En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/7748

TRANSCRIPTION DE LA CONFERENCE DE PRESSE TENUE PAR LE SECRETAIRE GENERAL, M. KOFI ANNAN, AU SIEGE DES NATIONS UNIES, LE 22 MARS 2001

22/03/2001
Communiqué de presse
SG/SM/7748


TRANSCRIPTION DE LA CONFERENCE DE PRESSE TENUE PAR LE SECRETAIRE GENERAL, M. KOFI ANNAN, AU SIEGE DES NATIONS UNIES, LE 22 MARS 2001


           Le Secrétaire général  (interprétation de l’anglais) : Bonjour Mesdames et Messieurs. Je suis ici principalement pour répondre à vos questions, mais pour commencer je voudrais vous parler de trois ou quatre choses que j’ai particulièrement à l’esprit.


           Mon souci le plus immédiat concerne la situation dans l’ex-République yougoslave de Macédoine, qui est très grave. Si cette situation n’est pas maîtrisée, elle pourrait déstabiliser toute la région. Ce qui est encore plus important, c’est que la communauté internationale tout entière s’est rassemblée pour réaffirmer l’unité et l’intégrité territoriale de la République. Même ceux qui ont pris les armes contre elle le reconnaissent. Ils doivent comprendre que les méthodes qu’ils ont choisies ne sont ni un moyen acceptable ni un moyen crédible pour obtenir une meilleure représentation de leur collectivité dans le cadre des institutions macédoniennes. Ils doivent entendre l’appel du Conseil de sécurité qui, hier, a condamné à l’unanimité les violences des extrémistes, y compris les activités terroristes, et a lancé un appel au dialogue entre toutes les parties légitimes.


           Tout aussi inquiétante est la situation au Moyen-Orient, où je dois me rendre la semaine prochaine pour assister au Sommet des pays arabes. Là aussi, il est important que tous comprennent qu’il ne saurait y avoir de solution passant par la violence, et qu’il est insensé de retarder le jour où ils retourneront à la table de négociation.


           Il y a des nouvelles qui sont un peu meilleures venant de l’Afrique. L’accord de paix entre l’Érythrée et l’Éthiopie est en cours d’application, et il y a à présent une atmosphère qui est beaucoup plus porteuse d’espoir en République démocratique du Congo, ce qui offre de bonnes perspectives que nous allons enfin être en mesure de déployer notre force d’observateurs. Évidemment, le continent reste confronté aux problèmes sociaux et économiques les plus difficiles, dont le VIH/sida est le plus dramatique. Mais je pense que les dirigeants de l’Afrique et toute la communauté internationale, y compris les sociétés pharmaceutiques, commencent enfin à réagir d’une façon qui est à la hauteur de l’urgence de la situation. Cependant, nous ne devons pas oublier que le problème sous-jacent de l’Afrique est celui de la pauvreté extrême, ou que le moyen le plus sûr de sortir de la pauvreté pour tous les pays passe par le commerce et l’investissement. C’est pourquoi j’ai été extrêmement satisfait de la décision prise par l’Union européenne de lever les tarifs et quotas touchant tous les produits, à l’exception des armes, venant des 48 pays les moins avancés. J’espère encore que les autres pays industrialisés feront de même à temps pour la conférence de mai sur les pays les moins avancés qui doit se tenir à Bruxelles. Ce serait un premier pas important, mais pour véritablement changer les choses, il faudra sans doute attendre la réunion sur le commerce mondial au Qatar. Les pays en développement doivent s’y rendre en étant bien préparés à défendre leurs intérêts et en étant prêts à insister sur une véritable série de négociations commerciales axées sur le développement et prévoyant un accès libre à leurs produits.


           Enfin, il y a une autre question que j’ai à l’esprit et sur laquelle je sais que vous êtes très désireux de me poser des questions. Depuis un certain temps, d’ailleurs, vous-mêmes et d’autres m’avez demandé si je serais disposé à remplir un deuxième mandat comme Secrétaire général, et je vous ai promis de vous donner une réponse dans le courant de ce mois. Effectivement, j’ai été touché et très satisfait des nombreuses manifestations d’encouragement et de soutien que j’ai reçues de nombreux gouvernements, et tout particulièrement du Groupe des États d’Afrique, dont les Représentants permanents ont lancé la semaine dernière un appel public pour que je reste en fonctions.


