POUR METTRE FIN AU CONFLIT AU LIBERIA, LE CONSEIL DE SECURITE PRECONISE UNE STRATEGIE INTERNATIONALE GLOBALE AXEE SUR LA RECONCILIATION NATIONALE ET LA REFORME POLITIQUE
Communiqué de presse CS/2410 |
Conseil de sécurité CS/2410
4665e séance – après-midi 13 décembre 2002
POUR METTRE FIN AU CONFLIT AU LIBERIA, LE CONSEIL DE SECURITE PRECONISE UNE STRATEGIE INTERNATIONALE GLOBALE AXEE SUR LA RECONCILIATION NATIONALE ET LA REFORME POLITIQUE
La stratégie prévoit un rôle élargi pour le Bureau de l’ONU au Libéria
et une participation plus active du Bureau de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest
Préoccupé par la situation au Libéria et la menace qu’elle représente pour la paix et la sécurité dans la région, du fait des activités du Gouvernement libérien et de la persistance du conflit interne dans ce pays, notamment les attaques armées du mouvement «Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie» (LURD), le Conseil de sécurité a préconisé, cet après-midi, une série de mesures pour régler le conflit et mettre en place un processus de paix ouvert.
Dans une déclaration présidentielle, lue par son Président, M. Alfonso Valdivieso de la Colombie, le Conseil de sécurité a d’abord condamné la non-satisfaction par le Gouvernement du Libéria et le LURD des exigences de l’embargo sur les armes imposé par la résolution 1343 du 7 mars 2001 et prié ces parties de conclure un accord de cessez-le-feu et un processus de paix global. Ce processus, selon le Conseil, devrait notamment prévoir le désarmement et la démobilisation des combattants et une réforme complète du secteur de la sécurité. A ce propos, le Conseil a demandé à tous les Etats de s’abstenir de fournir un appui militaire à quelque partie que ce soit et d’accomplir tout acte susceptible d’aggraver la situation aux frontières entre le Libéria et les pays limitrophes. Le Conseil a ainsi prévu d’envoyer une mission dans la région au cours du premier semestre de 2003.
Au titre des mesures visant la mise en place d’un processus de paix ouvert, le Conseil a préconisé la mise au point d’une stratégie internationale globale qui reposerait sur deux grands principes à savoir, d’une part, l’apport des principaux acteurs régionaux et l’inscription de cette stratégie dans une approche globale de la reconstruction d’un système intégré de paix et de sécurité régionales, et d’autre part, l’engagement du Président du Libéria à œuvrer à la réconciliation nationale et à la réforme politique.
S’agissant précisément de cet engagement, le Conseil s’est dit déterminé à promouvoir un rôle élargi au Bureau des Nations Unies pour l’appui à la consolidation de la paix au Libéria et une participation plus active du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest récemment créé. Pour ce qui est du Bureau des Nations Unies au Libéria, ses tâches viseront le renforcement des institutions démocratiques et de l’état de droit; la préparation d’élections libres et régulières en 2003; le contrôle du respect des droits de l’homme; la promotion de la réconciliation nationale et la résolution du conflit; l’assistance au Gouvernement libérien dans l’application des accords de paix; et le lancement d’une campagne d’information sur les politiques et les activités de l’ONU concernant le Libéria.
Pour le Conseil, le succès de la stratégie internationale globale au Libéria dépendra dans une large mesure de la participation directe et active de l’Union africaine, de la Communauté pour le développement économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et du Groupe de contact international. Le Conseil a d’ailleurs pris note des positions des deux premiers au sujet du régime des sanctions au Libéria. Il a ainsi exprimé son intention de maintenir les sanctions à l’étude afin de s’assurer de leur conformité à la présente déclaration et aux résolutions 1343 (2001) et 1408 (2002) et de continuer de déterminer si ces sanctions ont des répercussions humanitaires sur la population libérienne.
