UN ASSOUPLISSEMENT DU REGIME DES SANTIONS CONTRE L’IRAQ EST INSINUE AU CONSEIL DE SECURITE
Communiqué de presse CS/2160 |
Conseil de sécurité
4336e séance – après-midi
UN ASSOUPLISSEMENT DU REGIME DES SANCTIONS CONTRE L’IRAQ EST INSINUE
AU CONSEIL DE SECURITE
L’Iraq s’explique et déclare que les sanctions font obstacle à son développement
Dans une déclaration de plus de deux heures, le Sous Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères de l’Iraq, M. Riyadh Al-Qaysi, a porté des observations critiques sur les résolutions du Conseil de sécurité relatives à son pays, en faisant notamment part de son désaccord avec la manière dont les dites résolutions ont été appliquées. Il a dénoncé, entre autres, ce qu’il a appelé la mauvaise gestion du Programme pétrole contre nourriture et demandé au Conseil de sécurité de conduire une enquête à ce sujet. L'intervention iraquienne fait suite au débat entamé mardi dernier par le Conseil de sécurité qui examinait la situation entre l’Iraq et le Koweït, avec pour objectif d’alléger le régime des sanctions qui frappe l’Iraq dans le but de soulager la situation humanitaire dans ce pays. Les délégations ont commenté un projet de résolution et une liste révisée d'articles civils que l'Iraq serait désormais autorisé à importer sans l'approbation préalable du Comité des sanctions. Depuis 1990, en vertu de la résolution 661, l'Iraq est soumis, entres autres, à embargo commercial et financier qui, de l’avis de certains observateurs, a faibli considérablement son développement économique et, partant, réduit l’intervention de l’Etat dans les domaines social et humanitaire. En 1995, par la résolution 986, le Conseil de sécurité a créé le Programme humanitaire dit "pétrole contre nourriture" et malgré l'élimination du plafond imposé aux exportations pétrolières de l'Iraq et l'assouplissement des conditions liées aux importations iraquiennes d'articles civils, la situation humanitaire demeure un sujet de préoccupation.
La situation humanitaire continuera de se détériorer à moins que l'économie iraquienne soit relancée, a déclaré le Sous-Secrétaire d'Etat iraquien en estimant que la seule cure susceptible de pallier toutes ces difficultés est la levée des sanctions. Il a ajouté que tel que conçu, le Programme "pétrole contre nourriture" ne peut satisfaire les besoins humanitaires du peuple iraquien. Il a accusé les Etats-Unis et le Royaume-Uni d'avoir tout mis en oeuvre pour compliquer l'application du Mémorandum d'accord de 1996 qui jette les bases juridiques et opérationnelles du Programme "pétrole contre nourriture". Une bureaucratie lourde a été mise en place qui a conduit à des suspensions de contrats, à des retards dans les ouvertures des lignes de crédit ou encore à des coûts très élevés de procédure, a-t-il stigmatisé. Il a demandé au Conseil de sécurité de conduire une enquête sur le Programme « pétrole contre nourriture » dont les résultats seront mis à la disposition des Etats membres et de l'opinion publique internationale.
(à suivre – 1a)
Le représentant iraquien a évoqué la question du désarmement de son pays en réitérant son opinion que l'UNSCOM et l'AIEA ne représentent que les instruments des intérêts anglo-américains. Il a répondu aux revendications du Koweït en dénonçant la manière dont fonctionne la Commission d'indemnisations qui de 1996 à 2000, a prélevé une somme de 12,6 milliards de dollars sur les recettes pétrolières de l'Iraq qui ne représentent elles que 12,8 milliards de dollars.
Si les délégations de la Libye, de l'Inde ou de la Syrie qui sont intervenues cet après-midi, ont réitéré leur opposition aux sanctions, en particulier lorsqu'elles sont à l'origine de la détérioration d'une situation humanitaire, d'autres à l’instar du Japon et de l'Allemagne ont rappelé que l'objectif principal des résolutions du Conseil sur l'Iraq est de garantir que ce pays ne représente plus jamais une menace pour les pays de la région. C'est la raison pour laquelle, elles ont voulu qu'avant toute décision, le Conseil consulte les pays voisins de l'Iraq. Arguant que seule une coopération de l'Iraq avec les Nations Unies ouvrirait la voie à une levée des sanctions, ces délégations ont lancé des appels aux autorités iraquiennes pour qu'elles acceptent sur leur territoire, conformément à la résolution d'ensemble 1284 (2000), les inspecteurs de la Commission de vérification et de contrôle et de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), chargé du désarmement chimique, biologique et nucléaire, acceptation qui, comme l’a rappelé les Pays-Bas, mènerait au gel des sanctions.
