VASTE SOUTIEN AU CONSEIL POUR LA CONFERENCE DE RECONCILIATION NATIONALE EN SOMALIE, PREVUE EN AVRIL PROCHAIN A NAIROBI, A L’INITIATIVE DE L’IGAD
Communiqué de presse CS/2271 |
Conseil de sécurité
4487ème séance – matin et après-midi
VASTE SOUTIEN AU CONSEIL POUR LA CONFERENCE DE RECONCILIATION NATIONALE EN SOMALIE, PREVUE EN AVRIL PROCHAIN A NAIROBI, A L’INITIATIVE DE L’IGAD
En dépit des conditions de sécurité difficiles, plusieurs Etats
jugent indispensable que l’ONU participe activement au processus en cours
La Somalie reste l’un des environnements les plus dangereux dans lesquels intervient l’ONU et les conditions de sécurité étant difficiles à prévoir, une présence à long terme des Nations Unies n’est pas envisageable. C’est à partir de ce constat, contenu dans le rapport du Secrétaire général sur le cadre du déploiement d'une éventuelle mission de consolidation de la paix en Somalie, que le Conseil a discuté, ce matin, en présence du Ministre somalien des affaires étrangères, M. Yusuf Hassan Ibrahim, des moyens de sortir la Somalie des conflits et de l'instabilité politique.
Dans ce contexte, les membres du Conseil ont réaffirmé la validité du processus de paix d’Arta de 2000, qui a donné lieu à la mise en place d’un Gouvernement national de transition et d’une Assemblée nationale de transition, comme offrant les plus grandes chances de paix et de réconciliation nationale en Somalie. Ils se sont, en conséquence, félicités de la décision adoptée le 14 février dernier par le Comité des ministres des affaires étrangères de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) de convoquer, à Nairobi au cours de la seconde moitié d'avril 2002, une conférence de réconciliation nationale à laquelle participeraient, sans condition, le Gouvernement national de transition et l’ensemble des autres parties somaliennes. Pour les membres du Conseil, cette décision est déterminante pour le processus de paix en Somalie en ce sens qu'elle démontre la disposition des pays voisins de la Somalie de privilégier désormais une approche unifiée, privant ainsi les factions somaliennes de la faculté de jouer tel pays contre un autre.
Faisant part, en conséquence, de leur «optimisme prudent» et reconnaissant que, pour l'heure, les conditions de sécurité ne sont pas réunies pour permettre le déploiement d’une mission de consolidation de la paix en Somalie, les délégations, dont celle de l’Espagne, au nom de l’Union européenne, ont néanmoins rappelé le Conseil à ses responsabilités, jugeant la participation active des Nations Unies au processus en cours tout à fait indispensable. Elles l'ont donc exhorté à prendre des initiatives politiques plus concrètes pour libérer, une fois pour toutes, le peuple somalien des «griffes des seigneurs de la guerre». Dans ce contexte, des délégations ont appelé à la création d’un mécanisme pour surveiller le respect de l’embargo sur les armes imposé en 1992 et à l’octroi d’une assistance accrue au programme interinstitutions de désarmement, de démobilisation et de réinsertion. Le Ministre des affaires étrangères du Gouvernement national de transition de la Somalie, a, quant à lui, plaidé pour que la communauté internationale donne les ressources et les moyens à son Gouvernement d’assurer la sécurité à Mogadishu et aux alentours, et pour qu’elle développe un vaste programme de reconstruction de son pays.
Au lendemain du 11 septembre, il est dans l’intérêt de la communauté internationale d’encourager l'émergence de gouvernements forts, a estimé le représentant de Singapour qui, à l’instar des autres délégations, a salué l’action du Gouvernement national de transition dans la lutte contre le terrorisme. Au lieu de mettre la Somalie au ban de la scène internationale, il serait plus judicieux de lui apporter l’assistance requise conformément à la résolution 1373 sur la lutte internationale contre le terrorisme, a déclaré en écho le représentant de la République arabe syrienne avant celui des Etats-Unis qui a affirmé que, pour son pays, la Somalie représente une menace à la sécurité internationale. A ce propos, des représentants comme ceux de Singapour ou de la France, se sont inquiétés des répercussions économiques sur la Somalie du gel des comptes de la Banque Al-Barakaat, accusée par Washington d'être le principal argentier de l'organisation Al-Qaida.
En attendant l’élaboration d’une stratégie qu’elles ont voulue «globale et à long terme» en Somalie, les délégations ont souscrit à la proposition du Secrétaire général de créer un comité des amis de la Somalie à Nairobi qui sera présidé par son Représentant spécial et d’un autre, à New York, qui se réunira périodiquement sous la présidence du Secrétaire général adjoint aux affaires politiques. Le représentant du Cameroun a jugé important que la composition de ces comités reflète la complexité des relations entre les diverses factions somaliennes et les «susceptibilités déclarées des pays voisins». De nombreuses délégations ont souhaité que ces comités soient à composition non limitée et comprennent des membres du Conseil, le représentant français faisant part d'emblée de la disposition de son pays à en faire partie.
Outre ses quinze membres, le Conseil de sécurité a entendu les déclarations des pays suivants: Jordanie (au nom du Groupe arabe), Espagne (au nom de l’Union européenne et des pays associés), Djibouti, Jamahiriya arabe libyenne, Kenya et Ethiopie. Le Ministre des affaires étrangères du Gouvernement national de transition s’est également exprimé.
LA SITUATION EN SOMALIE
Rapport du Secrétaire général (S/2002/189)
Ce rapport rend compte de l’évolution politique, de la situation humanitaire et des activités menées par les organismes des Nations Unies, ainsi que des efforts renouvelés faits par les pays de la région en vue d’aider à la réconciliation nationale en Somalie. Il rend compte également des résultats des consultations menées par le Conseiller spécial du Secrétaire général, M. Mohamed Sahnoun, avec les chefs d’Etat des pays membres de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et par la mission interinstitutions d’évaluation de la situation en matière de sécurité, que le Conseil avait prié M. Annan de dépêcher en Somalie.
