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CS/2066

LA CREATION D'UNE RESERVE DE JUGES AD LITEM POUR LE TRIBUNAL POUR L'EX-YOUGOSLAVIE ET LE TRANSFERT DU SIEGE DU TRIBUNAL POUR LE RWANDA A KIGALI, PROPOSES AU CONSEIL DE SECURITE

21 novembre 2000


Communiqué de Presse
CS/2066


LA CREATION D'UNE RESERVE DE JUGES AD LITEM POUR LE TRIBUNAL POUR L'EX-YOUGOSLAVIE ET LE TRANSFERT DU SIEGE DU TRIBUNAL POUR LE RWANDA A KIGALI, PROPOSES AU CONSEIL DE SECURITE

20001121

Le Conseil de sécurité a procédé, ce matin, à un échange de vues avec la Présidente du Tribunal pénal international pour le Rwanda, Mme Navanethem Pillay, le Président du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, M. Claude Jorda, et le Procureur de ces deux juridictions, Mme Carla Del Ponte. La Présidente du Tribunal pour le Rwanda a ainsi eu l'occasion de faire part des progrès enregistrés par sa juridiction depuis le règlement des questions administratives. Compte tenu de la reprise des relations de confiance et de coopération entre le Tribunal et le Gouvernement rwandais, matérialisée notamment par la nomination d'un Représentant du Gouvernement rwandais auprès du Tribunal, la visite du Procureur à Kigali et l'installation d'un centre d'information à Kigali, la Présidente du Tribunal pour le Rwanda a proposé au Conseil que le siège du Tribunal soit déplacé à Kigali conformément aux voeux du Gouvernement rwandais qui souhaite que son peuple participe à l'application de la justice pour le bien de la réconciliation nationale. La Présidente a défendu cette proposition en arguant qu'une telle évolution contribuerait à un plus grand respect du droit des victimes, tout comme elle simplifierait l'accès aux témoins. La Présidente a également soulevé la question de l'indemnisation des victimes bien que de l'avis des juges, cet aspect ne relève pas de la compétence du Tribunal à moins d'un amendement à son Statut.

Si les délégations n'ont apporté aucune réponse définitive à ces propositions, elles se sont néanmoins félicitées des progrès réalisés dans les travaux du Tribunal qui, ont-elles convenu, met tout en oeuvre pour garantir un déroulement prompt des procès. Les délégations ont assuré la Présidente que ces questions sont à l'examen au sein du Groupe de travail du Conseil de sécurité chargé d'améliorer l'efficacité des deux Tribunaux. Le Groupe de travail examine également les propositions du Président du Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie visant à créer une réserve de juges ad litem, issus des Etats Membres et appelés en temps opportun à statuer sur des affaires précises. Si cette question semble faire l'objet d'un consensus, celle présentée par le Procureur, concernant l'élargissement de la compétence du Tribunal pour connaître des violations du droit humanitaire international commises au Kosovo, a suscité quelques réserves. De nombreuses délégations ont préféré laisser cette question à d'autres mécanismes compétents.

(à suivre - 1a) . - 1a - CS/2066 . 21 novembre 2000

Beaucoup d'entre elles ont, par ailleurs, estimé que l'amélioration de la situation politique dans la région des Balkans laisse présager d'un renforcement de la coopération entre les pays concernés et le Tribunal. Ainsi, des délégations se sont félicitées de l'intention de la République fédérale de Yougoslavie de rouvrir le Bureau du Tribunal à Belgrade et de permettre au Procureur de se rendre dans le pays. A cet égard, le Procureur a rappelé la position du nouveau Président yougoslave qui estime que la coopération avec le Tribunal n'est pas une priorité. Des délégations comme l'Ukraine ont argué que la situation actuelle dans la région permettra au Tribunal de mettre pleinement en oeuvre les dispositions contenues dans son statut et qui prévoient notamment de déférer certains cas de moindre envergure aux tribunaux nationaux. L'Ukraine a regretté l'absence de juges des pays d'Europe de l'Est dans la composition du Tribunal et de même que le représentant de la Fédération de Russie a demandé qu'une date limite soit fixée pour l'arrêt des opérations du Tribunal. Réitérant ses accusations de "position anti-Serbe" contre le Tribunal, la Fédération de Russie a demandé un réexamen des tâches, des méthodes de travail et de la durée de vie du Tribunal. Il a également fait remarquer que l'existence d'un "Tribunal ad hoc" pendant 20 ans coûterait aux Nations Unies plus de 2 milliards de dollars.

......Le Procureur a répondu qu'une position plus souple à l'égard des pays de l'ex-Yougoslavie les encouragerait à affaiblir leur coopération avec le Tribunal. Les autorités de ces pays doivent coopérer avec le Tribunal pour procéder à l'arrestation des fugitifs. A cet égard, les Etats-Unis ont souligné le danger que représente pour la stabilité régionale l'impunité dont continuent de bénéficier des personnalités telles que Milosevic, Mlavic et Karadic.

Les représentants des pays membres suivants du Conseil ont pris la parole : Etats- Unis, Bangladesh, France, Canada, Royaume-Uni, Argentine, Fédération de Russie, Malaisie, Chine, Jamaïque, Ukraine, Mali, Namibie, Tunisie et Pays-Bas.