Outre les délégations déjà mentionnées, les représentants des pays suivants ont pris la parole : Turquie, Australie, Nouvelle-Zélande, Bahreïn, Allemagne, Italie, Yémen, Espagne, Canada et Thaïlande.
LA SITUATION ENTRE L’IRAQ ET LE KOWEIT
Débat
M. ISA AYAD BABAA (Jamahiriya arabe libyenne) a déclaré que la Libye est opposée aux sanctions et attachée à un règlement pacifique des différends par la voie du dialogue. Il a estimé qu’il faut que le Conseil de sécurité mette tout en œuvre pour lever les sanctions imposées à l’Iraq et pour cesser de s’ingérer dans les affaires d’un Etat sous prétexte de représailles. Le Conseil agit au nom de tous les Etats Membres et l’imposition des sanctions doit donc être une décision collective, approuvée par tous, a-t-il ajouté. Le représentant a noté que d’autres Etats menacent la sécurité internationale, violent les résolutions du Conseil et possèdent des armes de destruction massive sans faire l’objet de sanctions. Il a déclaré que le régime de Tel Aviv utilise des moyens dignes de l’apartheid s’appuyant, entre autres, sur la création de colonies de peuplement et l’utilisation d’armes légères contre les femmes et les enfants. Le Conseil de sécurité doit obliger Israël à respecter les principes des Nations Unies, a insisté le représentant. Poursuivant, il a estimé que des Etats ont ouvert le territoire de l’Iraq à des services de renseignements dont aucune parcelle, jusqu’aux chambres à coucher des Iraquiens, n’a échappé à l’inspection. Alors que des attaques presque quotidiennes sont perpétrées contre l’Iraq, le Conseil ne lance aucun débat sur ces attaques qui sont contraires au droit international. En dépit des efforts de coopération avec la communauté internationale et les Nations Unies, l’Iraq continue de subir les sanctions. Avant de demander à l’Iraq de coopérer, le Conseil doit regagner sa crédibilité en faisant respecter l’ensemble de ses résolutions et en cessant d’exercer des pressions au nom d’un seul pays. Que les sanctions soient fortes, intelligentes ou autres, elles visent, par leur maintien indéfini, à détruire l’avenir d’un peuple entier.
M. YUKIO SATOH (Japon) a souligné que l'objectif principal des résolutions du Conseil sur l'Iraq est de garantir que ce pays n'ait plus la capacité de faire peser des menaces sur les pays voisins. Appuyant tout effort tendant à alléger la souffrance de la population iraquienne, le représentant a salué l'initiative du Conseil qui vise à modifier le régime des sanctions. Il a jugé important que les pays intéressés de la région soient consultés dans le processus d'élaboration de ce nouveau régime de sanctions. Leur coopération est essentielle à une mise en oeuvre efficace d'un tel régime, a-t-il insisté en lançant une nouvelle fois un appel à l'Iraq à coopérer avec les Nations Unies et à mettre en oeuvre les résolutions pertinentes du Conseil aussitôt que possible et, en particulier, à accepter le déploiement de la Commission des Nations Unies de vérification et de contrôle du désarmement.
M. MEHMET UMIT PAMIR (Turquie) a estimé qu’une approche globale est nécessaire pour sortir du blocage actuel en ce qui concerne les sanctions contre l’Iraq. Le principal souhait de la Turquie est de voir les sanctions levées le plus tôt possible mais seul un nouvel esprit de coopération entre le Conseil de sécurité et l’Iraq permettra d’y parvenir. Les négociations qui se déroulent actuellement devraient aboutir à ce résultat et éliminer efficacement les obstacles existants qui empêchent le peuple iraquien d’accéder à tous les articles civils. De même, le décalage entre le Conseil et l’Iraq devrait être comblé de manière à ce qu’ils puissent coopérer dans le cadre de l’application des paragraphes 8, 9 et 10 de la résolution 687. La Turquie est profondément préoccupée par le déploiement et la livraison d’armes de destruction massive dans la région. A la lumière du processus de rédaction de la nouvelle résolution au sein du Conseil de sécurité, il semble que le texte final donnera une plus grande latitude au Secrétaire général dans l’exécution du programme humanitaire. Nous sommes confrontés à l’urgente nécessité d’améliorer la situation humanitaire en Iraq et de soulager les pays voisins du fardeau économique et social qu’ils ont à porter depuis des années. Il faudrait ouvrir la voie à un commerce plus libre et susciter la coopération de l’Iraq, qui est indispensable.
