LE REPRESENTANT SPECIAL EN AFGHANISTAN INSISTE SUR LA NECESSITE DE VOIR LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE CONCRETISER TOUS SES ENGAGEMENTS
Communiqué de presse CS/2361 |
Conseil de sécurité
4611e séance – matin
LE REPRESENTANT SPECIAL EN AFGHANISTAN INSISTE SUR LA NECESSITE DE VOIR
LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE CONCRETISER TOUS SES ENGAGEMENTS
Il ne faut céder ni à la panique, ni à la complaisance si l’on veut
obtenir une paix et une prospérité durables en Afghanistan, avertit M. Brahimi
«Les progrès que l’Afghanistan a accomplis au cours de l’année qui s’achève ne pourront être consolidés si ce pays ne reçoit pas un soutien engagé et durable de la communauté internationale», a clairement mis en garde le Représentant spécial du Secrétaire général en Afghanistan, M. Lakhdar Brahimi, alors qu’il informait, ce matin, le Conseil de sécurité de l’évolution de la situation sur place. A ses yeux, la tentative d’assassinat perpétrée le 5 septembre contre le Président Hamid Karzai et l’attentat à la bombe commis le même jour à Kaboul illustrent une nouvelle fois la précarité de l’environnement de sécurité à laquelle l’Administration transitoire fait face. Le peuple afghan garde cependant l’espoir de voir ses conditions de vie s’améliorer, et le prestige et la crédibilité de l’Administration transitoire se joueront sur sa capacité à répondre aux questions urgentes de sécurité et de reconstruction du pays. Si ces efforts venaient à échouer, la division du pays s’accentuerait, l’extrémisme reprendrait le dessus, et des pays, groupes et individus pourraient de nouveau profiter de la situation pour inciter à la reprise de la violence.
Arguant que l’Administration de transition ne peut faire seule face aux besoins de sécurité et de reconstruction et que les projets majeurs d’infrastructures, notamment les ponts et les routes dont l’Afghanistan a besoin, ne peuvent être réalisés par ce pays lui-même, M. Brahimi s’est réjoui de l’annonce d’une aide de 180 millions de dollars faite la semaine dernière par les Etats-Unis, le Japon et l’Arabie saoudite. Il ne faut cependant pas oublier que l’Afghanistan ne dispose toujours pas du budget national dont il a besoin. Sans création massive d’emplois, l’Afghanistan ne pourra faire face aux exigences énormes de la reconstruction et du rétablissement de la paix, ni accueillir les masses de réfugiés qui doivent rentrer de l’Iran, du Pakistan et d’autres pays voisins. Parallèlement, la conduite des indispensables programmes de désarmement et de réintégration de combattants, et la lutte contre la culture du pavot à opium exigent un appui efficace. L’Administration de transition a d’autre part besoin de soutien pour le lancement de la nouvelle monnaie qu’elle va mettre en circulation le mois prochain, et qui peut jouer un rôle important dans l’unité du pays, la cohésion sociale et la stabilisation de l’économie. Et M. Brahimi a exhorté la communauté des donateurs à soutenir tous ces projets, ajoutant que les millions qui doivent être versés aujourd’hui à l’Afghanistan vaudront des milliards demain.
Ainsi qu’il est clairement indiqué dans le communiqué signé par les Ministres de plus de vingt pays vendredi dernier, après la réunion de haut niveau sur l’Afghanistan, le pays continue de faire face à un sérieux problème de sécurité. Sur ce point, le Représentant spécial a rappelé qu’à plusieurs reprises, le Gouvernement afghan a lancé un appel à la communauté internationale pour un renforcement de la Force internationale d’assistance à la sécurité (ISAF). Le fait que cet appel n’ait pas été entendu, cause une certaine déception chez le peuple afghan et dans les pays voisins, a averti M. Brahimi, avant de souhaiter que des discussions thématiques puissent se tenir sur cette question à Kaboul entre les autorités afghanes, les Nations Unies et les membres les plus influents de la communauté internationale.
La situation sécuritaire est en effet préoccupante car les deux premiers mois qui ont suivi l’arrivée au pouvoir de l’Administration de transition ont été marqués par la multiplication des conflits locaux et de la violence, dont les Nations Unies ont parfois été la cible directe. Il y a par exemple deux jours les installations de l’UNICEF à Jalalabad ont été la cible d’une attaque au lance-roquettes au cours de laquelle un garde de sécurité a été blessé. Toutefois, ces tout derniers jours la situation s’est quelque peu calmée. Les deux factions rivales dans le nord du pays, Jamiat et Jumbesh, ont par exemple accepté de mettre en place une équipe conjointe pour lutter contre la violence et l’instabilité et de désarmer ceux qui fomentent des attaques. La démilitarisation de Mazar-e-Sharif tant attendue a en outre démarré la semaine passée et les contrôles de police ont d’ores et déjà permis de désarmer les détachements armés qui restaient encore dans cette ville. A l’appui de ces initiatives, les généraux Dostum et Atta, les dirigeants des factions Jamiat et Jumbesh, ont déclaré qu’à l’avenir il n’y aurait plus de place pour ces commandants locaux poursuivant les violences à des fins personnelles. Dans le sud du pays, a aussi précisé M. Brahimi, Pacha Khan Zadran, jusqu’alors l’un des opposants les plus acharnés du Président Karzai, a été chassé de la ville de Khost suite à une offensive menée début septembre. Les Nations Unies ont depuis été en mesure de reprendre leurs opérations dans cette zone.
Compte tenu des difficultés nombreuses jalonnant encore la voie de la restauration de la sécurité et de la prospérité en Afghanistan, M. Brahimi a réitéré son appel à la communauté internationale pour qu’elle ne cède ni à la panique, ni à la complaisance. Le succès de la Loya Jirga et l’enthousiasme qu’elle a suscité ont pu donner le sentiment que la paix dans le pays pourrait être obtenue à moindre coût pour la communauté internationale. Or la tentative d’assassinat contre le Président Karzai doit faire office de véritable réveil pour les Afghans et le reste du monde. Les reculs de ce type doivent faire redoubler encore la détermination de la communauté internationale et de l’autorité légitime afghane de parvenir à la stabilité et à la sécurité dans le pays. Il s’agit d’une véritable course contre la montre et à quelques mois du premier anniversaire des Accords de Bonn, M. Brahimi a formé l’espoir que la communauté internationale concrétisera ses engagements en actions déterminées et qui permettront de faire la différence.
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