LES ETATS-UNIS S’OPPOSENT AU PROJET DE RESOLUTION RELATIF AU MOYEN-ORIENT PRESENTE PAR LA SYRIE
Communiqué de presse CS/2425 |
Conseil de sécurité CS/2425
4681e séance – soir 20 décembre 2002
LES ETATS-UNIS S’OPPOSENT AU PROJET DE RESOLUTION RELATIF
AU MOYEN-ORIENT PRESENTE PAR LA SYRIE
En raison du vote négatif des Etats-Unis, membre permanent du Conseil de sécurité doté du droit de veto, le Conseil de sécurité n’a pas été en mesure, ce soir, d’adopter le projet de résolution relatif à la situation au Moyen-Orient présenté par la République arabe syrienne. Douze pays ont voté en faveur du texte, deux se sont abstenus (Bulgarie et Cameroun).
Si cette résolution avait été adoptée, le Conseil aurait condamné le fait que les forces d’occupation israéliennes ont tué plusieurs agents de l’Organisation des Nations Unies, dont il y a peu, dans le camp de réfugiés de Djénine, un fonctionnaire recruté sur le plan international. Le Conseil aurait également condamné le fait que les forces d’occupation israéliennes ont détruit de façon gratuite un entrepôt du Programme alimentaire mondial à Beit Lahiya, dans le territoire palestinien occupé, où étaient stockées 537 tonnes de denrées alimentaires qui provenaient de dons et devaient être distribuées à des Palestiniens dans le besoin.
Par ce projet de texte, le Conseil de sécurité exigeait également qu’Israël, puissance occupante, se conforme pleinement aux obligations qui lui incombent en vertu de la quatrième Convention de Genève relative à la protection des civils en temps de guerre, du 12 août 1949, et s’abstienne de faire un usage excessif et disproportionné de la force dans le territoire palestinien occupé.
Expliquant son opposition au projet de résolution, l’Ambassadeur des Etats-Unis, John Negroponte, a expliqué que ce texte aurait dû contenir une invitation à l'intention de toutes les parties concernées pour qu'elle réduise les menaces qui se posent à la sécurité du personnel humanitaire. Malheureusement, ceux qui sont à l’origine de ce projet de résolution tentent de condamner l’occupation israélienne plutôt que de protéger les fonctionnaires des Nations Unies, ce qui est inapproprié. De plus, l’adoption de cette résolution ne contribue pas à la mise en œuvre de mesures visant à faciliter l’application de la feuille de route du Quartet à laquelle le Président Bush a donné son appui.
LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION DE PALESTINE
Projet de résolution S/2002/1385
Le Conseil de sécurité,
Réaffirmant ses résolutions 242 (1967) du 22 novembre 1967, 338 (1973) du 22 octobre 1973, 1397 (2002) du 12 mars 2002, 1402 (2002) du 30 mars 2002, 1403 (2002) du 4 avril 2002 et 1435 (2002) du 24 septembre 2002, ainsi que les déclarations de son président en date du 10 avril 2002 et du 18 juillet 2002,
Se déclarant à nouveau profondément préoccupé par les événements tragiques et violents qui se déroulent depuis septembre 2000 et par la détérioration constante de la situation,
Exprime sa vive préoccupation devant le fait que les forces d’occupation israéliennes ont tué plusieurs agents de l’Organisation des Nations Unies, dont, il y a peu, dans le camp de réfugiés de Djénine, un fonctionnaire recruté sur le plan international,
Exprime sa profonde préoccupation devant le fait que les forces d’occupation israéliennes ont détruit de façon gratuite un entrepôt du Programme alimentaire mondial à Beit Lahiya, dans le territoire palestinien occupé, où étaient stockées 537 tonnes de denrées alimentaires qui provenaient de dons et devaient être distribuées à des Palestiniens dans le besoin,
Rappelant la protection reconnue aux installations de ce type en vertu du droit international humanitaire,
1.Condamne les actes susmentionnés qui se sont soldés par des morts et des destructions;
2.Exige qu’Israël, puissance occupante, se conforme pleinement aux obligations qui lui incombent en vertu de la quatrième Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre, du 12 août 1949, et s’abstienne de faire un usage excessif et disproportionné de la force dans le territoire palestinien occupé;
3.Prie le Secrétaire général de l’informer de toute évolution de la situation.
Explications de position
M. JOHN NEGROPONTE (Etats-Unis) a déclaré que pour son pays, les incidents ayant causé la mort de plusieurs fonctionnaires et la destruction d’un entrepôt du Programme alimentaire mondial sont des faits d’une très grande gravité. Nous avons demandé à Israël de faire la lumière sur ces incidents. Cette résolution aurait dû toutefois inviter toutes les parties concernées à minimiser les menaces qui se posent à la sécurité du personnel humanitaire. Malheureusement, ce texte ne le fait pas. Ceux qui sont à l’origine de ce projet de résolution tentent plutôt de condamner l’occupation israélienne et non pas de protéger les fonctionnaires des Nations Unies, ce qui est inapproprié. En début de journée, le Président Bush a exprimé son ferme appui à la feuille de route du Quartet qui reflète sa vision de deux Etats vivant côte à côte dans des frontières sûres et reconnues. L’adoption de cette résolution ne contribuera pas à la mise en œuvre de mesures visant à faciliter l’application de la feuille de route. Nous étions prêts à nous engager dans des discussions sérieuses avec les autres membres du Conseil sur un texte ralliant le compromis et nous avions, à cet effet, fait circuler un texte qui abordait tous les points pertinents. Nous avions indiqué notre intention de présenter ce texte la semaine prochaine mais les auteurs du texte présenté aujourd’hui ont préféré insister sur un vote hâtif. C’est avec regret que nous allons voter contre ce projet de résolution. .
