LE CONSEIL PROROGE DE SIX MOIS LE MANDAT DE LA MINUEE ET DEMANDE A L'ETHIOPIE ET L'ERYTHREE DE PLEINEMENT COOPERER AVEC ELLE
Communiqué de presse CS/2276 |
Conseil de sécurité
4494ème séance – après-midi
LE CONSEIL PROROGE DE SIX MOIS LE MANDAT DE LA MINUEE ET DEMANDE A L'ETHIOPIE
ET L'ERYTHREE DE PLEINEMENT COOPERER AVEC ELLE
Réuni ce matin sous la présidence de M. Ole Peter Kolby (Norvège), le Conseil de sécurité a prorogé jusqu’au 15 septembre 2002 le mandat de la Mission des Nations Unies en Ethiopie et en Erythrée (MINUEE) avec l'effectif militaire autorisé par sa résolution 1320 du 15 septembre 2000, c’est-à-dire 4 200 hommes dont un maximum de 220 observateurs militaires. Aux termes de la résolution 1398 adoptée ce matin à l’unanimité, le Conseil exprime sa satisfaction devant le fait qu'un règlement juridique définitif des problèmes frontaliers est sur le point d'être réalisé conformément aux Accords d'Alger, et compte qu'un tel règlement interviendra bientôt. Le Conseil demande aux parties de coopérer pleinement et rapidement avec la MINUEE dans la poursuite de l'exécution de son mandat, de respecter scrupuleusement la lettre et l'esprit de leurs accords et de collaborer étroitement avec le Représentant spécial du Secrétaire général à la mise en oeuvre de la décision de la Commission du tracé de la frontière, et notamment de participer avec diligence, de concert avec la MINUEE, à l'exécution de leurs plans de déminage nécessaires aux fins de la démarcation.
Le Conseil de sécurité souligne qu'il importe d'assurer la mise en oeuvre rapide de la décision qui sera prise prochainement par la Commission du tracé de la frontière, et il souligne aussi que la MINUEE continuera de s'acquitter de son mandat jusqu'à l'achèvement de la démarcation de la frontière. Selon le texte adopté, le Conseil demande à nouveau à l'Erythrée d'assurer à la MINUEE la liberté complète de mouvement afin de surveiller les forces redéployées, de communiquer les chiffres, les effectifs et la disposition de sa milice et de sa police à l'intérieur de la Zone de sécurité temporaire, et de conclure l'accord sur le statut des forces avec le Secrétaire général. Le Conseil s'inquiète qu'aucun progrès n'ait été accompli pour ce qui est de l'établissement à l'intention de la MINUEE d'un vol direct à haute altitude entre Asmara et Addis-Abeba et demande à nouveau aux parties de collaborer avec le Représentant spécial du Secrétaire général afin de régler cette question dans l'intérêt de tous. Aux termes de la résolution, le Conseil demande aux parties de libérer et rapatrier sans plus tarder, sous l'égide du Comité international de la Croix-Rouge, tous les prisonniers de guerre et tous les civils qu'elles détiennent encore.
LA SITUATION ENTRE L’ERYTHREE ET L’ETHIOPIE
Rapport du Secrétaire général sur l'Ethiopie et l'Erythrée (S/2002/245)
Dans ce rapport, le Secrétaire général rend compte des faits nouveaux intervenus depuis le 13 décembre 2001 en ce qui concerne le déploiement et les activités de la Mission des Nations Unies en Ethiopie et en Erythrée (MINUEE) ainsi que les plans politique, militaire, humanitaire et des droits de l'homme. Le Secrétaire général indique ainsi que la situation de la Zone de sécurité temporaire est restée généralement calme et que, jusqu'à présent, rien n'indique un changement d'attitude de l'une ou l'autre des parties. Conformément à l'Accord de cessation des hostilités, précise-t-il, les mécanismes de sécurité doivent rester en place jusqu'à la fin des opérations de délimitation et de démarcation de la frontière. Il juge, en conséquence, préoccupante la déclaration du Président érythréen au sujet de l'application de l'Accord au moment où la mission du Conseil se trouvait sur place.
