CONSEIL DE SECURITE : PRIMAUTE DU DROIT ET REFORMES ECONOMIQUES, DEUX PRIORITES FIXEES POUR LA BOSNIE-HERZEGOVINE
Communiqué de presse CS/2379 |
Conseil de sécurité
4631ème séance - matin
CONSEIL DE SECURITE : PRIMAUTE DU DROIT ET REFORMES ECONOMIQUES,
DEUX PRIORITES FIXEES POUR LA BOSNIE-HERZEGOVINE
A la veille de la transition, prévue le 1er janvier 2003, de la Mission des Nations Unies en Bosnie-Herzégovine (MINUBH) à la Mission de Police de l’Union européenne, le Conseil de sécurité, présidé par le Représentant permanent du Cameroun, M. Martin Belinga-Eboutou, a invité le Haut Représentant chargé d’assurer le suivi de l’application de l’Accord de paix et Représentant spécial de l’Union européenne, M. Paddy Ashdown, ainsi que le Représentant spécial du Secrétaire et Coordonnateur des opérations de l’ONU, M. Jacques Paul Klein, à l’informer de l’évolution de la situation.
Cette évolution, les deux personnalités l’ont illustrée par le faible taux de participation –55%- aux élections du 5 octobre qui, sept ans après la signature de l’Accord de paix de Dayton, sont les premières à être organisées par les autorités bosniaques elles-mêmes et à donner aux élus un mandat de 4 ans. Selon le Haut Représentant et le Représentant spécial, les abstentions constituent un « non-vote » de protestation contre la politique et les politiciens, en général, et surtout devant la lenteur des progrès.
Les élections ayant donné lieu à une répartition presque égale des sièges entre partis nationalistes et non nationaliste, le Représentant spécial a expliqué que les voix qui se sont reportées sur les parties nationalistes ne sont pas des voix pro Milosevic ou pro Tudjman ou contre le processus de paix, mais celles d’électeurs qui ont voulu sanctionner la criminalité, la corruption et un certain immobilisme. La nouvelle coalition gouvernementale, qui devrait être formée aux environs du mois de mars, sera jugée non pas sur ses promesses mais sur ses actes, ont prévenu le Haut Représentant et le Représentant spécial.
Aussi, ces personnalités ont-elles fixé deux priorités, à savoir l’instauration de la primauté du droit par le renforcement des capacités humaines et institutionnelles et les réformes économiques. En Bosnie-Herzégovine, a déclaré le Représentant spécial du Secrétaire général, nous avons appris le rôle de l’état de droit comme un fondement de la démocratie dans les situations post-conflictuelles. Ce qu’il faut maintenant, a déclaré à son tour le Haut Représentant, ce sont des fonds, une présence militaire continue, l’engagement de personnes qualifiées, et surtout, la volonté politique. Si nous voulons, d’ici la fin de l’année, remettre aux Bosniaques une «Bosnie qui fonctionne», la communauté internationale doit apporter son appui.
Ces propos ont été pleinement appuyés par les délégations, notamment par la représentante du Danemark qui, au nom de l’Union européenne, a souligné l’importance d’une coopération et d’une coordination renforcées entre les différents acteurs internationaux en Bosnie-Herzégovine. Par son Accord sur le Pacte de stabilité et d’association et sa Mission de police, l’Union européenne continuera à travailler avec les autorités du pays à l’établissement d’une société multiethnique viable, a souligné la représentante.
La formation du nouveau gouvernement, la création d’une armée commune aux trois entités, le poids politique des partis nationalistes, la coopération avec le Tribunal spécial pour l’ex-Yougoslavie, les obstacles au retour des réfugiés et des personnes déplacées, l’établissement d’un système douanier efficace ou encore la lutte contre le crime organisé ont été au cœur des questions auxquelles ont répondu le Haut Représentant et le Représentant spécial.
