CS/2062

LE CONSEIL DEVRAIT PERFECTIONNER SON PROCESSUS DECISIONNEL EN MATIERE DE RETRAIT DES OPERATIONS DE PAIX

15 novembre 2000


Communiqué de Presse
CS/2062


LE CONSEIL DEVRAIT PERFECTIONNER SON PROCESSUS DECISIONNEL EN MATIERE DE RETRAIT DES OPERATIONS DE PAIX

20001115

«Pas de retrait sans stratégie» pour les opérations de maintien de la paix des Nations Unies, tel était le thème du débat tenu aujourd’hui par le Conseil de sécurité. A cette fin, les membres du Conseil étaient saisis d’une lettre émanant du Représentant permanent des Pays-Bas, M. Peter Van Walsum, s’interrogeant sur les conditions dans lesquelles le Conseil devrait décider du retrait d’une opération de maintien de la paix. Dans cette lettre, les Pays-Bas relèvent que dans un certain nombre de cas le Conseil, se retirant militairement d'une situation de conflit ou modifiant radicalement son intervention, s'est aperçu ensuite que la situation demeurait instable ou, pire, débouchait à nouveau sur la violence et le chaos. Pour éviter que de tels faits ne se reproduisent à l’avenir, les Pays-Bas proposaient donc ce matin de lancer le débat sur la manière de perfectionner la stratégie de retrait des opérations de paix.

Les délégations se sont félicitées de la tenue d’une telle discussion au moment précis où les Nations Unies s’engagent dans une œuvre de réforme de leurs opérations de paix et après l’adoption par le Conseil, il y a deux jours, d’une résolution par laquelle il décide de donner à ces opérations des mandats clairs, crédibles et réalistes, appuyant ainsi les recommandations du rapport Brahimi.

Au cours du débat, plusieurs représentants ont en effet estimé qu’il conviendrait de perfectionner le processus de décisions relatif au retrait des opérations de paix. Le représentant du Royaume-Uni a ainsi estimé que les décisions de retrait d’opérations de paix devraient répondre à des critères précis et qu’il serait bon de pouvoir envoyer sur le terrain des équipes restreintes chargées de donner au Conseil, avant qu’il ne prenne ses décisions, des informations de première main sur la situation qui y prévaut. Il a par ailleurs affirmé que le retrait d’une opération de paix ne devrait pas être considéré comme une décision définitive mais comme une phase transitoire, par laquelle on ne fait que transmettre ce qui reste à accomplir aux autorités nationales concernées. Le représentant de la France a, pour sa part, précisé que les critères de retrait devraient être la réunion des conditions politiques, sécuritaires et économiques d’une paix durable. Le représentant du Danemark a, quant à lui, déclaré que toute stratégie de retraite devrait être fondée sur un plan à long terme, visant l’instauration de la paix dans la zone de conflit. Dans ce contexte, plusieurs autres représentants ont déclaré que le Conseil devrait s’assurer, avant toute décision de retrait, que les autorités locales seront bien à même d’exercer les responsabilités liées à la consolidation de la paix.

De nombreux représentants ont par ailleurs souligné que si le retrait des opérations de paix doit reposer sur une stratégie propre, son succès est lié à celui de l’opération de paix considérée dans son ensemble, depuis la décision de son déploiement, en passant par celle de sa mise en œuvre, jusqu’à la phase de reconstruction de la paix après le conflit. Dans ce contexte, plusieurs représentants ont réaffirmé leurs vues sur les moyens plus généraux de renforcer les opérations de paix des Nations Unies. Ils ont ainsi notamment rappelé la nécessité de fonder ces opérations, en amont, sur des mandats clairs, crédibles et réalistes en prenant en compte les causes profondes des conflits. Ils ont également insisté sur l’importance des mesures de reconstruction de la paix après les conflits et notamment sur les programmes de désarmement, de démobilisation et de réintégration des anciens combattants.

Dans ce cadre, les représentants des membres suivants du Conseil de sécurité ont fait une déclaration: Pays-Bas (en sa qualité de Président du Conseil), Etats- Unis, France, Bangladesh, Canada, Argentine, Malaisie, Chine, Fédération de Russie, Tunisie, Namibie, Ukraine, Jamaïque, Mali et Royaume-Uni.

Ont également pris la parole les représentants des pays suivants: Allemagne, Singapour, Portugal, Afrique du Sud, Thaïlande, Australie, Egypte, Italie, Norvège, Danemark, Philippines, Finlande, Pakistan, Bélarus, Inde, Slovaquie, Irlande, Croatie, Rwanda et Pays-Bas.

PAS DE RETRAIT SANS STRATEGIE

Lettre datée du 6 novembre 2000, adressée au Secrétaire général par le Représentant permanent des Pays-Bas auprès de l'Organisation des Nations Unies (S/2000/1072)

Par cette lettre, le Représentant permanent des Pays-Bas auprès de l'Organisation des Nations Unies souligne que les opérations de paix sont instrument essentiel pour le Conseil de sécurité lorsqu'il exerce la responsabilité que lui confère la Charte des Nations Unies en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales. Par cette même lettre, les Pays-Bas se proposent d'organiser un débat du Conseil de sécurité sur ses décisions concernant l'arrêt définitif ou progressif d'une mission, débat auquel les Etats Membres de l'Organisation des Nations Unies qui ne sont pas membres du Conseil devraient avoir la possibilité de participer s'ils le désirent. Par cette lettre, les Pays-Bas soulignent qu'il existe un certain nombre de cas dans lesquels le Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations Unies s'est retiré militairement d'une situation de conflit ou a modifié radicalement son intervention, pour s'apercevoir ensuite que la situation demeurait instable ou, pire, débouchait à nouveau sur la violence et le chaos peu de temps après. Comment cela est-il arrivé? Comment le Conseil a-t-il décidé qu'il pouvait se retirer ou réduire son intervention sans que cette décision soit justifiée? Les membres du Conseil ont- ils trop fait porter leurs efforts sur les stratégies de sortie au lieu d'essayer de dégager une solution à long terme au conflit en question? Pour répondre à de telles questions les Pays-Bas proposent de lancer un débat sur la façon dont le Conseil décide de faire cesser ou de modifier sensiblement son intervention dans des situations de conflit.

