LE CONSEIL APPELLE LES NOUVEAUX DIRIGEANTS BOSNIAQUES A FAIRE PROGRESSER LE RAPATRIEMENT DES REFUGIES, LA CONSOLIDATION DES INSTITUTIONS ET LA REFORME ECONOMIQUE
Communiqué de presse CS/2127 |
Conseil de sécurité
4303e et 4304e séances plénières - matin
LE CONSEIL APPELLE LES NOUVEAUX DIRIGEANTS BOSNIAQUES A FAIRE PROGRESSER LE RAPATRIEMENT DES REFUGIES, LA CONSOLIDATION DES INSTITUTIONS ET LA REFORME ECONOMIQUE
Il soutient le Haut Représentant pour le suivi de l’Accord de paix dans
sa lutte contre les velléités d’autonomie de certains dirigeants croates de Bosnie
Tenant sa réunion d’informations régulière sur la situation en Bosnie-Herzégovine, le Conseil de sécurité a entendu, dans ce cadre, l’exposé du Haut représentant chargé d’assurer le suivi de l’application de l’Accord de paix, dit Accords de Dayton, M. Wolfgang Petritsch. A l’issue de cet exposé et du débat qui a suivi, le Ministre des affaires étrangères de l’Ukraine, M. Zlenko, qui assure ce mois la présidence du Conseil, a lu, au nom des membres du Conseil, une déclaration présidentielle. Dans cette dernière, le Conseil s’est félicité de la constitution, à l’issue des élections générales du 11 novembre 2000, des nouvelles administrations au niveau de l’Etat et des entités et leur a demandé de prendre des mesures actives pour faire progresser davantage le rapatriement des réfugiés, la consolidation des institutions étatiques et la réforme économique. A cet égard, le Haut Représentant a déclaré que si les résultats des élections ont pu susciter une certaine déception en raison notamment du score des nationalistes en Republika Srpska, il n’en demeure pas moins que, pour la première fois depuis les dernières élections de 1996, un gouvernement sans nationalistes a pu être formé au niveau de l’Etat et dans la Fédération bosno-croate. Pour ce qui est de la consolidation des institutions étatiques, le Haut Représentant a annoncé la mise en place de commissions constitutionnelles dans les deux entités afin, comme l’indique la déclaration présidentielle, de faciliter la mise en oeuvre de l’arrêt sur “les peuples constitutifs” rendu par la Cour constitutionnelle, le 1er juillet 2000. Il a également annoncé la mise en place d’une commission judiciaire indépendante pour accélérer les réformes des tribunaux et des fonctions des procureurs. S’agissant de la réforme économique, le Haut Représentant s’est montré optimiste quant à la volonté des nouveaux dirigeants de sortir le pays de la dépendance vis-à-vis de l’assistance internationale qui représente encore 60% du PNB, de mettre en oeuvre des réformes pour encourager les investissements intérieurs et extérieurs et d’équilibrer les budgets publics.
Dans la même déclaration présidentielle, le Conseil prenant note de la conclusion de l’accord instituant des relations privilégiées entre la République fédérale de Yougoslavie et la Republika Srpska, a engagé le Haut Représentant à en suivre l’application ainsi que les modifications qui pourraient lui être apportées afin de s’assurer qu’il demeure conforme à l’intégrité territoriale et à la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine et à l’Accord de paix. A cet égard, le Haut Représentant a souligné les relations excellentes qu’il entretient avec Belgrade pour faire part de sa réelle implication dans l’élaboration de cet Accord. Cet Accord prévoit notamment un engagement international continu et une implication véritable de la Bosnie-Herzégovine dans les relations ainsi créées. Pour sa part, le représentant de la République fédérale de Yougoslavie a affirmé que cet Accord réaffirme les principes et l’esprit des Accords de Dayton et que la transparence est l’élément essentiel de la coopération entre l’entité et son pays.
Le Conseil, par la déclaration présidentielle, a aussi condamné les tentatives unilatérales récentes du prétendu congrès national croate pour instaurer l’autonomie croate en contradiction avec l’Accord de paix. Il a soutenu le Haut Représentant dans les mesures qu’il prend contre les titulaires de charges publiques qui ne respecteraient pas les obligations juridiques souscrites en vertu de l’Accord de paix. Affirmant qu’il s’agit d’une initiative désespérée illustrant la perte de terrain des nationalistes dans l’ensemble de la Bosnie-Herzégovine, le Haut Représentant a annoncé la décision de retirer Ante Jelavic de la Présidence collégiale et de l’interdire de toute activité politique de même que trois de ses adjoints. A ce propos, le représentant de la Croatie a douté de la pertinence des ultimatums devant des “questions si sensibles”, en soulignant les craintes réelles de la plus petite communauté de la Bosnie-Herzégovine quant à la survie de son identité.
Enfin, la déclaration présidentielle montre la préoccupation du Conseil devant la lenteur du rapatriement des réfugiés, en particulier dans les zones urbaines. Dans ce contexte, le Haut Représentant a fait part de la véritable percée en la matière en citant les chiffres de 67 000 retours pour l’an 2000, soit le double de l’année 1999. Il a certes convenu que le problème reste loin d’être réglé en conditionnant le succès à la relance économique et aux garanties de sécurité. Il a appelé la communauté internationale à déployer des efforts supplémentaires dans les pays hôtes pour obtenir d’eux qu’ils encouragent les départs. Commentant également la question, le représentant de la Bosnie-Herzégovine a mis le Conseil en garde contre le risque de voir les réfugiés accepter de vivre en dehors de chez eux et de reconnaître ainsi le succès du nettoyage ethnique.
Outre les intervenants cités et les quinze membres du Conseil, le représentant de la Suède, au nom de l’Union européenne a pris la parole.