Concernant l’évolution politique, le Secrétaire général fait état de la situation interne au lendemain de la motion de censure déposée le 12 octobre 2001 contre le Gouvernement national de transition et la nomination, le 12 novembre 2001, de M. Hassan Abshir Farah comme nouveau Premier Ministre. Il ajoute que le Premier Ministre aurait commencé à former son Gouvernement le 16 février 2002 mais souligne que les cinq coprésidents du Conseil somalien de réconciliation et de relèvement refusent toujours de reconnaître le Gouvernement national de transition. Le dirigeant du «Somaliland», M. Mohammed Ibrahim Egal, garde toujours ses distances avec le Gouvernement national de transition, indique le Secrétaire général. Au lendemain des attentats terroristes du 11 septembre, rappelle M. Kofi Annan, le Président des Etats-Unis a pris un décret le 23 septembre 2001 gelant les avoirs d’organisations et d’individus liés au terrorisme, dont Al-Itihaad al-Islamiya, organisation somalienne. La liste de ces personnes et organisations a été élargie depuis à un certain nombre de Somaliens et aux sociétés appartenant au Groupe Al-Barakaat Companies, Somalia Ltd. Le Secrétaire général précise que, le 31 octobre, le Président Hassan a nié, lors d’un entretien avec son représentant pour la Somalie à Nairobi, qu’il existait un lien quelconque entre son Gouvernement et Al-Itihaad al-Islamiya et que depuis, le Gouvernement national de transition a créé une équipe spéciale antiterroriste.
Outre les questions d’ordre politique, le rapport rend compte de l’évaluation faite par la mission interinstitutions de la situation sur le plan de la sécurité en Somalie qui a jugé notamment que ce pays demeurait un des endroits les plus dangereux dans lesquels était présente l’Organisation des Nations Unies. Le rapport procède également à une évaluation de la situation humanitaire et en matière de développement, ainsi que des activités opérationnelles à l’appui de la paix.
Dans ses observations, le Secrétaire général rappelle que le Conseil de sécurité a considéré que le processus de paix conclu à Arta était celui qui offrait les plus grandes chances de paix et de réconciliation nationale en Somalie. Malheureusement, ajoute-t-il, son précédent rapport expliquait non seulement le processus n’était pas terminé et que la réconciliation entre les parties somaliennes était dans l’impasse, mais il insistait en outre sur les divergences de vues entre les Etats membres de l’IGAD concernant la réconciliation nationale en Somalie. Cependant, le neuvième Sommet de l’IGAD a permis de remettre l’accent sur la réconciliation nationale et est parvenu à un accord
encourageant concernant les mesures concrètes à prendre par les pays concernés membres de l’IGAD. Il ajoute que la décision adoptée le 14 février dernier par le Comité des ministres des affaires étrangères de l’IGAD de convoquer une conférence de réconciliation nationale au cours de la seconde moitié d’avril 2002, à laquelle participeraient le Gouvernement national de transition et l’ensemble des autres parties somaliennes, sans conditions, est encourageante.
Le Secrétaire général assure que l’ONU enverra une mission de renforcement de la paix une fois que la situation dans le pays le permettra. Etant donné que sa proposition de créer deux comités des amis de la Somalie a été bien accueillie dans la région, le Secrétaire général précise qu’il a l’intention de créer ces comités à Nairobi et qu’il sera présidé par son Représentant. Il ajoute que la situation humanitaire en Somalie reste précaire et que le développement socioéconomique et de l’infrastructure a pris des années de retard. Les conditions de sécurité du personnel des Nations Unies diffèrent profondément d’un endroit à l’autre et sont difficiles à prévoir, en particulier à Mogadishu où elles ne permettent pas une présence à long terme comme l’a confirmé l’évaluation interorganisations. En attendant que soient réunies les conditions permettant de lancer un programme général de consolidation de la paix, le Secrétaire général précise que les programmes en cours seront complétés par des projets humanitaires et de développement ainsi que par des activités de consolidation de la paix mettant l’accent sur les interventions au niveau communautaire, la réduction du nombre d’armes légères en circulation ou encore la formation des forces de police.
Déclarations
M. STEFAN TAFROV (Bulgarie) a rappelé que les problèmes de la Somalie sont complexes et alarmants, que ce pays reste très fragile et que le processus de paix d’Arta est pratiquement dans l’impasse. Au cours de ces dix derniers mois, a-t-il ajouté, des faits nouveaux encourageants sont intervenus et la Bulgarie se félicite de l’initiative des Ministres des affaires étrangères de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) de convoquer une conférence de réconciliation nationale en avril 2002. Le Conseil de sécurité doit apporter son soutien aux efforts en cours afin de rétablir les voies du dialogue, a ajouté M. Tafrov, lançant un appel à toutes les factions et aux différents groupes communautaires pour qu’ils contribuent à faire avancer le processus de paix. La Bulgarie encourage également la proposition du Secrétaire général de créer deux comités des amis de la Somalie.
Dans le contexte des attaques terroristes du 11 septembre 2001, il est important de suivre attentivement l’évolution de la situation en Somalie pour ne pas permettre qu’elle devienne un refuge de terroristes, a jugé M. Tafrov. La diffusion des armes légères est une question préoccupante, et il est donc nécessaire de mettre fin à la fourniture d’armes à la Somalie, a-t-il souligné en lançant un appel aux pays voisins afin que les sanctions soient respectées. Le représentant a encouragé les donateurs à répondre favorablement à l’appel global interinstitutions et a rappelé que la sécurité du personnel des Nations Unies sur le terrain est fondamentale.
M. KISHORE MAHBUBANI (Singapour) a souligné que le problème de la Somalie ne peut être résolu que par les Somaliens eux-mêmes. Il est néanmoins utile pour le pays d’avoir des voisins, en particulier les pays de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), qui montrent une véritable détermination à apporter leur contribution au processus de paix, a reconnu le représentant. Pour ce qui est de la communauté internationale, M. Mahbubani a jugé important qu’elle définisse sa position sur le conflit somalien. De plus, a-t-il poursuivi, après le 11 septembre, il est de l’intérêt de la communauté internationale d’encourager tous les Etats à se doter de gouvernements forts qui sont essentiels dans la lutte contre le terrorisme. En concluant, le représentant a émis le vœu que le Conseil ne se limitera pas à certains aspects isolés de la situation en Somalie mais qu’il élaborera une politique globale et à long terme.
