En cours au Siège de l'ONU

DH/G/1380

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND LE MINISTRE DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE L'HOMME DU PAKISTAN

23/03/2001
Communiqué de presse
DH/G/1380


LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND LE MINISTRE DE LA JUSTICE

ET DES DROITS DE L'HOMME DU PAKISTAN


Elle poursuit son débat sur les questions relatives au racisme,

à la discrimination raciale et à toutes les formes de discrimination


Genève, 23 mars -- La Commission des droits de l'homme a entendu cet après-midi le Ministre de la justice et des droits de l'homme du Pakistan, Mme Shahida Jamil, qui a déclaré que le souci de l'équité entre les sexes a été le premier signe fort envoyé par le Gouvernement du Pakistan qui a accédé au pouvoir le

12 octobre 1999.


Abordant la situation en Afghanistan, la Ministre pakistanaise a notamment déclaré que pour promouvoir l'objectif de paix de la communauté internationale, pour éradiquer le terrorisme, pour faire face aux fléaux de la drogue et des armes et pour mettre fin aux souffrances du peuple afghan, il est indispensable d'engager un dialogue avec le Gouvernement des Taliban en place à Kaboul.


Poursuivant son débat sur le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et de l'intolérance qu'y est associée, la Commission a entendu les représentants des pays suivants : Costa Rica, Cuba, Inde, Pologne, Arabie saoudite, Qatar, Kenya, Suisse, Iran, Saint-Marin, Jordanie, Autriche, Saint-Siège, Égypte, Érythrée, Koweït, Sri Lanka et Turquie.  Plusieurs représentants ont souligné que la Conférence mondiale contre le racisme de Durban devait  être l'occasion de défendre les valeurs universelles contre les nouvelles formes de racisme et de discrimination raciale.  Le Kenya, au nom du Groupe africain, a insisté pour que la Conférence prenne pour point de départ la reconnaissance des injustices historiques comme l'esclavage et le colonialisme.


La Commission a également entendu les interventions de représentants de la Banque mondiale, du Programme conjoint des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) et de la Fédération Internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge.


L'Inde et le Pakistan ont exercé leur droit de réponse.


La prochaine séance de la Commission, lundi à 9 heures, sera consacrée à un débat spécial sur la tolérance et le respect.  La question sera examinée sous ses aspects religieux, dans ses rapports avec la liberté d'expression, sous l'angle de l'intégration sociale et de l'éducation, du point de vue des droits de l'enfant et au regard des problèmes liés aux migrations, aux réfugiés, et au trafic des personnes.  La journée sera organisée en quatre séances de discussion avec la participation de personnalités éminentes.


Déclaration ministérielle au titre du débat général


MME SHAHIDA JAMIL, Ministre de la justice et des droits de l'homme du Pakistan, a rappelé que le souci de l'équité entre les sexes a été le premier signe fort envoyé par le Gouvernement du Général Pervaiz Musharaff après son accession au pouvoir le 12 octobre 1999.  Pour la première fois dans l'histoire du pays, sept femmes ont obtenu des postes de décision au sein du Conseil de sécurité nationale, du Cabinet fédéral et des cabinets provinciaux.  Une Commission nationale de la condition de la femme a été établie en avril 2000 et la loi sur la citoyenneté a été amendée afin de permettre aux femmes pakistanaises mariées à des étrangers de transmettre à leurs enfants leur nationalité  pakistanaise.  Avec la coopération du système judiciaire, le gouvernement a créé, près des installations pénitentiaires, quatre tribunaux chargés d'instruire des procès équitables au bénéfice des personnes détenues sans avoir encore été jugées.  La Ministre a par ailleurs rappelé que le gouvernement de son pays avait promulgué le décret sur la justice juvénile abolissant la peine de mort pour les mineurs de moins de 18 ans.  La Ministre pakistanaise a attiré l'attention sur le manque de moyens de la police de son pays et l'inefficacité de la justice, de sorte que la criminalité a augmenté et s'est modernisée en accédant à des armes toujours plus sophistiquées.  La loi et l'ordre se sont détériorées à tel point que la voie  était ouverte pour l'ultime prédateur de la société civile : le terrorisme.  La réforme de la police est donc pour le Pakistan une priorité  absolue et diverses mesures en ce sens sont en cours de réalisation, a déclaré Mme Jamil.