Le Secrétaire général poursuit en indiquant que la Mission a pu recueillir de nouvelles informations sur les positions et les activités érythréennes se trouvant en dehors de la Zone de sécurité temporaire. Il fait observer que les activités de surveillance de la Mission montrent que l'attitude des deux parties reste pour l'essentiel défensive. La tension et la suspicion persistent entre les forces armées des deux parties sur le terrain. Ainsi, dit encore le Secrétaire général, en dépit de ses efforts répétés, la MINUEE n'a pas réussi à obtenir du Gouvernement érythréen des informations détaillées sur le nombre, les effectifs et l'emplacement des milices et des forces de police locale à l'intérieur de la Zone de sécurité temporaire. La Mission estime, pour sa part, que les effectifs totaux se sont maintenus aux alentours de 9 600.
En dépit des protestations, poursuit plus loin le Secrétaire général, les autorités érythréennes considèrent toujours que la MINUEE n'a pas besoin de bénéficier d'une liberté de mouvement en dehors de la Zone de sécurité temporaire. Des assouplissements ont pu être constatés dans les secteurs ouest et est mais nullement au centre. De plus, les mêmes autorités continuent de restreindre la liberté de mouvement de la Mission dans l’espace aérien et de refuser aux avions de l'ONU le droit de survoler certains emplacements situés au nord de la Zone de sécurité temporaire. Du côté éthiopien, souligne le Secrétaire général, la Mission jouit d'une liberté quasi-totale. En revanche, indique-t-il, concernant l'établissement d'une liaison aérienne entre Asmara et Addis-Abeba, aucun progrès n'a été enregistré. L'Erythrée continue de soutenir que les avions de la MINUEE devraient suivre l'itinéraire le plus direct et refuse par conséquent d'autoriser tout autre itinéraire alors que les autorités éthiopiennes insistent pour que ces avions s'écartent quelque peu de l'itinéraire le plus direct de façon à passer au large des installations de défense anti-aérienne. Au moment de la rédaction du rapport, indique par ailleurs le Secrétaire général, l'Erythrée n'avait pas encore signé l'accord sur le statut des forces contrairement à l'Ethiopie qui l'a fait dès le 22 mars 2001.
Sur la question de la lutte antimines, le Secrétaire général estime que la présence de mines terrestres et de munitions non explosées demeure une grave menace pour la population et le personnel de l'ONU et des autres organisations humanitaires. A cet égard, la MINUEE sollicite des autorités éthiopiennes des précisions concernant les types de mines utilisées dans la Zone de sécurité temporaire et les zones adjacentes ainsi que des renseignements plus précis concernant les champs déjà déminés par les Forces armées éthiopiennes. Etant donné que le déminage est un préalable à la démarcation de la frontière, souligne le Secrétaire général, le Centre de coordination de la lutte antimines de la MINUEE a déjà pris des dispositions de sorte qu'une fois l'emplacement des bornes frontières est connu, des propositions puissent être faites en vue d'entamer sans délai le déminage nécessaire pour engager la démarcation de la frontière.
Alors que le moment où la Commission du tracé de la frontière doit rendre sa décision approche à grands pas, l'application de cette décision, qui sera sans appel et obligatoire, continuera d'exiger des deux Etats et de leurs dirigeants qu'ils fassent preuve de sagesse politique, rappelle le Secrétaire général. L'ONU et la Mission demeurent déterminées à jouer un rôle de premier plan dans le cadre de la procédure de délimitation et de démarcation, dit-il, et en attendant, il recommande que le mandat de la MINUEE soit prorogé pour une période de six mois, jusqu'au 15 septembre 2002. Il annonce des recommandations plus avant sur l'appui que la MINUEE pourrait fournir à l'application de la décision sur la délimitation des frontières. A cet égard, le Secrétaire général indique qu'il a déjà donné pour instructions à son Représentant spécial d'examiner avec les deux parties les dispositions et les procédures nécessaires à une application prompte et harmonieuse de la décision de la Commission. Dans ce contexte, il recommande la mise en place d'un mécanisme élargi qui permettra de procéder à des consultations et de régler les problèmes lors de l'application de la décision sur la délimitation des frontières. Il serait utile, juge-t-il, qu'outre les parties et la MINUEE, les garants, les médiateurs et les témoins soient également associés à ce mécanisme.