M. RAYKO RAYTCHEV (Bulgarie) s’est dit convaincu que la division du Conseil ne facilite pas une solution juste en faveur de la paix et de la sécurité. La Bulgarie ne s’oppose pas au principe de ce texte mais est contre tout acte de violence qui fait des victimes innocentes, a souligné le représentant.
M. PETER KOLBY (Norvège) a invité les deux parties à respecter le droit international. Il est particulièrement important, a-t-il souligné, que le personnel international puisse effectuer sa mission humanitaire. La Norvège, a-t-il précisé, condamne néanmoins les actes terroristes contre des civils israéliens. Ces attaques sont des obstacles à la reprise du processus de paix, a-t-il dit en priant l’Autorité palestinienne de lutter contre le terrorisme et de réformer les structures de sécurité. Parallèlement, les Palestiniens doivent proposer un programme de réforme et respecter la liberté et l’état de droit, a conclu le représentant.
M. JEAN-MARC DE LA SABLIERE (France) a indiqué que la France avait apporté son soutien au projet de résolution présenté aujourd’hui qui condamne les actes ayant coûté la vie de fonctionnaires internationaux. Il était légitime que le Conseil engage à nouveau Israël à respecter les obligations qui sont les siennes en vertu du droit international humanitaire et, en particulier, la quatrième Convention de Genève sur la protection des civils en temps de guerre et nous regrettons que le Conseil n’ait pas adopté ce texte.
M. GERARD CORR (Irlande) a estimé qu’il était nécessaire que le Conseil agisse sur les questions importantes dont traite le projet de résolution et condamne les morts et les destructions causées par les forces de défense israéliennes. Ce texte est approprié dans la mesure où Israël a des obligations qui lui dictent d’appliquer pleinement la quatrième Convention de Genève dans le territoire palestinien occupé.
M. NASSER AL-KIDWA, Observateur de la Palestine, a condamné dans les termes les plus forts les attaques lancées par Israël contre les bâtiments de l’ONU dans le territoire palestinien occupé. Il a notamment condamné le meurtre de fonctionnaires des Nations Unies dont Ian Hook qui était chargé de la reconstruction du camp de l’UNRWA. Il a aussi condamné la destruction de l’entrepôt du Programme alimentaire mondial (PAM). Ce sont, a-t-il dit, des attaques qui constituent des crimes de guerre et des violations du droit international humanitaire, notamment la quatrième Convention de Genève. La communauté internationale doit prendre les mesures qui s’imposent contre les responsables de tels actes et œuvrer pour qu’ils soient traduits en justice, a souligné l’Observateur. Il a ainsi regretté que le Gouvernement israélien n’ait pris aucune mesure pour mettre un terme aux graves violations auxquelles se
livrent les forces israéliennes, y compris contre les organisations internationales et le personnel humanitaire. En outre, a-t-il poursuivi, il est clair que les attaques contre les locaux et le personnel des Nations Unies sont délibérées et témoignent du comportement des forces israéliennes.
Ce comportement, a encore dit l’Observateur, est un défi que ces forces lancent au droit international humanitaire et à toutes les lois et coutumes internationales. Israël, a-t-il estimé, jouit d’une protection automatique d’un membre du Conseil de sécurité. Le Groupe arabe, a—t-il expliqué, a présenté un texte traitant d’évènements avérés et visant à mettre un terme aux actes des forces israéliennes en soulignant les dispositions du droit international humanitaire. Qui aurait pensé qu’un tel projet se trouverait dans une situation aussi difficile, s’est interrogé l’Observateur. Qui aurait pensé au veto même s’il est vrai que les Etats-Unis ne sont jamais objectifs quand il s’agit d’Israël. Cette subjectivité n’a aucune limite, a regretté l’Observateur, même quand il s’agit du droit international et de victimes qui travaillaient au bien-être du peuple palestinien.
Si la raison du rejet du texte est la mention à la quatrième Convention de Genève et à Israël comme puissance occupante, alors nous sommes devant un obstacle, a estimé l’Observateur. Si cette hypothèse est vraie, alors, a-t-il fait remarquer, les Etats-Unis sont sur le point de causer une nouvelle catastrophe au Moyen-Orient en adoptant une position qui ne peut être interprétée que comme un appui à l’extrême droite israélienne et à l’érosion de la nature occupée du territoire palestinien. Ceci veut dire, a poursuivi l’Observateur, que les tentatives de créer deux Etats resteront vaines. Cela signifie la fin du processus de paix, a-t-il prévenu en soulignant que les Palestiniens ne marchanderont jamais leur terre.