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Financement du Tribunal pénal international chargé de juger les personnes accusées de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991

Financement du Tribunal pénal international chargé de juger les personnes accusées d'acte de génocide ou d'autres violations graves du droit international humanitaire commis sur le territoire du Rwanda et les citoyens rwandais présumés responsables de tels actes ou violations commis sur le territoire d'Etats voisins entre le 1er janvier et le 21 décembre 1994

Déclarations

M. CLAUDE JORDA, Président du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), a fait observer que la présence à ses côtés de la Présidente du Tribunal pénal international pour le Rwanda - Mme Pillay - et du Procureur des deux Tribunaux - Mme Carla del Ponte - revêt à ses yeux un caractère symbolique et une importance particulière. Représentants des Tribunaux pénaux internationaux créés plus de 50 ans après Nuremberg, ils rendent compte tous les trois devant le Conseil de sécurité de leurs travaux respectifs. En juin dernier, a rappelé M. Jorda, tous les trois avaient présenté un projet de réforme du fonctionnement et des structures du Tribunal. Ils avaient expliqué que si aucun changement n'était entrepris, ils ne pouvaient pas espérer achever leur mandat avant l'année 2016. Ils avaient appelé l'attention du Conseil de sécurité sur le fait que cette situation risquait de compromettre la réalisation de leur mission qui, a tenu à rappelé M. Jorda, est temporaire et doit permettre le retour à une paix durable dans les Balkans. Ils avaient également attiré l'attention sur la possibilité que soit menacé un des droits fondamentaux de l'accusé à être jugé sans retard excessif et avaient insisté sur le coût financier qu'une telle situation engendrerait pour les Nations Unies. A cet égard, le Président du TPIY a rappelé que la crédibilité de la justice internationale est plus nécessaire que jamais à l'heure où les Etats doivent ratifier le traité instituant la future Cour pénale permanente.

Pour remédier à cette situation, M. Jorda a préconisé la création d'une réserve de juges ad litem issus des Etats Membres et appelés, en temps opportun, à statuer sur des affaires pénales. Cette solution présente également l'avantage d'être moins coûteuse à long terme. Cette proposition s'accompagne d'une accélération de la phase préalable au procès dont la charge reposerait davantage sur des juristes qualifiés, ce qui permettrait aux juges de se consacrer entièrement au jugement des affaires. Le TPIY s'emploie d'ores et déjà à appliquer cette seconde mesure.

Le Groupe de travail chargé d'examiner les propositions que le Président du TPIY avaient avancées est presque parvenu à un consensus. Toutefois, ces solutions ne donneront leur pleine mesure que si elles s'accompagnent d'autres réformes sur le plan interne cette fois-ci, a fait remarquer M. Jorda. Le Tribunal vise à modifier - pour les rendre plus efficaces - les règles d'administration et de présentation des preuves, à renforcer les pouvoirs de contrôle du juge sur le déroulement de la procédure en vue d'accélérer le jugement des accusés, dans le respect des exigences d'un procès équitable, tout en évitant les procédures dilatoires.

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......Dans quelques semaines, le Président du TPIY entend proposer de nouvelles mesures permettant aux organes du Tribunal de déterminer d'un commun accord leurs priorités judiciaires à plus long terme et de collaborer plus étroitement à la réalisation de celles-ci dans les plus brefs délais. M. Jorda a déclaré que pour que ces mesures donnent leur plein effet, l'ensemble des organes du Tribunal - et notamment le Greffe et l'administration - doivent travailler de manière coordonnée et avec le souci permanent de gérer au mieux les ressources disponibles, c'est-à- dire dans le seul intérêt de la justice.

Les avancées observées dans les travaux du Tribunal résultent d'abord de la collaboration accrue de tous les Etats Membres qui, par l'entremise des organisations internationales, et plus spécifiquement de la SFOR et de la KFOR, coopèrent de façon plus intense à la réalisation du mandat du TPIY. Elles tiennent aussi à la coopération accrue de la Bosnie-Herzégovine et, depuis une date récente, de la Croatie. Comme le Tribunal ne dispose pas de force de police pour faire exécuter ses décisions, il doit pouvoir compter sur le soutien sans faille des Etats de la communauté internationale. Les bouleversements politiques qui se sont produits dernièrement dans les Balkans sont, à cet égard, porteurs de nouveaux espoirs. L'avènement d'un pouvoir démocratique en Croatie marque en effet la volonté du peuple croate de tirer un trait sur les évènements douloureux qu'il a vécus. De même, le retour de la démocratie en République fédérale de Yougoslavie, ainsi que la réintégration de cet Etat au sein de la communauté des nations, témoignent de l'intention de la population yougoslave de rompre avec les années de guerre récentes. Ces évènements majeurs permettent d'espérer que les Etats des Balkans respecteront pleinement leurs engagements internationaux et coopéreront étroitement à l'accomplissement de la mission du TPIY. Toutefois, les plus hauts responsables politiques et militaires encore en liberté doivent être jugés en priorité par un Tribunal international garant de la paix et de la sécurité de l'humanité. Ce sont principalement ces individus qui mettent gravement en danger l'ordre public international dont nous sommes protecteurs, a rappelé M. Jorda.

C'est pourquoi, le Président du TPIY en a appelé au Conseil de sécurité pour qu'il use de toute son influence sur les Etats Membres, et plus particulièrement sur ceux issus de l'ex-Yougoslavie, pour qu'ils arrêtent et traduisent devant le Tribunal les accusés qui se trouvent sur leur territoire. Pour ce faire, il est impératif d'agir avec célérité car le nationalisme dans ce qu'il a d'exacerbé est toujours présent et risque de compromettre l'exercice exigeant et parfois douloureux de la justice. La paix profonde et durable dans les Balkans dépend de cette justice, a conclu M. Jorda.