           Cette question n’a pas été facile à envisager. D’un côté, j’ai consacré la plus grande partie de ma vie professionnelle à promouvoir les valeurs et l’œuvre de l’ONU, dont je suis convaincu qu’elles incarnent les plus nobles aspirations de l’humanité. Je suis également sensible à l’appel du devoir et chaque jour, je suis inspirée par les sacrifices que consentent les fonctionnaires de l’ONU, en particulier ceux qui se trouvent sur le terrain et dans les missions de maintien de la paix ou dans les camps de réfugiés œuvrant pour ceux que nous servons. Tout ce que je pourrais faire ou espérer faire ne peut se réaliser que grâce à leur dévouement.


           D’un autre côté, je dois me poser la question de savoir si je suis disposé et apte à faire ce travail pendant cinq nouvelles années avec la même énergie et le même engagement que j’y ai consacré depuis quatre ans. Cette responsabilité a été pour moi très exigeante et difficile et a inévitablement mis fortement à contribution ma famille et ma vie personnelle. Après avoir bien réfléchi et consulté de près ma famille et mon épouse Nane, qui m’a soutenu plus que tout autre, dans les bons et mauvais moments, je suis heureux de vous dire aujourd’hui que ma réponse est oui. Si les États Membres décident de me proposer un deuxième mandat comme Secrétaire général, je serais profondément honoré d’accepter cette fonction. Il reste encore beaucoup à faire pour que l’ONU, organisation indispensable, devienne un instrument efficace pour l’humanité afin de promouvoir les causes de la paix, du développement et des droits de l’homme. Si on me le demande, je serais disposé à répondre à l’appel.


           Merci. Je suis maintenant prêt à entendre vos questions.


           Question  : Monsieur, au nom de l’Association des correspondants des Nations Unies, je vous souhaite la bienvenue. La première chose que nous voudrions savoir est quelle type de réaction vous avez obtenu des 5 membres permanents quant à vos projets de deuxième mandat?


           Le Secrétaire général  :Je crois que je laisserai aux cinq membres permanents le soin de s’exprimer pour eux-mêmes. Ils sont servis par des ambassadeurs très efficaces et actifs. J’attendrai donc qu’ils se prononcent sur la question mais je crois que nous avons bien travaillé ensemble depuis quatre ans et que nous nous sommes bien entendus.


           Question  :Pourquoi pensez-vous que vous méritez un

deuxième mandat?


           Le Secrétaire général  :Je ne sais pas s’il s’agit de mérite. J’ai dit tout à l’heure qu’il appartenait aux États Membres d’en décider. Mais je crois que depuis quatre ans, j’ai fait de mon mieux pour investir une énergie nouvelle dans cette organisation. J’ai appliqué, avec énergie, un programme de réformes et œuvré avec les États Membres pour définir un nouveau programme de travail pour l’ONU et je crois que la Déclaration du millénaire est une chose dont nous pouvons tous être fiers. J’ai également ouvert l’Organisation aux peuples en général, au secteur privé soutenant comme je l’ai fait que l’ONU ne peut agir seule pour affronter toutes les questions qui se présentent à nous et que nous devons agir en partenariat avec tous les intervenants. J’ai accompli d’autres choses dont vous avez connaissance. Je n’ai pas le temps de tout détailler. Il faudrait pour cela une autre conférence de presse, un autre débat.


           Question  :Comme vous le savez, certaines préoccupations ont été exprimées par des pays asiatiques ou européens estimant que si vous effectuez un deuxième mandat, l’Afrique aura eu ses plus hautes fonctions pendant 15 ans. Est-ce que vous pouvez répondre à cela? Et si l’on considère, comme vos supporters, que vous êtes la personne la plus apte pour ce poste, et qu’il devrait être donné à la personne la plus compétente, est-ce qu’on peut envisager qu’à l’avenir tous les postes seront octroyés sur la base du mérite au lieu d’une rotation automatique entre les régions comme cela arrive fréquemment pour les postes situés plus bas dans la hiérarchie?


