LA DELEGATION D’OUZBEKISTAN REFUTE LES INTERPRETATIONS FORMULEES DANS LE CADRE DU COMITE DES DROITS DE L’HOMME SUR LE DEPLACEMENT MASSIF DE TADJIKS
Communiqué de presse DH/303 |
Comité des droits de l'homme
Soixante et onzième session
1910e séance - matin
LA DELEGATION D’OUZBEKISTAN REFUTE LES INTERPRETATIONS FORMULEES DANS LE CADRE DU COMITE DES DROITS DE L’HOMME SUR LE DEPLACEMENT MASSIF DE TADJIKS
Elle demande que soit soigneusement examinée
la fiabilité des informations provenant de sources extérieures
Le chef de la délégation ouzbèke a démenti ce matin devant le Comité des droits de l’homme qui examinait son rapport initial, les commentaires et les interprétations concernant le déplacement massif de Tadjiks. Il a indiqué que l’opération portait sur 1 333 personnes et qu’elle se justifiait par les caractéristiques de leur région d’origine, région de haute montagne, difficile d’accès et dangereuse notamment en raison de risques d’éboulement et de la présence de trafiquants et bandes de brigands. Il a décrit les mesures d’accompagnement prises par le Gouvernement ouzbek: déblocage de crédits pour la création d’infrastructures dans la région d’accueil, aide financière et matérielle aux personnes déplacées et création d’une commission de suivi.
Le représentant de l’Ouzbékistan a indiqué que son gouvernement était catégoriquement opposé à la torture et que tout fonctionnaire responsable d’un tel acte était immédiatement sanctionné. Il a demandé aux membres du Comité de vérifier la fiabilité des informations fournies par leurs différentes sources. Il a reconnu que l’application de la législation garantissant le respect des droits de l’homme dans son pays avait pris du retard et a demandé que le Comité prenne en compte le peu de temps dont le Gouvernement ouzbek a disposé au regard de l’ampleur de la tâche.
Nous savons quelles sont les difficultés qui accompagnent le passage d’un régime autoritaire à un autre accordant une large place à la protection des droits de l’homme, a-t-il été dit lors des commentaires des experts. Certains d’entre eux ont formulé des hypothèses sur les raisons pouvant expliquer les divergences profondes entre les informations fournies par la délégation ouzbèke et les nombreuses allégations de sources extérieures portant sur des violations des droits de l’homme en Ouzbékistan. Un expert a demandé si ces violations ne résultaient pas des habitudes héritées du passé qui subsisteraient encore notamment dans le pouvoir judiciaire. L’Ouzbékistan n’est peut-être même pas encore en phase de transition, a-t-il été suggéré. Rappelant que les statistiques étaient considérées comme un secret d’Etat par le régime soviétique, un expert a suggéré que c’est peut-être pour cette raison que les statistiques sur la peine de mort ne sont pas disponibles.
Plusieurs de leurs questions et commentaires ont porté sur le recours à la torture en Ouzbékistan. Un expert a fait état de condamnations ayant été effectuées sur la base de preuves obtenues par la torture, citant le cas de Dmitri Chikunov qui, a-t-il relaté, a écrit avant de mourir une lettre déchirante à sa mère. Un autre expert a demandé si les autorités ouzbèkes vérifiaient qu’aucun instrument utilisé dans certains moyens de torture n’était disponible dans les centres de police. Selon un expert, les autorités ouzbèkes ont réagi de façon disproportionnée à l’extrémisme religieux et la référence à cet extrémisme religieux était en fait une façon de justifier un régime totalitaire.
Le Comité poursuivra l’examen du rapport initial de l’Ouzbékistan cet après-midi, à partir de 15 heures.