M. MIKHAIL WEHBE (République arabe syrienne) a apporté son soutien au Gouvernement national de transition en Somalie et a exhorté le Conseil de sécurité à intervenir pour éviter des conséquences humanitaires et politiques graves. Il a ajouté que le rapport du Secrétaire général est assez sombre en ce qui concerne la situation en Somalie qui demeure une des zones les plus dangereuses pour les Nations Unies. Nous nous devons de trouver une réponse aux causes de la détérioration de la situation en Somalie pour y remédier, a estimé M. Wehbe. Le rapport du Secrétaire général ne présente pas de pistes de réflexion sur les moyens de résoudre les problèmes actuels, a t-il regretté, rappelant que, dans d’autres pays d’Afrique, les Nations Unies ont tout de même envoyé des missions de consolidation de la paix malgré un contexte critique et s’est donc interrogé sur les raisons pour lesquelles le Conseil ne pouvait l’envisager à présent pour la Somalie.
Les recommandations contenues dans le rapport sont insuffisantes, en particulier pour ce qui est de la démobilisation et du désarmement des milices, a estimé M. Wehbe, faisant observer que le rapport ne présente pas non plus d’approche globale de la situation. Sa délégation considère que la décision de dépêcher une mission des Nations Unies sur le terrain ne pouvait être prise en otage par des miliciens, réaffirmant que le processus d’Arta est le seul accord de nature à rétablir une paix durable en Somalie. Cependant, a souligné le représentant, le succès du Gouvernement dépendra aussi des moyens qui seront mis à la disposition des nouvelles autorités. Il a souhaité que, dans la déclaration présidentielle qu’il adoptera, le Conseil condamne vigoureusement les seigneurs de la guerre qui entravent la voie de la réconciliation nationale et réaffirme que l’unité et l’intégrité territoriale de la Somalie et la non-ingérence dans ses affaires intérieures sont essentielles. Il a défendu la création d’un mécanisme pour faciliter le travail du Comité des sanctions et garantir le respect de l’embargo sur les armes. M. Wehbe a jugé que le Conseil de sécurité doit participer à un processus sérieux de consolidation de la paix en Somalie. Il a rappelé que les sanctions prises contre la Banque Al-Barakaat pèsent lourdement sur l’économie de la Somalie et a exhorté le Conseil à prendre des mesures à ce sujet.
M. ALFONSO VALDIVIESO (Colombie) a rappelé que la participation de la communauté internationale au processus de paix en Somalie a été très importante jusqu’à présent, en soulignant notamment le rôle joué par Djibouti. Il a aussi souligné le rôle de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) qui a décidé de tenir en avril prochain une conférence sur la réconciliation nationale. Dans ce contexte, le représentant a souhaité que le Conseil s’implique davantage et cherche des solutions qui permettent d’assurer une présence politique plus importante de l’ONU sur le terrain. Il a notamment jugé utile que le Conseil augmente les flux d’informations en provenance de la Somalie pour être à même de prendre des mesures appropriées. Concernant l’embargo sur les armes, le représentant a estimé nécessaire de créer un mécanisme de surveillance qui impliquerait notamment les organisations non gouvernementales somaliennes et les organisations régionales. Le Comité des sanctions pour la Somalie doit diriger ce processus, a-t-il dit, pour garantir le respect par tous les Etats de la résolution du Conseil. Concluant sur la lutte contre le terrorisme, il s’est félicité des mesures prises par le Gouvernement national de transition et a appelé la communauté internationale à apporter l’assistance technique et financière demandée.
M. WANG YINGFAN (Chine) a exhorté les pays voisins de la Somalie et les membres de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) à préparer activement la conférence de réconciliation nationale du mois d’avril. Estimant toutefois que seuls les dirigeants somaliens peuvent mettre fin à ce conflit, le représentant a appelé les différents acteurs à faire preuve de la bonne volonté nécessaire et de participer à la conférence de Nairobi en avril prochain. Il les a mis en garde contre le risque que le recours à la violence ne pourrait contribuer à la restauration de la paix. Il a salué les efforts inlassables de l'Organisation de l'unité africaine et de l’IGAD et a demandé aux pays ayant une influence sur les factions somaliennes de les convaincre de ne pas prendre de mesures de nature à entraver le processus d’Arta. Il s’est félicité de la proposition du Secrétaire général de créer les comités des amis de la Somalie en attendant de pouvoir y déployer une mission de consolidation de la paix quand les conditions le permettront. Il a souligné les aspects humanitaires de la situation en Somalie en appelant la communauté internationale à venir en appui au Gouvernement national de transition afin de lui permettre de reconstruire ce pays.
M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) a estimé que le Gouvernement national de transition mérite d’être soutenu, en tant que seule option viable pour l’unité et l’intégrité territoriale de la Somalie. Il faut donner toutes les chances au nouveau Gouvernement et répondre aux offres de coopération de ce Gouvernement dans le domaine de la lutte contre le terrorisme, a souligné le représentant. Le Conseil qui a été saisi de la situation en Somalie, il y a dix ans, a-t-il poursuivi, avait déjà permis le déploiement de deux opérations de maintien de la paix et d’une force multinationale. Ce n’est pas le moment de baisser les bras, a estimé le représentant en déclarant partager l’optimisme prudent du Secrétaire général à la vielle de la conférence de réconciliation nationale prévue en avril prochain à Nairobi. Le succès en la matière, a-t-il souligné, dépendra de la bonne disposition des Somaliens et des pays de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).
Jugeant important d’éviter que la Somalie ne devienne un nouvel Afghanistan, le représentant a souligné les conséquences très lourdes du gel des avoirs de la Banque Al-Baraka. Il a, en conséquence, souscrit à l’idée du dégel progressif proposé par le Gouvernement somalien. Que peut faire le Conseil? s’est interrogé le représentant, soulignant la pertinence des missions de bons offices. La création de deux comités des amis de la Somalie va également dans le bon sens, a affirmé M. Levitte, en indiquant la disposition de son pays d’y participer. Il a en outre jugé important que le Conseil réaffirme son attachement à certains principes avant de soulever la question de l’efficacité de l’embargo sur les armes et l’importance des programmes de désarmement. En concluant, il s’est dit favorable à l’envoi d’une mission de consolidation de la paix dès que les conditions de sécurité le permettront.