LA SITUATION EN BOSNIE-HERZÉGOVINE
Exposé de M. Wolfgang Petritsch, Haut Représentant chargé d'assurer le suivi de l'application de l'Accord de paix relatif à la Bosnie-Herzégovine
M. WOLFGANG PETRITSCH, Haut Représentant chargé d’assurer le suivi de l’application de l’Accord de paix relatif à la Bosnie-Herzégovine, a souligné qu’en ce moment, la communauté internationale ne peut prétendre ignorer les défis en matière de consolidation de la paix en Europe du Sud-Est. Les défis sont clairs : il s’agit de gérer la crainte des dirigeants du passé de voir les changements positifs du présent les déshériter à la fois politiquement et financièrement, a-t-il insisté. Compte tenu des changements intervenus en Croatie et en République fédérale de Yougoslavie (RFY), les résultats des élections générales en Bosnie-Herzégovine ont été constatés avec déception, a convenu le Haut Représentant, en déclarant néanmoins qu’au vu du caractère multiethnique de la Bosnie, le transfert vers les partis modérés est réel et encourageant. Dans ce contexte, il a attiré l’attention sur la formation du premier gouvernement non nationaliste tant au niveau des Etats qu’au niveau de la Fédération croato-bosniaque. En Republika Srpska, a-t-il ajouté, un démocrate modéré a été désigné à la tête du Gouvernement. Faut-il abandonner, M. Matic, le Premier Ministre de la Bosnie-Herzégovine maintenant que le pays avance? s’est demandé le Haut Représentant.
Argumentant, il a affirmé qu’aujourd’hui, Ante Jelavic perd du terrain et qu’après ses provocations, la décision a été prise de le retirer de la Présidence collégiale. Il a également été interdit de toute activité politique aux côtés de trois de ses adjoints. Peu après, son parti, prétendant parler au nom des Croates de Bosnie-Herzégovine, a annoncé un plan d’autonomie. J’ai été forcé de prendre des décisions définitives, a souligné le Haut Représentant en insistant, une nouvelle fois, sur la perte de terrain des nationalistes. Par exemple, le parti de Ante Jelavic est passé de 360 000 voix aux élections de 1996 à 160 000 l’année dernière. Certes, a reconnu le Haut Représentant, le SDS des Serbes dirigé par Radovan Karadzic a enregistré un certain succès en Republika Srpska mais ce parti n’a eu d’autres choix que de reconnaître le gouvernement modéré qui a finalement été formé.
Donnant des signes de l’amélioration de la situation, le Haut Représentant a indiqué qu’un nombre record de réfugiés et de personnes déplacées ont jugé la situation assez sûre pour rentrer. Ainsi, 67 000 retours ont été enregistrés en Bosnie-Herzégovine en 2000, soit le double de l’année 1999. Insistant encore sur la perte de terrain des nationalistes, le Haut Représentant a poursuivi sur la question économique pour dire que le pays dépend encore trop de l’assistance internationale qui représente toujours 60% du produit national brut (PNB). Il a néanmoins indiqué que pour l’an 2000, le PNB a atteint un niveau respectable de 10% alors que l’inflation continue de baisser. La mise en place de la nouvelle administration permet d’espérer que pour la première fois, les populations ont des dirigeants qui ont véritablement l’intention de prendre en mains le processus de développement. Des efforts, a indiqué le Haut Représentant, sont déployés pour attirer l’investissement intérieur et extérieur, équilibrer les budgets publics et lutter contre les trafics illégaux. Aujourd’hui, contrairement aux voeux des nationalistes, on peut constater une plus grande transparence et un meilleur respect de la règle de droit.
Venant aux questions politiques, le Haut Représentant a fait part de sa décision de mettre en place des commissions constitutionnelles dans les deux entités et une commission judiciaire indépendante pour accélérer les réforme des tribunaux et du travail des procureurs. Annonçant aussi la décision de la Bosnie-Herzégovine de nommer son premier ambassadeur à Belgrade, le Haut Représentant a expliqué ce qui, pour lui, pourrait assurer l’intégration de la région des Balkans à l’Europe. D’abord, a-t-il dit, il faut assurer l’appui continu des Nations Unies au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. Il ne faut pas diminuer la pression et tout faire pour que Slobodan Milosevic, Radovan Karadzic et Ratko Mladic soient jugés. Ensuite, il est important de ne pas focaliser l’attention sur “les hommes armés” à la frontière de l’ex-République yougoslave de Macédoine et dans le sud de la Serbie.
Nous échouons, a dit le Haut Représentant, quand nous ne sommes pas clairs et quand nous ne parlons pas d’une même voix. La redéfinition des frontières pour répondre aux exigences impossibles des nationalistes ne peut conduire qu’à plus de massacres et qu’à une présence prolongée de la communauté internationale. Nous avons des moyens de pression considérables. Tous les peuples d’Europe du Sud veulent être membres d’une Union européenne prospère et les élections en Bosnie-Herzégovine ont montré que ses citoyens ont commencé à comprendre comment le nationalisme les a appauvris et isolés. Il faut partir de ce succès et ne pas abandonner le travail alors qu’il n’est qu’à moitié achevé, a conclu le Haut Représentant.