M. SATYABRATA PAL (Inde) a rappelé que son pays s’était toujours opposé aux sanctions en raison des conséquences humanitaires et qu’il avait de façon répétée, demandé que ces sanctions soient levées en réponse au respect par l’Iraq des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Après avoir précisé que les “zones d’exclusion aérienne” ne sont sanctionnées par aucun aspect des résolutions du Conseil, le représentant a indiqué que l’Inde a toujours désapprouvé les actions armées unilatérales contre l’Iraq; les attaques portant atteinte à l’intégrité territoriale de l’Iraq peuvent en effet avoir des implications imprévues et déstabilisantes pour l’équilibre géopolitique de la région. Affirmant que les sanctions contre l’Iraq ont également eu des répercussions fâcheuses pour certains pays tiers, dont l’Inde, le représentant a regretté que la requête de son pays en vertu de l’article 50 attende toujours d’être examinée par le Comité des sanctions. Afin d’alléger les difficultés résultant de ces sanctions, le représentant a informé le Conseil qu’un accord commercial de nourriture contre pétrole avait été conclu entre l’Inde et l’Iraq. Le représentant a fait valoir que la normalisation de la situation de l’Iraq aiderait à promouvoir la sécurité et la stabilité dans la région et a demandé au Conseil d’agir rapidement afin de mettre un terme au cauchemar du peuple iraqien.
Mme PENNY WENSLEY (Australie) a déclaré accueillir avec satisfaction la proposition visant à alléger les contrôles sur les importations iraquiennes. Toutefois, arguant du fait que la sécurité régionale requiert que chaque Etat de cette région respecte ses engagements internationaux, elle s’est déclarée inquiète que depuis deux ans maintenant, il n’ait pas été possible de procéder aux vérifications et aux contrôles des armements iraqiens prévus par le Conseil de sécurité. Il est nécessaire que l’Iraq coopère pleinement avec la Commission de contrôle, de vérification et d’inspection des Nations Unies (UNMOVIC) et avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qu’il permette à ces deux instances d’effectuer les contrôles mandatés par le Conseil de sécurité et qu’il respecte le traité de non-prolifération nucléaire, a affirmé la représentante, faisant valoir que l’absence de contrôles avait un effet déstabilisant pour la région. La question des armes de destruction massive est également hautement préoccupante, a-t-elle continué, apportant son soutien aux résolutions du Conseil de sécurité qui demandent leur élimination. Insistant pour que l’Iraq respecte toutes les résolutions du Conseil de sécurité, Mme Wensley a réclamé des garanties concernant l’abandon total et définitif des programmes iraquiens d’armes chimiques et biologiques. Elle a également demandé instamment à l’Iraq de ne pas contribuer au développement et à la prolifération des missiles, vecteurs principaux des armes de destruction massive, ces systèmes de longue portée étant particulièrement déstabilisants pour la sécurité dans la région et dans le monde. La représentante a précisé que les sanctions n’avaient jamais visé les civils; elle s’est félicitée des différents allègements qui lui avaient été apportés, tel le programme “pétrole contre nourriture” et fait observer que ce programme avait mis un terme à la détérioration du niveau de vie des Iraquiens.
M. DON MACKAY (Nouvelle-Zélande) a déclaré que les sanctions sont un outil indispensable pour le Conseil de sécurité mais constituent en même temps un instrument dangereux. La délégation néo-zélandaise considère que les sanctions doivent être ciblées pour avoir une efficacité maximale, et s’attacher à minimiser tout impact nuisible sur les besoins humanitaires de la population civile concernée. L’urgence de la nécessité d’atténuer les souffrances de la population civile iraquienne est largement reconnue. C’est dans cet esprit de préoccupation à l’égard de la population civile de l’Iraq que le Programme « pétrole contre nourriture » a été mis en place. Ce Programme n’avait pas été conçu comme un mécanisme à long terme destiné à satisfaire les besoins humanitaires de la population iraquienne. Cela dit, le Programme « pétrole contre nourriture » devrait répondre aux besoins fondamentaux de cette population. Nous avons accueilli favorablement les efforts accomplis par le Conseil de sécurité depuis l’adoption de sa résolution 1284 pour améliorer la situation des Iraquiens ordinaires en rendant le Programme plus efficace.
