AU MOMENT OU SES DIRIGEANTS PRENNENT DES INITIATIVES AUDACIEUSES DE GOUVERNANCE ET DE DEVELOPPEMENT, L'AFRIQUE DOIT BENEFICIER DU SOUTIEN ACTIF DU CONSEIL
Communiqué de presse CS/2313 |
Conseil de sécurité
4538ème séance – matin et après-midi
AU MOMENT OU SES DIRIGEANTS PRENNENT DES INITIATIVES AUDACIEUSES DE GOUVERNANCE ET DE DEVELOPPEMENT, L'AFRIQUE DOIT BENEFICIER DU SOUTIEN ACTIF DU CONSEIL
Réuni sous la présidence de M. Shanmugam Jayakumar, Ministre des affaires étrangères de Singapour, le Conseil de sécurité a aujourd'hui tenu une séance d’échanges interactifs sur la situation en Afrique au cours de laquelle il a entendu des interventions des Etats non membres, auxquels des Etats membres du Conseil ont ensuite pu répondre. Auparavant, le Conseil avait entendu des présentations de M. Jagdish Koonjul, représentant de Maurice et Président du Groupe de travail spécial sur la prévention et le règlement des conflits en Afrique; de M. Ivan Simonovic (Croatie), Président du Conseil économique et social (ECOSOC); et de M. Ibrahima Fall, Sous-Secrétaire général aux affaires politiques et nouveau Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest.
A l’issue de la réunion, le Président du Conseil a estimé que toutes les initiatives en faveur de la paix et de la reconstruction en Afrique devraient être menées de manière conjointe, et que le Conseil devrait travailler dans le cadre d’un véritable partenariat avec les pays et les organisations du continent africain. D’autre part, le Groupe de travail spécial sur la prévention et le règlement des conflits pourrait mener des tâches et des réflexions d’une manière plus souple que le Conseil qui, du fait de la rigidité de son mandat, est parfois incapable de conduire certaines missions, a estimé le Président. L’objet du débat de la réunion est de donner au Conseil un élan lui permettant de mieux appréhender les tâches qui l’attendent en Afrique.
Dans leurs présentations respectives, les principaux orateurs ont fait rapport au Conseil des travaux effectués et des recommandations proposées par le Groupe de travail et par l’ECOSOC sur la résolution des conflits et la reconstruction post-conflit dans les pays et les zones affectées par la guerre et les violences intra-étatiques ou régionales. A cet égard, le Président du Groupe de travail spécial a parlé des questions liées à la mise en œuvre du mandat qui avait été confié au Groupe par le Conseil sur la base du rapport du Secrétaire général sur les causes des conflits et la promotion d’une paix et d’un développement durables en Afrique, rapport qui contenait une série de recommandations allant du maintien de la paix à la mobilisation des ressources pour le développement. Les problèmes qui continuent de se poser ont notamment trait, selon le Groupe de travail, à la reconstruction des pays émergeant de conflits armés, et à la difficulté de passer de l’aide purement humanitaire à des programmes intégrés de développement à long terme. Ces difficultés touchent aussi la nécessité de coordonner le règlement des conflits à la fois au niveau national et au niveau régional, la plupart des conflits africains ayant d’une part une dimension sous-régionale comme en Afrique de l’Ouest, et étant d’autre part nourris par la situation de détérioration économique et par la pauvreté qui est bien souvent à leur origine et en même temps les alimente.
(à suivre – 1a)
En prenant la parole devant le Conseil, M. Ibrahima Fall s’est félicité que l’afropessimisme ambiant ne semble pas entamer la résolution du Conseil de rester engagé en Afrique, surtout au moment où les dirigeants du continent prennent des mesures courageuses pour améliorer la gouvernance politique et économique de l'Afrique. L’Afrique bénéficie d’une coopération croissante entre les Nations Unies et l’Organisation de l’unité africaine, a dit M. Fall, et cette collaboration est illustrée par les rencontres et réunions régulières que le Secrétaire général a avec les représentants de l’OUA à New York, le système de l’ONU ayant en même temps des liens de travail productifs avec les organisations sous-régionales africaines sur le terrain. Les résultats positifs obtenus par la coopération entre l’ONU et la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) augurent de ce qui pourrait être fait ailleurs sur le continent. Nous proposons, a dit M. Fall, un renforcement de cette collaboration, de manière à assurer un suivi efficace de la situation de sécurité sur le continent par un « quadrillage » basé sur le fonctionnement d’un mécanisme commun ONU-organisations sous-régionales, et nous proposons que l’ONU harmonise ses principes avec ceux de l’OUA, notamment en ce qui concerne le problème des changements inconstitutionnels de régimes. L’OUA a en effet adopté une règle selon laquelle elle refuse de voir participer à ses travaux des dirigeants qui seraient arrivés illégalement au pouvoir, et l’ONU devrait en faire autant.
Intervenant sur la question des relations entre le Conseil de sécurité et les institutions continentales africaines, qui avait été évoquée par les représentants de l’Algérie et de l’Egypte, M. Jean-David Levitte a déclaré que le Conseil ne pouvait jouer le rôle d’un simple prestataire de services pour satisfaire les souhaits exprimés ou les initiatives prises sans consultation préalable par les dirigeants africains. A cet égard, il a évoqué la mission du Conseil dans la région des Grands Lacs, qui a dû expliquer à des dirigeants de la région que les termes de l’Accord de Lusaka, qui exigent « le désarmement par la force des factions combattantes » non étatiques ne sont pas applicables en l’état par le Conseil et la Mission de l’Organisation des Nations Unies au Congo (MONUC), ces combattants n’ayant pu être désarmés par la force par l’armée rwandaise qui s’y est attelée pendant plusieurs années.
Donnant des précisions sur les initiatives africaines, notamment en matière de paix et de promotion de la bonne gouvernance, le représentant du Nigéria a souligné que les dirigeants africains menaient de plus en plus une diplomatie préventive active et discrète, notamment en matière d’organisations de scrutins électoraux qui permettent des transitions de régimes sans violence. Cette discrétion et les recommandations qui sont émises par les dirigeants africains ne devraient pas être interprétées comme des faits accomplis ou des solutions imposées au Conseil, a dit le représentant. Pour sa part, intervenant sur la question de la situation dans la région des Grands lacs, le représentant du Rwanda s’est fermement élevé contre toute tentative par quelque Etat ou institution de vouloir imposer des points de vues ou des solutions qui ne prennent pas en compte les besoins légitimes de sécurité de son pays. D’autre part, a estimé le représentant, il est inacceptable de vouloir aborder les problèmes dont souffre le continent africain en escamotant le débat qui doit avoir lieu sur les conséquences de l’esclavagisme, du colonialisme et du néocolonialisme qui ont affecté et affectent encore l’Afrique.
Les représentants des pays suivants se sont exprimés au cours du débat : Bénin, Egypte, République de Corée, France, Bangladesh, Cuba, Jamahiriya arabe libyenne, Australie, Espagne (au nom de l’Union européenne et des pays associés), Djibouti, Inde, Japon, Sierra Leone, Gambie, Tunisie, Irlande, Afrique du Sud, Népal, Nigéria, Royaume-Uni, Sénégal, Ukraine, Maroc, Colombie, République-Unie de Tanzanie, Bahreïn, Mexique, Zambie, Côte d’Ivoire, Chine, Malawi, Mali, Mozambique, Norvège, Mozambique, Somalie, Rwanda, Costa Rica, Ethiopie et République centrafricaine. Le Président du Groupe de travail spécial sur la prévention et le règlement des conflits en Afrique, M. Jagdish Koonjul (Maurice), et le Président de l’ECOSOC, M. Ivan Simonovic (Croatie), sont intervenus en début de séance, de même que l’Observateur permanent de l’Organisation de l’unité africaine, M. Amadou Kébé, et le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest, M. Ibrahima Fall. Le Ministre des affaires étrangères de Singapour a pris la parole en fin de séance pour faire une synthèse du débat.
LA SITUATION EN AFRIQUE
Déclarations
M. JAGDISH KOONJUL (Maurice), Président du Groupe de travail spécial sur la prévention et la résolution des conflits en Afrique, a rappelé que l’idée de créer le Groupe spécial a été lancée en janvier 2002 pendant une réunion publique consacrée à la situation en Afrique et organisée sous la présidence de Maurice. Le mandat du Groupe de travail, a aussi rappelé son Président, est de surveiller la mise en œuvre de la déclaration présidentielle S/PRST/2002/2 du Conseil adoptée après ladite réunion publique et des déclarations précédentes. Le mandat consiste également à proposer des recommandations sur le renforcement de la coopération entre le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social ainsi qu’avec les autres institutions des Nations Unies. Le mandat vise en outre à examiner les questions régionales qui affectent le travail du Conseil sur la prévention et le règlement des conflits en Afrique. Il a enfin pour objectif de proposer des recommandations au Conseil sur le renforcement de la coopération en matière de prévention et de règlement des conflits entre l’ONU et les organisations régionales et sous-régionales.
C’est à partir de ce mandat que le Groupe de travail a établi son programme de travail. S’agissant du Conseil économique et social, le Groupe de travail a, étant donné l’importance de la réhabilitation et de la reconstruction économiques pour un pays sortant d’un conflit, le Groupe de travail a appuyé la décision du Conseil économique et social de créer un Groupe consultatif sur les pays africains sortant d’un conflit. C’est dans ce cadre que le Groupe de travail entend discuter avec le Conseil économique et social notamment de la coordination entre les deux groupes; de la situation en Guinée-Bissau et en République centrafricaine; et de la contribution des autres organes des Nations Unies, les organisations sous-régionales et des institutions de Bretton Woods dans la prévention et la résolution des conflits.
Conformément à son programme de travail, le Groupe de travail entend aussi discuter des mesures d’établissement de la confiance pour les pays de l’Union du Fleuve Mano; du renforcement du rôle des représentants spéciaux du Secrétaire général en Afrique; de la manière dont les Nations Unies peuvent fournir une assistance aux processus électoraux, du début à la fin; de la création du «Groupe des amis» pour des situations spécifiques de conflit; de la coopération avec l’OUA, en particulier de la contribution que pourrait apporter le Groupe de travail à la mise en œuvre de la Nouvelle initiative pour le développement de l’Afrique (NEPAD); et de la contribution des ONG, des universités et des académies au travail du Groupe de travail.
M. IVAN SIMONOVIC (Croatie), Président du Conseil économique et social (ECOSOC), a déclaré que pour être efficaces, les stratégies pour la prévention et la résolution des conflits et pour la reconstruction, requièrent une approche globale, avec des actions s’étendant sur des domaines d’intervention divers, y compris politique, diplomatique, humanitaire, des droits de l’homme et même institutionnel, ainsi que des efforts de promotion du développement. L’ECOSOC a des responsabilités dans ces domaines, a dit M. Simonovic, et il a commencé à s’en acquitter de manière coordonnée. Il est aussi clair que l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité, l’ECOSOC et les autres partenaires, auront besoin de travailler en beaucoup plus étroite coopération qu’ils ne l’ont fait à ce jour. Les Nations Unies et les Etats Membres doivent travailler sur tous les aspects de la construction et du rétablissement de la paix, en vue d’accomplir et de mettre en oeuvre les engagements de la Charte des Nations Unies. L’Assemblée a appelé l’ECOSOC à se pencher sur les travaux et actions liés aux causes des conflits et à la promotion d’une paix et d’un développement durable en Afrique. Au cours d’une réunion au mois de janvier sur la situation en Afrique, le Conseil de sécurité a réaffirmé l’importance du renforcement de la coopération avec l’ECOSOC à travers une plus grande interaction, en accord avec l'Article 65 de la Charte. L’ECOSOC a un mandat, en vertu de la Charte de l’ONU, et les termes de ce mandat peuvent lui permettre d’aider à examiner et à mettre en oeuvre les actions liées aux causes de la violence, à l’assistance humanitaire, à l’économie, et à la reconstruction sociale et aux droits de l’homme, processus qui sont tous au cœur de la construction de la paix.