           Le Secrétaire général  :Je crois que nous devons faire tout ce qu’il est possible de faire sur la base du mérite et en recrutant et nommant moi-même mes collègues, j’ai essayé de me fonder sur le mérite. Mais cela ne signifie pas que l’on ne puisse pas trouver des personnes méritantes dans le monde entier. En conséquence, le fait de nommer du personnel sur une base géographique aussi large que possible est acceptable mais cela ne signifie pas que l’on doive engager des personnes médiocres. On peut trouver de bons candidats dans le monde entier.


           Je crois que la question de savoir si un Secrétaire général d’une région particulière ne devrait effectuer que deux mandats, ou si une région particulière ne devrait avoir que deux mandats, est une chose que les États Membres devront trancher. Mais si l’on examine l’histoire de cette Organisation, il n’en a pas toujours été ainsi. Si l’on examine l’histoire, on s’apercevra que Trygve Lie, Dag Hammarskjöld et Waldheim n’ont pas suivi le type de schéma dont il est question aujourd’hui. Et j’espère que les États Membres lorsqu’ils se prononceront, prendront une décision sage et judicieuse.


           Question  :Pour revenir à la question d’un candidat d’Asie, est-ce que vous avez eu des entretiens avec un membre de la région dans vos délibérations et est-ce que cela a influencé votre décision de demander un deuxième mandat?


           Le Secrétaire général  :J’ai été contacté par un Représentant permanent de l’Asie – je regrette de ne pas avoir répondu à cette question – mais pas sur la base de savoir s’ils allaient présenter un autre candidat ou pour leur demander leur soutien. Je pense que j’ai bien travaillé avec eux, ils savent de quoi je suis capable et je sais qu’il y a eu des questions sur le plan d’un candidat asiatique, ce qui est normal et naturel. Il y a dans le monde entier des gens disposés à se présenter à ce type de fonctions et je ne serais pas étonné qu’il y ait d’autres candidats. Il appartiendra aux États Membres de décider. Je ne suis pas particulièrement préoccupé par la possibilité que d’autres candidats se présentent. Je pense que c’est normal.


           Question  :Vous avez enregistré plus de kilomètres et visité plus de pays que tous vos prédécesseurs. Pensez-vous que cette Organisation pourrait être gérée efficacement par un Secrétaire général parfois absent? C’est ma première question.


           La seconde est la suivante : que se passe-t-il à Chypre? Est-ce que vous avez eu un compte rendu?


           Le Secrétaire général  :En ce qui concerne votre première question, vous semblez présumer que le monde est très sédentaire comme celui que nous connaissions il y a 100 ans, sans communications, sans possibilité d’être en contact où que l’on se trouve. En fait, ceux qui sont en voyage avec moi sont souvent étonnés. Ils pensent que j’accomplis plusieurs fonctions en même temps car je fais ce que je dois faire en voyage mais mon bureau voyage avec moi et je suis en communication avec New York de manière constante. Je pense que la communication, mon ami, a changé notre vie.


           Au sujet de Chypre, mon Représentant spécial est en contact avec les parties chypriotes des communautés grecques et turques, ainsi qu’avec les autorités de la Grèce et de la Turquie. Mes bons offices sont toujours utilisés. Nous sommes en contact avec les parties et nous espérons avoir bientôt une indication sur la date d’une nouvelle série de négociations.


           Question : Le Conseil de sécurité est en train de réfléchir à la question de savoir si l’on va envoyer une force d’observation au Moyen-Orient. Étant donné qu’Israël a précisé qu’il n’accepterait pas une telle force, est-ce que votre opinion est que l’ONU serait un instrument efficace si une telle force était décidée?


           Le Secrétaire général  :J’ai eu hier un entretien avec le Premier Ministre Sharon. Il m’a réaffirmé la position de son gouvernement qui est qu’il n’accepterait pas une force d’observation. Le Conseil continue ses délibérations. Je ne sais pas quelle sera la décision finale qu’il prendra. Vous avez raison de dire qu’ils discutent de cette question et évidemment, pour qu’une force puisse se rendre sur place, il nous faut la coopération des deux parties afin qu’elle soit efficace. Et si l’on n’obtient pas cette coopération, la question alors se pose de savoir si la force devrait aller sur place et si elle y va, que pourrait-elle faire?