Questions et commentaires des experts
Plusieurs experts ont noté des divergences importantes entre les informations fournies, d’une part, par le rapport et la délégation ouzbèke et, d’autre part, les nombreuses allégations de sources extérieures au sujet de violations des droits de l’homme en Ouzbékistan. Ce décalage est tel qu’on pourrait croire qu’il s’agit de deux pays différents, a estimé un expert. Notant le changement de régime intervenu en Ouzbékistan, les experts ont demandé quelles mesures ont été prises pour former les fonctionnaires aux nouvelles lois. Poursuivant, un autre expert a assuré la délégation ouzbèke que le prestige de Tachkent, Boukhara et Samarcande rayonne jusqu’au Moyen-Orient et au-delà, et se retrouve dans les conversations quotidiennes de milieux dépassant largement les sphères universitaires. Il a aussi souligné la compréhension qu’ont tous les pays des régions voisines de l’Ouzbékistan des difficultés qui accompagnent le passage d’un régime autoritaire à un autre accordant une large place à la protection des droits de l’homme et s’efforçant de réaliser les dispositions du Pacte. Ces pays sont également sensibles aux problèmes que pose l’utilisation abusive de la religion et des dogmes. On ne peut cependant pas ignorer les informations concernant un certain laxisme concernant les cas de torture ou de violence. Il semblerait que les enquêtes sur les affaires de torture se contentent de citer pour affirmer qu’ils ne s’appliquent pas aux accusés. Il semblerait qu’il existe un environnement d’intolérance et d’intimidation obligeant les personnes suffisamment courageuses pour porter plainte en cas de torture et les traitements inhumains ou dégradants à retirer leurs plaintes. Les informations obtenues par la torture physique, mentale ou d’autres moyens illégaux seraient retenus comme preuves par les tribunaux.
Selon d’autres informations extérieures, il semblerait aussi que les conditions dans lesquelles les détenus sont incarcérés sont déplorables. Dans ce contexte, un expert a souhaité savoir si les lieux de détention font régulièrement l’objet de visites de vérification surprise. En ce qui concerne la procédure de détention, les experts ont demandé s’il est exact qu’elle commence par 24 heures de détention, à la suite desquelles un enquêteur peut ordonner une condamnation à l’expiration d’une période de 72 heures supplémentaires, et le procureur une détention supplémentaire de 7 à 10 jours au Ministère de l’intérieur, suite à laquelle existe la possibilité d’une période d’isolement, puis, une fois la peine prononcée, l’emprisonnement. Tant que la peine n’a pas été définitivement prononcée, le détenu reste aussi dans des locaux dépendant du Ministère de l’intérieur ou de la police. Les experts se sont demandé si les détenus passent réellement l’ensemble de la période qui va de leur arrestation à leur condamnation sans jamais être soustraits au cadre du ministère de l’intérieur ou de la police. Ils ont demandé d’indiquer les statistiques sur les libérations sous caution.
En outre, les experts ont regretté que le rapport au paragraphe 175 comprenne des informations indiquant clairement que l’article 9 paragraphe 2) du Pacte n’est pas respecté, notamment du fait de la longueur excessive de la période de détention. Ils ont insisté sur le fait que l’accès à la révision judiciaire de toute forme de détention est essentiel pour la prévention de la torture. La torture intervenant le plus souvent dans les premiers temps de l’arrestation et de la détention, il faut prendre des mesures permettant un contrôle le plus tôt possible. Le Comité s’est interrogé sur les informations signalant un certain nombre de détentions non enregistrées par le Ministère de l’intérieur ou la police. Par ailleurs, les experts ont souligné qu’il est indispensable que les citoyens, à partir du moment où ils sont privés de liberté par l’Etat, puissent être représentés par un avocat indépendant. Dans un certain nombre de pays, on dit que le procureur appartient au pouvoir judiciaire mais si c’est lui qui décide des personnes devant être arrêtées et de l’orientation de l’enquête, il fait plutôt partie du processus d’accusation. Il est donc nécessaire de créer un mécanisme compétent dans le processus d’enquête mais indépendant. Quel est le champ de compétence des tribunaux militaires dans le rapport? a-t-il demandé.
Les experts ont rappelé que l’Ouzbékistan avait, par le passé, fourni des chiffres détaillés sur les plaintes liées à des cas de torture et de violences policières et ont souhaité savoir s’il en existe de nouveaux. Selon des témoignages indépendants, les pratiques de la police comprennent le passage à tabac, le viol, l’avortement forcé, les brûlures de cigarettes. Les forces de l’ordre emploieraient également des méthodes de torture spécifiques impliquant l’usage du masque à gaz et du bâton électrique. Dans ce contexte, les experts ont souhaité savoir si les autorités ont mené des enquêtes pour s’assurer qu’il n’y a pas d’instruments de torture dans les locaux de la police. Rappelant que certains modes de torture laissent des marques sur les corps des victimes, un expert a jugé inquiétant que des juges aient refusé d’examiner les corps de victimes vraisemblablement mortes sous la torture. Les experts ont confronté l’information de la délégation ouzbèke selon laquelle aucune plainte pour torture n’aurait été déposée en 2000, aux nombreuses informations témoignant du recours systématique à la torture. Ils ont reconnu que les informations fournies par les organisations non gouvernementales ne sont que des allégations. Mais, ont-ils ajouté, pour être sûrs qu’elles ne sont pas fondées, il faut savoir que l’Etat partie a mis au point un mécanisme d’enquête sur les cas de torture. On peut en effet considérer l’absence de plaintes comme le signe de l’absence de mécanisme crédible où les citoyens peuvent porter plainte.