Il y a toujours un vide entre le moment où s’achève l’assistance humanitaire et celui où sont lancés les programmes de développement systémique dans les pays qui sortent de conflits. Ce vide pourrait être comblé en se basant sur des actions coordonnées par l’ECOSOC et mettant à l’œuvre ses commissions fonctionnelles, les institutions de l’ONU, et les fonds et programmes de l’Organisation. Dans cette lancée, la coopération renforcée entre l’ECOSOC et les institutions de Bretton Woods serait d’une importance cruciale. Un projet de résolution visant la création d’un groupe de travail consultatif sur les pays africains émergeant de conflits sera bientôt soumis à l’attention du Conseil de sécurité et des Etats Membres. Ce groupe travaillerait dans le domaine de l’identification des besoins humanitaires des pays sortant de conflits, et dans celui de la reconstruction et des activités de développement. L’ECOSOC s’attellera bientôt à créer un groupe-conseil sur la question, et à la demande de tout Etat africain qui serait intéressé, il mettra les mécanismes nécessaires en pratique.
M. AMADOU KEBE, Observateur permanent de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), a rappelé que l’OUA se trouve aujourd’hui à une étape critique de son évolution. Au mois de juillet prochain, a-t-il souligné, l’OUA cessera d’exister et laissera la place à l’Union africaine. Partant, les discussions portent aujourd’hui sur la révision de la structure, des procédures et des méthodes de fonctionnement de l’Organe central du Mécanisme de l’OUA pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits. Un nouveau protocole a été élaboré qui sera soumis à l’examen à la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement prévu du 8 au 10 juillet 2002 à Durban, en Afrique du Sud. Ce projet de protocole contient une proposition visant à changer le nom de l’Organe central qui deviendrait le Conseil de paix et de sécurité. Ainsi, l’Organe du Mécanisme de l’OUA comprendrait le Conseil de paix et de sécurité, la Commission de l’Union et le Panel des Sages.
Commentant le travail du Groupe de travail du Conseil, l’Observateur a souhaité que son approche d’ensemble soit de promouvoir et de renforcer les mécanismes de coopération avec l’OUA et les organisations sous-régionales africaines en vue d’assurer notamment l’accélération de toute action de prévention des conflits et la mise en place rapide des opérations de maintien de la paix ou de consolidation de la paix dans les situations post-conflictuelles.
Dans le cadre du renforcement de la coopération avec l’ECOSOC, le Groupe de travail devrait notamment, en collaboration avec le Groupe consultatif de l’ECOSOC, l’OUA et les organisations sous-régionales africaines, aider à l’organisation de conférences des donateurs ou encore veiller à ce que des programmes de reconstruction et de réhabilitation, de désarmement, de démobilisation et de réintégration soient effectivement inclus dans tous les accords de paix.
Le Groupe de travail devrait aussi encourager les Secrétaires généraux de l’OUA et des Nations Unies à nommer des envoyés spéciaux dans des situations pré et post-conflit. Le Groupe de travail devrait, en outre, encourager un dialogue constructif entre les membres du Conseil de sécurité de l’ONU et ceux du futur Conseil de paix et de sécurité de l’Union africaine. Pour l’Observateur de l’OUA, de telles rencontres viseraient à adapter les vues et les approches aux circonstances changeantes des situations de conflits et à harmoniser leurs décisions et leurs actions dans le domaine de la diplomatie préventive et dans l’organisation de missions conjointes sur le terrain.
M. IBRAHIMA FALL, Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, a remercié le rôle positif joué par Singapour au sein du Conseil de sécurité au mois de mai, pendant lequel nous célébrons la naissance de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), et celui de l’Afrique, et nous remercions Singapour, président du Conseil et Maurice, président du Groupe de travail sur la prévention des conflits en Afrique, qui ont travaillé à organiser une réunion sur l’Afrique et, ce, au de afropessimisme ambiant. Pour avoir eu le privilège d’avoir été responsable des questions africaines au sein du Secrétariat, nous sommes conscients que le Conseil a déployé des efforts louables pour examiner les problèmes africains et leur trouver des solutions durables. Les missions annuelles menées dans la région des Grands Lacs sont une illustration de cet engagement du Conseil. Il en va de même des visites en Ethiopie et en Erythrée, et des séances organisées sur les questions touchant le continent dont celle du VIH/sida. Le Conseil a consacré des efforts à renforcer la coopération avec les organisations africaines, aussi bien l’OUA que les organisations sous-régionales et les accords d’Arusha, d’Alger et autres sont le fruit de l’engagement et de l’implication du Conseil dans les questions africaines. Toutes les initiatives n’auront certes pas été couronnées de succès immédiats. Mais nous n’oublions pas qu’en matière de maintien de la paix, l’Afrique abrite aujourd’hui, en Sierra Leone, la plus grande opération des Nations Unies.
Après son rapport sur les causes et la résolution des conflits en Afrique, le Secrétaire général a travaillé avec obstination à renforcer la coopération entre l’ONU et l’Afrique. Au niveau du Secrétariat, les liens de travail entre l’ONU et l’OUA et les organisations sous-régionales sont devenus pratiques courantes. Le Secrétaire général a des rencontres et des séances de travail régulières avec l’OUA et les autres organisations africaines et sur le terrain, les liens de coopération sont établis entre l’ONU et les organisations sous-régionales. Nous venons d’avoir des consultations sur la République démocratique du Congo (RDC), la République centrafricaine, Madagascar, le Burundi; et hier, nous nous sommes consultés avec l’OUA sur l’opportunité de faire tenir une réunion de son organe central sur la question.
Le Conseil de sécurité a eu des consultations avec la CEDEAO sur l’Accord de Lomé concernant la Sierra Leone. Nous voudrions proposer une consultation périodique de l’ONU-OUA sur les questions qui pourraient créer des perturbations à la situation de sécurité. Ces consultations auraient lieu avec toutes les organisations sous-régionales, qui quadrillent le continent africain, en vue de surveiller constamment l’état de la situation de sécurité sur le continent et la nécessité d’améliorer la prévention des conflits. Concernant la gouvernance politique, nous savons tous que l’OUA a décidé, il y a déjà quelques années de refuser toute reconnaissance et participation à ses travaux à des régimes issus de coups d’Etat. Sur cette décision, il faudrait harmoniser cette décision de l’OUA avec les pratiques de l’ONU, car il est intolérable que des régimes non reconnus par l’OUA soient autorisés à venir s’adresser aux organes de l’ONU. Concernant les questions de résolution de conflit et de reconstruction, la coopération avec les institutions de Bretton Woods devrait continuer à être renforcée. Concernant une autre question, celle des sanctions, l’Afrique est le continent qui en est le plus affecté. Le ciblage des sanctions devrait faire l’objet d’une réflexion plus critique, et il faudrait mettre en place une stratégie de sortie de sanctions. La question des armes légères et de petit calibre est cruciale pour l’Afrique. Malgré les efforts déjà déployés, nous pensons que la mise en œuvre des recommandations laisse encore à désirer. En Afrique de l’Ouest, le moratoire pris par la CEDEAO a pu être appliqué. Mais le Conseil devait aller plus loin et remonter les filières pour identifier les pays fabricants, les organismes vendeurs et les circuits de vente. Le Conseil pourrait travailler avec le Groupe spécial créé sur la question pour trouver des solutions pertinentes au trafic illicite d’armes légères. Le Conseil pourrait s’adresser aux dirigeants des pays abritant la fabrication et la vente illicite de ces armes pour trouver des solutions efficaces de lutte contre ce commerce destructeur.
M. JOEL W. ADECHI (Bénin), au nom du Groupe africain, a appuyé le renforcement de l’interaction entre le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social, aux fins de consolider la paix par le développement. Le Conseil devra, en conséquence, a-t-il dit, coordonner davantage ses activités concernant l’Afrique avec celle de l’ECOSOC pour mobiliser le soutien politique international en faveur de la consolidation de la paix. Il a ensuite estimé que le Groupe de travail, en raison de son caractère informel et de son mode flexible de fonctionnement, peut favoriser l’innovation et l’adaptabilité aux situations inédites ou expérimenter des mesures exploratoires. De manière générale, le Groupe de travail pourrait intégrer davantage l’examen de la question de la prévention dans son programme de travail; le Conseil dans son mode formel de fonctionnement étant plutôt réactif.
Le Groupe de travail pourrait davantage tirer parti des mécanismes d’alerte rapide et de diplomatie préventive opérationnels au sein de l’OUA et des organisations régionales. En ce qui concerne l’observation des élections, la pertinence du type d’intervention au regard des objectifs recherchés mérite d’être redéfinie. En effet, en Afrique, le maillon faible de la chaîne du processus électoral est et demeure l’élaboration de listes électorales fiables et permanentes. Des listes électorales fiables supposent des opérations de recensement conséquentes, un service de l’état civil fiable et opérationnel, une opération crédible d’inscription sur la liste électorale et enfin une structure indépendante de supervision des élections. Voilà, a dit le représentant, l’enjeu.
Il nécessite des moyens financiers et logistiques importants et donc un renforcement des capacités logistiques et financières conséquent. Commentant les discussions sur la création des groupes d’amis, le représentant a souhaité que le Groupe de travail examine les voies permettant aux mécanismes traditionnels existants, spécifiques à chaque pays, de concourir à prévenir les conflits et à éviter leur résurgence; qu’il s’agisse des groupes des sages, des leaders traditionnels ou religieux, ou encore des mouvements de femmes.
M. AHMED ABOUL GHEIT (Egypte) a souhaité que le Groupe de travail sur l’Afrique, dont la création démontre la volonté du Conseil de sécurité de s’atteler à résoudre les conflits sur la scène africaine, puisse présenter rapidement des propositions et des recommandations d’actions concrètes et réalistes au Conseil. Il a invité le Groupe de travail et le Conseil à tenir compte des attentes qui seront exprimées par les pays africains eux-mêmes et à collaborer étroitement avec l’Organisation de l’unité africaine (OUA) et d’autres organisations sous-régionales. M. Aboul Gheit a encouragé une coopération accrue entre le Conseil économique et social et le Conseil de sécurité sur les questions relatives au continent africain. De même, le représentant de l’Egypte a salué l’effort de concertation entre les membres du Conseil et les pays contributeurs de troupes aux opérations de maintien de la paix mais a regretté que les propositions émanant de ces pays n’aient pas été réellement prises en compte par le Conseil.
Afin de renforcer la coopération entre les Nations Unies et l’OUA dans le domaine du maintien de la paix, le représentant a suggéré la création d’un mécanisme de concertation et d’échange d’informations entre le Groupe de travail du Conseil et l’Organe central du Mécanisme de l’OUA pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits. Il a recommandé en outre des réunions régulières entre l’Organe central et le Conseil de sécurité à l’image des réunions organisées depuis 2 ans avec les membres du Comité politique de suivi de l’Accord de Lusaka. Enfin, s’agissant des missions du Conseil dans les zones de conflits en Afrique, M. Aboul Gheit a proposé que soit associé un représentant du Secrétariat de l’OUA à chacune de ces missions, notamment dès la prochaine mission de travail en Somalie.
M. ABDALLAH BAALI (Algérie) a relevé le relatif apaisement des conflits en Afrique qui, a-t-il dit, est le fruit sans conteste d'une prise de conscience collective aux niveaux africain et international des problèmes dramatiques auxquels est confronté le continent et le résultat d'efforts convergents déployés par les Africains eux-mêmes. Cet effort a bénéficié du soutien de la communauté internationale qui s'est exprimé d'une part par le soutien aux efforts de médiation, de conciliation et de bons offices et d'autre part par l'intérêt accordé aux affaires du continent africain par les organes principaux des Nations Unies. Avec la consécration par le Sommet de l'OUA du principe de l'alternance au pouvoir par des moyens constitutionnels et l'adoption du Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD), l'Afrique est en totale convergence avec la communauté internationale. L'Afrique a adopté une démarche intégrée comme moyen d'agir sur les causes profondes des conflits et les entraves au développement durable. Reste à voir comment la communauté internationale compte appuyer cette démarche.
