NGO/478

LE PRESIDENT DE LA YOUGOSLAVIE ET LE VICE-MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES DU TIMOR ORIENTAL APPORTENT LEUR TEMOIGNAGE DE PAYS SORTI DE LA GUERRE

11/09/02
Communiqué de presse
NGO/478


55e Conférence annuelle DPI/ONG

5e et 6e séances – matin & après-midi                    PI/1441

Communiqué final


LE PRESIDENT DE LA YOUGOSLAVIE ET LE VICE-MINISTRE DES AFFAIRES ETRANGERES DU TIMOR ORIENTAL APPORTENT LEUR TEMOIGNAGE DE PAYS SORTI DE LA GUERRE


La cinquante-cinquième édition de la Conférence DPI/ONG clôt ses 3 journées de réflexion sur la reconstruction des sociétés après les conflits


La cinquante-cinquième Conférence DPI/ONG, consacrée cette année à la reconstruction des sociétés après un conflit, a conclu cet après-midi ses travaux en entendant une allocution de M. Vojislav Kostunica, Président de la République fédérale de Yougoslavie, et de M. José-Luis Guterres, Vice-Ministre des affaires étrangères et de la coopération du Timor oriental, qui ont ainsi apporté un témoignage de première main sur le chemin à parcourir pour les pays sortant d’un conflit.  M. Kostunica a rendu hommage au secteur non gouvernemental dans son ensemble et tout particulièrement au rôle joué par les ONG yougoslaves dans leur action pour lutter contre la désintégration du pays et sur la voie de la reconstruction économique et la promotion d’un état de droit.  Il s’est dit convaincu que les démocraties ne se lancent pas dans des guerres.  C’est pourquoi, il a souligné l’importance de voir le secteur non gouvernemental se concentrer sur le renforcement de la démocratie, la mise en oeuvre de la règle de droit et la bonne gouvernance.  Les ONG,.a-t-il précisé, présentent l’avantage d’être autonomes et de pouvoir réagir vite. 


Pour M. Guterres, dont le pays deviendra le 191è Etat Membre des Nations Unies, l’ère nouvelle qui s’ouvre sera placée sous le signe des droits de l’homme, de la stabilité, de la bonne gouvernance et du développement, ainsi que de l’intégration régionale et internationale. 


Dans ses remarques de clôture, M. Shashi Tharoor, Secrétaire général adjoint à la communication et à l’information, a indiqué que cette journée du souvenir nous pousse tous à nous demander ce qu’il faut faire pour mettre fin à la violence et aux conflits et a invité, à ce titre, les participants à observer une minute de silence à la mémoire de ceux qui ont perdu la vie le 11 septembre.


Avant ces allocutions, la dernière des cinq tables rondes, organisées durant ces trois jours de réflexion, a porté sur le démantèlement des machines de guerre en vue de construire une paix durable.  Sous la houlette d’Ali Jalali, chef du service Pashto de Voice of America, qui a souligné d’emblée le rôle clef de la communauté internationale et des médias dans la création d’un environnement propice au désarmement volontaire, les panélistes ont passé en revue les conditions de la réussite de tout processus de désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR).  Après avoir fait remarquer qu’en 2001, le monde avait consacré 839 milliards de dollars aux dépenses


d’armements, M. Jayantha Dhanapala, Secrétaire général adjoint aux affaires de désarmement de l’ONU, a ainsi expliqué que l’un des principaux défis posés à son Département est de démontrer que le désarmement est rentable et peut constituer une source d’importants revenus.  De son côté, M. Jean-Marie Guéhenno, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, a exposé les enseignements clefs tirés par son Département ces dernières années en matière de DDR, comme par exemple la bonne volonté des anciennes parties au conflit, l’intégration des différentes étapes du processus, la planification précoce, la complémentarité des efforts entrepris, la fiabilité du financement, et la reconnaissance que pour réussir il faut impérativement établir des partenariats.  Directrice exécutive de l’Appel de La Haye pour la paix, Mme Cora Weiss, a, quant à elle, fait remarquer qu’il est difficile aujourd’hui de parler du démantèlement de la machine de guerre, alors qu’en ce moment même les tambours de la guerre battent plus fort que jamais.  Elle a insisté sur le rôle joué par les femmes dans tout processus de paix ainsi que sur l’importance de l’éducation à la paix.  La table ronde a aussi donné l’occasion à M. Vandy Kanyako de la Sierra Leone d’apporter son témoignage d’ancien enfant-soldat.


Dans la matinée, la Conférence avait tenu une table ronde intitulée “Envers et contre tout : le processus de réconciliation”, au cours de laquelle les deux codirecteurs de l’Association des enfants du Moyen-Orient, une ONG israélo-palestinienne, avaient exposé leur expérience et leurs difficultés à promouvoir l’éducation équilibrée et sans préjugés des enfants des deux parties.  Mme Carole Rittner, Professeur au Sotckton College qui animait la table ronde, avait, quant à elle, ouvert le dialogue en soulignant combien la paix est difficile, parfois tout aussi difficile que la guerre, les victimes étant particulièrement vulnérables à cause des nombreuses contradictions auxquelles elles doivent alors faire face. 