En ce qui concerne la peine de mort, un expert a rappelé que les statistiques sur la peine de mort étaient traditionnellement considérées comme confidentielles par l’Etat soviétique, s’est demandé si ces informations constituent encore un secret d’Etat et, si tel n’est pas le cas, quelles sont les bases juridiques qui en font un secret. Il s’est dit heureux que les femmes et les enfants ne puissent pas être exécutés mais s’est demandé si cela ne constitue pas une discrimination à l’égard des hommes au sens de l’article 26 du Pacte. Par ailleurs, les experts ont jugé particulièrement troublant que des condamnations à la peine capitale reposent sur des preuves obtenues par la torture. Dimitri Chikunov, exécuté en janvier 2000, en serait peut-être un exemple.
Par ailleurs, les experts se sont interrogés sur la liberté dont jouissent effectivement les groupes religieux dans la pratique de leur culte, sans ingérence de l’Etat. Un expert a demandé ce que l’on entend exactement aux paragraphes 249 et 250 du rapport, qui mentionnent notamment «la nécessité de chercher à établir un dialogue avec les différentes communautés religieuses afin de tirer parti des possibilités qu’elles offrent pour la renaissance spirituelle du pays et l’affirmation des valeurs morales universelles». En ce qui concerne l’extrémisme religieux, il a semblé à un expert que la réaction des autorités de l’Etat partie est excessive. Il a regretté que les autorités utilisent cette menace pour justifier un régime totalitaire et le recours à des méthodes violant l’intégrité de la personne. La procédure d’enregistrement des organisations religieuses semble en outre représenter un obstacle à leur libre fonctionnement.
Un autre expert, soulignant le fait qu’il n’y avait pas de droit d’asile en Ouzbékistan, a demandé des précisions sur le sort réservé aux demandeurs d’asile. Il a rappelé que le délégué avait fait état de l’intention de son pays d’adhérer au Protocole facultatif. Or, a indiqué l’expert, nous savons que Kamoliddin Sattarov a été condamné en juin 2000 à neuf ans d’emprisonnement pour avoir été trouvé en possession de plaintes qu’il souhaitait soumettre au Comité. Il a demandé d’expliquer comment l’Ouzbékistan concilie cette condamnation avec sa démarche à l’égard du Protocole.
Réponses de la délégation
M. AKMAL SAIDOV, Directeur du Centre national pour les droits de l’homme de l’Ouzbékistan, s’est dit touché par la volonté manifestée par les experts de comprendre ce qui se passe réellement dans son pays. Il a indiqué que le Gouvernement ouzbek était prêt au dialogue avec les ONG et que c’était déjà le cas avec un certain nombre d’entre elles, notamment Human Rights Watch et Amnesty International. Il a cité en exemple la préparation du rapport sur l’élimination des formes de discrimination à l’égard des femmes qui s’est effectué en collaboration avec des représentants d’organisations gouvernementales et non gouvernementales. Le délégué a admis que l’application de la loi avait pris du retard. Le Gouvernement a procédé à la révision approfondie des lois de l’ancien régime totalitaire qui ne correspondaient pas à son objectif dans le domaine des droits de l’homme, a-t-il déclaré. Il a ensuite créé un mécanisme de suivi de l’application de ces lois. Et c’est à ce niveau-là que subsistent encore beaucoup de problèmes. Nous accordons beaucoup d’importance à la surveillance de la protection des droits de l’homme. Le rapport présenté est un rapport officiel et nous sommes responsables de la fiabilité de ce rapport, a fait observer le délégué. Le Comité a bien entendu le droit d’utiliser d’autres sources. Un dicton ouzbek dit qu’il est bien d’avoir une tête pour penser mais que c’est encore mieux d’en avoir deux. La question se pose toutefois en ce qui concerne la fiabilité des informations fournies. La délégation ouzbèke souhaite que le Comité prenne en compte le fait qu’elle se fonde pour sa part sur la présomption de l’exactitude de l’information. Le Gouvernement d’Ouzbékistan étudie toutes les informations fournies par les ONG comme par les ambassades étrangères et, notamment, le Département d’Etat des Etats-Unis qui prépare chaque année un rapport sur la situation des droits de l’homme dans le monde. Une section de ce rapport est consacrée à l’Ouzbékistan et nous l’étudions très attentivement.