Une grande partie des actions à entreprendre pour agir sur les causes des conflits en Afrique échoit au Conseil économique et social, a estimé le représentant. Une relation plus forte entre le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social leur permettrait de mieux coordonner leurs actions et d'éviter des chevauchements inutiles ou conflits de compétences, notamment dans la perspective du débat de haut niveau qui sera consacré à l'Afrique par l'Assemblée générale le 16 septembre 2002. Le Groupe spécial du Conseil de sécurité a certainement un rôle à jouer dans la mise en oeuvre du NEPAD. Il pourrait s'impliquer activement dans la mobilisation de ressources adéquates en faveur de l'Afrique. Une réunion préparatoire de ce débat de haut niveau, sous forme de séminaire, est prévue à New York à la mi-juillet. Au titre de la consolidation de la paix, la coordination avec le Groupe spécial de l'ECOSOC pour les pays africains émergeant de conflits revêt un caractère crucial. Il pourrait examiner avec le Groupe spécial du Conseil de sécurité l'utilité éventuelle de la prorogation d'une opération de maintien de la paix ou d'un déploiement préventif.
Le représentant s'est également dit en faveur d'une coopération entre l'Organe central du Mécanisme de l'OUA sur la prévention, la gestion et le règlement des conflits en Afrique et le Groupe spécial du Conseil de sécurité. Ce dernier pourrait également susciter une action préventive commune au Conseil de sécurité et au Secrétaire général par la désignation ou l'envoi de représentants spéciaux. Il importe par ailleurs de comprendre que la pratique de l'établissement de groupes d'amis pour des situations spécifiques de conflit ne peut pas se substituer au Conseil.
M. LEE HO-JIN (République de Corée) a rappelé le consensus sur les liens inextricables entre la paix et le développement, en particulier en Afrique. C’est dans ce contexte qu’il a accueilli avec satisfaction l’inclusion des relations entre le Conseil de sécurité et l’ECOSOC comme un des aspects les plus importants des travaux du Groupe de travail spécial. Il a jugé important que ce Groupe de travail et le Groupe consultatif de l’ECOSOC tiennent des consultations périodiques et fassent part du fruit de leurs discussions au Conseil et à l’ECOSOC. Le représentant a aussi accueilli avec satisfaction le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) qui, a-t-il dit, est conforme au consensus selon lequel la responsabilité de la paix et du développement revient au premier chef aux pays concernés eux-mêmes.
Conscient néanmoins de l’importance de l’assistance internationale, le représentant s’est félicité de l’organisation d’une réunion de haut niveau de l’Assemblée générale sur le NEPAD qui, selon lui, soulignera le rôle de l’ONU dans l’assistance à la mise en œuvre de ce Partenariat. Concluant sur la nécessaire coopération entre l’ONU et l’OUA, le représentant a plaidé pour une participation accrue des représentants de l’OUA aux discussions du Conseil sur les questions africaines et pour la mise en place, à l’image du NEPAD, d’un mécanisme de paix régionale tel qu’un «Centre régional des opérations de maintien de la paix pour surveiller la situation régionale en matière de sécurité, lancer des alertes rapides et faire office d’agent de liaison avec les opérations de maintien de la paix des Nations Unies».
M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) a pris la parole pour répondre aux observations faites par les délégations non membres du Conseil de sécurité. Parlant au nom de la France, M. Levitte a dit que les dirigeants africains prennent eux-mêmes de plus en plus des initiatives pour trouver des solutions aux questions africaines. L’Algérie a par exemple grandement contribué au processus d’un accord sur la question du conflit entre l’Ethiopie et l’Erythrée. Il faut se féliciter de cet état d’esprit. Mais le Conseil de sécurité ne peut pas être simplement un prestataire de services qui répondrait au doigt et à l’œil aux chefs d’Etat africains qui prendraient les initiatives qui leur semblent opportunes et demanderaient le soutien de l’ONU. Lors de la mission qu’il vient de mener dans la région des Grands lacs, le Conseil a, après lecture de l’Accord de Lusaka, estimé que ses termes, qui disent entre autres qu’il faut «désarmer de force» les forces qui sèment la violence, étaient inapplicables dans leur forme. Comment désarmer des combattants que l’armée rwandaise, depuis plusieurs années, n’a pas pu soumettre ou convaincre de déposer les armes? Avant que les dirigeants africains ne prennent donc une décision, il faudrait qu’ils consultent étroitement le Conseil. Le représentant de l’Egypte a estimé que le Conseil prenait parfois des décisions qui sont contraires à celles que souhaiteraient les Africains. Il est normal que le Conseil, qui voit la situation de l’extérieur, ait parfois une perspective qui peut différer de celles qu’ont les dirigeants africains. Mais le dialogue existe pour trouver la bonne solution.
Concernant la question des sanctions, évoquée par M. Ibrahima Fall, de plus en plus, des dirigeants africains demandent au Conseil d’en prendre contre ceux d’entre eux qui ne tiendraient pas leurs engagements et ne respecteraient pas les accords signés. C’est le cas dans la région des Grands Lacs. Des dirigeants ont demandé à la mission du Conseil de sanctionner les pays qui, selon eux, n’appliquaient pas l’Accord de Lusaka. M. Jeremy Greenstock, représentant du Royaume-Uni et membre de la mission, leur a fait remarquer que même si elles sont prises, des sanctions ne peuvent être appliquées et efficaces que si des pays voisins aident à les faire respecter.
Il vaut mieux prévenir que guérir, a dit M. Levitte. Mais la plupart des crises africaines étant des crises internes, il faut parfois avoir une lecture prudente de la Charte des Nations Unies. La question de la souveraineté des Etats se pose. Mais l'Organisation de l'unité africaine semble montrer le bon chemin dans la manière dont elle a géré la crise de Madagascar qui est de prime abord une crise interne. Mais cette crise interne menace cependant la stabilité d’un pays. Le Conseil devrait donc suivre l’Organisation de l'unité africaine et l’appuyer. La question des processus électoraux est la plus délicate à aborder. Tout en étant conscient qu’elle est très souvent à la l’origine des crises, le Conseil doit, tout en ne s’ingérant pas dans les processus souverains menés par les Etats, pouvoir trouver, grâce à l’expérience acquise par l’ONU et l'Organisation de l'unité africaine, une manière de s’impliquer. Ce n’est pas à la veille d’un scrutin qu’il faudrait envoyer une équipe d’observation électorale. Il faudrait s’impliquer plus tôt, et l’ONU devrait mener une action coordonnée avec l'Organisation de l'unité africaine, et avoir un seul porte-parole pour éviter les cacophonies au moment de la déclaration des résultats électoraux.
M. IFTEKHAN AHMED CHOWDHURY (Bangladesh) a d’abord pris l’exemple de la République démocratique du Congo pour regretter que 1e Conseil n’ait pu obtenir la mise en œuvre de ses résolutions alors qu’il a su, pour d’autres situations, prendre les mesures qui s’imposent. Commentant le programme de travail du Groupe de travail, il a souligné la nécessité de ne pas faire double emploi avec les autres acteurs de l’ONU tant il est vrai qu’il revient au Secrétariat d’appliquer les décisions du Conseil. En la matière, le Groupe de travail doit se montrer novateur, a prévenu le représentant. Quant à la coordination avec l’ECOSOC, il a estimé qu’il serait peut-être bon d’examiner d’abord les échecs dans ce domaine. En la matière, le représentant a jugé important pour le Groupe de travail de solliciter davantage la contribution des fondations privées chargées de l’analyse des conflits.
Quant à la coopération avec l’OUA, le représentant a voulu que le Groupe spécial ne fasse pas double emploi avec le Groupe créé par le Secrétaire général. En concluant, il a souligné qu’à propos de l’Afrique, il ne faut pas essayer de réinventer la roue. Il est temps d’agir pour mettre en œuvre les recommandations du Secrétaire général parues en 1998. Quatre ans se sont écoulés et il faut espérer que cette réunion permettra de rétablir l’équilibre.
M. BRUNO RODRIGUEZ PARRILLA (Cuba) a déclaré que plus de réunions du type de celle qui se tient aujourd’hui devraient être organisées par le Conseil. Nul ne connaît mieux les problèmes africains que les Africains eux-mêmes, et leurs dirigeants sont les plus aptes à savoir ce dont leurs pays ont besoin. Cuba pense que ce type de réunion, sur l’Afrique, devrait être présidé par un représentant du groupe africain. La prévention des conflits devrait prendre le pas sur leur résolution tardive et hésitante. Beaucoup de questions évoquées ici ce matin devraient relever de l’Assemblée générale, et l’ECOSOC devrait jouer un rôle plus actif dans les questions concernant la reconstruction et le rétablissement de la paix en Afrique. Nous demandons que les responsabilités du Conseil soient plus clairement délimitées, car nous avons l’impression que le Conseil souvent va au-delà de son rôle et outrepasse son mandat, empiétant sur les responsabilités de l’Assemblée. Nous pensons que le groupe consultatif dont il a été question dans la déclaration de l’ECOSOC, ainsi que le Groupe de travail sur les conflits et le rétablissement de la paix en Afrique devrait soumettre à l’Assemblée le fruit de leurs réflexions sur les questions touchant à la définition des priorités et politiques en faveur de la sécurité et du développement en Afrique. Le Conseil devrait quant à lui éviter la sélectivité, et intervenir efficacement dans le cadre de son mandat, avec le soutien de tous les Etats Membres.
M. ABUZED OMAR DORDA (Jamahiriya arabe libyenne), au nom de la Communauté des Etats du Sahel-Sahara, tout en se félicitant des efforts du Conseil de sécurité dans la prévention et le règlement des conflits en Afrique, a estimé que beaucoup reste à faire pour résoudre ces questions où se conjuguent des facteurs politiques, historiques et sociaux ainsi que les effets négatifs de l’action des puissances coloniales. Le représentant a ensuite fait part des initiatives de sa Communauté en République centrafricaine, en Somalie, au Soudan, au Tchad ainsi que des initiatives prises sur le plan économique. Le représentant a ainsi souhaité que les Nations Unies et le Conseil de sécurité appuient davantage les efforts régionaux qui nécessitent des ressources financières. Il a aussi qualifié de mesure importante la création par le Conseil d’un Groupe de travail spécial et a annoncé la disposition de la Communauté des Etats du Sahel-Sahara à coopérer avec ce Groupe.
M. JOHN DAUTH (Australie) a estimé que la promotion d’une interaction étroite et bien structurée entre le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social et l’OUA peut être un élément important d’une réponse internationale intégrée aux conflits. Malgré les progrès dans leur compréhension, la prévention et le règlement des conflits ne sont toujours pas des sciences exactes, a dit le représentant en jugeant nécessaire d’encourager les initiatives locales. Pour lui, des initiatives comme le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) doivent être encouragées. Soulignant l’importance d’un partenariat entre l’Afrique et le reste de la communauté internationale, le représentant a annoncé que son pays entend adopter une nouvelle politique sur la paix, les conflits et la coopération en faveur du développement. La priorité sera de fournir un programme d’assistance fondé sur une approche globale de la prévention des conflits et de la reconstruction.
M. INOCENCIO F.ARIAS (Espagne) a fait part, au nom de l'Union européenne et des pays associés, de l'importance qu'il accorde au partenariat et à une coopération accrue entre les organes principaux des Nations Unies d'une part et entre les Nations Unies et les organisations régionales et sous-régionales d'autre part. Il est encourageant de constater que les consultations entre les Nations Unies et l'Union africaine sont devenues une routine et que leurs modalités de coopération sur la prévention et la résolution des conflits prend forme. Nous estimons également que la création de deux groupes de travail spéciaux pour l'Afrique au sein du Conseil économique et social et du Conseil de sécurité permettra de renforcer la coopération entre ces deux organes. Nous attachons également une grande importance à notre dialogue avec les organisations sous -régionales comme la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD). Nous soutenons le Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) et attendons avec impatience la tenue de la réunion du G-8 au Canada en juin où nous discuterons de cette initiative ainsi que l'organisation à Durban en juillet prochain du Sommet africain. Nous sommes disposés à travailler à la mise en oeuvre d'un cadre d'actions unifié sur la base de la rationalisation et de l'harmonisation des initiatives existantes. Dans ce cadre, l'examen final de l'Agenda des Nations Unies pour le développement en Afrique dans les années 1990 prévu au mois de septembre prochain, fournit l'occasion d'évaluer le rôle qu'ont joué la communauté internationale et les Nations Unies au regard des priorités africaines.