LA SITUATION EN BOSNIE-HERZEGOVINE
M. PADDY ASHDOWN, Haut Représentant chargé d’assurer le suivi de l’Accord de paix relatif à la Bosnie-Herzégovine et Représentant spécial de l’Union européenne, a souligné qu’en dépit de progrès incontestables, la situation de la région reste fragile et le processus de réconciliation est loin d’être achevé. Evoquant les dernières élections, M. Ashdown a souligné qu'il s'agissait des premières élections organisées par les Bosniaques eux-mêmes. Le taux de participation était certes décevant, a-t-il convenu, mais il ne fait que refléter une grande frustration et une certaine lassitude après six élections tenues en six ans. Ce qu’il faut retenir, a-t-il poursuivi, c’est que les partis nationalistes ont perdu une partie de leur électorat. Les résultats des élections doivent donc être interprétés comme un vote de protestation contre la politique et les politiciens en général et surtout devant la lenteur des progrès. Le nouveau gouvernement doit tenir compte de ce sentiment tout comme la communauté internationale.
Parlant en particulier de sa mission, M. Ashdown a indiqué que les principaux défis demeurent l’instauration de la règle de droit et la création d’emplois. S’agissant du premier défi, il a fait part de la réorganisation des organes de la communauté internationale en Bosnie-Herzégovine et de la création de différents instruments nécessaires à la logique «enquête-incarcération». En janvier, la Mission de police de l’Union européenne devrait aider les autorités du pays à établir des infrastructures durables de l’ordre public. Il reste encore, a indiqué M. Ashdown, à mettre en place une législation centrale dans le domaine de la justice et de s’assurer, pour ce faire, de l’appui de la communauté internationale. La création, en janvier 2003, d’une nouvelle Cour de la Bosnie-Herzégovine est aujourd’hui au centre des efforts ainsi que la finalisation du code pénal et du code de procédure pénale. Là encore, a souligné M. Ashdown, la communauté internationale aura à fournir des experts, des ressources ainsi que des juges et des procureurs pour former le personnel local.
En ce qui concerne la création d’emplois, M. Ashdown s’est surtout attardé sur la réforme économique. En la matière, des lois importantes ont été adoptées au cours de ces derniers mois et des mesures déterminantes ont été prises pour lutter contre la corruption et prévenir ainsi la fatigue des donateurs. La lutte contre la corruption exigeant des institutions fortes, M. Ashdown a annoncé son intention de proposer la fin du système de rotation ethnique au sein du Conseil des Ministres qui a donné lieu à une «chaise musicale» ministérielle porteuse d’instabilité politique. Une autre proposition vise à assurer au Président des fonctionnaires compétents. Ces réformes structurelles conjuguées à des réformes économiques agressives sont la clef des changements dans le domaine de la création d’emplois, a souligné M. Ashdown.
Si nous souhaitons, d’ici la fin de l’année remettre aux Bosniaques une « Bosnie qui fonctionne », nous avons besoin de l’appui de la communauté internationale, en particulier pour le renforcement des capacités institutionnelles, a déclaré M. Ashdown. A cet égard, il a fait part de son intention d’élaborer un plan de mise en œuvre qui précisera les tâches du Bureau du Haut Représentant et définira la manière de procéder. Le Haut Représentant s’est félicité que l’Union européenne soit de plus en plus à la tête des actions entreprises en Bosnie-Herzégovine tout comme dans le reste des Balkans. La Bosnie-Herzégovine, a-t-il prévenu, doit demeurer une préoccupation commune de toute la communauté internationale, mais surtout des pays voisins. Ce qu’il faut maintenant ce sont des fonds, une présence militaire constante et l’engagement de personnes qualifiées. Il faut surtout une volonté politique pour assurer le succès qui est à portée à condition de maintenir le même rythme, a conclu M. Ashdown.
