CS/2352

LE CONSEIL ANALYSE LES RESPONSABILITES DE CHACUN DANS L’APPLICATION DE L’ACCORD DE PRETORIA SIGNE, LE 30 JUILLET, PAR LES PRESIDENTS DU RWANDA ET DE LA RDC

08/08/2002
Communiqué de presse
CS/2352


Conseil de sécurité                                         CS/2352

4596e séance – matin                                        8 août 2002


LE CONSEIL ANALYSE LES RESPONSABILITES DE CHACUN DANS L’APPLICATION DE L’ACCORD DE PRETORIA SIGNE, LE 30 JUILLET, PAR LES PRESIDENTS DU RWANDA ET DE LA RDC


Examinant, ce matin, la situation concernant la République démocratique du Congo, le Conseil de sécurité a entrepris, selon les propos de son Président, M. John Negroponte des Etats-Unis, de prendre la mesure des dispositions de l’Accord de Pretoria et des intentions des parties concernées afin de s’assurer que tous ceux qui auront à jouer un rôle pour permettre l’aboutissement de cet Accord comprennent leur responsabilité.  En présence du Secrétaire général de l’ONU, le Conseil a donc entendu la Ministre des affaires étrangères de l’Afrique du Sud, le Ministre des affaires étrangères de la République démocratique du Congo (RDC) et l’Envoyé spécial du Président du Rwanda pour la région des Grands Lacs.


Signé le 30 juillet dernier par les Présidents de la RDC et du Rwanda, en présence de la tierce partie, représentée par le Président de l’Afrique du Sud et le Représentant du Secrétaire général de l’ONU, l’Accord de Pretoria, comme l’a expliqué aujourd’hui Mme Nkosazana Dlamini Zuma, Ministre sud-africaine des affaires étrangères, prévoit le retrait des troupes rwandaises du territoire de la RDC et le démantèlement des ex-Forces armées rwandaises (FAR) et des forces Interahamwe présentes sur le territoire congolais. L’Accord de Pretoria, a-t-elle précisé, ne remplace pas mais complète l’Accord de cessez-le-feu de Lusaka de 1999 ou les autres accords consécutifs.


Qualifiant cet Accord de «pas sans précédent vers le règlement du conflit», M. Patrick Mazimpaka, l’Envoyé spécial du Président du Rwanda, a souligné que la nouveauté de l’Accord réside dans l’engagement solennel du Gouvernement de la RDC de désarmer les ex-Far et les Interahamwe en collaboration avec la MONUC, la Commission militaire mixte et la tierce partie.  Le Rwanda, a-t-il réaffirmé, doit en retour procéder au retrait de ses troupes dès que le processus de désarmement, démobilisation, rapatriement, réintégration et réinstallation (DDRRR) aura commencé et sera jugé irréversible.  Estimant que cet effort ne pourra résoudre seul les questions en suspens, l’Envoyé a appelé à l’engagement de toutes les parties au conflit de travailler à un accord global et au retrait de toutes les troupes étrangères.


A ce propos, le Ministre congolais des affaires étrangères, M. Léonard She Okitunudu, a souligné que parmi les forces invitées et non invitées, le Rwanda est le seul pays à avoir considérablement augmenté ses forces et à rester engagé dans des opérations militaires d’envergure sur le sol congolais.  C’est avec une «immense joie», a ainsi prédit le Ministre que le peuple congolais, la tierce partie et la communauté internationale prendront


officiellement connaissance, dans quelques heures, du plan de retrait des troupes rwandaises.  Un autre signe, a ajouté le Ministre serait le début de la démilitarisation de la ville de Kisangani.  S’agissant du processus de DDRRR, le Ministre congolais des affaires étrangères a réitéré l’engagement de son pays à exécuter fidèlement les obligations de l’Accord de Pretoria, notamment en poursuivant le processus de démobilisation et de désarmement de combattants rwandais commencé à Kamina et de l’étendre aux autres territoires du pays sous occupation étrangère au fur et à mesure que l’autorité de l’Etat y sera rétablie.