Le représentant a ensuite cédé la parole au Représentant spécial de la Présidence de l’Union européenne dans les pays de l’Union du Fleuve Mano, M. Hans Dahlgren. Ce dernier a surtout évoqué l’évolution encourageante de la situation en Sierra Leone. Il a toutefois plaidé pour une aide internationale à la reconstruction des infrastructures en soulignant que la paix et la sécurité ne peuvent être maintenues que si l’ensemble de la région reste stable. Dans ce cadre, il a suggéré trois étapes à savoir l’adoption de mesures d’établissement de la confiance au plus haut niveau, la recherche de solutions conjointes pour renverser la tendance à la résurgence des conflits et, enfin, la mise en place, dans ces pays, d’une culture démocratique. La Sierra Leone, a souligné le Représentant spécial, a montré ce qu’il est possible de faire. Evoquant ensuite la situation au Libéria, il a salué l’initiative de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) d’offrir une médiation immédiate et prévenu que, pour ce pays, la priorité sera de mettre sur pied un processus de réconciliation.
M. ROBLE OLHAYE (Djibouti) s’est interrogé d’emblée sur la persistance des conflits en Afrique malgré les initiatives et les efforts initiés par la communauté internationale, en particulier le Conseil de sécurité. Apportant des éléments de réponse, il a cité l’incapacité à prendre des mesures efficaces, opportunes et nécessaires pour traiter des conflits en Afrique; le caractère inadéquat des mandats et des ressources des opérations par rapport à la situation; et le manque de volonté politique de s’attaquer à certaines situations conflictuelles. Pour le représentant, la vraie question est de savoir si le Conseil peut ou veut accorder à l’Afrique la même attention qu’il accorde aux autres conflits.
M. A GOPINATHAN (Inde) a estimé que, bien que les questions et aspects économiques et sociaux aient une grande importance en matière de paix et de sécurité, les interfaces qui leur sont liées et qui sont traitées par le Conseil et l’ECOSOC, devraient l’être sous la supervision de l’Assemblée générale, qui est l’organe intergouvernemental suprême, légitime et le plus représentatif. Le Conseil de sécurité et l’ECOSOC doivent rendre compte à l’Assemblée, et toute coopération entre les deux premiers devrait être soigneusement discutée afin que ne se répète pas ce qui s’est passé l’an dernier, quand tous les efforts en vue d’une réunion entre eux ont dû être abandonnés. Concernant la question de l’observation des élections, avant que le Conseil ne se lance dans ce genre d’activités, il doit s’élever clairement contre les coups d’Etat militaires et tout changement inconstitutionnel de régime quel qu’en soit le lieu. Il est en effet inacceptable d’embrasser des dictateurs militaires en les considérant comme faisant partie de solutions à des problèmes qui se posent au niveau mondial, alors que ce sont eux qui sont un problème en montrant un mauvais exemple par leur méthode d’accession au pouvoir. Sur la création de «groupes d’amis» dans des situations spécifiques de conflits, il faudrait d’abord que ledit groupe réunisse vraiment des «amis» de toutes les parties au conflit et qu’il ait la confiance de tous les acteurs. Concernant la coopération avec l'Organisation de l'unité africaine et les organisations sous-régionales, l’Inde estime que le Groupe de travail doit établir des relations fortes avec l'Organisation de l'unité africaine, mais pense fermement que la responsabilité du maintien de la paix et de la sécurité doit rester dans les prérogatives du Conseil. Aucune division du travail ne devrait amener le Conseil de sécurité à se laver les mains et ne pas respecter ses responsabilités.
Nous sommes surpris que le programme de travail du Groupe de travail sur la prévention des conflits et la reconstruction en Afrique ne mentionne pas une participation institutionnalisée des Etats Membres de l’ONU non-membres du Conseil de sécurité. Nous espérons que cet oubli sera comblé. Concernant la question du trafic illicite des armes légères, nous espérons que le Groupe de travail recevra un mandat lui permettant de l’examiner attentivement au vu des dégâts que causent ces armes. Le Conseil doit agir fermement contre les pays qui fabriquent ces armes et qui tournent les yeux ailleurs quand leurs ressortissants en font un commerce lucratif, mais morbide dans d’autres régions du monde.
M. YOSHIYUKI MOTOMURA (Japon) a estimé qu'il était nécessaire d'adopter une approche globale, intégrant les aspects politiques, sociaux et économiques, pour le règlement des différends. Une telle approche exige de bonnes modalités de coopération entre le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social. Se référant à la création possible d'un groupe consultatif au sein de l'ECOSOC sur les conflits émergeants en Afrique, le représentant a souligné la nécessité d'éviter les doubles emplois entre les activités de celui-ci et celles du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur la prévention et la résolution des conflits en Afrique. Si un tel groupe était créé au sein de l'ECOSOC, il faudrait que les deux organes définissent les moyens de combler le fossé entre les activités d'urgence humanitaire pendant la phase des conflits et les activités de reconstruction et d'aide au développement une fois que le conflit a été résolu. Le représentant a fait part de son soutien au Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) dont l'esprit coïncide avec l'approche holistique recommandée. Le représentant a insisté pour que le Groupe de travail du Conseil reçoive des informations de la part de non-membres du Conseil de sécurité qui disposent de l'expérience et de la capacité à jouer un rôle important dans les situations de reconstruction et d'aide au développement.
M. ALLIEU I. KANU (Sierra Leone) a déclaré que les causes des conflits africains sont toujours étroitement liées à l’instabilité régionale. Les solutions à leur apporter doivent donc prendre en compte cette dimension régionale. L’Afrique de l’Ouest en particulier est une région au sein de laquelle l’imbrication des différents conflits alimente la pauvreté qui, elle-même, nourrit les conflits. Ce phénomène menace de faire de l’Afrique de l’Ouest une région complètement sinistrée. La Sierra Leone est restée longtemps inscrite à l’ordre du jour du Conseil de sécurité. Mais grâce à l’engagement du Conseil et des Nations Unies, le peuple sierra-léonais connaît de nouveau l’espoir. La création imminente du Tribunal spécial, la récente tenue d’élections présidentielles et d’élections législatives ont été des défis relevés avec succès, et dont les résultats devraient encourager le Conseil à rester engagé. La situation dans les pays voisins reste précaire et continuera de faire planer une menace de déstabilisation sur la Sierra Leone. Le nombre élevé de réfugiés et de personnes déplacées de l’intérieur reste également préoccupant. La Sierra Leone souhaite exprimer son soutien aux initiatives venant du continent africain et nous tenons à rendre hommage à l’appui que l’ONU apporte aux pays africains sur cette question. Nous remercions en particulier le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour sa contribution au réseau des femmes pour la paix dans la région du Fleuve Mano.
Le rapport du Secrétaire général met justement l’accent sur le lien qui existe entre la paix et le développement, et il fait des propositions globales et intégrées pour la prévention des conflits. Un des éléments qui contribuent le plus aux conflits africains est celui de l’accumulation et de l’usage illicite des armes légères. La Sierra Leone a souffert de cette situation. En ce qui concerne le soutien que la communauté internationale doit apporter à l’Afrique, notre délégation pense qu’il devrait toucher les domaines du développement durable, du renforcement des capacités administratives, de la croissance économique et des investissements dans les ressources humaines.
M. CRISPIN GREY-JOHNSON (Gambie) a souligné qu’il fallait reconnaître que le problème de la paix et de la sécurité et celui du développement constituent les deux côtés d’une même médaille si l’on veut que l’ONU puisse réellement rendre service aux pays africains. Après s’être réjoui du bon déroulement des élections en Sierra Leone, le représentant a évoqué la situation concernant l’Union du Fleuve Mano. Il a estimé qu’à cet égard, l’ONU devrait élargir son approche et se pencher de manière plus réaliste sur le problème. Il faudrait notamment que les dimensions guinéennes du problème soient prises en compte et a suggéré qu’un bureau de représentation de l’Union soit ouvert dans ce pays et que le mandat de la Mission en Sierra Leone soit élargi à cette fin. Le représentant a aussi abordé la question des mercenaires qui se trouvent en Afrique de l’Ouest. Il a estimé que l’ONU devait formellement reconnaître l’existence de ces acteurs dans différents conflits, afin d’élaborer des programmes appropriés considérant véritablement l’élément important qu’ils représentent dans la quête d’une paix durable dans cette sous-région. Il a regretté qu’à l’heure actuelle rien ne soit fait pour démobiliser ces mercenaires, qui s’étant déjà déplacés de la Sierra Leone vers le Libéria pourraient bien bouger vers d’autres pays lorsque les tensions dans ce dernier se seront apaisées. En collaboration avec la CEDEAO, l’ONU devrait prendre des mesures pour les empêcher d’avoir accès aux armes légères qui les maintiennent en activité. Pour cela, les fabricants d’armes du monde occidental devraient être davantage tenus pour responsables et encourager à procéder à leur commerce de manière plus sélective.
M. Grey-Johnson a ensuite estimé que les activités de maintien de la paix de l’ONU devraient prendre désormais une tournure plus volontaire en matière de prévention des conflits avant leur éclatement. L’Organisation semble encore en effet mieux préparée à réagir qu’à intervenir de manière préventive. C’est pourquoi, elle devrait encourager et soutenir les initiatives individuelles ou bilatérales de prévention et conciliation des Etats. Le représentant a aussi estimé que l’appui après les conflits semblait demeurer un mystère pour l’Organisation. Tout se passe comme si les Nations Unies avaient hâte de quitter un pays dès les premiers signes d’accalmie, a-t-il déploré, ajoutant que certains semblaient actuellement très pressés de commencer le retrait de la Mission en Sierra Leone. Selon lui, les mandats de maintien de la paix ne devraient pas s’arrêter avec la cessation des hostilités. Ils devraient plutôt contenir des programmes solides de reconstruction des capacités. Précisant que le plus grand mal dont souffrent bien souvent les pays sortant d’un conflit est la fuite des cerveaux et des compétences, il a demandé au Conseil économique et social de se pencher sur cette question afin de trouver des mesures novatrices, peut-être grâce à des programmes d’encouragement au retour volontaire.
M. NOUREDDINE MEJDOUB (Tunisie) a salué la mise en place du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur la prévention des conflits en Afrique. Il a jugé que le Groupe devrait s’inspirer, entre autres, du rapport publié en 1998 par le Secrétaire général sur les causes des conflits en Afrique. Il a insisté sur l’importance de l’interaction entre le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social (ECOSOC) dans les efforts de prévention des conflits et dans la consolidation de la paix. Il a rappelé qu’en février 2001, la Tunisie, qui présidait alors le Conseil, avait exhorté les Etats Membres à réfléchir sur les voies et moyens de préserver et de consolider la paix tant avant les conflits qu’au sortir de ceux-ci. Il a salué les mesures prises par les Représentants spéciaux du Secrétaire général, dans le cadre des opérations de maintien la paix, pour mobiliser les appuis politiques internationaux nécessaires afin de mener à bien les processus de reconstruction économique et social post-conflit. M. Mejdoub a souligné ensuite le rôle central des organisations régionales et sous-régionales dans la prévention et la résolution des conflits, de même que dans la consolidation de la paix. A ce titre, il a recommandé le renforcement des capacités de l’Organisation de l’unité africaine et demandé que soient développées des initiatives conjointes de prévention des conflits. Il a souhaité également que soient associées des organisations sous-régionales telles que la SADC, l’IGAD ou la CEDEAO, estimant que des expériences telles que celle du règlement du conflit en Sierra Leone ou au Libéria méritent d’être reconnues par le Conseil comme étant de nature à servir d’exemple dans l’approche de la résolution des conflits. Il a ensuite mis en garde contre le manque de ressources des organisations régionales et sous-régionales qui, pourtant, peuvent assumer la mission de consolidation de la paix après les conflits.