Ce débat vise à améliorer le processus décisionnel du Conseil. Il s'ensuit que le champ de la présente étude est nécessairement très circonscrit : il s'agit du processus par lequel le Conseil de sécurité décide d'octroyer un mandat, de le modifier ou de mettre fin aux activités de la mission concernée. L'examen de cette question devrait être considéré comme le prolongement naturel du débat sur la réforme encouragée par le rapport Brahimi. Les gouvernements, la presse et d'autres entités assimilent de plus en plus la phase de retrait ou de cessation d'activités d'une opération de maintien de la paix à une « stratégie de sortie ». Nous pensons toutefois que cette expression est de nature à induire en erreur car elle n'établit pas un lien entre la fin de la mission et ses objectifs. Il faudrait donc plutôt disposer d'une stratégie globale : un plan à long terme conçu pour conduire à une paix autonome dans la zone de conflit. Dans ces conditions, la « sortie » s'appuierait sur l'accomplissement du mandat d'une mission, à savoir la réalisation d'une paix durable qui, à son tour, rendrait inutile de maintenir la mission. Une telle approche permettrait d'étudier plus soigneusement la question des objectifs qui seraient fixés à la mission envisagée, y compris des objectifs à long terme, et celle des ressources nécessaires pour y parvenir. Cela devrait être fait aux tous premiers stades de la planification, c'est-à-dire avant que la mission ne soit déployée. Si cette stratégie n'est pas viable, toutefois, on pourrait en retenir une autre qui consiste à organiser une présence destinée à stabiliser la situation dans la zone du conflit.

Dans ce cas, toutefois, le Conseil de sécurité devra accepter l'engagement à long terme que cette stratégie implique. Il ressort nettement des considérations qui précèdent que le Conseil de sécurité doit engager des débats et des négociations qui soient plus réalistes et ouverts en ce qui concerne la véritable nature de la situation à l'examen et sur les résultats attendus. Il est tout aussi important que le Conseil reste engagé pendant toutes les phases de l'opération de paix de façon qu'une phase succède à une autre en aussi bon ordre que possible et qu'il soit à même d'apporter au mandat de la mission les modifications nécessaires en temps voulu, si les événements sur le terrain le justifient. De plus, le Conseil doit employer tous les moyens de pression à sa disposition pour multiplier les modalités d'exécution du mandat de l'opération de paix. Il s'agit notamment de prendre conscience du rôle joué par les activités économiques des parties au conflit soit comme cause fondamentale du conflit, soit comme moyen essentiel de maintien de l'option militaire. Les embargos sur les diamants dans les cas de l'Angola et de la Sierra Leone sont des mesures encourageantes dans ce domaine. Il arrive très souvent que les Membres soient amenés à se poser des questions inconfortables à propos de leur engagement, de leur endurance ou de leur prévoyance en ce qui concerne la situation en question. Par exemple, les membres du Conseil se retirent-ils d'une situation de conflit par manque de sens des responsabilités, parce qu'ils sont épuisés, parce qu'ils ont peur d'échouer ou parce qu'ils sont trop économes? Les décisions du Conseil lui sont-elles dictées par des considérations nettement plus particularistes que nous sommes prêts à l'admettre, et non par les obligations collectives qui nous incombent en vertu de la Charte des Nations Unies? Les décisions du Conseil font- elles automatiquement deux poids deux mesures en ce qui concerne l'Afrique, traitée différemment des autres régions du monde?

Pour illustrer les risques associés à la myopie intellectuelle qui consiste à considérer qu'il faut disposer d'une stratégie de sortie au lieu d'engager un débat honnête sur les objectifs d'une mission, les Pays-Bas présentent dans leur document trois études de cas succinctes concernant le Mozambique, le Libéria et Haïti, décrivant la situation de ces pays après le départ d'une opération de maintien de la paix.

Déclarations

M. PETER VAN WALSUM (Pays-Bas), s'exprimant en sa qualité de Président du Conseil de sécurité, a fait observer que bien qu'un certain nombre de séances publiques soient prévues pour ce mois, les Pays-Bas considèrent leur initiative «Pas de retrait sans stratégie» comme la pièce de résistance de leur présidence. Ce thème n'a rien à voir avec l'expiration imminente du mandat des Pays-Bas au sein du Conseil de sécurité, mais peut être plutôt perçue comme cadeau d'adieu. La manière dont le débat d'aujourd'hui a été expliqué dans une annexe à la lettre qu'il a adressée au Secrétaire général n'est pas orthodoxe. Le Conseil de sécurité ne s'engage pas souvent à tenir un débat public sur la base d'un document contenant les termes "motivations paradoxales" et "deux poids, deux mesures". Toutefois, a estimé M. Van Walsum, un débat sur le processus de prise de décisions du Conseil de sécurité concernant le retrait des opérations de maintien de la paix ne peut qu'être constructif si l'on aspire à un degré d'ouverture qui n'est pas, de manière régulière, associé avec les séances publiques du Conseil de sécurité. En vue de réaliser cet objectif, il est inévitable que la distinction entre ses fonctions de Président du Conseil de sécurité et la contribution qu'il fait en sa qualité de représentant permanent des Pays-Bas ait été temporairement estompée, a indiqué M. Van Walsum, assurant les membres du Conseil que cette phase est maintenant passée. La question que les Pays-Bas proposent porte sur la manière dont le Conseil de sécurité peut améliorer son processus décisionnel concernant le retrait ou la transition d'opérations de maintien de la paix. Cette question n'est pas traitée de manière explicite dans le rapport Brahimi, mais elle est implicite en ce que le rapport indique sur le processus décisionnel du Conseil. Il existe un lien évident entre la plus grande clarté sur le retrait d'une opération de maintien de la paix et les "mandats clairs, crédibles et réalistes" que le rapport Brahimi exige des futures opérations de maintien de la paix.

La délégation des Pays-Bas souhaite entendre des suggestions sur l'amélioration dans un certain nombre de domaines tels que l'analyse et la planification, la volonté politique, l'engagement et la direction, ainsi que les ressources financières et humaines. Elle estime toutefois qu'une discussion réaliste devrait tenir compte du fait que l'on ne peut jamais garantir qu'une opération de maintien de la paix - une fois qu'elle a démarré - se déroulera dans de bonnes conditions en vue d'une transition souple et ordonnée vers la restauration de la paix après le conflit. Il faudrait par ailleurs procéder à l'examen de la manière dont les Nations Unies peuvent dans ce cas réduire les conséquences négatives d'un retrait prématuré d'une opération de maintien de la paix.

