LES NATIONS UNIES SONT LES MIEUX PLACEES POUR SERVIR DE CENTRE DE RALLIEMENT D'UNE COALITION INTERNATIONALE CONTRE LE TERRORISME, DECLARE M. ANNAN
Communiqué de presse SG/SM/7977 |
LES NATIONS UNIES SONT LES MIEUX PLACEES POUR SERVIR DE CENTRE DE RALLIEMENT
D'UNE COALITION INTERNATIONALE CONTRE LE TERRORISME, DECLARE M. ANNAN
Vous trouverez ci-après la déclaration du Secrétaire général, M. Kofi Annan, faite aujourd’hui à l’Assemblée générale, sur le terrorisme:
Vendredi soir, le Conseil de sécurité a adopté à l’unanimité une résolution d’une large portée visant les terroristes et ceux qui les abritent, les aident ou les soutiennent. Cette résolution demande aux États Membres de coopérer dans des domaines aussi divers que la répression du financement du terrorisme, l’alerte rapide, la coopération dans les enquêtes criminelles et l’échange de renseignements sur les risques d’attentats terroristes. Je félicite le Conseil d’avoir agi avec une telle célérité afin d’inscrire dans les textes les premières mesures à prendre pour mener cette lutte avec une vigueur et une détermination nouvelles.
Maintenant, tous les États Membres doivent redoubler d’efforts pour échanger des renseignements sur les pratiques qui se sont révélées efficaces dans la lutte contre le terrorisme et en tirer les enseignements voulus, de façon à établir des critères d’excellence pour le monde entier. J’encourage les États qui peuvent offrir une assistance à cet égard à le faire généreusement et sans délai.
Jusqu’ici, la communauté internationale a été capable d’agir avec une promptitude et une unité sans précédent. Le 12 septembre, l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité ont l’un et l’autre adopté des résolutions énergiques condamnant les attaques et engageant tous les États à coopérer pour traduire les coupables en justice. Le Conseil de sécurité a adopté maintenant une résolution plus détaillée qui est venue rapidement renforcer la première. Aujourd’hui, cette auguste Assemblée se réunit pour débattre de sa propre réaction aux événements du 11 septembre.
La raison de cette réaction et de cette unité sans précédent est suffisamment claire. Les attaques terroristes qui ont frappé les États-Unis le 11 septembre et ont causé la mort de quelque 6 000 personnes appartenant à 80 pays étaient des actes d’une cruauté terrible qui ont heurté profondément la conscience du monde entier.
Mais du mal peut naître le bien. Paradoxalement, ces attaques odieuses contre notre humanité commune ont eu pour effet de réaffirmer notre humanité commune. Cette cruauté même et cette indifférence brutale à la souffrance et à la douleur causées à des milliers de familles innocentes ont provoqué une émotion sincère de la part de millions de personnes ordinaires dans le monde entier appartenant aux sociétés les plus diverses.
Notre tâche consiste maintenant à tirer parti de cette vague de solidarité – à veiller à ce que cet élan ne soit pas perdu, à mettre au point une stratégie vaste, globale et surtout soutenue pour combattre le terrorisme et le faire disparaître de la face du monde.
Cette importante réunion de l’Assemblée générale a un rôle crucial à jouer à cet égard. Ce rôle ne doit pas être seulement symbolique. Il doit marquer le début de changements immédiats, concrets et profonds dans la manière dont cette organisation et ses États Membres font face au terrorisme.
Aujourd’hui, le monde entier se trouve uni sous le choc de ce crime. Toutefois, si nous voulons empêcher que pareil crime soit de nouveau perpétré, nous devons rester unis dans l’élimination du terrorisme. Dans cette lutte, il n’y a d’autre choix que la coopération internationale. La victoire contre le terrorisme ne sera possible que si la communauté internationale trouve la volonté de s’unir dans une large coalition. L’Organisation des Nations Unies est la mieux placée pour servir de centre de ralliement à cette coalition et pour élaborer les mesures que les gouvernements doivent maintenant prendre, individuellement et collectivement, pour lutter contre le terrorisme à l’échelon mondial.