           Question (interprétation de l’anglais) :Vous avez dit que votre épouse vous a fortement soutenu. Quelle a été sa réaction envers le fait que vous briguiez un nouveau mandat?


           Et qu’en est-il de la Macédoine et de la situation pour l’ensemble de la région?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) :En ce qui concerne votre première question, elle m’a dit qu’elle m’épaulerait. Je dois m’en tenir à cela.


           En ce qui concerne la deuxième question, Carl Bildt a continué de travailler étroitement dans la région avec l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), l’Union européenne et les différents gouvernements pour coordonner les efforts des uns et des autres pour que nous nous entendions sur un message unique et poursuivions nos efforts.


           En fait, hier, le Vice-Secrétaire général s’est joint à lui à Bruxelles pour une réunion. On a discuté de ces questions. Je crois que Carl Bildt va poursuivre ses efforts dans la région.


           Question(interprétation de l’anglais) :J’aimerais demander un éclaircissement. Vous avez parlé du prochain mandat de cinq ans. Vous avez dit que vous y avez réfléchi. Est-ce que vous avez discuté avec Mme Annan et votre bureau d’un mandat plus limité, plus court? Ou est-ce que vous souhaitez un plein mandat?


           Ma deuxième question porte sur votre participation au Sommet arabe? Vous savez qu’il y a une déception importante dans le monde arabe qui estime que l’Organisation des Nations Unies n’a pas suffisamment agi pour défendre les Palestiniens. Est-ce que vous estimez qu’Israël est responsable en tant que puissance occupante de ce qui se passe dans la région? Et je ne pense pas seulement aux questions économiques. Il y a une convention violée par Israël. Est-ce que vous êtes prêt à prendre une position avant de vous rendre au Sommet?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) :En ce qui concerne la première question, la procédure retenue ici a toujours été d’un mandat de cinq ans, et je crois que ceci ne changera pas à moins que les États Membres ne décident de changer la durée des mandats.


           En ce qui concerne votre deuxième question, l’attitude de l’Organisation des Nations Unies a toujours été claire. Le Conseil et moi-même avons tout mis en œuvre pour faire comprendre le message, notamment qu’il convient d’atténuer les sanctions économiques envers les Palestiniens, qu’il faut qu’il y ait un retour à la table des négociations, que la violence doit cesser et que les deux parties doivent travailler sur la base de l’Accord de Charm el-Cheikh pour que la violence cesse, et l’ONU a toujours agi sur la base des résolutions 242 (1967) et 338 (1973) du Conseil de sécurité et a recherché activement à installer la paix au Moyen-Orient. Je continuerai de rendre disponibles mes bons offices aux parties, à tous ceux concernés, pour ramener les parties à la table des négociations.


           Question :Vous avez parlé de la Macédoine. Vous en avez rencontré le représentant. Avez-vous parlé avec d’autres autorités de Skopje, le Président Rakovsky peut-être, et que déduisez-vous de la situation récente? Est-ce que c’est un danger pour la sécurité de la région?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) :Vous vous souviendrez que le Ministre des affaires étrangères de l’ex-République yougoslave de Macédoine était ici il y a une semaine, il y a 10 jours. Il m’a rencontré. Je me suis longuement entretenu avec lui et d’autres dirigeants de l’Europe, y compris le Secrétaire général de l’OTAN. Et comme je l’ai fait comprendre dans une de mes réponses précédentes, si nous ne maîtrisons pas la situation, elle risque d’avoir une incidence sur la stabilité de la région et pourrait se répercuter sur d’autres pays d’une façon que nous ne souhaitons pas.


           Question (interprétation de l’anglais) :Nous savons que vous allez à Washington demain pour rencontrer le Président Bush et le Secrétaire Powell. On dit que vous avez de bonnes relations avec le Secrétaire d’État, M. Powell. La décision des États-Unis de verser leurs contributions et le fait qu’il y a une nouvelle administration ont-ils eu une incidence sur votre décision?