Le délégué a indiqué que les représentants de Human Rights Watch se rendent souvent dans le pays mais qu’ils refusaient de rencontrer les autorités du pays. Le Gouvernement ouzbek est prêt à respecter ses engagements à l’égard des droits de l’homme, a-t-il poursuivi, mais il faut que la démarche s’effectue dans les deux sens. Il a reconnu que de nombreux fonctionnaires de l’Etat connaissaient mal les normes internationales, indiquant cependant que la création d’une académie de formation des fonctionnaires dispensant des cours sur les droits de l’homme ainsi qu’une formation propre aux fonctionnaires du système judiciaire, avait été décidée par décret présidentiel.
Le délégué a précisé que 200 plaintes portant sur des cas de disparitions avaient été reçues cette année et examinées avec beaucoup de soin avant que mesures concrètes aient été prises. Il a cité en exemple une procédure de certification des fonctionnaires de police qui a été menée au regard de possibles exactions et au terme de laquelle 168 des 1838 fonctionnaires qui en ont fait l’objet, ont été renvoyés.
Le délégué a démenti formellement les interprétations et commentaires sur les déplacements massifs de Tadjiks. Il y a eu effectivement 1 333 personnes déplacées; toutefois, une commission spéciale a été créée et un financement de 2 669 500 000 soms a été débloqué pour parer à cette situation. L’aide nécessaire au transport de leurs biens ainsi qu’une aide financière de 6 563 000 soms leur a été fournie. La construction de logements et la création d’infrastructures sociales - dont trois centres médicaux et deux écoles d’une capacité de 300 élèves -, ainsi que des travaux d’aménagement des sols ont été entrepris dans le secteur où ils sont réinstallés. Le territoire affecté à cette réinstallation couvre un peu plus de 47 hectares. Les raisons à ce déplacement tiennent aux caractéristiques de la zone où résidaient ces personnes. Il s’agit d’une région montagneuse qui culmine à 3 440 m d’altitude, qui, à certains endroits, présente des risques sérieux d’éboulement et qui, de façon générale, est isolée et difficile d’accès. Il est donc difficile voire impossible de la doter d’infrastructures et d’y acheminer des secours. C’est également une région peu sûre de trafic de stupéfiants, située à proximité de la frontière par laquelle circulent des groupes armés et où existe un risque de prise d’otage lié à la présence de brigands dans la région. Le Gouvernement suit de très près ce dossier et le représentant du médiateur s’est rendu sur place pour vérifier de quelle façon se déroulait l’opération.
Il est important de se rendre sur place pour savoir réellement ce qui se passe, a fait valoir M. Saïdov. Certaines organisations des droits de l’homme ont, il y a un an environ, soulevé la question de la prison de Jaslyk, les visites que nous avons effectuées sur place ont clairement montré que ces allégations n’étaient pas fondées. L’Ouzbékistan a signé un accord avec le Comité international de la Croix-Rouge en janvier dernier sur l’organisation de visites à Jaslyk. D’autres organisations s’y sont rendues. Cela a été le cas notamment de l’UNIFEM et de l’organisation britannique «Save the children».
Le délégué a précisé que près des trois-quarts des publications d’Ouzbékistan sont des publications d’Etat mais que l’on commence à voir apparaître des médias non gouvernementaux.
M. SAIDOV a indiqué que l’Ouzbékistan procède actuellement à une réforme judiciaire qui a notamment abouti à la modification de la loi sur les tribunaux afin de s’aligner sur les systèmes européens. Il a admis que toutes les mesures prises étaient d’ordre financier, organisationnel ou administratif et que, pour que les tribunaux cessent d’être considérés comme des organes de répression par la population, le Gouvernement devrait entreprendre un travail de fond. A l’heure actuelle, on spécialise les tribunaux de compétence générale en créant des tribunaux de compétence civile, pénale ou économique. Un département chargé d’organiser ce changement dans le pays et de formuler des propositions a été créé auprès du Ministère de l’intérieur à cet effet. M. Saidov a indiqué qu’il existe des tribunaux militaires, notamment composés de juges de la Cour suprême, qui sont saisis d’affaires relevant des organes militaires responsables de la défense nationale, de la protection des frontières, de la sécurité, et des affaires intérieures. Ces juridictions peuvent également recevoir les plaintes de soldats concernant leurs supérieurs hiérarchiques ou traiter les violations de secrets d’Etat.
Tout une série de mesures ont été mises en place pour assurer la formation des fonctionnaires. Il s’agit d’une tâche extrêmement importante pour le gouvernement.