L’élévation de la limite des exportations iraquiennes de pétrole et la rationalisation du processus d’approbation pour l’importation de biens civils montrent que la manière dont les sanctions ont été appliquées en Iraq a été améliorée. Les sanctions ont donné au Gouvernement iraquien les moyens de satisfaire les besoins de sa population civile. Mon Gouvernement reste très préoccupé par le fait que le Gouvernement iraquien ait choisi de ne pas saisir cette occasion et continue de nuire à l’efficacité du Programme en refusant d’exporter du pétrole. Il dépend du Gouvernement iraquien de faire disparaître la nécessité de tout régime de sanctions. Une application réussie des changements proposés au régime de sanctions exigera la pleine coopération de tous les Etats Membres. L’engagement du Conseil de sécurité dans sa résolution 1352 de susciter d’importants changements dans le flux de services et de produits vers l’Iraq bénéficiera à l’ensemble de la région. La restauration d’un commerce normal est une étape importante dans le retour de l’Iraq au monde moderne et sera également bénéfique au Gouvernement iraquien lui-même, s’il choisit de coopérer.
M. JASSIM MOHAMMED BUALLAY (Bahreïn) a déclaré qu’après plusieurs années de débats sur les questions liées aux sanctions qui frappent l’Iraq, on a totalement négligé la question des prisonniers et des biens disparus. En adoptant la résolution 1284, le Conseil de sécurité a montré qu’il était disposé à coopérer avec l’Iraq en faisant preuve d’une grande souplesse sur quatre dossiers importants relatifs aux armes de destruction massive. En dépit de tout cela, la situation sur le terrain n’a absolument pas bougé. L’Iraq stipule que les dossiers sur les armes de destruction massive sont bouclés pour la plupart d’entre eux. Si tel est le cas, pourquoi l’Iraq ne peut-il en donner une preuve légale par l’intermédiaire d’une commission de vérification? s’est-il demandé. Nous avons du mal à comprendre la déclaration selon laquelle il n’y a pas de prisonnier koweïtien en Iraq alors qu’il existe des preuves du contraire. L’Iraq doit participer aux activités de la Commission internationale qui a été créée dans le but de régler cette question. Les Etats de la région estiment qu’il n’est pas normal de vivre dans un état qui oscille entre la paix et la guerre. Nous avons des responsabilités à l’égard de nos peuples. Les bases solides d’une coopération nécessitent la mise en œuvre par l’Iraq des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, ce qui passe prioritairement par le règlement des dossiers sur les armes de destruction massive et la question des prisonniers koweïtiens et d’Etats tiers.
M. DIETER KASTRUP (Allemagne) s'est déclaré décidé à améliorer la situation humanitaire en Iraq. Il a toutefois souligné qu'il incombe au seul Gouvernement iraquien de l'améliorer. La meilleure manière de procéder, a-t-il dit, consisterait à lever les sanctions mais seulement après que l'Iraq aura respecté toutes les résolutions du Conseil. Malheureusement, nous sommes encore loin de cette meilleure solution, a regretté le représentant. Ayant pris note du projet de résolution présenté par la Fédération de Russie, il a dit craindre qu'il ne puisse contribuer au consensus. La résolution 1284, a-t-il estimé, trace la voie de la levée des sanctions et seule l'intransigeance du Gouvernement iraquien a empêché jusqu'ici une telle mesure. Tant que le Gouvernement iraquien n'honorera pas ses obligations internationales, la question sera de savoir comment améliorer le régime des sanctions et non pas à quel moment les lever.
Le représentant a donc accueilli avec satisfaction les discussions en cours et estimé qu'un système plus ciblé pourra être créé contribuant à instaurer un climat propice à la situation humanitaire de l'Iraq et au développement des échanges commerciaux. Les articles civils doivent être définis de façon à prévenir la vente d'armements et des biens à double usage. La liste, a souhaité le représentant, doit être ciblée, transparente, concise et applicable. Il a d'ailleurs espéré que ces nouvelles dispositions permettront l'élimination du problème des contrats en attente. Il a aussi plaidé pour la réouverture du trafic aérien avant d'encourager le Conseil à oeuvrer en faveur d'une solution qui servirait les intérêts de la population iraquienne tout en assurant la coopération du Gouvernement iraquien. La solution doit aussi tenir compte de la situation difficile des pays voisins, a conclu le représentant.
