FACE AUX RÉPERCUSSIONS DE LA CRISE ARGENTINE SUR LES FEMMES, LES EXPERTS DU CEDAW RECOMMANDENT L’INTÉGRATION D’UNE DIMENSION SEXOSPÉCFIQUE AUX POLITIQUES D’URGENCE
Communiqué de presse FEM/1219 |
Comité pour l’élimination de la FEM/1219
discrimination à l’égard des femmes 16 août 2002
584ème séance – matin
FACE AUX RÉPERCUSSIONS DE LA CRISE ARGENTINE SUR LES FEMMES, LES EXPERTS DU CEDAW RECOMMANDENT L’INTÉGRATION D’UNE DIMENSION SEXOSPÉCFIQUE AUX POLITIQUES D’URGENCE
Etant donné la crise économique, financière, politique et sociale qui secoue l’Argentine depuis décembre 2001, les experts du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) qui examinaient ce matin les quatrième et cinquième rapports de l’Etat partie, ont analysé la situation de la femme argentine sous l’angle de la conjoncture actuelle et de ses répercussions sur la population féminine.
Aujourd’hui, 40% de la population argentine vit dans la pauvreté: 15 millions en dessous du seuil de pauvreté et 2 millions dans la misère totale. Selon les sources gouvernementales, la production et le commerce sont au point mort, la chaîne des paiements est rompue et rien ne semble pouvoir relancer l’économie. Dans ces conditions difficiles, les experts du CEDAW ont fait savoir que l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes est compromise.
Les femmes risquent en effet de supporter le plus lourd fardeau de la crise dans la mesure où elles sont victimes de manière disproportionnée de l’augmentation du chômage, de la suspension du versement des salaires, des pensions et des allocations, du manque d’aliments, de médicaments et de soins de santé.
A cet égard, Mme Maria Yolanda Ferrer Gomez, experte de Cuba, a fait remarquer que les dangers les plus lourds encourus par les femmes dans un tel contexte de crise sont ceux liés à la recrudescence de la violence et à l’augmentation de la prostitution. L’experte de la République de Corée, Mme Heisoo Shin, a quant à elle fait part de l’expérience que son pays a vécue pendant la crise financière en soulignant que les femmes ont subi des situations de discrimination particulièrement aiguës sur le marché du travail et dans le domaine de la santé.
Ainsi, dans un pays où des millions de femmes ne trouvent plus les moyens d’assurer leur survie, les experts ont interrogé Mme Gloria del Socorro Aban, Présidente du Comité national de la femme, sur la façon dont son Gouvernement entend résister à la crise et conférer aux plans d’urgence une dimension sexospécifique. Déplorant que certains programmes d’assistance aient disparu en raison de l’insuffisance des ressources nécessaires à la fourniture de services, Mme del Socorro Aban a fait savoir que le Gouvernement argentin a mis en place un programme d’aide alimentaire pour les chefs de foyers dont la moitié des bénéficiaires sont des femmes ainsi qu’un programme d’assistance sanitaire comportant une dimension sexospécifique.
Dans une situation d’urgence où il faut consolider la démocratie, les experts ont recommandé au Gouvernement argentin de rassembler le potentiel que représentent les organisations de femmes pour assurer la politique de reconstruction du pays. Ils ont également fortement insisté sur l’importance de remettre à l’ordre du jour du Parlement la ratification du Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, cette dernière ayant été ratifiée par l’Argentine en 1985.
Conformément à la procédure en vigueur, Mme Zelmira Regazzoli, experte de l’Argentine, n’a pas participé au débat de ce matin.
Le Comité reprendra ses travaux, lundi 19 août à partir de 10 heures, pour examiner les quatrième et cinquième rapports périodiques de la Grèce.
PRÉSENTATION DES QUATRIÈME ET CINQUIÈME RAPPORTS PÉRIODIQUES DE L’ARGENTINE
Rapports (CEDAW/C/ARG/4) et (CEDAW/C/ARG/5)
Ces deux rapports portent sur la période allant respectivement du 30 août 1996 à octobre 1999 et du 4 février 2000 au 27 décembre 2002 et décrivent les mesures prises pour donner suite à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et aux recommandations présentées par le Comité en 1997 lors de l’examen du troisième rapport périodique.