Déclarations
M. GENNADY M. GATILOV (Fédération de Russie) a estimé que le rapport du Haut Représentant chargé su suivi de l’application de l’Accord de paix relatif à la Bosnie-Herzégovine contient des évaluations et des propositions très discutables. La Fédération de Russie a un point de vue fort mitigé sur ce rapport. Depuis la tenue des dernières élections, certains groupes boycottent les nouvelles institutions de la Bosnie-Herzégovine. Si l’on constate une augmentation du PNB du pays, la répartition et la distribution de cette croissance sont cependant sujettes à problèmes. La corruption règne et l’on constate des mouvements significatifs d’exode et de départ du pays qui touchent surtout des jeunes. La Fédération de Russie exprime des doutes sur les efforts visant à imposer la création de forces armées unifiées en Bosnie-Herzégovine, ce qui est contraire à l'Accord de Dayton. Si l’on supprime délibérément les différentes entités, comment pourra-t-on garantir les intérêts des différents groupes humains du pays? Nous aimerions avoir une réponse claire du Haut Représentant.
Des commissions constitutionnelles provisoires existent. Mais l’on veut les faire disparaître, toujours contre l’esprit de l'Accord de Dayton, a fait observer le représentant, souhaitant que le Haut Représentant apporte des éclaircissements sur ces anomalies.
M. OLE PETER KOLBY (Norvège) s'est félicité des progrès réalisés en 2000 à la suite des initiatives de M. Wolfgang Petritsch, Haut Représentant chargé d'assurer le suivi de l'application de l'Accord de paix relatif à la Bosnie-Herzégovine, pour la mise en œuvre de la paix dans les domaines de la réforme économique, du retour des réfugiés et de la consolidation des institutions et de l'Etat. Il a souligné la responsabilité fondamentale de la Bosnie-Herzégovine au niveau de l'Etat et des entités et autorités locales dans la viabilité démontrée de l'Accord de Dayton/Paris. A cet égard, il a estimé que, malgré son caractère temporaire, la création de commissions constitutionnelles dans les deux entités est une mesure importante pour protéger les intérêts vitaux du peuple constituant de la Bosnie-Herzégovine. Il a par ailleurs déclaré que la Norvège est préoccupée par la situation politique et économique de la Bosnie-Herzégovine. Elle se félicite de la formation de gouvernements non nationalistes aux niveaux national et des entités en novembre dernier et appelle les gouvernements respectifs à appliquer des politiques conformes aux priorités données par le Conseil de mise en œuvre de la paix en mai 2000. A cet égard, la Norvège condamne fermement les tentatives du Congrès national croate (HDZ) d'établir une entité croate au sein de la Bosnie-Herzégovine. Ceci constitue une violation de l'Accord de Dayton et une menace à la stabilité politique de la Bosnie-Herzégovine. Dans ce contexte, le Haut Représentant n'avait d'autre choix que de retirer M. Jelavic de la présidence de la Bosnie-Herzégovine et d'autres personnalités des certaines fonctions publiques, a déclaré M. Kolby.
La Norvège apprécie les efforts du Haut Représentant visant à assurer que l'accord sur les relations privilégiées entre la Republica Srpska et la République fédérale de Yougoslavie conformément à l'Accord de Dayton et aux constitutions de la Bosnie-Herzégovine et de la Republika Srpska. La Norvège souligne le rôle crucial que jouent les pays voisins dans la promotion d'un Etat de Bosnie-Herzégovine viable, stable, multiethnique et unifié. A cet égard, a souligné
M. Kolby, il est important d'adopter une approche régionale au problème des Balkans. Les tensions dans le sud de la Serbie, au Kosovo et à la frontière macédonienne pourraient affecter de manière défavorable le développement économique et politique de la Bosnie-Herzégovine. Les problèmes grandissants de la criminalité organisée, du trafic illicite, de la stagnation économique et de l'instabilité politique ne peuvent être abordés de manière appropriée qu'au niveau régional et grâce à une approche internationale unifiée. Il incombe aux gouvernements de la Bosnie-Herzégovine de prendre une plus grande part de responsabilité dans le développement d'une solution pacifique, démocratique et durable pour la Bosnie-Herzégovine.
M. YVES DOUTRIAUX (France) a déclaré que la formation récente du Gouvernement dirigé par M. Matic en Bosnie-Herzégovine sur la base des élections générales du 11 novembre 2000 est l’illustration de la nouvelle atmosphère qui règne dans cette région. Après les cinq années de domination nationaliste qui ont suivi la signature de l'Accord de Dayton, l’alternance en faveur d’une coalition pluriethnique, démocratique et moderne vient de se concrétiser. Tout doit être désormais fait pour que les espoirs nés des urnes ne soient pas déçus. C’est dans cet esprit que M. Hubert Védrine, Ministre des affaires étrangères de la France, s’est rendu le 9 mars dernier à Sarajevo pour évaluer les changements intervenus depuis les élections et encourager les nouvelles autorités dans la voie des
réformes et de la coexistence des communautés. La France a appuyé la décision du Haut Représentant, M. Wolfgang Petritsch, de destituer le membre bosno-croate de la présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine, M. Ante Jelavic. Cette mesure s’imposait. Il est nécessaire de marquer clairement aux yeux de tous la nécessité de ne pas dévier du cadre fixé par l’Accord de paix. Il est essentiel que les nouvelles autorités consolident le pays et mènent à terme les réformes économiques et sociales dont il a besoin.
La priorité en Bosnie-Herzégovine est l’économie, dont la situation sera déterminante lors des prochaines élections générales prévues à l’automne 2002. La lutte contre la corruption doit être au premier rang des reformes, et il convient de favoriser tout ce qui peut améliorer l’environnement économique et la confiance des investisseurs. La communauté internationale devra accompagner ce processus et l’Europe a un grand rôle à y jouer. Le rythme de rapprochement de la Bosnie-Herzégovine avec l’Union européenne dans le cadre du processus de stabilisation et d’association dépendra des progrès réalisés dans le respect des critères définis par l’Union européenne.