A la vérité la réconciliation est bien plus que la coexistence de groupes auparavant hostiles, c’est aussi et surtout apprendre à s’accepter et à se faire confiance mutuellement, ainsi qu’accepter le passé.  Un constat illustré par un jeune Macédonien, de la Fondation des Ambassadeurs de l’amitié, qui a expliqué que dans bien des cas la réconciliation passe par la nécessité de comprendre les langues et les cultures concernées, donc par une approche anthropologique.  Abondant aussi dans ce sens, un membre du Groupe de réflexion angolais pour la paix a rappelé que la paix ce n’est pas seulement faire taire les armes, c’est aussi assurer la vie ensemble en parfaite harmonie.  Il ne s’agit donc pas seulement de financer le déminage, mais d’aborder la question du déminage social et de toutes ces mines psychologiques qui restent un frein à la réconciliation.  Cet échange avait aussi permis à un représentant des Volontaires des Nations Unies de présenter la philosophie et le travail sur le terrain de ce programme.


En guise de paroles de conclusion, la Présidente de cette 55e Conférence DPI/ONG, Mme Sherill Kazan Toledo, a rappelé que même si les objectifs fixés pour cet événement ont été atteints, le travail ne s’arrêtait pas là et qu’il fallait désormais continuer de renforcer et de concrétiser le concept de responsabilité partagée au service de la paix.


ENVERS ET CONTRE TOUT : LE PROCESSUS DE RECONCILIATION


Présentant le thème, la modératrice de cette table ronde, Mme CAROLE RITTNER, Professeur au Stockton College, Etats-Unis, a fait remarquer que si la guerre est quelque chose de difficile à vivre, la paix après un conflit est particulièrement difficile à vivre également pour ceux qui ont été blessés, perdu un membre de leur famille, ou qui considèrent que le conflit leur a fait gaspiller plusieurs années.  Oui, a-t-elle insisté, la paix est difficile pour beaucoup d’autres raisons, parce que les gens qui sortent d’un conflit sont vulnérables du fait qu’ils se trouvent en face de contradictions.  La réconciliation, c’est plus que la coexistence de groupes auparavant hostiles, c’est apprendre à s’accepter et à se faire confiance mutuellement, mais aussi accepter le passé.  Elle a évoqué le récit d’une survivante du génocide rwandais.  Ceux qui ont tué ma famille, a dit cette rescapée, n’étaient pas des étrangers, c’était mes voisins, ceux avec qui je suis allée à l’école.  Cette réfugiée a expliqué que le plus dur c’était de perdre confiance en l’être humain.  Mme Rittner a également évoqué le problème des troubles post-traumatiques des victimes de conflits et de violences et la nécessité d’y apporter des réponses concrètes, afin de mettre un terme à l’anxiété, la douleur, la colère ou encore au désir de revanche. 


Premier participant à intervenir ce matin, M. GHASSAN ABDULLAH, Codirecteur de l’Association des enfants du Moyen-Orient, a en premier lieu, en cette journée de souvenir, condamné toutes les formes de terrorisme.  Il a demandé au Gouvernement et au peuple américains de continuer à faire avancer leurs idéaux de tolérance, de justice et de paix et de poursuivre leur recherche de la liberté et de la démocratie.  Il a ensuite indiqué que la présente conférence lui avait permis de rencontrer plusieurs partenaires israéliens et palestiniens qui s’efforcent, comme lui, de réduire les souffrances quotidiennes des enfants du Moyen-Orient, ce qu’il n’a malheureusement pas la liberté de faire dans son pays.  En dépit de la détérioration de la situation au Moyen-Orient et toutes les formes d’humiliation subies chaque jour, son association et ses enseignants, venus aussi bien d’Israël que de Palestine, n’ont pas baissé les bras et continuent d’essayer de fournir une éducation aux enfants et de lutter contre les stéréotypes respectifs.  Le problème est que les hommes politiques ne s’intéressent pas assez au rôle positif que peut jouer l’éducation.  Pire encore, ils ont de chaque côté fait en sorte que les manuels scolaires continuent de transmettre des images négatives de l’autre. 


Créée en 1996, l’Association des enfants du Moyen-Orient vise à promouvoir la compréhension mutuelle, à faire comprendre que si nous sommes tous différents, nous sommes aussi tous égaux, a précisé M. Abdullah.  Les enseignements dispensés par l’Association se concentrent autour de 4 axes principaux : l’éducation en matière de droits de l’homme, l’éducation sur le règlement des conflits, l’éducation sur les affaires internationales et l’éducation en matière de respect de l’environnement.  L’un des défis est de lutter contre l’idéologie de conflit qui règne entre les deux pays et ne fait qu’alimenter l’hostilité et renforcer le cercle vicieux de la violence.  Concrètement, l’Association plaide en faveur d’une révision des manuels scolaires, présentant une vision plus tolérante et nettoyée de tous préjugés.  Les obstacles à la liberté de mouvement sont l’un des principaux problèmes auxquels l’Association doit faire face.  Pour réaliser ces tâches, elle reçoit un appui financier d’une série de donateurs internationaux différents, comme l’Union européenne, l’UNESCO, les Etats-Unis ou différentes fondations.  En conclusion, M. Abdullah a formé le voeu que les dirigeants israéliens et palestiniens ne gaspilleront pas davantage de temps et parviendront bientôt à la paix.


