DE NOMBREUSES DELEGATIONS REGRETTENT QUE L’EQUIPE CHARGEE D’ETABLIR LES FAITS SUR LES EVENEMENTS DE DJENINE N’AIT PU REMPLIR SA MISSION
Communiqué de presse CS/2303 |
Conseil de sécurité
4525ème séance – après-midi
DE NOMBREUSES DELEGATIONS REGRETTENT QUE L’EQUIPE CHARGEE D’ETABLIR LES FAITS
SUR LES EVENEMENTS DE DJENINE N’AIT PU REMPLIR SA MISSION
Elles soutiennent la proposition du «Quartet»
de convoquer une conférence internationale dans le courant de l’été
Le refus d’Israël de coopérer à la mise en oeuvre de la résolution 1405 est une erreur grave, a déclaré ce soir le représentant de la France devant le Conseil de sécurité qui était réuni en urgence, à la demande du Groupe arabe, pour examiner la situation au Moyen-Orient, y compris la question palestinienne. A l’instar de la France, de nombreuses délégations ont regretté qu’il ait été impossible d’envoyer l’équipe désignée le 25 avril par le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, et chargée de l'établissement des faits sur les récents événements survenus dans le camp de réfugiés de Djénine. “Le Conseil de sécurité a pleinement échoué à sauvegarder sa crédibilité et à soutenir le Secrétaire général qui a dû faire face seul aux manoeuvres dilatoires israéliennes”, a estimé pour sa part le représentant de l’Egypte. Evoquant la décision prise par M. Annan de dissoudre l’équipe d’établissement des faits, le représentant du Cameroun a dit comprendre ce geste, jugeant que le Secrétaire général «s’est montré responsable et a refusé de se rendre complice d’un rapport qui ne reposerait pas sur les faits».
Précisant la position de son Gouvernement, le représentant d’Israël a rappelé qu’il y a une semaine, des délibérations constructives avaient eu lieu entre des représentants israéliens et le Secrétaire général des Nations Unies concernant la mise sur pied de l’équipe d’établissement des faits sur les récents événements du camp de Djénine. Malheureusement, a-t-il regretté, depuis l’adoption de la résolution 1405 entérinant cette mission, il y a eu beaucoup de désinformation et de confusion concernant le mandat de l’équipe. Pour Israël, cette équipe devait avoir des objectifs et des paramètres clairement établis avant d’être envoyée dans la région et elle aurait dû en outre se pencher sur les activités des deux parties, et notamment sur celles faisant d’un camp de réfugiés des Nations Unies une base terroriste, a déclaré M. Lancry. Il a par ailleurs demandé aux membres du Conseil de ne pas ignorer les récits des organisations indépendantes présentes sur le terrain et qui confirment qu’il y a eu certes une bataille intense entre l’armée israélienne et les terroristes palestiniens, mais pas de massacre.
(à suivre – 1a)
On ne peut procéder à un examen objectif de la situation sans mener une enquête sur ce qui s’est véritablement passé à Djénine, a fait remarquer pour sa part l’Observateur permanent de Palestine. L’attitude d’Israël prouve que ses forces d’occupation ont effectivement commis des crimes de guerre indicibles contre le peuple palestinien et perpétré un véritable massacre dans le camp de Djénine, a-t-il ajouté. Il est nécessaire pour la communauté internationale d’examiner la question de façon approfondie et d’agir de manière appropriée pour traduire en justice ceux qui ont commis ces crimes de guerre, a-t-il souligné. Rappelant ensuite que les résolutions 1402 et 1403 n’ont toujours pas été pleinement mises en oeuvre par Israël, l’Observateur palestinien a condamné le fait que les forces israéliennes aient quitté certaines localités pour en réoccuper d’autres. «La fin du siège de la résidence du Président Arafat, à Ramallah, si elle constitue une étape positive, ne peut être suffisante», a fait valoir M. Al-Kidwa, pour qui la poursuite du siège de l’église de la Nativité à Bethléem est un affront à la communauté internationale.
Si le Conseil de sécurité ne trouve pas l’énergie et l’unité que nécessite une action politique au Moyen-Orient, a déclaré le représentant de la Tunisie, alors il nous revient de recourir à d’autres instances telles que l’Assemblée générale. Le Groupe arabe devra se résigner à demander la reprise de la dixième session extraordinaire d’urgence de l’Assemblée, a déclaré le représentant du Soudan, et ce, «afin que puisse s’exprimer la colère du monde face aux exactions commises par les Israéliens contre le peuple palestinien et afin d’exiger le retrait des forces israéliennes des territoires occupés et de la ville d’Al Qods Al Charif». La communauté internationale doit poursuivre ses efforts en vue d’un règlement définitif de cette situation, a indiqué pour sa part le représentant du Royaume-Uni, en privilégiant la coexistence de deux Etats, Israël et la Palestine, vivant côte à côte au sein de frontières reconnues et en paix.
Mettant en avant les avancées décisives enregistrées cette semaine, notamment avec la fin du siège de Ramallah, le représentant des Etats-Unis a insisté sur l’implication de son pays en vue de la recherche d’une solution découlant de l’application des résolutions 1402 et 1403. Il a, à ce titre, réitéré l’appel des Etats-Unis en faveur, lui aussi, d’un accord final qui garantisse la coexistence de deux Etats, Israël et la Palestine, vivant en paix et en sécurité dans leurs frontières. Pour y parvenir, le représentant américain a exhorté le Président Arafat à assumer ses responsabilités sur les questions de sécurité et a lancé un appel pour la reprise urgente des négociations de paix. Le représentant des Etats-Unis s’est félicité des résultats positifs de la réunion du «Quartet» hier à Washington qui a conclu à la nécessité de convoquer une conférence internationale sur le Moyen-Orient dans le courant de l’été. Il a appelé le reste de la communauté internationale à soutenir cette initiative, opportunité unique pour les parties d’aboutir à un accord final reposant sur les résolutions 242 et 338.
Outre les délégations déjà mentionnées, les représentants des pays suivants ont pris la parole: Cuba, Chili, Canada, Jordanie, Pakistan, Malaisie, Espagne (au nom de l’Union européenne et des pays associés), Afrique du Sud, Turquie, Japon, Emirats arabes unis, Maroc, Argentine, République islamique d’Iran, Brésil, Liban, Colombie, Irlande, Cameroun, Guinée, Fédération de Russie, Bulgarie, Chine, Maurice, République arabe syrienne, Mexique, Norvège et Singapour. Le Vice-Président du Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien a également fait une déclaration.
LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT, Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE
Déclarations
M. NASSER AL-KIDWA, Observateur permanent de la Palestine, a rappelé que le Conseil de sécurité avait adopté, il y a deux semaines, la résolution 1405, qui se félicitait notamment de l’initiative prise par le Secrétaire général des Nations Unies de désigner une équipe chargée de l’établissement des faits sur ce qui s’est déroulé dans le camp de Djénine à la suite des exactions perpétrées par les forces de défense israéliennes. Il a regretté qu’en dépit de cette décision, la situation est dans l’impasse. On ne peut procéder à un examen objectif de la situation sans mener une enquête sur ce qui s’est vraiment passé, a poursuivi M. Al-Kidwa, soulignant que l’équipe désignée par M.Annan était conduite par trois experts de grande renommée, eux-mêmes épaulés par des experts dont la neutralité était incontestable. Il a dénoncé le recul complet d’Israël qui a adopté des positions ayant pour but de saper le travail de cette équipe avant de procéder à un chantage avec le Secrétaire général des Nations Unies, puis de rejeter purement et simplement la mission d’établissement des faits et la résolution 1405.
Rappelant que la partie palestinienne avait toujours été favorable à cette mission et déterminée à collaborer à ses travaux, M. Al-Kidwa a félicité le Secrétaire général pour avoir déployé tous les efforts nécessaires. Il a condamné cependant la décision d’Israël de ne pas respecter la résolution 1405 et d’empêcher le travail de la mission d’établissement des faits. Il a regretté que le Conseil de sécurité n’ait pas pris de mesures pour soutenir le Secrétaire général et inciter Israël à collaborer avec la mission d’établissement des faits, le conduisant ainsi à la démanteler. M. Al-Kidwa a regretté également le recul du Conseil face au rejet de la résolution 1405 par Israël qu’il a qualifié de renoncement face à ses responsabilités sous la pression d’un de ses Etats Membres. Il a déclaré que si le Conseil ne réagit pas, il faudra recourir à la reprise de la dixième session extraordinaire de l’Assemblée générale sur cette question.
L’attitude d’Israël prouve que les forces d’occupation israéliennes ont effectivement commis des crimes de guerre indicibles contre le peuple palestinien et perpétré un véritable massacre dans le camp de Djénine, a dit M. Al-Kidwa. Convaincu qu’il reste maintenant à déterminer l’étendue et les conséquences de ces crimes, il a souligné la nécessité pour la communauté internationale d’examiner la question de façon approfondie et agir de manière appropriée pour traduire en justice ceux qui ont commis des crimes de guerre et des destructions démesurées. Il a rappelé ensuite que les résolutions 1402 et 1403 n’avaient toujours pas été pleinement mises en oeuvre, puisque les forces israéliennes ont quitté certaines localités pour en réoccuper d’autres. La fin du siège de la résidence du Président Arafat, si elle constitue une étape positive, ne peut être suffisante, a-t-il fait remarquer, condamnant le fait que l’église de la Nativité à Bethléem soit toujours assiégée par la puissance occupante. Les buts de la campagne israélienne consistent toujours à causer le plus de dommages possibles au peuple palestinien et ils n’ont pas varié malgré les appels de la communauté internationale et les efforts de certaines parties. Il a exhorté le Conseil de sécurité à adopter une attitude plus sérieuse et à se conformer à la Charte des Nations Unies.
M. YEHUDA LANCRY (Israël) a rappelé qu’il y a une semaine, des délibérations constructives s’étaient déroulées entre Israël et le Secrétaire général concernant son initiative de mettre sur pied une équipe d’établissement des faits sur les récents événements du camp de Djénine. Malheureusement, depuis l’adoption de la résolution 1405 entérinant cette initiative, il y a eu beaucoup de désinformation et de confusion concernant le mandat de cette équipe. La position d’Israël était qu’elle devait avoir des objectifs et des paramètres clairement établis avant d’être dispatchée dans la région. Son travail aurait, en toute logique, dû reposer sur le paragraphe 2 du dispositif de la résolution 1405 et sur les normes des Nations Unies en matière d’équipes d’établissement des faits. Ce n’était en outre pas trop demander que l’équipe se penche sur les activités des deux parties, y compris celles faisant d’un camp de réfugiés des Nations Unies une base terroriste, a estimé M. Lancry. Il a ajouté que, selon la pratique établie par l’Assemblée générale, une telle équipe doit se limiter à une présentation de constatations factuelles, a l’obligation de respecter le droit et la législation nationale et doit mener sa mission avec la coopération des parties concernées. «Israël était donc en droit de s’attendre que l’ONU accepte les pratiques qu’elle a elle-même établies», a affirmé le représentant. C’est là la question qui sous-tend la position et les inquiétudes d’Israël, a-t-il ajouté.