La Ministre a souligné qu'une croissance économique durable reste une condition préalable pour la prospérité et la paix du pays.  Cela exigera une restructuration de la lourde dette extérieure du pays ainsi que la promotion d'un accès plus juste et plus libre du Pakistan aux marchés de ses partenaires des pays développés.  Les problèmes socioéconomiques du Pakistan ont sans aucun doute été aggravés par les retombées du conflit prolongé qui affecte l'Afghanistan.  Le Pakistan continue en effet d'accueillir quelque 2 millions de réfugiés afghans, suite à quoi le Pakistan a assisté à une hausse de l'extrémisme religieux des deux côtés de la frontière et au sein même de la société pakistanaise.  Cette situation a donné l'occasion aux adversaires du Pakistan de recourir encore plus intensément au terrorisme et à diffamer le pays auprès de la communauté internationale.  Plus que tout autre pays, le Pakistan s'est efforcé de modérer et d'infléchir l'attitude des Taliban, notamment durant la regrettable affaire de la destruction des statues bouddhistes.  Mais l'Afghanistan est notre voisin et les Taliban sont une réalité puisqu'ils contrôlent plus de 90% du pays.  Le Pakistan estime que pour promouvoir l'objectif de paix de la communauté internationale, pour éradiquer le terrorisme, pour faire face aux fléaux de la drogue et des armes ainsi que pour mettre fin aux souffrances du peuple afghan, il est indispensable d'engager un dialogue avec le gouvernement taliban en place à Kaboul.


En dépit de la menace croissante que l'Inde fait peser sur la paix et la stabilité dans la région, le Pakistan a réduit ses dépenses de défense alors que l'Inde les a accrues de 50% ces deux dernières années.  Il est regrettable que l'Inde et le Pakistan n'aient jamais été capables de résoudre bilatéralement le moindre différend majeur.  Il est donc évident que la communauté internationale doit s'engager de manière constructive auprès de ces deux pays.  Les droits inaliénables du peuple cachemirien ne sauraient être sacrifiés par l'utilisation brutale et massive de la force militaire.  La Ministre a par ailleurs estimé que les frustrations et les griefs de la direction palestinienne en ce qui concerne l'application du processus de paix au Moyen-Orient sont bien fondées.  Il est donc impératif pour le nouveau Gouvernement israélien de relancer ce processus avec la direction palestinienne et sans conditions préalables.


Suite du débat sur le racisme et la discrimination raciale


M. CHRISTIAN GUILLERMO (Costa Rica) a affirmé que le racisme et les doctrines politiques qui prônent une quelconque supériorité d'une race sur une autre, sont absurdes et inacceptables.  Le Costa Rica, a-t-il poursuivi, se considère comme une société multiculturelle et multiethnique et attache une très grande importance à la réussite de la Conférence mondiale contre le racisme de Durban pour la défense des valeurs universelles contre les nouvelles formes de racisme et de discrimination raciale.  De ce fait, a-t-il souligné en reprenant les termes de la Déclaration de Santiago, «la nature multiraciale, multiethnique et multiculturelle de nos sociétés peuvent constituer une contribution à l'harmonie entre les peuples et à l'édification d'une culture du respect réciproque et d'un système politique démocratique».


M. RODOLFO REYES RODRÍGUEZ (Cuba) a souligné que c'est dans les pays développés que se manifestent de la manière la plus grave et la plus subtile les nouvelles formes de racisme, de discrimination raciale et de xénophobie.  En Europe occidentale, en Europe orientale et en Amérique du Nord, les idées d'extrême droite et les idées néofascistes gagnent du terrain dans l'opinion publique.  Il existe même des pays qui facilitent le financement des groupements politiques à caractère raciste en prélevant sur les ressources du budget de l'État.  Parmi les facteurs qui génèrent et aggravent les manifestations de racisme, figurent l'inégale répartition des richesses à l'intérieur des pays et le fossé qui ne cesse de s'élargir entre le Nord et le Sud ‑ le tout aggravé par la libéralisation à outrance des marchés et par la mondialisation de l'économie sur la base de principes individualistes.  À la discrimination contre les minorités raciales et ethniques, s'ajoute la discrimination et l'intolérance contre les migrants convertis en boucs émissaires des maux qui affectent les sociétés développées.