Sa collègue israélienne, Mme ADINA SHAPIRO, codirectrice de l’Association des enfants du Moyen-Orient, a pour sa part centré son intervention sur l’expérience acquise par l’association au fil des ans en matière d’éducation, l’éducation étant l’objectif exclusif de l’organisation.  Il ne s’agit pas de procéder à l’endoctrinement des enfants, mais de sensibiliser les générations futures à toutes les questions, de la complexité du monde aux dilemmes moraux.  Un processus de réconciliation n’est possible que si les jeunes disposent des outils leur permettant d’équilibrer les valeurs différentes et de comprendre comment elles peuvent entrer en conflit.  Une telle approche est importante dans tout processus de réconciliation car elle permet, à défaut d’une sécurité physique, d’instaurer au moins une plus grande sécurité psychologique et de rompre avec le sentiment d’isolement qui résulte traditionnellement des politiques de démonisation.  Elle conduit ensuite à nourrir l’espoir ou à le raviver, condition essentielle à toute reconstruction véritable.  Enseigner la complexité des choses permet aussi d’apprécier à sa juste valeur tout progrès, tout pas en avant dans le processus de paix et de bien comprendre que la paix ne résultera pas de la simple signature d’un accord et d’une poignée de mains.  Enfin, cette approche permet aussi de répondre aux besoins des différents segments qui constituent une société, elle permet de semer les graines d’un consensus social véritable.


L’expérience au Moyen-Orient a permis de comprendre que l’éducation, et notamment l’éducation à la paix, est un élément pivot de toute paix durable.  C’est pourquoi, toute négociation de paix future exigera plusieurs facteurs : l’engagement ferme des gouvernements à créer un groupe consacré à l’éducation; qu’ils favorisent la formation des enseignants; qu’ils exigent qu’un programme scolaire au moins présente le véritable visage humain de “l’ancien ennemi”; qu’ils procèdent à l’examen régulier des manuels scolaires; et qu’ils garantissent que chaque enfant puisse se rendre en toute sécurité à l’école.  


M. BERTRAN SELIN, Conseiller des jeunes, Fondation Friendship Ambassadors, a évoqué le droit à la vie reconnu par les Nations Unies en regrettant que de nombreux conflits remettent en cause ce droit.  Il  a fait par de son expérience de jeune macédonien pour évoquer la situation de ces jeunes qui vivent dans des zones post-conflictuelles où problèmes et tensions interethniques persistent.  Il s’agit, a-t-il dit, de s’occuper de familles qui ont été témoins de massacres ou victimes de tortures.  On ne peut les aider à oublier le passé, mais à le comprendre.  Le problème est que ces victimes maintiennent une identité dans une culture qui suscite la haine.  Face à la diversité, ils se sentent menacés.  Cette crainte mène à la haine qui, elle, mène à la guerre.  Il a dénoncé les programmes scolaires dépassés dans les écoles du Kosovo et de Macédoine qui sont toujours axés autour d’un

patriotisme exacerbé.  On apprend aux enfants à être dociles plutôt que critiques, a-t-il regretté, et les châtiments toujours en vigueur à l’école laissent penser aux enfants que la victoire s’obtient toujours pas le recours à la violence physique. 


M. Selin a également déclaré qu’une fois que la crainte et les préjugés sont éliminés, la réconciliation est possible.  Il faut trouver un terrain d’entente entre les gens, quelque chose de commun et enseigner le compromis en rappelant qu’après un conflit les gens traumatisés perdent le contact avec la réalité.  C’est pourquoi, il faut favoriser des programmes qui redonnent un sens de contrôle de soi aux individus.  Dans bien des cas, a-t-il ajouté, la réconciliation ne réussit que si la population locale est associée à ces efforts.  Cela passe par la compréhension des langues et des cultures concernées, donc par une approche anthropologique.  C’est du fait de l’absence de cette approche anthropologique, a-t-il regretté, que les programmes des Nations Unies ont souvent échoué en matière de réconciliation.  Il a également réitéré que le meilleur moyen de pratiquer la réconciliation est de réformer le système d’éducation, en insistant sur l’égalité entre les gens et en faisant fi des préjudices et des stéréotypes.  Il a également souligné l’importance des échanges culturels, par le bais desquels nous avons appris à nous apprécier les uns les autres dans les Balkans.  Grâce à la culture et au soutien des médias nous avons pu dépasser les stéréotypes.  Les enseignants devraient être formés à favoriser un climat de réconciliation, car l’éducation est ce qui reste lorsque l’on a tout perdu.  Il est temps de changer, a-t-il conclu, parce que c’est maintenant que nous avons ce choix. 


M. PROSPER BANI, spécialiste des programmes au Programme des Volontaires des Nations Unies, a engagé à réfléchir sur les motivations poussant les Volontaires des Nations Unies et toutes les personnes engagées en faveur de la paix à abandonner leur vie et leur salaire confortable, ainsi que leur famille, pour se retrouver bénévoles dans des régions du monde ravagées par des conflits, des régions à hauts risques.  Créé en 1971, le Programme des Volontaires des Nations Unies regroupe actuellement plus de 5 000 bénévoles dispersés de part le monde.  Son principe de départ est que le bénévolat contribue véritablement, que ce soit économiquement ou socialement, à la paix dans le monde.  Toutes les activités menées par le Programme suivent impérativement les principes fondamentaux de la liberté de choix, de l’engagement et de la solidarité.  Il met l’accent sur le règlement des conflits et les mesures de rétablissement et de restauration de la confiance qui peuvent être prises.  Concrètement et toujours de la manière la plus souple et la plus discrète possible, les Volontaires mettent en place des activités de formation, appuient la vie communautaire, promeuvent la réconciliation et le dialogue, et favorisent le développement de la société civile.  L’un des atouts du Programme est que les Volontaires ne sont pas freinés par les contraintes qui caractérisent le mandat des Nations Unies, ils ont plus de latitude et de souplesse, à l’image d’une ONG traditionnelle.  Les Volontaires fonctionnent en partenariat et en coopération constante avec les sociétés civiles des régions en conflit, ainsi qu’en collaboration étroite avec les ONG.