Le représentant a regretté que l’Afrique qui n’a pas été en mesure de rompre avec la pauvreté compte encore 34 pays parmi les 49 pays les moins avancés (PMA), pays paralysés par une lourde dette, une dépréciation des prix des produits de base, une diminution de l’aide publique au développement (APD) et une diminution des investissements directs étrangers (IED). Il a jugé que la mise en oeuvre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) est essentielle pour le continent et a suggéré que soient prises en compte les causes des conflits dans toutes les approches du développement, M. Mejdoub citant le Mahatma Gandhi pour conclure en ces termes: «La pauvreté est la pire forme de violence et d’insécurité».
M. GERARD CORR (Irlande) a déclaré que le Conseil devait renforcer sa coopération avec le Conseil économique et social (ECOSOC). Le niveau de l’activité de l’ONU en matière de maintien de la paix et de la sécurité pourrait s’améliorer et s’appuyer sur des initiatives plus audacieuses, notamment quand il s’agit de l’Afrique. Plusieurs orateurs ont dit que chaque situation africaine avait ses particularités et qu’il fallait trouver à chacune des solutions qui lui sont adaptées. L’OUA, par sa coopération avec l’ONU, peut apporter de nouvelles manières de voir les questions à résoudre. L’intégration des questions humanitaires, économiques et militaires, devra se faire de manière plus systématique quand on cherchera des réponses aux problèmes que rencontre le continent africain. Il est temps que l’ONU et l’OUA adoptent de nouvelles méthodes, plus efficaces, pour travailler ensemble et optimiser leurs moyens. Le nouveau groupe de travail, qui sera créé après examen d’un projet de résolution, devrait pouvoir réfléchir sur ces questions. Il faudrait améliorer les capacités de diplomatie préventive et de médiation des Nations Unies en Afrique. Quant à l’ECOSOC, cela fait une quinzaine d’années qu’il traite de plus en plus des questions africaines. Mais l’ECOSOC n’a pas suffisamment été soutenu au niveau international et multilatéral.
La question des sanctions évoquée ce matin par M. Ibrahima Fall doit faire l’objet d’une réflexion profonde, notamment quand ces sanctions concernent l’Afrique. Nous devons faire en sorte qu’elles soient beaucoup plus ciblées et tout doit être fait pour minimiser leur impact au niveau régional, sur un continent qui souffre déjà de la pauvreté. Concernant la question du développement, tout en nous félicitant du NEPAD, nous tenons à relever que d’autres questions doivent être résolues, comme celle de la dette extérieure, qui pèse considérablement sur les économies africaines. Nous proposons d’autre part que les impacts des décisions du Conseil sur le développement des pays africains soient étudiés. Il est par ailleurs frappant, sur le plan humanitaire et des programmes de reconstruction post-conflit, de constater que les appels consolidés lancés en faveur de l’Afrique mobilisent très peu de contributions financières. Il faut accomplir davantage et nous devons soutenir les pays africains, au moment où ils mettent en place des structures de gouvernance économique et politique plus ouvertes. Le NEPAD, à lui seul, ne pourra apporter une solution à tous les besoins du continent. C’est pourquoi, la communauté internationale doit rester engagée aux côtés de l’Afrique.
M. DUMISANI S. KUMALO (Afrique du Sud) a exprimé la satisfaction de sa délégation pour le mandat assigné au Groupe de travail présidé par l’Ambassadeur Jagdish Koonjul de Maurice. Il a exhorté le Conseil de sécurité et l’ECOSOC à intensifier leur collaboration pour répondre aux problèmes rencontrés par les pays africains qui sont le théâtre de conflits meurtriers affectant l’ensemble du continent. A ce titre, le représentant a jugé que les conflits en Afrique trouvent leurs racines, entre autres, dans la pauvreté et le sous-développement et a souligné que ces conflits provoquent l’exode de millions de personnes, enfants, femmes, civils innocents. Aussi, il a invité les Etats Membres à agir sur ces aspects et a estimé que, conformément à son mandat, qui recouvre le maintien de la paix et de la sécurité, le Conseil de sécurité doit établir des arrangements avec les organisations régionales. A ce titre, M. Kumalo a précisé que le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) a pour objectif de placer les pays africains sur la voie d’une croissance et d’un développement durable.
A cet effet, il a invité les Etats Membres à aider cette instance dans la réalisation des objectifs premiers tels que la promotion de conditions de sécurité et de développement, la mise en place d’un mécanisme d’alerte rapide, le renforcement des capacités africaines en matière de maintien de la paix et enfin le renforcement de la démocratie et de la bonne gouvernance. Il a souhaité que le Groupe de travail du Conseil de sécurité fasse tout son possible pour assurer la coordination entre le Conseil de sécurité, l’ECOSOC et le NEPAD. Il a encouragé le Conseil de sécurité à continuer d’être ouvert à l’avis des pays africains qui sont aussi affectés par les conflits même s’ils ne sont pas directement impliqués. Enfin, M. Kumalo a exhorté les membres du Conseil à poursuivre la pratique des missions sur le terrain pour rencontrer tous les acteurs engagés dans la résolution des conflits du continent africain.
M. MURARI RAJ SHARMA (Népal) a déclaré que les ressources de l’Afrique, qui ont enrichi les colonisateurs mais n’ont jamais profité aux Africains eux-mêmes, devraient être mises en valeur au profit des peuples du continent. Il revient aux dirigeants africains d’assurer la reconstruction de leurs pays et de veiller aux libertés et au développement de leurs populations. Pour le moment, la pauvreté est tellement profonde sur le continent que l’Afrique ne peut se redresser seule et a besoin d’aide. La communauté internationale a le devoir d’aider les Africains à prendre en main leur propre destin. L’ONU est restée engagée aux côtés des pays africains dans la limite de ses moyens. Mais comme d’autres régions du monde, l’Afrique a besoin de plus de soutien. La lutte contre le VIH/sida ou le paludisme nécessite des moyens que le continent africain n’a pas lui-même. La communauté internationale devrait, pour une fois, faire preuve d’un véritable esprit de justice et d’équité et, sur le plan économique par exemple, ouvrir les marchés des pays du Nord aux produits des pays pauvres d’Afrique. Car les conflits, bien souvent, sont étroitement liés à des situations de pauvreté. La paix et la sécurité durables en Afrique exigent une approche globale qui intègre un échantillon large de moyens et de stratégies.
M. T.O. APATA (Nigéria) a partagé les observations et propositions faites ce matin par M. Kébé, représentant de l’Organisation de l’unité africaine (OUA), demandant au nouveau Représentant spécial du Secrétaire général, M. Ibrahima Fall, de tenir compte de ces observations dans la mise en oeuvre de ses initiatives futures sur le terrain. Il a souligné le rôle des organisations sous-régionales et des dirigeants africains, mentionnés dans la matinée par les Ambassadeurs Koonjul et Levitte, et a fait observer que de nombreux dirigeants africains tels que les Présidents Mbeki, Konaré ou Obasanjo s’investissent dans des interventions silencieuses pour prévenir les conflits, le représentant demandant au Conseil de ne pas négliger cet aspect de la diplomatie préventive. Le Groupe de travail doit oeuvrer en coopération étroite avec les pays africains et le Secrétaire général, tout comme le Conseil de sécurité doit tenir compte de la contribution de ces chefs d’Etat dans leurs approches. Abordant ensuite le cadre de concertation et de coopération entre la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et les Nations Unies, M. Apata a demandé à ce que cette pratique soit étendue à la Communauté pour le développement de l’Afrique australe (SADC) ou à l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD). Il a insisté,
commentant en cela la proposition de M. Levitte, sur l’importance de la prévention des crises nées des élections, en recommandant l’envoi de missions au moins six mois avant les élections plutôt que d’intervenir après le déclenchement de conflits consécutifs à ces élections, ce qui est plus coûteux. Il a pris l’exemple de Madagascar ou de la Centrafrique pour illustrer son argumentation, demandant au Conseil de sécurité de ne pas retirer les forces de maintien de la paix immédiatement après les élections pour faire des économies de bouts de chandelle et insistant à ce titre sur le cas de la Sierra Leone.
S’agissant du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), M. Apata a souligné que cette structure est dotée d’un mécanisme de contrôle chargé de faire appliquer les règles de bonne gouvernance, de démocratie et de prévention des conflits, ce qui traduit bien la vision des dirigeants africains. S’agissant du rôle du Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest, M. Ibrahima Fall, dans la résolution des conflits, M. Apata a recommandé la tenue de réunions de tous les représentants spéciaux du Secrétaire général pour échanger leurs informations et leurs points de vue sur ces questions. Il a exhorté M. Fall à travailler en étroite collaboration avec les dirigeants de la CEDEAO et a proposé ensuite au Groupe de travail sur l’Afrique de se réunir en séances officieuses avec les membres du Groupe africain.
M. JEREMY GREENSTOCK (Royaume-Uni) a dit que le Groupe de travail spécial sur les conflits en Afrique était une bonne idée. Son travail doit apporter des idées nouvelles. La coordination, dont il est question depuis le début de cette réunion, et que l’on a vue à l’œuvre entre autres en Sierra Leone, est un exemple de stratégie qui marche. Nous avons examiné les questions qui se posent entre le moment où prend fin l’aide humanitaire dans un pays sortant de conflit, et celui où sont lancés des programmes de développement. Nous sommes heureux que l’Union africaine prévoit la création en son sein d’un Conseil de paix et de sécurité avec lequel le Conseil de sécurité, nous l’espérons, pourra travailler fructueusement. Nous devons nous pencher sur les questions de financement et de reconstruction, alors que le Conseil de sécurité n’est peut-être pas le lieu le plus compétent pour parler de ce genre de choses. Peut-être les institutions-sœurs de l’ONU pourraient-elles nous aider.
Le Royaume-Uni, qui s’intéresse de près à la question de la gouvernance, est heureux de voir les Africains prendre des initiatives sur cette question. Quelqu’un a cependant dit que les problèmes de l’Afrique sont trop lourds pour les seuls Africains. Nous sommes alors tous ici, un peu africains, tout en reconnaissant aux Africains le devoir de prendre les devants sur le plan politique et de nous appeler, nous de l’extérieur, pour les aider dans un esprit de partenariat. Les liens entre conflits, paix et développement, dont ont parlé certains intervenants, sont un domaine qui doit retenir notre attention. Nous devons, à cet égard, travailler de très près en coordination avec l’ECOSOC, et nous soutenons ce qui a été dit par le représentant de l’Espagne sur ce point. Le Conseil doit tirer les leçons à la fois de ses succès et de ses échecs en Afrique, notamment dans la situation qui prévaut dans la région des Grands Lacs. La question du VIH/sida doit rester inscrite à notre agenda, et la question des programmes de désarmement, de démobilisation, de rapatriement, de réhabilitation et de réinsertion (DDRRR) doit être mieux cernée sur le continent africain. Notre délégation, qui présidera le Conseil au mois de juillet, compte organiser un atelier sur l’Afrique, sous la direction d’Africains qualifiés et sachant ce qu’ils veulent.
M. PAPA LOUIS FALL (Sénégal) a indiqué son pays souscrit pleinement à la démarche du Groupe de travail spécial visant à examiner, de manière approfondie, les moyens d’intégrer le Conseil économique et social, le nouveau Bureau des Nations Unies en Afrique de l’Ouest basé à Dakar, l’Organisation de l’unité africaine et la société civile, dans la formulation de stratégies pour un partenariat fécond et de type nouveau. La nécessaire collaboration et la coordination vitale des activités entre ce Groupe et le Groupe consultatif spécial pour les pays africains sortant d’un conflit, constituent une démarche capitale qui devrait déboucher impérativement sur l’amélioration des méthodes de travail des différentes structures de l’ONU et sur le renforcement de la cohésion de leurs actions, a estimé M. Fall. Evoquant le cas de la Guinée-Bissau, «cas typique de pays où tous les indices d’un chaos social existent et où la communauté internationale, en spectateur, attend que les exigences de l’application de critères de bonne gouvernance et de transparence soient remplis pour intervenir», le représentant a lancé un appel pressant à la communauté internationale, y compris aux institutions de Bretton Woods, afin qu’elles accordent rapidement l’assistance nécessaire à ce pays. Il a également plaidé en faveur de la République centrafricaine, qui a besoin d’aide pour l’assister à résoudre les problèmes liés au fonctionnement des institutions et à mettre en place les processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion.