Jugeant, à son tour, que l’Accord de Pretoria est «l’opportunité la plus sérieuse» depuis le début de la guerre, le 2 août 1998, le Ministre des affaires étrangères a demandé à l’ONU d’élaborer pour la Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) un nouveau concept d’opérations qui déclencherait la phase III de son déploiement.  Le Conseil, a-t-il estimé, se doit de redéfinir le concept d’opérations de la MONUC afin de lui permettre de s’acquitter valablement de la mission que lui a conférée l’Accord de Pretoria.  Devant ces propos, le Secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan a déclaré: «nous ne devons ménager aucun effort pour aider les parties à mettre en œuvre cet Accord».  La MONUC, a-t-il indiqué, a reçu des instructions pour déterminer les mesures à prendre afin d’aider les parties à exécuter l'Accord.  Les parties doivent comprendre clairement, a insisté le Secrétaire général, les tâches qu'elles auront à accomplir et fournir les informations nécessaires à la Mission.  A cet égard, le Secrétaire général a dit attendre avec intérêt la visite d'experts d'Afrique du Sud, prévue aujourd’hui, pour discuter de l’appui nécessaire au processus.  Il a dit son intention de présenter des recommandations au Conseil en temps voulu après consultations entre le Secrétariat de l’ONU et les parties concernées.


LA SITUATION CONCERNANT LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO


M. KOFI ANNAN, Secrétaire général des Nations Unies, s'est dit convaincu que la signature de l'Accord de Pretoria est un jalon politique important qui pourra ouvrir la voie à un règlement durable d'un des conflits les plus complexes de l'Afrique.  Nous ne devons ménager aucun effort pour les aider à mettre en œuvre cet Accord, a souligné le Secrétaire général en soulignant que les deux Présidents se sont engagés à instaurer la paix et, tout particulièrement, à travailler ensemble pour y parvenir.  Il faut maintenant, a estimé le Secrétaire général, approcher les parties, de manière pragmatique, pour leur demander de prendre les mesures qui s’imposent pour exécuter cet Accord.  La communauté internationale doit apporter son appui pour assurer le succès de cette initiative.  L'élan, a insisté le Secrétaire général, doit être maintenu et renforcé.  La Mission de l’Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) a d'ailleurs reçu des instructions pour déterminer les mesures à prendre afin d’aider les parties à exécuter l'Accord. 


Toutefois, les parties doivent comprendre clairement quelles sont les tâches qu'elles auront à accomplir et fournir les informations nécessaires à la MONUC.  Le Secrétariat, a indiqué le Secrétaire général, attend avec intérêt la visite d'experts d'Afrique du Sud pour discuter ensemble du soutien nécessaire au processus et de la manière de progresser.  Je soumettrai des recommandations en temps voulu au Conseil après les consultations entre le Secrétariat et les parties concernées, a indiqué le Secrétaire général.  La présence des parties aujourd'hui est particulièrement importante car elle permet au Conseil de discuter directement avec elles des questions liées à la mise en œuvre de l'Accord.  Il a émis l’espoir que le dialogue sera fructueux non seulement au sein du Conseil mais également avec les différents Départements de l'ONU, a déclaré le Secrétaire général.


Mme DLAMINUI ZUMA NKOZAZANA, Ministre des affaires étrangères de l’Afrique du Sud, s’est félicitée de l’importante mesure prise la semaine dernière par les Présidents de la République démocratique du Congo et du Rwanda en signant un Accord de paix sur le retrait des troupes rwandaises du territoire de la République démocratique du Congo (RDC) et le démantèlement des ex-FAR et des forces Interahamwe présentes sur le territoire de la RDC.  Cet Accord, a-t-elle ajoutée arrive à point nommé, à la suite du Dialogue intercongolais qui s’est tenu cette année en Afrique du Sud.  Elle a rappelé toute l’importance de l’Accord de cessez-le-feu de Lusaka de 1999, qui a jeté les bases de la conduite à tenir à l’égard des troupes étrangères installées en RDC.  A cet égard, elle a déclaré qu’il était clair que la situation de la République démocratique du Congo ne pouvait être réglée tant que l’on aura pas réglé celle des groupes militaires armés.  Dans ce contexte, elle s’est félicitée de l’engagement du Gouvernement du Rwanda de procéder au retrait de ses forces installées en République démocratique du Congo dès que les groupes militaires présentent dans ce pays cesseront de représenter une menace pour le peuple rwandais.  Dans le même ordre d’idées, elle a salué l’engagement de la République démocratique du Congo de faire en sorte que les groupes armés évoqués n’utilisent pas son territoire pour lancer des attaques contre des pays voisins.