Parmi les éléments clefs de l’approche suivie par le Programme, on peut noter le fait qu’il s’efforce toujours d’amener les parties précédemment en conflit à présenter chacune des bénévoles pouvant être associés aux activités.  En outre, ses ressources financières relativement limitées font souvent que le Programme a tendance à être considéré comme “inoffensif” ce qui facilite souvent ses relations avec les autorités locales.  Outre les mesures de confiance, le Programme reconnaît le rôle incomparable de la jeunesse dans la réconciliation; une jeunesse qui constitue aussi bien souvent le groupe le plus vulnérable et le plus fertile aux points de vue extrémistes en tout genre.  Pour éviter de retomber dans les travers passés, s’attacher plus particulièrement aux jeunes est donc fondamental.  En fait, le Programme des Volontaires peut jouer un véritable rôle de catalyseur des acquis de la paix.


M. DANIEL NTONI-NZINGA, représentant des affaires internationales quaker du Groupe de réflexion angolais pour la paix, a évoqué la spécificité du continent africain où deux extrêmes se côtoient, l’Afrique du Sud qui a été un exemple en matière de réconciliation et l’Angola où tout reste à faire.  A cet égard, il s’est demandé comment l’Angola peut devenir une société unie et pratiquer la réconciliation.  Il s’est félicité de la signature d’un protocole d’accord le 4 avril dernier entre le gouvernement et les forces de l’UNITA qui a mis fin à la lutte armée.  85000 femmes et hommes armés de l’UNITA qui étaient dispersés dans tout le pays ne constituent plus aujourd’hui de menace pour la stabilité du pays.  Mais la paix ce n’est pas seulement faire taire les armes, c’est aussi assurer la vie ensemble en parfaite harmonie et il faut que tous les Angolais soient associés à cet effort.  Depuis le 4 avril, nous construisons la paix ensemble en essayant d’élaborer une compréhension commune de la nature du problème auquel nous sommes confrontés. 


Pour comprendre ce à quoi nous faisons face aujourd’hui, il faut préciser qu’il y a eu des tentatives de réconciliation en 1991 et 1994.  Il a regretté que dans le cadre de cette nouvelle tentative de paix, on parle surtout d’attribuer des postes ministériels, diplomatiques et administratifs aux dirigeants de l’UNITA.  Mais partager le gâteau, a-t-il fait remarquer, n’est pas de la réconciliation.  Cela devrait être la deuxième étape du processus de réconciliation.  Pour nous, la réconciliation c’est d’abord s’entendre sur qui nous voulons être et comment nous allons vivre ensemble.  Si vous examinez la réconciliation en Afrique du Sud, elle s’est faite trois ans, quatre ans avant la mise en place de la Commission réconciliation et vérité, grâce à des mesures et dispositions englobant tous les acteurs de la société sud-africaine.  La réconciliation doit être la réunion de tous les membres d’une nation pour déterminer le type de nation dans laquelle ils veulent vivre ensemble.  Il faut faire preuve de courage, car il faut parler de ce qui s’est passé, pour avoir de vrais rapports, pour un rétablissement des liens entre ceux qui veulent vivre ensemble.  Reporter la crise n’est pas une solution.  Il a évoqué la situation du Zimbabwe où le problème de la réconciliation autour de la terre n’a jamais été franchement abordé, ce qui a conduit à la crise actuelle.  En Angola, il faut aborder les questions de fonds.  Il ne s’agit pas seulement de financer le déminage, mais aborder la question du déminage social et de toutes ces mines psychologiques, notamment les conséquences des traumatismes, qui restent un frein à la réconciliation. 


Dialogue


      Interrogé sur la meilleure manière d’approcher les enfants avec sensibilité dans les zones où règnent la paix pour leur exposer la situation des enfants victimes de conflits, M. ABDULLAH, de l’Association des enfants du Moyen-Orient, a fait remarquer que ce qui importe le plus est la manière dont le travail que vous effectuez est reçu par les enfants.  Il est fondamental de ne rien imposer aux enfants mais de les laisser s’emparer, s’approprier des projets.  Sa collègue, Mme SHAPIRO, a ajouté qu’il est très difficile de prendre pleinement conscience de la situation des régions plus privilégiées, étant donné l’omniprésence du conflit.  Un constat auquel

M. BANI du Programme des Volontaires des Nations Unies a fait écho.  Son expérience sur le terrain lui a montré en effet qu’il est très difficile de faire prendre conscience aux enfants de l’existence d’une autre réalité que celle dans laquelle ils vivent.  Pour y parvenir, il faut en fait leur faire comprendre les choses à leur propre niveau. 