M. RICHARD HOLBROOKE (Etats-Unis) s'est félicité de l'initiative et de l'esprit créatif de la délégation des Pays-Bas visant la convocation de ce débat. Il a souligné qu'en dépit des difficultés résultant des récentes élections présidentielles américaines, le Président actuel est toujours en exercice et l'engagement des Etats-Unis en faveur des opérations de maintien de la paix n'en est pas pour autant réduit. De nombreux Etats Membres sont encore préoccupés par le respect des principes de souveraineté nationale et d'intégrité territoriale lors de la mise en place des opérations de maintien de la paix. Il est essentiel d'envisager une stratégie en cas de sortie et c'est pourquoi il est essentiel de définir des mandats clairs et réalistes. Pour leur part, les programmes spécialisés comme le HCR et l'UNICEF consacrent des ressources considérablement plus élevées que celles des Nations Unies pour contribuer au succès des opérations de maintien de la paix. Les dates butoirs artificielles ont montré que les seigneurs de la guerre pouvaient continuer à mépriser les engagements pris. M. Holbrooke a réaffirmé qu'il nous incombe de déterminer l'objectif de mettre fin à une opération de maintien de la paix. Les Etats-Unis ont abandonné l'idée d'imposer des dates limite afin de continuer les efforts diplomatiques visant à instaurer la paix et la sécurité. Des objectifs intérimaires, notamment l'instauration de l'état de droit et d'un système judiciaire, la mise en place d'institutions démocratiques, pourraient être définis et réalisés. Le processus de paix en El Salvador, en Bosnie-Herzégovine, en Afrique du Sud a réussi, ne serait-ce que partiellement.

Le maintien de la paix est vital pour les Etats-Unis et pour le monde et le rôle des Nations Unies en la matière ne doit pas être cependant exclusif. Faisant référence à la situation en RDC, M. Holbrooke a fait observer que la paix et la sécurité vont de pair. Il faut trouver la bonne stratégie et non pas seulement se pencher sur la stratégie de sortie. La mise en oeuvre du rapport Brahimi est essentielle pour le succès de la réforme des opérations de maintien de la paix. Les pays fournisseurs de contingents n'ont pas eu assez de consultations avec le Département des opérations de maintien de la paix. A cet égard, M. Holbrooke a insisté sur la nécessité d'améliorer la représentation de ces pays afin d'éviter notamment les problèmes de sécurité auxquels est exposé le personnel de maintien de la paix. Il a également mis l'accent sur la nécessité de fournir les ressources financières et le matériel approprié pour permettre aux opérations de maintien de la paix de réussir. M. Holbrooke a émis l'espoir que les recommandations formulées dans le rapport Brahimi seront mises en oeuvre.

M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) a souhaité tirer les enseignements de la Mission d’observation des Nations Unies en République centrafricaine. La gestion de cette affaire a été la plus inclusive possible, a-t-il souligné. Outre l’examen régulier par le Conseil de sécurité, un groupe d’amis a été créé, ce qui a permis d’assurer une bonne compréhension commune des objectifs et de la conduite de la mission ainsi qu’une cohérence dans l’action de la communauté internationale. Le groupe des amis s’était fixé une série de critères qui ont constitué une feuille de route décrivant les objectifs poursuivis pour assurer une stabilisation durable de la situation et un «tableau de bord» permettant de mesurer les résultats et d’ajuster la durée et le mandat de l’opération. Sur cette base, a poursuivi le représentant, le Conseil de sécurité a prolongé le mandat de la MINURCA pour qu’elle assure un environnement plus sûr pour la tenue des élections législatives mais aussi présidentielles de façon à permettre au pays de disposer d’institutions politiques ayant une légitimité démocratique. Ce préalable politique sans être suffisant était toutefois indispensable pour traiter des autres problèmes du pays.

Le représentant s’est félicité de la tenue d’un débat sur le thème «Pas de retrait sans stratégie» à un moment où les Nations Unies sont engagées dans un exercice d’introspection et de refonte des opérations de maintien de la paix à la suite du très utile rapport Brahimi. Le représentant a souligné que disposer d’une stratégie suppose d’avoir une bonne connaissance des causes profondes des conflits, des intérêts et des motivations des protagonistes. Cette tâche n’est pas la plus simple a souligné le représentant. Elle souffre malheureusement du fait que le Conseil de sécurité n’intervient le plus souvent qu’une fois le conflit déclenché. Pour le représentant, les remèdes à ces insuffisances ne sont pas évidents mais on en connaît aujourd’hui certains éléments : développement d’une approche préventive, renforcement des capacités d’analyse et d’alerte du Secrétariat. Poursuivant, le représentant a déclaré que toute stratégie doit être fondée sur des objectifs finaux clairement définis, qui doivent être essentiellement l’établissement des conditions politiques, sécuritaires, économiques d’une paix durable. Il a par ailleurs affirmé que beaucoup dépend des acteurs locaux. En cas de respect assez large de règles du jeu communes, il est possible de définir une stratégie et de s’y tenir, a-t-il estimé. C’est ce qui s’est passé au Mozambique et en République centrafricaine. En revanche, la Somalie et le Rwanda montrent la difficulté, pour ne pas dire l’infaisabilité de la tâche lorsqu’il n’y a pas de consensus minimal entre les parties au conflit. Dans ce cas, deux voies s’offrent au Conseil de sécurité : soit l’inaction – et l’on sait le prix politique que les Nations Unies ont payé dans ces circonstances – soit, l’action coercitive. Poursuivant, le représentant a déclaré que la mise en œuvre d’une stratégie suppose que les Nations Unies et ses Etats Membres soient prêts à mobiliser les moyens nécessaires aussi longtemps que possible. Cela suppose que les ressources suffisantes soient disponibles. Même s’il n’appartient pas au Conseil de répondre à une telle question, celle-ci mérite d’être posée. Peut-il y avoir continuité de l’effort de la communauté internationale dans le cadre d’une stratégie de sortie avec une telle discontinuité dans le mode de financement, s’est demandé le représentant. Poursuivant, il a souligné que les Nations Unies doivent savoir s’adapter aux changements sur le terrain et passer le relais au bon moment. Enfin, a affirmé le représentant, une stratégie doit comprendre un ensemble d’objectifs et d’instruments complémentaires qui concourent tous à la même fin. Dans ce contexte, il a insisté sur le caractère crucial des programmes de désarmement, de démobilisation et de réinsertion des ex-combattants. Ce fût une des clés de la réussite au Mozambique et de l’échec en Angola, a-t-il estimé. M. ANWARUL KARIM CHOWDHURY (Bangladesh) a fait valoir que la question de la transition entre phase de maintien de la paix et phase de consolidation de la paix n'a pas fait l'objet d'un examen adéquat au cours du débat tenu dans le cadre de la réforme des opérations de maintien de la paix. Il a estimé que l'utilisation du terme «sortie» qui comporte une connotation péjorative n'est peut-être pas correcte dans ce contexte et ajouté que la question à l'étude ici concerne plus exactement la phase de conclusion des opérations de maintien de la paix et leur transition avec une phase de consolidation de la paix après conflit. Il a appuyé l'idée selon laquelle les missions de maintien de la paix doivent venir étayer un processus de paix ayant un objectif politique clair, estimant cependant que les préoccupations relatives à une stratégie de sortie ne devraient pas aboutir à une discussion portant sur «pas d'entrée en action sans stratégie ou «pas d'entrée en action sans stratégie de retrait». A cet égard, il a déclaré que la réalisation des objectifs fixés dans le mandat initial d'une mission ne constituent pas les seuls critères motivant des changements significatifs, ou le retrait ou encore la fin d'une mission. Il a rappelé que la situation peut également se détériorer sérieusement lorsque les parties au conflit renoncent à l'accord de paix ou reprennent les hostilités. Dans ce cas, a-t-il poursuivi, la situation implique un retrait du déploiement ou encore un retrait partiel ou complet de la mission, suivant les cas.

