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DSG/SM/173

ALLOCUTION DE LA VICE-SECRETAIRE GENERALE DES NATIONS UNIES AU NEUVIEME SOMMET DE LA FRANCOPHONIE

18/10/2002
Communiqué de presse
DSG/SM/173


ALLOCUTION DE LA VICE-SECRETAIRE GENERALE DES NATIONS UNIES

AU NEUVIEME SOMMET DE LA FRANCOPHONIE


On trouvera ci-après l’allocution prononcée par la Vice-Secrétaire générale, Mme Louise Fréchette, au neuvième sommet de la francophonie, Beyrouth (Liban), le 18 octobre 2002 :


Permettez-moi tout d’abord de vous remercier, Monsieur le Président, ainsi que le Gouvernement et le peuple libanais pour l’accueil chaleureux qui nous est réservé. 


Le thème de ce Sommet – le dialogue des cultures – a une résonance toute particulière au Liban.   Notre hôte incarne en effet parfaitement la richesse de la diversité culturelle et le dialogue constant qu’exige la cohabitation de communautés ayant chacune leurs traditions et leurs spécificités.  Au-delà des aléas de son histoire, il a su défendre une identité à la fois une et plurielle.


L’Organisation des Nations Unies elle-même est née de la conviction que le dialogue peut l’emporter sur la discorde, que la diversité est un atout et que les peuples du monde sont bien plus unis par leur destin que séparés par leurs identités. 


En novembre dernier, dans le cadre de l’Année des Nations Unies pour le dialogue entre les civilisations, l’Assemblée générale de l’ONU a adopté un programme mondial pour le dialogue entre les civilisations.  L’article premier de ce programme stipule que ce dialogue « correspond à un désir commun d’apprendre, de découvrir et d’étudier des hypothèses, de mettre en évidence des interprétations communes et des valeurs fondamentales et de faire se rencontrer des perspectives diverses ».  


En quoi le dialogue entre les civilisations ou le dialogue des cultures est-il utile ?


Premièrement, c’est une réponse appropriée et nécessaire à l’idée de plus en plus souvent évoquée d’un choc inévitable des civilisations.  Adopter cette idée serait tomber dans le piège de ceux qui cherchent à soulever les peuples les uns contre les autres en exagérant leurs différences religieuses et culturelles et en instillant la peur.   Un autre scénario pour l’avenir est possible : une communauté mondiale respectant la diversité et s’appuyant sur des valeurs universelles.   La Charte des Nations Unies et la Déclaration universelle des droits de l’homme offrent une base commune de valeurs et de principes reconnus de tous.   


Deuxièmement, le dialogue permet de trouver des terrains d’entente pour s’attaquer aux problèmes de plus en plus nombreux exigeant des solutions mondiales.   Qu’il s’agisse de la dégradation de l’environnement, de l’épidémie de sida, du terrorisme ou de la criminalité transnationale, aucun pays, aussi puissant soit-il, ne peut faire front seul, en comptant uniquement sur ses propres ressources.  Mais nous pouvons faire beaucoup en unissant nos forces. 


Troisièmement, le dialogue peut nous aider à mieux comprendre les causes des conflits et à aplanir la voie vers la paix.  Trop souvent, les griefs qui sont à l’origine de conflits sont occultés par des discours tendant à déformer l’histoire et à l’utiliser abusivement pour aggraver les divisions et les antagonismes entre communautés.  Bien sûr les mots seuls ne suffisent pas à régler les problèmes souvent profonds et très réels qui sont la cause d’un conflit, mais un dialogue véritable, appuyé par des mesures réciproques fondées sur la reconnaissance des griefs et des préoccupations de chaque partie, peut aider les protagonistes à trouver le chemin de la paix.  