LA SITUATION AU LIBÉRIA
Projet de déclaration du Président du Conseil de sécurité
« La communauté internationale et le Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies se sont employés sans relâche et de concert à promouvoir la paix et la sécurité en Afrique occidentale, en particulier dans la région de l’Union du fleuve Mano. Ces efforts ont représenté un important investissement en ressources et en moyens. Le processus de paix en Sierra Leone est le résultat tangible de ces efforts. Le Conseil poursuivra ses efforts et continuera de favoriser la compréhension et la paix dans la région afin de faire en sorte que le processus de paix en Sierra Leone, qui demeure fragile, prenne corps et profite au peuple de Sierra Leone et à l’ensemble de la région du fleuve Mano.
Par ailleurs, le Conseil de sécurité est profondément préoccupé par la situation au Libéria et la menace qu’elle représente pour la paix et la sécurité internationales dans la région, du fait des activités du Gouvernement libérien et de la persistance du conflit interne dans ce pays, notamment les attaques armées du mouvement « Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie » (LURD). Le conflit interne et la violence intense au Libéria entraînent un exode de réfugiés et de vastes déplacements de populations au Libéria, ce qui ne fait qu’aggraver la situation humanitaire et favorise les mouvements de combattants irréguliers et les flux d’armes dans l’ensemble de la région. Le Conseil condamne la non-satisfaction par le Gouvernement des exigences de la résolution 1343 (2001) du 7 mars 2001 et le non-respect par le Gouvernement, d’autres États et d’autres entités, dont le LURD, des mesures imposées dans ladite résolution, notamment la poursuite de l’importation d’armes en violation de l’embargo sur les armes. Tous ces faits nouveaux menacent le processus de paix en Sierra Leone, la stabilité de toute la région de l’Afrique de l’Ouest et surtout, ce qui est le plus tragique, inflige d’immenses souffrances à la population libérienne elle-même.
Afin de trouver une solution à la situation au Libéria et à la menace qu’elle représente pour la paix et la sécurité internationales dans la région, le Conseil de sécurité et la communauté internationale devraient collaborer à une stratégie globale visant à mobiliser des efforts menés au niveau international pour parvenir à un cessez-le-feu, régler le conflit interne et mettre en place un processus de paix ouvert; à encourager la paix et la réconciliation au Libéria ainsi que l’élaboration d’un processus politique stable et démocratique; à résoudre les problèmes humanitaires; à lutter contre les entrées illicites d’armes dans le pays; et à garantir les droits fondamentaux. Le Conseil est déterminé à soutenir les efforts des acteurs régionaux et internationaux dans l’application de cette stratégie.
Cette stratégie reposerait sur deux grands principes. En premier lieu, elle doit recevoir l’apport des principaux acteurs régionaux et s’inscrire dans une approche globale de la construction d’un système intégré de paix et de sécurité régionales. En deuxième lieu, la paix et la sécurité dans la région de l’Union du fleuve Mano exigent que le Président du Libéria s’engage de manière constructive aux côtés de la communauté internationale pour oeuvrer à la réconciliation nationale et à la réforme politique au Libéria.
En partant de ces principes, le Conseil de sécurité s’attachera à élaborer une stratégie coordonnée avec la communauté internationale pour poursuivre les objectifs suivants :
S’agissant de la perspective régionale, le Conseil de sécurité continuera d’appuyer le processus de Rabat mené sous l’égide du Roi du Maroc et encouragera vivement la Guinée, la Sierra Leone et le Libéria à donner suite à leurs engagements concernant la prise de mesures de confiance et la mise en oeuvre de mesures de sécurité le long de leurs frontières communes. À ce propos, le Conseil de sécurité considère qu’il y a tout lieu de se féliciter des initiatives tendant à établir un dialogue direct, prises par les présidents de ces trois pays, afin de stimuler le processus de Rabat. Le Conseil de sécurité demande instamment au Président du Libéria de participer activement à ces réunions.
Le Conseil de sécurité exprime son appui résolu au moratoire de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) concernant les armes légères dans la région. Il encourage les pays de la CEDEAO à honorer intégralement ces engagements et à renforcer les mécanismes d’application afin de mettre fin au commerce illicite d’armes, en particulier aux envois d’armes légères à destination du Libéria.