......Mme NAVANETHEM PILLAY, Présidente du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), a rendu compte des activités du Tribunal en indiquant son souci de répondre aux préoccupations de la communauté internationale sur la lenteur des procédures du Tribunal. A cet égard, la Présidente a invoqué toutes les procédures préliminaires prévues par le Statut. Elle a aussi invoqué les retards qu'apportent certains Etats Membres à coopérer avec le Tribunal. La période actuelle est celle où après d'intenses efforts de la part des chambres d’appel et de première instance, le Tribunal peut enfin commencer à faire des projets pour l’année 2001, a expliqué la Présidente.

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......Pour la première fois, les deux Tribunaux ont pu se rencontrer au Royaume- Uni et outre les trois procès qui ont commencé cette année, de nouveaux procès sont prévus pour le premier semestre de l’année prochaine. Elle a assuré le Conseil de la détermination du Tribunal à faire de son mieux pour terminer les procès des 35 personnes en attente de jugement. Elle a appuyé la demande de la Chambre d’appel de nommer deux juges, de préférence choisis parmi le groupe des juges du Tribunal pour l'ex-Yougoslavie, afin d'alléger la charge de travail du Tribunal. De nombreuses difficultés administratives responsables des retards dans les procès sont traitées par les juges qui sont toujours d'avis que les questions d’administration devraient faire partie des fonctions judiciaires du Tribunal, a déclaré la Présidente qui a également rappelé que le Tribunal avait besoin davantage de ressources humaines pour préparer les jugements. En ce qui concerne la compensation des victimes, elle a expliqué que les juges ont convenu que cette question ne relève pas de la compétence du Tribunal. Pour ce qui est de l’organisation des procès au Rwanda, la Présidente a indiqué que même si les Rwandais souhaitent voir la justice rendue en leur présence, le statut ne contient aucune disposition en ce sens. Si nos progrès sont bien lents par rapport à ceux du Tribunal pour l’ex-Yougoslavie, cela est dû au fait que le Tribunal jouit d’une bonne coopération des Etats, a conclu la Présidente.

......MME CARLA DEL PONTE, Procureur des Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda, a fait observer que des faits nouveaux ont marqué les travaux des deux Tribunaux pénaux internationaux au cours de ces derniers mois. Certaines des grandes affaires sont actuellement à l'examen et d'autres le seront très prochainement. Outre qu'il exerce d'importantes responsabilités, le Bureau du Procureur entend accorder la priorité au rôle des médias dans le génocide du Rwanda. L'appel interjeté par l'ex-Ministre Kambanda a été rejeté. Le Procureur a indiqué que cinq mises en accusation importantes seront décidées dans les jours qui viennent. On peut s'attendre à ce que le Tribunal pénal international pour le Rwanda fasse des progrès considérables. Un Bureau d'information a été ouvert à Kigali. La situation au Rwanda s'est grandement améliorée depuis 1994 et le Gouvernement rwandais peut maintenant offrir des garanties aux procès.

Concernant le TPIY, Mme del Ponte a rappelé que dès que ses équipes étaient en mesure d'accéder au Kosovo, le Tribunal s'était engagé à mener un projet ambitieux d'exhumations de fosses communes sur l'ensemble du Kosovo. En 1999, il a été possible d'exhumer 2 108 cadavres de 195 sites. Cette année, grâce à l'assistance du personnel mis à disposition par des Etats Membres des Nations Unies et la Suisse, les équipes du Tribunal ont évalué 325 autres sites, exhumant 1 577 corps et trouvé des restes humains dans 258 autres sites. Les médecins-légistes ont procédé à 1 807 autopsies sur les victimes. Bien que le Bureau du Procureur n'ait pas reçu les rapports de toutes les équipes médicales, le Tribunal a été en mesure d'exhumer ou d'examiner près de 4000 corps. En Croatie et en Bosnie-Herzégovine, des exhumations dans huit sites ont permis de retrouver 491 corps, ainsi que des restes humains. Le Bureau du Procureur a ordonné 619 autopsies, s'ajoutant à certaines autopsies faites au nom de la Commission bosniaque sur les personnes disparues. En outre, le Bureau du Procureur a été saisi de nombreuses demandes d'enquête sur d'éventuels actes de nettoyage ethnique contre les populations serbes et romes.

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......Pour permettre au Tribunal de connaître des crimes contre l'humanité commis au Kosovo après le déploiement de la KFOR, l'Article 5 de son Statut devrait être amendé, supprimant la référence et l'exigence d'un conflit armé, ce qui les rendrait compatibles avec le Statut du Tribunal pour le Rwanda. L'inaction forcée du TPIY concernant la situation au Kosovo, affaiblit la crédibilité historique du Tribunal. Il faut donc s'assurer que la charge unique pour le Tribunal de rétablir la justice pour les populations de l'ex-Yougoslavie ne soit pas biaisée en faveur d'une minorité ethnique et au détriment de l'autre. Si l'on réussit à atteindre cet objectif et à étendre le mandat du Tribunal, ce dernier pourrait servir de facteur de dissuasion contre la campagne de nettoyage ethnique au Kosovo.

Comme peut le constater le Conseil de sécurité, le Statut du TPIY - tel qu'il est rédigé actuellement - exige que les crimes commis soient liés à un conflit armé et de ce fait, le Bureau du Procureur ne peut être saisi de crimes commis actuellement au Kosovo. Pour ce faire, Mme del Ponte a demandé officiellement au Conseil d'étendre la compétence du Tribunal.