M. JACQUES PAUL KLEIN, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Bosnie-Herzégovine, a évoqué la situation politique de la Bosnie-Herzégovine au lendemain des premières élections ainsi que le processus de transition vers la mise en place de la Mission de police de l’Union européenne. Il a souligné la responsabilité première du Conseil de sécurité dans la supervision du processus de mise en œuvre des accords de paix de Dayton. S’agissant des résultats des récentes élections, il a précisé que les voix qui se sont portées sur les partis nationalistes ne sont pas des voix pro Milosevic ou de Tudjman ou qui mettent en cause le processus de paix; mais il s’agit tout simplement de voix sanctionnant la criminalité, la corruption et une certaine inaction des « non-nationalistes » les moins performants. En ce qui concerne la coopération avec les autorités locales, il a souligné que la MINUBH a profité d’une meilleure coopération de la part des autorités dites « nationalistes » de la République Srpska et de la région de Mostar, que de la part de la coalition « non-nationaliste » de la Fédération du Ministère de l’intérieur qui connaît des débuts difficiles. Il s’est inquiété que le Ministère de l’intérieur et des partis politiques cherchent à exercer des pressions sur des commissaires de police sélectionnés dans le cadre d’un processus ouvert sur la base de leurs compétences professionnelles et de leur neutralité politique.
Par ailleurs, il s’est dit heureux de constater que l’état de droit ait été placé au centre du programme de réforme en précisant que l’intervention de l’ONU se concentre sur la restructuration et la réforme de la police qui n’est qu’un des éléments de la promotion de la primauté du droit. Il a évoqué les efforts de la MINUBH en matière de lutte contre la prostitution et les maisons closes. Il a précisé que le taux de criminalité de la Bosnie-Herzégovine est aujourd’hui inférieur à celui de nombreux pays de l’Europe de l’Ouest. La sécurité n’est plus un obstacle au retour des réfugiés et des personnes déplacées. Dans le même ordre d’idées, il a précisé que la Bosnie-Herzégovine n’était plus le point d’entrée principal en Europe pour les immigrants clandestins. En ce qui concerne la réforme de la police, il a précisé qu’à la date du 18 octobre, 16 832 officiers de police qui occupaient des fonctions à titre provisoire en 1999, ont été titularisés. 500 à 600 de ces officiers n’ont pu obtenir de titularisation pour diverses raisons: un domicile illégal, faux diplômes ou conduite durant la guerre. A ceux-ci s’ajoutent 234 officiers de police qui ont été destitués pour leur comportement durant la guerre.
En outre, le Représentant spécial a évoqué la transition en janvier 2003 de la MINUBH, vers la Mission de police de l’Union européenne. A cet égard, il a précisé qu’une équipe de planification de 30 personnes de cette mission travaille de concert avec la MINUBH depuis le mois de mai. Il s’est dit heureux de constater que la Mission de l’Union européenne ait accepté d’accorder la priorité à un service de douane efficace et à une bonne gestion de mesures de lutte contre le marché noir. En conclusion, il a rendu hommage aux hommes et femmes originaires de 96 nations et aux 43 pays fournisseurs de contingents de police qui ont contribué au grand succès de la MINUBH. Nous avons appris de nombreuses leçons en Bosnie-Herzégovine, notamment sur l’importance de la création d’un État de droit comme fondement solide de la démocratie dans les situations post-conflictuelles. Je forme le vœu, a-t-il dit, que nous sachions tenir compte de ces expériences lorsque nous aurons à faire face à de nouvelles situations de grande complexité.
M. KIM TRAAVIK (Norvège) a félicité les autorités bosniaques pour leur organisation, couronnée de succès, de l’élection générale du 5 octobre. Toutefois le nombre de votants comme les préférences manifestées par l’électorat suscitent de nombreuses interrogations. Le taux de participation très bas déçoit pour des élections qui sont les premières depuis quatre ans. Ensuite les résultats de l’élection indiquent le soutien constant à tous les niveaux aux trois partis politiques à dominantes ethnique et nationaliste: le HDZ, le SDA et le SDS. Ce scrutin ne saurait être considéré comme l’expression d’élections libres et équitables, mais plutôt, comme le suggère le Haut Représentant Lord Ashdown, comme d’une protestation à l’encontre du manque de clairvoyance de la communauté internationale. Si cette dernière se doit de réagir en prenant les mesures adéquates pour aider la Bosnie-Herzégovine à aller de l’avant, c’est aux autorités locales de faire la preuve de leur volonté politique en s’engageant dans un processus de réforme. La Norvège soutient les six tâches prioritaires incombant aux Hauts Représentants pour mettre en œuvre cette réforme qui doit donc s’appliquer respectivement au Conseil des ministres; au système des revenus; au système politique par l’établissement de Commissions parlementaires; au milieu des affaires par la suppression de la double taxation dans les frontières nationales; au système judiciaire par la création d’une Cour d’Etat efficace; enfin, au service civil. Le représentant de la Norvège a rappelé en conclusion à quel point l’engagement financier de la communauté internationale était indispensable et devait se donner pour priorité le soutien et le développement des capacités institutionnelles locales, en collaboration avec les autorités de Bosnie-Herzégovine, afin d’aider celle-ci à rejoindre la communauté des nations.