Tout en comprenant la volonté internationale d’établir un rapport précis et complet, le représentant a demandé à ne pas ignorer les récits des organisations indépendantes présentes sur place et confirmant qu’il y a eu certes une bataille intense entre l’armée israélienne et les terroristes palestiniens, mais pas de massacre. Dès le départ, les déclarations palestiniennes ont été considérablement alarmistes, comme en témoignent les allégations affirmant que des milliers d’individus se trouvaient sous les décombres alors qu’aujourd’hui on sait que 47 terroristes palestiniens, 23 soldats israéliens et 7 civils palestiniens ont été tués. Selon certains témoignages palestiniens, il est même reconnu que les maisons avaient été piégées à l’explosif. Bien qu’il y ait eu des victimes civiles involontaires dans la bataille de Djénine, comme il y a en a dans tout conflit, leur décès aussi regrettable qu’il soit ne constitue nullement un massacre, a réitéré M. Lancry, avant d’expliquer que ces civils sont morts car les terroristes palestiniens les ont pris pour bouclier humain. Ces faits devraient constituer une mise en garde à l’égard du Conseil. Si la communauté internationale avait eu connaissance de ce qui s’est exactement passé à Djénine, le Conseil n’aurait sûrement pas jugé nécessaire d’y envoyer une commission d’établissement des faits.
En ce qui concerne la situation dans l’église de la Nativité à Bethléem, il s’agit non pas d’un siège mais d’une prise d’otages où des personnes armées ont envahi ce lieu saint au mépris de son caractère sacré. Un certain nombre d’individus ont déjà été libérés et il faut espérer que, d’ici quelques jours, on parviendra à un règlement non violent de cette situation à l’image de ce qui s’est passé à Ramallah, a ajouté M. Lancry. Le Président Arafat peut maintenant se déplacer librement et exercer sa pleine autorité sur le peuple palestinien. C’est à lui de décider s’il veut promouvoir la paix ou encourager la haine. Dans l’intérêt de la paix, il est bien entendu impératif qu’il n’incite pas son peuple à la haine et à la violence. Il faut aussi que les Palestiniens honorent les responsabilités qui sont les leurs en vertu de la résolution 1402 (2002).
Dans le cas contraire, tout progrès en vue d’une reprise du dialogue politique serait sévèrement compromis. Le Conseil de sécurité devrait donc aussi porter son attention sur le refus permanent des Palestiniens d’accepter un cessez-le-feu, de mettre fin au terrorisme et de coopération avec le Général Zinni. Le Premier Ministre Ariel Sharon arrivera à Washington la semaine prochaine pour discuter de la proposition de relance du dialogue. A cet égard, Israël comprend parfaitement que les Palestiniens sont et seront toujours ses voisins et que c’est seulement par le dialogue et la négociation, menés dans un esprit de non-violence et de reconnaissance mutuelle, que l’on pourra faire renaître l’esprit de paix et de réconciliation.
M. ELFATIH MOHAMED AHMED ERWA (Soudan), s’exprimant au nom du Groupe arabe, a salué les efforts déployés par le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, qui a mis en place une équipe d’experts chargée d’établir les faits de ce qui s’est produit à Djénine conformément à la résolution 1405 du Conseil de sécurité. Il a salué la patience dont a fait preuve M. Annan face à la puissance occupante israélienne, soulignant les efforts de négociation entrepris par le Secrétaire général avant de décider de démanteler purement et simplement cette mission à la suite du refus d’Israël de la laisser travailler. Le représentant du Soudan a rappelé qu’Israël avait toujours bafoué les résolutions du Conseil de sécurité et il a condamné la décision israélienne de refuser de recevoir la mission d’experts désignée par le Secrétaire général, initiative approuvée par le Conseil dans la résolution 1405. Que faire face à ce défi lancé au Conseil par Israël, s’est-il interrogé.
Le représentant a recommandé aux membres du Conseil de se faire respecter par les Israéliens et d’exiger des détails et des informations sur les crimes commis par la puissance occupante israélienne et sur le massacre perpétré à Djénine. Il a suggéré que le Conseil demande au Secrétaire général de lui remettre un rapport contenant ces informations. Si le Conseil n’assume pas son devoir, a-t-il dit, le Groupe arabe devra recourir à l’Assemblée générale pour que puisse s’exprimer la colère du monde face aux exactions commises par les Israéliens contre le peuple palestinien et pour exiger le retrait des forces israéliennes des territoires occupés et de la ville d’Al Qods Al Charif. Le Conseil ne peut se laisser dicter ses mesures par Israël qui entend lui imposer sa vision des choses et sa vérité, a déclaré le représentant du Soudan.
M. NOUREDDINE MEJDOUB (Tunisie) a indiqué qu’il y avait actuellement une triple crise. Il s’agit d’abord d’une crise humanitaire, on a laissé une armée s’enfermer des jours durant dans un camp de réfugiés à Djénine pour organiser un massacre. Il a ajouté qu’Israël est aujourd’hui, mais ce n’est pas nouveau, en état de rébellion devant le Conseil de sécurité, le Secrétaire général et l’ensemble du système des Nations Unies. Des secours sont nécessaires, il faut que la communauté internationale réalise l’étendue du drame et s’active à faire parvenir nourriture et médicaments. Relevant également une crise morale, il a demandé comment on pouvait prendre la responsabilité de réveiller les vieux démons et de susciter les haines entre les communautés. Il a indiqué que le nationalisme israélien, que les Arabes pragmatiques avaient fini par accepter, est là mis à rude épreuve. Il a estimé que c’est un terrible gâchis. La crise d’autorité est la plus grave, a-t-il poursuivi, car il s’agit de notre Conseil qui représente la plus haute instance internationale et qui est ignorée par Tel-Aviv. Il a estimé que la politique des deux poids et deux mesures fait partie de notre lot et que nos opinions publiques apprécient de moins en moins, ajoutant que les grands de ce monde devraient écouter ce que préconise l’ancien Président Carter.
Concernant les remèdes, le représentant a demandé de rappeler aux autorités israéliennes qu’elles doivent se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité aujourd’hui. Le fait qu’il y ait des tractations ne change rien. Il a également demandé qu’un règlement soit trouvé pour l’église de la Nativité, estimant que l’incendie de l’église de la Nativité restera comme une tâche dans l’histoire d’Israël. Il a ajouté que quatre textes ont été bafoués par Israël au nom de la loi du plus fort sur le terrain et a jugé qu’il n’est pas admissible que le Conseil renonce à ses prérogatives et accepte l’échec que Tel-Aviv vient de lui infliger. Le Secrétaire général s’est acquitté de sa tâche avec impartialité et dans l’esprit le plus constructif. Si le Conseil ne trouve pas l’énergie et l’unité que nécessite une action politique au Moyen-Orient, il nous revient de recourir à d’autres instances, telle que l’Assemblée générale. N’acceptons pas les deux poids et deux mesures si l’on veut parvenir à une paix juste et durable au Moyen-Orient, a conclu le représentant.
M. BRUNO RODRIGUEZ PARRILLA (Cuba) a estimé qu’une fois de plus le Conseil avait failli à ses responsabilités et fait la preuve de son incapacité à agir en réponse à la situation gravissime dans le territoire palestinien occupé. La situation à Djénine et le refus israélien de coopérer avec l’équipe d’enquête exigent une résolution invoquant le Chapitre VII de la Charte, comme celle que la République arabe syrienne et la Tunisie ont proposée dès le 30 avril dernier. Il n’a malheureusement même pas été possible d’adopter un texte plus modéré en raison de la menace de veto des Etats-Unis. La position américaine est ridicule, car les Etats-Unis furent précisément le pays ayant soumis au Conseil la résolution 1405, entérinant l’initiative de déployer une équipe d’établissement des faits à Djénine. Cela ne devrait pas surprendre, car en réalité les Etats-Unis n’ont jamais vraiment souhaité envoyer une équipe à Djénine, ils entendaient en fait éviter que le Conseil ne prenne les mesures qui s’imposaient vraiment.
Mais équipe d’établissement des faits ou pas, la vérité ne pourra pas être cachée. Les exactions de Djénine ou le siège de l’église de la Nativité à Bethléem ne sont pas un hasard mais le résultat de l’impunité qui a été accordée au Gouvernement israélien, sans que ce Conseil ait pu l’empêcher. C’est pourquoi, Cuba demande à nouveau que les Etats-Unis cessent leur appui financier, à fins militaires, à Israël et condamnent le terrorisme d’Etat auquel se livre Israël, surtout s’ils entendent effectivement lutter contre le terrorisme à l’échelle mondiale. De son côté, le Conseil de sécurité doit envisager sérieusement la proposition d’établir une force multinationale dans le Territoire occupé. Il est en effet tout simplement inacceptable que le Conseil continue de tourner le dos aux souffrances du peuple palestinien. L’Assemblée générale doit elle aussi agir, compte tenu de l’inaction du Conseil, et reprendre sa dixième session d’urgence afin de venir en aide au peuple palestinien, de dénoncer les crimes commis et de sauver la crédibilité des Nations Unies.
M. JUAN GABRIEL VALDES (Chili) a rappelé que c’est la troisième fois en l’espace de quelques semaines que son pays a la possibilité d’exprimer sa position au Conseil de sécurité concernant un conflit dont les implications mondiales ne peuvent laisser indifférent. Quatre résolutions ont durant la même période été adoptées, toutes contiennent des dispositions claires et des délais précis et toutes ont été ignorées par une ou par les deux parties. L’attachement indéfectible du Chili aux normes du droit international l’amène aujourd’hui à exprimer sa préoccupation et son regret à l’égard du manque de coopération patent de l’une des parties en vue d’établir toute la lumière sur des faits qui méritent une réaction urgente.
Le Chili a condamné fermement les attentats terroristes contre les civils innocents en Israël, mais il considère tout aussi condamnable la grave situation humanitaire et les circonstances qui ont conduit à l’invasion israélienne de plusieurs villes palestiniennes. Les actions commises dans le camp de réfugiés de Djénine revêtent une gravité particulière. Ils ne peuvent que susciter un sentiment de douleur et d’impuissance et exigent une enquête complète et détaillée, comme le demande la résolution 1405 (2002). Le Chili regrette donc profondément la décision du Gouvernement israélien d’empêcher cette enquête.