A un représentant d’une ONG qui l’interrogeait sur les perspectives actuelles de réconciliation entre noirs et blancs au Zimbabwe, M. NTONI-NZINGA du Groupe de réflexion angolais pour la paix a répondu qu’il faut faire davantage d’efforts pour persuader le Gouvernement du Zimbabwe d’adopter une attitude différente.  La seule manière de résoudre le problème passe par le dialogue et il faudra bien que tôt ou tard le Gouvernement discute de la question avec les intéressés.  Il faut aussi que la communauté internationale suive une autre approche, car une attitude hostile n’a rien de bon et ne fait qu’amplifier les tensions.


Répondant à une question sur les motivations de dirigeants qui pourraient utiliser les traumatismes pour justifier la violence, M. ABDULLAH s’est dit surpris que l’on puisse justifier la violence sur la base des traumatismes subis.  Evoquant le cas des Palestiniens et Israéliens, il a souligné que son association, à partir des traumatismes, enseigne qu’il y a d’autres manières de lutter et de sensibiliser à la nécessité d’une plus grande coopération et compréhension à l’égard des autres.  Mme SHAPIRO, quant à elle, a expliqué que l’une des choses qui définit le traumatisme est le manque d’un cadre.  Le traumatisme doit être l’occasion d’essayer d réapprendre les valeurs et il est tout aussi important de savoir ce que nous pouvons tirer des traumatismes des autres


Répondant à une question sur la promotion des réparations comme moyen de décourager la violence, M. NTONI-NZINGA a déclaré qu’on ne peut parler de réconciliation sans aborder la question de la réparation.  Cela a trop souvent été négligé, ce qui est regrettable, car la réparation peut aider les victimes à accepter le passé.


Répondant à une question sur l’opportunité d’interdire des écoles qui enseignent la haine et la discrimination religieuse, Mme SHAPIRO a déclaré qu’interdire une école quelle qu’elle soit est un précédent dangereux.  L’un des grands facteurs est que les écoles comprennent leur intérêt à promouvoir la diversité et une vision multiple de la société et c’est la tâche des gouvernements de s’assurer que des factions extrêmes n’utilisent pas les écoles pour satisfaire leurs objectifs.  De son côté, M. ABDULLAH a déclaré qu’il faut prendre en compte que la situation politique du moment amène certains gouvernements à prendre des mesures pour ou contre la paix.  Pour l’Autorité palestinienne, a-t-il précisé, il est difficile de parler de la paix dans ses manuels scolaires alors que l’on fait face au développement de colonies de peuplement.  Le travail le plus efficace est celui qui se fait en temps difficile et nous avons des variantes à l’éducation officielle qui est l’éducation informelle.  La presse et les médias, à cet égard, peuvent jouer un rôle important.  Malheureusement, trop souvent, ce n’est pas le cas. 


M. ALI JALALI, Chef du Service Pashto, Voice of America, a déclaré qu’au moment où nous nous réunissons en ce jour anniversaire des attentats du 11 septembre, cela nous rappelle que les conflits peuvent se répandre comme un feu de brousse, bien au-delà des régions où ils sont nés.  C’est pourquoi, tous les efforts visant à aboutir à la paix et au démantèlement des machines de guerre constituent pour nous une responsabilité partagée. Il ne faut pas se limiter à un démantèlement, il faut créer une capacité nationale de transformation des structures militaires pour arriver à un climat et des structures favorisant la paix.  Pour ce faire, la démobilisation est une étape décisive et elle doit être mise en place en fonction de critères économiques et sociaux, du niveau d’implication des combattants et de l’importance de la participation étrangère à ce conflit.  Le désarmement ne peut se produire que par le biais d’une action volontaire.  Il faut donc créer un environnement politique favorable pour faciliter la réalisation d’un désarmement volontaire.  Et pour ce faire la communauté internationale et les médias jouent un rôle clef. 


M. JAYANTHA DHANAPALA, Secrétaire général adjoint aux affaires de désarmement des Nations Unies, a relevé que le monde a consacré 839 milliards de dollars en 2001 pour les dépenses d’armements, alors que des milliers d’armes nucléaires sont toujours en fonction et que plus de 639 millions d’armes sont utilisées dans les 24 conflits en cours.  Pour favoriser le démantèlement, il s’agit de faire en sorte que les ressources technologiques, économiques et humaines ne soient plus utilisées à des fins de conflits mais pour des choses plus constructives.  Il a défini le terme de “machine de guerre” par tout ce qui englobe le complexe militaro-industriel, un ensemble d’intérêts économiques et bureaucratiques pour la rationalisation et la maîtrise de la production d’armes.  Pour satisfaire ces intérêts, il faut non seulement que la production d’armes ait lieu, mais aussi que ces armes soient utilisées. 


Il a également cité l’expérience de pays qui ont mis un terme à un conflit et qui ont ensuite exporté leurs armes dans des régions voisines, alimentant ainsi d’autres conflits.  De nombreuses ONG sont actives dans ce domaine du désarmement, a-t-il souligné, mais il en faudrait plus.  Il faut permettre aux Etats d’avoir d’autres possibilités que celle de la production d’armes tout en préservant leur droit à la légitime défense.  Notre action consiste à démontrer que le désarmement est rentable et nous encourageons une adhésion universelle aux conventions pour l’élimination des armes de destruction massive.  L’élimination de ces armes serait source d’importantes ressources.  A titre d’illustration, il a indiqué que les États-Unis ont dépensé à eux seuls plus de 5,6 trillions de dollars pour les armes nucléaires au cours des 50 dernières années.  Imaginer, a-t-il ajouté, ce que l’on aurait pu faire avec cet argent en matière de santé publique, de développement ou de promotion des énergies renouvelables.  Il a évoqué, tout particulièrement, le problème des mines terrestres qui sont un frein au développement dans les régions où elles sont enfouies.  A cet égard, il a déclaré que nous comptons sur la coopération de tous les pays que nous encourageons à ratifier la convention sur l’interdiction des mines.  Donnant des exemples d’encouragement au désarmement, il a cité le cas de l’Albanie, où les communautés locales ont été invitées à livrer leurs armes en échange d’une aide au développement.