Le représentant a, par ailleurs, affirmé que le maintien de la paix et de la sécurité internationales constitue un processus continu et que l'aspect maintien de la paix n'est qu'une des phases de ce processus qui peut également comprendre des volets de prévention des conflits, de rétablissement de la paix, d'imposition de la paix et de consolidation de la paix. Il a poursuivi en expliquant que la transition en douceur recherchée nécessite une coordination plus étroite entre le Conseil de sécurité et les autres organes des Nations Unies, à savoir notamment, l'Assemblée générale et l'ECOSOC, de même que les autres programmes et fonds pertinents. Il a ajouté que, dans ce contexte, les institutions de Bretton Woods revêtent une importance cruciale. Il a proposé la mise en place d'un mécanisme institutionnel de consultation entre les acteurs pertinents pour l'élaboration d'une telle stratégie globale de transition. Mettant aussi en avant le rôle clé tenu par les ONG qui partagent avec l'ONU le mandat de paix et de sécurité, il a estimé que le Conseil se devait de mettre également en place un mécanisme institutionnel de coopération et de coordination avec les ONG. Cela l'aidera à éviter de reproduire ses erreurs passées, a-t-il conclu.

M. PAUL HEINBECKER (Canada) a déclaré que pour s'assurer que chaque mission de la paix a pour objectif ultime de renforcer les perspectives d’une paix intérieure et durable et limiter la probabilité de la reprise d’un conflit violent, le Conseil devrait tenir compte du contexte socio-économique des conflits. On devrait également prendre en compte des aspects tels que le respect de la légalité et la situation relative aux droits de l’homme, et non pas se limiter à des questions strictement militaires ou humanitaires. Pour le représentant, il convient donc de s’appuyer sur les concepts traditionnels du maintien de la paix et de s’acheminer vers une approche plus globale et plus intégrée du soutien à la paix. A cet égard, il a encouragé le Conseil de sécurité à tenir compte des stratégies de consolidation de la paix à long terme lors de la planification des missions et de l’élaboration de leurs mandats. Pour le Canada, les éléments de la consolidation de la paix devraient être intégrés dès le départ, dans le mandat de toute mission. Poursuivant, le représentant a souligné l’importance qu’il y a à élaborer les mandats de maintien de la paix en fonction des exigences sur le terrain, notamment de la résolution à plus long terme du conflit, plutôt qu’en fonction de considérations politiques et financières externes. Le Conseil doit à tout prix s’assurer que la communauté internationale n’investit pas à fonds perdus dans la paix parce qu’elle tient compte des impératifs politiques à courte vue.

Pour le Canada, il est également important que le Conseil fasse preuve de perspicacité lorsqu’il décide où il va investir dans la paix. En d’autres termes, a précisé le représentant, il ne devrait pas non plus entrer en lice «sans stratégie». Poursuivant, le représentant a déclaré que la consolidation de la paix pourrait inclure la prévention des conflits, la résolution des conflits, ainsi que divers types de reconstruction au lendemain des conflits, immédiatement et à plus long terme. A cette fin, le Canada appuie pleinement les recommandations du rapport Brahimi et préconise de renforcer la capacité du Conseil à s’attaquer aux causes profondes du conflit. En outre, a précisé le représentant, dans un monde où les crises évoluent rapidement, il est crucial de planifier de manière intégrée une mission de base multidisciplinaire dès le début de l’opération, en faisant participer tous les acteurs pertinents comme les militaires, la police civile, les organismes à vocation humanitaire et des experts civils.

Le représentant s’est par ailleurs félicité de la décision du Secrétaire général d’élaborer un plan sur le renforcement des capacités de l’ONU en matière de mise au point des stratégies de consolidation de la paix. Dans ce contexte, il a rappelé que son pays avait lancé en 1996 sa propre initiative pour la consolidation de la paix. Cette initiative insistait notamment sur le renforcement des capacités de démobilisation, de désarmement et de réinsertion, sur le soutien aux mesures nationales et communautaires en faveur de la réduction et de l’élimination des armes de petit calibre et sur l’encouragement à la réconciliation entre les populations touchées. Poursuivant, le représentant a déclaré que son pays serait heureux d’aider l’ONU à élaborer le plan de renforcement des stratégies de consolidation de la paix.

M. ARNOLDO M. LISTRE (Argentine) a estimé que la stratégie de sortie est une question tout aussi importante que celle de la création d'une opération de maintien de la paix. Elle doit répondre à deux questions fondamentales: les objectifs et l'évaluation par le Conseil de sécurité entre les coûts de l'opération et les conséquences du retrait. Dans le cas où il n'existe pas de violations de cessez-le-feu mais un conflit latent, l'opération a donc un rôle de stabilisation. Le Conseil de sécurité pourrait alors décider de son retrait. Comme il est difficile de déterminer à quel moment les objectifs fixés par l'opération de maintien de la paix sont atteints, une évaluation périodique est nécessaire. Si l'opération de maintien de la paix comporte des aspects multidimensionnels, une étroite coopération entre le Conseil de sécurité et le Secrétariat, en l'occurrence le Département des opérations de maintien de la paix, est impérative pour en garantir le succès. Sans préjuger du caractère propre des conflits, il est important d'analyser avant la fin d'un conflit les conséquences du retrait d'une opération de maintien de la paix. Le Conseil de sécurité doit appuyer les activités de consolidation de la paix dans un pays donné. Il est important de réfléchir sur les stratégies de sortie et d'en prévoir une pour chaque opération, a souligné M. Listre.