Le Conseil de sécurité salue les efforts déployés par la CEDEAO ainsi que par le Groupe de contact international sur le Libéria, récemment créé, pour promouvoir la paix et la stabilité au Libéria et dans la région du fleuve Mano. Le Conseil estime que la participation de ces mécanismes est vitale pour la réconciliation nationale et la réforme politique.
À ce propos, le Conseil de sécurité encourage les États membres de l’Union africaine et de la CEDEAO à promouvoir activement la mise en oeuvre intégrale des arrangements en matière de sécurité existants ainsi que d’autres initiatives visant à appuyer ces arrangements entre les pays de l’Union du fleuve Mano.
Le Conseil de sécurité exige de nouveau que le Gouvernement libérien se plie aux résolutions 1343 (2001) et 1408 (2002) et que toutes les parties respectent les mesures que ces résolutions ont imposées et élargies. Il importe de satisfaire aux exigences visées dans ces résolutions afin qu’il puisse être mis fin à ces mesures conformément auxdites résolutions. Le Conseil prend note des positions de l’Union africaine et de la CEDEAO au sujet du régime de sanctions au Libéria. Il maintiendra les sanctions à l’étude afin de s’assurer de leur conformité à la présente déclaration et aux résolutions 1343 (2001) et 1408 (2002), et continuera de déterminer si les sanctions ont des répercussions d’ordre humanitaire sur la population libérienne.
Le Conseil de sécurité engage tous les États de la région à honorer leurs engagements et à empêcher des individus armés de se servir de leur territoire national pour préparer et commettre des attaques contre des pays voisins. Le Conseil rappelle de nouveau à tous les États qu’ils ont l’obligation d’appliquer l’embargo sur la vente ou la livraison d’armes et de matériels militaires au Libéria imposé par sa résolution 1343 (2001). Il souligne que cet embargo s’applique à toutes les ventes ou livraisons à tout destinataire du Libéria, y compris tous les acteurs non étatiques tels que le LURD.
S’agissant d’un engagement constructif au Libéria, en particulier par le Président du Libéria pour ce qui est de mettre fin à la violence et de favoriser la réconciliation nationale, le Conseil de sécurité est déterminé à promouvoir ce qui suit :
Un rôle élargi du Bureau des Nations Unies pour l’appui à la consolidation de la paix au Libéria et une participation plus active du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest récemment créé. À cet égard, le Conseil se félicite de la nomination du nouveau Représentant spécial du Secrétaire général au Libéria et prie instamment le Gouvernement libérien de coopérer pleinement aux activités du Bureau des Nations Unies au Libéria. Le Conseil souhaite que celui-ci exécute entre autres les tâches suivantes :
–Prêter assistance aux autorités et à la population libériennes en vue du renforcement des institutions démocratiques et de l’état de droit, notamment par la promotion d’une presse indépendante et d’un environnement dans lequel les partis politiques puissent opérer librement au Libéria;
–Soutenir et suivre la préparation d’élections libres et régulières en 2003, en particulier par la promotion d’une commission électorale indépendante;
–Promouvoir et surveiller le respect des droits de l’homme au Libéria, y compris grâce à un dialogue constructif avec le Gouvernement libérien, en prêtant une attention particulière aux services à l’intention de groupes locaux de la société civile et en encourageant la constitution d’une commission indépendante et fonctionnelle des droits de l’homme;
–Promouvoir la réconciliation nationale et la résolution du conflit, notamment en appuyant les initiatives sur le terrain;
–Aider le Gouvernement libérien à appliquer les accords de paix qui seront adoptés;
–Entreprendre une campagne d’information afin de présenter une image fidèle des politiques et activités de l’Organisation des Nations Unies concernant le Libéria.
Le Conseil de sécurité a recommandé par écrit au Secrétaire général de renforcer le mandat du Bureau des Nations Unies au Libéria, en lui demandant de faire rapport tous les trois mois.