Aucun pays mieux que les États-Unis ne témoigne de façon aussi éloquente de l'institutionnalisation systématique du racisme touchant tous les aspects de la vie politique, économique, sociale et culturelle.  Lorsque Pendant longtemps, jusqu'à il y a trois décennies, États-Unis ont nié à la population de descendance africaine la reconnaissance formelle de ses droits civils et politiques.  L'assassinat, par des moyens judiciaires, du militant des droits civils Shaka Sankofa, condamné et exécuté injustement, illustre la manipulation de la justice pour des motifs racistes aux États-Unis.  Aujourd'hui, dans un État comme la Pennsylvanie dont seulement 9% de la population est afro-américaine, 62% des condamnés à mort sont de race noire.  La population hispanique des États-Unis est venue grossir le flot des groupes de populations soumis à la marginalisation et à la ségrégation.  La Commission devrait donc lancer un appel urgent au Gouvernement des États-Unis afin qu'il mette un terme au massacre et au racisme d'État qui prévaut dans ce pays.  Le représentant cubain a par ailleurs attiré l'attention de la Commission sur la situation dramatique de la minorité rom dans divers pays d'Europe, en particulier en République tchèque.


MME SAVITRI KUNADI (Inde) a souhaité que la Conférence mondiale contre le racisme soit constructive et évite de sombrer dans les récrimination et l'anathème.  À cet égard, soulignant la nécessité de confronter le passé, elle a mis en garde contre une contemplation du passé qui ne servirait qu'à rouvrir des blessures anciennes et laisser peu de temps pour l'examen des graves manifestations du racisme actuel.  Elle a en outre attiré l'attention sur les causes du racisme que sont les disparités économiques criantes entre les diverses parties du monde; le fanatisme et la violence au nom de valeurs religieuses détournées; l'absence de démocratie; les idées politiques stigmatisant les étrangers comme des ennemis ou comme une menace pour la prospérité, la culture ou l'identité locales; l'utilisation des technologies modernes pour la diffusion de la haine raciale.


Mme Kunadi a exprimé l'opposition de son pays à élargir le champ de la Conférence à d'autres discriminations que celles liées au racisme.  Elle a en outre souhaité que la Conférence appelle les États à offrir des solutions et des recours pour les victimes du racisme et les encourage à s'engager dans des approches de discrimination positive en faveur des segments de leur population les plus défavorisés.  Elle a souligné l'importance d'accorder une attention particulière aux groupes vulnérables tels que les femmes, les enfants, les minorités et les réfugiés.  Rappelant la nécessité de changer les attitudes sociales, elle a souhaité que la Conférence porte son attention sur le rôle de l'éducation et de l'information.


M. KRZYSZTOF JAKUBOWSKI (Pologne) a affirmé que son pays s'associait à la déclaration faite ce matin par le représentant de la Suède au nom de l'Union européenne.  La Pologne est pleinement engagée dans les efforts pour faire de la Conférence mondiale contre le racisme une réussite.  La Conférence devrait s'attaquer aux manifestations locales du racisme et renforcer la protection des minorités ainsi que la protection de droits de l'homme, comme il ressort des résultats d'un séminaire régional organisé par le Gouvernement polonais en coopération avec le Haut Commissariat aux droits de l'homme.  La Pologne, a-t-il poursuivi, attache une grande importance à l'idéal d'une société civile ouverte et fera de son mieux pour améliorer les pratiques administratives et mettre en place des programmes d'éducation spéciaux par le biais d'initiatives gouvernementales locales ainsi que par ceux organisé par les Organisations non gouvernementales.