           Le Secrétaire général :Je me rendrai à Washington demain pour rencontrer le Président Bush, le Secrétaire d’État Powell et le Conseiller en matière de sécurité nationale, Condoleeza Rice. En ce qui concerne ces questions, il convient de les considérer un ensemble. De manière générale, il faut réfléchir à vos relations avec les États Membres, dans quelle mesure vous arrivez à travailler convenablement avec eux, l’appui que vous pouvez escompter, quelle sera leur coopération. Tous ces facteurs interviennent. Dès que vous aurez la certitude que vous pourrez compter sur la coopération des États Membres pour donner un sens à votre travail et pour faire en sorte que votre vie soit tolérable, à ce moment là, je pourrai réfléchir à ces questions et prendre une décision.


(La question était inaudible)


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) :Les États Membres seront très heureux.


           Question : Vous avez parlé des choses qui, d’après vous, ont été accomplies durant votre premier mandat. Pouvez-vous nous dire ce qui, selon vous, était les échecs de votre premier mandat, et quel sera, d’après vous, l’enjeu principal de votre deuxième mandat? Et pour enchaîner sur la question de Linda, pouvez-vous nous donner une idée du programme que vous avez établi en ce qui concerne vos pourparlers avec le Président Bush demain?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) :Il est toujours difficile de parler de ses propres accomplissements, mais en ce qui concerne le passif du bilan, notamment ce que nous n’avons pas pu accomplir, je voudrais dire qu’à ce stade nous aurions pu bénéficier de tout l’appui nécessaire à accorder aux opérations de maintien de la paix et que nous aurions mieux réussi en Sierra Leone, par exemple, et réussi plus vite. Mais pour cela, il faut une volonté et des ressources, et nous sommes déterminés sur la base du Rapport Brahimi à travailler avec les États Membres pour renforcer ces opérations, pour leur donner l’appui et les ressources nécessaires. J’ espère que les États Membres nous épauleront. Nous commençons à nous engager à nouveau dans le maintien de la paix. Nous ne pouvons répéter les échecs du passé. Je souhaite que les opérations soient réellement bien conçues.


           Quant à ce que je souhaite accomplir dans mon mandat suivant, je crois que cette Organisation réunit des États, et comme je l’ai déjà dit, nous avons la chance d’avoir un programme qui fait de la lutte contre la pauvreté une priorité, et le respect de l’environnement, l’éducation des filles et les opérations de maintien de la paix que j’ai déjà citées sont également importants, mais pour la première fois depuis longtemps, nous avons un programme clair établi par les États Membres que je souhaite appliquer activement avec les États Membres, car eux aussi doivent faire leur part de travail.


           En ce qui concerne le programme de demain, il y a de nombreuses questions qui nous préoccupent. Du Moyen-Orient aux Balkans, en passant par le Congo, nous allons discuter des relations avec l’Organisation des Nations Unies, y compris le budget et l’accord récent sur le barème des quotes-parts, les contributions dues par les États-Unis, et je suis sûr que beaucoup d’autres questions encore seront évoquées.


           Question (interprétation de l’anglais) :On vous a fortement critiqué en ce qui concerne la discrimination au niveau de l’emploi à l’Organisation des Nations Unies, et comme vous briguez un deuxième mandat, pouvez-vous nous rendre compte de la situation en matière de recrutement et de promotion dans le système des Nations Unies, surtout le recrutement d’Africains, et également pouvez-vous nous parler de la discrimination envers les femmes, et puisque vous briguez un deuxième mandat, avec le concours du Département de l’information, pouvez-vous nous donner des informations sur le recrutement en Afrique?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Le système de recrutement et de promotion est très ouvert et très transparent. J’ai essayé d’améliorer la situation en matière de parité des sexes et d’attirer le plus grand nombre de femmes possible. Je crois que nous avons réussi au cours des dernières années. Je ne dirais pas que la situation est parfaite; au contraire il reste encore du travail à faire et nous comptons poursuivre sur cette voie.


           En réponse à une question précédente, j’ai dit que nous souhaitons faire le recrutement sur une assise géographique aussi large que possible, et nous avons des concours par lesquels les gens peuvent entrer. Nous avons évidemment une procédure transparente de promotion, dans lequel les différents comités examinent les dossiers et font des recommandations. Je sais qu’il y a des accusations de racisme au Secrétariat en ce qui concerne le recrutement et la promotion. L’Assemblée générale nous a demandé d’étudier la situation en 1999, et nous avons créé un groupe à cette fin, et il n’a toutefois pas fait les accusations que vous semblez sous-entendre ici. Mais, s’il y a des problèmes de discrimination raciale ou sexuelle ou de harcèlement, nous agirons fermement et sans pitié.