M. ANWARUL KARIM CHOWDHURY (Bangladesh) a pris note avec satisfaction du rapport présenté par le Haut Représentant, en particulier en ce qui concerne les résultats des élections de l’année dernière. Se félicitant surtout de la création de la Commission judiciaire indépendante, le Représentant a souligné le respect de la règle de droit et la bonne gouvernance comme moyens de relever les défis socioéconomiques. Prenant note de l’Accord sur les relations privilégiées entre la République fédérale de Yougoslavie et la Republika Srpska, le représentant a dit craindre que ce type d’accords ne porte préjudice à l’Accord de paix et à la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine. Dans ce contexte, il a dénoncé la décision unilatérale des Croates de créer une autonomie et un prétendu Congrès national croate. Le représentant a également soulevé les questions de l’économie et du retour des réfugiés avant de poser des questions directes au Haut Représentant. Il a souhaité savoir quelles sont, à ce stade, les perspectives en ce qui concerne la réalisation des objectifs de l’Accord de Dayton et la fin de la Mission des Nations Unies. Quelle est la nature des relations entre le Haut Représentant et Belgrade, a encore demandé le représentant?
M. MARK MINTON (Etats-Unis) a estimé que le retour à la normale et la reconstruction prendront du temps en Bosnie-Herzégovine. Des factions extrémistes continuent de saper les efforts en cours comme le montre le cas du Congrès national croate. Les Etats-Unis appuient les mesures prises par le Haut Représentant pour diminuer l’impact de toutes les positions extrémistes. Nous estimons que la communauté internationale a le droit de demander des comptes sur l’application de l'Accord de Dayton lorsque se posent des problèmes. Le Haut Représentant doit respecter les principes de Dayton pour s’assurer que les mesures prises n’en violent pas l’esprit et les termes. Les Etats-Unis auraient aimé que la déclaration du Haut Représentant contienne des propositions sur la loi électorale devant régir les scrutins électoraux en Bosnie-Herzégovine. Nous l’appelons à réfléchir à la question.
M. NOUREDDINE MEJDOUB (Tunisie) s’est félicité du fait que la Bosnie-Herzégovine se soit dotée d’un Conseil des ministres élu dont la principale tâche consiste à entreprendre des réformes fondamentales à tous les niveaux. Il s’est déclaré réconforté par la reconnaissance du drapeau, des armoiries et de l’hymne national de la Bosnie-Herzégovine par l’Assemblée nationale de la Republika Srpska, symboles d’un Etat uni et d’une symbiose des communautés. Il a ajouté que la communauté internationale ne devrait se montrer en aucune manière tolérante à l’égard de tout projet sécessionniste des partis nationalistes. Il a déploré la proclamation d’autonomie des Croates nationalistes de Bosnie-Herzégovine et souhaité qu’ils réexaminent leur décision à la lumière des accords de paix.
M. Mejdoub a ensuite déclaré qu’une économie forte et prospère en Bosnie-Herzégovine est incontestablement un facteur de consolidation de la paix dans ce pays et souhaité qu’une attention particulière soit accordée aux difficultés économiques que connaît la Bosnie-Herzégovine et qui découlent directement des effets de la guerre. Il a également souhaité que la réforme du système judiciaire soit menée à son terme dans des conditions optimales et a appuyé la création de la commission judiciaire indépendante chargée par le bureau du Haut Représentant de mettre en oeuvre une réforme cohérente et globale. Il a ensuite salué la création de la fonction de médiateur national.
Le représentant a poursuivi en souhaitant l’accélération de programmes ciblés permettant aux réfugiés de retrouver la place qui leur revient au sein de la société bosnienne, tels que le renforcement de la sécurité autour des zones habitées par les minorités, le règlement de questions de propriété foncière, l’accès aux services publics de base, à même d’aider à l’éclosion d’une société multiethnique en Bosnie-Herzégovine. Il a conclu en déclarant que tout désengagement de la communauté internationale de la Bosnie-Herzégovine, en cette étape décisive, est prématuré et risque d’avoir des conséquences inattendues.
M. SHEN GUOFANG (Chine) s’est déclaré satisfait de l’amélioration de la situation en Bosnie-Herzégovine tout en regrettant la lenteur dans la mise en oeuvre intégrale de l’Accord de paix. Il a espéré que les institutions internationales poursuivront leur coopération et souhaité que la communauté internationale fasse en sorte que les populations soient de moins en moins dépendantes de l’aide internationale. Pour le représentant, la réconciliation ethnique est la base fondamentale d’une vie pacifique et prospère. Il a donc souligné qu’en la matière, il reste beaucoup reste à faire. Se déclarant inquiet des tendances séparatistes, il a appelé à la vigilance et à l’adoption de mesures de précaution.
M. STEWART ELDON (Royaume-Uni) s’est lui aussi félicité des progrès accomplis sur les plans politique, économique et juridique. Il a également qualifié de signe positif le nombre accru de réfugiés et de personnes déplacées qui sont rentrés en Bosnie-Herzégovine. Il a cependant admis qu’en la matière, il reste beaucoup reste à faire. Comment faire pour accélérer ces retours, a demandé le représentant avant de citer comme priorité la mise en place d’une nouvelle loi électorale. Se félicitant, dans ce contexte, de la décision d’écarter du pouvoir les nationalistes radicaux, le représentant a néanmoins souligné l’importance qu’il y a à maintenir le contact avec la communauté croate. Il a également soulevé la question des relations entre la République fédérale de Yougoslave et la Republika Srpska qu’il a voulues transparentes, avant de conclure sur les “bonnes nouvelles” concernant le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie.