M. ABDULWAHAB ATTAR (Arabie saoudite) a souligné que son gouvernement accorde une très grande importance à la Conférence mondiale contre le racisme qui doit se tenir à Durban dans quelques mois.  Il a indiqué que son pays a participé aux travaux préparatoires de cette Conférence dans l'espoir que la communauté internationale parvienne à adopter par consensus une déclaration et un programme d'action reflétant les préoccupations et points de vue de tous les États ainsi que les préoccupations des groupes régionaux telles qu'elles se dégagent notamment des


déclarations et plans d'action adoptés à Téhéran, Dakar, Santiago-du-Chili et Strasbourg.  L'Arabie saoudite est sérieusement préoccupé par les manifestations fréquentes, dans certaines sociétés, de discrimination à l'encontre des musulmans ainsi que par les tentatives d'associer l'Islam à certains phénomènes tels que le terrorisme et l'intolérance.


M. KHALID J. ALTHANI (Qatar) a indiqué que la religion musulmane a combattu le racisme sous toutes ses formes et mis un terme à la discrimination raciale.  Il a en outre insisté sur le rôle fondamental des médias dans la sensibilisation de la société à cette question ainsi que l'importance de l'éducation pour lutter contre l'ignorance et les préjugés qui nourrissent la discrimination raciale.  La Conférence de Durban doit aboutir à des résultats afin de démontrer l'engagement sincère de la communauté internationale toute entière contre le fléau du racisme, a-t-il souligné.


MME A. C. MOHAMED (Kenya, au nom du Groupe africain) s'est félicitée de la tenue de la Conférence mondiale contre le racisme et a exprimé l'espoir qu'elle aboutira à un Plan d'action contenant des mesures spécifiques pour promouvoir les nobles principes d'égalité, de tolérance et de non-discrimination.  À cet égard, il est regrettable que le groupe de travail intersession avance aussi lentement dans ses travaux.  La Conférence, estime Mme Mohamed, devrait prendre pour point de départ la reconnaissance des injustices historiques comme l'esclavage et le colonialisme, et ceci pour cicatriser les blessures du passé et permettre que s'ouvre pour tous un nouvel avenir.  La Conférence devrait prendre en compte le point de vue des victimes et s'attacher plus particulièrement aux efforts pour que les violations ne se répètent plus.


Le Groupe africain estime que la Conférence devrait condamner les nouvelles formes de racisme et porter son attention sur la question des partis politiques d'extrême droite qui jouissent d'un statut juridique, ce qui leur permet de diffuser la propagande raciste.  La Conférence devrait également être à l'origine d'un code de conduite pour les médias, qui sont parfois responsables de transmettre des stéréotypes négatifs et ainsi d'aider à la diffusion du racisme.


MME MALIKA AIT-MOHAMED PARENT (Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge) a rappelé que depuis plusieurs années déjà, le «Mouvement de Croix-Rouge et du Croissant-Rouge» oeuvre directement ou indirectement contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et toutes les formes de discrimination.  Comme cela est précisé dans la Stratégie 2010 de la Fédération, «dans un monde de plus en plus marqué par l'isolement, les tensions et la violence, la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge doivent défendre les valeurs individuelles et collectives qui incitent au respect d'autrui et à la volonté de travailler ensemble pour trouver des solutions aux problèmes communautaires».  Certaines sociétés nationales ont déjà entrepris des programmes en ce sens, notamment en lançant des actions pour lutter contre la discrimination (par exemple envers les demandeurs d'asile, les immigrants, les personnes infectées par le VIH/sida ou les personnes handicapées), pour mettre fin à la violence et pour instaurer une culture de non-violence dans le règlement des conflits intracommunautaires.  Les principaux acteurs de ces programmes sont en fait les 97 millions de volontaires qui oeuvrent au quotidien de par le monde.


M. FRANÇOIS NORDMANN (Suisse) a estimé que pour que la lutte contre le racisme ait un réel impact, il faut s'assurer de la crédibilité et de la cohérence des actions et de l'effet durable des mesures mises en oeuvre, lier les mesures de répression et de prévention, prêter attention à la façon dont sont traitées les victimes et prendre en compte les riches connaissances et l'expérience des organisations non gouvernementales.  La Suisse a mis l'accent sur l'importance de la non-discrimination en tant que principe fondamental du droit international humanitaire.  Elle s'est également prononcée en faveur de l'établissement d'institutions spécialisées indépendantes et proposé d'en étudier l'efficacité.  Le représentant suisse a souligné l'importance du rôle de l'Internet tout en se déclarant préoccupé par son rôle négatif quant à la diffusion de matériels racistes.  Le représentant a annoncé que son pays ferait des propositions à cet égard dans le cadre du Comité préparatoire de la Conférence de Durban.