M. RICHARD. S. WILLIAMSON (Etats-Unis) s’est interrogé sur la manière dont le Haut Représentant ripostera au cas où des coalitions nationalistes verraient le jour après les élections d’octobre et notamment si l’on devait découvrir que des liens ont été établis avec des criminels de guerre ? Quelle est la capacité de la Mission de police de l’Union européenne d’assumer les tâches de police, notamment en matière de lutte contre le terrorisme, de lutte contre la corruption et le trafic de personnes? Y a-t-il un problème particulier en ce qui concerne la liquidation de la MINUBH d’ici la fin de l’année? a-t-il encore demandé. M. MICHEL DUCLOS (France) a rendu hommage au travail du Représentant permanent Jacques Paul Klein et à l’excellente coopération entre l’Union européenne et les Nations Unies et qui permet à l’Union européenne de prendre la relève le 1er janvier prochain dans les meilleures conditions possibles. En ce qui concerne les récentes élections, il a partagé les conclusions de M. Asdown. Il nous semble, a-t-il ajouté, que nous devons appeler et inciter les futurs dirigeants à tenir compte du message des dernières élections et à s’engager dans la voie des réformes. Nous devons soutenir les priorités de réforme préconisées par M. Asdown qui se résument par la formule "justice et emplois". Il a mis l’accent sur la lutte contre le crime organisé qu’il a définie comme une action prioritaire à mener. Seule la mobilisation de tous les acteurs de la communauté internationale permettra à cette transition d'être couronnée de succès.
M. RICHARD RYAN (Irlande) s’est félicité du bon climat dans lequel se sont déroulées les élections du 5 octobre et a rappelé l’échec du gouvernement sortant en matière de réforme. Il est important que les élus s’engagent à adopter des réformes, comme un préalable au développement économique à long terme. Il a estimé par ailleurs qu’il fallait intensifier la lutte contre la corruption et le crime organisé. Saluant l’importance de la Mission de police de l’Union européenne qui témoigne de l’implication de l’Europe en Bosnie-Herzégovine, le représentant s’est félicité d’autre part du retour croissant des réfugiés, qu’il a défini comme un témoignage de l’évolution très positive de la sécurité. Il est important, a-t-il ajouté, que les gouvernements de la région coopèrent pleinement avec le Tribunal pénal international pour l’Ex-Yougoslavie.
Pour sa part, M. ADAM THOMSON (Royaume-Uni) a souhaité que la primauté du droit soit la plus haute priorité des efforts déployés par la communauté internationale en Bosnie-Herzégovine. Après avoir insisté sur l’importance de l’aide pratique octroyée par la communauté internationale, le représentant du Royaume-Uni a expliqué que dans le contexte des réformes économiques, il fallait redoubler d’efforts. Il a lancé un appel au nouveau gouvernement pour qu’il souscrive aux recommandations du Haut Représentant. Commentant le vote de protestation du 5 octobre, le représentant a estimé que le prochain gouvernement pourra changer les choses s’il garantit des résultats en ce qui concerne les réformes. Qu’en est-il, s’est-il interrogé pour conclure, des ambitions politiques des nationalistes de la République Srpska et comment peuvent-elles influer sur la prochaine coalition gouvernementale? M. JIANG JIANG (Chine) s’est lui aussi dit favorable à ce que la primauté du droit et les réformes économiques soient les priorités en Bosnie-Herzégovine.