Projet de résolution (S/2002/266)
Rappelant ses résolutions 1298 (2000) du 17 mai 2000, 1308 (2000) du 17 juillet 2000, 1312 (2000) du 31 juillet 2000, 1320 (2000) du 15 septembre 2000, 1344 (2001) du 15 mars 2001 et 1369 (2001) du 14 septembre 2001, les déclarations de son Président des 9 février 2001 (S/PRST/2001/4), 15 mai 2001 (S/PRST/2001/14) et 15 janvier 2002 (S/PRST/2002/1) respectivement, ainsi que toutes les autres résolutions et déclarations antérieures pertinentes se rapportant à la situation entre l’Éthiopie et l’Érythrée,
Rappelant en outre le rapport de la Mission du Conseil de sécurité qui s’est rendue en Éthiopie et en Érythrée du 21 au 25 février 2002, en date du 27 février 2002 (S/2002/205),
Réaffirmant l’attachement de tous les États Membres à la souveraineté, à l’indépendance et à l’intégrité territoriale de l’Éthiopie et de l’Érythrée,
Réaffirmant en outre que les deux parties doivent s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu du droit international, notamment du droit international humanitaire, des normes internationales relatives aux droits de l’homme et du droit international des réfugiés, et assurer la sécurité de tout le personnel des Nations Unies, du Comité international de la Croix-Rouge et des autres organisations humanitaires,
Exprimant de nouveau son appui résolu à l’Accord de paix global entre le Gouvernement de l’État d’Érythrée et le Gouvernement de la République démocratique fédérale d’Éthiopie signé à Alger le 12 décembre 2000 (S/2000/1183), ainsi qu’au précédent Accord de cessation des hostilités (S/2000/601), signé à Alger le 18 juin 2000 (ci-après collectivement dénommés les « Accords d’Alger »),
Réaffirmant son appui résolu à l’aide que le Secrétaire général et son Représentant spécial, continuent d’apporter, notamment par leurs bons offices, à l’application des Accords d’Alger,
Réaffirmant également son appui résolu au rôle joué par la Mission des Nations Unies en Éthiopie et en Érythrée (MINUEE) dans l’exécution de son mandat et dans ses efforts visant à faciliter un règlement pacifique du différend,
Réaffirmant en outre son appui résolu à la Mission de liaison de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) en Éthiopie et en Érythrée et invitant le Secrétaire général de l’OUA à continuer d’offrir le soutien sans réserve de son organisation au processus de paix,
Ayant examiné le rapport du Secrétaire général en date du 8 mars 2002 (S/2002/245),
1. Décide de proroger jusqu’au 15 septembre 2002 le mandat de la MINUEE avec l’effectif (contingents et observateurs militaires) autorisé par sa résolution 1320 (2000);
2. Exprime sa satisfaction devant le fait qu’un règlement juridique définitif des problèmes frontaliers est sur le point d’être réalisé conformément aux Accords d’Alger, compte qu’un tel règlement interviendra bientôt et accueille favorablement à cet égard les déclarations récentes dans lesquelles les deux parties ont réaffirmé que la décision qui sera prise prochainement par la Commission du tracé de la frontière a un caractère définitif et contraignant;
3. Félicite les parties des progrès accomplis à ce jour dans l’application des Accords d’Alger, et notamment du fait que la Zone de sécurité temporaire (ZST) continue d’être respectée, ainsi que des mesures prises en coopération avec le Cartographe de l’ONU pour préparer la mise en oeuvre de la décision de la Commission du tracé de la frontière une fois qu’elle sera annoncée;
4. Demande aux parties de coopérer pleinement et rapidement avec la MINUEE dans la poursuite de l’exécution de son mandat, de respecter scrupuleusement la lettre et l’esprit de leurs accords et de collaborer étroitement avec le Représentant spécial du Secrétaire général à la mise en oeuvre de la décision de la Commission du tracé de la frontière, et notamment de participer avec diligence, de concert avec la MINUEE, à l’exécution de leurs plans de déminage nécessaire aux fins de la démarcation;
5. Souligne qu’il importe d’assurer la mise en oeuvre rapide de la décision qui sera prise prochainement par la Commission du tracé de la frontière tout en maintenant la stabilité dans toutes les zones auxquelles s’appliquera cette décision, et encourage les parties à envisager de nouveaux moyens concrets de mener des consultations à cet égard, éventuellement grâce au renforcement approprié de la Commission de coordination militaire et d’autres mécanismes avec le concours des garants, des facilitateurs et des témoins des Accords d’Alger;