Le représentant de la Suisse a par ailleurs insisté sur la protection des victimes et l'importance essentielle de l'application de la loi.  Toutes les personnes doivent avoir accès à des voies de recours efficaces et adéquats et bénéficier du droit de demander réparation pour discrimination.  Il a proposé d'introduire au plus vite les actes racistes dans le droit pénal comme délit poursuivi d'office.


M. ALI KHORRAM (République islamique de l'Iran) a déclaré que la persistance des théories raciales et de supériorité culturelle exige de prendre davantage conscience des diverses formes de racisme dans le monde contemporain et de renforcer les efforts de la part de tous les pays du monde.  Pour contrer les tentatives de domination culturelle et de civilisation il est essentiel d'accepter de manière sincère la diversité culturelle et promouvoir des efforts internationaux pour aider la compréhension mutuelle entre civilisations.  Malheureusement, les musulmans sont en train de devenir une cible d'attaques racistes et xénophobes, et par conséquent le phénomène de l'islamophobie devrait recevoir une grande attention dans notre effort collectif contre le racisme.  M. Khorram a aussi tenu à mettre en garde la Commission sur l'utilisation abusive des nouvelles technologies comme l'Internet qui sont à l'origine de la diffusion des idéologies prônant la supériorité raciale.  Or, a-t-il poursuivi, pour éradiquer le racisme il faut éliminer les doctrines de supériorité raciale.  Il a enfin réitéré le besoin urgent de promouvoir des stratégies, au niveau national et international, visant à protéger les droits économiques, sociaux et culturels des victimes du racisme.


MME FEDERICA BIGI (Saint-Marin) a souhaité que la Conférence de Durban ne soit pas un simple exercice de savoir-faire diplomatique mais une confrontation ouverte et constructive sur des questions essentielles pour tous les peuples.  Pour assurer le succès de la Conférence, il faut qu'elle indique des objectifs concrets et mesurables que les États s'engageront à mettre en oeuvre, a-t-elle estimé.  Elle a en outre mis l'accent sur le rôle fondamental et prioritaire de l'éducation et de l'engagement au niveau national et international à assurer l'accès à un système éducatif fondé sur le respect des droits de l'homme, de la diversité et de la tolérance, à apprendre aux plus jeunes à surmonter les préjugés et leur permettre la connaissance de l'histoire, de la culture et des traditions des autres peuples.  Elle a également souligné l'importance du rôle des moyens de communication de masse, au premier rang desquels l'Internet, en tant qu'instruments aussi potentiellement efficaces pour lutter contre le racisme que dangereux lorsqu'il répond des idées fondées sur la discrimination raciale.


M. SHEHAB A. MADI, (Jordanie) a affirmé que malgré les efforts, il y a aujourd'hui des manifestations de racisme et de discrimination raciale partout dans le monde.  Les nouvelles formes de racisme et discrimination raciale, notamment sous la forme d'idéologies de supériorité raciale, sont en train de surgir en abusant notamment des nouvelles technologies de communication, y compris l'Internet.  Par conséquent, la Conférence mondiale de Durban est une chance pour les États Membres de redonner vigueur à leurs engagements pour combattre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qu'y est associée.  Il est nécessaire, par conséquent, de saisir cette occasion et de fournir un effort commun et collectif pour un monde plus humain.


M. GEORG MAUTNER-MARKHOF (Autriche) a mis l'accent sur deux aspects particuliers de l'engagement de l'Autriche contre le racisme: l'éducation aux droits de l'homme et la protection des minorités.  Convaincu qu'une éducation aux droits de l'homme est le meilleur investissement pour enraciner la tolérance et le respect de l'autre, l'Autriche a mis en place des programmes spéciaux dans les écoles, pour la formation de la police et des personnels de sécurité ainsi que les professions de la justice.  L'Autriche actuelle a également mis en place un système élaboré pour protéger les minorité s, fondé sur le respect, la préservation et la promotion de la langue, de la culture et de l'identité des minorités nationales.


