En cours au Siège de l'ONU

DSG/SM/115

LA VICE-SECRETAIRE GENERALE DEMANDE QUE L'ON EXAMINE LE CADRE INSTITUTIONNEL DE LA GOUVERNANCE MONDIALE

4 décembre 2000


Communiqué de Presse
DSG/SM/115


LA VICE-SECRETAIRE GENERALE DEMANDE QUE L'ON EXAMINE LE CADRE INSTITUTIONNEL DE LA GOUVERNANCE MONDIALE

20001204

On trouvera ci-après le texte de la déclaration que la Vice-Secrétaire générale, Mme Louise Fréchette, a faite le 15 novembre à Stockholm devant l’Institut Utrikespolitiska.

À l’instar de votre pays lui-même, cet organisme prestigieux qu’est le vôtre est la preuve vivante que la capacité d’influer n’est pas nécessairement fonction de la taille. L’Organisation des Nations Unies sait mieux que toute autre organisation que la Suède cultive depuis longtemps l’art de se battre contre plus fort que soi.

De fait, depuis l’époque de Dag Hammarskjöld, il est difficile d’imaginer l’ONU sans la Suède. Dans tous les domaines de travail, votre pays fait preuve d’un esprit d’initiative et d’une volonté politique que l’on aimerait voir s’étendre à tous les États Membres. La Suède n’est pas seulement un îlot de stabilité dans un monde déchiré mais aussi un bastion de solidarité. Tout au long de l’histoire de l’ONU, son attachement au maintien et au rétablissement de la paix, au développement et au droit international, à la sécurité et aux droits de l’homme a aidé de nombreux pays, bien au-delà de ses frontières, à se sentir plus en sécurité.

Vous n’êtes donc pas sans savoir que cette année de début de millénaire est importante dans l’histoire de l’ONU parce qu’elle nous a fourni une occasion exceptionnelle de réfléchir aux moyens de renforcer l’Organisation. Votre Premier Ministre, M. Göran Persson, l’a dit avec éloquence dans l’allocution qu’il a prononcée au Sommet du Millénaire : il faudrait que le Sommet fasse comprendre avec force que nous avons un avenir et que cet avenir nous est commun à tous.

De fait, le Sommet du Millénaire a constitué un événement d’une importance capitale pour l’avenir de l’ONU, on peut même dire un tournant dans son histoire. Il lui permet en effet – ce qui est un avantage considérable – de commencer le nouveau siècle en s’appuyant sur un ensemble de principes acceptés de tous, des principes fermement ancrés dans la Charte mais qui reflètent la réalité d’aujourd’hui.

Kofi Annan a dit dans son Rapport sur le Millénaire qu’il fallait mettre les individus au centre de tout ce que fait l’Organisation. Cette préoccupation s’exprime tout au long de la Déclaration du Millénaire que le Sommet a adoptée et dans laquelle les dirigeants du monde entier ont dit clairement quelles étaient leurs priorités : s’attaquer à la pauvreté, mettre fin aux conflits, protéger l’environnement.

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Ils ont en outre affirmé que l’ONU était le lieu de rassemblement indispensable de l’humanité tout entière et, en venant aussi nombreux à New York, ont montré l’importance qu’ils attachent à cette idée.

La Déclaration du Millénaire est très importante mais elle n’est qu’un commencement, et non une fin, en ce sens qu’il nous faut maintenant accomplir l’énorme programme de travail qui en découle. Nous ne devons pas permettre que l’esprit qui a animé le Sommet du Millénaire se dissipe maintenant que le Sommet est terminé. Aussi nous faut-il agir – et quand je dis « nous », je veux dire par là la communauté internationale dans son sens le plus large.

Ce n’est qu’en agissant ensemble à l’échelon international, en effet, que nous pouvons espérer progresser dans la réalisation des objectifs énoncés dans la Déclaration du Millénaire qui sont les plus difficiles à atteindre, à savoir l’atténuation de la pauvreté, la lutte contre le sida, la protection de l’environnement, de la paix et de la sécurité et la réduction de la fracture numérique.

Permettez-moi de rappeler certaines des manifestations qui, dans un an ou un peu plus, fourniront aux gouvernements d’excellentes occasions de montrer qu’ils ne se payaient pas de mots lorsqu’ils ont rédigé la Déclaration du Millénaire :

– La Conférence des Nations Unies sur les pays les moins avancés, qui sera accueillie par l’Union européenne à Bruxelles, en mai prochain;

– La réunion intergouvernementale de haut niveau chargée d’examiner la question du financement du développement à l’échelon intergouvernemental;

– La session extraordinaire de l’Assemblée générale sur le VIH/sida;

– La Conférence sur les armes légères; et

La Conférence des Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, qui se tient actuellement à La Haye. J’espère que cette conférence donnera un nouvel élan, dans le plus grand nombre de pays possible, au processus de ratification du Protocole de Kyoto afin que celui-ci puisse entrer en vigueur avant le dixième anniversaire de la Conférence de Rio, en 2002, ce qui permettrait d’atteindre l’un des buts de la Déclaration du Millénaire.