M. ROSLAN ABDUL RAHMAN (Malaisie) a souligné que les nouvelles dimensions des conflits armés qui ont donné lieu à des catastrophes humanitaires - exode de millions de réfugiés et de personnes déplacées - exigent une attention urgente et constante du Conseil de sécurité et une action rapide pour les régler. Il n'est pas aisé pour le Conseil de sécurité de trouver des solutions à ces conflits armés. Cette tâche est d'autant plus difficile dans la mesure où les causes profondes de ces conflits violents sont par nature multidimensionnelles, comme l'ambition et la cupidité, les problèmes continus et dévastateurs de l'extrême pauvreté, l'endettement, les maladies, la famine, l'oppression et les obstacles auxquels certains pays sont confrontés dans le climat économique et financier mondial. Mettre fin à ces conflits militaires constitue aujourd'hui un défi important dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales. La complexité et la fragilité de ce processus exigent souvent l'assistance de la communauté internationale. Une opération de maintien de la paix impartiale pourrait jouer un rôle essentiel en s'acquittant de ses fonctions clefs et en contribuant à créer un climat propice à la transition vers une opération de reconstruction après le conflit.

Rappelant que le maintien de la paix est l'un des instruments dont dispose le Conseil de sécurité, M. Roslan a souligné que le nombre et l'intensité des conflits armés exigent une action globale pour répondre aux problèmes complexes de ces conflits. Il est donc impératif que les parties aux accords de paix éventuels, notamment les organisations régionales et sous-régionales, engagent les Nations Unies dès la phase préliminaire des négociations. Pour sa part, le Conseil de sécurité doit assurer que le mandat des opérations de maintien de la paix soit adapté à la situation sur le terrain, et qu'il prévoit notamment les chances de succès et le besoin potentiel de protéger les civils. A cet égard, la délégation malaisienne est fermement convaincue qu'au-delà du déploiement des missions de maintien de la paix dans les conflits en cours, il faut que le Conseil de sécurité et les Nations Unies développent des stratégies appropriées pour la diplomatie préventive et la consolidation de la paix. En tant que stratégie d'ensemble des opérations de maintien de la paix, la Malaisie estime que l'envoi de missions du Conseil de sécurité dans les pays où une opération de maintien de la paix est en place, avec le consentement du pays hôte, permettent d'évaluer la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité. Avec une telle expérience, le Conseil peut formuler des recommandations réalistes en faveur d'une action appropriée. Toutefois, le Conseil de sécurité ne peut agir seul. D'autres organes des Nations Unies et les institutions financières internationales doivent également jouer un rôle pour garantir une transition d'une forme d'opération à une autre. Il est donc impératif que le Conseil de sécurité œuvre en étroite coopération avec ces institutions pour assurer une meilleure coordination en vue du succès de l'opération.

M. WANG YINGFAN (Chine) s’est félicité de la tenue d’un débat sur les stratégies de retrait des opérations de maintien de la paix. Toute stratégie devrait reposer sur une analyse de la situation de la région concernée et notamment sur une évaluation des facteurs susceptible de compromettre le processus de paix. Le représentant a par ailleurs souligné que toute stratégie de sortie devrait être fondée sur des ressources financières adéquates. Poursuivant, il a déclaré que les opérations de paix des Nations Unies devraient rechercher dès le départ à soutenir et appuyer les capacités propres des pays à parvenir à la paix.

Dans ce contexte, le représentant a souligné que les Nations Unies devraient toujours respecter les vœux et opinions des pays visés. Elle ne sauraient en aucun cas imposer des modèles de paix préétablis. En fin, les Nations Unies devraient renforcer leur collaboration et leur coordination avec les organisations régionales.

M. GENNADI M. GATILOV (Fédération de Russie) a estimé que la question d'une stratégie doit être placée dans le contexte des autres questions liées aux opérations de maintien de la paix. Le Conseil de sécurité doit respecter strictement les obligations en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, conformément à la Charte des Nations Unies. Le succès d'une opération de maintien de la paix exige des ressources, une analyse et une planification approfondies. Sa délégation appuie les propositions visant à améliorer le fonctionnement des missions de maintien de la paix. Une stratégie bien réfléchie de retrait et de liquidation d'une opération de maintien de la paix doit être développée. Ces derniers temps, avec une demande de plus en plus accrue de ces opérations, le budget actuel ne permet plus de répondre aux nouvelles exigences.

M. SAID BEN MUSTAPHA (Tunisie) a fait remarquer que les questions qui se posent sont de savoir si l'accent devrait être placé sur une stratégie de sortie d'une opération de maintien de la paix en tant qu'objectif en soi ou si la priorité doit être accordée à une solution à long terme au conflit en question. Au cas où les parties envisagent de demander aux Nations Unies le déploiement d'une mission il faut que les Nations Unies apportent leur assistance aux parties durant les négociations de paix. Il importe également que le Conseil de sécurité maintienne un engagement constant en faveur de la mission jusqu'à son aboutissement. Un tel engagement ne devrait pas être affecté par la complexité d'un conflit donné ou des difficultés de parcours, aussi longtemps que les parties font montre d'engagement en faveur de la paix. En outre, il importe de doter les opérations de maintien de la paix d'un mandat, d'objectifs et de structures de commandement clairement définis et de leur assurer les ressources nécessaires qui favorisent leur déploiement rapide et efficace. Le Conseil doit disposer d'informations aussi complètes et précises que possible lui permettant d'évaluer la situation et de prendre les décisions appropriées concernant l'évolution d'une opération donnée. Soulignant que les pays contributeurs de troupes jouent un rôle essentiel dans la mise en œuvre, sur le terrain, des mandats des opérations de maintien de la paix décidée par le Conseil de sécurité, M. Ben Mustapha s'est félicité que le Conseil ait, à cet égard, convenu de renforcer le mécanisme existant pour les consultations entre le Conseil et les pays contributeurs de troupes.

Avant de se désengager d'une mission, a estimé M. Ben Mustapha, les Nations Unies doivent s'assurer que l'objectif pour lequel elles se sont engagées est atteint. Dans le cas où il s'agit d'un conflit entre Etats, il faut s'assurer que les causes du conflit et les tensions qu'il alimente ont disparu et que les conditions de la paix et de la stabilité et partant les fondements de rapports normaux entre ces Etats soient établis. Pour consolider ces réalisations, le Conseil pourrait encourager la promotion de mesures de confiance. Dans le cas d'un conflit interne, il convient d'adopter une stratégie globale visant à consolider les fondements de la paix et de la stabilité et à les inscrire dans la durabilité. Pour ce faire, il faut adopter une approche globale et coordonnée à laquelle contribuent les organes des Nations Unies selon leurs mandats respectifs et avec l'appui des parties concernées.