M. ALEXANDER V. KONUZIN (Fédération de Russie) a déclaré que la condition essentielle est d’assurer la stabilité de la Bosnie-Herzégovine. Nous sommes convaincus, a-t-il ajouté, que les tentatives de révision des Accords de Dayton est contre-productive. Il s’est félicité du succès des élections du 5 octobre et a déclaré qu’il partageait les conclusions des intervenants sur le caractère de ces élections. Il a souligné la nécessité d’assurer la primauté du droit, la réforme économique, le renforcement des institutions d’État et la primauté du droit sur la base d’un consensus de toutes les parties bosniaques. Il a exhorté les différentes parties de la Bosnie à faire fi de leurs différends et des intérêts particuliers de toutes les ethnies et à faire preuve d’un esprit de coopération. Il a formé le vœu que la communauté internationale continue de suivre de près l’évolution de la situation en Bosnie-Herzégovine. Les tentatives d’imposer aux parties bosniaques une seule armée va à l’encontre, non seulement des Accords de Dayton, mais également de la constitution bosniaque elle-même.
A son tour, M. STEFAN TAFROV (Bulgarie) a souscrit à l’analyse faite sur les résultats des élections du 5 octobre. Cette lassitude démocratique, a-t-il dit, est un signal dont il faut tenir compte et qui présente une raison de plus de maintenir une présence internationale forte dans les années à venir. Toutefois, a-t-il convenu, l’avenir du pays, notamment dans le domaine économique, est dans les mains des Bosniaques eux-mêmes. Or, l’immobilisme économique continue de compromettre les progrès en la matière, a-t-il constaté en appuyant les deux priorités fixées par le Haut Représentant. M. Tafrov a ensuite posé la question de savoir quelle place le problème de la traite des êtres humains occupe dans la stratégie relative à la primauté du droit. Appelant pour finir à une collaboration accrue des autorités de Bosnie avec le Tribunal pour l’ex-Yougoslavie, le représentant a estimé que l’ensemble suit une évolution positive, grâce notamment au Pacte de stabilité.
M. ALFONSO VALDIVIESO (Colombie) a évoqué les inquiétudes formulées suite aux suffrages obtenus par les partis nationalistes lors des dernières élections en Bosnie-Herzégovine. Il a déclaré que, même si les tendances nationalistes avaient triomphé, cela n’aurait en rien remis en cause la mission de maintien de la paix. Nous ne pouvons pas imposer la démocratie que nous souhaitons et devons respecter et tenir compte des résultats des urnes. Il a demandé des précisions sur la nécessité d’accélérer le rythme des changements et des réformes, notamment sous la forme du recours évoqué par M. Ashdown, à un gouvernement central avec un poste unique de Premier Ministre. Le représentant de la Colombie a demandé ce qu’il était possible de faire dans ce domaine et ce qui l’est moins?
M. MIKHAIL WEHBE (République arabe syrienne) a remercié MM. Klein et Ashdown des efforts entrepris pour relever la Bosnie-Herzégovine en tant que préalable à son adhésion à l’Union européenne. Il s’est félicité que l’instauration de la justice et la primauté du droit soient considérées comme des priorités du processus de relèvement. En ce qui concerne les résultats du scrutin électoral, il a demandé des informations sur la participation des jeunes aux récentes élections. Il a également demandé quels étaient les obstacles à la mise en place de la police et de l’armée compte tenu de la limitation des moyens. Il s’est interrogé sur la stabilité de la Bosnie-Herzégovine en rappelant que c’est la situation économique qui va conditionner la stabilité sociale. Dans ce contexte, il a demandé des précisions sur la nature des relations de la Bosnie-Herzégovine avec ses voisins. M. BIJAYEDUTH GOKOOL (Maurice) s’est dit heureux de constater que ces premières élections en Bosnie-Herzégovine ont été un succès. Il a pris note qu’une portion non négligeable de la population n’a pas participé aux élections. Il a demandé des précisions sur ce qui est prévu pour traiter du problème de la crise de la dette de la Bosnie-Herzégovine et sur les moyens d’attirer l’investissement étranger.