Le Procureur a rappelé qu'elle a eu, cette année, des entretiens importants avec les autorités croates concernant leur coopération avec le TPIY. Des progrès considérables ont été accomplis dans ce domaine, bien qu'il subsiste encore une méfiance lorsque la Croatie considère la coopération comme allant à l'encontre de ses intérêts politiques ou de sa sécurité nationale. Le Bureau du Procureur continue à se heurter au refus de la Croatie d'accéder aux témoins ou aux documents essentiels à ses enquêtes sur la campagne que la Croatie a menée en 1995 à l'encontre de la minorité serbe. Concernant le nombre des inculpations, Mme del Ponte a rappelé qu'elle avait recommandé au cours de ces derniers mois la formation d'une équipe spéciale de police chargée d'appréhender les fugitifs sur l'ensemble du territoire de Bosnie-Herzégovine. Malheureusement, cette demande est restée lettre morte. Dans le souci d'instaurer une justice globale, une paix durable et la réconciliation, il est impératif de mettre fin au nationalisme criminel et à l'impunité de ses promoteurs, a souligné Mme del Ponte, appelant les forces internationales en Bosnie-Herzégovine à adopter une approche ferme et positive pour appréhender tous ceux qui sont encore en fuite.

Le Bureau du Procureur travaille sous une pression considérable à la fois pour mener de nouvelles enquêtes, préparer des mises en accusation, engager les procédures préliminaires et conduire les procès en cours tout en garantissant célérité et équité. Evoquant la situation en République fédérale de Yougoslavie, Mme del Ponte a fait observer que le monde s'est félicité de l'élection du Président Kostunica en dépit du fait qu'il a constamment réaffirmé que la coopération avec le TPIY ne constitue pas, pour lui, une priorité. Milosevic doit être traduit devant le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, a souligné Mme del Ponte. A cet égard, elle a rappelé qu'après tous les efforts déployés par la communauté internationale pour rétablir la paix dans les Balkans et après des semaines de bombardements par l'OTAN afin d'empêcher les violations graves des droits de l'homme contre des civils au Kosovo, il serait inconcevable que Milosevic reste impuni pour les conséquences de ses actes.

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......Les conséquences pour la justice internationale seraient dévastatrices si l'on tolérait cette situation. Le Procureur a indiqué qu'elle envisage de soulever cette question lorsqu'elle rencontrera M. Kostunica, car cette question est autant une priorité pour lui, que pour elle et pour le Conseil de sécurité qui a créé le TPIY non pas pour régler rapidement une crise politique, mais pour apporter une contribution importante à la restauration d'une paix durable dans les Balkans.

......M. JAMES CUNNINGHAM (Etats-Unis) s’est félicité de l’évolution de la situation politique dans la région des Balkans en soulignant néanmoins que les opportunités offertes par les changements politiques ne pourront pas être saisies à moins que le Tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie ne réussisse dans sa tâche. Il a constaté que le Tribunal avait enregistré des progrès importants, et s'est félicité, à cet égard, de l’arrestation de Momcilo Krajisnik. Il a fait sien le point de vue du Procureur des deux Tribunaux selon lequel les inculpés comme Karadzic, Mladic et Milosevic doivent prendre la place qu'ils méritent “derrière les barreaux”. Il a regretté que certains autres non encore inculpés mènent des activités qui sapent la mise en oeuvre complète de l’Accord de Dayton tout en compromettant le retour des réfugiés. Le représentant a appelé le Tribunal et les acteurs intéressés de la communauté internationale, y compris le Haut Représentant de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), à prendre des mesures vigoureuses pour assurer que la justice soit rendue et que les efforts que déploient ces criminels pour bloquer l’Accord de Dayton ne soient pas couronnés de succès. Tous les pays de la région ont l’obligation de contribuer au travail du Tribunal, a insisté le représentant qui a indiqué que son pays n’a pas manqué de le rappeler au Président nouvellement élu de la République fédérale de Yougoslavie. Le représentant s’est donc félicité de ce que les autorités yougoslaves soient disposées à rouvrir les bureaux du Tribunal à Belgrade, fermé l’année dernière par l’ancien Président Milosevic, et à permettre au Procureur de se rendre dans le pays. Le représentant a aussi encouragé le Président de la Croatie à redoubler d’efforts pour honorer ses obligations envers le Tribunal.

......Il s’est prononcé en faveur de la nomination d’un nouveau groupe de juges ad litem qui selon lui, permettra d’alléger le travail du Tribunal. Il s’est toutefois opposé à un élargissement de la compétence du Tribunal car il reste convaincu que les autres problèmes qui se posent dans la région peuvent être réglés par d’autres mécanismes. Le représentant s’est aussi opposé à l’idée de fixer des délais pour l’accomplissement des tâches assignées au Tribunal. Nous devons mettre tout en oeuvre pour aider le Tribunal à terminer son mandat aussitôt que possible en lui accordant les ressources et la coopération nécessaires, en particulier en ce qui concerne les pays de la région, a déclaré le représentant. Soulignant aussi l’importance du Tribunal pénal pour le Rwanda, il a déclaré que bien que le travail soit loin d’être achevé, son pays attend avec impatience la formulation d’une “stratégie de fin de jeu pour le Tribunal”. Il craint que le processus de Lusaka ne soit dans une impasse dangereuse, et a déploré la présence continue des ex-FAR et des Interhamwe en République démocratique du Congo (RDC). Certains estiment que ces éléments justifient l’intervention du Rwanda alors que d’autres insistent que ce ne sont là que des prétextes pour le Rwanda, a reconnu le représentant qui a néanmoins réitéré l’appel du Conseil pour un retrait de toutes les troupes étrangères de la République démocratique du Congo, conformément aux Accords de Lusaka.