M. Mautner-Markhof a ensuite souhaité commenter le rapport du Rapporteur spécial sur les formes contemporaines du racisme et mis en garde contre des citations hors contexte.  S'agissant des allégations sur des activités néonazies en Autriche, il a précisé que la loi autrichienne est extrêmement sévère sur le sujet et interdit d'établir, maintenir, promouvoir ou soutenir ce genre d'activités.  En ce qui concerne les déclarations de M. Jorg Haider, il a rappelé que le Chancelier fédéral et le Ministre des affaires étrangères se sont démarqués vigoureusement de ces propos et ont mis publiquement en garde contre ce genre de jeux de mots dans un discours politique qui risque d'encourager des sentiments antisémites, racistes ou xénophobes.


M. EDGAR PENA (Saint-Siège) a estimé que, sur le chemin de Durban, la communauté internationale ne peut pas oublier le passé de ceux qui ont été victimes du racisme.  Leur faire l'honneur de la vérité permettra de dessiner un monde meilleur dans lequel chacun verra ses talents personnels et ses droits individuels appuyés par la solidarité dynamique de l'humanité.  Citant le Pape Jean-Paul II, M. Pena a affirmé que le dialogue, dans un monde marqué de tant de conflits et de violence, s'impose comme instrument fondamental et doit inspirer la vie sociale, politique, économique, culturelle et religieuse.  Le Saint-Siège souhaite en outre mettre l'accent sur le rôle stratégique de l'éducation comme un des éléments essentiels de la prévention en tant qu'instrument du plein développement de la personne humaine, du renforcement du respect des droits de l'homme et de la promotion de la compréhension, de la tolérance et de l'amitié entre les peuples.  L'engagement du Saint-Siège et de l'église catholique dans cette voie se traduit à travers l'action concrète et l'existence à travers le monde d'environ 170 000 écoles catholiques comptant plus de 42 millions d'élèves.


M. IBRAHIM SALAMA (Égypte) a noté la recrudescence de l'intolérance et de la xénophobie à  travers le monde.  La Conférence mondiale contre le racisme qui doit se tenir dans quelques mois à Durban devra se solder par la mise en place d'un mécanisme de suivi efficace des résultats de cette réunion, a-t-il estimé. 


M. Salama a par ailleurs a jugé nécessaire, pour les mois à venir, d'instaurer un dialogue constructif empreint de compréhension mutuelle entre les partisans des divers points de vue exprimés lors des réunions préparatoires régionales de Téhéran, Dakar, Santiago du Chili et Strasbourg.


M. ALFREDO SFEIR-YOUNIS (Banque mondiale) a déclaré que souvent les ressources du développement n'atteignent pas les plus pauvres, les minorités, et les segments vulnérables de la population.  Or, étant donné que la pauvreté est une violation grave des droits de l'homme, la Banque mondiale a un rôle à jouer dans la promotion d'une société de l'inclusion.  La discrimination, le racisme et la xénophobie ne sont pas simplement une question de justice dans la répartition des richesses, mais leur élimination est essentielle pour la durabilité de la paix et de la stabilité sociale partout dans le monde.  Il est donc fondamental de se concentrer tout d'abord sur la diversité qui est essentielle pour notre existence.


M. AMARE TEKLE (Érythrée) a déclaré que les anciennes et nouvelles formes de racisme et de discrimination raciale, ainsi que les théories prétendument scientifiques qui les soutiennent, se manifestent en de nombreuses régions du monde, y compris dans la Corne de l'Afrique.  Dans certains cas, a été instauré un système d'apartheid ethnique par lequel un groupe ethnique monopolise le pouvoir, établissant ainsi un système global de domination ethnique.  Dans de tels cas, il devient impossible pour les autres groupes ethniques de jouir de leurs droits de l'homme et de participer à la vie politique et économique de leur pays.  Une telle division du territoire en zones ethniques est devenue une manière d'incorporer au territoire du groupe ethnique dominant de larges zones appartenant aux groupes ethniques voisins, a déclaré M. Tekle.  Il est alors inévitable qu'un nationalisme si virulent mène à une politique étrangère agressive d'hégémonisme.  Il en résulte, a estimé M. Tekle, que le racisme, la discrimination raciale et les politiques d'exclusion ne constituent plus désormais des questions relevant des seules affaires intérieures des États.  En témoigne l'exemple de la Corne de l'Afrique où la création d'un État ethnique a été et continue d'être préjudiciable à la paix, à la sécurité, à la stabilité et aux relations de bon voisinage.