M. DAVID COONEY (Irlande) a souscrit à la déclaration de l’Union européenne qui sera faite par la Suède. L’Irlande, a dit le représentant, considère que la démocratisation et le développement de la Bosnie-Herzégovine sont essentiels à la stabilité de la région des Balkans. Des progrès ont été accomplis depuis la signature, il y a cinq ans, de l’Accord de paix, et nous estimons que l’approche régionale qui a été adoptée est la meilleure et encourageons toutes les parties prenantes de la région à contribuer au renforcement des relations interétatiques. Nous pensons aussi que l’implication de la communauté internationale en Bosnie-Herzégovine doit se poursuivre. Notre pays, a poursuivi M. Cooney, se réjouit de la formation d’un gouvernement modéré, dont ne fait partie aucun parti nationaliste, en Bosnie-Herzégovine . La délégation irlandaise espère que ce gouvernement fera des progrès rapides dans la promotion d’institutions capables de gérer dans la durée une société démocratique et multiethnique. L’Irlande se joint à d’autres pays pour condamner les initiatives du soi-disant Congrès national croate qui prétend établir un pouvoir autonome croate.
L’Irlande est inquiète du nombre et de la situation des réfugiés en Bosnie-Herzégovine, où plus d’un million de personnes continuent de vivre en situation de déplacés. Notre pays est aussi concerné par les trafics d’êtres humains qui ont lieu dans la région. Nous sommes cependant satisfaits que plusieurs auteurs des crimes commis sous les régimes précédents dans la région soient aujourd’hui traduits en justice et nous encourageons toutes les parties à coopérer pleinement avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie.
M. KISHORE MAHBUBANI (Singapour) a estimé que la paix en Bosnie-Herzégovine reste un défi pour les Nations Unies et la communauté internationale. Cela fait cinq ans, a-t-il rappelé, que l'Accord de Dayton ont été conclus et que l’animosité entre les trois groupes ethniques perdure. La situation reste fragile en Bosnie-Herzégovine et dans la région, a souligné le représentant en arguant de l’exposé du Haut Représentant qui a parlé du retour du “crépitement des fusils”. Dans ce contexte, une question s’impose, a estimé le représentant en demandant si le moment est venu de revoir l’approche adoptée pour la Bosnie-Herzégovine sans pour autant abandonner l’esprit et la lettre de l'Accord de Dayton. La dernière initiative des Croates de Bosnie signifie-t-elle, a-t-il souhaité savoir, que "que le génie nationaliste est sorti de sa bouteille?" Quelles sont les mesures prises pour ramener les Croates de Bosnie à la raison et comment le Conseil peut-il épauler ces efforts? Y a-t-il des éléments de l'Accord de Dayton qu’il conviendrait de modifier pour répondre au mieux aux objectifs de stabilité? La situation en République fédérale de Yougoslavie a-t-elle eu des retombées positives ou négatives en Bosnie-Herzégovine? Telles sont les questions posées par le représentant.
Mme PATRICIA DURRANT (Jamaïque) a indiqué que l’évolution dans le sens de la démocratie intervenue en République fédérale de Yougoslavie était favorable à l’évolution du processus de paix de la région. Les acquis de mise en oeuvre de l’Accord de Dayton des cinq dernières années ne doivent pas être remis en cause. Les récents progrès politiques qui se sont réalisés en Bosnie-Herzégovine après les élections générales sont à encourager. La Jamaïque s’associe aux autres Etats pour condamner les velléités nationalistes du Congrès national croate. Se déclarant favorable au renforcement de la surveillance des frontières en vue de promouvoir la stabilité et la sécurité de la région, la délégation jamaïcaine est
d’avis que les progrès économiques constitueront la clef de la normalisation de la situation dans le territoire, et exprime son inquiétude à l’égard de la montée du chômage parmi les franges les plus jeunes de la population. Nous soutenons l’avis du Haut Représentant sur la question du jugement par le Tribunal pénal international pour l’ex Yougoslavie de tous les criminels de guerre. A cet égard, notre délégation se réjouit que le crime de viol ait été reconnu comme un crime majeur contre la personne humaine.
M. ALFONSO VALDIVIESO (Colombie) a estimé que la situation politique, économique et social de la Bosnie-Herzégovine a évolué de manière positive au cours de ces derniers mois, en mettant l’accent, en particulier, sur les résultats des élections et les réformes économiques. Il a néanmoins souligné la fragilité de ces changements et appelé la communauté internationale à maintenir son engagement dans ce pays. Il faut éviter, a dit le représentant, que la fragilité institutionnelle actuelle permette à la crise des pays voisins d’avoir des conséquences fâcheuses sur la consolidation d’une société multiethnique en
Bosnie-Herzégovine. Posant, à son tour, des questions au Haut Représentant,
M. Valdivieso a souhaité connaître la nature de l’appui dont disposent les nationalistes dans la population bosno-croate. Quelles sont les mesures prises pour prévenir un effet négatif, par exemple, sur les forces militaires? L’initiative des Croates pourrait-elle être imitée par d’autres partis? Que peut faire le Conseil pour convaincre ce groupe de renoncer à créer un gouvernement parallèle? a encore demandé le représentant.