           Question (interprétation de l’anglais) : Monsieur le Secrétaire général, pour les cinq années à venir, vous avez parlé d’un nombre de questions. Mais nous n’avez pas parlé de la réforme du Conseil de sécurité. Comment la situation va t-elle évoluer au cours des cinq prochaines années? Pour quels résultats? Et que fera t-on pour apaiser les craintes de certaines nations en matière de représentation équitable au sein de cet organe?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Si je n’ai pas mentionné cette question, ce n’est pas parce que je ne pensais pas qu’elle est importante, mais parce que c’est quelque chose que les États Membres auront eux-mêmes à régler. Mais j’appuie la réforme du Conseil de sécurité, et j’espère que les États Membres pourront faire avancer ce dossier. J’espère pour ma part que la réforme du Conseil de sécurité – ou le manque de réforme – ne sera pas éternelle. J’espère que les États Membres pourront s’organiser pour venir à bout de cette question une fois pour toutes dans les deux années à venir. Je ferai tout ce je pourrai pour les encourager et les appuyer, mais la décision leur appartient.


           Question  : La critique que les Africains vous font le plus souvent c’est que le continent africain reste le grand oublié. Même s’il y a des tas de réunions du Conseil de sécurité, ça ne débouche jamais sur rien. Vous allez avoir cinq ans encore pour faire en sorte, j’espère, que le Groupe africain et les Africains soient plus écoutés. Comment allez-vous vous y prendre? Et deuxièmement, avez-vous pris goût au pouvoir?


           Le Secrétaire général : S’agissant de la première question, laissez-moi dire que je crois que les Africains se rendent compte aujourd’hui que les Nations Unies et le Conseil de sécurité s’impliquent davantage dans les problèmes africains. Aujourd’hui il y a quatre opérations de maintien de la paix en Afrique. Après l’expérience de la Somalie, les Nations Unies ont presque quitté l’Afrique en ce qui concerne les opérations de maintien de la paix. Et sur les plans économique et social et dans la lutte contre le sida, les Nations Unies sont là avec eux. On travaille avec eux, on pousse les sociétés pharmaceutiques à aider, en collaboration avec la société civile et les pays donateurs. Donc l’Afrique n’est pas oubliée. J’espère que d’ici cinq ans, ils vont se rendre compte que les Nations Unies sont là pour eux, et que c’est leur Organisation.


           En ce qui concerne la deuxième question, je vais répondre en anglais.


(l’orateur poursuit en anglais)


           Vous n’avez peut-être pas compris ce qui a été dit : «Avez-vous pris au pouvoir?» Tout d’abord, je ne sais pas si j’ai tant de pouvoir dans cette acception. Et quand je pense au pouvoir et à ceux qui l’exercent, je pense souvent au Pape Jean-Paul II, qui a dit un jour que ceux qui sont au pouvoir lui rappellent ses années où il était jeune évêque en Italie, et qu’il regardait les garçons jouer au football sur la cour. Lorsque le ballon était bien gonflé, ils s’empressaient de tirer sur le ballon comme s’ils en avaient le droit. Mais quand le ballon était dégonflé, ils perdaient tout intérêt et s’en allaient. Il a dit que c’était le lot de tous ceux qui étaient au pouvoir. Ne soyons donc pas envieux. Par conséquent, je suis très réaliste quant à ces positions. Le pouvoir ne m’est pas monté à la tête, si c’est cela que vous sous-entendiez.