Reconnaissant que l’on critique souvent l’Ouzbékistan comme étant un pays oriental où le rôle et la situation des femmes sont très peu élevés, le représentant a donc jugé déroutant que l’on critique le fait que les femmes ne puissent être condamnées à mort.
L’Ouzbékistan est également en train d’examiner ce qui peut être fait pour que les droits des avocats au civil et au pénal puissent être comparables à ceux du procureur. Le Gouvernement ouzbek se rend compte de la nécessité de lancer un processus de démocratisation. A la demande du Gouvernement ouzbek, des experts des Nations Unies et un professeur de droit de l’Université du Caire se sont rendus en Ouzbékistan dans le cadre d’un programme de renforcement du respect des droits de l’homme qui a duré deux ans et demi. Plusieurs réformes sont nécessaires dans ce domaine mais aussi dans les domaines économique, de la défense, de la politique extérieure, entre autres. Le représentant a également fait part du renouveau des «mohalla», de très anciennes institutions démocratiques de protection des citoyens, auxquelles le Gouvernement a transmis certains de ses pouvoirs afin de renforcer le rôle de la société civile.
Le Gouvernement cherche également à lancer un dialogue avec les autorités religieuses car il doit se libérer de nombreuses années d’Etat athée et renouer avec ses racines et ses valeurs culturelles. Le représentant a souligné que l’Ouzbékistan est fier d’être musulman mais qu’il se caractérise, depuis 2000 ans, par la coexistence de plusieurs communautés religieuses, linguistiques et culturelles. Le Gouvernement souhaite donc tirer parti de ce potentiel. Quant à la conviction religieuse, c’est l’affaire privée de chaque citoyen. M. Saidov a ajouté que le Gouvernement tient l’extrémisme religieux et le terrorisme comme les menaces les plus dangereuses de notre époque. Il a dénoncé le recours aux valeurs de la religion pour inciter à la haine raciale, religieuse et autres. Dans la région de l’Asie centrale, cet extrémisme est souvent lié au terrorisme et au trafic de stupéfiants. Le Gouvernement comprend très bien que la lutte contre ces maux ne saurait justifier de violations des droits de l’homme. Il a ainsi élaboré des bases législatives afin de pouvoir réagir aux erreurs judiciaires. Par ailleurs, M. Saidov a indiqué qu’une organisation religieuse doit compter 100 personnes, ce qui ne pose pas de problèmes aux organisations musulmanes. Le Gouvernement a cependant dû faire un pas vers les autres communautés religieuses qui comptaient souvent moins de 100 personnes en revoyant le texte de loi. Cette modification a été suivie d’une importante augmentation du nombre d’organisations enregistrées.
L’Ouzbékistan, en tant qu’Etat nouvellement indépendant, a accordé une grande importance à la création d’un système démocratique. Dans l’évaluation de la situation des droits de l’homme, tout est affaire de comparaison, a estimé M. Saidov. Il a rappelé que seulement dix ans se sont écoulés depuis l’effondrement de l’URSS et souligné la portée des changements qui se sont produits au cours de cette période. Paris ne s’est pas construit en un jour et même les Etats-Unis ont mis deux siècles à se constituer en démocratie, a-t-il fait valoir. En ce qui concerne la situation d’urgence, le représentant a indiqué qu’elle sera régie par une loi en pleine conformité avec les dispositions du Pacte. L’Ouzbékistan est sensible aux préoccupations du Comité en ce qui concerne la torture et mène une lutte sans merci contre cette pratique sous toutes ses formes. Le Gouvernement est catégoriquement opposé à ce que les fonctionnaires des institutions pénitentiaires utilisent des outils de torture contre les prisonniers. Se demandant comment on peut tolérer, au XXIe siècle, l’utilisation d’électrochocs pour torturer les prisonniers, M. Saidov a assuré le Comité qu’il transmettrait ces informations de source extérieure à son Gouvernement. De même, s’il existe un juge qui n’a pas porté attention à des allégations de torture faites par la défense, il ne mérite pas de rester en place, a-t-il affirmé. Lorsque les autorités ont connaissance de pratique de la torture, elles suspendent immédiatement la procédure judiciaire et procèdent à une enquête. M. Saidov a précisé que les données officielles des organes chargés des affaires intérieures ont déclaré ne pas avoir reçu de plaintes, mais que le bureau du Procureur en a reçues. Pour lutter contre les abus, il existe une loi prévoyant d’interjeter l'appel, et une autre sur la responsabilité des fonctionnaires en cas d’action illégale contre un citoyen. On prévoit de revoir les dispositions existantes afin que les fonctionnaires puissent porter une responsabilité concrète en cas d’abus.
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