M. MAMOUNOU TOURE (Mali) a déclaré que sa délégation se félicite de la constitution de nouvelles institutions au niveau de l’Etat et des entités en Bosnie-Herzégovine, suite aux résultats des dernières élections générales du
11 novembre 2000. La bonne gouvernance et la démocratie doivent permettre aux nouvelles administrations de se placer au-dessus des considérations ethniques, et le partage du pouvoir et des responsabilités doit guider les responsables dans l’exercice de leurs fonctions. L’utilisation efficiente des nouvelles institutions contribuera à renforcer les bases encore fragiles du processus démocratique et permettra à la Bosnie-Herzégovine de retrouver l’intégralité de son passé multiculturel. Le Mali pense que la conclusion d’un accord de relations privilégiées entre la Republika Srpska et la République fédérale de Yougoslavie est une bonne chose en soi si l’accord est conforme à l’intégrité territoriale et à la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine. Le développement économique étant le meilleur garant de la paix, le Mali invite les autorités de Bosnie-Herzégovine à persévérer dans la voie des réformes économiques et à coopérer avec les organisations financières internationales pour intégrer le pays dans les structures euro-atlantiques. Le Mali est préoccupé par la question de la mise en place d’un système judiciaire efficace capable de rendre une justice saine pour tous les citoyens. Nous tenons à encourager les initiatives visant à favoriser le retour des réfugiés et souhaitons que toutes les dispositions soient prises pour soutenir ceux qui regagnent leur foyer dans un état de dénuement. Le Mali soutient le rôle joué par le Haut Représentant qu’il estime essentiel.
M. ANUND PRIYAY NEEWOOR (Maurice) a mis l’accent sur la nécessité d’accorder l’attention requise au secteur de l’éducation en ce sens que “c’est là que l’on pourrait inculquer aux jeunes générations l’idée d’une coexistence multiethnique”. Le représentant s’est, par ailleurs, félicité des réformes économiques et du retour des réfugiés et des personnes déplacées. Il a en outre encouragé le Haut Représentant de prendre les mesures nécessaires pour écarter les nationalistes du pouvoir.
M. ANATOLIY ZLENKO, Ministre des affaires étrangères de l'Ukraine, a exprimé l’appui de son pays aux initiatives de M. Petritsch, qui visent à soutenir les populations de Bosnie-Herzégovine. Nous nous félicitons des résultats des élections du 11 novembre 2000 qui ont permis de mettre en oeuvre des politiques et des institutions pluriethniques, et non nationalistes. La question de la restructuration des commissions constitutionnelles ne devrait ni prendre le pas sur celle des réformes économiques ni l’occulter, les sujets économiques étant pour notre délégation les plus importants à traiter en ce moment. L’Ukraine estime qu’il faut améliorer les conditions de sécurité, assurer la protection des biens et des personnes et promouvoir la défense des droits de l’homme dans le territoire. La protection des minorités doit, quant à elle, être reconnue. La minorité ukrainienne est la quatrième composante ethnique de la Bosnie-Herzégovine. Elle a subi beaucoup de violations et nous pensons que des efforts suffisants n’ont pas encore été déployés pour assurer la survie harmonieuse des groupes minoritaires. Nous ne pouvons accepter la modification des principes de Dayton, ce qui serait une source de déstabilisation de toute la région.. Nous rejetons toute tentative unilatérale visant à créer une quelconque structure parallèle sur le territoire croate qui viendrait miner les équilibres actuels. Nous partageons le point de vue du Haut Représentant sur le Conseil national croate, mais nous sommes opposés à toute mesure de sanctions à l’encontre les populations et des entités croates, qui n’auraient que des impacts négatifs sur le dialogue. Nous demandons à la Yougoslavie, qui a signé un accord sur des relations privilégiées avec la Republika Srspka de respecter la souveraineté et l’intégrité de la Bosnie-Herzégovine. L’Ukraine soutient une Bosnie-Herzégovine démocratique et économiquement intégrée à l’Europe.
M. HUSEIN ZIVALJ (Bosnie-Herzégovine) a soulevé la question des réfugiés et des personnes déplacées en soulignant que si, la lenteur du processus de retour peut être attribuable aux problèmes de sécurité et d’opportunités économiques, il n’en reste pas moins que le processus de retour doit être accéléré au risque de voir les personnes concernées accepter le nettoyage ethnique comme une réalité irréversible. C’est pourquoi, a dit le représentant, il faut tout mettre en oeuvre pour accélérer les retours dans l’ensemble de la Bosnie-Herzégovine, et en particulier, dans les régions minoritaires. Le représentant a aussi évoqué la question du Service des frontières, créé par la Déclaration de New York visant à combattre les trafics illicites. Le Service ne couvrant que 60% de la frontière, le représentant a souligné l’urgence qu’il y a à l’élargir et faire en sorte qu’il contrôle toutes les frontières avec les Etats voisins. Etant donné le caractère transnational des crimes, cela contribuerait à lutter contre la criminalité dans l’ensemble de la région, a estimé le représentant.
M. PIERRE SCHORI (Suède) a relevé, au nom de l’Union européenne et des pays associés, que pour la première fois depuis la signature de l’Accord de Dayton, la Bosnie-Herzégovine a un gouvernement sans la participation de partis nationalistes. L’Union européenne condamne les récentes initiatives unilatérales du Congrès national croate visant à sortir du cadre défini par l'Accord de Dayton et de Paris, et elle réitère son soutien à la décision du Haut Représentant d’exclure M. Ante Jelavic de la présidence collégiale de Bosnie-Herzégovine. Nous soutenons dans le même ordre d’idées le désir exprimé par le Haut Représentant de maintenir un dialogue avec les Bosno-Croates et d’encourager leur participation au développement socioéconomique du pays. L’Union européenne rappelle le rôle essentiel que doivent jouer les Etats voisins dans la promotion d’une Bosnie-Herzégovine multiethnique et stable. Nous notons la récente création d’un cadre de relations privilégiées entre la République fédérale de Yougoslavie (RFY) et la Republika Srspka de Bosnie-Herzégovine, et demandons au Haut Représentant de veiller à ce que tout amendement futur qui serait apporté au texte constitutif de ce cadre respecte la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Bosnie-Herzégovine. L’engagement de l’Union européenne envers ce pays est exprimé, entre autres, par le Processus de stabilisation et d’association, qui est la voie indiquée pour le rapprochement de la Bosnie-Herzégovine avec l’Union. Nous voulons rappeler l’importance de la mise en oeuvre de réformes politiques, économiques, démocratiques, et de respect des droits de l’homme et de l’état de droit, telles qu’elles sont énoncées dans le moratoire publié par l’Union européenne, pour que nous puissions passer à la prochaine étape du Processus, qui serait une étude de faisabilité.