Le Sénégal a en outre attiré l’attention du Groupe de travail sur un fléau devenu récurrent dans de nombreux pays africains, et notamment en Afrique de l’Ouest: la prolifération et la circulation des armes illicites, au regard de l’impact du phénomène sur la stabilité, la sécurité et le développement des pays de la sous-région. M. Fall a souhaité que le Groupe de travail, en rapport avec le Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général en Afrique de l’Ouest, aide les pays concernés à coordonner plus efficacement les différentes actions entreprises, tant au plan national qu’à l’échelon sous-régional, voire continental. Pour sa part, le Sénégal soutient la constitution d’un partenariat fonctionnel avec les principaux acteurs sous-régionaux, dans les domaines aussi prioritaires que l’alerte rapide, le renforcement des ressources humaines et des capacités, le processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration ou le développement.
M. VALERIY KUCHINSKY (Ukraine) a dit approuver le concept de travail du Groupe spécial du Conseil de sécurité sur les pays émergeant de situations de conflit. Il est important d'inviter aux réunions du Groupe les représentants du monde politique, financier et universitaire pour connaître leur position sur des situations de conflit spécifiques. Il serait également utile d'adresser cette invitation, si nécessaire, directement aux parties au conflit et aux pays contributeurs de troupes. Nous appuyons également la constitution de groupes d'amis qui devraient être ouverts à tous ceux dont la contribution à la résolution d'un conflit s'avère constructive. Nous souhaitons voir l'engagement de davantage d'acteurs africains dans le cadre de la mise en place d'un groupe d'amis pour le règlement des conflits en Afrique. Il est important que le Groupe de travail du Conseil de sécurité développe des mécanismes efficaces de coopération avec les Nations Unies, l'Assemblée générale et le Conseil économique et social. Compte tenu du fait que ce Groupe met aujourd'hui l'accent sur les mesures de confiance de l'Union du Fleuve Mano, il est important qu'il tisse des liens avec le Bureau régional des Nations Unies en Afrique de l'Ouest et la CEDEAO.
M. MOHAMMED LOULICHKI (Maroc) a fait observer que la nature et la portée du mandat du Groupe de travail chargé de la résolution et de la prévention des conflits en Afrique peut poser, de prime abord, le problème d’un possible double -emploi avec les activités du Groupe de travail de l’Assemblée générale chargé de l’application des recommandations du rapport du Secrétaire général sur les causes des conflits. C’est pourquoi, et en dépit du caractère informel du Groupe de travail du Conseil, une délimitation des champs d’intervention des deux organes paraît souhaitable. Le représentant a estimé ensuite, qu’étant donné l’interaction entre la consolidation de la paix et le développement socioéconomique des pays émergents d’un conflit, la coordination des activités du Conseil économique et social et celles du Conseil de sécurité s’impose. Une telle coordination aurait de plus le mérite d’offrir une visibilité accrue au gouvernement du pays concerné ainsi qu’à ses partenaires, qu’il s’agisse des pays donateurs, des institutions financières internationales ou des investisseurs privés, a expliqué M. Loulichki. Dans le cadre de la coordination souhaitée par le Conseil pour éviter l’aggravation d’un conflit, le stabiliser ou prévenir l’éclatement d’un nouveau conflit, une mention particulière devrait être accordée à la coopération et à la coordination avec le Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR) et avec le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a poursuivi le représentant. Ces deux instances jouent en effet un rôle précieux et irremplaçable dans le traitement des aspects humanitaires de conflits et doivent être en mesure de remplir pleinement leur mandat vis-à-vis des réfugiés et des personnes détenues et, ce, indépendamment du règlement politique final. C’est pourquoi, l’ONU devrait adopter des mesures concrètes pour assurer un respect rigoureux par toutes les parties au conflit des normes du droit international humanitaire.
Abordant la question des mesures de confiance à prendre dans la région du Fleuve Mano, M. Loulichki a rappelé que le sommet des chefs d’Etat de la Guinée, du Libéria et de la Sierra Leone, tenu récemment dans son pays à Rabat, a enclenché une dynamique de paix, grâce à l’adoption de mesures liées à sécurisation des frontières communes, au rapatriement des réfugiés, à l’assistance aux personnes déplacées et à la réactivation du Secrétariat de l’Union du Fleuve Mano. Quelques semaines plus tard, une réunion de suivi au niveau des Ministres des affaires étrangères de ces pays a adopté une série de mesures de confiance dont la mise en oeuvre mérite tout le soutien de la communauté internationale afin de rétablir la paix dans cette région.
Le représentant a aussi évoqué le rôle des représentants spéciaux du Secrétaire général, qu’il a qualifié de «primordial» dans l’exécution du mandat de l’ONU concernant un différend ou un conflit déterminé. Ce mandat, selon lui, commence par la garantie du respect scrupuleux par toutes les parties du cessez-le-feu, point de départ et base fondamentale de tout processus devant mener à une solution politique définitive du conflit. Il a ajouté que la coordination permanente entre les différentes institutions des Nations Unies impliquées constitue une valeur ajoutée appréciable et un atout majeur dans le succès d’une mission. Il a aussi proposé la tenue de réunions périodiques, sous les auspices du Secrétaire général, des représentants spéciaux chargés des opérations de maintien de la paix en Afrique, estimant qu'elles pourraient favoriser un échange des expériences et des informations pouvant s’avérer utiles pour améliorer les performances des missions.
Evoquant en dernier lieu, la coopération avec les organisations régionales et sous-régionales et autres Etats, M. Loulichki a estimé qu’elle devrait être étendue à des instances comme la SADC, la CEDEAO, l’IGAD ou la SENSAD. De même, des Etats dont le voisinage ou la qualité des relations avec les parties au conflit les prédisposent à jouer un rôle de rapprochement et de conciliation, gagneraient à être associés ponctuellement au travail du Comité spécial du Conseil. En conclusion, le représentant a rappelé que le présent débat ne doit pas faire oublier que la paix en Afrique demeure liée au développement et que l’ONU et la communauté internationale doivent faire avancer ces deux objectifs en même temps.
M. ALFONSO VALDIVIESO (Colombie) a estimé que les apports conjugués de l’ECOSOC, de l’OUA et des pays africains contribueront à enrichir l’approche du Conseil de sécurité dans la consolidation de la paix et de la sécurité en Afrique. Il a souhaité que le Groupe de travail puisse contribuer à combler le vide qui a pu être souligné par certaines délégations quant aux actions de prévention du Conseil. Sa délégation apporte son soutien à un débat de haut niveau au sein de l’ECOSOC sur le développement de l’Afrique et salue la désignation du Représentant spécial du Secrétaire général pour l’Afrique de l’Ouest en vue de renforcer la coopération avec les organisations sous-régionales. L’absence de coordination entre les organes principaux et subsidiaires des Nations Unies doit être surmontée, a estimé M. Valdivieso, et il a demandé que les efforts de chacune de ces instances ne soient affectés par l’absence de coopération entre elles. Il a insisté sur les orientations proposées en matière de renforcement des capacités du Secrétariat dans l’appui aux processus électoraux et a également jugé pertinente la proposition de M. Fall, Secrétaire général adjoint des Nations Unies, concernant la prise en compte par le Conseil de la question du commerce illicite des armes légères. Il a exhorté le Conseil de sécurité et les Etats Membres à adopter une approche commune du développement de l’Afrique, de la prévention des conflits et de la consolidation de la paix sur ce continent.
M. DAUDI MWAKAWAGO (République-Unie de Tanzanie) a indiqué que si, en ce qui concerne l’Ethiopie et l’Erythrée, l’Angola et la Sierra Leone, les situations de guerre ont été résolues par des mécanismes différents, une chose est cependant certaine: dans chacun de ces cas, le Conseil de sécurité a oeuvré en coopération étroite avec les organes régionaux et locaux. Il a recommandé au Groupe de travail d’isoler les éléments qui ont permis le règlement de ces conflits afin de faciliter les résolutions futures. En ce qui concerne la République démocratique du Congo, le représentant a estimé qu’il est encourageant que le dialogue intercongolais qui s’est tenu à Sun City, en Afrique du Sud, ait permis d’accomplir des progrès substantiels. Il a souhaité que le Conseil reste engagé jusqu’à ce que toutes les questions soient réglées et que le processus reste entre les mains des Congolais. M. Mwakawago s’est également félicité de ce que des progrès aient été enregistrés au Burundi, notamment grâce à l’arrangement transitoire de partage du pouvoir. Mais, ayant fait observer que le Gouvernement de transition, qui a pris ses fonctions le 1er novembre dernier, n’a malheureusement pas mis un terme aux combats, le représentant a regretté que les promesses faites à Paris n’aient pas été tenues et que l’aide promise au Gouvernement de transition n’ait pas été fournie. Nous sommes convaincus que, si une assistance avait été fournie au Gouvernement transitoire, il lui aurait été plus facile d’isoler les rebelles et de consolider la paix, a expliqué le représentant.
Evoquant ensuite les mouvements de personnes, qu’il s’agisse des réfugiés ou des personnes déplacées à l’intérieur de leurs frontières, le représentant a indiqué que son pays accueille en ce moment plus de 500 000 réfugiés en provenance du Burundi et 170 000 en provenance de la République démocratique du Congo, ce qui représente une «énorme responsabilité». Pour ce qui est de la situation en Sierra Leone, le représentant a dit qu’à son avis, l’opération de maintien de la paix se composait en fait de deux missions: l’une sous l’égide du Conseil de sécurité et des Nations Unies, et l’autre sous l’égide d’un des principaux membres du Conseil. Il a fait observer que ce modèle ne saurait se reproduire ailleurs sur le continent et a, en conclusion, demandé que les questions de l’assistance humanitaire et du développement reçoivent toute l’attention qu’elles méritent.
M. MOHAMMED SALEH MOHAMMED SALEH (Bahreïn) a souhaité que cet échange de vues sur la prévention et le règlement des conflits en Afrique permette de parvenir à des solutions constructives et a exhorté le Groupe de travail présidé par M. Koonjul à faire des propositions novatrices. Il a prôné le renforcement de la coordination entre le Conseil de sécurité et l’ECOSOC dans le domaine de la prévention des menaces à la paix et à la sécurité internationales. Il a poursuivi en recommandant une étroite collaboration entre le Secrétariat des Nations Unies, les organes subsidiaires, les institutions de Bretton Woods, les organisations internationales et les organisations humanitaires afin de répondre aux situations de conflits ou post-conflits. Il a estimé qu’investir dans le capital humain est un des moyens de contribuer efficacement à la prévention des conflits armés et a souligné qu’à cet égard, la contribution du segment de haut niveau de l’ECOSOC est importante dans cette dynamique du développement des ressources humaines. Le représentant a souhaité que la coordination et la coopération entre le Conseil de sécurité et l’ECOSOC s’intensifient notamment par la tenue de réunions conjointes et a estimé que les réunions de concertation entre les pays africains et les Etats Membres du Conseil de sécurité pourraient contribuer au renforcement de la prévention des conflits. Le rôle du Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest est essentiel pour intensifier les relations avec les organisations sous-régionales, a déclaré le représentant, souhaitant que cette coopération se poursuive aussi avec l’OUA dont il a salué le Mécanisme de prévention et de gestion des conflits.