           Question (interprétation de l’anglais) : En ce qui concerne votre récente visite en Asie du Sud, il y a la question de l’Afghanistan, mais également celle du Cachemire, vieille de 53 ans. Vous avez même refusé de rencontrer un groupe de ressortissants du Cachemire durant votre visite. Pourquoi? Deuxièmement, lors de votre rencontre avec les représentants des Taliban, avez-vous eu l’impression que ce problème peut être résolu? Sont-ils prêts à faire quelque chose en ce qui concerne la question d’Osama à l’avenir?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : S’agissant de votre première question, j’ai eu de nombreux pourparlers au sujet des relations entre l’Inde et le Pakistan. Nous avons discuté également du Cachemire. J’ai encouragé les deux pays à se rencontrer pour régler aplanir leurs divergences et régler leurs différends à la table des négociations – dans l’esprit de Lahore et de Simla pour ainsi dire – et de se concentrer sur un rapprochement. On a parlé des résolutions de l’ONU, qui sont importantes car une fois que les résolutions sont adoptées, elles existent mais elles ne s’appliquent pas d’elles-mêmes. En dernière analyse ce sont les parties qui doivent se retrouver pour parler et régler le problème.


           J’ai fait une visite éclair. Elle était très chargée; ceux qui m’accompagnaient le savent. Je n’ai pas pu rencontrer tous ceux qui souhaitaient me rencontrer. Il y a beaucoup de personnes que je n’ai pas pu rencontrer.


           En ce qui concerne la question des Taliban, je n’ai pas évoqué la question de leur représentation à l’ONU ou le fait de savoir s’ils pourront siéger ici. C’est une question qui relève des États Membres. J’ai leur ai parlé de la destruction des statues des Bouddhas, qui appartiennent au patrimoine de l’humanité; et qu’ils n’auraient pas dû les détruire. J’ai également parlé de la situation humanitaire en Afghanistan et de la situation des réfugiés à la frontière avec le Pakistan. J’ai discuté avec le Chef de l’exécutif pakistanais des mesures à prendre pour protéger et aider les réfugiés au Pakistan alors que nous prenons des mesures pour venir en aide à ceux qui sont en Afghanistan.


           En ce qui concerne la question de la destruction des statues, je dois dire que j’ai été surpris de la manière dont les Taliban la voient. Ils étaient sûrs de la justesse de leur décision. Je crois qu’il s’agit d’une grande tragédie et c’est une grande honte qu’ils aient détruit les statues à Bamiyan.


           Question (interprétation de l’anglais) : Avez-vous parlez

de la question d’Osama?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Cette question fut évoquée, mais je ne vais pas entrer dans les

détails.


           Question (interprétation de l’anglais) : Vous avez mentionné de la possibilité que, même si les Israéliens étaient opposés à une présence d’observateurs dans les territoires, si les Nations Unies adoptaient une résolution il faudra alors commencer un processus qui serve à quelque chose. Est-ce que vous pourriez être plus précis? Si je ne m’abuse, en décembre, lorsqu’il y a eu une première proposition et un vote sur le corps de la paix, vous avez dit que, étant la position israélienne, il n’y avait pas d’espoir que quelqu’un puisse y aller.


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je ne suis pas certain d’avoir bien compris votre question. Ce que j’ai dit tout à l’heure c’était que le Conseil était encore en train d’examiner la question de savoir s’il allait exiger que des observateurs soient envoyés ou non. Je ne sais pas quel sera le résultat final de leurs discussions.


           Question (interprétation de l’anglais) : Mais alors, s’il devait y avoir une résolution à adopter, il faudrait encore discuter de la question de savoir comment y aller et que faire?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Si le Conseil devait décider que des observateurs doivent être déployés, alors la question se posera de savoir comment on fait pour les faire venir? Quelle sera l’attitude des deux parties? Quelle sera l’attitude des pays fournisseurs de contingents? etc. Mais nous n’en sommes pas encore là, car je n’ai pas vu la résolution.


           Question (interprétation de l’anglais) : Même si Israël est contre?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je crois avoir répondu à cette question : il faut la coopération des deux parties, et sans cette coopération il y a vraiment une difficulté.


           Question (interprétation de l’anglais) : Je me rappelle que vous avez mentionné il y a deux ans le fait qu’il faudrait imposer des restrictions au pouvoir de veto des cinq membres permanents du Conseil de sécurité et que le pouvoir le Conseil soit élargi. Est-ce que vous soutenez toujours cette position?