MME SELMA ASHIPALA-MUSAVYI (Namibie) a réaffirmé la responsabilité première et indispensable du Conseil de sécurité relative au maintien de la paix et de la sécurité internationales. Elle a indiqué qu'une stratégie de retrait ne doit pas équivaloir à une sortie facile, ni à un renoncement aux responsabilités premières. Ma délégation, a-t-elle expliqué perçoit ce thème comme un moyen d'élaborer un processus continu allant du maintien de la paix à la consolidation de la paix, ajoutant qu'il s'agit donc de se retirer mais de le faire de la bonne manière. Elle a, par ailleurs, déploré le déséquilibre qui prévaut dans le traitement actuel des conflits, affirmant que tandis que l'on laisse traîner en longueur certains d'entre eux, ce qui entraîne la destruction des institutions d'Etat, des infrastructures et des déplacements de populations, d'autres conflits sont traités rapidement et au moyen d'importantes ressources. De l'avis de ma délégation, a-t- elle poursuivi, c'est l'obligation de sécurité collective telle que stipulée dans la Charte, qui doit servir de guide aux mandats des opérations de la paix de l'ONU et non l'intérêt national.

La représentante a rappelé les propositions visant à ce que l'élaboration de mandats de maintien de la paix envisage les pires scénarios, ce qui équivaut à prendre en compte les difficultés inhérentes à chaque opération de paix. Par conséquent, a-t-elle fait valoir, lorsque des ressources appropriées accompagnent chaque opération de maintien de la paix, sans tenir compte de sa situation géographique, alors les difficultés éventuelles sont minimisées et le passage de la phase de maintien de la paix à celle de consolidation de la paix se trouve assurée. Elle a rappelé qu'actuellement les principaux conflits, notamment africains, ont des causes économiques, et sont liés à la présence de diamants et de ressources naturelles. A cet égard, elle a vivement engagé la communauté internationale dans son ensemble à adhérer à l'embargo sur les diamants concernant la Sierra Leone et l'Angola. Elle a également estimé que le rapport du Secrétaire général consacré à l'exploitation illégale des ressources, qui doit paraître prochainement, constituera aussi un pas dans la bonne direction. La représentante a souligné que le débat en cours ne doit pas déboucher sur le fait de mettre fin de manière sélective aux mandats et d'abandonner des missions en raison du manque de progrès, de la fatigue ou de la crainte. Elle a estimé que les difficultés actuelles relatives au déploiement de la MONUC pourraient être aplanies, si le Conseil de sécurité les examine dans le cadre de la Charte et de ses responsabilités et non du point de vue des intérêts nationaux de ses membres. L'expérience a montré que la consolidation de la paix constitue une partie importante des opérations de paix, a-t-elle déclaré, affirmant que chaque mandat de mission de maintien de la paix devrait prendre en compte le niveau de développement socio-économique de chaque situation, ce qui dicte le niveau de ce qui doit être fait en terme de consolidation de la paix. Pour conclure, elle a encouragé le Conseil de sécurité à entreprendre des missions de visite sur le terrain avant de décider d'un retrait, ajoutant que sa délégation ne défend pas l'idée de missions sans fin, mais celle de s'assurer que la violence ait été suffisamment réduite avant le retrait.

M. VOLODYMYR YU YEL'CHENKO (Ukraine) s’est félicité de la tenue d’un tel débat dans le contexte actuel, marqué par la volonté de réformer les opérations de paix des Nations Unies. Un tel débat, a-t-il ajouté, vise à combler les lacunes et à renforcer l’autorité du Conseil en ce domaine. Le représentant a déclaré que toute stratégie de retrait devrait être conçue dans le contexte plus large des efforts généraux de maintien de la paix des Nations Unies. Si le retrait constitue une partie intégrante de la stratégie de règlement des conflits, son succès est largement tributaire des efforts réalisés au cours de l’ensemble des phases précédentes. En d’autres termes, a précisé le représentant, le succès de la phase finale dépend de la qualité des opérations qui ont précédé. Poursuivant, il a rappelé la proposition faite par le Président de l’Ukraine visant à la définition d’une stratégie globale des Nations Unies pour la prévention des conflits. Les Nations Unies devraient renforcer le recours à la diplomatie préventive. Le représentant a déclaré en outre que le Conseil devrait se fixer des objectifs réalistes en évaluant les circonstances sur le terrain ainsi que les ressources disponibles pour les atteindre. Il a par ailleurs souligné que le Conseil doit demeurer engagé tout au long du déroulement des opérations de maintien de paix. Il est essentiel, a-t-il précisé, que les réponses et stratégies des Nations Unies soient élaborées via le mécanisme de consultation entre le Conseil de sécurité, le Secrétariat et les pays fournisseurs de contingents. Par ailleurs, le Conseil devrait suivre de près les processus de consolidation de la paix après les conflits.

M. CURTIS A. WARD (Jamaïque) a fait mention du rapport Brahimi et notamment rappelé, pour éclairer le débat en cours du Conseil de sécurité, la recommandation selon laquelle dans le cas "d'opérations complexes, le travail du personnel du maintien de la paix vise à maintenir un environnement local sûr, tandis que le personnel chargé de la consolidation de la paix travaille à rendre cet environnement durable. Seul un tel environnement offre la possibilité d’un retrait aux forces de maintien de la paix, faisant du personnel de maintien de la paix et de celui chargé de la consolidation de la paix des partenaires inséparables”. Cette conclusion, a-t-il poursuivi, a été formulée par un Groupe de travail que le Secrétaire général a décrit comme étant composé d’individus disposant d’une expérience dans le domaine du maintien et de la consolidation de la paix, ainsi que dans le domaine du développement et de l’assistance. C’est pourquoi, a-t-il expliqué, il convient de prendre en compte leurs conclusions de la façon la plus sérieuse possible.

Le représentant a, par ailleurs, énuméré les différentes considérations qui doivent guider une stratégie de retrait. A ce titre, il a notamment évoqué la stabilité de la région dans son ensemble, les dangers que constituent la pauvreté et le sous-développement, ainsi que les autres causes profondes des conflits qui peuvent le raviver. Pour développer cette stratégie, a-t-il expliqué, il convient de tenir compte de certains éléments, précisant que bien d'entre eux se trouvent dans les recommandations et les décisions de la résolution 1327. Ces éléments constituent une série de principes pour guider le Conseil dans la façon d’élaborer des mandats de maintien de la paix garantissant une paix durable. Dans ce contexte, le représentant a notamment affirmé que le Conseil doit chercher à garantir les accords de paix ce qui implique la participation de forces de maintien de la paix de l’ONU pourvues d’un objectif politique clair. De plus, le Conseil de sécurité doit également définir clairement chaque mandat de maintien de la paix nouveau ou dans les cas des renouvellements, s’assurer que celui-ci est crédible et réalisable, a-t-il affirmé. Enfin, le Conseil de sécurité doit incorporer des mesures de consolidation de la paix en tant que parties intégrantes des phases d’élaboration et de conception des opérations de paix. Ceci appelle un partenariat avec le Secrétariat pour ce qui concerne l’élaboration d’une doctrine de stratégies et de programmes de consolidation de la paix dans une approche intégrée et globale des situations de conflit. Ces étapes importantes du processus de développement d’une stratégie de retrait visent à réduire de manière significative, sinon entièrement, la possibilité de laisser une situation menaçant d’un retour à un conflit sérieux après le départ d’une mission.