M. AISHA M-S. AL-ADSANI (Koweït) a estimé que l'égalité et la non-discrimination sont les deux faces d'une même médaille.  Il a souligné que l'Islam considère que les hommes ont tous la même âme et que le Prophète a déclaré que tous les hommes naissent égaux.  Le Koweït a renforcé les droits de l'homme dans sa législation nationale, a ratifié tous les instruments internationaux et, en particulier, a présenté régulièrement ses rapports en vertu de la Convention internationale contre toutes les formes de discrimination.  Le représentant a estimé qu'il fallait s'intéresser et lutter contre la discrimination non seulement en temps de paix mais aussi en temps de guerre.  À cet égard il a insisté sur la nécessité de protéger les prisonniers de guerre contre la discrimination et préconisé l'intensification des efforts pour qu'ils soient libérés et rendus à leurs pays.


M. PRASAD KARIYAWASAM (Sri Lanka) a souhaité que les éléments de la Déclaration de Téhéran figurent dans le document final de la Conférence de Durban contre le racisme.  En dépit des efforts déployés par la communauté internationale, des formes de racisme persistent et constituent une menace grave pour la démocratie, les droits de l'homme, le bien-être des peuples et la sécurité internationale.  Il faut promouvoir la tolérance et les approches pluralistes, a déclaré le représentant sri-lankais, qui souligné l'importance du renforcement des


arrangements internationaux visant à éliminer la discrimination raciale et à renforcer l'égalité, la justice sociale et la dignité humaine.  Le pays continuera de s'opposer à la propagande raciste et à oeuvrer à la promotion d'une culture de paix.  M. Kariyawasam a indiqué que son pays accordait la priorité aux efforts visant à favoriser des relations ethniques harmonieuses en adoptant une nouvelle approche au concept de la nation englobant toutes les communautés ethniques.


M. MURAT SUNGAR (Turquie) a souligné que la communauté internationale est confrontée à de nouvelles formes d'exclusion, de racisme et de violence.  Ces formes contemporaines de racisme représentent une menace majeure pour le maintien de relations pacifiques et amicales entre les nations ainsi que pour la paix et l'harmonie entre les peuples.  Aussi, est-il plus nécessaire que jamais de combattre toutes les formes de discrimination.  La résurgence du néofascisme et du néonazisme, imputable à la réapparition de partis et mouvements d'extrême droite en particulier dans les sociétés multiculturelles, doit être combattue par la communauté internationale en ayant recours à la coopération et à la solidarité.  M. Sungar a fait part de la profonde préoccupation de son pays face  à l'expansion du racisme et de la xénophobie, en particulier dans les sociétés occidentales.  Il a souligné que les communautés migrantes sont les principales cibles de la discrimination et de l'intolérance.  Il ne faut pas oublier que le racisme a toujours été à la base des crimes contre l'humanité et notamment du nettoyage ethnique, a rappelé le représentant turc.  Il a précisé que la Turquie a entamé le processus de ratification de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.


M. KIM YONG HO (République populaire démocratique de Corée ) a estimé que le racisme de nos jours ne se manifeste pas seulement dans les relations entre les nations et les groupes ethniques ou religieux mais aussi dans les aspects politique, économiques, culturels et autres de la vie sociale.  Les nations les moins développées ont souvent été l'objet de discrimination et d'exploitation de la part des nations développées.  La différence de développement elle-même est le résultat de politiques discriminatoires et de pratiques racistes par des pays ou des groupes racistes.  Le représentant a en outre évoqué le peuple Coréen qui a été victime d'une des plus extrême discrimination raciale dans le passé et encore aujourd'hui.  Il a rappelé qu'il a subit pendant plus de 40 ans la domination coloniale du Japon pendant laquelle le peuple coréen a été privé de ses droits culturels.  Une sincère reconnaissance par l'agresseur de ces graves souffrances et préjudices qui ne peuvent pas être matériellement réparés, apporterait au moins l'espoir que de tels actes ne se répéteront pas.  Or le Japon, loin d'accepter ses responsabilités, déforme l'histoire et cherche à cacher son passé criminel, a déclaré M. Kim.  De même, les résidents coréens au Japon sont victimes de violences fréquentes, a précisé le représentant qui a en outre fustigé la discrimination contre son peuple par l'Occident par le biais des embargos et des menaces du seul fait qu'il s'accroche à son idéologie juste et idéale.