M. RAKESH B. BHUCKORY (Maurice) a rappelé que, pour son pays, le processus d’Arta est le seul cadre viable permettant de ramener l’espoir et la paix en Somalie et qu’il importe de poursuivre les efforts visant à consolider le processus de paix. Il a rappelé que, depuis octobre 2001, de nombreuses initiatives ont été prises pour faire progresser le processus de paix, notamment sous la conduite du Kenya. Il a jugé qu’il faut s’employer à faire participer tous ceux qui sont en marge du processus afin de consolider l’espoir de réconciliation dans le pays. Il s’est félicité de la proposition du Secrétaire général de créer deux comités des amis de la Somalie, soulignant qu’il importe que ses membres partagent la même vision que le Conseil de sécurité et soutiennent le Gouvernement national de transition. Le représentant a salué les efforts inlassables de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) qui a convoqué le mois prochain une conférence de réconciliation nationale à Nairobi et a appelé toutes les factions à y participer.
Commentant les conclusions de la mission interinstitutions d’évaluation de la sécurité qui a souligné que cette dernière empêche les Nations Unies d’envisager dès à présent un programme de consolidation de la paix, il a regretté que les Nations Unies restent prises en otage par les seigneurs de la guerre. Leur intransigeance est exacerbée par la profusion des armes légères, a déploré le représentant de Maurice, soulignant la nécessité d’identifier clairement ceux qui arment ces factions et de prendre des mesures à leur encontre. S’interrogeant sur ce que peuvent faire les Nations Unies pour aider ce pays, il a rappelé l’intention exprimée par l’ancien Premier Ministre du Gouvernement national de transition en octobre 2001 devant le Conseil qui demandait une aide à la mise en place de forces de police. Les Nations Unies, a-t-il ajouté, doivent aider le Gouvernement national de transition à assurer la sécurité et le Conseil de sécurité doit adresser un message clair aux seigneurs de la guerre.
M. FELIX MBAYU (Cameroun) a estimé qu’il revient au Conseil de sécurité de capitaliser les signaux positifs qui viennent de la Somalie. Il a demandé au Conseil d’appuyer le maintien et le renforcement d’un dialogue national entre toutes les factions somaliennes. Il a aussi voulu que le Conseil encourage l’intensification du processus de réconciliation nationale qui doit donner lieu à un gouvernement représentatif et respectueux de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’unité de la Somalie. Poursuivant, le représentant a invité le Conseil à appeler à des mesures concrètes en faveur du relèvement socioéconomique du pays. Ces mesures, a-t-il expliqué, passent par une mobilisation des ressources financières pour atteindre les 83 milliards de dollars demandés dans l’appel interinstitutions. Ces mesures impliquent aussi un soutien aux actions de l’Organisation mondiale de la santé (OMS)a et de Médecins sans frontières. Le représentant a, par ailleurs, demandé une assistance supplémentaire au plan interinstitutions des Nations Unies pour le désarmement et la démobilisation, ainsi qu’aux activités de redressement et de développement. Les Somaliens, a-t-il conclu, doivent faire preuve de tolérance et de patriotisme et accepter les négociations en vue de la réconciliation nationale. Il a, en conséquence, appuyé l’initiative de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et celle du Secrétaire général de créer deux comités des amis de la Somalie. Il a souhaité que leur composition tienne compte de la complexité de la situation et des susceptibilités déclarées dans la sous-région.
M. JOHN CORR (Irlande) s’est déclaré convaincu que le peuple de Somalie est maintenant prêt à s'engager sur la voie d'une réconciliation paisible. Aussi, la communauté internationale doit-elle soutenir leurs efforts et consolider les premières mesures prises à Arta. A cette fin, a indiqué le représentant, l'Irlande soutient la proposition du Secrétaire général de créer un groupe d'amis de la Somalie à New York et à Nairobi. Il s'est dit encouragé par l'approche régionale préconisée par l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), au niveau des chefs d'Etat et des ministres, car, selon lui, s'il est vrai qu'il incombe aux dirigeants somaliens de mettre fin aux souffrances de leur peuple, ceci ne peut être fait sans une approche coordonnée et constructive de la part des voisins de la Somalie. A cet égard, il a considéré que la conférence nationale de réconciliation qui se tiendra prochainement à Nairobi constituera une occasion historique pour les parties somaliennes de placer les intérêts de la population avant les leurs et a encouragé toutes ces parties à participer à cette conférence.
De son côté, a-t-il poursuivi, la communauté internationale a une responsabilité claire et sans ambiguïté envers la population somalienne qui l'oblige à réfléchir, malgré les contingences de sécurité que la situation impose, aux moyens de permettre aux Nations Unies de s'engager davantage sur le terrain. Pour le délégué, cette responsabilité revient donc au Conseil de sécurité, le silence et le manque d'action ne constituant pas une option. Il a rappelé qu'en octobre dernier, le Conseil de sécurité invitait, par une déclaration présidentielle, à la formulation de propositions visant à aider par exemple à la démobilisation des miliciens et à la formation de la police. Le représentant a par ailleurs souhaité que soient renforcés le régime de sanctions et l'efficacité de l'embargo sur les armes à destination de la Somalie, suggérant à cette fin la création d'un mécanisme approprié.
M. BOUBACAR DIALLO (Guinée) a déclaré que le processus de paix d'Arta conclu à Djibouti en 2000 est la seule base viable pour une solution globale et durable à la crise. Il nous apparaît impératif et urgent que toutes les parties au conflit, groupes politiques et factions, intègrent le processus en cours. La réconciliation nationale et la restauration de la confiance ne sauraient se réaliser sans la participation effective de toutes les sensibilités sociopolitiques du pays. Il serait souhaitable que tous ceux qui disposent d'une certaine influence sur les divers acteurs en Somalie en usent pour assurer leur participation effective à la réunion de réconciliation qui doit se tenir en avril prochain à Nairobi. De nombreux défis restent à relever, parmi lesquels les problèmes humanitaires et de sécurité, a ajouté le représentant. C'est pourquoi, il est nécessaire de renforcer l'embargo sur les armes en vue de mettre fin à leur prolifération. Au plan humanitaire, notre délégation, préoccupée par la grave situation alimentaire, lance un appel à la communauté internationale pour qu'elle mobilise les ressources nécessaires.
