LE CONSEIL PROROGE LE MANDAT DE LA MISSION DE L'ONU EN SIERRA LEONE POUR SIX MOIS ET SE FELICITE DE LA SIGNATURE DE L'ACCORD SUR LA CREATION DU TRIBUNAL SPECIAL
Communiqué de presse CS/2281 |
Conseil de sécurité
4500ème séance – matin
LE CONSEIL PROROGE LE MANDAT DE LA MISSION DE L'ONU EN SIERRA LEONE POUR SIX MOIS ET SE FELICITE DE LA SIGNATURE DE L'ACCORD SUR LA CREATION DU TRIBUNAL SPECIAL
Le Conseil de sécurité a prorogé ce matin, pour une période de six mois commençant le 30 mars 2002, le mandat de la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL) en accueillant favorablement le concept d'opérations militaires pour cette année. Par cette résolution 1400 (2002) adoptée à l'unanimité, le Conseil se félicite aussi de la signature, le 16 janvier 2002, de l'accord entre l'ONU et le Gouvernement sierra-léonais pour la création d'un Tribunal spécial pour la Sierra Leone.
Aux termes de la résolution, le Conseil engage le Gouvernement sierra-léonais et le Revolutionary United Front (RUF) à intensifier leurs efforts pour assurer l'application intégrale de l'Accord de cessez-le-feu du 10 novembre 2000 et les encouragent à continuer de prendre des mesures pour faire avancer le dialogue et la réconciliation nationale. A ce propos, le Conseil se félicite des progrès accomplis par le Gouvernement sierra-léonais pour la création de la Commission vérité et réconciliation et demande instamment aux donateurs de lui affecter d'urgence des fonds.
Dans le même ordre d'idées, le Conseil se félicite de l'achèvement officiel du processus de désarmement et engage le Gouvernement sierra-léonais à rechercher activement les ressources supplémentaires nécessaires d'urgence pour la réinsertion. A ce Gouvernement, il demande aussi d'accélérer le rétablissement de l'autorité civile et des services publics dans tout le pays, en particulier dans les zones d'extraction du diamant, et en déployant l'armée pour assurer la sécurité des frontières. A cet égard, le Conseil accueille avec satisfaction la réunion au sommet de l'Union du fleuve Mano tenue à Rabat le 27 février 2002 et engage les Présidents concernés à donner effet aux engagements qu'ils ont pris en faveur du rétablissement de la paix et de la sécurité dans la région.
LA SITUATION EN SIERRA LEONE
Projet de résolution (S/2002/321)
Le Conseil de sécurité,
Rappelant ses résolutions précédentes et les déclarations de son Président concernant la situation en Sierra Leone,
Affirmant que tous les États sont déterminés à respecter la souveraineté, l’indépendance politique et l’intégrité territoriale de la Sierra Leone,
Accueillant avec satisfaction la réunion des Présidents de l’Union du fleuve Mano tenue à Rabat le 27 février 2002 sur l’invitation de S. M. le Roi du Maroc,
Se félicitant des nouveaux progrès obtenus dans le processus de paix en Sierra Leone, et notamment de la levée de l’état d’urgence, saluant le rôle positif que joue la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL) en faisant progresser le processus de paix, et appelant à le consolider encore,
Encourageant le Réseau des femmes de l’Union du fleuve Mano pour la paix et les autres initiatives de la société civile à continuer d’apporter leur concours en faveur de la paix dans la région,
Constatant que la situation en Sierra Leone continue de constituer une menace pour la paix et la sécurité dans la région,
Se déclarant préoccupé par la précarité de la situation dans la région du fleuve Mano, le fort accroissement du nombre des réfugiés ainsi que par les conséquences humanitaires pour les populations civiles, réfugiées et déplacées dans cette région,
Insistant sur l’importance que revêt la tenue d’élections libres, régulières, transparentes et sans exclusive en Sierra Leone, et se félicitant des progrès que le Gouvernement sierra-léonais et la Commission électorale nationale de la Sierra Leone ont accomplis dans la préparation des élections, notamment dans l’enregistrement des électeurs,
Réaffirmantl’importance que revêtent l’extension effective de l’autorité de l’État à l’ensemble du pays, la réinsertion des anciens combattants, le retour spontané et sans entrave des réfugiés et des déplacés, le plein respect des droits de l’homme et de la primauté du droit, et l’adoption de mesures efficaces en ce qui concerne les questions d’impunité et de responsabilité, en particulier pour la protection des femmes et des enfants, et soulignant que l’Organisation des Nations Unies doit continuer d’appuyer la réalisation de ces objectifs,