M. ADOLFO AGUILAR ZINSER (Mexique) a appelé les partis politiques vainqueurs des dernières élections à assumer leurs fonctions, et à ne pas fuir leurs responsabilités découlant des principes de l’Accord de Dayton en matière de mise en place d’une société multiethnique. Il convient d’avoir des priorités de travail claires pour ouvrir la voie aux réalisations et aux résultats. Il sera nécessaire de mettre en place des réformes en profondeur pour structurer la vie des institutions bosniaques en conformité avec les objectifs que nous nous sommes fixés. Il s’est interrogé sur le rôle du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, car c’est de son succès et de la coopération de toutes les autorités bosniaques que va dépendre le succès de la primauté du droit.
M. MAMADY TRAORE (Guinée) a lancé un appel à la communauté internationale pour qu’elle apporte le soutien requis aux réformes en cours en Bosnie-Herzégovine. Commentant les élections du 5 octobre, il a salué leur bon déroulement tout en soulignant que le plus dur reste à faire et qu’il faut par exemple rétablir la confiance de ceux qui ont «boudé» ces élections. La communauté internationale doit accorder son plein appui aux nouvelles autorités gouvernementales pour leur permettre de relever les défis auxquels elles sont confrontées. A son tour, le brigadier général M. YAP ONG HENG (Singapour) a appuyé les deux priorités fixées par le Haut Représentant. Le prochain gouvernement doit mettre en œuvre les réformes visant la primauté du droit, a souhaité le représentant en réitérant la nécessité d’une transition harmonieuse du GIP à la Mission de police de l’Union européenne. A ce propos, il a demandé quels étaient les problèmes de cette transition. Intervenant également, M. MARTIN BELINGA-EBOUTOU (Cameroun) a souhaité savoir comment les autres pays de la sous-région ont accueilli les résultats des élections du 5 octobre. La future coalition gouvernementale, a-t-il aussi demandé, permettra-t-elle de poursuivre la coopération internationale dans la lutte contre le crime organisé?
A son tour, Mme ELLEN MARGRETHE LOJ (Danemark) au nom de l’Union européenne, a regretté la faible participation aux élections du 5 octobre. Le peuple bosniaque, a-t-elle reconnu, a indiqué sa frustration devant les politiques mises en œuvre et la lenteur des réformes économiques. Elle a souhaité savoir à quel moment faut-il espérer la formation d’un nouveau gouvernement. Parlant du crime organisé, la représentante a demandé ce qu’il en est des préparatifs de la conférence prévue à Londres le 25 novembre. Comment l’Union européenne peut-elle contribuer à la réussite de cette conférence? s’est-elle interrogée avant de s’attarder sur la question des personnes déplacées. Elle a dénoncé l’obstructionnisme local au retour et s’est interrogée sur les obstacles au retour des réfugiés et les plans relatifs à son financement.
M. IVAN SIMONOVIC (Croatie) a déclaré que la réforme est la clef du développement durable de la Bosnie-Herzégovine. Il s’est félicité du succès des élections du 5 octobre dernier et a formé le vœu que les partis politiques appuient clairement les réformes, notamment en matière de justice et d’emploi. Il s’est interrogé sur le caractère durable de la stabilité de la Bosnie-Herzégovine dans laquelle les criminels de guerre Mladic et Karadic sont toujours en fuite. Dans ce contexte, il a demandé quelle attitude le Conseil de sécurité souhaite adopter à cet égard. M. DEJAN SAHOVIC (Yougoslavie) a déclaré que son pays attache une signification particulière aux relations à développer avec la Bosnie-Herzégovine. Il a souligné l’amélioration constante de ces relations comme en témoigne le récent accord de libre-échange signé entre les deux pays relatif à la libre circulation des personnes et des marchandises. Il s’est dit confiant que la Mission de police de l’Union européenne jouera un rôle tout aussi efficace que la MINUBH. Il a précisé que la Yougoslavie se réjouit de travailler avec le nouveau Gouvernement de la Bosnie-Herzégovine pour promouvoir les relations de bon voisinage.