6. Souligne en outre que, conformément à l’article 14 de l’Accord de cessation des hostilités, les arrangements en matière de sécurité doivent rester en vigueur et que, de ce fait, les arrangements relatifs à la séparation des forces, réalisée par la Zone de sécurité temporaire, resteront d’une importance capitale;
7. Souligne que tout transfert de territoire et d’autorité civile et tout déplacement de population ou mouvement de troupes, conformément à la décision de la Commission du tracé de la frontière, devraient avoir lieu dans l’ordre et être effectués grâce au dialogue et selon des modalités facilitées par les Nations Unies, conformément au paragraphe 16 de l’article 4 de l’Accord de paix global, et sans mesures unilatérales;
8. Souligne aussi que la MINUEE continuera de s’acquitter de son mandat jusqu’à l’achèvement de la démarcation de la frontière;
9. Affirme sa détermination à aider les parties à appliquer la décision de la Commission du tracé de la frontière et invite le Secrétaire général à lui présenter dans les meilleurs délais des recommandations quant au rôle que la MINUEE pourrait jouer dans la démarcation de la frontière, notamment pour ce qui est du déminage en vue de la démarcation, en prenant en considération la décision de la Commission du tracé de la frontière, les contributions des parties, la capacité de la MINUEE et les ressources du Fonds d’affectation spéciale des Nations Unies pour la délimitation et la démarcation de la frontière entre l’Éthiopie et l’Érythrée;
10. Demande à nouveau à l’Érythrée, nonobstant la procédure de notification préalable, d’assurer à la MINUEE la liberté complète de mouvement afin de surveiller les forces redéployées, de communiquer les chiffres, les effectifs et la disposition de sa milice et de sa police à l’intérieur de la Zone de sécurité temporaire, et de conclure l’accord sur le statut des forces avec le Secrétaire général;
11. Prie instamment l’Éthiopie de fournir au Centre de coordination de l’action antimines les précisions promises au sujet des renseignements déjà communiqués;
12. S’inquiète qu’aucun progrès n’ait été accompli pour ce qui est de l’établissement à l’intention de la MINUEE d’un vol direct à haute altitude entre Asmara et Addis-Abeba, et demande à nouveau aux parties de collaborer avec le Représentant spécial du Secrétaire général dans un esprit de compromis afin de régler cette question dans l’intérêt de tous;
13. Demande aux parties de libérer et rapatrier sans plus tarder, sous l’égide du Comité international de la Croix-Rouge et conformément aux Conventions de Genève et aux Accords d’Alger, tous les prisonniers de guerre et tous les civils qu’elles détiennent encore;
14. Demande également aux parties de prendre d’autres mesures propres à instaurer la confiance et à favoriser la réconciliation entre les deux peuples dans leur intérêt mutuel, notamment en traitant chacune avec humanité les nationaux de l’autre partie, conformément aux Accords d’Alger; en facilitant la réinsertion durable des réfugiés, des déplacés et des soldats démobilisés; en favorisant les contacts transfrontières au niveau local afin de régler les différends et de rétablir les relations communautaires; et en facilitant la poursuite du dialogue dans la société civile à tous les niveaux dans les deux pays, comme l’ont entrepris récemment les chefs religieux;
15. Encourage les parties à prendre des dispositions pour permettre à la MINUEE d’informer les groupes de population intéressés de la zone de la mission au sujet du tracé et de la démarcation de la frontière entre les deux pays et du rôle des Nations Unies à cet égard;
16. Encourage également les parties à s’attacher à la reconstruction et au
développement de leur économie et à l’amélioration de leurs relations, dans l’intérêt de tous et afin de favoriser la paix et la sécurité régionales;
17. Encourage les garants, les facilitateurs et les témoins des Accords d’Alger à continuer d’appuyer le processus de paix et invite tous les États et organisations internationales à soutenir ce processus, notamment en faisant preuve du plus haut niveau de responsabilité en décourageant les livraisons d’armes à la région et en versant des contributions au Fonds d’affectation spéciale pour l’appui au processus de paix en Éthiopie et en Érythrée, au Fonds d’affectation spéciale pour la délimitation et la démarcation de la frontière entre l’Éthiopie et l’Érythrée, ainsi qu’au titre de la procédure d’appel global des Nations Unies pour 2002;
18. Décide de rester activement saisi de la question.
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