M. SEKOU KASSE (Mali) s'est félicité de la convocation du présent débat pour rappeler au Conseil de sécurité son rôle crucial en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il a fait siennes les recommandations contenues dans le rapport Brahimi. Convenant qu'il faut trouver la bonne stratégie pour la sortie d'une opération de maintien de la paix, la délégation malienne insiste toutefois qu'il ne faut pas établir une date butoir pour l'accomplissement du mandat d'une telle opération. Une évaluation succincte des expériences du passé exige de définir de nouveaux paramètres pour garantir le succès de la mission. La crise de confiance entre les parties au conflit a été une des raisons essentielles qui ont amené le Conseil de sécurité à imposer le retrait de certaines missions. Un tel retrait a eu des conséquences négatives tant pour les pays concernés que pour le prestige même des Nations Unies. Avant de déterminer un mandat, le Conseil de sécurité doit analyser de manière approfondie la situation sur le terrain et renforcer le mécanisme des consultations avec les pays contributeurs de troupes.

M. JEREMY GREENSTOCK (Royaume-Uni) a déclaré que le Conseil doit, en effet, se poser la question de savoir comment prononcer le retrait des opérations de maintien de la paix. Il est clair, a-t-il déclaré, que dans l’élaboration de leurs stratégies en matière d’opérations de la paix, les Nations Unies doivent mener une analyse plus profonde et plus large de leur action. Il faudrait développer les capacités d’analyse stratégique au sein du Secrétariat. De telles analyses devraient, comme l’ont précisé plusieurs intervenants ce matin, s’intéresser aux causes mêmes des conflits et au contexte dans lesquels ils s’inscrivent. Les mandats des opérations de la paix doivent également tenir compte des accords de paix conclus entre les parties, ce qui illustre bien que l’ONU n’est pas maître de tout. Poursuivant, le représentant a souligné qu’il serait souhaitable d’adopter des critères relatifs à la sortie des opérations de paix. Les mandats devraient contenir les critères qui, une fois satisfaits, permettent de prononcer un retrait. A cet égard, le représentant a souligné qu’il faut se donner les moyens de savoir si les objectifs ont été atteints.

Pour le représentant, il est important de définir des mandats qui soient compréhensibles et acceptables pour tous. Le représentant a ensuite évoqué la question de la mise en œuvre des opérations de maintien de la paix, qui est déterminante de leur succès. A cet égard, il a déclaré que l’ONU est déficiente en ce qui concerne le leadership. On se renvoie la responsabilité entre différents organes, ce qui n’est pas bon. Le représentant a par ailleurs souligné la nécessité d’assurer la souplesse des mandats pour permettre une meilleure adaptation à la nouveauté des situations. En fin, il a estimé que la consolidation de la paix après le conflit devrait laisser la principale responsabilité au pays lui-même. La décision de la sortie doit être considérée comme une décision de transition par laquelle on transmet le travail qui reste à accomplir à un mécanisme. M. DIETER KASTRUP (Allemagne) a fait observer que l'on peut se poser plusieurs questions quant au thème du débat d'aujourd'hui «Pas de retrait sans stratégie». Doit-on adopter une stratégie en cas de retrait d'une mission pour des raisons d'urgence, en cas de transition d'une opération vers une autre, en cas de transition vers une administration nationale ou locale, ou encore en cas de la détermination du succès d'un mandat? Faisant remarquer qu'il n'existe pas de formule magique pour garantir le succès d'un mandat défini par le Conseil de sécurité, M. Kastrup a estimé qu'il faudrait cependant prendre en compte certains éléments lors de l'élaboration, de la modification ou de l'expiration d'un mandat du Conseil de sécurité. Il est clair qu'il n'existe pas de solutions types, chaque conflit en cours ou potentiel exigeant sa propre analyse et une action appropriée. Néanmoins, les leçons tirées des expériences du passé soulignent la nécessité de procéder à une évaluation claire et précise de la situation sur le terrain avant d'établir, de modifier ou de mettre fin à un mandat. A cette fin, le rôle du Représentant spécial du Secrétaire général, le renforcement du mécanisme des consultations entre le Conseil de sécurité et les pays contributeurs de troupes ainsi que celui des capacités du Secrétariat de recueillir les informations nécessaires constituent des instruments efficaces.

Une approche intégrée implique également qu'il faut tenir compte des répercussions d'un nouveau mandat, de son amendement ou de son expiration sur les pays voisins, a souligné M. Kastrup, rappelant notamment l'impact du mandat du Conseil de sécurité pour le Kosovo, la Bosnie-Herzégovine et la Sierra Leone sur les pays voisins. Lorsque le Conseil de sécurité décide de modifier ou de mettre fin à un mandat, il faudrait combiner un scénario clair et une analyse des différentes options pour évaluer les conséquences de l'action envisagée. Les mandats doivent être clairs, crédibles et réalistes et disposer de ressources adéquates. S'il envisage de réduire les effectifs de la mission, de la retirer ou d'y mettre fin, le Conseil doit procéder à une évaluation transparente et appropriée de la réalisation des objectifs de la mission. Les mandats doivent prévoir assez de souplesse afin que des modifications soient possibles au cours de la mise en œuvre de la mission. Tout en comprenant les raisons d'un retrait, M. Kastrup a jugé important d'en établir des critères précis. Les missions de maintien de la paix doivent être perçues comme la continuité d'activités multidimensionnelles et il est important de faire face aux activités intégrées qui passent de la prévention des conflits à la consolidation de la paix après les conflits. En outre, il faut de toute évidence établir une coordination efficace entre tous les partenaires potentiels pour la mise en œuvre des actions intégrées. La délégation allemande attend l'application des recommandations formulées dans le rapport Brahimi, indiquant que l'Allemagne a déjà pour sa part mis en œuvre les recommandations relatives aux accords sur les forces en attente, la formation du personnel civil de maintien de la paix, sa contribution au Fonds d'affectation pour la prévention des crises ainsi que le renforcement de l'unité des enseignements tirés du passé.