Le quatrième rapport indique que, pour assurer l’application des recommandations du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, le Gouvernement national, à travers le Conseil de la femme, en tant qu’organisme d’exécution, a mis en oeuvre le Plan fédéral de promotion de la femme de la Présidence de la nation. En 1999, a été mis en oeuvre le Plan fédéral de promotion de la femme. Par décret 17/99 a été approuvé le Contrat de prêt entre le Gouvernement national et la Banque interaméricaine de développement, visant à financer le Plan fédéral de promotion de la femme, pour un montant de 7,5 millions de dollars. Le Gouvernement national fournira l’autre moitié du budget de ce plan. Le Plan fédéral de promotion de la femme est un plan d’égalité structurelle car il fournira à toutes les juridictions les mêmes équipements, la même formation et la même assistance technique, afin de leur permettre de développer leur capacité de réalisation des plans, programmes et activités visant à assurer l’égalité. L’objectif principal du Plan fédéral de promotion de la femme est d’améliorer la formulation, le suivi et l’évaluation des politiques et programmes de l’Etat afin d’améliorer la situation des femmes en Argentine.
Le cinquième rapport fait état d’un ensemble de lois adoptées pour éviter que la femme ne soit victime de discrimination. En février 2000, l’Argentine a signé le Protocole facultatif à la Convention et en décembre 2000 le Protocole facultatif à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée. Il est indiqué que l’égalité entre les hommes et les femmes a nettement progressé à la fin de l’an 2000 au moment de la signature du décret qui étend l’application du quota de 30 % de femmes candidates à l’élection au Sénat. Aux élections nationales du 14 octobre 2001, le plancher de 30 % de participation au Congrès a été atteint et les femmes occupent 101 sièges dans les deux chambres (76 députées et 25 femmes sénateurs).
A partir de 2000, le Conseil national de la femme a fait de la lutte contre la violence domestique un thème prioritaire. Un accord entre le Conseil et la Fédération des barreaux argentins vise à former les avocats pour qu’ils deviennent spécialistes des questions de violence familiale. A l’heure actuelle, 20 barreaux ont signé cet accord. Il existe également un système d’information et de suivi sur la violence familiale contre la femme tandis que des journées de sensibilisation ont été organisées. Une série d’activités a également été organisée pour sensibiliser le public à la non-violence. Un Plan d’action en faveur des droits des enfants exploités sexuellement a été développé par le Gouvernement.
Sur le marché du travail, les femmes représentent 40 % des travailleurs. Le nombre d’hommes dans la population active a augmenté de 22 % pendant la décennie et celui des femmes de 41 %. Cette augmentation s’est traduite par une hausse de l’emploi (+20 %) et du chômage (+170 %). Récemment le nombre de femmes ayant un emploi a augmenté de 30 % contre une augmentation totale de 13 % du nombre de travailleurs tandis que le nombre de femmes au chômage a augmenté de 200 % alors que le nombre de chômeurs a augmenté de 150 %. Les femmes ont un niveau d’instruction plus élevé que les hommes, les taux de fréquentation scolaire pour les filles âgées de 15 à 17 ans étant de 84,6 % et de 78,6 % pour les garçons. Toutefois, l’insertion professionnelle ne se fait pas sur un plan d’égalité en raison des stéréotypes culturels. Les femmes sont concentrées dans un nombre réduit d’emplois. Elles sont essentiellement secrétaires, infirmières, vendeuses, coiffeuses. Les revenus perçus par les femmes sont en moyenne inférieurs de 30 % par rapport à celui des hommes.
En matière de santé, le cinquième rapport détaille le plan de réduction de la mortalité infantile et maternelle qui comporte quatre axes d’intervention, à savoir: la coordination intersectorielle des programmes et mesures; la formation des agents de santé; la promotion des droits individuels, et sociaux; et la communication sociale. Il est également fait état de stratégies visant la promotion des droits de la femme dans le domaine de la santé.
Présentation par l’Etat partie
Mme CHARLOTTE ABAKA, Présidente du Comité et experte du Ghana, a précisé que le Comité, sensible à la situation actuelle du pays, ne désire pas rentrer dans tous les petits détails concernant l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes mais souhaite plutôt mettre l’accent sur les défis les plus importants que le pays doit aujourd’hui relever.