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......Une discussion franche sur la présence des ex-FAR et des Interhamwe permettra d’accélérer le processus, a déclaré le représentant car ignorer cet aspect de la question ne pourrait que retarder le retrait des troupes étrangères de la RDC. Soulignant que la paix passe par la traduction en justice de ces ex- FAR et Interhamwe, le représentant a estimé que la réticence de certains membres du Conseil à mentionner ces termes dans un texte officiel du Conseil entame aussi bien la crédibilité du Conseil que son efficacité. Si nous cédons aux sensibilités politiques et omettons de faire référence aux architectes du génocide rwandais, nous ne nous rendons pas service, a conclu le représentant qui souhaite également que soit rapidement installé le Tribunal pénal international pour la Sierra Leone.

M. ANWARUL KARIM CHOWDHURY (Bangladesh) a déclaré qu'en ce qui concerne le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, il est impératif de garantir la justice pour rétablir la paix dans les Balkans. Les Nations Unies ont, pour leur part, adopté une approche concrète en créant et en appuyant les Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda qui ont été chargés de défendre les valeurs humanitaires et de contribuer à la restauration et au maintien de la paix dans des régions du monde qui ont été le théâtre d'atrocités indescriptibles. Notant avec regret que de nombreux criminels sont toujours en fuite, M. Chowdhury a appelé tous les Etats Membres, et en particulier les Etats des Balkans, à faire preuve d'une coopération plus ferme afin de les traduire en justice. Il faut par ailleurs accorder une attention particulière au système que nous avons établi pour garantir la justice, a estimé M. Chowdhury. Sa délégation appuie les propositions de réforme présentées par le Président Jorda.

M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) a estimé que les changements historiques intervenus dans les Balkans, au cours de cette année, devraient avoir des effets positifs pour l'activité du Tribunal international pour l'ex-Yougoslavie. Avec ses partenaires européens, la France est convaincue que la restauration de l'état de droit et de la paix dans la région iront de pair avec la traduction en justice des personnes soupçonnées de très graves violations du droit international humanitaire. A cet égard, il est indispensable que tous les Etats et entités se conforment à leur obligation de coopérer avec le Tribunal. Cet appel s'adresse en particulier à la République fédérale de Yougoslavie, a souligné M. Levitte. La Croatie paraît manifester une réelle volonté politique de coopération et le TPIY se préoccupe, à juste titre, de faire face à sa charge de travail et d'accomplir sa tâche avec l'efficacité et la célérité nécessaires. Le collège des juges a élaboré une série de propositions que le Président Jorda est lui-même venu présenter au Conseil de sécurité, en juin dernier.

Les propositions d'amendements au Statut permettant d'une part la création de juges ad litem destinés à renforcer, en tant que de besoin, les chambres de première instance et, d'autre part, l'adjonction de deux juges du TPIR à la chambre d'appel commune aux deux Tribunaux ont été examinées par le groupe de travail ad hoc créé en juillet par le Conseil. La France souhaite que le Conseil puisse, avant la fin du mois, adopter ces amendements au Statut des deux Tribunaux. En prenant rapidement une telle décision sur les juges ad litem et la chambre d'appel, le Conseil de sécurité aidera le Tribunal à achever sa mission dans un délai raisonnable. Un tel objectif sera également servi par la volonté du Procureur de cibler ses enquêtes et ses mises en accusation sur les plus hauts responsables civils et militaires.

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......M. Levitte s'est donc déclaré convaincu que le Tribunal saura tenir compte de l'émergence de justices locales dans les pays de l'ex-Yougoslavie, comme son Statut et son Règlement de procédure et de preuve le lui permettent. S'agissant de la fixation d'une limite temporelle à la compétence du Tribunal, il est important que la décision que le Conseil de sécurité prendra sur ce sujet soit suffisamment réfléchie.

Pour sa part, le Tribunal pénal international pour le Rwanda entre maintenant dans une phase de maturité, après avoir été la première juridiction internationale à condamner pour acte de génocide. Sa charge de travail et sa responsabilité sont lourdes et exigeantes. Le Tribunal continue d'affronter de nombreux défis en dépit des progrès enregistrés. C'est pourquoi, il doit faire pleinement usage de ses ressources humaines et matérielles ainsi que des possibilités offertes par son règlement de procédure. La reprise des relations de confiance et de coopération entre le Tribunal et le Rwanda concrétisée par la nomination en octobre 1999 d'un représentant du Gouvernement rwandais auprès du Tribunal et par la visite en mai 2000 de Mme del Ponte constituent des points positifs. L'expérience des deux Tribunaux a permis de prendre conscience de l'importance de la question de l'accès des victimes au Tribunal et de leur protection. C'est pourquoi, il est essentiel que les victimes de ces crimes soient assurées que la responsabilité de leurs agresseurs sera engagée devant le Tribunal et qu'elles puissent bénéficier de services de conseil et de soutien. Les deux Tribunaux ont joué un rôle pionnier, contribuant aux travaux qui ont abouti à l'adoption du Statut de Rome qui institue la Cour pénale internationale.