Reste qu'il appartient en premier lieu aux Somaliens eux-mêmes de faire preuve de sagesse pour mettre au conflit fratricide qui n'a que trop duré. La communauté internationale peut toutefois donner l'élan et poursuivre ses efforts. Nous sommes convaincus que les Nations Unies peuvent jouer un rôle dans le redressement de la Somalie, en tenant compte de la sécurité de son personnel. Dans le contexte international actuel, la mise en place d'une mission de consolidation de la paix en Somalie s'avère indispensable. Nous sommes également favorables à l'idée de créer deux comités des amis du Secrétaire général pour la Somalie.
M. RICHARD WILLIAMSON (Etats-Unis) a salué les efforts du Gouvernement national de transition pour lutter contre le terrorisme conformément à la résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité. Il s’est dit préoccupé par l’absence de progrès dans les domaines politique et sécuritaire et a regretté les incidents fréquents auxquels est confronté le personnel des Nations Unies. Il a fait siennes les préoccupations du Conseil de sécurité concernant la dégradation de la situation en raison de la recrudescence de la violence qui entrave le processus de paix. Il a salué l’initiative du Secrétaire général de créer deux comités des amis de la Somalie et a approuvé la décision de pas envisager, à la lumière des conclusions de la mission interinstitutions, l’ouverture, à ce stade, d’un bureau du programme de consolidation de la paix sur le terrain. Le représentant a ajouté que les Etats-Unis sont attachés à la lutte contre la menace sécuritaire et demeurent préoccupés par l’utilisation de la Somalie à des fins terroristes.
De l’avis de sa délégation, a-t-il prévenu, la situation de la Somalie menace la paix et la sécurité internationales. Il a réaffirmé son appui à la résolution 733 imposant un embargo sur les armes à la Somalie et s’est dit prêt à aider le Comité des sanctions à explorer les voies et moyens de faire appliquer cet embargo. Tout en saluant les efforts de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), il a demandé aux pays voisins de jouer un rôle constructif en encourageant les parties à participer à la conférence de réconciliation nationale qui se tiendra en avril prochain à Nairobi. Il a appelé la population à s’éloigner des seigneurs de la guerre et à montrer qu’elle est prête à instaurer une Somalie nouvelle et démocratique.
M. ANDREY GRANOVSKY (Fédération de Russie) a dit partager l’optimisme prudent du Secrétaire général à la suite de la convocation par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) d’une conférence de réconciliation nationale en Somalie à Nairobi, en avril prochain. Il s’est particulièrement félicité du consensus entre les membres de l’IGAD qui empêchera désormais aux factions somaliennes de jouer les intérêts de tel pays en faveur d’un autre. Il s’est aussi félicité de la proposition de créer deux comités des amis de la Somalie, en jugeant que leur composition devra être illimitée et inclure les membres du Conseil qui le désirent. Evoquant la question du terrorisme, il a appelé le Conseil et la communauté internationale à offrir aux Somaliens l’aide nécessaire pour neutraliser les groupes terroristes.
M. ALISTAIR HARRISON (Royaume-Uni) a jugé que la conférence de Nairobi constitue le début d’un processus, tout en estimant peu probable que cette réunion parvienne à un consensus sur la création d’un gouvernement unitaire étant données les divergences de fond entre les factions. Il appartient aux Somaliens de poser les jalons de leur avenir eux-mêmes, a-t-il déclaré, exhortant les pays de la région à s’abstenir de toutes initiatives qui risquent d’entraver la recherche du consensus. Le représentant a ajouté que la création d’un bureau des Nations Unies dans le pays serait très utile tout en appelant les membres du Conseil à tenir compte de l’avis du Secrétaire général qui s’inspire des conclusions de la mission interinstitutions. Il a recommandé la réactivation de l’embargo sur les armes afin d’empêcher les seigneurs de la guerre de continuer de déstabiliser le pays et d’entraver ainsi le processus d’Arta. Il a encouragé les efforts de l’IGAD et les pays de la région qui doivent, selon le Royaume-Uni, épauler activement les efforts de reconstruction de la Somalie. A cet égard, le représentant a exhorté l’Arabie Saoudite à lever l’embargo sur les importations de viande bovine en provenance de la Somalie. Le représentant a estimé que si la conférence de Nairobi échoue, le Conseil devra prendre des mesures contre les responsables de cet échec.
M. ADOLFO AGUILAR ZINSER (Mexique) a jugé important que le Conseil et les Nations Unies restent engagés dans le processus de paix en Somalie. Le Conseil, a-t-il dit, doit réfléchir à la manière de renforcer davantage les différents programmes de l’ONU en Somalie. Le représentant a, en particulier, insisté sur la nécessité de faire respecter l’embargo sur les armes. Il a poursuivi en souhaitant un grand succès au Gouvernement national de transition, notamment dans les efforts de réconciliation nationale qu’il mène. Il est nécessaire, a jugé le représentant, que le Conseil, la communauté internationale et les organisations internationales coordonnent leurs efforts pour amener les factions à renoncer, une fois pour toutes, à la violence et à adhérer au principe de partage du pouvoir. A cet égard, le représentant a dit attendre avec impatience l’issue des travaux de la conférence convoquée par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) en avril 2002. Il a conclu, en appuyant la proposition du Secrétaire général de créer deux comités des amis de la Somalie.