Accueillant avec satisfaction l’accord conclu entre l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement sierra-léonais pour la création d’un Tribunal spécial pour la Sierra Leone, et les recommandations de la mission de planification en vue de la création d’un Tribunal spécial pour la Sierra Leone (S/2002/246), ainsi que celles que le Secrétaire général formule dans son rapport en date du 14 mars 2002 (S/2002/267), tendant à ce que la MINUSIL assure l’appui administratif et l’appui connexe au Tribunal spécial,
Soulignant qu’il importe que la MINUSIL continue de prêter appui au Gouvernement sierra-léonais pour la consolidation de la paix et la stabilité après les élections,
Ayant examiné le rapport du Secrétaire général en date du 14 mars 2002 (S/2002/267),
1. Décide de proroger le mandat de la MINUSIL pour une période de six mois commençant le 30 mars 2002;
2. Exprime sa gratitude aux États Membres qui fournissent des contingents et des éléments de soutien à la MINUSIL et à ceux qui se sont engagés à le faire;
3. Accueille favorablement le concept d’opérations militaires pour 2002 de la MINUSIL, exposé au paragraphe 10 du rapport du Secrétaire général daté du 14 mars 2002 (S/2002/267) et prie le Secrétaire général de l’informer régulièrement des progrès accomplis par la MINUSIL dans la réalisation des aspects essentiels de ce concept et dans la planification des phases suivantes;
4. Engage le Gouvernement sierra-léonais et le Revolutionary United Front (RUF) à intensifier leurs efforts pour assurer l’application intégrale de l’Accord de cessez-le-feu signé par eux le 10 novembre 2000 à Abuja (S/2000/1091) et confirmé à la réunion tenue le 2 mai 2001 à Abuja par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), l’Organisation des Nations Unies, le Gouvernement sierra-léonais et le RUF;
5. Encourage le Gouvernement sierra-léonais et le RUF à continuer de prendre des mesures pour faire avancer le dialogue et la réconciliation nationale et, à ce propos, souligne l’importance de la réinsertion du RUF dans la société sierra-léonaise et sa transformation en parti politique, et exige le démantèlement immédiat, en toute transparence, de toutes les structures militaires non gouvernementales;
6. Se félicite de l’achèvement officiel du processus de désarmement, se déclare préoccupé par la grave insuffisance du financement apporté au Fonds d’affectation spéciale multidonateurs pour le programme de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, et engage le Gouvernement sierra-léonais à rechercher activement les ressources supplémentaires nécessaires d’urgence pour la réinsertion;
7. Souligne que le renforcement des capacités de la Sierra Leone dans le domaine de l’administration est indispensable à la paix et au développement durables dans le pays, ainsi qu’à la tenue d’élections libres et régulières, et prie donc instamment le Gouvernement sierra-léonais, avec l’aide de la MINUSIL, conformément à son mandat, d’accélérer le rétablissement de l’autorité civile et des services publics dans tout le pays, en particulier dans les zones d’extraction du diamant, notamment en pourvoyant les postes clefs des administrations publiques et de la police et en déployant l’armée sierra-léonaise pour assurer la sécurité des frontières, et demande aux États et aux autres organisations internationales et non gouvernementales d’apporter leur concours à toute la gamme des efforts de relèvement;
8. Se félicite de la création de la composante électorale de la MINUSIL et du recrutement de 30 conseillers de police civile supplémentaires chargés d’aider le Gouvernement sierra-léonais et la police sierra-léonaise à préparer les élections;
9. Accueille avec satisfaction la signature, le 16 janvier 2002, de l’accord entre l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement sierra-léonais pour la création d’un Tribunal spécial pour la Sierra Leone, envisagé dans la résolution 1315 (2000) du 14 août 2000, engage les donateurs à s’acquitter d’urgence des contributions qu’ils ont annoncées au Fonds d’affectation spéciale pour le Tribunal spécial, et espère que le Tribunal entamera bientôt ses activités et autorise la MINUSIL à assurer au Tribunal spécial, sur la base du remboursement des frais, et sans préjudice pour son potentiel, l’appui administratif et l’appui connexe nécessaires;
10. Se félicite des progrès accomplis par le Gouvernement sierra-léonais, agissant avec le Secrétaire général, le Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme et les autres intervenants internationaux concernés, pour la création de la Commission vérité et réconciliation, et demande instamment aux donateurs de lui affecter d’urgence des fonds;