M. AHMED ABOULGHEIT (Egypte) a rappelé que la résolution 1405 du 19 avril dernier avait été adoptée sur proposition des Etats-Unis afin de soutenir l’initiative de désigner une mission d’établissement des faits sur les atrocités commises par les forces d’occupation israéliennes dans le camp de Djénine. Il a salué les efforts inlassables du Secrétaire général qui a désigné le 25 avril une équipe de renommée internationale pour conduire cette mission d’établissement des faits, conformément aux termes de référence fixés par le Conseil dans sa résolution 1405 (2002). Pendant deux semaines, le Secrétaire général a fait montre de patience et a essayé de répondre aux demandes israéliennes, a fait remarquer M. Aboulgheit regrettant qu’en contrepartie, le Secrétaire général ait été confronté à la volonté israélienne de gagner du temps et de ne pas donner son aval à cette mission. Israël persiste et signe, il affiche son dédain à l’égard des résolutions du Conseil et se protège derrière certains Etats puissants du Conseil, espérant que ces Etats vont l’aider à dissimuler ses crimes, a déclaré le représentant de l’Egypte.
Le Conseil a pleinement échoué à sauvegarder sa crédibilité et à soutenir le Secrétaire général qui a dû faire face seul aux manoeuvres dilatoires israéliennes. Par cette attitude, le Conseil adresse un message clair au peuple palestinien ainsi qu’aux autres peuples qui pourraient lui lancer demain un appel à la protection, le silence et l’indifférence. Le Conseil est fort et uni face aux faibles, mais il s’avère désuni et faible face à l’agression, a-t-il observé. M. Aboulgheit a mis en garde contre ce dysfonctionnement dangereux qui vient compromettre l’ordre mondial international mis en place après la Seconde Guerre mondiale. Le Conseil de sécurité observe en silence, perdant ainsi sa crédibilité mais aussi son autorité face à un Etat qui n’a que faire du droit international et de la légalité internationale, a-t-il regretté.
M. PAUL HEINBECKER (Canada) s’est félicité de l’intention formulée hier à Washington par le quartette diplomatique d’organiser une conférence de paix cet été, car seule une diplomatie à large base apportera une solution politique à long terme que nous recherchons tous. Il a également salué la levée du siège de l’Autorité palestinienne et le retrait des troupes israéliennes de Ramallah. Il a appelé le Président Arafat à tout mettre en oeuvre pour empêcher que de nouveaux actes de violence ne soient perpétrés contre des civils israéliens et a exhorté les deux parties à faire en sorte de sortir de l’impasse du siège de l’église de la Nativité sans violence ni destruction.
Le représentant a regretté que les Israéliens n’aient pas suivi les recommandations de la résolution 1402 et ne se soient pas entièrement retirés des villes de la Cisjordanie. Il a rappelé qu’aux termes de l’Article 25 de la Charte des Nations Unies, tous les Membres sont tenus d’accepter les décisions du Conseil de sécurité. Il a également déclaré que le Canada a fait sienne la proposition relative à une équipe d’établissement des faits formulée par le Secrétaire général, parce qu’il est persuadé qu’il est de la plus haute importance que la lumière soit faite autour des événements de Djénine, dans l’intérêt des deux parties et de toute la communauté internationale. Le Canada est d’avis qu’une telle opération doit permettre d’examiner toutes les allégations de fautes, israéliennes et palestiniennes. Dans ce contexte, le représentant a regretté l’attitude de l’État d’Israël et sa persistance à ne pas vouloir coopérer avec l’Équipe, ce qui selon lui contribue à porter atteinte à l’autorité du Conseil de sécurité. En conclusion, il a réitéré tout le soutien de son pays au Conseil de sécurité dans ses efforts pour établir une paix durable et authentique dans la région.
M. ZAID AL-HADIDI (Jordanie) a rappelé que le Conseil avait adopté la résolution 1405 il y a deux semaines pour répondre à la situation catastrophique provoquée à Djénine par les graves violations du droit international humanitaire commises par les forces de défense israéliennes. Le Conseil avait alors demandé au Secrétaire général de rassembler des renseignements précis par le truchement d’une équipe d’établissement des faits et ce, après que le Gouvernement israélien ait déclaré n’avoir rien à cacher et être prêt à collaborer. Remerciant le Secrétaire général pour ses efforts inlassables et pour avoir désigné rapidement une équipe irréprochable, le représentant jordanien a estimé qu’il était apparu clairement qu’Israël ne souhaitait pas que soit élaboré un rapport complet et précis sur ce qui s’est passé dans le camp de Djénine. Ce rapport aurait été susceptible d’entraîner Israël devant la justice pénale internationale pour répondre des crimes odieux commis sur des civils, a-t-il poursuivi. Regrettant que le Secrétaire général ait dû en définitive annuler cette mission, le représentant de la Jordanie a souligné que les autorités israéliennes ne respectent pas le Conseil de sécurité et ses résolutions. Il a appelé les membres du Conseil à être à la hauteur de leurs responsabilités et à ne pas agir selon la politique des «deux poids deux mesures», laissant d’un côté Israël mépriser ses résolutions, et forçant de l’autre l’Iraq à les appliquer en imposant des sanctions. Il a demandé au Conseil d’exhorter fermement Israël à se soumettre aux résolutions qu’il a adoptées et à évacuer les territoires palestiniens occupés.
M. MASOOD KHALID (Pakistan) a estimé que le refus d'Israël de coopérer avec la mission d'établissement des faits signifie qu'Israël cherche à dissimuler ces faits. Le massacre de Djénine a été autant excessif qu'inexcusable. Une enquête impartiale doit être menée pour dévoiler ce qui s'est produit à Djénine. Les missions d'établissement des faits dans les zones où ont lieu des violations flagrantes du droit humanitaire, que ce soit au Moyen-Orient ou ailleurs, doivent être établies automatiquement et non pas dans des cas exceptionnels. Nous regrettons le massacre de civils innocents dans la région et avons déjà fait part de notre soutien à la proposition du Secrétaire général de dépêcher une force internationale pour assurer la sécurité et favoriser ainsi l’action diplomatique.
Le Conseil de sécurité ne peut pas ignorer la responsabilité particulière qui lui incombe pour ce qui est du maintien de la paix et de la sécurité. Il ne peut pas permettre une mise en oeuvre sélective de ses résolutions. Le Conseil doit prendre des mesures immédiates pour garantir la cessation immédiate des activités militaires israéliennes et le retrait total de ses forces des territoires occupés. Plus que jamais, la crédibilité du Conseil est en jeu. Notre objectif en fin de compte n'est pas la mise en oeuvre d'un cessez-le-feu et le retrait des forces israéliennes mais un règlement de paix final au Moyen-Orient dont le cadre a déjà été défini par les résolutions 242, 338 et 1397 et la Déclaration de Beyrouth.
M. HASMY AGAM (Malaisie) a indiqué que la tentative d’Israël de bloquer l’envoi de l’équipe d’établissement des faits est l’ultime manifestation de sa réticence vis-à-vis des décisions du Conseil de sécurité. Il a jugé les raisons données par Israël fallacieuses et irréalistes et a estimé qu’elles auraient dû être totalement rejetées par le Conseil. Le problème, a poursuivi le représentant, ne réside pas dans le fait de savoir si les Nations Unies sont partiales à l’égard d’Israël, comme l’a indiqué le Gouvernement israélien, ce qui ne peut être vrai puisque Israël a beaucoup d’amis au sein de l’Organisation. La question est de savoir si Israël est un membre responsable des Nations Unies et respectueux des lois. Il a également exprimé son profond regret et sa profonde déception devant le démantèlement de la mission en raison du refus d’Israël de coopérer. L’échec de la réalisation de cette mission desservira grandement les efforts du Secrétaire général, ébranlera sa crédibilité ainsi que celle de l’autorité du Conseil. Cela montre que pour certains pays, les décisions du Conseil ne sont pas nécessairement contraignantes, qu’elles peuvent être ignorées en toute impunité. Il a estimé que c’était un message malheureux envoyé dans le monde au moment où le prestige du Conseil est faible. Le Conseil doit soutenir la demande de la Palestine pour une enquête sur les événements survenus à Djénine, le plus tôt serait le mieux. Il a rappelé que, malgré la résolution 1405, les conditions de vie des Palestiniens restent épouvantables et que les restrictions de sécurité ont empêché le Programme alimentaire mondial d’avoir accès à beaucoup d’entre eux. Il a ainsi estimé que l’entrave à l’aide humanitaire et l’attaque impitoyable contre le peuple palestinien ne peuvent avoir été autorisées par un «homme de paix».
Le représentant a en outre réitéré son appel à des sanctions appropriées contre Israël, telles que prévues par la Charte des Nations Unies, si Israël continue de défier le Conseil et a estimé qu’une non-action continue du Conseil serait pour le moins un coup terrible porté à son prestige. Il s’est également félicité des efforts déployés par les Etats-Unis et l’Arabie saoudite pour éviter l’impasse de la crise au Moyen-Orient et encourager les parties à reprendre les négociations. Ces efforts doivent être maintenus par ces deux pays et par d’autres face à l’intention claire du Gouvernement israélien de rechercher une solution militaire plutôt que politique. Il a estimé que pour stopper la violence et reprendre les négociations, le Conseil doit autoriser l’envoi d’une mission de maintien de la paix des Nations Unie ou d’une mission internationale. Il a conclu, pour réussir, il est important que le Conseil ne recule pas au premier signe de résistance israélienne.
M. INOCENCIO F. ARIAS (Espagne), s’exprimant au nom de l’Union européenne et des pays associés, s’est félicité des récents efforts diplomatiques de la communauté internationale qui ont permis de régler la situation conflictuelle autour de Ramallah et de mettre fin à l’isolement du Président Yasser Arafat. A cet égard, il a formé le voeu que la liberté de mouvement et la sécurité du dirigeant élu du peuple palestinien soit respectée et garantie. Il a déclaré que l’Union européenne était, avec les Etats-Unis, la Fédération de Russie et les Nations Unies, totalement engagée à parvenir à une paix juste, durable et globale au Moyen-Orient. Il a également rappelé que le Quartet diplomatique s’est réuni hier pour la deuxième fois en moins d’un mois. Elle se dit prête à assister les parties à mettre en oeuvre leurs accords et à participer à une conférence internationale de paix qui réunit toutes les parties concernées et tienne compte des accords précédents. Le Quartet a indiqué hier à Washington qu’il était prÊt à entamer les préparatifs en vue de tenir une conférence internationale l’été prochain pour définir les questions économiques, humanitaires et de sécurité, ainsi que des moyens de règlement politique. En dépit de ces progrès, a fait observer M. Arias, l’Union européenne demeure inquiète face à la situation autour de l’église de la Nativité à Bethléem, et a regretté que le risque de confrontation demeure après un mois de crise. Dans ce contexte, il a exhorté la communauté internationale à prendre des mesures concrètes pour la mise en oeuvre de la Déclaration commune du Quartet diplomatique du 10 avril 2002 et, en particulier, l’application immédiate des recommandations des résolutions 1402 et 1403 du Conseil de sécurité. C’est pourquoi, il a appelé le Gouvernement israélien à cesser immédiatement toute action militaire dans les territoires occupés.