Répondant aux questions, le Haut Représentant a réitéré ses appels à une assistance pratique aux programmes relatifs à la justice. Pour s’attaquer avec sérieux au vaste réseau du crime organisé, a-t-il insisté, il faut assurer une protection efficace des témoins et dépêcher des procureurs et des juges à même de former leurs collègues bosniaques. La Conférence de Londres sur le crime organisé dans les Balkans est un jalon important en la matière qui doit convaincre la communauté internationale d’apporter une aide pratique. Au sujet des obstacles au retour des réfugiés, il a cité la situation économique, l’état de délabrement de leurs anciennes maisons et le manque de ressources nécessaires aux travaux de réhabilitation.
Parlant des élections du 5 octobre, il a convenu que les plus puissants aujourd’hui sont ceux qui viennent des parties nationalistes. Toutefois, le nouveau gouvernement doit être jugé à l’aune de ses actions et pas de son étiquette politique. Il est important, a prévenu le Haut Représentant, d’être plus direct et de consacrer des ressources à la lutte contre la corruption et la criminalité. S’agissant de la faible participation aux élections, il a reconnu sa déception tout en soulignant que le taux de 55% est bien plus élevé que les taux que l’on voit parfois dans les plus grandes démocraties. Il est normal, a-t-il expliqué, de voir une lassitude des électeurs après six élections en six ans qui n’ont pourtant pas donné lieu à des réformes visibles. Il s’agit là d’un message pour accélérer les réformes et il faut en tenir compte.
Quant à l’établissement d’un gouvernement non nationaliste en Republika Srpska, le Haut Représentant a répondu que la chose est possible compte tenu des rapports de force. Si les partis nationalistes se disent attachés à la réforme, il faut toutefois, compte tenu du passé, rester prudent. Répondant au représentant de la Fédération de Russie, le Haut Représentant a réitéré son ferme engagement aux dispositions de l’Accord de Dayton. Aujourd’hui, pour juguler la crise économique, la seule voie est l’attraction des investissements étrangers. Répondant enfin à la Syrie, le Haut Représentant s’est dit favorable à une réforme de l’armée conformément aux conditions posées par l’OTAN. Il y a suffisamment de latitude pour finaliser les choses dans les 18 mois à venir, a-t-il affirmé. Il a conclu sur l’importance de la nouvelle Cour pour juger les crimes de guerre et sur les prévisions quant à la formation d’un nouveau gouvernement. Il a répondu que compte tenu de la répartition « équitable » des sièges entre partis nationalistes et non nationalistes, le nouveau gouvernement ne pourrait être formé avant le mois de mars 2003. Le Haut Représentant a encore tenu à souligner l’importance de la coopération régionale pour l’avenir de la Bosnie-Herzégovine.
M. JACQUES PAUL KLEIN, Représentant spécial du Secrétaire général pour la Bosnie-Herzégovine, a déclaré que la Mission de police de la MINUBH se déroule parfaitement et que la transition vers la Mission de police de l'Union européenne ne devrait poser aucun problème puisque l’Union européenne dispose déjà de 5000 policiers sur le terrain. En ce qui concerne MM. Mladic et Karadzic, il a déclaré qu’il faut faire preuve de volonté politique et former le vœu que le Conseil de sécurité adresse un mandat clair demandant de trouver, arrêter et faire comparaître Karadzic et Mladic devant le Tribunal pénal international pour l’Ex-Yougoslavie. Il a rappelé qu’il est accordé une priorité à la primauté du droit dans toute démarche de relèvement de la Bosnie-Herzégovine. En ce qui concerne, l’action de la MINUBH, il a précisé que la majorité de la population de la Bosnie-Herzégovine approuve sa politique.
* *** *