M. ZEID RA’AD ZEID AL-HUSSEIN (Jordanie), s’exprimant au nom du Groupe arabe, a estimé que la réunion d’aujourd’hui fournit une bonne occasion d’examiner les moyens d’aider la Somalie à aller de l’avant dans son processus de paix et de réconciliation nationale. Pour que la paix s’instaure à nouveau en Somalie, il est indispensable d’aider le Gouvernement national de transition à poursuivre les contacts et les efforts d’unité nationale. Il faut aussi impérativement éviter tout acte d’ingérence dans les affaires intérieures. L’Accord d’Arta doit constituer le fondement du processus de paix et de réconciliation nationale. A cet égard, il a émis l’espoir que la conférence de réconciliation nationale, convoquée en avril prochain à Nairobi par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), dans la droite ligne de l’Accord d’Arta, sera couronnée de succès.
De son côté, le Conseil de sécurité doit continuer d’accorder régulièrement son attention à la question somalienne et de suivre de près tous les développements. Dans ce contexte, la Jordanie appuie l’idée de dépêcher une mission d’établissement des faits en Somalie. Elle encourage aussi le Conseil à examiner la possibilité de créer un mécanisme de contrôle de l’embargo sur les armes imposé à la Somalie. Le représentant a aussi indiqué que le Groupe arabe souhaitait faire partie d’un des comités des amis pour la Somalie que le Secrétaire général se propose de créer. Il a émis l’espoir que le Gouvernement national de transition trouvera toute l’aide nécessaire dont il a besoin auprès du Conseil et de la communauté internationale dans son ensemble.
M. INOCENCIO F. ARIAS (Espagne), s’exprimant au nom de l’Union européenne et de la Bulgarie, la République tchèque, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie, la Slovénie, de Chypre, de Malte, de la Turquie et de l’Islande, a déclaré que l’avenir de la Somalie est avant tout entre les mains des Somaliens. La communauté internationale doit, pour sa part, les aider à mettre un terme à la situation unique et dangereuse qui prévaut dans un pays, qui n’a plus d’infrastructures publiques depuis plus de dix ans. De plus, investir dans la pacification et la reconstruction de la Somalie ne fera que contribuer à la sécurité de l’ensemble de la région. L’Union européenne insiste sur la nécessité d’adopter une approche unie s’agissant du processus de paix. Les politiques mises en oeuvre doivent en fait être plus cohérentes si l’on veut parvenir à un règlement durable du problème. Partant, l’Union européenne se félicite tout particulièrement de la résolution adoptée le 11 janvier dernier par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD). Très attachée à la lutte contre le terrorisme, l’Union européenne prend note de la création, par le Gouvernement national de transition, d’une équipe spéciale contre le terrorisme. Elle prête d’ailleurs assistance au pays pour qu’il remplisse les exigences du Comité de lutte contre le terrorisme. Le représentant s’est aussi réjoui de la décision de l’IGAD d’organiser une conférence de réconciliation nationale en avril prochain à Nairobi. Il a encouragé toutes les parties somaliennes à y participer, sans poser de conditions préalables et en s’efforçant de mettre leurs différences de côté. Quant à elle, l’Union européenne examinera les moyens de soutenir les efforts de paix de l’IGAD lors d’une réunion du Forum commun de ses partenaires prévue à Rome le 11 avril prochain. M. Arias a aussi demandé à tous les pays, et notamment ceux de la région, de s’abstenir de toute intervention militaire en Somalie et de toute initiative remettant en cause sa souveraineté, son indépendance politique et les perspectives de paix.
Le représentant a ensuite indiqué qu’il partageait pleinement les préoccupations du Secrétaire général quant aux conditions de sécurité régnant à Mogadishu. Toutefois, il est indéniable que la participation active de l’ONU au processus de paix somalien et à la restauration de la paix et de la stabilité est absolument essentielle. L’ONU et la communauté internationale doivent donc chercher les moyens de rompre le cycle de l’insécurité et de contribuer à créer les conditions de sécurité indispensables en Somalie. L’Union européenne encourage, à cet égard, de nouvelles propositions concernant les activités de reconstruction de la paix après le conflit et de restauration des institutions, y compris en matière d’aide à la démobilisation des membres de la milice et à la formation du personnel de police. Elle attend avec intérêt la création par le Secrétaire général d’un comité des amis de la Somalie, afin de coordonner les efforts et de rassembler le plus grand soutien possible en faveur de la paix et de la reconstruction de ce pays. L’Union européenne insiste aussi sur la promotion de la participation de la société civile et des femmes au processus de réconciliation nationale et de reconstruction économique et sociale. Une plus grande attention devrait être accordée à l’éducation et à la formation des jeunes, a ajouté le représentant. Il a également demandé à toutes les parties somaliennes de respecter la sécurité et la sûreté de tout le personnel des Nations Unies et des organisations internationales et humanitaires travaillant dans le pays. A cet égard, il a jugé nécessaire de réouvrir l’aéroport de Mogadishu afin de permettre un plus grand flux d’aide humanitaire. L’extrême gravité de la situation des droits de l’homme dans le pays doit aussi recueillir l’attention. Des mesures visant à mettre un terme à l’impunité et aux exécutions arbitraires et sommaires, ainsi qu’aux actes de torture et à la poursuite du recrutement des enfants doivent être prises. L’Union européenne est aussi particulièrement préoccupée par l’absence d’un système judiciaire efficace dans le pays.
M. AHMED ABOUL GHEIT (Egypte) a fait part de la satisfaction de sa délégation après la nomination de M. Winston Tubman comme nouveau Représentant du Secrétaire général pour la Somalie. Tout en réitérant son soutien aux résultats obtenus par la conférence d'Arta et à la création du Gouvernement national de transition, l'Egypte pense que les efforts du Conseil de sécurité doivent se concentrer sur la finalisation du processus d'Arta et sur la promotion du processus national de réconciliation qui en est issu. A cet égard, le Conseil devrait encourager et exhorter les parties prenantes somaliennes à se joindre aux efforts de l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) dans un cadre que nous espérons voir porter des fruits lors de la conférence de réconciliation prévue à Nairobi le mois prochain, a dit le représentant. Le Conseil devrait aussi inviter les Etats qui ont des liens avec les différentes factions à exercer leur influence pour garantir leur participation à la conférence. Si la communauté internationale est incapable de prendre des mesures concrètes pour désarmer et démobiliser les éléments des milices qui restent opposés au processus de paix, notamment à Mogadishu, le Conseil devrait au moins prendre l'initiative de mettre en oeuvre les résolutions qu'il a lui-même adoptées en faisant appliquer l'embargo sur les armes imposé par sa résolution 733 (1992), ceci en créant un mécanisme spécifique qui permette la surveillance du respect de cet embargo.