La réaction mondiale à ces attaques devrait nous encourager et nous permettre d’espérer pouvoir sortir vainqueurs de cette lutte. Le spectacle de tant de personnes de toutes confessions rassemblées dans des villes des quatre coins du monde pour exprimer leur douleur et leur solidarité avec le peuple américain prouve, beaucoup plus éloquemment que tout discours, que le terrorisme n’est pas un problème qui divise l’humanité, mais un problème qui l’unit. Nous sommes engagés dans un combat moral contre un mal que toutes les religions abhorrent. Chaque État et chaque peuple ont un rôle à jouer. Car il s’agit d’une attaque contre l’humanité, et c’est l’humanité tout entière qui doit réagir.
L’Organisation des Nations Unies doit maintenant de toute urgence élaborer une stratégie à long terme afin de légitimer à l’échelon mondial la lutte qui s’annonce. Cette légitimité permettra au plus grand nombre d’États possible de prendre les mesures nécessaires mais difficiles, sur les plans diplomatique, juridique et politique, qu’exige la défaite du terrorisme.
Un programme bien précis attend les États Membres que vous représentez. Il s’agit tout d’abord de faire en sorte que les 12 conventions et protocoles relatifs au terrorisme international qui ont déjà été rédigés et adoptés sous les auspices des Nations Unies soient signés, ratifiés et appliqués sans retard par tous les États.
Deux de ces conventions, en particulier, sont de nature à renforcer la lutte contre le terrorisme. Il s’agit tout d’abord de la Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l’explosif, qui est entrée en vigueur le 23 mai de cette année; il y a ensuite la Convention de 1999 pour la répression du financement du terrorisme, qui a fait l’objet à ce jour de 44 signatures et de quatre ratifications. Il faut encore 18 ratifications pour qu’elle entre en vigueur, et j’espère que les États Membres se feront désormais un point d’honneur de signer et de ratifier dans les meilleurs délais cette convention d’importance capitale.
Il est bien évident que ces conventions, même une fois appliquées, ne suffiront pas à mettre un terme au terrorisme, mais elles font partie du cadre juridique qu’exige cet effort. Je voudrais proposer à tous les États Membres qu’ils s’engagent en priorité, au cours du débat général, à signer toutes les conventions relatives au terrorisme et à oeuvrer sans retard en vue de leur ratification et de leur application.
Il faudra également parvenir à un accord au sujet d’une convention globale sur le terrorisme international. Depuis le 11 septembre, nul ne saurait contester la nature de la menace terroriste ni la nécessité d’y apporter une réponse mondiale. Je sais que certaines questions en suspens ont empêché jusqu’ici un accord au sujet de cette convention. Certaines des questions les plus épineuses ont trait à la définition du terrorisme. Je comprends et j’admets que la précision juridique s’impose en la matière. Mais permettez-moi de vous dire franchement que la clarté morale s’impose également. On ne saurait tolérer ceux qui chercheraient à justifier le meurtre de civils innocents, quels que soient leur cause ou leurs griefs. S’il y a un principe universel qui doit faire l’unanimité, c’est bien celui-là.
Même dans les situations de conflit armé, il est illégal et moralement inacceptable de prendre pour cible des civils innocents. Et pourtant, comme je l’ai indiqué dans mes deux rapports sur la protection des civils dans les conflits armés, les populations civiles sont de plus en plus souvent prises délibérément pour cible. En fait, les civils sont désormais les principales victimes des conflits et représentent quelque 75 % de l’ensemble des victimes.