Nous avons tous le devoir de faire en sorte que – pour reprendre à nouveau les termes de la Déclaration – « les richesses incommensurables que la nature nous offre puissent être préservées et léguées à nos descendants ».

J’aimerais saisir cette occasion pour rappeler que 2002 ne marquera pas seulement le dixième anniversaire de la Conférence de Rio, mais aussi le trentième anniversaire de la Conférence de Stockholm sur l’environnement humain. Depuis la tenue de cette conférence en 1972, la Suède a fait preuve d’un remarquable leadership en matière de développement durable et de défense de l’environnement.

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Elle fait partie, avec d’autres pays nordiques, des pays qui appuient le plus fermement le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), dont la création date de la Conférence de Stockholm, et en ce qui concerne les changements climatiques, elle fait oeuvre de pionnier. Je sais que nous pouvons compter sur elle pour aller encore plus loin dans cette direction lorsqu’elle assumera la présidence de l’Union européenne, au premier semestre 2001.

Mesdames et Messieurs, je n’ai souligné que quelques-unes des possibilités d’action concertée qui se présenteront dans un an ou un peu plus tard. Mais si nous réussissons à les mettre toutes à profit, nous aurons beaucoup contribué à accroître la crédibilité de l’ONU en tant qu’instance capable de rassembler l’humanité tout entière et de faire progresser l’examen des questions touchant ses intérêts vitaux.

Ceci nous amène à réfléchir à l’institution qu’est l’Organisation des Nations Unies. Si nous voulons la renforcer, il faut continuer à la réformer. La réforme de l’Organisation a été l’une des grandes questions soulevées lors du Sommet du Millénaire. Celle du Conseil de sécurité, en particulier, a été demandée par presque tous les orateurs – et avec raison. Il est indispensable pour la sécurité de tous que cet organe soit en mesure de s’acquitter plus efficacement de ses énormes responsabilités et que tous les peuples du monde puissent lui reconnaître davantage de légitimité.

Sur ce point également, je voudrais souligner la contribution de la Suède. Son ancien et remarquable représentant permanent auprès de l’Organisation des Nations Unies, M. Hans Dahlgren, actuellement membre du Gouvernement suédois, s’est montré particulièrement constructif lorsqu’il a assuré la coprésidence du Groupe de travail de l’Assemblée générale chargé d’étudier la question de l’élargissement du Conseil de sécurité – élargissement indispensable pour que la réforme soit le fait de tous les États Membres, et non seulement des pays qui aspirent à devenir membres permanents du Conseil.

D’autres réformes, dans le domaine de la paix et de la sécurité, sont tout aussi cruciales. Permettez-moi d’insister particulièrement aujourd’hui sur l’une d’elles, dont je me suis beaucoup occupée personnellement ces derniers mois. Je me réfère, bien entendu, à la réforme des opérations de paix des Nations Unies, qui a fait l’objet du rapport Brahimi.

Ces opérations – dont un grand nombre sont beaucoup plus complexes que le maintien de la paix dans son acception traditionnelle – sont une question de vie ou de mort pour des millions d’êtres humains. C’est à l’aune de leur succès ou de leur échec, plus que celui de toute autre activité, que l’Organisation des Nations Unies tend à être jugée.

Le Groupe d’étude sur les opérations de paix de l’Organisation des Nations Unies présidé par M. Brahimi a formulé avec une clarté sans précédent les réformes à entreprendre pour que l’ONU soit plus à même de conduire ces opérations. Dans son premier rapport sur les moyens d’appliquer ces propositions de réforme, qu’il vient de faire paraître, le Secrétaire général fournit un plan d’action détaillé aux États Membres et demande que l’on augmente d’urgence les ressources consacrées au maintien de la paix.

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Ces ressources ne sont pas négligeables mais si les États Membres veulent vraiment que l’ONU soit plus performante dans ce domaine – ce qu’ils affirment presque tous –, il faut qu’ils lui en donnent vraiment les moyens.

En ce qui concerne la suite donnée au rapport Brahimi, là aussi, l’ONU apprécie l’appui de la Suède et des autres pays nordiques. Demain, à Oslo, je prendrai part, avec de hauts responsables des pays nordiques et d’anciens et actuels hauts fonctionnaires des Nations Unies de ces pays, à une consultation sur des questions liées à l’application des recommandations formulées dans le rapport. J’attends avec intérêt de débattre avec eux de questions telles que le renforcement des capacités du Secrétariat d’élaborer des stratégies de consolidation de la paix, le recours plus fréquent à des missions d’enquête et d’autres questions connexes.

Nous étudierons aussi, je crois, les moyens de renforcer la prévention des conflits à l’échelle du système des Nations Unies, domaine dans lequel je sais que la Suède a beaucoup à apporter, comme en témoigne l’ouvrage publié l’an dernier sous le titre « Prévention des conflits violents : le plan d’action de la Suède ».