Mme GLORIA DEL SOCORRO ABAN, Présidente du Conseil national de la femme, a rappelé que le Conseil national de la femme a été créé il y a dix ans et qu’il a connu une forte continuité institutionnelle indépendamment des changements politiques intervenus dans le pays. Ce Conseil a pour objectif de promouvoir les mesures visant à venir en aide aux femmes. L’Argentine a connu une réforme constitutionnelle importante dans le domaine de la promotion des droits de la femme et de l’égalité des chances entre les sexes. Dans un pays fédéral tel que l’Argentine, a poursuivi Mme Del Socorro Aban, il est indispensable de disposer de mécanismes au niveau local. Un Plan fédéral de la femme a donc été défini en 1998. Ce Plan est mis en oeuvre par le Conseil fédéral de la femme qui traite des différents problèmes relatifs à l’égalité entre les sexes. Il existe en outre dans les municipalités 40 espaces femmes. Ce réseau institutionnel est complété par des organismes non gouvernementaux qui agissent aux niveaux national et fédéral.
La grave crise que connaît actuellement le pays s’est déclarée très brutalement à partir du mois de décembre 2001 mais elle est la conséquence de la dégradation de la situation depuis de nombreuses années. On a par conséquent constaté une concentration croissante de la richesse entre un petit groupe de personnes. Il résulte de cette situation des taux de chômage extrêmes et une détérioration des droits sociaux. Le taux de chômage, qui augmente depuis 1995, a atteint un niveau historique en mai 2002. Il est passé en un an de 16,10% à 21%. A Buenos Aires, le chômage touche davantage les hommes. Cette augmentation s’explique par la perte de postes dans les secteurs de l’industrie, du bâtiment et des transports.
Dans ce contexte, le Gouvernement a mis en place un Programme d’urgence alimentaire qui s’applique jusqu’au 31 décembre 2002 et qui fournit une aide financière pour subventionner les rations alimentaires. Un programme des chefs de foyers a également été institué avec pour objectif de garantir le droit des familles à faire partie intégrante de la société afin que les enfants puissent, notamment, demeurer scolarisés. A l’heure actuelle, 1 822 000 personnes bénéficient de ce programme. Ce programme pourra profiter également aux chômeurs qui n’ont pas pu avoir accès à une prestation temporaire. Le Gouvernement doit également assurer et redéfinir les prestations de base essentielles, à savoir celles qui sont indispensables au maintien de la vie.
La majorité des organismes consacrés à la femme sont vulnérables en cas de crise. Le mécanisme national continue néanmoins de fonctionner avec des ressources économiques limitées. Certains organismes ont connu des coupes budgétaires de l’ordre de 64%. Cependant, depuis 2001, le Conseil national de la femme relève du Secrétariat général de la Présidence de la République. Face à cette nouvelle situation, le plafond budgétaire a pu être relevé, pour l’exercice 2003, de 295%par rapport à l’exercice actuel. Le Conseil pourra donc assurer la continuité de ses activités.
Mme Del Socorro Aban a ajouté que le Conseil national de la femme est un mécanisme d’exécution du Plan fédéral de promotion de la femme. Le montant qui lui a été attribué à été revu à la baisse, ce qui a donné lieu à la cessation de certaines activités. On a formé en moyenne 50 personnes par province afin de faciliter la mise en œuvre des objectifs du Plan. Des ateliers et séminaires sur la santé génésique, la violence dans la famille et sur l’emploi ont été organisés. Nous avons fourni un appui aux initiatives locales en tenant compte du rôle des femmes. Nous avons lancé un concours public permettant de présenter des projets dans le cadre du Plan national de la femme. Au nombre de ces projets, 21 émanant de la société civile ont été adoptés. Ces projets impliquent plus de 250 techniciens et spécialistes. Un projet d’assistance technique pour les femmes a été établi pour renforcer les programmes financés par la Banque mondiale et un autre visant à promouvoir le développement des membres de la famille.
Le régime juridique argentin ne contient aucune disposition discriminatoire. Néanmoins, il est nécessaire d’œuvrer à la mise à jour de nos dispositions législatives pour les harmoniser avec les divers traités des droits de l’homme. Le nouveau décret sur le système des quotas du 20 décembre 2000 assure une application réelle de ce système. Le Conseil national de la femme a contribué activement à l’élaboration de ce texte qui permet d’instaurer un système de quotas pour l’élection des sénateurs. Lors des élections nationales, la participation des femmes a atteint le seuil de 30 % et elles occupent actuellement au total 101 sièges dans les deux chambres du Parlement.