M. IVAN SIMONOVIC (Croatie) a estimé que les problèmes majeurs en Bosnie-Herzégovine demeurent le retour des réfugiés, la revitalisation économique ainsi que le fonctionnement et le développement des institutions. Il a rappelé qu’à maintes reprises, son pays a attiré l’attention de la communauté internationale sur le paradoxe principal de la structure constitutionnelle de la Bosnie-Herzégovine qui voit d’un côté, l’intégrité du pays, et de l’autre, une partition de fait. Pour le représentant, l’Accord de Dayton ne donne aucune indication en la matière et au contraire, il ne fait que geler les lignes de confrontation entre la Republika Srpska et la Fédération en légitimant ainsi les frontières dessinées par la force. L’Accord de Dayton est donc une oeuvre inachevée, a dit le représentant en affirmant que tant que les trois entités de la Bosnie-Herzégovine resteront privées de l’exercice de leurs droits en Republika Srpska, l’intégrité de la Bosnie-Herzégovine demeurera un projet irréaliste. Car, a-t-il expliqué, pendant que la Republika Srpska vit un statut d’”Etat parallèle ethniquement pure”, la Fédération est contrainte, elle, à lutter pour maintenir l’équilibre requis entre la minorité croate et la majorité bosnienne.
Le représentant a condamné la décision unilatérale de “certains dirigeants politiques croates” en considérant que la Déclaration de Mostar ne peut que conduire la communauté croate à l’isolement et à une plus grande marginalisation. Il a néanmoins estimé que les ultimatums ne sont pas la méthode idéale lorsque l’on traite de “questions sensibles”. M. Simonovic a rappelé que les Croates constituent la composante la plus petite de la Bosnie-Herzégovine et que leur survie dépend d’un système politique garantissant la préservation de leur identité nationale, culturelle et religieuse et une représentation réelle dans les institutions conjointes. Ces objectifs figurent dans l’Accord de Dayton, a souligné le représentant en demandant s’ils ont été réalisés et si les mesures prises par la communauté internationale ont facilité leur réalisation.
Le représentant a conclu en attirant l’attention sur les règles prévues par la Commission électorale. Selon lui, les Croates pourraient interpréter ces règles comme une menace à une représentation équitable aux institutions conjointes. Il a émis la crainte que ces règles ne mènent à une radicalisation de la position de la communauté croate. Il a ajouté que la mise en oeuvre de l’Accord de Dayton ne peut être vue comme une notion statique. C’est une notion dynamique, a dit le représentant en arguant que cette mise en oeuvre exige une évolution appropriée des institutions conjointes garantissant une véritable représentation et une protection des trois composantes ethniques dans toute l’étendue de la Bosnie-Herzégovine.
M. DEJAN SAHOVIC (République fédérale de Yougoslavie) a déclaré que la République fédérale de Yougoslavie (RFY) est pleinement partie prenante de la mise en oeuvre intégrale et du plein respect des termes de l'Accord de Dayton et Paris. Notre pays espère aussi que tous les autres Etats respecteront ces textes dans leur esprit et leur lettre, ce qui serait dans le meilleur intérêt des trois peuples qui coexistent en Bosnie-Herzégovine et dans celui de la stabilité et du développement de la région. La RFY et la Bosnie-Herzégovine ont établi des relations diplomatiques et échangeront bientôt des ambassadeurs. Nos deux pays sont déterminés à développer des relations complètes, basées sur les règles de bon voisinage et de respect mutuel, et sur les principes du respect de l’intégrité territoriale, de la souveraineté et de l’indépendance politique. La RFY et la Republika Srpska ont, quant à elles, signé un accord de création de relations privilégiées, qui est conforme à l'Accord de Dayton et de Paris. Ces relations respectent l’intégrité et la souveraineté de la Bosnie-Herzégovine, et si elles sont basées sur les principes de Dayton, elles en réaffirment aussi l’esprit. Elles reflètent également le besoin de la RFY et de la Republika Srpska d’harmoniser leurs relations dans les domaines économique, culturel, scientifique et autres. La transparence de la coopération entre les deux entités est évidente dans le texte adopté. Un nombre d’accords interétatiques entre la RFY et la Bosnie-Herzégovine touchant notamment à la coopération économique, au commerce, aux investissements, aux transports, aux douanes et à la justice pénale sont aussi à l’examen. La RFY souhaite profondément le retour des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur de toute l’ex-Yougoslavie. Les recensements en cours nous donneront, a espéré M. Sahovic, une idée réelle de la situation en vue de résoudre cette question.
Répondant aux questions des délégations, le Haut Représentant a commenté les observations sur la doctrine de défense commune et a expliqué que les progrès effectués ont permis à la Présidence collégiale de s’entendre sur une force de défense commune. Abordant la question de la constitution, il a argué de l’importance qu’il y a à respecter l’esprit et la lettre de l’Accord de Dayton. Il a expliqué que les Commissions constitutionnelles ont été mises en place sur une base provisoire et qu’elles sont chargées de présenter des recommandations sur l’amélioration des constitutions des deux entités et l’exécution des décisions de la Cour constitutionnelle. Répondant à la question sur les perspectives de la Mission de l’ONU, le Haut Représentant a indiqué que les tâches qui restent à accomplir par l’ONU pourraient être exécutées selon le calendrier prévu.