Dans le domaine de la paix et de la sécurité aussi, le rôle de la Suède sera encore plus important lorsqu’elle assumera la présidence de l’Union européenne, en janvier prochain. L’ONU suit avec intérêt les efforts que fait l’Union pour se doter des moyens nécessaires pour participer à des activités de défense de la paix. J’espère que l’Organisation pourra collaborer davantage et échanger davantage d’informations sur ce point avec les institutions suédoises concernées. Il importe également de souligner qu’il ne faudrait pas que l’augmentation du budget consacré aux opérations de paix des Nations Unies se fasse au détriment de celui consacré au développement. Je sais que la Suède fait tout son possible pour donner plus de poids encore à ces deux éléments essentiels de l’action de l’ONU. J’espère qu’en tant que l’un des pays qui ont la plus longue expérience de l’aide au développement, elle pourra aussi contribuer à rassurer les pays en développement.

La Déclaration du Millénaire fait comprendre très clairement qu’il faut augmenter les ressources consacrées aux opérations de paix et au développement. Il y est demandé aux pays industrialisés d’adopter une politique d’admission en franchise et hors quota pour les produits exportés par les pays les moins avancés, d’alléger davantage et plus rapidement la dette de ces pays et d’accorder une aide au développement plus généreuse.

Depuis que la Déclaration a été adoptée à l’unanimité, les dirigeants des pays industrialisés se sont associés à cette demande. Nous pouvons donc supposer qu’ils comptent y répondre. Après tout, non seulement ils sont humainement tenus de se montrer solidaires des pays en développement mais encore il est dans leur intérêt d’aider ces pays à s’intégrer pleinement dans la nouvelle économie mondiale.

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Enfin, Mesdames et Messieurs, permettez-moi de souligner que le programme de travail découlant de la Déclaration du Millénaire nous oblige à regarder au-delà des organes de l’ONU, tels qu’ils sont définis dans la Charte, vers le cadre institutionnel général de la gouvernance mondiale. La nouvelle économie mondiale offre des possibilités prometteuses mais elle n’a pas que des avantages et fait des victimes. Nous devrions notamment nous demander, à ce propos, si nous avons mis en place les systèmes voulus pour résoudre des problèmes tels que la volatilité des mouvements de capitaux, l’augmentation de la fraude électronique ou la diffusion via Internet de matériaux de pornographie enfantine. Je soupçonne que non et me demande avec inquiétude si les institutions qui prennent les décisions touchant l’économie mondiale sont vraiment qualifiées pour le faire.

Personne ne conteste que nous sommes confrontés à toutes sortes de problèmes mondiaux. Et personne ne doute que ces problèmes compromettent la qualité de vie et les intérêts aussi bien des populations des pays pauvres – qui constituent une majorité croissante de la population mondiale – que des populations des pays riches. Et pourtant, il semble que dans de nombreux domaines, la réponse que nous apportons ensemble à ces problèmes trouve sa formulation, non dans des institutions représentatives de toute l’humanité, mais dans des sommets ne rassemblant que les dirigeants des pays les plus puissants et ne répondant souvent à aucune nécessité.

Je ne plaide pas là en faveur d’un gouvernement mondial ni ne suggère que les gouvernements, à quelque niveau que ce soit, détiennent toutes les réponses. Je pense au contraire qu’il faudra que le nouveau cadre d’action que nous élaborerons, pour être crédible, reconnaisse le rôle très important des entités non gouvernementales – sociétés privées ou organisations de la société civile.

Ces acteurs autres que les États exercent déjà une influence considérable mais les institutions internationales ne leur font pas la place qui leur revient, ce qui fait que souvent, on n’est pas informé de leur action autant qu’il serait nécessaire.

C’est dans ce contexte que le Secrétaire général a proposé son désormais célèbre Pacte mondial, qui vise à encourager les entreprises à respecter les normes sociales et civiques internationalement reconnues sur les nouveaux marchés mondiaux. Ce pacte fait fond sur la capacité qui est celle de l’ONU de rassembler des sociétés privées, des syndicats et des organisations non gouvernementales pour inciter ceux-ci à appliquer les grands principes internationaux énoncés dans des documents entérinés par une large majorité de gouvernements. Ceci n’est qu’un petit exemple mais je crois qu’il montre bien la direction à prendre. C’est ce qu’ont compris, apparemment, certaines des plus grandes sociétés suédoises comme ABB, Ericsson et Volvo qui, je suis fière de le dire, adhèrent au Pacte mondial.

Comme le montreront, je l’espère, le Pacte mondial, la suite donnée au rapport Brahimi et d’autres initiatives, il ne sera peut-être pas nécessaire de créer de nouvelles institutions. Mais il faudra, en revanche, réfléchir et se mobiliser à nouveau sur le plan politique pour que les institutions dont nous sommes déjà dotés soient plus représentatives, plus efficaces et plus adaptées aux exigences de notre temps.

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Mesdames et Messieurs, je crois qu’en abordant cette éternelle question, j’arrive à la fin de mon temps de parole. J’attends vos observations avec beaucoup d’intérêt et ferai de mon mieux pour répondre à toutes les questions que vous pouvez avoir à me poser. Tack så mycket, allesamman.

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