La Ministre a, par ailleurs, rappelé le caractère crucial de la rencontre qui s’est tenue lors du lancement de l’Union africaine, rassemblant pour la première fois M. Joseph Kabila, Président de la République démocratique du Congo et M. Paul Kagame, Président du Rwanda en présence du Président sud-africain, M. Thabo Mbeki et du Secrétaire général, M. Kofi Annan.  Elle s’est également félicitée du travail de la MONUC qui, malgré les difficultés en présence et ses effectifs limités, a réussi à s’acquitter de ses obligations.  En ce qui concerne l’Accord récemment signé, elle également ajouté que celui-ci ne remplace pas l’Accord de cessez-le-feu de Lusaka de 1999 ou d’autres accords, mais ne fait que les compléter.  Il est évident, a-t-elle encore déclaré, qu’il n’y avait aucun doute sur le fait que les développements de ce dernier mois ont contribué à mettre en place un climat politique favorable, et que cette occasion devrait être saisie par tous les acteurs concernés et la communauté internationale pour atteindre les objectifs fixés pour la mise en œuvre de cet Accord de paix.  En conclusion, elle a défini cet Accord comme  « un gage offert au peuple de la République démocratique du Congo et à tous les pays de la région des Grands Lacs » et a formé le vœu que cela puisse faire progresser le processus de paix. 


M. LEONARD SHE OKITUNDU, Ministre des affaires étrangères de la République démocratique du Congo (RDC), a souligné que l’Accord de Pretoria, qui est à caractère essentiellement bilatéral et garanti par la tierce partie, s’inscrit dans le cadre de l’Accord de Lusaka.  L’Accord, a-t-il ajouté, est également conforme aux dispositions des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, et plus particulièrement la résolution 1341 (2001), par laquelle le Conseil, pour la première fois, demandait notamment l’élaboration d’un plan et d’un calendrier précis qui mèneraient à l’achèvement du retrait total et ordonné des troupes étrangères ainsi que celle de plans de désarmement, démobilisation, rapatriement, réintégration et réinstallation (DDRRR).  S’agissant de ce processus, le Ministre des affaires étrangères a dit l’engagement de son pays à exécuter fidèlement les obligations de l’Accord de Pretoria, notamment en poursuivant le processus de démobilisation et de désarmement de combattants rwandais commencé à Kamina et de l’étendre aux autres territoires du pays sous occupation étrangère au fur et à mesure que l’autorité de l’Etat y sera rétablie.


Le Ministre des affaires étrangères a, à cet égard, exprimé sa confiance à la communauté internationale pour son appui au processus simultané de retrait des troupes et de rapatriement, réintégration et réinstallation des combattants dans leur pays d’origine en conformité avec le droit international.  S’agissant du retrait des troupes étrangères, le Ministre des affaires étrangères a rappelé que la Namibie s’est totalement retirée et que l’Angola et le Zimbabwe ont rapatrié une grande partie de leurs contingents.  Du côté des forces non invitées, il a indiqué que c’est uniquement du côté de l’Ouganda et du Burundi que des mouvements de retrait ont pu être observés.  Le Rwanda, a-t-il souligné, a considérablement augmenté ses forces et demeure le seul pays à être engagé dans des opérations militaires d’envergure sur le sol congolais.


C’est avec une immense joie, a ainsi affirmé le Ministre des affaires étrangères, que le peuple congolais, la tierce partie et la communauté internationale prendront officiellement connaissance dans quelques heures du plan de retrait des troupes rwandaises conformément au programme de mise en oeuvre de l’Accord de Pretoria.  Un autre signe fort, a-t-il estimé, serait le début de la démilitarisation de la ville de Kisangani en application de la résolution 1304 (2000).  De même, a-t-il encore dit, toute activité illégale d’exploitation des ressources naturelles et autres forces de richesse de la RDC, qui alimente la poursuite de la guerre d’agression, doit prendre fin.


L’Accord de Pretoria, a-t-il poursuivi, est certainement l’opportunité la plus sérieuse depuis le début de la guerre le 2 août 1998.  Le Ministre des affaires étrangères ainsi expliqué que cet Accord fournit une réponse, qu’il a espéré adéquate, aux préoccupations sécuritaires du Rwanda et vise également la restauration de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale de la RDC.  Cet Accord enfin, a-t-il précisé, porte en lui les ingrédients du retour à la normalité pour les pays et les peuples de la région des Grands Lacs.  Le Ministre des affaires étrangères a donc sollicité l’aide de l’ONU en lui demandant notamment d’élaborer pour la MONUC un nouveau concept d’opérations qui déclencherait la phase III de son déploiement.  L’amélioration des perspectives de paix dans la région nous permet d’envisager avec beaucoup plus de sérénité le processus de réconciliation et de concorde nationale, a estimé le Ministre des affaires étrangères en rendant compte des efforts déployés pour définir les contours d’un accord qui serait davantage consensuel et inclusif.