Par ailleurs, le représentant de l’Espagne a fait sienne la volonté du Secrétaire général d’obtenir des informations sur les actes commis à Djénine et ce par le moyen d’une équipe d’établissement des faits. Il a appelé l’Autorité palestinienne à tout mettre en oeuvre pour faire cesser les actes terroristes et tout particulièrement les attaques-suicide qui, par leur immoralité, portent atteinte aux revendications légitimes du peuple palestinien. Dans le même ordre d’idées, M. Arias s’est inquiété de la destruction des infrastructures de l’Autorité palestinienne par les Israéliens, situation qu’il a définie comme inacceptable et contre-productive. Il a appelé Israël à mettre fin au blocus économique dans les territoires occupés et au confinement des populations et à cesser de porter atteinte à la liberté de mouvement des biens et des personnes. Il a également déclaré qu’il était inacceptable que les organisations humanitaires se voient limiter dans leurs actions et empêchées d’accéder aux populations dans le besoin. Dans ce contexte, il a exhorté les Israéliens à se conformer au droit international humanitaire. Enfin, M. Arias a réaffirmé qu’il n’y a aucune solution militaire à ce conflit et que les conditions de la paix sont clairement définies. Elles sont contenues dans les recommandations des résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité, dans le respect du principe de la restitution des territoires en échange de la paix qui forme la base des Accords de Madrid de 1991, dans la création d’un Etat palestinien politiquement et économiquement viable avec des garanties de sécurité pour l’Etat d’Israël tel que cela a été formulé par la résolution 1397 du Conseil de sécurité et enfin dans le récent Plan de paix du Prince héritier Abdullah de l’Arabie Saoudite. En conclusion, il a fait sienne la proposition du Secrétaire général d’envoyer une force multinationale pour le Moyen-Orient et s’est dit persuadé que l’intervention d’une tierce partie sur le terrain était indispensable pour arriver à un règlement politique et sécuritaire du conflit.
M. DUMISANI KUMALO (Afrique du Sud), s'exprimant au nom du Mouvement des pays non alignés, a déploré la décision d'Israël de ne pas coopérer avec le Secrétaire général pour enquêter sur les événements de Djénine et, qu'en conséquence, l'équipe d'établissement des faits ait été dissoute. Il a jugé indispensable que le Secrétaire général prépare un rapport complet fondé sur toutes les informations disponibles à propos de ces événements. Pour le représentant, la communauté internationale ne peut permettre à Israël d’exercer son droit de veto contre des tentatives d'enquêter sur de possibles massacres et crimes de guerre commis à Djénine, ou ailleurs dans les territoires occupés.
Le Conseil de sécurité, a poursuivi M. Kumalo, ne peut ignorer plus longtemps la culture d'impunité dont semble profiter Israël. L'intransigeance de l'Etat hébreu commence à entamer la crédibilité et la légitimité des Nations Unies. Les résolutions 1402 (2002)et 1403 (2002) appelaient au retrait des forces israéliennes des territoires palestiniens et elles ne l'ont pas encore fait, a-t-il noté. La résolution 1405 (2002) accueillait positivement l'initiative de M. Kofi Annan sur la création d'une équipe d'établissement de faits survenus à Djénine, mais elle a été dissoute, a-t-il poursuivi. Le Conseil de sécurité doit maintenant prendre une décision, sinon il se rendra coupable d’exercer son autorité de manière sélective et se montrera inconsistant. En outre, si le Conseil n'est pas capable d'imposer des conséquences au fait que ses décisions ne sont pas appliquées, sa capacité à s’acquitter du mandat qui lui est confié par la Charte des Nations Unies sera minée et sa crédibilité entamée. Après avoir rappelé que les Ministres des pays non alignés s'étaient réunis à Durban le 29 avril dernier et avaient exprimé leur horreur face aux tueries et destructions survenues à Djénine et dans d'autres villes palestiniennes, il a reconnu que la situation au Moyen-Orient était compliquée: néanmoins, a estimé le représentant sud-africain, les Etats Membres attendent du Conseil de sécurité qu'il insiste pour faire respecter et appliquer ses décisions.
M. ÜMIT PAMIR (Turquie) a déclaré que son inquiétude au sujet de la situation du Moyen-Orient ne se dissipera pas tant que les résolutions 1402 et 1403 du Conseil de sécurité ne seront pas mises en oeuvre et tant que les forces israéliennes ne se seront pas retirées des territoires palestiniens. Il s’est néanmoins félicité de la levée du siège du quartier général du Président Arafat à Ramallah et a formé le voeu que la situation autour de l’église de la Nativité à Bethléem puisse être résolue pacifiquement. Il a réaffirmé la condamnation par son pays de toutes les formes de violence, notamment les attentats-suicide contre les civils israéliens, attentats qu’il a qualifiés de moralement répugnants. Il s’est dit convaincu que la lutte efficace contre le terrorisme et la violence en général formera la base sur laquelle la paix peut être construite. Dans le même ordre d’idées, il a souligné la nécessité de faire intervenir une tierce partie pour aider les Palestiniens et les Israéliens. Dans ce contexte, il s’est associé à la proposition du Secrétaire général d’envoyer une équipe d’établissement des faits pour enquêter sur les événements de Djénine. Il a fait part de sa déception face à l’échec de cette proposition et face à la non application de la résolution 1405 du Conseil de sécurité.
Le représentant de la Turquie s’est félicité de la tenue hier à Washington de la réunion du Quartet, qu’il a définie comme une nouvelle étape visant à ranimer l’espoir. Il a rappelé que son pays, par sa position unique à l’égard des parties concernées, a toujours joué un rôle de conciliation pour régler la question du Moyen-Orient. A cet égard, il a précisé que MM. Cem et Papandreou, respectivement Ministre des affaires étrangères de la Turquie et de la Grèce, se sont rendus ensemble en Israël et en Palestine les 24 et 25 avril derniers. Une démarche, a-t-il insisté, qui n’a pas seulement démontré l’intérêt de la Turquie pour la question du Moyen-Orient, mais aussi son souci de favoriser le dialogue avec un voisin, avec lequel il a des divergences sur plusieurs autres questions. Evoquant la question humanitaire, il a souligné que son Gouvernement a fourni une assistance humanitaire d’urgence par le biais du Croissant-Rouge turc dans le souci de soulager les souffrances des civils palestiniens et qu’il prévoit également d’augmenter ses contributions auprès de l’Office de secours et de travaux pour les réfugiés de Palestine (UNRWA) afin de lui permettre de faire face à ses urgences. En conclusion, M. Pamir a précisé que le cadre d’une paix durable était clairement défini et qu’il reposait sur l’application des résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité, du respect du principe de l’échange des territoires contre la paix, dans le contexte politique clairement défini par la résolution 1397 du Conseil de sécurité qui affirme l’idée d’une région dans laquelle deux Etats, Israël et la Palestine, puissent vivre côte à côte, à l’intérieur de frontières internationalement reconnues. Dans ce contexte, il a également souligné l’importance de la proposition de paix du Prince héritier Abdullah de l’Arabie saoudite.
M. MOTOHIDE YOSHIKAWA (Japon) a regretté qu'en raison des objections du Gouvernement israélien, le Secrétaire général ait annoncé son intention de dissoudre l'Equipe d'établissement des faits, ce qui a grandement érodé l'autorité et la crédibilité du Conseil de sécurité. Le Japon espère que le Conseil prendra une position claire sur la question. Préoccupé par la situation humanitaire que connaissent les Palestiniens, le Japon a décidé d'accroître son aide humanitaire d'urgence au peuple palestinien, par le biais du PNUD, de près de 3,3 millions de dollars. En réponse aux appels de contributions de l'UNRWA, le Japon s'est engagé à fournir une aide médicale de 1,2 million de dollars. Nous étudions la possibilité d'accroître notre aide humanitaire si de besoin. En dépit des difficultés, nos efforts visant à restaurer la paix dans la région doivent se poursuivre, a dit le représentant. Nous invitons instamment le Gouvernement d'Israël et l'Autorité palestinienne à prendre des mesures décisives pour faciliter un cessez-le-feu et la reprise du processus de paix.
Comme le disait la Ministre des affaires étrangères du Japon, un engagement multiple de la part de la communauté internationale avec la participation active du Japon est nécessaire. Celle-ci a identifié trois priorités, à savoir la nécessité de garantir l'application d'un accord de cessez-le-feu et de promouvoir le processus politique et la tenue d'une conférence de paix. Deuxièmement, il est important de renforcer la stabilité régionale et le développement qui sont les «dividendes de la paix». Une manière d’y parvenir serait de relancer par exemple des projets de coopération régionale. Une troisième priorité consiste à établir des relations de confiance mutuelles entre les deux parties. Le Japon est disposé à accueillir un forum associant Israéliens et Palestiniens représentant un large éventail de disciplines et offrant diverses perspectives de discussions sur la coexistence pacifique entre les deux peuples et la vision d’un futur Etat palestinien. Nous appuyons dans ce contexte la proposition de Colin Powell de tenir une conférence de paix en début d'été.
M. ABDULAZIZ NASSER R. AL-SHAMSI (Emirats arabes unis) s’est dit préoccupé par les méthodes du Conseil de sécurité alors qu’il est aux prises à l’une des questions les plus volatiles et les plus complexes à l’ordre du jour. Depuis l’adoption de la résolution 1405 (2002), parrainée par les Etats-Unis et le Royaume-Uni, il est particulièrement surprenant d’apprendre que les auteurs mêmes de ce texte font tout pour se désister. Ce qui s’est passé à Djénine ne fait aucun doute et ne saurait être justifié. Les crimes qui ont été commis dans ce camp sont punissables et doivent être sanctionnés. Comment se fait-il qu’Israël, après deux jours de consultations avec le Secrétaire général, n’ait pas été en mesure d’accepter le déploiement de l’équipe d’établissement des faits. Il n’y a qu’une explication, c’est qu’Israël entendait ainsi cacher les crimes commis à Djénine, a estimé le représentant.
Les pressions exercées sur le Gouvernement israélien pour qu’il coopère avec cette équipe n’ont pas été à la hauteur, ni de l’urgence de la situation, ni des règles et normes du droit international et du droit international humanitaire, a fait remarquer le représentant. C’est pourquoi, il a demandé aujourd’hui au Conseil d’assumer pleinement ses responsabilités en évitant toute politique des « deux poids, deux mesures » et en protégeant les innocents et les plus faibles. Il faut donc qu’il condamne Israël pour Djénine et les incursions dans les territoires palestiniens. Il doit rejeter toute excuse avancée par Israël pour justifier ses actes à Djénine. Les crimes qui y ont été commis doivent être jugés comme les autres crimes de guerre commis ailleurs, en ex-Yougoslavie ou au Rwanda. Le Conseil doit aussi veiller à faire lever le siège de l’église de la Nativité à Bethléem. Il a enfin prôné l’envoi d’une force de l’ONU pour protéger le peuple palestinien, leur territoire et reconstruire les infrastructures palestiniennes détruites par les incursions militaires israéliennes afin de permettre le développement du Territoire.