           D’autre part, est-ce que vous envisagez de vous rendre en Corée du Nord? Quel rôle pensez-vous pouvoir jouer dans ce pays, en dehors de l’aspect humanitaire?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je commencerai par la deuxième question. Non, je n’ai aucun projet de me rendre en Corée du Nord avant la fin de cette année.


           En ce qui concerne votre première question, je dirai que l’idée d’interdire le recours au veto a été examinée dans le cadre de la réforme générale et, là encore, il appartient aux États Membres d’en décider. La décision ne m’appartient pas.


           Question (interprétation de l’anglais)  : Mon collègue de l’autre pays (inaudible) au Conseil de sécurité a déjà posé une question. Il me reste donc une seule question à poser. D’une façon générale, quel serait votre niveau d’optimisme en ce qui concerne le processus de paix au Moyen-Orient? Est-ce que votre optimisme a augmenté ou diminué depuis votre entretien avec Sharon?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Est-ce que vous auriez une boule de cristal à me prêter? Je voudrais dire qu’évidemment, il y a un nouveau Gouvernement en Israël et une nouvelle Administration à Washington. Le nouveau Gouvernement israélien essaie également de définir sa politique et ses orientations. Le Président Arafat a indiqué qu’il était disposé à retourner à la table de négociations là où elles s’étaient arrêtées à Taba. Le Premier Ministre Sharon a indiqué qu’il fallait se baser sur les accords signés. Il y a donc un décalage qui devra être résolu lorsque les deux parties reviendront à la table de négociations. Mais l’important est que l’un et l’autre discutent du processus politique et de la reprise des pourparlers. Dans quel délai ils reviendront à la table de négociations? Je ne peux le dire. Bien que je sois en contact avec les deux parties, il est encore un peu tôt pour dire ce qu’il en sera. Est-ce que cela sera plus facile? Est-ce que le processus va s’accélérer? C’est difficile à dire. Mais j’attendrai qu’ils reviennent à la table de négociations et de voir comment ils relanceront les négociations avant de répondre à votre question.


           Question (interprétation de l’anglais) : Une autre question au sujet du Moyen-Orient. L’ONU semble revenir sur l’échiquier du Moyen-Orient et les Israéliens semblent de plus en plus disposés à ce que l’ONU joue un rôle. Est-ce que le Premier Ministre Sharon vous a dit quel rôle il envisageait pour l’ONU? Avez-vous l’impression qu’ils voulaient vraiment reprendre les pourparlers de paix au point où ils s’étaient arrêtés?

           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Oui, effectivement, ils collaborent avec nous de même que nous collaborons avec le Président Arafat et l’autre partie. Nous n’avons pas défini le rôle qu’il souhaiterait voir l’ONU jouer ni n’en avons discuté. Mais il est informé que mes bons offices leur sont offerts, comme ils l’ont été dans le passé, et il a indiqué sa volonté de travailler avec moi sur la question du Moyen-Orient.


           Voulez-vous me rappeler votre deuxième question?


           Question (interprétation de l’anglais) : Est-ce que M. Sharon a exprimé clairement son intention de relancer les pourparlers là où ils s’étaient arrêtés?


Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Non pas là où ils s’étaient arrêtés. Je l’ai mentionné auparavant. Et c’est là qu’il existe un certain désaccord. Permettez-moi d’être clair : avant que le Premier Ministre Barak quitte ses fonctions, il m’a écrit ainsi qu’à d’autres dirigeants dans le monde pour affirmer que les propositions qui avaient été faites à Taba n’étaient plus valables. On se rappellera que le Premier Ministre Sharon estime qu’il faut reprendre les négociations sur la base des accords qui ont été signés, c’est à dire qu’il existe un désaccord entre la conception qu’il a du point où les pourparlers devraient reprendre et la conception du Président Arafat qui souhaite reprendre à partir de Taba, parce qu’à Taba le document n’a pas été signé.


           Question (interprétation de l’anglais) : (inaudible) Oslo, par exemple?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) :

Oslo, par exemple, ou Wye – je crois qu’il y avait un document.


           Question (interprétation de l’anglais) : Est-ce que la question de l’Iraq sera résolue dans cinq ans?


           Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je l’espère, je l’espère. Vous devrez m’aider. Nous devons tous travailler pour résoudre la question. Je l’espère.


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