......M. PAUL HEINBECKER (Canada) s’est déclaré convaincu que les Tribunaux peuvent jouer un rôle crucial dans la préservation de la sécurité humaine. Le représentant a néanmoins exprimé sa grande déception d’apprendre que la coopération de la Croatie n’a pas atteint le niveau espéré. Il s'est, en revanche, félicité de la décision des autorités de Belgrade de rouvrir le bureau du Tribunal dans cette ville. Il a donc prié le Procureur d’évaluer l’impact de la nouvelle position de Belgrade sur les travaux futurs du Tribunal. Milosevic, Mladic et Karadic doivent être déférés devant le Tribunal de La Haye, et pour ce faire, a insisté le représentant, la coopération de tous les pays de la région des Balkans est essentielle surtout si l'on souhaite une réconciliation régionale. Le représentant a appelé les membres du Conseil à appuyer le travail du Tribunal et à s’abstenir de susciter des doutes quant à son impartialité. Il s’est, par ailleurs, félicité du degré de coopération entre le Tribunal pénal pour le Rwanda et le Gouvernement de ce pays. Il a salué la mise en place des différents organes destinés à faciliter les travaux du Tribunal. Il a aussi plaidé pour des amendements rapides au Statut du Tribunal afin de donner corps aux propositions des juges.

M. STEWART ELDON (Royaume-Uni) a estimé qu'il est impérieux que tous les organes judiciaires internationaux oeuvrent en étroite coopération pour garantir le succès de leurs travaux. Des progrès considérables ont été accomplis et les évènements politiques intervenus récemment en République fédérale de Yougoslavie permettent d'espérer une meilleure évolution du rôle du TPIY. Le représentant a exprimé toutefois des préoccupations concernant le nombre encore élevé des inculpés en fuite. Lorsque ces personnes seront traduites devant le TPIY, on sera en mesure de déclarer que cette juridiction s'est acquittée avec succès de son mandat.

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......Le représentant a exprimé l'espoir que tous les membres du Conseil de sécurité seront en mesure de parvenir à un consensus sur les propositions formulées par le Président du TPIY, M. Claude Jorda. De l'avis de sa délégation, l'extension du mandat de ce Tribunal, comme l'a préconisé Mme del Ponte, aura des incidences politiques. Le Royaume-Uni a souhaité que la Présidente du TPIR, Mme Pillay, soit en mesure d'obtenir les ressources nécessaires au bon fonctionnement de cette juridiction, et à cet égard il a suggéré que le Tribunal soit transféré à Kigali.

......M. LUIS ENRIQUE CAPPAGLI (Argentine) a rappelé qu'il n'y pas si longtemps, le Conseil de sécurité avait identifié comme principal obstacle au fonctionnement du Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie, le manque de coopération des Etats de la région. Il s'est donc félicité des changements intervenus sur la scène politique de la région qui "laissent espérer" une amélioration de la situation. S'agissant du Tribunal pénal pour le Rwanda, le représentant s'est félicité de ce qu'il ait surmonté ses difficultés. Mais la tâche reste lourde, a-t-il reconnu et c'est pourquoi il a appuyé la proposition de créer un groupe de juges ad litem. Le Conseil, a souligné le représentant, est à un stade où il peut envisager des amendements au Statut du Tribunal. Mon pays aurait souhaité que cette réunion soit l'occasion de le faire, et il espère que le Conseil sera en mesure de prendre les décisions requises avant la fin de cette année.

......M. SERGEY LAVROV (Fédération de Russie) s'est félicité des efforts que déploient les Tribunaux pour accélérer leurs travaux et on peut comprendre leur sentiment de frustration devant la lenteur des choses. Mais bien d'autres choses se produisent, a reconnu le représentant qui a rappelé que son pays n'a cessé de soulever la question des difficultés que rencontre le Tribunal pénal pour l'ex- Yougoslavie. Prenant note des propos du Procureur selon lesquels les positions russes sont sans fondement, le représentant s'est insurgé contre cette opinion qu'il a jugé inappropriée et a déclaré que le titre "impressionnant" du Procureur ne lui permet en aucun cas de porter des accusations sur les Etats membres d'autant plus qu'aucune des questions importantes n'a reçu jusqu'ici de réponse satisfaisante. Le représentant a donc rappelé qu'en créant le Tribunal pénal pour l'ex-Yougoslavie, la communauté internationale souhaitait régler la crise sur le territoire de l'ex-Yougoslavie. Il a donc fallu constater que dès le début de ses activités, le Tribunal avait commencé à politiser ses travaux et à s'engager sur une voie anti-Serbe. Lorsqu'il s'agissait de violations perpétrées par la République fédérale de Yougoslavie, les mises en accusations du Tribunal devenaient très vite des condamnations, comme cela a été le cas au Kosovo. Lorsque l'OTAN a attaqué les installations civiles en République fédérale de Yougoslavie, le Tribunal n'a pas jugé bon d'ouvrir une enquête malgré les nombreuses demandes, a déclaré le représentant. Dénonçant l'accord entre l'OTAN et le Tribunal et la violation des frontières d'Etats souverains dans la recherche de suspects, le représentant a posé la question de savoir si la communauté internationale doit financer ce genre d'activités qui sort clairement du cadre du mandat du Tribunal et sème le doute sur l'équité de ses actes. Il faut préciser les tâches, les méthodes de travail et les délais de fonctionnement du Tribunal, a poursuivi le représentant, en rappelant qu'il a été créé dans des circonstances spéciales qui ont cessé de prévaloir aujourd'hui.