M. MOCHAMAD SLAMET HIDAYAT (Indonésie) a exprimé sa vive inquiétude face à la tragédie humanitaire qui frappe le peuple palestinien. La souffrance des civils palestiniens dans de nombreuses villes et dans les camps de réfugiés est accentuée par les pénuries alimentaires et le manque de soins de santé. La poursuite du siège de l’église de la Nativité à Bethléem est tout aussi préoccupante, a-t-il poursuivi, tandis que l’ampleur de ce qui s’est passé à Djénine est inqualifiable. Il a apporté le soutien de sa délégation aux efforts déployés par le Secrétaire général dans la mise en oeuvre de la résolution 1405, notamment par la mise en place de la mission d’établissement des faits. Regrettant que cette mission n’ait pu se rendre sur le terrain en raison du refus d’Israël de coopérer, M. Slamet Hidayat a estimé qu’il s’agissait là d’un nouveau défi lancé à la communauté internationale. Il aurait été de l’intérêt de toutes les parties de voir les faits établis sur ce qui s’est réellement passé à Djénine, a-t-il observé, afin de pouvoir prendre des mesures appropriées pour éviter une dégradation de la situation. Cependant, Israël continue de se moquer des résolutions du Conseil de sécurité mais cela ne devrait pas diminuer pour autant la pression qui doit être mise sur son Gouvernement. La crédibilité du Conseil est ici en jeu, a déclaré le représentant indonésien, et il est temps selon lui de prendre des mesures pour faire respecter et appliquer les résolutions 1402 et 1403 et de déployer une force de sécurité internationale dans les territoires palestiniens occupés.
M. MOHAMED BENNOUNA (Maroc) a indiqué que les destructions par Israël des infrastructures des cités palestiniennes ne répondaient à aucune nécessité militaire, elles visaient seulement à casser ce que l’Autorité palestinienne a mis une dizaine d’années à bâtir afin de préparer l’avènement de l’Etat palestinien. Il a ajouté que le monde entier est désormais traumatisé par les images de cette catastrophe humanitaire qui marquera d’une empreinte indélébile la mémoire de nombreuses générations de Palestiniens. Il a apporté tout son appui au Secrétaire général, à l’esprit d’ouverture qu’il a manifesté, tout en restant ferme sur les principes et en défendant les valeurs qui fondent l’Organisation des Nations Unies. Il a rappelé que, contrairement à ce qui a été avancé par Israël, l’équipe d’établissement des faits n’avait pas besoin de son autorisation préalable pour se rendre à Djénine. Seulement, en refusant de coopérer avec les Nations Unies, Israël savait qu’elle poussait cette équipe à l’échec. La crédibilité même de notre Oorganisation se trouve maintenant en péril, ce qui est très préoccupant pour l’avenir du maintien de la paix et de la sécurité dans le monde, a poursuivi le représentant.
M. Bennouna a en outre estimé que le monde ne peut être paralysé parce qu’un Etat Membre refuse de coopérer et qu’il faut poursuivre le travail de clarification sur Djénine, mobiliser le Secrétariat des Nations Unies et toutes les bonnes volontés et en faire rapport au Conseil, ajoutant, selon un proverbe marocain, «qu’on ne cache pas le soleil avec un tamis». Il a souhaité ardemment que les efforts actuels pour ranimer le processus de paix puissent progresser rapidement. Il a indiqué que le Royaume du Maroc est prêt à encourager la tenue d’une conférence internationale sur la base du principe de la terre contre la paix, et dans le respect de la légalité internationale, ajoutant qu’au préalable, le Conseil doit veiller à la mise en oeuvre de ses résolutions 1402 et 1405 et au retrait des troupes israéliennes de toutes les cités palestiniennes.
Pour M. ARNOLDO LISTRE (Argentine), il est aujourd’hui plus clair que jamais qu’il n’y a aucune solution militaire possible au conflit au Moyen-Orient et que les deux parties ont besoin de l’aide d’une tierce partie pour sortir de l’impasse. C’est pourquoi, il s’est félicité de l’initiative du «quartet», annoncée hier à Washington, d’organiser une grande conférence pour la paix en juin prochain. M. Listre s’est aussi réjoui du dénouement heureux du siège du Président Arafat à Ramallah. Cette avancée ouvre de nouvelles perspectives pour l’indispensable reprise du dialogue. Pour cela, les parties doivent renoncer à la violence et prendre des mesures favorisant l’établissement d’un climat de confiance. Condamnant énergiquement tous les actes de violence, quels qu’ils soient, l’Argentine réitère sa préoccupation face aux opérations militaires autour de l’église de la Nativité à Bethléem.
Les dernières semaines ayant clairement démontré que la violence appelle la violence, l’Argentine en appelle instamment aux deux parties pour qu’elles respectent les résolutions 1402 et 1403 (2002) du Conseil de sécurité. L’Autorité palestinienne doit condamner et sanctionner sans équivoque les actes de terrorisme et Israël doit se retirer des territoires occupés. L’Argentine appuie également la résolution 1405 entérinant la création d’une équipe d’établissement des faits concernant Djénine. Elle regrette que cette enquête n’ait finalement pu avoir lieu car elle estime, avec le Secrétaire général, qu’elle aurait fait un travail aussi professionnel qu’objectif. En conclusion, le représentant a réitéré sa conviction du droit inaliénable du peuple palestinien à disposer de son Etat
indépendant et de celui d’Israël à vivre en paix à l’intérieur de frontières sûres, reconnues par tous les Etats, en priorité ceux de la région. Il a demandé aux deux parties de consentir mutuellement à certaines concessions afin que cette vision de deux Etats côte à côte devienne l’un des premiers succès du nouveau millénaire.
M. HADI NEJAD HOSSEINIAN (République islamique d’Iran) a indiqué qu’un consensus s’était dégagé parmi les organisations internationales humanitaires et des droits de l’homme sur le fait que l’armée israélienne avait commis des crimes de guerre lors de ses récentes incursions dans les territoires occupés et particulièrement dans le camp de Djénine. Il a également estimé que la dissolution de l’équipe d’établissement des faits constituait un autre exemple de la politique des « deux poids, deux mesures » qui a paralysé les Nations Unies pendant si longtemps. Il s’agit d’un coup porté à la crédibilité et à l’autorité du Conseil de sécurité. A partir de ce moment, a-t-il demandé, comment tout effort du Conseil visant à imposer la mise en oeuvre de ses résolutions peut paraître légitime aux yeux des peuples du monde ? Il a indiqué que le démantèlement de l’équipe était prématuré et que celle-ci aurait pu utiliser d’autres moyens que ceux consistant à visiter la scène des crimes.
Le représentant s’est en outre dit convaincu que l’occupation par Israël des territoires arabes, qu’ils soient palestiniens, syriens ou libanais, est au coeur de la crise et du conflit au Moyen-orient. Il a également déploré l’échec du Conseil à prendre des mesures fermes conformément au Chapitre VII de la Charte des Nations Unies pour que les Israéliens cessent de se moquer sans cesse de ses résolutions. Il a jugé essentiel de traduire en justice les Israéliens qui ont ordonné et commis les crimes de guerre contre les civils dans les territoires occupés palestiniens et nécessaire pour la communauté internationale de se demander si un régime qui se moque des résolutions du Conseil de sécurité et les principes du droit international peut encore réclamer une place au sein des organisations multilatérales.
M. GELSON FONSECA (Brésil)a déclaré que les autorités israéliennes avaient porté atteinte à leur propre crédibilité en refusant de coopérer avec l’équipe d’établissement des faits des Nations Unies. Il s’est dit convaincu que cette obstruction n’empêchera pas la vérité de voir le jour. A cet égard, il a déclaré que la position israélienne consistant à refuser la coopération avec les Nations Unies avait un impact sur la crédibilité et l’autorité même du Conseil de sécurité. Dans ce contexte, il s’est félicité du rôle joué par les membres du «Quartet» et des nombreux dirigeants de la région dans leurs efforts visant à aboutir à un règlement du conflit entre Palestiniens et Israéliens. Il s’est félicité de la levée du siège du quartier général de l’Autorité palestinienne à Ramallah et a formé le voeu que le Président Yasser Arafat puisse retrouver toute sa liberté de mouvement. Il a salué également la proposition du «Quartet» d’organiser une conférence internationale de paix dans le souci d’apporter une réponse aux aspects sécuritaire, humanitaire, économique et social de cette crise.
Le représentant du Brésil a, par ailleurs, déclaré que la principale question à résoudre au Moyen-Orient était une question liée à une occupation étrangère illégale et au droit à l’autodétermination et il a appelé le Conseil de sécurité à être clair à ce sujet. Tout en appelant à la cessation de toutes les formes de violence et des actes terroristes en particulier, M. Fonseca a demandé une fois encore que les forces israéliennes se retirent des territoires palestiniens. Dans le même ordre d’idées, il a formé le voeu qu’il soit mis un terme aux colonies de peuplement illégales ainsi qu’au siège de l’église de la Nativité à Bethléem et que les négociations reprennent avec l’Autorité palestinienne. En conclusion, il s’est dit convaincu de la nécessité immédiate d’une présence internationale et a exprimé tout son soutien aux efforts déployés dans ce sens par le Secrétaire général.
M. HOUSSAN ASAAD DIAB (Liban) a rappelé que la résolution 1405 a été adoptée récemment pour demander au Secrétaire général de désigner une équipe devant procéder à l’établissement des faits sur ce qui s’est passé à Djénine. En adoptant cette résolution, le Conseil répondait en premier lieu au cri lancé par deux hauts responsables des Nations Unies, notamment M. Peter Hansen qui dénonçait l’offensive sanglante des forces de défense israéliennes dans le camp de Djénine. Il demandait en outre aux forces israéliennes de laisser passer les ambulances a poursuivi le représentant, soulignant qu’Israël ne respectait pas les Conventions de Genève sur la protection des civils en temps de guerre. Le Directeur de l’Office de secours et de travaux pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) déclarait pour sa part que la situation à Djénine était désastreuse et c’est pourquoi la communauté internationale a tenu à réagir. Le représentant a rappelé que Mme Mary Robinson avait été empêchée de se rendre sur le terrain et que c’était la situation de Djénine qui avait conduit le Conseil de sécurité à appuyer le principe d’une mission d’établissement des faits. Citant un rapport rendu public par la Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, le représentant du Liban a souligné que 800 logements avaient été détruits dans le camp de Djénine, sans compter le désastre humain. Il a regretté qu’une enquête ne soit pas menée sur ce qui s’est passé dans ce camp, mettant en garde contre le risque de discrédit sur la communauté internationale tout entière. Il a lancé un appel au Conseil de sécurité afin qu’il fasse le nécessaire pour faire respecter ses résolutions, l’appelant également à soutenir le Secrétaire général dans ses efforts. Il a condamné les crimes commis par Israël et a dénoncé ce qui est devenu une culture de l’impunité pour Israël et un mépris total pour les Nations Unies.