11. Accueille avec satisfaction la réunion au sommet de l’Union du fleuve Mano tenue à Rabat le 27 février 2002, engage les Présidents à poursuivre la concertation et à donner effet aux engagements qu’ils ont pris en faveur du rétablissement de la paix et de la sécurité dans la région, et encourage les efforts déployés par la CEDEAO en vue d’un règlement durable et définitif de la crise dans la région de l’Union du fleuve Mano;
12. Se déclare gravement préoccupé par les violences, notamment les violences sexuelles, dont les femmes et les enfants ont été victimes pendant le conflit en Sierra Leone, et souligne qu’il importe d’apporter à ces problèmes une solution efficace;
13. Se déclare gravement préoccupé par les éléments de preuve, recueillis par la MINUSIL, de violations des droits de l’homme et de transgressions du droit humanitaire, exposés aux paragraphes 38 à 40 du rapport du Secrétaire général daté du 14 mars 2002 (S/2002/267), encourage la MINUSIL à poursuivre son action et, à ce propos, prie le Secrétaire général d’évaluer à nouveau la situation décrite dans son rapport de septembre, notamment en ce qui concerne la situation des femmes et des enfants qui ont été victimes du conflit;
14. Se déclare gravement préoccupé par les allégations selon lesquelles des personnels des Nations Unies auraient pu se rendre coupables de violences sexuelles à l’encontre de femmes et d’enfants des camps de réfugiés et de déplacés dans la région, soutient la politique de tolérance zéro du Secrétaire général à l’égard de cette sorte de violences, attend avec intérêt le rapport du Secrétaire général sur les résultats de l’enquête consacrée à ces allégations, et le prie de formuler des recommandations sur les moyens de prévenir désormais tout crime de ce type, tout en appelant les États en cause à faire le nécessaire pour traduire en justice leurs ressortissants responsables de ces crimes;
15. Demande que soit maintenu l’appui de la MINUSIL, dans les limites de son potentiel et des zones où elle est déployée, pour le retour des réfugiés et des déplacés, et demande instamment à tous les intervenants de continuer de coopérer à cette fin pour donner effet à leurs engagements, conformément à l’Accord de cessez-le-feu d’Abuja;
16. Se félicite que le Secrétaire général ait l’intention de continuer de suivre de près la situation sur le plan de la sécurité, la situation politique et la situation sur le plan humanitaire et sur celui des droits de l’homme et de lui en rendre compte, après avoir dûment consulté les pays qui fournissent des contingents et en formulant éventuellement des recommandations supplémentaires, et le prie en particulier de lui présenter avant le 30 juin 2002 un rapport d’étape évaluant la situation après les élections et les perspectives de consolidation de la paix;
17. Décide de demeurer activement saisi de la question.
Treizième rapport du Secrétaire général sur la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (S/2002/267)
Le Treizième rapport du Secrétaire général sur la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL) retrace l'évolution de la situation depuis le 13 septembre 2001. Il fait état des progrès enregistrés dans le cadre du processus de paix et les problèmes qui subsistent. Estimant que la présence de la MINUSIL demeurera indispensable après les élections présidentielles et parlementaires prévues pour le 14 mai 2002,le Secrétaire général recommande que son mandat soit prorogé pour une période de six mois, jusqu'au 30 décembre 2002. A ses yeux, la priorité absolue est de veiller à ce que les élections soient crédibles et se déroulent dans la sécurité et la paix. Au lendemain des élections, les efforts du nouveau Gouvernement devront porter en particulier sur la consolidation de la paix, l'extension de l'autorité de l'Etat, la réinsertion des anciens combattants et le rétablissement du contrôle de l'Etat sur les mines de diamants.
Il faudra également rétablir l'appareil judiciaire, renforcer les organes chargés d'appliquer la loi, relancer les services publics de base et les travaux de reconstruction. De plus, si les conditions de sécurité continuent de s'améliorer après les élections, il faudra adapter l'effectif, la composition et le déploiement de la MINUSIL. Un résultat de cette évaluation sera présenté au Conseil de sécurité en septembre prochain. Au titre des priorités également identifiées par le Secrétaire général figurent la réinsertion des déplacés et des réfugiés, la création d'emploi, la réconciliation nationale et le jugement de ceux responsables d'atrocités.