La représentante a reconnu qu’il fallait créer des services de prestations aux femmes victimes de la violence et assurer un meilleur fonctionnement des réseaux d’ONG, assurer un bon accès à la justice avec un parrainage juridique gratuit. Le Conseil élabore actuellement un rapport relatif aux délits à l’égard des femmes dont la publication sera assurée prochainement. Depuis 1996, nous avons mis en œuvre un plan national de lutte contre la violence au foyer en collaboration avec l’UNICEF. L’absence de données fiables nous complique la tâche. Nous avons publié un guide méthodologique concernant l’application de
mesures de lutte contre la violence domestique. Depuis 1995, la police organise des journées de sensibilisation à la violence domestique. En mai 2002, un accord a été passé prévoyant un protocole supplémentaire sur les problèmes de la violence à l’égard des femmes. En décembre 2002, l’Argentine a approuvé l’adoption du Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et prévenir la traite de personnes, en particulier les femmes et les enfants à la Convention sur la criminalité transnationale organisée portant sur la traite des femmes et desenfants. Les amendements au Code pénal prévoient de nouvelles peines pour les cas de prostitution aggravée et pour ceux qui encouragent l’entrée dans le pays ou la sortie du pays de mineurs destinés à la prostitution.
Le Congrès national examine actuellement dix projets de loi visant à réprimer l’agression sexuelle. Le Conseil national de la femme a travaillé activement à la préparation d’un décret qui intègre le harcèlement sexuel au système législatif de base de la fonction publique.
Depuis 1995, on constate des taux de chômage élevés, soit 17 % pour les hommes contre 21 % pour les femmes. En 2002, les femmes représentent 20 % des chômeurs contre 23 % pour les hommes. Dans ce contexte de chômage généralisé, il est difficile de promouvoir le travail des femmes. Les salaires versés aux femmes sont inférieurs à ceux des hommes. On encourage la participation des femmes à des projets créateurs d’emplois.
Dans le domaine de la santé, on a constaté une chute de 25% de la mortalité maternelle, soit 35 décès pour 100 000 naissances vivantes. Dans ce contexte, un programme sur la maternité responsable a été mis en place.
Dialogue avec les experts
Mme ABAKA, Présidente du Comité et experte du Ghana, a souligné que le Comité est très conscient de la situation dans laquelle se trouve l’Argentine. Il s’agit d’une période difficile pour ce pays. Cependant, elle a regretté que l’exposé de la Présidente du Comité national des femmes n’ait pas reflété la situation des femmes actuellement en cette période difficile.
Mme MARIA YOLANDA FERRER GOMEZ, experte du Cuba, a souhaité que le dialogue soit centré sur la situation des femmes argentines à l’heure actuelle. La grave crise financière et économique que connaît l’Argentine suite à l’échec de la politique néolibérale qui a été mise en oeuvre met en danger l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Ces dernières risquent de supporter le plus lourd fardeau de la crise. La population vit dans une situation d’indigence réelle. Les manifestants, souvent des femmes, attaquent les banques et les supermarchés. Des millions de femmes de tout âge ne trouvent pas les moyens de survivre.
Dans ce contexte, l’experte s’est félicitée du fait que le Conseil national de la femme puisse continuer de fonctionner car il peut jouer un rôle important pour veiller à ce que soit respecté le principe de l’égalité des chances entre les femmes et les hommes. Elle a demandé davantage de détails à propos de ce qui est accompli en faveur desse passe pour les femmes des secteurs les plus vulnérables du pays et a souhaité en savoir plus sur
les accords conclus en mars 2002 avec le Ministère du travail et en mai 2002 avec le Ministère de la santé. La situation de crise actuelle est un «bouillon de culture » qui exacerbe la violence à l’égard des femmes dans le pays ainsi que phénomène de la prostitution. Dans ce contexte, a-t-on pensé à redoubler d’efforts pour prévenir la violence et empêcher que des individus de petite vertu ne profitent pas des femmes? Il faut aussi accorder la priorité aux moyens de trouver les contraceptifs efficacesmédicaments anti-conceptionnels et sensibiliser l’opinion à l’importance de la santé des femmes pour limiterne pas augmenter le nombre de décès de mères et d’enfants. Comment intègre-t-on les femmes dans lesont-elles incluses dans les p programmes d’urgence?