Le processus de rétablissement de la paix, d’établissement et de consolidation de relations de confiance doit se poursuivre, a souligné le Ministre des affaires étrangères, et être renforcé par une crédibilité accrue des Nations Unies et de son Conseil de sécurité au risque, a-t-il prévenu, de voir s’écrouler tout l’édifice de ce partenariat que le Conseil a scellé avec les parties liées à l’Accord de Lusaka.  Le Conseil, a-t-il encore insisté, se doit de redéfinir le concept d’opérations de la MONUC afin de lui permettre de s’acquitter valablement de la mission que lui a conférée l’Accord de Pretoria.  La MONUC devrait être dotée des moyens lui permettant d’opérer et d’avoir un accès sans entraves aux populations dans le besoin.


S’adressant aux pays de la région, le Ministre des affaires étrangères les a appelés à fournir des efforts supplémentaires.  Il a jugé urgent, dans un premier temps, que la RDC conclue avec l’Ouganda et le Burundi des accords similaires à celui de Pretoria.  Ensuite, a-t-il dit, il nous faudra tous nous asseoir et discuter de l’avenir de notre région.  La Conférence internationale sur la paix, la stabilité, la sécurité et le développement devrait jeter les bases d’un ordre nouveau.  L’Accord de Pretoria, a conclu le Ministre des affaires étrangères, constitue le socle même du rétablissement de la confiance perdue sur lequel il sera possible de renouer les fils de l’amitié et du bon voisinage appelés à régir les relations futures.  Jamais, a tenu à souligner le Ministre des affaires étrangères, la RDC se servira de rampe à qui que ce soit pour semer la discorde et la désolation dans un pays donné et particulièrement dans les pays voisins.  C’est là, a-t-il affirmé, un principe sacré de la diplomatie de la RDC qu’elle a toujours voulue constructive et non subversive.


M. PATRICK MAZIMHAKA, Envoyé spécial du Président rwandais pour la région des Grands Lacs, a défini l’Accord de Pretoria comme un pas sans précédent vers le règlement du conflit, depuis la signature de l’Accord de cessez-le feu de Lusaka de 1999.  Cet Accord, a-t-il ajouté, présente l’avantage d’offrir des solutions à des problèmes insolubles jusqu’à présent, notamment en ce qui concerne la présence sur le territoire de la République démocratique du Congo des forces qui ont perpétré le génocide au Rwanda.  Dans ce contexte, il s’est dit convaincu que ce plan de paix a une chance d’aboutir et a appelé le Conseil de sécurité pour qu’il fasse tout ce qui est en son pouvoir pour permettre la réalisation des objectifs de cet Accord.  Il a affirmé que deux questions clés sous-tendent le conflit : le retrait de toutes les forces étrangères de la République démocratique du Congo et la situation des forces Interahamwe et ex-FAR. 


Par ailleurs, l’Envoyé spécial du Président rwandais a formé le vœu que le retrait des forces Interahamwe se fasse en coopération avec la MONUC et a affirmé que le Rwanda s’est engagé, en échange de ce retrait, à retirer ses troupes de RDC, dès que le processus de désarmement, démobilisation, rapatriement, réintégration et réinstallation des forces Interahamwe et ex-FAR sera entamé et aura un caractère irréversible.  Il a également souhaité que les groupes armés présents en RDC et qui, conformément aux Accords du 19 avril 2001, souhaitaient rentrer au Rwanda sous couvert d’unité nationale, ne soient plus empêchés de le faire pour des raisons politiques.  Grâce à la MONUC, a-t-il ajouté, nous avons une idée de la façon dont les ex-Far opèrent de la RDC et comment elles se sont organisées.  Il s’est félicité du rôle joué par l’Organisation des Nations Unies et pour toute l’aide qu’elle a fournie dans les moments les plus difficiles et a salué l’engagement de

M. Mbeki en sa qualité de Président de l’Union africaine et de l’Afrique du sud pour l’aboutissement de cet Accord.  Il a évoqué les problèmes qui persistent, notamment la nécessité d’aboutir à un accord global et procéder à un retrait total de toutes les forces étrangères.  Il s’est félicité de la volonté du Gouvernement du RDC de négocier cet Accord et a salué les grandes qualités d’homme d´Etat dont a fait preuve le Président Kabila en signant cet Accord.  Dans le même ordre d’idées, M. Mazimpaka a réaffirmé l’engagement du Président Paul Kagame, au nom du peuple rwandais, de tout mettre en œuvre pour atteindre les objectifs dudit Accord.  Nous sommes prêts, a-t-il conclu, à travailler avec vous, frères et sœurs d’Afrique et de toute la communauté internationale, pour faire triompher la paix et la sécurité, si indispensables aux peuples du Rwanda et de la République démocratique du Congo et de toute l’Afrique. 


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