Ainsi, il est clair que le conflit israélo-palestinien ne sera pas réglé par la force militaire, ni par le recours à des moyens violents quels qu’ils soient.  Il faudra en venir à un règlement politique, négocié entre les deux peuples sur un pied d’égalité ; un règlement impliquant que deux Etats, Israël et la Palestine, vivent côte à côte, à l’intérieur de frontières sûres et reconnues.  Mais combien de centaines ou de milliers de personnes devront mourir, combien de souffrances et d’épreuves les populations devront-elles encore endurer, avant que les dirigeants des deux côtés aient la clairvoyance et le courage nécessaires pour accepter l’inévitable ?  Tous ceux qui ont une influence sur les parties doivent les exhorter à accepter cette vision des choses et à agir en conséquence, pour que les deux peuples connaissent enfin la paix et la sécurité, dans le cadre d’un règlement juste, durable et global du conflit du Moyen-Orient – y compris entre Israël et le Liban, et entre Israël et la Syrie – sur la base des résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité et du principe de l’échange de la terre contre la paix.  A cet égard, l’initiative approuvée lors du Sommet de la Ligue arabe tenu à Beyrouth en mars dernier conserve toute son importance.


Tout au long de l’histoire de l’humanité, les cultures et les civilisations se sont interpénétrées et enrichies au contact les unes des autres.  Et le fait est que peu d’entre nous, aujourd’hui, peuvent se réclamer d’une seule civilisation.  Au contraire, nous mesurons, comme jamais auparavant, que nous sommes les produits de nombreuses cultures et influences ; que notre force est de savoir concilier ce qui est familier et ce qui est étranger ; et qu’une civilisation exclusive et qui se replierait sur elle-même serait vouée à l’échec. 


Loin de moi l’idée que nous ne pouvons pas, à bon droit, tirer fierté de notre foi ou de notre héritage particuliers.  Nous le pouvons et le devons, sans pour cela haïr ce que nous ne sommes pas. 


Le premier principe sur lequel doit se fonder le dialogue que nous recherchons, c’est le respect de l’égale dignité de toutes les cultures et de toutes les civilisations. 


Il impose de reconnaître que la diversité culturelle est source de vitalité et une richesse que nous avons le devoir de préserver.  A ce propos, la Déclaration universelle sur la diversité culturelle, adoptée par l’UNESCO en novembre dernier, marque un grand pas vers la reconnaissance du droit à la diversité culturelle et sa prise en compte dans le débat sur la mondialisation, le commerce et la gouvernance mondiale.


Il impose aussi de reconnaître que chacun a un rôle à jouer dans un monde interdépendant et doit pouvoir faire entendre sa voix.


Et parce que rien n’est plus nuisible au dialogue que l’injustice, il impose d’introduire plus d’équité et de justice, plus de solidarité entre les êtres humains. 


Lors du Sommet du millénaire en septembre 2000, les chefs d’Etat et de gouvernement ont adopté une déclaration ambitieuse qui énonce clairement leurs priorités pour le 21e siècle, ainsi que leur volonté de défendre, au niveau mondial, les principes de la dignité humaine, de l’égalité et de l’équité.  Pour traduire ces valeurs et principes en actes, ils ont défini une série d’objectifs visant à libérer l’humanité du besoin et de la peur et à protéger notre planète.  Introduire plus de justice, c’est commencer par faire en sorte de réduire de moitié, d’ici à 2015 – comme ils s’y sont engagés – la proportion de la population mondiale qui vit dans la misère, et atteindre les objectifs fixés en matière, notamment, d’éducation, de réduction de la mortalité infantile et maternelle, de lutte contre la faim et contre le VIH/sida.  


Comme l’ONU, la Francophonie contribue par son action à bâtir des ponts entre les peuples et à nourrir le dialogue des cultures et des civilisations.  Elle réunit un large éventail de sociétés et de peuples d’origines, de traditions et de convictions très diverses, et est porteuse d’un message fort d’ouverture, de tolérance, de solidarité et de respect de l’autre.  L’ONU se réjouit de la coopération étroite établie avec l’OIF dans toute une série de domaines d’intérêt mutuel, depuis le soutien électoral que nos deux organisations ont apporté dans plusieurs pays francophones au cours des dernières années jusqu'à la concertation et l'action conjointe pour la paix, la sécurité et le développement dans l'espace francophone.  


Je voudrais terminer en félicitant votre Secrétaire général, M. Boutros Boutros-Ghali qui, fort de sa longue expérience des affaires internationales, y compris comme Secrétaire général de l’ONU, a dirigé l’Organisation internationale de la Francophonie avec dynamisme, créativité et sagesse au cours des cinq dernières années.   


Je vous souhaite un débat fructueux et vous remercie de votre attention.


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