En ce qui concerne ses contacts avec Belgrade, le Haut Représentant a fait part de la collaboration étroite qui caractérise ces relations avec la République fédérale de Yougoslavie surtout pour ce qui est de la question des réfugiés et de l’Accord entre la Republika Srpska et la République fédérale de Yougoslavie. Il a insisté sur le fait que l’Accord prévoit un engagement international constant et une implication effective de la Bosnie-Herzégovine. Abordant les questions économiques, le Haut Représentant est revenu sur le syndrome de la dépendance vis-à-vis de l’assistance internationale. Il a donc fait part de ses efforts consistant à sensibiliser les uns et les autres pour accélérer le processus d’appropriation. Revenant sur la question des réfugiés, il a indiqué que le retour de ces derniers a accusé une percée, illustrant ainsi les progrès accomplis même si de nombreuses questions restent à régler. Pour accélérer les choses, il convient de renforcer les efforts au niveau intérieur, a-t-il dit en conditionnant
les progrès en la matière au degré de la relance économique du pays et de la sécurité. Parlant en particulier du retour des réfugiés croates, le Haut Représentant a estimé que si la communauté internationale fait un geste supplémentaire, elle pourrait encourager les pays hôtes à obtenir des départs plus nombreux.
Evoquant la Déclaration de Mostar, le Haut Représentant a insisté sur la fermeté nécessaire et la primauté du droit. Il a fait part des contacts qu’il entretient avec la communauté croate en soulignant, dans ce contexte, que les Croates sont représentés équitablement dans le nouveau gouvernement. Pour la première fois, a-t-il ajouté, les nationalistes sont exclus du gouvernement. Il faut, a-t-il dit, continuer à appuyer le peuple croate tout en le persuadant qu’il existe d’autres possibilités de représentation que les nationalistes.
Concluant sur l’Accord de Dayton, le Haut Représentant a réaffirmé leur place comme le fondement de la paix en Bosnie-Herzégovine. L’Accord n’est pas parfait, a-t-il convenu, en expliquant que, sur le terrain, son Bureau et la Cour constitutionnelle ont le pouvoir de l’adapter. A cet égard, il a indiqué qu’il est attendu de la République fédérale de Yougoslavie qu’elle rejoigne la Croatie comme parties intégrantes de la mise en oeuvre de l’Accord de Dayton.
Projet de déclaration du Président sur la Bosnie-Herzégovine
Le Conseil de sécurité se félicite de l’exposé du Haut Représentant pour la mise en oeuvre de l’Accord-cadre général sur la paix en Bosnie-Herzégovine et des annexes audit accord (dénommés collectivement l’Accord de paix, S/1995/999, annexe) sur la situation en Bosnie-Herzégovine et le remercie des efforts qu’il déploie pour appliquer cet accord.
Le Conseil préconise la poursuite de la coopération politique et économique régionale, conformément aux principes de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’inviolabilité des frontières de la Bosnie-Herzégovine et des autres États de la région.
Le Conseil se félicite de la constitution, à l’issue des élections générales du 11 novembre 2000, des nouvelles administrations au niveau de l’État et des entités et leur demande de prendre des mesures actives pour faire encore progresser le rapatriement des réfugiés, la consolidation des institutions étatiques et la réforme économique. Il se félicite des progrès réalisés dans la création d’une identité de défense au niveau de l’État dans le plein respect des dispositions pertinentes de l’Accord de paix et encourage la Présidence de la Bosnie-Herzégovine à régler sans retard les points en suspens.
Le Conseil se félicite de la création de commissions constitutionnelles pour protéger les intérêts vitaux des peuples constitutifs afin de faciliter la mise en oeuvre de l’« arrêt sur les peuples constitutifs » rendu par la Cour constitutionnelle de la Bosnie-Herzégovine le 1er juillet 2000, et demande aux parlements des entités d’engager un débat sur les modifications qu’il est nécessaire d’apporter à leurs constitutions respectives compte tenu des propositions examinées par les commissions constitutionnelles.
Le Conseil prend note de la conclusion de l’accord instituant des relations privilégiées entre la République fédérale de Yougoslavie et la Republika Srpska et engage le Haut Représentant à en suivre l’application ainsi que les modifications qui pourraient lui être apportées, afin de s’assurer qu’il demeure conforme à l’intégrité territoriale et à la souveraineté de l’ensemble de la Bosnie-Herzégovine et à l’Accord de paix.
Le Conseil condamne les tentatives unilatérales récentes du prétendu congrès national croate pour instaurer l’autonomie croate en contradiction flagrante avec les dispositions de l’Accord de paix, et demande à toutes les parties de collaborer dans le cadre des institutions légales et du cadre constitutionnel de la Bosnie-Herzégovine et des entités. Il soutient le Haut Représentant dans les mesures qu’il prend contre les titulaires de charges publiques qui ne respecteraient pas les obligations juridiques souscrites en vertu de l’Accord de paix ou les modalités de sa mise en oeuvre.
Le Conseil se félicite des progrès réalisés en ce qui concerne le rapatriement des réfugiés et la mise en oeuvre de la loi sur les biens en 2000, mais demeure préoccupé par la lenteur du rapatriement des réfugiés, en particulier dans les zones urbaines. Le Conseil maintient qu’il incombe aux autorités locales d’accélérer le rythme des retours et de la mise en oeuvre de la loi sur les biens.
Le Conseil engage tous les partis politiques de Bosnie-Herzégovine et leurs dirigeants respectifs à collaborer de façon constructive au sein des institutions légales de ce pays en vue d’appliquer intégralement l’Accord de paix.
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