La délégation de l'Egypte prend note de ce qui est dit dans le rapport du Secrétaire général concernant la création d'une mission de maintien de la paix en Somalie. Tout en comprenant les raisons qui amènent au rejet de la création d'une mission, nous tenons à faire remarquer que l'ONU doit être prête à faire face aux défis et aux dangers qu'elle rencontre en Somalie comme elle le fait ailleurs dans les régions et pays où elle a du personnel. Nous ne pouvons attendre que de parfaites conditions de sécurité existent. Enfin, l'Egypte se félicite de la recommandation faite par le Secrétaire général de créer un comité des amis de la Somalie qui serait basé à Nairobi, et la création parallèle d'une structure de même nature basée à New York.
M. ROBLE OLHAYE (Djibouti) a indiqué que tant que l’instabilité et l’insécurité persisteraient en Somalie, le risque de guerre dans la région n’en serait que plus grand. La communauté internationale a pendant trop longtemps fermé les yeux sur la brutalité et le bain de sang en Somalie et elle doit maintenant tirer les leçons de ses erreurs passées, a-t-il ajouté, faisant observer que si l’on n’en finit pas tôt ou tard avec l’instabilité en Somalie, la corne de l’Afrique deviendra la région la plus pauvre du monde. Il a rappelé que Djibouti avait initié la tenue de la Conférence de paix nationale en Somalie en 2000, favorisant un processus global, transparent et représentatif, et qu’à l’exception de quelques groupes, apparemment désarçonnés par le caractère démocratique de l’événement, une majorité de Somaliens avaient participé à la Conférence. Reconnaissant qu’il est déjà positif que les dernières réunions de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) aient conclu que les pays de la corne de l’Afrique doivent coordonner leurs efforts en faveur de la réconciliation de la Somalie, le représentant a néanmoins fait observer que, malheureusement, il ne sera pas possible de parler de réconciliation en Somalie tant que les Etats membres de l’IGAD poursuivront des objectifs divers, voire conflictuels.
Le témoignage le plus flagrant des politiques contradictoires et menant à l’échec mises en œuvre en Somalie est constitué par la négation systématique du processus d’Arta, a estimé M. Olhaye. Le Gouvernement national de transition est une administration naissante et fragile qui n’a hérité que du chaos, de la destruction et des caisses vides, et l’inaction, les rivalités et les jalousies des peuples de notre région constituent autant d’obstacles à la mise en œuvre de l’Accord d’Arta. Il est en outre déplorable que les luttes de la Somalie, qui posent un défi permanent à la paix et à la sécurité dans la région, ne suscitent que l’indifférence de la communauté internationale. Pour ces raisons, et en l’absence d’approches politiques cohérentes des pays de la région, Djibouti ne souhaite pas se prononcer sur les recommandations du Secrétaire général. Le représentant a en conclusion rendu hommage au travail exemplaire accompli par le personnel humanitaire en Somalie.
M. ABUZED OMAR DORDA (Jamahiriya arabe libyenne) s’est félicité de ce que le rapport du Secrétaire général permette d’effectuer un examen complet des différents aspects de la question, mais a toutefois noté que les conclusions ne cadrent pas en profondeur avec le rapport. En effet, a-t-il expliqué à plusieurs reprises, il est indiqué que la situation humanitaire en Somalie reste grave et que de nombreux problèmes persistent dans le domaine humanitaire du fait de la situation en matière de sécurité dans le pays. Il est de même indiqué qu’il existe un risque que la Somalie serve de refuge à des terroristes ou à des organisations terroristes. Or, le rapport indique également que le processus d’Arta est celui qui offre le plus de possibilités de paix en Somalie. Le processus conclu à Arta s’est traduit par un gouvernement national de transition qui doit servir de base au processus de paix, a estimé le représentant, mais il est regrettable que le Conseil de sécurité n’accorde pas à l’Afrique la place qui devrait lui revenir. Alors que pour certaines questions le Conseil n’hésite pas à se réunir le week-end, c’est l’inaction qui prévaut dans le cas de l’Afrique, a-t-il poursuivi. Le représentant a ensuite indiqué que certes, la Somalie doit faire en sorte que les principes définis à Arta soient renforcés, mais qu’il n’est pas juste de dire que la communauté internationale doit s’en remettre aux Somaliens. En effet, une partie des Somaliens est à l’origine de la situation de conflit et un pouvoir central fort signifierait l’affaiblissement de leur pouvoir. Le Conseil, a continué le représentant, ne saurait aujourd’hui être neutre car cela contribuerait à renforcer la position des «seigneurs de la guerre» et il doit au contraire apporter son appui au Gouvernement national de transition.
M. BOB F. JALANG’O (Kenya) s’est félicité du rapport complet sur la situation en Somalie préparé par le Secrétaire général. Il a estimé que les trois accords distincts qui sont intervenus en décembre dernier, dans la capitale de son pays, chargé par l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) de coordonner les efforts de réconciliation en Somalie, montrent bien que la recherche de la paix dans ce pays a trouvé un nouvel élan. Un élan qui a permis au Conseil des Ministres des affaires étrangères de l’IGAD de s’accorder sur la convocation, en avril prochain à Nairobi, d’une conférence de réconciliation nationale à laquelle toutes les parties somaliennes, sans conditions, sont attendues. Afin d’assurer la participation la plus large possible à cette conférence, une réunion du Conseil de réconciliation et de relèvement de la Somalie a déjà eu lieu en Ethiopie, du 27 février au 1er mars dernier.