M. ADOLFO AGUILAR ZINSER (Mexique) a déclaré que le Conseil avait la responsabilité du maintien de la paix en Afrique. Au-delà des conflits qui existent dans la région, l’Afrique a besoin qu’on lui accorde autant d’attention qu’à d’autres régions du monde, et le Groupe de travail sur l’Afrique a permis au Conseil d’avoir une vue plus juste et plus complète de la situation sur le continent. Ce qui est en jeu ici, c’est la capacité même du Conseil à s’acquitter des responsabilités que lui a confiées la Charte des Nations Unies. Il faut reconnaître aux Africains le droit et la compétence de définir et d’identifier eux-mêmes ce dont ils ont besoin. Le Conseil doit respecter les choix des Africains, car c’est la seule voie qui puisse assurer le succès de ses interventions. A cet égard, le Conseil doit consulter les organisations africaines. En dépit de ses attributions étroites, le Conseil ne peut ignorer le lien évident qui existe entre développement économique et social et maintien de la paix et de la sécurité. C’est pourquoi, sa coopération avec l’ECOSOC est cruciale. Le Mexique tient à souligner que la question de la République démocratique du Congo, dont les ressources pourraient faire la locomotive de la région des Grands Lacs, doit être résolue dans le respect des résultats du dialogue intercongolais. Nous faisons confiance aux forces vives de la nation congolaise pour qu’elles parviennent à un accord qui garantisse l’intégrité de leur pays et nous espérons que l’Afrique du Sud pourra contribuer à la solution de la question. La résolution de la question de la RDC sera le test sur lequel on pourra mesurer les espoirs de paix et de stabilité en Afrique. Le Mexique pense, sur une autre question, que l’autodétermination du peuple sahraoui devrait être garantie à travers une consultation populaire organisée de manière juste dans le territoire. Le Conseil de sécurité ne saurait imposer unilatéralement une solution à la question qui ne satisfasse pas toutes les parties en cause.
M. MWELWA C. MUSAMBACHIME (Zambie) a déclaré que la présente réunion est la bienvenue car elle permet d’évaluer les résultats obtenus en Afrique et de proposer des nouvelles orientations. Compte tenu de la nature complexe des con flits en Afrique, le Groupe de travail du Conseil a l’énorme responsabilité de trouver des voies et moyens novateurs pour régler les causes profondes de ces conflits et parvenir à une paix et une sécurité durables sur le continent. Cette réunion intervient aussi à un moment où l’on assiste à un certain nombre de développements positifs en Afrique, comme en Sierra Leone, en Angola ou même en Erythrée/Ethiopie. Parallèlement toutefois, les événements se déroulant dans d’autres pays comme Madagascar, la République démocratique du Congo, la Somalie et le Libéria, sont malheureusement beaucoup moins réconfortants. La situation dans ces pays exige un effort concerté de tous et la communauté internationale doit prendre des mesures pour restaurer la paix et éviter toute perte de vie supplémentaire.
M. PHILIPPE DJANGONE-BI (Côte d’Ivoire) a salué la nouvelle méthode de travail du Conseil de sécurité qui réserve une place de choix à l’Afrique et a encouragé le Groupe de travail sur la prévention et la résolution des conflits en Afrique à poursuivre ses travaux avec courage et détermination. Il a rappelé que, lors de la réunion du Conseil consacrée à l’Afrique le 29 janvier 2002, les pays africains avaient souligné l’importance de la diplomatie préventive parallèlement à une diplomatie curative pour faire face à des conflits qui résultent, entre autres, de l’absence de démocratie ou de bonne gouvernance, de la pauvreté, de l’analphabétisme et de la maladie, mais aussi de la prolifération et du trafic illicite des armes légères. Pour soigner le mal, il faut tout d’abord commencer par l’identifier, a fait observer M. Djangone-Bi avant d’inviter les Etats Membres à passer à des actes concrets sur la base d’une obligation de résultats. Il a salué l’initiative du Secrétaire général qui vient d’ouvrir un bureau régional des Nations Unies en Afrique de l’Ouest ainsi que l’entrée en vigueur de la Cour pénale internationale qui constitue à ses yeux un instrument majeur de prévention et de résolution des conflits.
S’agissant des travaux du Groupe de travail sur l’Afrique, le représentant de la Côte d’Ivoire a insisté sur la nécessité de privilégier une approche pragmatique et d’associer les institutions de Bretton Woods, l’Union européenne et le G-8 à son action afin de lutter contre l’appauvrissement du continent. Il a encouragé une nouvelle démarche qui implique les bailleurs de fonds dans tout le processus de développement économique, y compris dans les processus électoraux, afin d’accompagner les choix des populations et non de leur imposer d’autres politiques. Il a invité le Groupe de travail à s’impliquer pleinement dans la mise en oeuvre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) et à examiner de près la question de la prolifération des armes légères dans son approche de prévention des conflits.
M. ZHANG YISHAN (Chine) a salué le travail accompli par le Groupe de travail présidé par l’Ambassadeur Koonjul et a souhaité qu’il puisse s’inspirer des recommandations faites, entre autres, par les Etats africains, au cours de cet échange de vues sur la question de la prévention et de la résolution des conflits en Afrique. Il a appelé le Conseil de sécurité à ne ménager aucun effort pour consolider la paix et prévenir les conflits en Afrique, suggérant que l’exemple de la Sierra Leone soit pris en compte dans les processus de reconstruction et de réhabilitation post-conflits. Il a souhaité en outre insister sur le fait que la communauté internationale doit faire preuve de volonté politique pour répondre aux problèmes de l’Afrique et pour déployer les ressources nécessaires à la mise en oeuvre des objectifs de développement. Il faut s’attaquer efficacement aux causes profondes des crises et des conflits et y répondre par des moyens adéquats, a souligné le représentant de la Chine, convaincu qu’il faut privilégier une concertation aux niveaux national et régional dans la recherche de solutions aux conflits en associant par exemple les parties en conflit, les Etats voisins et les organisations sous-régionales au processus de consolidation de la paix. Il a jugé inacceptable la situation de pauvreté qu’endure l’Afrique et a appelé les Etats Membres à tout mettre en oeuvre pour aider le continent africain à renouer avec la croissance, la paix et le développement qui sont étroitement liés.
M. ISAAC C. LAMBA (Malawi) a indiqué que, bien que les turbulences montrent des signes de répit en Angola, en Sierra Leone, en Ethiopie et en Erythrée, et dans une certaine mesure, en République démocratique du Congo, toute tentation de croire que la fin des difficultés politiques est à portée de main en Afrique serait prématurée. En effet, de nombreux Etats comme le Burundi, le Congo-Brazzaville, le Sahara occidental, le Soudan, la Somalie et Madagascar, sont loin d’être stables et le Groupe de travail spécial du Conseil de sécurité sur l’Afrique a devant lui l’immense tâche d’évaluer ces luttes politiques et de déterminer l’étendue d’une éventuelle intervention du Conseil de sécurité. Afin que le Groupe de travail reste au fait de ce qui se passe en Afrique, a continué le représentant, il est impératif qu’il collabore avec l’Organisation de l’unité africaine (OUA) et les organisations régionales telles que la Communauté pour le développement de l’Afrique australe ou l’Autorité intergouvernementale pour le développement. L’établissement d’une interface de collaboration entre l’OUA et l’ONU, inscrit dans le cadre juridique de la Charte des Nations Unies, est hautement désirable afin de favoriser l’échange d’idées relatives à la gestion et à la prévention des conflits. M. Lamba a également favorablement accueilli l’idée d’inviter occasionnellement des représentants du milieu universitaire et des organisations non gouvernementales pour établir des échanges de vues avec le Groupe de travail.
Le représentant a souhaité que les possibilités de collaboration entre le Groupe de travail et le Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD) soient approfondies car le NEPAD, que M. Lamba a qualifié «d’enfant de l’OUA», est clairement en phase avec les aspirations et les idéaux des Nations Unies, notamment en ce qui concerne les aspects politiques et la bonne gouvernance. Le représentant a souhaité que, lorsque l’on évoque les synergies possibles, on évite les doubles emplois entre le Groupe de travail et le Groupe consultatif spécial de l’ECOSOC sur les pays africains émergents de conflits. Il a conclu en faisant observer que le programme de travail du Groupe représente un défi assez complet qui nécessitera, pour être relevé, l’appui des organes des
Nations Unies ainsi que des ressources. Notant notamment que l’évaluation des situations de conflit et la formulation de stratégies réalistes ne peut se faire sans visite sur le terrain, le représentant a plaidé en faveur de l’accroissement des ressources financières.
M. MOCTAR OUANE (Mali) a déclaré que la prévention et le règlement des conflits en Afrique exigent une approche globale et intégrée qui tienne compte de la complexité des causes profondes en Afrique et de leurs conséquences dévastatrices. Le Groupe de travail spécial sur la prévention et le règlement des conflits en Afrique pourrait tirer parti des capacités de l'ensemble du système des Nations Unies lors de la conception et de la réalisation d'études. Nous plaidons dans ce contexte pour un renforcement des relations entre le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social, ces deux organes étant complémentaires. En outre, il importe de traduire dans les faits l'intention du Secrétaire général d'adresser périodiquement des rapports régionaux et sous-régionaux sur les menaces contre la paix, notamment l'exploitation illégale de ressources naturelles, le trafic illicite des armes légères, les mercenaires, les réfugiés ou encore les enfants soldats. Le représentant a insisté sur la nécessité de renforcer la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales et sous-régionales ainsi qu'avec les organisations non gouvernementales, la société civile et les milieux d'affaires. Il est en effet essentiel d'appuyer les mécanismes d'alerte rapide et de prévention des conflits de l'OUA, de la SADC et de la CEDEAO et dans ce contexte, le Groupe de travail spécial pourrait être utile.
M. OLE PETER KOLBY (Norvège) a estimé qu’il faudrait régulièrement associer les Etats africains aux travaux du Conseil de sécurité et du Groupe de travail dirigé par l’Ambassadeur Koonjul. Il a en effet encouragé une interaction plus étroite entre le Conseil de sécurité et l’Organisation de l’unité africaine selon des modalités restant à déterminer. Il a ajouté que le Conseil devrait également intensifier ses relations avec l’ECOSOC et avec les organisations régionales et sous-régionales et, ce, afin de répondre aux causes profondes des crises et conflits sur le continent africain. M. Kolby a ensuite pris l’exemple de l’Afrique de l’Ouest et de l’expérience de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) au Libéria et en Sierra Leone, appelant le Conseil à en tirer les leçons constructives. Il s’est enfin joint à toutes les délégations qui ont souhaité que la question de la prolifération et du commerce illicite des armes légères soit abordée sérieusement au sein du Conseil de sécurité.
M. CARLOS DOS SANTOS (Mozambique) a insisté sur l'aspect prévention qui doit guider l'approche des Nations Unies et qui exige également que l'on identifie les causes des conflits en Afrique. La recherche de la paix, de la démocratie et du développement doit faire l'objet d'initiatives intégrées qui se renforcent mutuellement. La prévention suppose que l'on établisse un lien fort entre la paix et le développement. C'est dans ce cadre que nous envisageons une plus grande coopération entre le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social. Les Nations Unies doivent accroître leur aide aux initiatives de paix et de développement africaines tandis que l'Afrique doit renforcer ses capacités de prévention, de gestion et de résolution des conflits. Les initiatives récentes de la Communauté pour le développement de l'Afrique australe (SADC), de l'Organisation de l'unité africaine et de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) témoignent de l'engagement de l'Afrique à régler ses propres problèmes.
Nous sommes satisfaits de voir que le Conseil économique et social a créé le Groupe de travail spécial sur les pays émergeant de situations de conflit et souhaitons une plus grande collaboration entre le Conseil de sécurité, l'ECOSOC et les autres organes et institutions des Nations Unies. Nous estimons que le succès de toute initiative visant le règlement des conflits est dicté par une bonne connaissance de la situation. Ceux qui participent aux efforts de médiation doivent disposer d'une bonne connaissance de la dynamique du conflit. L'établissement de «groupes d'amis» pour des situations données peut également s'avérer fondamental. Ces groupes devraient être plus participatifs et représentatifs. Toute initiative de gestion et de règlement des conflits ne peut que tirer avantage de la participation de la société civile, y compris les organisations non gouvernementales et le milieu universitaire, qui constitue une valeur ajoutée en raison de ses connaissances et parfois de son accès aux parties impliquées.