M. JEAN-MARIE GUEHENNO, Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, a tout d’abord fait remarquer qu’il n’y a pas un seul jour où, en sa qualité de responsable du maintien de la paix à l’ONU, il ne constate que, pour réussir la paix, il faut établir des partenariats solides, les défis étant trop complexes.  C’est pourquoi, les ONG jouent un rôle si crucial, notamment en matière de désarmement, démobilisation et de réintégration (DDR).  Certes, il s’agit d’une activité en premier lieu militaire, mais fondamentalement, ce travail demeure apolitique et humanitaire.  Il faut aussi envisager certains aspects politiques, comme surtout la volonté des parties à participer de bonne foi à une telle entreprise. 


L’expérience acquise par le Département des opérations de maintien de la paix (DOMP), ces dernières années, a permis de tirer certains enseignements clefs, a poursuivi M. Guéhenno.  En premier lieu, la bonne volonté des anciennes parties au conflit.  Celles-ci doivent avoir pleinement confiance dans le processus de paix.  Les informations fournies par ces parties concernant leurs combattants sont par exemple tout à fait capitales pour la réussite des activités de DDR.  Deuxièmement, le DDR est un processus continu, une succession de phases qui doivent s’enchaîner les unes aux autres en assurant la participation des acteurs locaux et l’engagement de la communauté internationale.  Tous doivent bien comprendre que pour les combattants, il n’y a aucune logique à déposer les armes s’il n’y a pas d’avenir en perspective, s’ils n’ont aucun autre moyen de subsistance.  Le troisième élément clef est la planification précoce.  Le processus de DDR doit notamment être clairement intégré aux accords de paix signés.  Les responsabilités entre les parties et la communauté internationale doivent y être bien définies très tôt et le rôle de chacun, y compris les ONG, doit être complémentaire. 


Tous les efforts fournis doivent être complémentaires et intégrés et être encadrés par une structure de gestion solide, a également insisté

M. Guéhenno.  La question du financement est capitale, car les activités de DDR coûtent de l’argent, mais ne se limitent pas à l’assistance financière aux ex-combattants et à leur famille.  Il faut aussi mettre sur pied des projets de réinsertion et de réintégration à plus long terme.  En conclusion, le Secrétaire général adjoint a souligné qu’aucune organisation ne peut prétendre mener avec succès un processus de DDR si elle est seule.  L’une des premières priorités du DDR doit donc consister à bien définir la division du travail entre tous les partenaires.  Les acteurs sur le terrain ne doivent à aucun moment entrer en concurrence, notamment pour les ressources financières.  Le DOMP, de son côté, s’efforce de réaliser le plus tôt possible l’intégration efficace de tous ces partenaires. 


M. VANDY KANYAKO, ancien enfant soldat de la Sierra Leone, a précisé qu’il a travaillé de nombreuses années auprès des enfants soldat de Sierra Leone et s’est battu dès le début pour permettre la participation des enfants au processus de paix.  Il a regretté qu’avant le conflit, la question de la jeunesse et de la prévention des conflits ait été en marge des débats politiques et qu’il ait fallu attendre de voir des jeunes armés de machettes pour que la Sierra Leone profite de l’expérience acquise par la communauté internationale au Rwanda.


Il asouligné la nécessité de lutter contre les conséquences des traumatismes subis par ces jeunes qui ont été recrutés et armés.  L’expérience nous montre que la signature d’accords de paix ne signifie pas forcément la fin du conflit.  Il a également précisé que plus de la moitié des habitants de la Sierra Leone a moins de quinze ce qui en fait l’un des pays les plus jeunes de la planète.  Ce qui fait que la majorité de la population ne peut prendre part aux votes ou aux décisions.  Avec la guerre civile de 1991, nous avons découvert la notion d’enfant soldat et on a vu des enfants de huit ans armés de kalachnikov.  Ce sont des enfants qui n’appartenaient pas à la classe éduquée ou moyenne.  Il s’agissait essentiellement d’enfants pauvres qui avaient le sentiment qu’ils n’avaient rien à perdre en se lançant dans la guerre.  Lorsqu’il s’est agi du démantèlement de la machine de guerre, ce qui a commencé avec les accords de paix de Lomé de 1999 entre le gouvernement et les rebelles, on a insisté sur la façon de traiter les enfants après la guerre.  C’était une initiative exceptionnelle pour la communauté internationale puisque pour la première fois on a pris en compte tout particulièrement le cas des enfants soldat et leurs besoins.  A cet égard, il a précisé que le besoin de l’éducation est primordial pour les enfants.  C’est pourquoi il a souligné la nécessité de mettre en place, un enseignement fonctionnel adapté aux besoins de la société.  Il a reconnu que l’attitude de la société à l’égard des enfants soldat est très négative et on peut le comprendre.  C’est pourquoi, le travail des ONG pour la réintégration de ces enfants est essentiel compte tenu du manque de ressources du gouvernement.  La leçon, a-t-il conclu, c’est que l’Afrique a besoin de recevoir moins d’armes, pour s’assurer qu’elles ne tombent en de mauvaises mains. 


