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SG/SM/7902

AUCUN PAYS N’EST A l’ABRI DES MARCHANDS D’ARMES SANS SCRUPULES, AVERTIT LE SECRETAIRE GENERAL

2/08/2001
Communiqué de presse
SG/SM/7902


AUCUN PAYS N’EST A l’ABRI DES MARCHANDS D’ARMES SANS SCRUPULES, AVERTIT LE SECRETAIRE GENERAL


    On trouvera ci-après le texte de la déclaration du Secrétaire général, M. Kofi Annan, au débat public du Conseil de sécurité sur la question des armes légères, New York, 2 août 2001-08-02


    C’est un grand plaisir d’être parmi vous aujourd’hui, alors que le Conseil s’interroge sur ce qu’il lui est possible de faire pour remédier aux conséquences catastrophiques qu’ont les armes légères pour les populations et les sociétés de par le monde.


    La Conférence des Nations Unies sur le commerce illicite des armes légères sous tous ses aspects, qui s’est tenue le mois dernier, a permis d’accomplir de grands progrès. Je tiens à féliciter le Président de la Conférence, Monsieur l’Ambassadeur Camilo Reyes Rodriguez, de la Colombie, de la part essentielle qui lui revient dans la réussite de cette manifestation.


    La Conférence a eu un grand retentissement car les médias du monde entier ont diffusé beaucoup d’informations sur les carnages dont ces armes sont responsables et sur les coûts que cela entraîne. Des représentants de la société civile des quatre coins de la planète ont participé activement et de façon créative à la manifestation. Et à l’issue de négociations intenses, difficiles, les États Membres ont forgé un consensus au-delà de la pluralité de leurs vues et de leurs intérêts, et adopté un Programme d’action détaillé. Exposée au fléau mondial des armes légères, la communauté internationale a posé des jalons décisifs en vue d’une action constructive de portée mondiale.


    Les États se sont engagés à élaborer, renforcer et appliquer des normes et des mesures visant à prévenir, maîtriser et, à terme, éliminer la fabrication et le commerce illicites des armes légères.


    Ils ont décidé de mettre particulièrement l’accent sur les situations d’après conflit, et notamment d’apporter un soutien accru aux programmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion des anciens combattants, y compris des ex-enfants soldats.


    Ils ont également décidé d’assumer les responsabilités qui leur incombent pour ce qui a trait à l’exportation, à l’importation, au transit et à la réexportation d’armes, étant donné que les armes licites sont trop souvent et trop facilement détournées au profit de terroristes, de criminels et de trafiquants de drogue.


    Ils ont reconnu la nécessité de marquer les armes et de tenir des registres fiables autorisant le traçage et l’identification rapides des armes.


    Ils se sont engagés à renforcer l’application des embargos sur les armes décrétés par le Conseil.


    Enfin, ils ont décidé de détruire s’il y a lieu les armes illicites ou excédentaires. Je me félicite de la publication par le Département des affaires de désarmement d’un manuel sur les méthodes écologiques de destruction des armes, qui je l’espère, sera utile aux États.

    Le Programme d’action appelle à une plus grande transparence et à des programmes d’éducation et de sensibilisation.


    Et pour mieux suivre les progrès et maintenir la dynamique créée par la Conférence, il prévoit la tenue d’une conférence d’examen avant 2006.


    Ces premières initiatives ne seront pas des moindres pour faire reculer la grave menace qui pèse sur la paix et la sécurité internationales. Nous devons maintenant consolider ces acquis. Un programme d’action, ce n’est qu’un début, pas une fin en soi. C’est au stade de l’exécution que l’on pourra juger de son efficacité.


    J’encourage aussi les gouvernements à continuer de travailler sur questions sur lesquelles il n'a pas été possible de parvenir à un consensus lors de la conférence.


    Ils doivent aussi envisager la négociation d’instruments juridiquement contraignants. Les États ont élaboré des normes internationales dans les domaines de la non-prolifération nucléaire et ont adopté des traités interdisant les armes chimiques et biologiques et les mines terrestres antipersonnel. Le commerce illicite des armes légères est marqué par l’absence d'un tel cadre juridique contraignant.


    Il faut aussi régler le problème de l’offre. Depuis le milieu des années 80, les sociétés et les pays qui fabriquent des armes légères sont toujours plus nombreux. Certains des pays les plus riches du monde en sont les principaux fournisseurs. Mais de nombreux pays en développement produisent aussi des armes légères, notamment pour l’exportation.


    Les conséquences tragiques de ces armes sur les enfants méritent aussi d’être soulignées. Les enfants sont les premières victimes des violences causées par les armes légères, qu’ils en meurent, soient blessés, ou soient déplacés; qu’ils perdent leurs parents ou leurs frères et soeurs ou soient traumatisés par le spectacle des brutalités. Sans compter les graves conséquences indirectes que sont la destruction des installations sanitaires et des écoles et le manque de perspectives lié aux retards de développement de la société.


    En glorifiant les armes, on envoie aussi aux enfants un triste message, à savoir que les solutions non violentes sont inapplicables et illusoires, et que le pouvoir n’est pas affaire de compétences ou d’intellect, mais tient à la capacité d’intimider les autres ou de leur faire du mal. Le fait que les armes légères exigent très peu d’entraînement a certainement beaucoup contribué au recrutement des quelques 300 000 enfants soldats dans le monde. Les enfants sont les victimes les plus vulnérables des armes légères, et leurs besoins spécifiques n’ont pas encore été suffisamment pris en compte.

Excellences,


    Les armes légères sont faciles à acheter, à utiliser, à transporter et à dissimuler. Leur prolifération exacerbe les conflits, jette les réfugiés sur les routes, bafoue la primauté du droit et engendre un climat de violence et d’impunité. Elles ne posent pas seulement un problème de désarmement, mais compromettent aussi le développement, la démocratie, les droits de l’homme et la sécurité humaine.


    La conférence historique du mois dernier n’entendait pas enfreindre la souveraineté nationale, limiter le droit des États à se défendre, ou empiéter sur la responsabilité qui leur incombe d’assurer la sécurité publique. Son but n’était pas non plus de priver les propriétaires légitimes de leurs armes.


    La vraie cible, ce sont les marchands d’armes sans scrupules, les fonctionnaires corrompus, les associations de trafiquants de drogue, les terroristes, les groupes armés et autres qui sèment la mort et la dévastation dans nos rues, nos écoles et nos villes, qui réduisent des vies à néant et détruisent en quelques minutes le travail de longues années. Aucun pays n’est à l’abri de cette menace.


    Il n’existe pas de solution immédiate, ni de recette unique pour parer aux effets du commerce illicite d’armes légères. Les engagements politiques peuvent faire beaucoup quand il s’agit d’épargner des vies et d’atténuer des souffrances. Et le Conseil occupe une place privilégiée pour faire connaître le problème des armes légères partout dans le monde. Je me réjouis à la perspective de poursuivre nos travaux sur cet aspect central de la paix et de la sécurité internationales. Je vous remercie.


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