Le Conseil de sécurité considère qu’un effort urgent est nécessaire pour améliorer la situation humanitaire grave au Libéria, en particulier pour répondre aux besoins des personnes déplacées et des réfugiés. À ce propos, il prie instamment le Gouvernement libérien et les combattants, en particulier le LURD, d’autoriser les organismes humanitaires des Nations Unies et les organisations non gouvernementales à accéder librement aux zones où se trouvent des réfugiés ayant besoin d’assistance et où les droits de l’homme doivent être protégés. Le Conseil de sécurité encourage également les pays voisins du Libéria à continuer à permettre aux organisations humanitaires internationales et aux groupes humanitaires non gouvernementaux d’accéder aux zones frontalières où se trouvent des réfugiés et des personnes déplacées. Il demande à tous les États de la région de respecter scrupuleusement le droit international dans le traitement des réfugiés et des personnes déplacées.
Le Conseil de sécurité prie instamment les organisations humanitaires et les pays donateurs de continuer de fournir des secours humanitaires aux réfugiés et aux personnes déplacées.
Le Conseil de sécurité est déterminé à appuyer des efforts aux fins de la promotion de la réconciliation nationale, du rétablissement de la paix et de l’instauration de nouvelles conditions de stabilité politique interne. À cet effet, il prie instamment le Gouvernement libérien et le LURD de conclure un accord de cessez-le-feu et un processus de paix global en prévoyant notamment le désarmement et la démobilisation des combattants et une réforme complète du secteur de la sécurité. À ce propos, le Conseil demande à tous les États de s’abstenir de fournir un appui militaire à quelque partie que ce soit au Libéria et d’accomplir tout acte susceptible d’aggraver la situation aux frontières entre le Libéria et les pays limitrophes.
Le Conseil de sécurité prie le Gouvernement libérien de s’employer à créer un environnement propice au succès d’une véritable conférence de réconciliation nationale à laquelle tous les groupes de la société libérienne, sur le territoire national et à l’étranger, pourront largement participer.
Le Conseil de sécurité demande également au Gouvernement libérien de prendre les mesures nécessaires et d’appliquer les réformes politiques indispensables à la tenue en 2003 d’élections universelles, libres, régulières, transparentes et ouvertes à tous. Il souligne qu’il importe que tous les partis politiques participent largement à ce processus et que tous les dirigeants politiques retournent au Libéria.
Le Conseil de sécurité demande à la communauté internationale d’examiner comment elle peut fournir une assistance financière et technique au programme de désarmement, de démobilisation et de réinsertion qui pourrait être mis sur pied dans le cadre de la cessation des hostilités et de l’attachement à la réforme politique au Libéria. Une attention et des ressources particulières doivent être données en vue de dispenser aux femmes et aux enfants une assistance dans le cadre de leur réinsertion et d’offrir aux jeunes ex-combattants et aux enfants soldats la possibilité d’être pleinement réinsérés dans la société.
Le Conseil de sécurité considère que le succès d’une stratégie internationale globale au Libéria dépend dans une large mesure de la participation directe et active de l’Union africaine, de la CEDEAO et du Groupe de contact international, oeuvrant avec les bureaux des Nations Unies dans la région conformément à leurs mandats.
Le Conseil de sécurité demande au Gouvernement libérien de coopérer avec toutes ces actions afin de trouver une solution pacifique au conflit, de réformer ses processus politiques et de s’acquitter des responsabilités humanitaires, sociales et économiques qui lui incombent envers le peuple libérien. La coopération du Libéria est essentielle pour que les relations de ce pays avec ses voisins soient pleinement rétablies et que ses relations avec la communauté internationale soient normalisées.
Tandis que le Gouvernement libérien progresse avec la communauté internationale dans la réalisation des objectifs énoncés dans la présente déclaration, le Conseil demande à la communauté internationale d’examiner les moyens de soutenir le développement économique futur du Libéria, afin d’améliorer le bien-être de la population du pays.
Convaincu que la paix au Libéria mettra fin aux souffrances du peuple libérien et constituera le fondement d’une paix durable dans la région, le Conseil de sécurité maintiendra son engagement aux côtés du Gouvernement et du peuple libériens.
Le Conseil de sécurité prie le Secrétaire général de suivre la situation au Libéria et de le tenir au courant des mesures prises aux fins de la réalisation des objectifs énoncés dans la présente déclaration. Il envisage d’envoyer une mission dans la région, qui se rendra entre autres au Libéria afin d’évaluer la situation au cours du premier semestre de 2003.»
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