M. DIRK JAN VAN DEN BERG (Pays-Bas) a souhaité que l’Iraq reprenne sa place de membre à part entière de la communauté internationale dans les plus brefs délais. Mais il a rappelé que c’est l’Iraq lui-même qui, par ses actions, s’est placé en marge de la communauté internationale. Les Pays-Bas continuent de soutenir l’objectif de la résolution 687, adoptée après l’invasion du Koweït par l’Iraq en 1990, qui vise clairement de prévenir une nouvelle agression iraquienne. Le représentant a estimé que la voie vers une pleine réhabilitation de l’Iraq est tout aussi claire. Le Gouvernement de l’Iraq doit se plier et appliquer les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, après quoi les sanctions seront levées. Si, dans un premier temps, ce gouvernement coopère dans tous les domaines avec l’UNMOVIC et l’AIEA, conformément à la résolution 1284, les sanctions seront suspendues. Malheureusement, l’Iraq n’a encore rien fait pour permettre au Conseil de prendre de telles décisions. En dépit de l’attitude du Gouvernement iraquien, le Conseil lui-même doit faire tout son possible pour atténuer les souffrances du peuple iraquien. La résolution 1284 avait grandement contribué à parvenir à des sanctions plus ciblées. Les efforts actuellement en cours au Conseil de sécurité visant à améliorer davantage le régime des sanctions s’inscrivent dans la logique de cette résolution et nous les accueillons avec satisfaction. Nous espérons que le nouveau régime des sanctions mettra fin au phénomène des importants retards liés au traitement des contrats. Les Pays-Bas pensent que le Conseil de sécurité devrait aussi examiner la question de l’entretien et de l’expansion de la capacité de la production pétrolière de l’Iraq.
M. SERGIO VENTO (Italie) a souhaité la promotion d'un climat de confiance fondé sur le respect des résolutions du Conseil et des initiatives constructives et équitables. Il a souligné la nécessité de respecter l'intégrité territoriale et la souveraineté de chaque pays de la région et ce par tous les pays de la communauté internationale. Il a appelé l'Iraq à faire preuve de coopération en accueillant les inspecteurs de la Commission de vérification et de contrôle tout en jugeant approprié de discuter plus avant de la question des prisonniers de guerre, des personnes disparues et des biens volés au Koweït. Venant à la situation humanitaire de l'Iraq, il a jugé nécessaires de prendre des mesures d'urgence en plaidant, dans ce cadre, pour que le Conseil autorise les investissements étrangers directs et la réouverture progressive du trafic aérien. Il a argué que le bon fonctionnement d'un régime des sanctions exige la coopération de tous les membres et a encouragé le Conseil à consulter les pays voisins.
M. ABDALLA SALEH AL-ASHTAL (Yémen) a déclaré que le thème traité aujourd’hui dissimule une tragédie. Il a expliqué que la crise du Golfe a éprouvé toute la région. Il a regretté que les questions des biens et des prisonniers koweïtiens restent en suspens. Le représentant a ajouté qu’il n’en reste pas moins que toute une génération d’Iraquiens vit dans la misère, ce qui alimente la révolte et sème les germes d’une nouvelle crise. L’embargo, imposé il y a dix ans, continue d’avoir un impact négatif sur la vie des Iraquiens dont la vie et le développement sont bloqués. Les effets de l’embargo touchent tous les domaines de la société iraquienne et sont plus graves que ceux de la guerre. D’autres pays, par exemple les pays voisins et parmi eux le Yémen, en souffrent également. Nous demandons qu’il soit mis un terme à l’embargo et aux souffrances des Iraquiens qui doivent à présent avoir la possibilité de reconstruire leur pays, a insisté le représentant. La position du Yémen et de l’opinion arabe est que les Iraquiens sont victimes de sanctions collectives et sans aucun fondement éthique, qu’elles soient intelligentes ou stupides.
M. MIKHAIL WEHBE (Syrie) a dit qu’il espérait que les consultations actuelles conduiront à mettre définitivement fin aux souffrances du peuple iraquien victime de la rigueur de l'embargo et de ses conséquences destructives. Appelant à ce que les résolutions du Conseil gardent un certain degré de crédibilité, le représentant a souligné que la poursuite des sanctions aura des conséquences graves sur la stabilité et la sécurité de la région. Il a renouvelé l'attachement de son pays à l'intégrité territoriale de l'Iraq et du Koweït. Il a, une nouvelle fois, dit son opposition à l'imposition de sanctions qui, a-t-il dit, se révèlent souvent inefficaces et préjudiciables aux relations internationales. Le représentant a appelé le Conseil à tenir compte des difficultés économiques auxquelles sont confrontés les pays de la région du fait des sanctions imposées à l'Iraq. Il a espéré que le nouveau texte ne mettra pas en danger la souveraineté des Etats voisins de l'Iraq. Sur la question du désarmement de l'Iraq, il a demandé que le Conseil replace les choses dans le contexte de la création future d'une zone exempte d'armes nucléaires et qu’il adresse les mêmes demandes à Israël.