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......La proposition selon laquelle il faudrait accorder un délai de 20 ans au Tribunal pour qu'il termine sa tâche prête à réfléchir pour une organisation créée de manière provisoire, a souligné le représentant avant de mettre l'accent sur le fardeau de plus de 2 milliards de dollars que cela représenterait pour l'ONU. Il s'est donc déclaré favorable à la proposition visant à accroître l'efficacité des Tribunaux par le renforcement des chambres d'appel, le recrutement de juges ad litem et le recours à des juristes confirmés lors des procédures préliminaires. Il faut aussi tenir compte des autres aspects des activités du Tribunal et des points de vue comme ceux du Groupe d'experts chargé d'examiner l'efficacité des deux Tribunaux. Il est temps, a plaidé le représentant, de fixer plus précisément la juridiction temporaire du Tribunal comme le prévoit la résolution pertinente du Conseil. Il ne faut pas non plus oublier la responsabilité principale des Etats en matière de condamnation des coupables; le Tribunal ne devant se concentrer que sur des crimes que les Etats ne peuvent poursuivre ou lorsqu'ils ne peuvent faire preuve de l'impartialité nécessaire. Ce sont là les conditions qui ont présidé à la création du Tribunal, a rappelé le représentant, avant d'aborder le fonctionnement du Tribunal pour le Rwanda. Il a estimé que les activités de celui-ci ne correspondent toujours pas aux objectifs assignés par la communauté internationale. La poursuite des responsables reste lente et inefficace, a dit le représentant. Il a constaté qu'après six années, le Tribunal n'a pu condamner que 7 prévenus sur huit accusés, sans compter les détentions provisoires et les attentes de jugement. Le représentant a appelé l'attention sur le fait que le rapport du Groupe d'experts du Conseil chargé d'examiner l'efficacité des deux Tribunaux a fait des propositions pour surmonter les difficultés que rencontre le Tribunal.

........M. MOHAMMAD KAMAL (Malaisie) s'est félicité des exposés très utiles et très ouverts que viennent de faire respectivement les Présidents des Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda et par le Procureur des deux juridictions. Le représentant a déclaré que les propositions formulées par les Présidents respectifs de ces juridictions seront examinées de manière approfondie. La Malaisie salue les efforts inlassables accomplis par les Tribunaux pour garantir la protection des témoins. De toute évidence, la rapidité avec laquelle ces deux tribunaux lancent leur mandat d'arrêt est essentielle à faire progresser les procédures visant à appréhender et à traduire en justice les personnes concernées. L'arrestation des personnes en fuite doit être assurée avec l'appui du Conseil de sécurité et de la communauté internationale, a souligné M. Kamal.

......M. WANG YINGFAN (Chine) tout en se félicitant du travail du Tribunal pour l'ex-Yougoslavie, le représentant a rappelé ses réserves quant à la décision du Tribunal de ne pas ouvrir d'enquêtes sur les allégations de crimes internationaux commis lors des bombardements de l'OTAN sur la République fédérale de Yougoslavie. Tout en convenant du rôle central de ce Tribunal, le représentant n'en a pas moins souhaité que le Conseil détermine la date à laquelle prendra fin la juridiction temporaire du Tribunal. Il a aussi plaidé pour que soient transférer les prisonniers de moindre rang à des tribunaux nationaux. Le représentant a d'ailleurs estimé que ces questions doivent être examinées par le Groupe de travail du Conseil sur les Tribunaux ad hoc.

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MME PATRICIA DURRANT (Jamaïque) a insisté sur la nécessité pour le Conseil de sécurité de continuer à apporter son appui aux activités des Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et pour le Rwanda. Il semble qu'il y ait un large consensus pour désigner les juges ad litem. Elle s'est déclarée convaincue que ces deux juridictions seront en mesure de s'acquitter de leur mandat respectif de manière efficace. Concernant le TPIR, Mme Durrant a noté avec satisfaction qu'il y a des signes d'amélioration dans l'accomplissement de ses travaux. Elle s'est déclarée optimiste et espère que les Etats concernés continueront à coopérer étroitement avec le Tribunal.

M. VOLODYMYR KROKHMAL (Ukraine) a jugé qu'il était important pour les deux Tribunaux de maintenir les normes les plus élevées d'impartialité et de rester à l'écart de toute politisation. S'agissant du Tribunal pénal international pour le Rwanda, le représentant a fait montre d'un certain optimisme en se disant encouragé par la reprise de la coopération entre le Tribunal et le Rwanda, le nombre accru des arrestations, l'installation d'un centre d'information à Kigali, le nombre croissant de jugements et la gestion des difficultés administratives. Pour ce qui est du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, il s'est félicité des efforts déployés en vue de mettre en oeuvre les recommandations du Groupe d'experts et des mesures déjà prises par le Tribunal pour accélérer la procédure. Le représentant a estimé que les changements positifs sur la scène politique de la région des Balkans et le renforcement des systèmes judiciaires permettront au Tribunal de mettre pleinement en oeuvre les mécanismes prévus par son Statut et ses règles de procédures qui lui permettent de déléguer certains cas particuliers aux juridictions nationales comparables et de transférer les accusés, détenus par le Tribunal, aux autorités des Etats concernés. La capacité du Procureur de surveiller les procédures des Cours nationales, conjuguée à la faculté du Tribunal de récupérer un cas, assurerait l'impartialité et l'intégrité des procès menés dans les tribunaux nationaux, a déclaré le représentant, qui a estimé que cela permettrait aussi au Tribunal d'alléger sa charge de travail et de se concentrer sur les cas les plus importants. Le représentant a ensuite déploré l'absence de juges d'Europe orientale dans le corps des juges du Tribunal. Il a donc souligné qu'une large représentation de juges de tous les groupes régionaux est essentielle à l'efficacité et à la crédibilité du Tribunal. Le représentant a conclu en rappelant les propositions de son pays en ce qui concerne les amendements à apporter au Statut du Tribunal et en appelant les autres délégations à les examiner au plus tôt.