Espérant que cette hypothèse soit fausse, l’Observateur a insisté sur le fait que les actes d’Israël contre le personnel des Nations Unies et du personnel humanitaire, en général, font partie intégrante des attaques criminelles contre le peuple palestinien. Cette tragédie doit cesser et il faut, pour cela, que la communauté internationale et le Conseil jouent leur rôle et assument leur responsabilité au titre de la Charte des Nations Unies. Le Conseil doit jeter les bases d’une paix pour les deux Etats dans les frontières de 1967, avec en ce qui concerne l’Etat palestinien, Jérusalem pour capitale. Dans ces conditions, la feuille de route du Quartet ne peut que réussir, a conclu l’Observateur.
M. AARON JACOB (Israël) a indiqué que son pays avait fait part de sa préoccupation quant à la mort d’employés des Nations Unies et avait lancé une enquête dont les résultats seront transmis aux autorités compétentes. Israël a également engagé des discussions avec le Programme alimentaire mondial (PAM) et nous sommes certains qu’une solution sera trouvée dans un futur proche. Nous ne cherchons pas à envenimer une situation déjà difficile sur le terrain et sommes disposés à faciliter la fourniture de l’aide humanitaire nécessaire. Il est juste de prêter une attention soutenue aux actions des Etats. L’incapacité des Etats à tenir pour responsables les groupes armés qui abusent de la protection accordée aux civils en exposant à des risques les populations civiles ne fera qu’encourager les groupes terroristes. Nous sommes étonnés de constater que seul Israël semble visé à l’exclusion d’autres Etats. Pourtant, en avril dernier deux membres de la Force internationale temporaire à Hébron ont été pris pour cible et tués par un terroriste palestinien sans susciter la moindre réaction.
Nous avons entériné la vision du Président des Etats-Unis sur la coexistence de deux Etats dans des frontières sûres et reconnues. Nous sommes prêts à coopérer avec l’Autorité palestinienne dans ses efforts de réforme, de renforcement des organes de renseignements et de sécurité ainsi que dans le domaine de la lutte contre le terrorisme. Nous sommes également prêts à engager une coopération dans les domaines économiques et civils. Nous serons prêts à faire des concessions douloureuses pour obtenir la paix, étant entendu que des concessions sont nécessaires de la part de l’autre partie au conflit. Dans un premier temps, il sera nécessaire de mettre un terme à la haine des Juifs cultivée par les hauts dirigeants palestiniens et à la campagne terroriste palestinienne.
En deux ans, le conflit a coûté un nombre considérable de vies humaines du côté palestinien comme du côté israélien. L’économie palestinienne est en ruine et la crédibilité de ses leaders est désormais au point zéro tandis que la perspective de création d’un Etat palestinien s’éloigne de plus en plus. Nous continuerons à jouer à ce jeu diplomatique cynique et le manque total de sérieux de la part de la partie palestinienne ne nous mènera nulle part. La seule différence par rapport à la situation qui prévalait est le nombre de tombes comme témoignage de l’échec des politiques du passé. Nous sommes résolument engagés en faveur de la non-violence et du dialogue et de la reprise du processus de dialogue et de réconciliation.
M. MIKHAIL WEHBE (République arabe syrienne) a précisé que lorsque son pays a présenté le projet de résolution, au nom du Groupe des Etats arabes, il croyait qu’il s’agissait d’une question qui faisait l’unanimité. Le texte visant à mettre un terme aux attaques auxquelles se livraient les forces israéliennes contre le personnel de l’ONU. Ce texte visait aussi à obliger Israël à ne pas prendre pour cible des installations de l’ONU, y compris ceux du PAM. Israël ne peut se déroger au droit international et échapper aux sanctions lorsque sa responsabilité est établie. La quatrième Convention de Genève s’applique à tous de la même manière. Si le Conseil est incapable de mettre un terme à ce genre de pratiques à cause de la protection dont Israël bénéficie de la part d’un membre permanent du Conseil, cela ne peut qu’ouvrir la voie à d’autres violations.
La Syrie a déployé des efforts considérables pour impliquer tous les membres du Conseil aux consultations et a présenté au Groupe des Etats arabes toutes les propositions d’amendements. Il était tout simplement impossible de conserver les amendements proposés par une délégation parce qu’ils étaient étrangers aux objectifs recherchés et essayaient d’établir une égalité entre la victime et le bourreau. Aujourd’hui, cette délégation vient de priver la majorité des membres du Conseil des moyens d’envoyer à Israël le message qu’ils voulaient. Ce projet de résolution tout comme la condamnation qu’il contient n’a rien à voir avec l’effort international visant une paix globale. Bien que le Conseil ait été incapable d’adopter le projet de résolution, la Syrie persévèrera et continuera d’appuyer le Conseil dans son effort de maintien de la paix et de la sécurité internationales, de la préservation du droit international et de la prévention d’attaques meurtrières contre le personnel des Nations Unies, a conclu le représentant.
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