M. INOCENCIO F. ARIAS (Espagne) a estimé que la question de l’Iraq met en lumière la nécessité de parvenir à une solution politique, diplomatique et globale s’appuyant sur le respect de la légalité internationale telle qu’elle est exprimée dans toutes les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, parmi lesquelles la résolution 1284. Le respect de ces dispositions par l’Iraq est la seule voie vers une levée des sanctions qui le frappent et la normalisation de son rôle dans la communauté internationale. Il est également nécessaire que soit garantie l’intégrité territoriale et l’indépendance politique de tous les pays de la région, y compris l’Iraq. Il ne sera pas possible d’atteindre ces objectifs que dans le cadre d’un consensus au sein du Conseil de sécurité. L’Espagne appuie le rôle actif du Secrétaire général dans la poursuite du processus de dialogue avec l’Iraq. Il faut aborder efficacement la catastrophe humanitaire que vit la population iraquienne en normalisant le plus possible l’économie civile de l’Iraq. Dans ce contexte, l’adoption à l’unanimité de la résolution 1352 par le Conseil de sécurité mérite tout notre appui, de même que tous les efforts qui sont déployés actuellement pour promouvoir les principes inspirant la résolution 1352, en vue de raviver l’économie civile iraquienne dans tous ses aspects et de maintenir des restrictions en nombre aussi réduit que possible, afin de contrôler les exportations à caractère militaire. Le représentant a appelé à ne pas perdre de vue la situation régionale et les circonstances difficiles que doivent traverser les pays frontaliers avec l’Iraq. La liste annexe des biens soumis à un contrôle devra être aussi courte que possible afin de réduire les retards.
M. PAUL HEINBECKER (Canada) a estimé qu'il faut continuer à limiter la liberté de l'Iraq, étant donné que Saddam Hussein n'a pas encore montré la volonté de vivre en paix avec ses pays voisins. Parlant du projet de résolution à l'examen, il s'est dit déçu que le Groupe de travail sur les sanctions n'ait pas encore été créé. Il a dit comprendre les préoccupations des Etats voisins d'autant que l'Iraq a promis de prendre des mesures de représailles à l’encontre de tout pays qui coopèrerait à la mise en oeuvre de la résolution. Il s'est donc félicité de l'intention du Conseil d’établir des mécanismes pour répondre à ces préoccupations. Un Conseil uni et déterminé et les pays de la région doivent adresser un message clair en Iraq et lui faire savoir que le plein respect des résolutions pertinentes est la seule solution. Ce plein respect conduira à la levée des sanctions, a souligné le représentant. Partant, il a regretté les menaces de certaines délégations d'exercer leur droit de veto qui n’aurait pour effet que de compromettre la crédibilité du Conseil. Cela démontre, une nouvelle fois, la nécessité de réfléchir à cet instrument qui manifestement n'est pas utilisé de manière responsable, a conclu le représentant.
M. KULKUMUT SINGHARA NA AYUDHAYA (Thaïlande) a déclaré que les sanctions imposées à l’Iraq ont causé d’importantes souffrances à la population iraquienne. Il a estimé que le Programme « pétrole contre nourriture » a permis certains progrès mais que la situation des Iraquiens moyens reste très difficile. Le représentant a appelé le Conseil à trouver une solution pacifique et globale à ce problème.
M. HUSSEIN A. HASSOUNA, au nom de la Ligue des Etats arabes, a demandé la levée des sanctions imposées à l'Iraq tout en jugeant nécessaire de garantir la sécurité du Koweït. Il a appelé au dialogue pour faire face à la crise actuelle. Le temps est venu pour le Secrétaire général de poursuivre le dialogue qu'il a entamé en février dernier avec les autorités iraquiennes. Il a aussi demandé que la question de la destruction massive des armements soit réglée par un dialogue entre l'Iraq et les Nations Unies. Le représentant a insisté sur cette question en disant que la destruction des armes de destructive massive serait conforme aux voeux de la région de créer une zone exempte d'armes nucléaires. Il a donc demandé au Conseil de lancer le même appel à Israël.