M. RAVAN A.G. FARHADI, Vice-Président du Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, a exprimé la consternation du Comité de voir le Conseil de sécurité entravé dans ses efforts d’établir la vérité sur les événements récents survenus à Djénine. Il a condamné le refus de coopération du Gouvernement israélien et a jugé inacceptable que la vérité ne puisse être faite sur ce qui s’est passé dans ce camp. Il a regretté que le Conseil n’ait pu prendre de mesure plus ferme face au mépris israélien pour ses résolutions. “Même si le temps travaille à l’encontre d’une enquête, nous pensons que Djénine continuera de peser sur la crédibilité du Conseil” a-t-il observé. Le Conseil de sécurité doit poursuivre le plus vite possible ses efforts visant à établir avec exactitude les faits car il s’agit là de justice et d’équité, et c’est également un moyen de mettre fin aux actes brutaux perpétrés par les forces israéliennes, a déclaré le représentant. Djénine n’est pas le seul exemple de ce comportement inacceptable des Israéliens, a-t-il poursuivi, rappelant que le Bureau du Comité est consterné par ce qui s’est passé à Ramallah, Hébron ou Gaza. Il s’est félicité de la liberté de mouvement recouvrée par le Président Arafat dont la légitimité sort renforcée de cette épreuve, puis a salué les efforts du « Quartet » en vue de l’organisation d’une Conférence internationale. Il a rappelé qu’une paix juste et durable est indissociable de l’application des
résolutions 242, 338 et du respect du principe de la terre contre la paix, de même que des résolutions 1402 et 1403. Il a ajouté que le Conseil de sécurité devait veiller à neutraliser les extrémistes avant d’appeler ses membres à prendre toutes les mesures nécessaires pour saisir l’occasion offerte ces derniers jours et la transformer en perspective réelle de paix.
M. SERGEY LAVROV (Fédération de Russie) a regretté que le Conseil se réunisse aujourd’hui sur le Moyen-Orient alors que, sur place, la situation est très difficile, que les civils continuent de mourir et que la situation humanitaire est des plus graves. Pour que la normalisation soit possible, il a expliqué qu’il faut que la communauté internationale fournisse des efforts sur plusieurs fronts. C’est à cela que s’est attachée la réunion récente du «Quartet» à Washington, a-t-il ajouté. Des mesures concrètes ont été proposées pour calmer la situation sur le terrain. La Fédération de Russie pense que toutes les résolutions du Conseil de sécurité doivent être rigoureusement mises en oeuvre. Toute politique des «deux poids, deux mesures» ne ferait que saper son autorité et sa crédibilité, a prévenu M. Lavrov.
Le représentant russe a aussi estimé qu’il n’y avait aucune justification au refus d’Israël de coopérer avec l’équipe d’établissement des faits concernant Djénine. Il a appuyé pleinement les mesures prises par le Secrétaire général, même si malheureusement et à cause de la position du Gouvernement israélien, elles n’on pas été couronnées de succès. La priorité est maintenant de débloquer la situation autour de l’église de la Nativité à Bethléem et d’engager la reconstruction du Territoire palestinien et des infrastructures de l’Autorité palestinienne, a-t-il estimé, avant d’ajouter que, parallèlement, le dialogue doit reprendre et les initiatives de consultation se multiplier sur la base du processus politique.
M. RICHARD RYAN (Irlande) a estimé que c’était un droit de la communauté internationale de pouvoir disposer de la vérité sur ce qui s’est passé à Djénine. Il a rappelé l’engagement pris par les Ministres israéliens de la défense et des affaires étrangères qui avaient assuré le Secrétaire général des Nations Unies de leur pleine coopération. Citant ces Ministres qui avaient assuré que leur pays n’avait rien à cacher, le représentant de l’Irlande s’est interrogé, dès lors, sur les raisons d’une telle obstruction par Israël et de son refus d’autoriser l’équipe d’établissement des faits de se rendre à Djénine. Il a rappelé que sa délégation avait toujours soutenu les efforts du Secrétaire général depuis le 19 avril dernier et l’adoption de la résolution 1405. A ce titre, il a admis que M. Kofi Annan n’avait d’autre choix, face au refus d’Israël de coopérer, que de démanteler l’équipe, le représentant appuyant cette décision. Il a exhorté le Conseil de sécurité à répondre à la lettre du Secrétaire général, souhaitant une réponse unifiée qui condamne clairement l’attitude israélienne et le défi lancé aux Nations Unies. “L’Irlande partage avec le monde entier la tristesse et le dégoût face aux actes perpétrés par Israël”, a-t-il poursuivi avant de dénoncer une fois de plus l’attitude arrogante d’Israël qui empêche la vérité d’éclater au grand jour, et de mettre en garde les Israéliens sur le fait que cette obstruction pèsera à terme sur eux. Il a apporté ensuite son appui aux efforts du “Quartet” réuni hier à Washington et s’est félicité du fait que le Président Arafat ait recouvré sa liberté.
M. MARTIN BELINGA EBOUTOU (Cameroun) a fait observer que les circonstances qui ont rendu cette réunion nécessaire sont bien connues: l’impossibilité dans laquelle s’est trouvée l’équipe d’établissement des faits de se rendre à Djénine. Elle donne aussi l’occasion de faire le tour de la question. Certes certains résultats positifs ont été enregistrés, comme la levée du siège du quartier général du Président Arafat à Ramallah et le résultat de la réunion d’hier à Washington tenue par le «Quartet» et qui a débouché sur la proposition de tenir une conférence internationale d’ici au début de l’été. Mais la paix au Moyen-Orient appelle un préalable, le règlement de la question de Palestine, qui est au centre du conflit et fait tant de victimes dans la région, a clairement prévenu le représentant. L’autre point positif de la réunion de Washington, a-t-il estimé, est la réaffirmation qu’il faut examiner la question sur tous les fronts, sécuritaire, économique et politique.
Autant d’éléments positifs qui ne sauraient toutefois occulter la déception amère qui est aujourd’hui celle de la délégation du Cameroun. Aux termes du paragraphe dispositif 2 de la résolution 1405, le mandat de l’équipe d´établissement des faits était très simple et ce n’est pas faute de trésors d’imagination et d’inventivité de la part du Secrétaire général que l’équipe n’a pu se rendre sur le terrain. Le Conseil aurait ainsi pu être parfaitement informé de ce qui s’est passé à Djénine et travailler à favoriser le rétablissement de la confiance, et ainsi à terme relancer le processus de paix. Le Cameroun comprend la décision du Secrétaire général, qui s’est montré responsable et a refusé de se rendre complice d’un rapport qui ne reposerait pas sur les faits. Néanmoins, le représentant a indiqué qu’il continue à penser que le Secrétaire général doit par tous les moyens s’informer sur les événements de Djénine et en faire rapport au Conseil.
M. BOUBACAR DIALLO (Guinée) a indiqué que sa délégation déplorait le refus du Cabinet israélien de coopérer avec les Nations Unies concernant l’envoi de la mission d’établissement des faits, ce qui pourrait affecter la crédibilité du Conseil de sécurité. Il a souhaité que tout soit mis en oeuvre pour amener le Gouvernement israélien à coopérer au dénouement de la crise dans le cadre du respect de ses obligations internationales. Il a estimé que le Conseil de sécurité, dans son intégralité, devrait envisager de nouvelles mesures pour que toute la lumière soit apportée sur les événements qui se sont déroulés à Djénine et a indiqué qu’à cette fin, sa délégation est tout à fait disposée à travailler étroitement avec les autres délégations. Il s’est par ailleurs félicité de la tenue hier à Washington de la réunion du « Quartet » qui a pris l’engagement d’oeuvrer, de concert avec les Gouvernements arabes et la communauté internationale, à la restauration de la paix au Moyen-orient, en se fondant sur les trois piliers sécuritaire, politique et économique, y compris humanitaire. Il a enfin encouragé le « Quartet » à mettre en oeuvre la décision qu’il a prise d’organiser, au début de l’été, une conférence internationale qui permettra d’adopter des mesures concrètes pour atteindre cet objectif.
M. JAMES B. CUNNINGHAM (Etats-Unis) a rappelé l’esprit de la résolution 1405 présentée par sa délégation, précisant notamment que cette résolution n’exigeait rien ni du Secrétaire général, ni d’Israël, ni des Palestiniens, mais ne faisait qu’exprimer des souhaits. Il a jugé regrettable que les Israéliens n’aient pas permis l’envoi de l’équipe d’établissement des faits et a assuré que sa délégation avait également soutenu les efforts du Secrétaire général à toutes les étapes, y compris celle de la dissolution de cette équipe. Compte tenu des besoins actuels, il est urgent de se tourner vers l’avenir, a-t-il poursuivi, exprimant la préoccupation des Etats-Unis face à la situation humanitaire endurée par les Palestiniens. Au fur et à mesure que les faits apparaissent, il semble bien qu’il n’y ait pas eu de massacre à Djénine, a déclaré ensuite M. Cunningham.
Rappelant la récente initiative du Président Bush qui a dépêché dans la région le Secrétaire d’Etat Colin Powell, il a souligné certaines avancées constructives enregistrées cette semaine, notamment à Ramallah. Saluant ces développements et insistant sur les efforts diplomatiques de Washington, qui a accueilli hier la réunion du «Quartet», M. Cunningham a souligné trois éléments importants pour Washington qui découlent des résolutions 1402 et 1403 du Conseil de sécurité. Le premier est le besoin de vivre en paix et en sécurité pour les Palestiniens et les Israéliens, au sein de deux Etats distincts, le représentant appelant pour cela le Président Arafat à s’acquitter de ses obligations en matière de sécurité. Il faut en second lieu répondre aux besoins du peuple palestinien notamment au niveau humanitaire. A cet égard, M. Cunningham a appelé la communauté internationale à faire preuve de générosité et souligné que son pays a débloqué 300 millions de dollars pour l’aide humanitaire au peuple palestinien. Le troisième volet vise à faire pression sur les parties pour aboutir à un règlement négocié. Dès le début de l’été, avec la tenue de la conférence internationale de paix, il faudra saisir cette occasion pour parvenir à une solution négociée au Moyen-Orient et les Etats-Unis sont déterminés à tout mettre en ouvre pour privilégier la voie de la négociation politique sur la base des résolutions 242 et 338.