Mme CORA WEISS, Directrice exécutive de l’Appel de La Haye pour la paix, a estimé qu’il est difficile aujourd’hui de parler du démantèlement de la machine de guerre, alors qu’en ce moment même les tambours de la guerre battent plus fort que jamais.  Une attaque militaire dite préventive n’est pas une forme de prévention, a-t-elle prévenu.  L’objectif de fournir de l’eau potable à tous, fixé à Johannesburg, exige des fonds, ces fonds se trouvent plus qu’en suffisance dans les budgets militaires.  La meilleure façon de parvenir à une paix durable est d’éviter la guerre.  Pour ce faire, il faut en premier lieu comprendre que sans femmes, il n’y a pas de paix.  Il faut ensuite mettre fin à l’impunité pour les crimes de guerre, notamment ceux commis contre les femmes et les enfants.  Il faut aussi prendre en considération les besoins des groupes les plus vulnérables.  Le DOMP a besoin plus que tout autre département d’une unité spéciale consacrée à l’égalité entre les sexes, car l’on sait bien que les femmes sont la clef de la réussite de la plupart des accords de paix. 


Pour que la paix soit durable, il faut aussi éduquer pour et à la paix.  “La paix, cela s’apprend”, s’est exclamée Mme Weiss, ajoutant que la culture de la paix se transmet par toutes sortes d’enseignements multidisciplinaires.  L’Appel de La Haye, à la demande du Département des affaires de désarmement, vient à cet effet de lancer une expérience unique au Pérou, au Niger, en Albanie et au Cambodge, organisant des programmes d’éducation à la paix participatifs.  Si ces programmes réussissent, ils pourront être reproduits partout dans le monde, car le monde ne peut se permettre de perdre la course entre l’éducation et le cataclysme.


Répondant à une question sur la place du thème du désarmement dans les grandes conférences internationales, M. DHANAPAL a répondu que de nombreux gouvernements ont essayé de mettre cette question à l’ordre du jour des conférences de Monterrey et de Johannesburg, mais se sont heurtés à l’opposition d’autres pays.  A cet égard, il faut persévérer et relancer le thème des liens très importants entre le développement et le désarmement. 


Répondant à une question sur le processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) en Afghanistan, M GUEHENNO, a expliqué que la réussite de ce processus dépend beaucoup du contexte politique.  Si la population considère qu’il y a un gouvernement national qui assure la sécurité nationale avec une police et une armée nationale digne de ce nom, la culture du fusil perdra en pertinence.  Les programmes DDR ne peuvent se réaliser dans le vide.  Les factions désarmeront si elles se rendent compte que cela ne va pas à l’encontre de leurs intérêts et de leur sécurité. 


Répondant à une question sur la définition du terme d’éducation fonctionnelle, M KANYAKO a expliqué que ce qu’il entendait par-là était une éducation reflétant les besoins de la société au moment donné regrettant que des disciplines sont restées inchangées depuis l’époque coloniale. 


Séance de clôture


M. JOSE LUIS GUTERRES, Vice-Ministre des affaires étrangères et de la coopération du Timor oriental, a déclaré qu’une nouvelle ère s’ouvre désormais pour son pays, désormais appelé Timor-Leste.  Une ère placée tout d’abord sous le signe des droits de l’homme.  A cet égard, les Indonésiens, les Timorais et l’ensemble de la communauté internationale doivent redoubler d’efforts pour faire triompher la justice.  Et c’est pourquoi, la décision récente du Tribunal spécial sur les droits de l’homme en Indonésie d’acquitter plusieurs responsables de violations au Timor-Leste n’est pas la bienvenue.  De son côté, le nouvel Etat a intégré à sa Constitution, la Déclaration universelle des droits de l’homme ainsi que les dispositions contenues dans plusieurs conventions internationales, comme celle sur l’égalité des droits des femmes et celle en faveur des enfants.  Trois mois, à peine, après son accession à l’indépendance, le Timor-Leste a de plus déposé les instruments de ratification du Statut de Rome portant création de la Cour pénale internationale, a ajouté le Vice-Ministre. 


Cette nouvelle ère sera placée également sous le signe de la stabilité, de la bonne gouvernance et du développement, a poursuivi M. Guterres.  Les efforts se concentrent désormais sur la construction des capacités nationales, le maintien de la sécurité et le développement, puisque ce pays est l’un des dix plus pauvres du monde et que le taux d’analphabétisme y est l’un des plus élevés.  Pour parvenir au développement, le Gouvernement a décidé d'accorder la priorité à l’éducation et à l’agriculture.  Les autorités envisagent également la possibilité d’introduire une nouvelle politique en faveur des investissements.  Elles examinent aussi les moyens de procéder à la réinsertion des anciens combattants de la liberté et de leur donner la possibilité de participer à cette grande mission qu’est la construction d’une nation.  Le Vice-Ministre s’est aussi dit pleinement conscient que la stabilité de son pays dépend en large partie de son degré d’intégration régionale et il a indiqué qu’en juin dernier, le Timor-Leste était devenu Observateur du Groupe Asie/Pacifique et le mois dernier, membre de la communauté lusophone.  en conclusion, il a déclaré que son pays partage la vision et les idéaux des Nations Unies, dont il rejoindra la famille dans les prochains jours, et aspire aussi à faire de notre monde, un monde meilleur maintenant et pour les générations futures.