M. MOCTAR OUANE (Mali) a estimé que les Tribunaux pénaux internationaux pour l'ex-Yougoslavie et le Rwanda sont investis d'un mandat historique et pour s'acquitter de ce rôle, ils doivent bénéficier d'un appui considérable. Il a salué les efforts inlassables accomplis par le Procureur de ces deux juridictions, Mme del Ponte. La délégation malienne note avec satisfaction l'évolution de la situation politique dans la région des Balkans ainsi que la création d'un bureau d'information à Kigali. La condamnation de l'ex-Ministre rwandais Kambanda montre que l'on peut mettre fin à l'impunité des violations graves du droit humanitaire international. A l'instar des autres délégations, le Mali lance un appel en faveur du renforcement de la coopération avec ces deux juridictions internationales.

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......Mme SELMA ASHIPALA- MUSAVYI (Namibie) a commenté les travaux du Tribunal pénal pour l’ex-Yougoslavie en se félicitant des propositions novatrices et pragmatiques du Président Jorda visant à améliorer la conduite gestion des procédures et à réduire la charge de travail du Tribunal, tout en protégeant la qualité et l’efficacité des procédures. La représentante a ainsi reconnu que donner suite aux propositions du Président du Tribunal requiert des modifications au Statut du Tribunal. Rappelant, à cet égard que son pays participe au Groupe de travail ad hoc chargé d’examiner les propositions du Président, la représentante a exprimé l'espoir que les propositions du Président faciliteront la création d’un groupe de juges ad litem. S’exprimant, en particulier, sur la proposition relative aux compensations, la représentante a défendu une position souple en se déclarant disposée à envisager la possibilité d’amender le Statut du Tribunal en vue d’examiner la question et celle de la participation des victimes de crimes relevant de la compétence du Tribunal. Elle a néanmoins souligné la nécessité d’envisager ces questions dans les limites des ressources disponibles.

......M. ANOUAR BEN YOUSSEF (Tunisie) a fait siens les différents points de vue exprimés par d'autres délégations, notamment la Malaisie, en ce qui concerne les propositions de réforme qui seront formulées par le Groupe de travail créé à cette fin. Il a souligné la nécessité pour les deux juridictions pénales internationales pour le Rwanda et pour l'ex-Yougoslavie de tenir compte des différents systèmes juridiques en vigueur. S'agissant des crimes de génocide et des crimes contre l'humanité, la délégation tunisienne a rappelé que leur définition a été bien établie. Par ailleurs, le représentant a exhorté tous les Etats Membres à coopérer plus étroitement avec les deux Tribunaux afin de leur permettre de s'acquitter de leur mandat de manière efficace.

......M. PETER VAN WALSUM (Pays-Bas) s'est lui aussi félicité des changements politiques intervenus dans la région des Balkans qui faciliteront à bien des égards le travail du Tribunal pour l'ex-Yougoslavie. Il a souligné la participation de son pays au Groupe de travail du Conseil chargé notamment de l'examen des amendements du statut du Tribunal pour lui permettre de recourir à des juges ad litem. Le représentant a exprimé l'espoir que ces amendements seront apportés dans le cadre de la Présidence néerlandaise du Conseil, qui se termine à la fin du mois. Abordant la question du Tribunal pour le Rwanda, il a demandé à son Président d'utiliser au mieux les ressources allouées avant de rappeler aux deux Présidents des Tribunaux ainsi qu'au Procureur le rôle qu'ils jouent en tant que pionniers dans l'élaboration d'un prototype d'une cour pénal internationale.

Répondant aux observations formulées par les délégations, Mme DEL PONTE a indiqué qu'à la lumière de l'évolution politique dans la région et en particulier en République fédérale de Yougoslavie, elle envisage de mettre en place un bureau d'information en République fédérale de Yougoslavie. Elle a rappelé que pour l'instant la priorité doit être accordée à la conclusion d'une enquête qui date depuis de nombreuses années. Plusieurs accusés placés sous mandat d'arrêt ont trouvé refuge en République fédérale de Yougoslavie. Le Bureau du Procureur déploie tous les efforts nécessaires pour que ces accusés soient appréhendés et traduits devant le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie, à La Haye.

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Pour sa part, M. JORDA a constaté que le Conseil de sécurité est quasiment unanime sur la proposition de réforme qu'il avait présentée en juin dernier. S'agissant de la compétence temporelle, il a estimé que cette décision est politique et relève donc du ressort des Etats. Pour ce qui est de la date-butoir, il a estimé qu'il est prématuré de fixer dès maintenant une telle date dans la mesure où l'on ignore encore comment les actes d'accusation peuvent évoluer. Tout retard pris dans l'adoption de cette réforme sera préjudiciable pour le fonctionnement du TPIY. Il serait très urgent de se prononcer au moins sur la désignation des juges ad litem. En l'état actuel, c'est tout un nouveau système que l'on envisage de mettre en place. Quant à l'indemnisation, M. Jorda a fait remarquer que lorsqu'une personne est accusée ou jugée à tort, elle a droit à réparation. Il a convenu que toute formation collégiale doit tenir compte de tous les systèmes juridiques en vigueur. Les Tribunaux pénaux internationaux sont chargés d'interpréter le concept de responsabilité pénale internationale et n'exercent pas une fonction normative, comme la Cour internationale de justice.

......Mme PILLAY a dit avoir pris note des suggestions et des recommandations des Etats Membres qu'elle entend partager avec les juges pour les mettre en oeuvre. Elle a souligné la détermination du Tribunal à ne pas se contenter des sept condamnations maintenant que les difficultés administratives ont été réglées et que les ressources nécessaires ont été réunies.

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