M. ANDRES FRANCO (Colombie) a fait observer que le Conseil se réunit aujourd’hui en déplorant que l’équipe d’établissement des faits récemment survenus à Djénine, dont la création avait été approuvée à l’unanimité par les quinze membres, ait dû être dissoute sans s’être rendue sur place. Parallèlement, et grâce à d’intenses efforts diplomatiques, l’on constate malgré tout quelques signes encourageants concernant le Moyen-Orient, comme par exemple la levée du siège du Président Arafat à Ramallah et l’annonce hier par les membres du «Quartet» de leur intention d’organiser une conférence pour le Moyen-Orient. Cette dernière initiative mérite tout notre appui, a estimé le représentant, ajoutant que les bases de négociations sont déjà là et bien connues. Il est clair qu’il faudra à cette occasion examiner la question simultanément sur trois fronts, le front sécurité, le front humanitaire et économique et le front politique. Une solution partielle sur un seul de ces aspects ne produirait aucun résultat durable, a prévenu M. Franco.
Malheureusement ces signes positifs sont obscurcis par les objections que le Gouvernement israélien continue d’émettre à l’égard de l’envoi d’une équipe d’établissement des faits à Djénine. «Ma délégation regrette profondément le refus d’Israël de coopérer, poussant ainsi le Secrétaire général à dissoudre l’équipe qu’il avait mise sur pied», a insisté le représentant. Il a ajouté qu’Israël, puissance occupante, avait ainsi perdu l’occasion de faire la preuve du caractère «nécessaire et proportionné» de ses actions. De son côté, le Conseil de sécurité a perdu l’occasion de continuer à jouer un rôle constructif au Moyen-Orient, alors que ces derniers mois il était difficilement parvenu à atteindre un consensus sur cette question, conduisant à l’adoption d’importantes résolutions. Avec Djénine, le Conseil a en quelque sorte sabordé sa crédibilité politique, a regretté le représentant. Les allégations multiples de violations graves du droit humanitaire international à Djénine ne peuvent rester sans suite. La délégation colombienne estime que le thème central de la réunion d’aujourd’hui est le respect des résolutions du Conseil et elle considère que rien ne peut justifier le fait qu’elles, notamment les 1402 et la 1405, ne sont pas mises en œuvre. En conclusion, M. Franco a demandé à ce que le caractère sacré de l’église de la Nativité à Bethléem soit respecté et qu’une solution pacifique soit trouvée rapidement.
M. YOTOV (Bulgarie) s’est dit extrêmement préoccupé par la gravité de la situation au Moyen-Orient. Il a souligné l’importance des résolutions du Conseil de sécurité, seule base possible pour la paix dans la région. Il s’est félicité des initiatives du « Quartet » lors de sa réunion d’hier à Washington, qui a convenu de mesures concrètes, dont la tenue d’une conférence internationale sur la question, pouvant effectivement faire avancer les choses. La délégation bulgare est très préoccupée par le fait qu’au moment même où le Conseil se réunit, le retrait israélien des zones sous contrôle palestinien n’ait pas encore été effectué. Elle estime qu’il faut faire la lumière sur les événements de Djénine et appuie tous les efforts passés et à venir du Secrétaire général pour fournir au Conseil les informations pertinentes. Elle félicite les Etats-Unis et le Royaume-Uni dont les efforts ont permis la levée du siège du Président Arafat à Ramallah. Ce dernier doit maintenant faire tout son possible pour mettre fin à la violence, démanteler et faire cesser le terrorisme et reconstruire le territoire palestinien.
En même temps, il faut réaliser que la destruction des infrastructures de l’Autorité palestinienne au cours des incursions israéliennes sape sa capacité à lutter contre le terrorisme et la violence. C’est pourquoi, il est urgent d’entreprendre le plus rapidement possible les efforts de reconstruction. La délégation bulgare est aussi très préoccupée par la situation humanitaire dans laquelle se trouve le peuple palestinien, notamment dans les camps de réfugiés. Israël ne doit pas seulement garantir un accès aux populations dans le besoin mais coopérer avec les organisations humanitaires. Il faut aussi qu’Israël coopère pour résoudre le plus rapidement possible la crise autour de l’église de la Nativité à Bethléem. La communauté internationale doit saisir l’occasion fournie par les progrès récents pour véritablement faire repartir le processus de paix, a insisté le représentant en conclusion
M. WANG YINGFAN (Chine) a rappelé qu’alors que le monde découvrait, le mois dernier, que les forces israéliennes avaient tué des innocents à Djénine, détruit leurs maisons et ainsi entraîné une crise humanitaire grave, Israël avait promis son entière coopération avec l’équipe d’établissement des faits alors proposée par le Secrétaire général et approuvée par le Conseil. Mais Israël n’a pas mis en pratique cet engagement et, ainsi, n’a pas respecté les principes de la Charte des Nations Unies qui veulent que les résolutions du Conseil soient respectées. Le recours à la force et aux moyens militaires ne conduit à rien, a prévenu le représentant.
M. Wang a fait observer qu’il existe déjà un cadre clair pour une paix juste et durable au Moyen-Orient, qui reconnaît le droit légitime du peuple palestinien à disposer de son Etat et le droit du peuple israélien de vivre en sécurité à l’intérieur des frontières qui étaient celles d’avant 1967. La Chine appuie les efforts du Secrétaire général, du « Quartet » et de l’ensemble de la communauté internationale pour trouver une solution pacifique au conflit. Le représentant a aussi estimé qu’aujourd’hui le territoire palestinien est dans une situation déplorable, les destructions ayant été immenses. Par conséquent, il est urgent d’apporter aux Palestiniens toute l’assistance nécessaire quelle que soit sa forme.
M. B. GOKOOL (Maurice) a déclaré qu’il comprenait les préoccupations d’Israël pour la sécurité, notamment le droit de protéger son peuple des attaques terroristes. Mais il devrait être clair pour Israël et pour tous que la légitime défense n’est pas un chèque en blanc, a-t-il ajouté, estimant que la réponse au terrorisme ne libère en aucun cas Israël de ses obligations en vertu du droit international ni ne justifie la crise humanitaire et des droits de l’homme dans les territoires occupés palestiniens. Il a condamné l’utilisation de l’église de la Nativité comme un sanctuaire pour les militants et a appelé Israël à lever immédiatement le siège de l’église, ce qui empêcherait une tragédie humaine dans un site sacré de la foi chrétienne.
Le représentant a indiqué que la provocation d’Israël à l’égard du Secrétaire général et la rebuffade essuyée par le Conseil sont inacceptables et devraient être condamnées. C’est un coup porté à la crédibilité du Conseil. Il a estimé qu’il aurait fallu adopter un langage plus ferme forçant Israël à accepter sans conditions l’équipe d’établissement des faits. La dissolution de l’équipe est peut-être le prix à payer pour notre réticence et notre hésitation au Conseil. Il s’agit d’un dangereux précédent au sein du Conseil qui sera certainement utilisé par d’autres pays dans une situation similaire. Il a donné raison au Groupe des Etats arabes pour avoir présenté sa résolution hier. Il s’est également félicité de l’annonce de la tenue cette année d’une conférence internationale de paix sur le Moyen-Orient et a indiqué que la proposition de paix présentée par le Prince héritier Abdullah d’Arabie saoudite, approuvée par les dirigeants arabes, constitue une base importante de discussion par la Conférence. Il s’est en outre félicité de la déclaration du Ministre israélien de la défense demandant la reprise des négociations de paix. Le succès de cette conférence dépendra de plusieurs facteurs, parmi lesquels figure le respect total des résolutions récentes adoptées par le Conseil de sécurité, a conclu le représentant.
M. FAYSSAL MEKDAD (République arabe syrienne) a regretté que le Conseil de sécurité siège de nouveau ce soir pour aborder les défis auxquels il est confronté face aux agressions israéliennes contre les civils palestiniens, les destructions de villages et de villes, ou encore celles des camps de réfugiés. A ce titre, il a condamné les massacres perpétrés délibérément par Israël dans le camp de Djénine, et qui sont intervenus après l’adoption des résolutions 1402 et 1403. A la veille de la Pâques orthodoxe, l’église de la Nativité fait encore l’objet d’un siège, a-t-il dit, ajoutant que les soldats israéliens ont tué un grand nombre de civils palestiniens qui y sont réfugiés. Est-ce que Israël donnera une chance à la paix dans l’église de la Nativité, a-t-il interrogé, interpellant le Conseil de sécurité qui doit prendre ses responsabilités. Il a rappelé les propos du Ministre syrien des affaires étrangères qui rappelait récemment que les habitants du Camp de Djénine sont des réfugiés palestiniens qui ont été déracinés de leur terre depuis 1948 à cause de l’occupation israélienne. Il a souligné le besoin de faire en sorte qu’aucune partie ne puisse manipuler le Conseil de sécurité, rappelant que sa délégation, comme le Groupe arabe, ont tenu à maintenir l’unité du Conseil et le consensus en adoptant la résolution 1405 présentée par les États-Unis. Ma délégation, a-t-il poursuivi, a collaboré pleinement et apporté son soutien aux efforts du Secrétaire général, mettant en cause ensuite Israël qui a montré son vrai visage pour vider de son sens la résolution 1405. Voyant en cela une tactique bien connue d’Israël, il s’est demandé depuis quand l’accusé pourrait avoir le droit de nommer les juges qui vont prononcer son jugement. Il a déclaré que le Conseil aurait dû faire preuve de fermeté et soutenir le Secrétaire général face à certains responsables israéliens qui ont jeté des doutes sur les membres de l’équipe et sur les intentions de M. Kofi Annan. Alors que c’est le Conseil de sécurité qui avait demandé cette mission d’établissement des faits, a déploré le représentant syrien, il n’a pas voulu adopter, pour des raisons bien connues, le projet de résolution déposé par ma délégation. Israël doit assumer pleinement ses responsabilités pour la reconstruction des infrastructures palestiniennes qu’il a détruites, a-t-il poursuivi, soulignant que les chapitres VI et VII prévoient des dispositions pour contraindre les États paria à respecter la loi.
Mme ROBERTA LAJOUS (Mexique) a remercié le Secrétaire général de son initiative visant à relater clairement ce qui s’est passé dans le camp de réfugiés de Djénine. Le maintien de la paix et de la sécurité sont les piliers fondamentaux de cette Organisation et de cet organe, a-t-elle rappelé, avant d’ajouter que les résolutions du Conseil de sécurité doivent être respectées, sans exception que ce soit, par tous. Le manque de mise en œuvre de ces résolutions, notamment concernant le Moyen-Orient, a sapé les possibilités d’un règlement juste dans la région et remet en question la crédibilité de toute la communauté internationale, a-t-elle estimé. Elle a rappelé que la résolution 1405 avait été rédigée sur un ton modéré dans l’espoir qu’elle serait respectée par toutes les parties. Malheureusement, cela n’a pas été le cas et la délégation mexicaine tient à rappeler que la communauté internationale ne doit pas oublier ce qui s’est passé ces dernières semaines. Le Conseil de sécurité ne saurait renoncer à ses obligations juridiques de faire la lumière sur ce qui s’est passé, quelles que soient les parties incriminées, a-t-elle insisté en conclusion.