M. RIYADH AL-QAYSI, Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères de l’Iraq, a déclaré que les obligations qui sont imposées à l’Iraq, conformément aux résolutions adoptées par le Conseil de sécurité, sont extrêmement sévères et vont au-delà des limites de droit coutumier dans la recherche du respect de la paix et de la sécurité internationales. Le représentant a fait valoir que l’Iraq a appliqué intégralement, dans les délais et selon les conditions définies par les résolutions du Conseil de sécurité, notamment en ce qui concerne l’intégrité territoriale du Koweït et le tracé des frontières imposé par les Nations Unies, le déploiement des observateurs des Nations Unies et les engagements relatifs au contrôle des importations et des exportations. L’Iraq a restitué tous les biens koweïtiens qu’il a pu trouver et a promis de restituer tous les biens qu’il pourrait retrouver à l’avenir, il a renvoyé dans leurs foyers tous les prisonniers de guerre et enquête sur le sort des personnes disparues. Outre la nature extrêmement rigoureuse des sanctions, l’Iraq a subi des violations patentes du droit international ainsi que des mesures inhabituelles telles que des fluctuations des règles du jeu et des objectifs. En ce qui concerne le régime des réparations, le Conseil de sécurité admettait dans la résolution 687 que le droit international était le seul critère qui devrait régir le régime des réparations. La fonction judiciaire a été remplacée par un processus administratif et politique contrôlé par le Conseil qui, ce faisant, a ignoré totalement le critère relatif à la responsabilité des Etats en droit international. Le principe de ce régime devait être juridique mais c’est un principe politique qui a été suivi,
les Etats-Unis étant la force motrice de ce régime illégal. Les injustices subies par l’Iraq se sont notamment concrétisées par le fait que le Secrétariat de la Commission d’indemnisation a indemnisé à deux reprises 575 demandeurs, au titre du même dossier. Le Secrétaire d’Etat iraquien a également déploré que, sur un montant total de 12,8 milliards de dollars des recettes pétrolières entre 1996 et le 30 mai 2000, 12,6 milliards de dollars aient été alloués au dédommagement du Koweït, ce qui a laissé 200 millions de dollars à l’Iraq à consacrer aux biens humanitaires car certains membres du Conseil de sécurité ont imposé le maximum de déductions possibles. L’ex-UNSCOM et l’AIEA ont servi uniquement la politique des Etats-Unis et certainement pas les Nations Unies. La Commission spéciale a adopté une conduite qui l’a amenée à biaiser les méthodes de travail et à créer des obstacles visant à politiser des questions de nature technique, ce qui prolongeait indéfiniment le processus.
Le représentant a déclaré que les objectifs des Etats-Unis et du Royaume-Uni sont encore plus clairs aujourd'hui, à savoir perpétuer le blocus dont l’Iraq est l’objet en dépit des efforts qu’il déploie pour s’acquitter de ses obligations. Pour ce qui est du désarmement, le représentant a déclaré qu’il ne peut pas se faire dans le vide et que, si le Conseil ne prend pas toutes les mesures nécessaires pour assurer le désarmement des armes de destruction massive détenues par Israël, il se trouvera en porte-à-faux avec les dispositions de la Charte de l’ONU. Il a ajouté que l’Iraq a, quant à lui, appliqué toutes les dispositions contenues dans les résolutions du Conseil ce qui, dans une large mesure, aurait justifié, au minimum, l’application du paragraphe 22 de la résolution 687 qui porte sur un assouplissement de l’embargo. Le Conseil de sécurité aurait ainsi démontré qu’il respecte ses propres résolutions, a fait remarquer le représentant. Le Conseil de sécurité continue de camper sur une position extrême puis, de temps à autre, décide de nouvelles obligations pour l’Iraq qui répondent aux intérêts des Etats-Unis et du Royaume-Uni, sans rapport avec l’intérêt collectif de la communauté internationale. C’est sur la fondation des principes de la Charte des Nations Unies que le maintien de la paix et de la sécurité internationales lui a été confié au nom de la collectivité des nations. L’embargo a été poursuivi alors que les causes qui ont présidé à son instauration n’existent plus depuis des années. Cet état de choses n’aurait pas pu durer aussi longtemps s’il n’existait une hégémonie américaine au sein des Nations Unies et, en particulier du Conseil de sécurité, a estimé M. Al-Qaysi.
Le Secrétaire d’Etat iraquien a ensuite rappelé que la résolution 986, adoptée en 1995, contient des dispositions totalement déséquilibrées et que c’est la raison pour laquelle l’Iraq l’avait rejetée. Le Gouvernement iraquien a coopéré avec les institutions des Nations Unies pour satisfaire à leurs exigences mais, lorsque les objectifs du Programme « pétrole contre nourriture » n’ont pu être atteints, le Gouvernement iraquien a été accusé d’être la cause de cet échec. M. a expliqué que les raisons de cet échec sont liées, entre autres, à la nature complexe des mesures adoptées par le Conseil de sécurité pour mettre en œuvre le Mémorandum d’accord, l’intervention anglo-américaine dans la redistribution inéquitable des recettes des exportations de pétrole, une bureaucratie très lourde dans le contrôle des contrats, l’arrivée tardive des produits et des articles civils, et les coûts opérationnels et administratifs très élevés des Nations Unies pour les activités de l’ex-UNSCOM.