Le processus de paix a continué de progressé de façon encourageante, indique le Secrétaire général qui cite à l'appui le désarmement des combattants du Revolutionary United Front (RUF) et de la Force de défense civile qui s'est achevé le 11 janvier; la mise en place du programme spécial de collecte d'armes; la réinstallation des personnes déplacées; le rapatriement des réfugiés depuis la Guinée et le Libéria; la préparation des élections; la levée de l'état d'urgence; le déploiement de la police et l'armée sierra-léonaises à de nouveaux districts et les progrès dans la mise en place de la Commission de la vérité et de la réconciliation et du Tribunal spécial.
La rencontre des chefs d'Etat de la Guinée, du Libéria et de la Sierra Leone à Rabat au Maroc le 27 février a également constitué un point positif. Des experts juridiques des trois pays devraient se réunir en mars à Freetown pour concevoir un cadre juridique propre à régler la question des groupes dissidents. Un comité technique a également été chargé de donner effet à la décision de déployer des groupes mixtes de sécurité le long de leurs frontières communes.
Les troupes de la MINUSIL continueront dans le futur à effectuer des patrouilles de grande visibilité dans l'ensemble du pays. Actuellement, la Mission met en oeuvre la première phase de son mandat qui est d'assurer la sécurité au cours des élections à venir. Elle a à cette fin étendu son déploiement à 39 sites dans l'ensemble du pays. Elle a l'intention d'étendre encore sa présence au cours de la deuxième phase qui doit commencer prochainement. Durant la troisième phase, qui débutera après les élections, la MINUSIL s'emploiera à créer un climat de sécurité. Le programme de désarmement, de démobilisation et de réinsertion s'est achevé le 17 janvier 2002. A ce jour, 17 951 ex-combattants ont été intégrés. Toutefois son financement demeure insuffisant. La Mission a jusqu'à présent détruit 24 944 armes. Le programme spécial de collecte volontaire d'armes devrait être achevé à la mi-mars et le Secrétariat s'apprête à dépêcher une mission d'évaluation du désarmement en Sierra Leone.
Le Secrétaire général évoque par ailleurs les difficultés que connaît le Gouvernement dans le rétablissement de son autorité qui sont dues à un grave manque de capacités, en particulier un manque de personnel qualifié, l'absence d'équipements, le manque de matériel de bureau, de télécommunication et de moyen de transport. Par ailleurs, le programme d'inscription des électeurs a révélé les problèmes opérationnels auxquels doit toujours faire face la Commission électorale nationale. 11 partis d'opposition ont une nouvelle fois critiqué le système électoral fondé sur les districts et demandé à ce que les élections soient reportées à novembre 2002. Il ne devrait cependant pas être donné suite à ces demandes.
La situation des droits de l'homme s'est améliorée. Toutefois, l'accès à de nouvelles zones dans l'Est du pays a permis de découvrir notamment des «maisons d'exécution» où des civils auraient été torturés et tués. D'autre part, à la suite du processus de désarmement, le nombre d'enfants des rues est en hausse. La MINUSIL a entrepris le 18 février la rédaction du rapport le plus complet sur l'incidence et les effets des violences sexuelles dues à la guerre. A la suite des allégations d'exploitation sexuelle des mineurs et de filles par le personnel des Nations Unies, la MINUSIl a ouvert une enquête mais aucun cas précis n'a été porté à son attention. Un programme de surveillance des soldats de maintien de la paix à Lungi a été lancé le 23 février. A la suite de la parution le 23 février du rapport commun au HCR et à Save the Children-UK faisant état de l'exploitation sexuelle d'enfants dans les camps de réfugiés par le personnel des Nations Unies, le Secrétaire général a donné pour instruction d'engager rapidement des mesures disciplinaires à l'encontre de tout coupable. La MINUSIL a également immédiatement créé auprès de chaque unité des comités spéciaux de protection de l'enfance chargés de surveiller le comportement du personnel de la Mission. On compte actuellement dans les camps de la sous-région environ 107 000 réfugiés sierra-léonais bénéficiant de l'aide du HCR et 80 000 réfugiés non enregistrés vivant en dehors des camps.
Le redressement économique s'est poursuivi. Les politiques budgétaires et monétaires ont permis de maintenir l'inflation à 3,4% en 2001. La valeur des exportations enregistrées est passée de 6 millions de dollars en 1999 à 26 millions de dollars en 2001, 90% de ces exportations étant constituées des diamants soumis au régime des certificats d'origine. Toutefois, la situation économique reste précaire. A la fin 2000, la valeur actuelle nette de la dette extérieure représentait 133% du PIB et 757% des exportations.
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