M meME AIDA GONZALEZ MARTINEZ, experte du Mexique, a fait remarqu eré que depuis la ratification de la Convention en 1985, l’Argentine a bien honoré ses engagements internationaux. C’est pourquoi pourquoi, elle a dit ne pas comprendre pourquoi le projet de loi qui tendait à ratifier le Protocole facultatif a la Convention a été retiré de l’examen du Parlement sous prétexte qu’il pourrait violer la souveraineté de l’Etat argentin.
Mme AYSE FERIDE ACAR, experte de la Turquie, a manifesté son inquiétude face au refus de l’Argentine de ratifier le Protocole facultatif. Elle également demandé si les conclusions du Comité ont été publiées au x niveau x local et national. Les médias ont-ils couvert le contenu de ce dialogue?
Mme HEISOO SHIN, experte de la République de Corée, a souhaité que la représentante fournisse davantage d’informations sur les derniers événements qui se sont produits dans le pays sous l’angle du traitement réservé aux femmes, notamment en ce qui concerne leurs conditions de travail et la violence domestique. Le Gouvernement a-t-il l’intention de coopérer avec les organisations de femmes? Ce sont en effet elles qui sont vraiment au fait de la situation sur le terrain. Elles peuvent souvent détecter les problèmes avant le Gouvernement. L’experte a donc demandé au Gouvernement d’accepter leurs requêtes, leurs demandes et leurs critiques.
Mme FUMIKO SAIGA, experte du Japon, a regretté que les informations ne portent pas sur la situation actuelle. Elle s’est félicitée que le Conseil travaille avec tant d’efficacité mais a souhaité obtenir des détails sur le fonctionnement du mécanisme national mis en place.
Mme SJAMSIAH ACHMAD, experte de l’Indonésie, a félicité le Gouvernement argentin pour avoir maintenu les engagements pris en faveur des femmes malgré les circonstances difficiles du pays. Elle a demandé d’indiquer la stratégie qui avait permis de réussir en cette période de récession économique, en particulier pour assurer le soutien de divers groupes sociaux. Dans quelle mesure avez-vous obtenu le soutien du secteur privé, des autorités locales, des dirigeants religieux traditionnels et des partis politiques? Avez-vous des relations particulières avec le monde universitaire et les organisations féminines? Elle a aussi demandé d’expliquer comment le Gouvernement prévoyait la gestion future des relations avec ces groupes.
Mme DEL SOCORRO ABAN a expliqué que l’Argentine, qui est un vaste pays fédéral, est divisée en provinces autonomes qui elles-mêmes sont divisées en municipalités et dont la structure administrative est plus petite. Il en existe plus de 2 000 dans le pays et il est difficile de mener à bien toutes les politiques et programmes sociaux dans les zones les plus éloignées. C’est pourquoi, le Conseil national de la femme comporte également un Conseil fédéral de la femme, composé de femmes qui représentent chacune des provinces. Dans les municipalités, il y a également une représentante de femmes qui communique avec le Bureau provincial. Le Conseil a établi un partenariat avec un réseau d’organisations de la société civile à tous les niveaux, même au niveau local. Cette énergie déployée localement a permis de préserver les programmes, voire même de mettre en œuvre deux nouveaux programmes le mois prochain. La coordination avec les divers ministères reflète la place qui est accordée au Conseil national au niveau des prises de décisions les plus élevées. Cela nous a également permis de signer de nombreux accords. Des mesures intersectorielles nous ont permis de mettre en place des programmes holistiques même si notre organisme est de petite taille et ne dispose pas d’un budget important.
Les problèmes de violence à l’encontre des femmes se sont accrus en cette période de chômage généralisé. Certains programmes ont disparu pour que des ressources suffisantes à la fourniture de services de base soient dégagées. Nous disposons d’un programme d’aide alimentaire pour les chefs de foyers dont la moitié des bénéficiaires sont des femmes ou encore d’un programme de santé, domaines dans lesquels nous déployons la majorité de nos ressources. Le nombre des bénéficiaires de ces programmes reste encore insuffisant car nos ressources sont limitées. Un programme d’assistance sanitaire qui sera mis en œuvre le mois prochain bénéficie d’une enveloppe de 21 millions de dollars. Nous allons y participer pour y inclure une dimension sexospécifique. Ce programme vise la réduction de la mortalité maternelle et infantile et, à cet égard, nous allons mener des actions de sensibilisation à la planification familiale.