Est-il raisonnable que la gestion d’un programme de plusieurs millions de dollars ne fasse pas l’objet d’une vérification par une instance extérieure aux Nations Unies ? s’est interrogé le Secrétaire d’Etat. Il a expliqué que l’Iraq a été privé du matériel, acheté au prix fort par la Commission avec les fonds iraquiens, qui a été endommagé ou retenu. La Banque centrale iraquienne n’a aucune idée des opérations bancaires réalisées par les Nations Unies avec les ressources iraquiennes, ce qui est contraire aux dispositions du Mémorandum d’accord. La gestion du personnel n’est soumise à aucun contrôle et tous les responsables financiers des institutions qui travaillent en Iraq ont été envoyés à Genève aux frais du Programme pour présenter un simple bilan comptable. Dénonçant ces lacunes, M. Al-Qaysi a demandé qu’il soit procédé à une enquête, par les services d’un audit externe neutre, sur toutes ces questions dont les résultats seront rendus publics.
M. Al-Qaysi a regretté que la neuvième phase du Programme se soit achevée sur la constatation qu’un accord serait impossible et que la résolution 1352 ait alors été adoptée en 2001. Cette résolution contient de nouvelles dispositions et l’Iraq l’a refusée car elle recourt au Programme pour faire avancer la formule anglo-américaine des « sanctions intelligentes ». En outre, son extension pour un mois n’est pratiquement pas suffisante pour mettre en oeuvre les exportations de pétrole et les importations de biens civils. En conséquence de cette résolution, nous avons cessé d’exporter du pétrole en vertu de nouveaux contrats à compter du 4 juin 2001. Toutefois, les Etats-Unis et le Royaume-Uni n’ont pas mis fin à leurs tentatives en faveur de sanctions intelligentes. Le contenu fondamental de leurs projets signifie, de facto, un nouveau régime pour placer un embargo sur l’Iraq. Nous avons été soumis à un certain nombre de sanctions par différents organismes de manière à reformuler les conditions initiales, a déclaré le Secrétaire d’Etat iraquien. Le nouveau régime modifie les dispositions des résolutions précédentes, contrôle toutes les ressources financières des Nations Unies qu’il disperse ensuite sans que le Gouvernement iraquien n’ait son mot à dire, et tente de soumettre à des restrictions les tractations de l’Iraq avec ses voisins afin de resserrer son étau sur l’Iraq.
Le Secrétaire d’Etat a déclaré que les USA et leurs alliés refusent à l’Iraq ses droits en tant que membre des Nations Unies. En fusionnant le nouveau régime des sanctions et le Programme humanitaire, revient à dire que les engagements du Conseil de sécurité concernant la levée des sanctions ont été remplacés par un embargo permanent que l’on prétend être favorable à la population iraquienne. Dès le début, les sanctions ont pour but de mettre fin à l’existence de l’Iraq en tant qu’entité souveraine et l’expropriation totale de la population iraquienne dans tous les domaines économiques, industriels ou sociaux. Ce nouveau colonialisme appelle à une lutte pour l’indépendance nationale, a-t-il protesté. Nous refusons de devenir une simple société de consommation, une société qui mange sans penser, jouit sans produire et ce, pour l’intérêt des étrangers, a-t-il ensuite ajouté.
Revenant sur les sanctions, M. Al-Qaysi a regretté que, depuis le début, les sanctions aient été imposées d’une manière ni sincère ni honnête. L’éducation et l’information ont été soumises aux sanctions, ce qui est sans précédent. Dans le Programme humanitaire, rien n’a été prévu « pour le cerveau, la culture, le tissu social, l’éducation, l’agriculture et ce qui est nécessaire pour diriger un Etat, seulement de la nourriture et des médicaments « dans des circonstances humanitaires exceptionnelles ». Depuis le départ, les sanctions ont imposé pour modifier le régime politique en Iraq. Ce que la communauté internationale met en application est tout simplement quelque chose de falsifié. M. Al-Qaysi a critiqué le fait que la nouvelle résolution doive être finalisée le 3 juillet et doive représenter un lien entre la résolution 1284 et le Programme humanitaire. Il a émis des doutes quant à la réalité d’une levée des sanctions contre l’Iraq si elle est liée à l’application d’une multitude de dispositions. Dans ce contexte, le moindre incident dans l’application des résolutions, ou 5 incidents sur 400, peuvent être montés en épingle et « un petit fonctionnaire international » peut dire que la coopération n’a pas été « complète ». Le projet de résolution risque de favoriser les manipulations des transactions liées au pétrole dans lesquelles l’Iraq ne pourra pas choisir ses partenaires commerciaux. Le Secrétaire d’Etat iraquien a également regretté que ce nouveau texte ne fasse aucune mention des zones d’exclusion aériennes. Il a appelé le représentant du Royaume-Uni à rendre publiques les « preuves préoccupantes » qu’il a dit posséder concernant le réarmement de l’Iraq en armes de destruction massive.
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