C’est pourquoi nous devons nous préoccuper davantage du coût des conflits pour les populations civiles. Les États Membres doivent pour ce faire assumer les responsabilités que leur impose le droit international. Ils doivent s’attaquer avec fermeté au problème bien réel des groupes armés et autres éléments non étatiques qui se refusent à respecter les principes universels de la dignité humaine.
On a peine à imaginer que la tragédie du 11 septembre ait pu être pire. Pourtant, le fait est qu’une seule attaque à l’arme nucléaire ou biologique aurait pu tuer des millions de personnes. Le monde n’a pas été en mesure d’empêcher les attaques du 11 septembre, mais nous pouvons faire beaucoup pour contribuer à empêcher qu’à l’avenir des actes de terrorisme soient perpétrés au moyen d’armes de destruction massive. Dans l’immédiat, le principal danger tient à l’acquisition et à l’utilisation par un groupe non étatique, voire un particulier, d’une arme nucléaire, biologique ou chimique. Une telle arme pourrait être utilisée sans l’aide d’un missile ou d’un autre vecteur sophistiqué.
En plus des mesures prises individuellement par les États Membres, il nous faut désormais renforcer les normes mondiales à appliquer pour empêcher l’utilisation ou la prolifération d’armes de destruction massive. Il s’agit, entre autres :
• de redoubler d’efforts pour assurer l’universalité, la vérification et l’application intégrale des principaux traités concernant les armes de destruction massive, y compris ceux qui interdisent les armes chimiques et biologiques et le Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires;
• de favoriser le resserrement de la coopération entre les organisations internationales qui s’occupent de ces armes;
• de renforcer les législations nationales concernant les exportations de biens et de technologies nécessaires à la fabrication d’armes de destruction massive et de leurs vecteurs;
• et de redoubler d’efforts pour criminaliser l’acquisition ou l’utilisation d’armes de destruction massive par des groupes non étatiques.
En outre, nous devons renforcer les contrôles des autres types d’armes qui peuvent être extrêmement dangereuses aux mains des terroristes. Il faut pour cela faire davantage pour assurer l’interdiction de la vente des armes légères aux groupes non étatiques; progresser dans l’élimination des mines terrestres; améliorer la protection physique des installations industrielles sensibles, dont les centrales nucléaires et les usines chimiques; et redoubler de vigilance face aux menaces des cyberterroristes.
Tout en mobilisant les volontés et les ressources nécessaires pour remporter la lutte contre le terrorisme, nous devons également nous occuper de toutes les victimes du terrorisme, qu’il s’agisse des cibles directes ou d’autres populations qui seront touchées par notre effort commun. C’est pourquoi j’ai averti les donateurs qu’il faudra peut-être fournir une aide humanitaire beaucoup plus généreuse au peuple d’Afghanistan.
Cet appel ne représente que l’élément le plus urgent des efforts que nous sommes déterminés à poursuivre pour aider ceux qui souffrent de la pauvreté, de la maladie et des conflits dans le monde entier. Le rôle de l’Organisation des Nations Unies dans la promotion du développement, le règlement des différends qui durent depuis longtemps et la lutte contre l’ignorance et les préjugés est encore plus important aujourd’hui qu’avant le 11 septembre.
Les victimes des attaques du 11 septembre sont avant tout les civils innocents qui ont trouvé la mort et les familles qui les pleurent. Mais la paix, la tolérance, le respect mutuel, les droits de l’homme, l’état de droit et l’économie mondiale ont tous également souffert des actes terroristes.
Il ne sera pas facile de réparer le dommage causé au tissu de la communauté internationale et de rétablir la confiance entre les peuples et les cultures. Mais tout comme une réaction internationale concertée doit rendre la tâche des terroristes beaucoup plus difficile, l’unité née de cette tragédie doit rassembler toutes les nations dans la défense du droit le plus fondamental – le droit de tous les peuples à vivre dans la paix et la sécurité. Tel est le défi que nous devons relever si nous voulons éliminer le mal que constitue le terrorisme.
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