Pour ce qui est des divergences de vues que le Secrétaire général, dans son rapport, semble détecter au sein de l’IGAD, M. Jalang’o a expliqué que si cela avait pu être le cas par le passé, des progrès considérables ont été effectués et, depuis le neuvième Sommet, la tendance est de plus en plus à la convergence de vues. C’est pour favoriser et accélérer encore ces progrès que les Ministres des affaires étrangères de l’IGAD ont établi un comité technique, formé des Etats les plus directement concernés par la question. Expliquant que ce comité devait fonctionner sur une base permanente, le représentant a indiqué que ce bureau avait besoin d’être soutenu. Les membres de l’IGAD se réjouissent de l’initiative du Secrétaire général de créer deux comités des amis de la Somalie, qui auront respectivement leur siège à Nairobi et à New York, a également indiqué le représentant. La communauté internationale a donc démontré l’attention accrue qu’elle accorde à la Somalie. Il revient désormais aux Somaliens eux-mêmes de faire preuve de maturité et de tirer parti de la bonne volonté actuelle. Le représentant s’est dit convaincu que toutes les parties impliquées dans le processus, que ce soient les groupes régionaux, l'Organisation de l'Unité africaine, l’ONU, le Forum des partenaires de l’IGAD ou les comités des amis de la Somalie, seront prêts à faire des efforts supplémentaires concernant le processus de paix, l’aide humanitaire et l’amélioration des conditions de sécurité. M. Jalang’o s’est aussi dit convaincu que les pays amis et voisins de la Somalie seront, de leur côté, prêts à jour un rôle impartial et constructif dans les efforts visant à mettre fin au vieux problème de l’absence d’administration centrale en Somalie et aux menaces pour la communauté régionale et internationale qui découlent de ce vide.
M. FESSEHA A. TESSEMA (Ethiopie) s’est félicité des recommandations concernant la situation en Somalie formulées dans le rapport du Secrétaire général. La question exige en effet une approche globale. La mise en place le plus rapidement possible d’un gouvernement à participation large est non seulement de l’intérêt vital des Somaliens, mais aussi des pays de l’ensemble de la sous-région, et de la communauté internationale dans son ensemble. Ce constat représente d’ailleurs le cœur même du processus de paix élaboré par les pays de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD). Le consensus auquel l’Autorité est parvenu va permettre la coordination des activités pour la paix entre les pays de l’IGAD et en définitive va permettre à chacun d’harmoniser ses positions. Le représentant a émis l’espoir que cette initiative recueillera donc le plein appui et la coopération du Conseil de sécurité et de la communauté internationale. Il a aussi souhaité que la combinaison de ces efforts de paix feront une différence réelle pour la paix et l’établissement d’un gouvernement d’assise large en Somalie. Il n’y a en fait pas d’autre option possible, a affirmé le représentant.
M. Tessema a expliqué ensuite que les différents efforts de paix consentis ces onze dernières années en faveur de la Somalie se sont tous heurtés au vide structurel dans lequel ceux qui trouvaient leur intérêt dans l’anarchie ont laissé le pays. Cette situation d’enlisement doit cesser. Ainsi que l’a clairement indiqué le Conseil pour la réconciliation et le relèvement de la Somalie, il n’y a pas d’autre choix possible que celui de la lutte contre le terrorisme et de la formation d’un gouvernement à participation élargie. L’Ethiopie appelle donc instamment toutes les parties somaliennes et les groupes concernés à participer, sur un pied d’égalité et sans conditions préalables, à la conférence de réconciliation nationale qui aura lieu à Nairobi en avril prochain. L’Ethiopie appuiera pleinement tout accord qui en résultera pourvu qu’il assure la participation de tous et la constitution d’un gouvernement très représentatif. Elle demande instamment à tous les Etats, qu’ils appartiennent ou non à la sous-région, d’apporter un soutien constructif à ces efforts de paix.
M. OLE KOLBY (Norvège) a assuré le plein appui de son pays au processus de paix conclu à Arta, soulignant cependant que l’on ne saurait considérer que les objectifs d’Arta ont été atteints. La Norvège invite toutes les parties présentes en Somalie à s’employer pour parvenir à la paix et à la réconciliation nationales, privilégiant notamment le dialogue entre toutes les parties et la dévolution des pouvoirs. La Norvège appuie également les conclusions du sommet de Khartoum et est favorable à la convocation à Nairobi d’une conférence de réconciliation en avril prochain. Malgré cet optimisme prudent, le représentant a exprimé son inquiétude face aux combats récents et a insisté pour que tous les protagonistes respectent l’embargo sur les armes, déclarant à cet égard qu’il devrait être prioritaire de mettre en place un processus de contrôle. Particulièrement préoccupée par la situation humanitaire en Somalie, la Norvège s’est prononcée en faveur du renforcement de la sécurité de l’aide alimentaire et a enjoint toutes les parties à respecter la sécurité du personnel des Nations Unies et des organisations non gouvernementales. L’appui de la communauté internationale est absolument fondamental, a continué le représentant, faisant également observer que cet appui peut aller de pair et renforcer les efforts mondiaux en faveur de la lutte contre le terrorisme international. En l’absence d’une mission de consolidation de la paix, le Secrétaire général devrait continuer toutes les activités qui vont dans le sens du renforcement de la sécurité, a invité M. Kolby en conclusion.
M. YUSUF HASSAN IBRAHIM, Ministre des affaires étrangères du Gouvernement national de transition de la Somalie, a estimé qu’il ne faut pas préjuger de manière négative des conclusions de la conférence de réconciliation nationale qui se tiendra, à l’initiative de l’Autorité intergouvernementale pour le deéveloppement (IGAD), en avril prochain à Nairobi. Pour être une réussite, l’approche adoptée à cette occasion devra être globale et intervenir à plusieurs niveaux. Tout d’abord il faudra donner au Gouvernement national de transition les ressources et les moyens nécessaires pour assurer la sécurité à Mogadishu et aux alentours. Ensuite, il faudra que tous les pays respectent rigoureusement l’embargo sur les armes imposé par le Conseil de sécurité. Il faudra aussi garantir une contribution soutenue à la campagne internationale contre le terrorisme. La communauté internationale devra également soutenir de manière forte les efforts de paix de l’IGAD et, notamment, faire comprendre aux seigneurs de guerre que s’ils ne respectent pas le processus de paix, ils risqueront des mesures punitives. La communauté internationale devra enfin mettre en place un vaste programme de reconstruction. Le Gouvernement de transition, de son côté, est pleinement décidé à s’engager fermement en faveur de la paix, a assuré le Ministre en conclusion.
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