Le représentant s'est dit en outre préoccupé par les conflits liés à l'exercice de la démocratie, compte tenu du fait que les candidats et leurs partisans contestent souvent les résultats des élections. Cette situation montre clairement qu'il est essentiel de soutenir les institutions démocratiques en Afrique. Il est indispensable d'accroître l'aide internationale en faveur de la gouvernance et des institutions africaines, y compris celles relatives aux processus électoraux. Cependant, il est clair que les élections en elles-mêmes ne sont pas le garant de la paix et de la stabilité. Nous encourageons les Nations Unies à développer ses liens de coopération avec les institutions régionales et sous-régionales qui peuvent jouer un rôle fondamental dans la promotion de la paix sur le continent africain.
M. AHMED ABDI HASHI (Somalie) a déclaré que, venant d’un pays où les conflits ont rendu difficile la recherche de la paix et de la stabilité, il se félicitait que le Conseil consacre cette réunion à l’Afrique à la veille de l’anniversaire de la création de l’Organisation de l’unité africaine (OUA). Le partage des informations, la prévention des conflits et la prise de mesures évitant que les pays ne retombent dans la violence sont la voie que devrait emprunter le Conseil en Afrique. De nombreuses organisations régionales et sous-régionales africaines ayant mené des initiatives couronnées de succès en matière de prévention, le Conseil et le Groupe de travail spécial sur la prévention et le règlement des conflits en Afrique devraient s’inspirer de leurs méthodes et partager leurs expériences.
Le Gouvernement de notre pays appuie totalement les initiatives prises par la communauté internationale au profit du processus de paix en Somalie, a dit le représentant. Le Conseil devrait donner au Groupe de travail spécial les moyens de se rendre sur le terrain pour s’informer de première main sur les conflits qu’il entreprend de résoudre. Notre Gouvernement est prêt à travailler avec le Groupe de travail pour favoriser le retour de la paix et de la sécurité en Afrique.
M. ANASTASE GASANA (Rwanda) a rappelé que son pays avait célébré récemment le huitième anniversaire du génocide de 1994 et pouvait à cet égard contribuer à l’effort international pour établir une philosophie de la sécurité collective reposant sur un objectif simple: «plus jamais çà». M. Gasana a rendu hommage aux leaders africains qui ont sacrifié leurs vies dans le passé pour mettre fin à une histoire coloniale que l’Afrique ne devrait pas assumer seule, estimant que le continent africain ne peut en subir seul les retombées. De quelle Afrique parle-t-on ici, a demandé ensuite M. Gasana, considérant que le démembrement du continent au cours des siècles et des décennies passées avait conduit à l’émergence de plusieurs «Afrique». Il a dénoncé une Afrique ravagée par la misère, les coups d’Etat, le sous-développement et a estimé que le débat sur l’esclavage et le colonialisme n’était en rien dépassé puisque les conséquences de ces phénomènes sont le plus souvent à l’origine des conflits. Il a dénoncé le néocolonialisme qui est souvent perceptible sous le couvert d’actions menées par des organisations internationales. Le représentant a rappelé que le premier génocide de l’histoire de l’Afrique a eu lieu au Rwanda en 1994 et que les responsables de ce génocide avaient trouvé refuge en République démocratique du Congo (RDC), grâce notamment à l’Opération turquoise. Il a dénoncé le soutien militaire de la RDC et de ses amis à ces forces génocidaires sans lequel le Rwanda qui est intervenu pour poursuivre ces forces négatives les aurait neutralisées. Qui sont les manipulateurs de ce conflit, a-t-il demandé, qui tire encore les ficelles et pourquoi l’esprit de haine qui a conduit à ce génocide continue de se manifester sans que la communauté internationale ne réagisse? Il a rappelé ensuite les recommandations de la Commission d’enquête, qui avaient été présentées en 1999 au Conseil de sécurité par le président de la Commission, M. Carlsson, et qui n’ont pas été mises en oeuvre alors qu’elles auraient contribué à consolider le processus de réhabilitation dans son pays. Le représentant a salué le récent rapport de mission du Conseil de sécurité dans la région des Grands Lacs qui reconnaît la réalité des préoccupations sécuritaires du Rwanda et a assuré que dès que les questions de DDRRR seront réglées, son pays se retirera de la RDC car il est fermement attaché à la mise en oeuvre de l’Accord de Lusaka.
Mme MARIA ELENA CHASSOUL (Costa Rica) s’est félicitée de ce que des élections libres aient récemment été organisées dans plusieurs pays, dont la République centrafricaine, et que les Nations Unies aient joué un rôle essentiel dans la préparation et la coordination de ces élections. Cependant, a continué la représentante, nous devons être réalistes: la démocratie ne se construit pas en un jour et l’existence de mécanismes électoraux ne garantit pas la véritable démocratie. La démocratie est un processus continu et à long terme qui exige des efforts permanents de concertation et de coordination, de respect de la volonté de la majorité et des droits des minorités, de compréhension et de négociation. Mme Chassoul a déclaré que les Nations Unies peuvent contribuer à la tenue d’élections libres et justes, faisant toutefois remarquer que l’assistance et le suivi des processus électoraux ne sauraient se limiter aux premières élections qui ont lieu à la fin d’un conflit armé: ce suivi doit au contraire s’étendre à toute la période de consolidation démocratique. C’est pourquoi, le Costa Rica estime que les Nations Unies devraient fournir une assistance en matière de consolidation de la démocratie qui promeuve également le renforcement des mécanismes politiques et sociaux, le tenue périodique d’élections et des pratiques gouvernementales transparentes, responsables et ouvertes.
En ce qui concerne les liens entre le Conseil de sécurité et l’ECOSOC, la représentante a regretté que le simple échange d’informations et la coordination d’activités élaborées de manière indépendante soient encore insuffisants. Elle a estimé qu’afin de créer une véritable synergie entre ces deux organes, leurs activités devraient être coordonnées dès leur début. C’est pourquoi, les deux organes devraient adopter des stratégies communes et détaillées sur les points où leurs travaux sont complémentaires, a-t-elle expliqué. Mais, selon Mme Chassoul, le vrai problème n’est pas le manque de coordination, mais plutôt le manque de ressources et l’absence d’objectifs clairs et de mandats concrets. En effet, sans ressources économiques, techniques et humaines et sans soutien politique, le maintien de la paix en Afrique sera inefficace. La tâche est immense et exige l’appui ferme et décisif de toute la communauté internationale, a fait observer la représentante, avant de recommander, comme remède aux problèmes de coordination, un renforcement de l’autorité des Représentants spéciaux du Secrétaire général.
M. ABDUL MEJID HUSSEIN (Ethiopie) a entièrement souscrit à la déclaration de l’Afrique du Sud et est revenu sur quelques-uns des enseignements tirés de la gestion des conflits au cours de ces dernières années. En ce qui concerne le conflit Ethiopie/Erythrée, s’il est certes aujourd’hui de bon ton de se féliciter de son règlement, le représentant a regretté qu’au début de ce conflit le Conseil de sécurité n’ait pas manifesté un soutien plus vigoureux en faveur de la position de l’Organisation de l’unité africaine (OUA). De l’avis du représentant de l’Ethiopie, si le Conseil avait été plus actif et prompt, le conflit aurait pu être évité. En titre de deuxième leçon, le représentant a souhaité que, dans le cas des conflits non résolus, l’on évite de multiplier les initiatives dont les intérêts ne sont pas toujours convergents. Abordant la question des sanctions, le représentant a affirmé qu’il est inutile d’imposer des sanctions en l’absence de suivi, parce que dans ce cas les sanctions ne sont pas mises en oeuvre. Faisant en cela écho à une recommandation du rapport Brahimi, le représentant a demandé que le Conseil appelle les choses par leur nom et prenne des positions claires dans les conflits, surtout dans le cas où il y a clairement des coupables, comme en Angola. Le représentant s’est encore félicité de la collaboration entre le Conseil économique et social et le Conseil de sécurité et a souhaité que cette collaboration soit renforcée avec toutes les institutions des Nations Unies.
M. FERNAND POUKRE-KONO (République centrafricaine) a déclaré que la déclaration faite par M. Ibrahima Fall, Sous-Secrétaire général aux affaires africaines, devrait servir de base à une réflexion approfondie sur les problèmes qui affectent l’Afrique. Il est encourageant de noter que ce sont les dirigeants africains qui eux-mêmes prennent de plus en plus les devants quand un problème affecte une région du continent. La République centrafricaine remercie les pays qui l’ont aidé à retrouver la paix civile après les troubles qu’elle a connus. Cependant, pourquoi avoir retiré la MINURCA du sol centrafricain alors que le Gouvernement du pays demandait le maintien de cette mission de l’ONU? Après réflexion, pourquoi ne pas mettre en œuvre les programmes de démobilisation quand la présence internationale est encore là et faciliter ainsi la réinsertion des combattants et la consolidation de la paix?
Notre pays remercie les Etats de la CENSAD, organisme sous-régional qui, sous la férule de la Libye, qui la présidait, ont pu éviter il y a quelques mois à la République centrafricaine de retomber dans le chaos. L’expérience de notre pays n’a pas été un succès pour le Conseil de sécurité et l’ONU. Le Groupe de travail spécial devrait être le catalyseur de toutes les initiatives menées en faveur de l’Afrique, et notre délégation souhaite que le nouveau groupe, en gestation, entende la voix des organisations régionales et des pays frappés par les conflits.
Reprenant la parole, M. KOONJUL (Maurice), Président du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur la prévention et le règlement des conflits en Afrique, a assuré que le débat d’aujourd’hui inspirerait les travaux de son Groupe au cours des prochaines semaines. M. Koonjul a mentionné certains points qu’il a retenus au cours de cet échange de vues et notamment celui de la collaboration qui doit s’intensifier entre le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social (ECOSOC). Il a assuré que le Groupe de travail respecterait les principes d’ouverture et de transparence et a invité tous les Etats Membres qui le souhaitent à contribuer à cette réflexion. Il a également reconnu l’importance de la coopération entre le Conseil de sécurité des Nations Unies et l’Organisation de l’unité africaine et a souligné l’importance de cette coopération dans le cadre des processus électoraux qui peuvent souvent être à l’origine de conflits comme c’est le cas à Madagascar. Il a jugé important d’apporter une assistance à la demande d’un Etat Membre pour accompagner le processus électoral et a souligné à cet égard la nécessaire coordination de l’observation entre l’OUA, les Nations Unies et l’Union européenne. Il a également souligné l’importance de la question des mercenaires et celle du commerce illicite des armes légères.
Intervenant à la fin du débat, le Ministre des affaires étrangères de Singapour, M. JAYAMUKAR, a fait part de sa satisfaction au terme de cet échange fructueux qui a vu une participation importante des non-membres du Conseil de sécurité. De manière générale, le Ministre a estimé que, pour traiter de la prévention des conflits, il fallait être déterminé à mettre en oeuvre des initiatives audacieuses telles que le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD). Le dialogue interactif d’aujourd’hui n’est pas une fin en soi, a-t-il ajouté, suggérant que le Groupe de travail spécial établisse un bilan des succès et des échecs des différentes initiatives menées en Afrique. Le Ministre a cité notamment les enseignements qui peuvent être tirés de l’expérience de la Sierra Leone. Il a proposé au Groupe de travail de nommer un coordonnateur avec l’ECOSOC et a estimé que le Conseil de sécurité devrait tenir compte de l’avis des organisations régionales pour trouver une solution à la situation des trois pays membres de l’Union du Fleuve Mano. Il a également insisté sur la nécessaire formulation de règles de collaboration entre les Nations Unies et l’OUA sur la gestion des processus électoraux et a souhaité que le Conseil de sécurité tienne compte des risques de retrait prématuré après une élection. Le Ministre des affaires étrangères a suggéré au Groupe de travail de faciliter une interaction entre l’ONU et l’OUA, notamment concernant la mise en place d’un système d’alerte rapide, et a jugé que le Groupe de travail devrait élargir la participation à des organisations non gouvernementales et à des chercheurs.
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