M. STUART ELDON (Royaume-Uni) a déclaré que la situation dans le Territoire occupé continue d’être une grave source de préoccupation pour son Gouvernement. La violence et les représailles sont devenues la norme et la vie des civils, de chaque côté, est menacée de manière quasi quotidienne. S’il est difficile, dans ces circonstances, de garder un quelconque optimisme, on ne peut néanmoins abandonner les efforts entrepris. C’est pourquoi, la communauté internationale doit poursuivre ses efforts en vue d’un règlement définitif où deux Etats, Israël et la Palestine, vivraient côte à côte au sein de frontières reconnues et en paix. A cet égard, le représentant s’est félicité de l’issue de la réunion du «Quartet», tenue hier à Washington. Pour y parvenir, le dialogue et la négociation constituent la seule solution. Le Royaume-Uni est décidé à favoriser la reprise du processus de paix. C’est dans cette optique qu’avec les Etats-Unis, il a négocié l’initiative ayant permis au Président Arafat de reprendre ses activités à l’intérieur comme à l’extérieur du Territoire occupé. Le Président Arafat sera autorisé à se rendre à l’étranger et à revenir dans le Territoire, a-t-il réitéré.
Cette avancée n’est toutefois pas suffisante, a poursuivi M. Eldon, avant de souhaiter que les parties s’en inspirent pour mettre un terme à la violence et reprendre le dialogue. Ainsi que l’a clairement énoncé le Conseil de sécurité dans ses récentes résolutions, les deux parties doivent s’employer à mettre en place un véritable cessez-le-feu et à reprendre leur coopération. Israël doit se retirer des zones sous contrôle palestinien et respecter toutes les résolutions pertinentes. De son côté, le Président Arafat doit faire œuvre utile de sa liberté retrouvée et exercer son leadership politique et faire tout son possible pour que la violence cesse. De même que le Premier Ministre Sharon, qui doit aussi témoigner de sa stature d’homme d’Etat en ce moment crucial, le Président Arafat doit saisir l’opportunité qui se présente.
Le représentant a aussi exprimé la profonde déception de son Gouvernement devant le fait que l’équipe d’établissement des faits créée par le Secrétaire général n’ait pu se rendre à Djénine. Le porte-parole du Gouvernement israélien affirme que l’opération militaire était nécessaire et proportionnée. Si tel est le cas, alors Israël n’a rien à cacher, a fait observer M. Eldon. Le Secrétaire général a conclu avec justesse que le refus israélien de coopérer rendait le travail de l’équipe d’établissement des faits impossible dans un avenir proche. Compte tenu des circonstances, le Royaume-Uni appuie pleinement sa décision de dissoudre l’équipe, aussi regrettable que cela puisse être. «Nous pensons qu’un travail équilibré et crédible permettant d’établir clairement les faits qui se sont déroulés à Djénine aurait été du meilleur intérêt d’Israël, car maintenant, ainsi que l’a dit le Secrétaire général, l’ombre de Djénine va continuer de planer», a prévenu le représentant.
M. OLE PETER KOLBY (Norvège) s’est félicité de la levée du siège du quartier général de l’Autorité palestinienne à Ramallah. Il a déclaré que cette évolution était l’illustration que la diplomatie et les négociations sur le terrain devaient être privilégiées aux actions militaires et la violence pour la résolution de ce conflit. Dans ce contexte, il a appelé les parties à trouver une solution non violente au siège de l’église de la Nativité à Bethléem. Il a regretté l’absence de volonté du Gouvernement israélien de coopérer avec l’équipe d’établissement des faits et a regretté que cette situation ait amené le Secrétaire général à renoncer à cette équipe. Il a affirmé qu’il est dans l’intérêt de toutes les parties, des Palestiniens, des Israéliens et de toute la communauté internationale d’obtenir des informations aussi précises que possible sur ce qui s’est passé dans le camp de réfugiés de Djénine. En ce qui concerne la réponse à donner à cette crise, le représentant norvégien a souligné la nécessité de travailler à la fois sur les questions politique, sécuritaire et économique.
M. Kolby a, par ailleurs, salué la tenue la semaine dernière en Norvège d’une rencontre internationale des donateurs qui a été l’occasion d’engagements forts pour la reconstruction de la société palestinienne. Dans le même ordre d’idées, il s’est félicité des initiatives américaines et du «Quartet» pour promouvoir la paix dans la région. Il a également indiqué que le premier défi consistait maintenant à reconstruire l’Autorité palestinienne, y compris l’aspect sécuritaire. Il a formé le voeu que le Président Arafat puisse exercer une réelle autorité, mettre tout en oeuvre pour prévenir de futurs attentats terroristes et faire face à toutes ses responsabilités en tant que représentant élu du peuple
palestinien. En conclusion, il a appelé les Israéliens à se retirer de tous les territoires occupés et a indiqué qu’il partage la vision d’une région dans laquelle deux États, Israël et la Palestine, vivraient côte à côte, à l’intérieur de frontières internationalement reconnues. Enfin, il s’est également félicité de la proposition américaine d’organiser une Conférence de paix internationale sur le Moyen-Orient.
M. YVES DOUTRIAUX (France) a déploré qu’il ait été impossible d’envoyer l’équipe d’établissement des faits en raison des objections des autorités israéliennes qui sont revenues sur l’accord qu’elles avaient donné il y a deux semaines au Secrétaire général. Cette équipe avait été nommée par le Secrétaire général avec le plein soutien du Conseil de sécurité et la non-coopération d’Israël à la mise en oeuvre de la résolution 1405 est une erreur grave que la France condamne a ajouté le représentant, soulignant que les résolutions du Conseil ne sont pas optionnelles. Les témoignages et observations rapportés par les organisations internationales humanitaires et de défense des droits de l’homme ainsi que par les médias sont graves et l’absence de rapport exact et objectif sur les faits laisse tout le monde dans le doute, a souligné le représentant de la France. Il est important que le Conseil de sécurité puisse réagir en exprimant sa solidarité avec le Secrétaire général et l’équipe de Martti Ahtisaari et en exprimant la déception et la frustration de la communauté internationale.
La France se réjouit du règlement de la situation à Ramallah et du recouvrement par le Président de l’Autorité palestinienne de sa liberté de mouvement, a-t-il poursuivi, et elle rend hommage aux efforts diplomatiques qui ont été déployés pour aboutir à ce résultat positif, notamment par les Américains et les Britanniques. Alors qu’une dynamique positive semble s’amorcer avec l’annonce faite par le «Quartet» qu’il allait travailler à une conférence internationale, il importe de la conforter, notamment par la levée rapide du siège de l’église de la Nativité à Bethléem, a déclaré le représentant de la France. Il faut également aboutir sans délai à un retrait total et définitif des forces israéliennes de toutes les zones et obtenir l’assurance qu’il n’y aura plus d’incursion de l’armée israélienne. La France demeure très préoccupée par l’ensemble de la situation sur le terrain qui reste fragile et dangereuse, sur le plan humanitaire comme sur le plan politique. La communauté internationale qui s’est montrée prête à faire un gros effort financier lors de la réunion du Comité ad hoc de liaison à Oslo la semaine dernière doit intensifier ses efforts, a poursuivi M. Doutriaux, ajoutant qu’il faut aider en particulier l’Office de secours et de travaux pour les réfugiés de la Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), qui est en première ligne, à faire face à l’ampleur des besoins. Il est absolument indispensable que les autorités israéliennes prennent de leur côté les mesures nécessaires à une amélioration immédiate et durable de la situation humanitaire et économique des territoires palestiniens. Il ne pourra pas y avoir de progrès sans garantie de la liberté de mouvement et d’accès aux populations pour les agences humanitaires et le personnel médical et sans le plein respect par Israël des dispositions du droit international et du droit humanitaire défini par les Conventions de Genève de 1949.
Il faut que les parties, avec l’aide de la communauté internationale et, notamment, du «Quartet» et des dirigeants du monde arabe, retrouvent le chemin qui conduira à un cessez-le-feu durable et à la relance d’un véritable processus politique, a déclaré le représentant de la France. Il faut évaluer sans délai les destructions infligées à l’Autorité palestinienne, a-t-il poursuivi, et aider les Palestiniens à les reconstruire afin de jeter les bases d’un Etat de droit, viable et démocratique. Il n’y a pas d’autre voie que la conclusion d’un cessez-le-feu et la reprise sans délai des négociations politiques sur un règlement politique définitif et juste, a-t-il dit, et l’Autorité palestinienne et Israël doivent respecter leurs engagements et obligations réciproques. L’Autorité palestinienne doit assumer ses responsabilités, en particulier en matière de sécurité et de lutte antiterroriste et l’occupation israélienne doit cesser. Il est illusoire de penser qu’un tel règlement puisse être conclu sans Yasser Arafat, a poursuivi le représentant de la France car il est le représentant légitime et élu du peuple palestinien. Il a rappelé ensuite que la France soutient l’approche du Secrétaire général qui a proposé le déploiement d’une force multinationale et suggéré que des réflexions se poursuivent sur cette voie.
M. KISHORE MAHBUBANI (Singapour) a rappelé que, depuis le dernier débat du Conseil de sécurité, le 19 avril dernier, il y a eu de nombreux développements au Moyen-Orient. Sur le plan positif, Singapour accueille avec satisfaction les différentes initiatives prises par la communauté internationale pour sortir de l’impasse, comme celle ayant mené à la levée du siège du Président Arafat à Ramallah ou l’annonce hier par le « Quartet » de l’organisation d’une conférence internationale. Au milieu de ces initiatives, le Secrétaire général a, bien sûr, un rôle pivot à jouer et c’est pourquoi, Singapour appuie sa proposition de déploiement d’une force internationale sur place qui mérite une sérieuse réflexion.
Mais il y a aussi eu des développements négatifs, comme ceux concernant Djénine, qui ont entraîné la présente réunion, a regretté M. Mahbubani. Singapour a appuyé dès le début l’initiative du Secrétaire général d’envoyer une équipe d’établissement des faits sur place, ce qui allait, à ses yeux, dans l’intérêt d’Israël. Il est regrettable que cet effort louable ait avorté. En outre, il ressort de cet échec que la crédibilité du Conseil de sécurité est gravement atteinte, ainsi que l’ont fait remarquer aujourd’hui de nombreux orateurs. Si tel est bien le consensus, on peut alors se demander pourquoi le Conseil n’a pas réagi. En fait, le Conseil n’a pas été silencieux, ni inactif, a expliqué le représentant. Les activités ont été intenses ces dernières 48 heures pour forger une réponse unie, a-t-il précisé. Malheureusement ces efforts n’ont pas été concluants, même lorsque les membres ont examiné la possibilité d’envoyer une lettre au Secrétaire général lui demandant de préparer un rapport sur Djénine avec les informations dont il dispose. Or, il est fondamental que le Conseil agisse à l’unisson. Pour cela, il doit continuer de s’appuyer sur les résolutions importantes adoptées ces derniers mois et aujourd’hui les non-membres du Conseil lui ont envoyé le message clair qu’il devait réagir et assumer ses responsabilités et obligations.
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