M. VOJISLAV KOSTUNICA, Président de la République fédérale de Yougoslavie, a rendu hommage au secteur non gouvernemental dans son ensemble et tout particulièrement au rôle joué par les ONG yougoslaves dans la lutte contre la désintégration du pays et pour favoriser la reconstruction économique et la promotion d’un état de droit.  Il a rappelé que la guerre civile qui a frappé l’ex-République fédérale socialiste de Yougoslavie a été le conflit le plus grave depuis la fin de la deuxième guerre mondiale.  Les territoires et les marchés de l’ex-Yougoslavie ont été si fragmentés que l’intégration des successeurs au sein des organisations européennes et euro-atlantiques sera retardée durant de longues années.  Heureusement, malgré ces conflits aucun des Etats balkaniques n’est aujourd’hui ethniquement pur, et ceci est particulièrement vrai dans la République fédérale de Yougoslavie qui reste un état multiethnique, multiculturel et multiconfessionnel.  Il a regretté que certaines voix dans la région et à l’Ouest laissent entendre que le processus de désintégration de l’ex-République fédérale de Yougoslavie n’est pas encore à son terme et soutiennent que seul l’aboutissement à un État-Nation ethniquement pur est une solution.  Il a regretté que des ambitions nationalistes soient camouflées derrières des revendications morales légitimes comme les droits de l’homme et la liberté de religion ou encore la liberté  politique ou culturelle.  Le seul indicateur des agissements des protagonistes, a-t-il déclaré, est leur attitude à l’égard des minorités. 


Dans ce contexte, il a fait observer que toute tentative de modifier des frontières ou la composition ethnique de la population serait une invitation à renouveler cette tragédie.  Si les principes de base des accords de Dayton sur la Bosnie Herzégovine ont été appliqués avec succès, on ne peut pour autant appliquer ces recettes au Kosovo pour en faire un Etat-Nation avec tout ce que cela entraînerait comme risques de déstabilisation et de contagion dans la région, en particulier au Monténégro ou en Macédoine.  Il s’est dit convaincu que les démocraties ne se lancent pas dans des guerres.  C’est pourquoi, il a souligné l’importance de voir le secteur non gouvernemental se concentrer sur le renforcement de la démocratie, la mise en oeuvre de la règle de droit et la bonne gouvernance.  Les ONG.a t-il précisé, présentent l’avantage d’être autonomes et de pouvoir réagir vite. 


Par ailleurs, il a également précisé que la promotion des droits de l’homme dans les pays européens en développement est possible uniquement s’ils accèdent au Conseil de l’Europe.  Cette région, a-t-il ajouté, est trop petite pour vivre isolée de ses voisins. La seule perspective pour échapper au sous-développement c’est le développement du concept de l’Europe du Sud-Est intégrée aux institutions européennes.  Il faut combler le fossé qui sépare les parties développées et non développées de l’Europe. L’Europe ne sera pas unie si elle n’inclut pas l’Europe du Sud-Est.  Il s’est demandé si les ONG au Kosovo et au Metohija se soucient de la même façon des droits des citoyens serbes et albanais en précisant que les ONG ne devraient pas être les instruments de gouvernements, d’intérêts économiques ou de groupes politiques ou ethniques.  Il les a exhortées à s’affirmer comme des solides facteurs de promotion de la démocratie et des partenaires efficaces du dialogue social qui doit accompagner le processus de transition des pays qui sont passés par de graves crises.  Ce serait la meilleure façon d’appliquer la notion de responsabilité partagée pour la reconstruction des sociétés après un conflit. 


Formulant des commentaires de conclusion, M. SHASHI THAROOR, Secrétaire général adjoint à la communication et à l’information aux Nations Unies, a estimé que ces trois jours ont permis de mieux comprendre ce qui peuvent apporter l’éducation et la reconstruction pour la paix.  En bref, on a beaucoup appris, a-t-il affirmé.  Cet après-midi même, les participants ont pu entendre de première main l’expérience directe des hauts responsables de deux pays ayant connu les affres de la guerre et s’en étant sortis.  Il faut maintenant déterminer comment utiliser ces précieuses informations de manière concrète.  En conclusion, M. Tharoor a évoqué l’appel à l’action préparé par l’association mondiale des ONG intitulée “Nous les peuples”, ainsi que l’initiative du Centre européen des ONG relative à l’application de la recommandation 27 du Secrétaire général dans son rapport pour la prévention des conflits et qui met l’accent sur le rôle des ONG.  A cet égard, une grande conférence des ONG sera organisée ici même au Siège en 2004, a-t-il indiqué.


Prenant la parole en dernier lieu, la Présidente de cette 55e Conférence DPI/ONG, Mme SHERILL KAZAN ALVAREZ de TOLEDO, a déclaré que chaque journée de travail a permis d’aborder de manière critique tous les aspects de la reconstruction des sociétés après les conflits.  Les objectifs fixés ont été atteints, mais il est bien évident que trois jours de réflexion ne suffisent pas et qu’il faut poursuivre les efforts et redoubler notre dévouement en faveur de l’avenir des femmes et des enfants.  La responsabilité partagée est un concept bien réel qu’il faut continuer de renforcer et de concrétiser, a-t-elle indiqué en conclusion.


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