Mme ROSARIO MANALO, experte des Philippines, s’est dite très préoccupée par le fait que le Gouvernement ait retiré la ratification du Protocole facultatif de l’ordre du jour du Parlement. Elle a salué la délégation argentine pour les mesures et réformes visant à sanctionner l’exploitation sexuelle des femmes et des enfants et à venir en aide au personnel domestique. Elle a cependant demandé à préciser la stratégie que l’Argentine a adoptée en matière de migrations.
En réponse aux préoccupations exprimées, Mme DEL SOCORRO ABAN a indiqué que la question de la ratification du Protocole facultatif est importante pour le Gouvernement. Sur la question de savoir comment empêcher que les femmes sortent du pays, elle a précisé que le Gouvernement ne sait pas quelle stratégie adopter pour le moment.
Mme IVANKA CORTI, experte de l’Italie, a manifesté son inquiétude face au fait que le Gouvernement ait retiré de l’ordre du jour du Parlement la ratification du Protocole facultatif. Elle a également demandé des informations complémentaires sur la situation dans les hôpitaux argentins. Qu’en est-il de la population âgée, en particulier les femmes? Comment le Gouvernement assure-t-il l’approvisionnement en médicaments pour tout le monde? De l’avis de l’experte, le rôle de la société civile est essentiel à l’amélioration du bien-être de la population argentine. De nombreuses organisations non gouvernementales entreprennent un travail remarquable. Dans une situation d’urgence où il faut consolider la démocratie, l’experte a souligné qu’il est nécessaire de rassembler le potentiel que représentent les organisations de femmes pour assurer la politique de reconstruction du pays.
Mme CHRISTINE KAPALATA, experte de la République-Unie de Tanzanie, s’est inquiétée des risques de transmission du sida de la mère à l’enfant, taux qui est actuellement de 6,9 % et ce chiffre ne cesse d’augmenter. Quelle est la partie du Plan fédéral de la promotion de la femme qui vise l’élaboration d’un programme de lutte contre le VIH/sida? Est-ce que les femmes enceintes atteintes du sida reçoivent un traitement? Quels sont les soins attribués aux enfants qui naissent infectés par le virus?
Mme ABAKA a, elle aussi, fait part de son inquiétude quant à la santé des femmes. Elle a recommandé à l’Etat partie d’inclure les femmes atteintes du VIH/sida dans le programme d’urgence consacré à la santé. Elle a constaté en outre que les cas de violence, tout comme leur gravité, augmentaient, notamment les cas de viol. Elle a relevé qu’une loi permet une interruption de grossesse aux femmes dont la vie est en danger et lorsque la grossesse est consécutive à un viol. Comment les médecins réagissent–ils face aux patientes qui se rendent à l’hôpital après avoir fait une tentative d’avortement? Elle a relevé l’aspect discriminatoire de la loi sur la santé dans la mesure où les bénéficiaires hommes peuvent transférer les bénéfices de l’assurance santé à leur épouse alors que la femme ne le peut pas.
Répondant aux experts, Mme DEL SOCORRO ABAN a expliqué que la détérioration de la santé publique a commencé avant la crise économique actuelle. Cette crise touche l’ensemble de la population, ce qui explique pourquoi nous avons décrété l’urgence sanitaire. Ce décret veille à assurer l’approvisionnement de médicaments et la fourniture de prestations de base. Chacun peut bénéficier d’une assurance médicale et recevoir les médicaments essentiels. Les cas de violence augmentent et nous tentons de décentraliser nos actions. Les médicaments contre le VIH/sida font partie des médicaments jugés prioritaires. Ils sont accessibles à la population par le biais des services de santé publics.
Mme ABAKA a expliqué qu’en raison de la crise économique, les experts n’ont pas jugé approprié de passer en revue chacun des articles de la Convention. Les questions ont plutôt porté sur les moyens mis en œuvre par le Gouvernement argentin pour atténuer les effets de la crise économique sur les femmes. Elle a fortement engagé l’Argentine à ratifier le Protocole facultatif, rappelant que les Etats d’Amérique latine ont toujours fait preuve du plus grand sérieux pour s’acquitter de leurs obligations en vertu des instruments internationaux.
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