MME MIRIAM MALUWA (Programme conjoint des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA) a déclaré qu'il y a aujourd'hui 33 millions de malades de sida dans le monde, ce qui est en train de devenir une crise sociale à large échelle.  Mais lorsqu'on regarde de près on remarque une claire relation entre la discrimination et le sida car cette maladie touche d'abord ceux qui sont déjà  victimes de discriminations, notamment les femmes, les pauvres, les personnes appartenant à des minorités, les populations autochtones, les migrants, les immigrés et les réfugiés.  La discrimination des individus déjà infectés par les virus accroît


l'impact négatif de l'épidémie.  Il est par conséquent nécessaire que la Conférence contre le racisme réponde aux questions suivantes: tout d'abord, les personnes plus touchées par le virus se trouvent dans les pays en voie de développement; deuxièmement, les thérapies nécessaires sont inaccessibles pour 95% de la population infectée dans les pays en voie de développement; et enfin, que la majorité des personnes infectées dans ces pays sont des personnes de couleur.  La discrimination raciale dans des importants domaines de la vie publique, comme par exemple l'éducation, la santé et l'emploi, a-t-elle conclu, peut augmenter de manière disproportionnée la vulnérabilité des individus à cette infection.


Droit de réponse


Le représentant de l'Inde a répondu à la déclaration faite cet après-midi par le Ministre de la justice et des droits de l'homme du Pakistan en soulignant que personne ne s'étonne plus de la sempiternelle propagande du Pakistan contre l'Inde au sein de cette Commission.  Le régime militaire pakistanais a brusquement mis un terme à la démocratie dans ce pays, a déclaré le représentant indien.  Les appels de l'Inde à la paix n'ont pas été entendus par le Pakistan et en réponse à la visite historique de hauts responsables indiens au Pakistan, l'Inde a reçu les attaques du Pakistan dans la région indienne du Jammu-et-Cachemire, sur les collines de Kargill.


Le représentant du Pakistan a regretté que l'Inde cherche à déformer la réalité au Jammu-et-Cachemire.  L'Inde, a-t-il dit, tente de s'immiscer dans les affaires intérieures du Pakistan.  Il a souligné que le Pakistan, en soulevant la question du Jammu-et-Cachemire, ne s'immisce pas dans les affaires internes de l'Inde puisque le Jammu-et-Cachemire n'a jamais fait partie de l'Inde étant donné qu'au titre d'une ré solution du Conseil de sécurité il s'agit d'un territoire contesté.  Le Pakistan s'inquiète de l'apparition en Inde d'un parti intégriste parvenu au pouvoir et s'inquiète également de la discrimination dont sont victimes les musulmans en Inde.


Le représentant de l'Inde, en réponse au représentant du Pakistan, a indiqué que comme d'autres pays, l'Inde a également ses problèmes mais que ceux-ci sont traités dans le cadre du système démocratique.  Le représentant indien a ajouté  que le Pakistan aussi avait ses problèmes mais le problème avec le Pakistan, c'est qu'il a un système militaire non représentatif et mal outillé  pour faire face à ces problèmes.


Le représentant du Pakistan a suggéré que l'Inde accepte une visite d'un rapporteur spécial au Jammu-et-Cachemire ou d'une commission d'enquête afin de laver les accusations qui pèsent sur elle.  S'agissant de la propagande indienne concernant le terrorisme, le représentant pakistanais a rappelé que la population cachemirienne est soumise à des punitions collectives, ce qui est un crime contre l'humanité et contraire aux conventions de Genève.  Plutôt que de fustiger des combattants de la liberté en les qualifiant de terroristes, l'Inde devrait s'abstenir de tels crimes, a-t-il dit.


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