M. KISHORE MAHBUBANI (Singapour) a estimé que la Somalie donne l’exemple parfait du cas dans lequel une mission de maintien de la paix des Nations Unies a été engagée et achevée sans qu'on ait défini avec clarté des objectifs à long terme. Un tel comportement se retrouve en partie dans l’expérience rwandaise, où la mission des Nations Unies n’a pas pu faire face à un génocide qui était pourtant prévisible. Le représentant a estimé que le succès du retrait d’une opération de maintien de la paix est étroitement lié à la façon dont est décidé le déploiement d’une telle opération. Il a émis l’espoir que le débat tenu aujourd’hui relancera les études de cas réalisés par l’unité des enseignements tirés du passé. Il a estimé que pour déterminer les moyens d’assurer le succès des opérations de paix, il faut prendre conscience de leur grande diversité, et les distinguer. Pour le représentant, existent d’une part, les opérations de paix traditionnelles, déployées en réponse à des conflits interétatiques. De telles opérations existaient surtout pendant la période de la guerre froide. Leur but était de contrôler le respect des cessez-le-feu et les frontières. Le second type d’opération de paix, apparu après la fin de la guerre froide, concernait d’autres types de conflits qui pouvaient être résolus de façon rapide, car le Conseil agissait à l’époque de façon unie. Cette unité, a souligné le représentant, a permis de remporter de nombreux succès, y compris dans le cadre de conflits internes. Le représentant a fait remarquer que les succès remportés l’ont été parce que les populations locales se sont emparées des processus de paix. Il a souligné qu’il s’en est fallu de peu pour que l’expérience de la Somalie mène à leur perte les opérations de paix des Nations Unies. Heureusement, elles ont survécu sous une nouvelle forme. La mission des Nations Unies au Timor oriental constitue à cet égard le meilleur espoir pour les opérations de paix des Nations Unies. Dans ce contexte, il a souligné que cette mission ne sera couronnée de succès que si la communauté internationale n’y met pas fin de façon prématurée. Il a en fin émis l’espoir que la population locale et les dirigeants du pays prendront une part active au processus de paix.

M. ANTONIO MONTEIRO (Portugal) s'est rallié pleinement à l'initiative des Pays-Bas visant à ce que le Conseil de sécurité, assisté de manière efficace par le Secrétariat, adopte une stratégie pour le retrait qui doit, évidemment, être une stratégie garantissant le succès des efforts de paix des Nations Unies. Les ressources nécessaires devraient être associées à un mandat clair et réaliste pour mettre fin à la violence et consolider de manière irrévocable la paix après le conflit. C'est pourquoi, tout plan à long terme pour les opérations de maintien de la paix doit prévoir l'engagement en faveur d'une phase de consolidation de la paix après le conflit. A cet égard, la délégation portugaise réaffirme que dans la mesure où certains éléments de consolidation de la paix font partie intégrante des opérations de maintien de la paix, ils doivent être inclus dans la phase initiale de planification et de déploiement des opérations. Le Conseil de sécurité devrait également continuer à participer à toutes les phases des efforts des Nations Unies pour faire face à la situation de conflit. C'est le meilleur moyen visant à assurer une transition souple d'une phase à une autre et à adresser un message clair à toutes les parties concernées que le retrait d'une composante d'une opération de maintien de la paix n'implique en aucun cas que les Nations Unies reviennent sur leurs engagements en faveur d'une consolidation de la paix et de leur résistance au retour à la guerre. Toutes ces questions constituent une partie intégrante du processus décisionnel du Conseil de sécurité et ce processus est parfois l'art du possible et pas nécessairement une action rationnelle répondant aux crises avec des ressources optimales et des objectifs clairs.

Il est difficile de convaincre les pays contributeurs de troupes de fournir davantage de soldats pour les opérations de maintien de la paix lorsque les Nations Unies, en raison du non-paiement continu de contributions et d'arriérés, les Nations Unies ne les remboursent pas pour leur participation à des opérations terminées ou en cours. Bien qu'il s'agisse d'une question de principe, M. Monteiro a estimé que les contributions doivent être réglées intégralement dans les délais impartis et sans conditions, sinon l'Organisation ne peut fonctionner. A cause de ces contraintes, le Conseil de sécurité n'a pu, dans le passé, agir ou autoriser une opération déséquilibrée tant en termes de ressources financières que de mandat clair et crédible. Les Nations Unies ne peuvent réussir que lorsque les parties sont engagées en faveur de la paix. Les Etats doivent réaffirmer leur engagement en faveur du rôle primordial des Nations Unies en matière de maintien de paix et de sécurité internationales. Pour sa part, le Conseil de sécurité, conformément au mandat qui lui est confié par la Charte des Nations Unies, doit s'acquitter pleinement de ses obligations dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Enfin, le Secrétariat doit, pour assurer un rôle efficace dans ce domaine, disposer de ressources financières adéquates et d'un personnel suffisant et efficace.

M. DUMISANI S. KUMALO (Afrique du Sud) a fait valoir que toute la question de savoir si le Conseil de sécurité est capable d'engager certains des pays membres à devenir des pays fournisseurs de contingents pour le maintien de la paix n'est sans doute pas étrangère au thème de ce débat. Faisant mention du rapport intitulé Agenda pour la paix publié en 1992 par le Secrétaire général précédent, il a rappelé que ce document suggérait que l'énergie et les ressources de la communauté internationale ne devaient pas être mobilisées et organisées pour traiter uniquement les symptômes des crises, mais pour aborder également leurs causes profondes, y compris leurs dimensions politiques, économiques, sociales et humanitaires. Ce qui, a-t-il estimé, implique aussi que les efforts déployés en vue de la résolution des conflits soient perçus comme des efforts de long terme qui incluent un large volet de consolidation de la paix. Le représentant a, par ailleurs, mis en avant certaines des questions que soulève le document qui est au cœur de la discussion de cette séance. Il a notamment indiqué que sa délégation a accueilli avec beaucoup de satisfaction le débat intervenu récemment au Conseil de sécurité sur la question du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration (DDR), le considérant comme un élément essentiel de la consolidation de la paix après conflit. Il a aussi affirmé que le champ et la nature à long terme des activités de consolidation de la paix mettent l'accent sur le besoin de prendre en compte les limites de l'implication du Conseil dans de telles activités. La mise en œuvre des recommandations du Groupe d'étude dirigé par M. Brahimi à ce sujet doit également traiter de l'implication d'autres composantes du système de l'ONU, y compris de l'Assemblée générale, de l'ECOSOC et des autres programmes et institutions spécialisés. En conclusion, le représentant a félicité le Conseil pour l'adoption de la résolution 1327 en réponse aux recommandations contenues dans le rapport Brahimi. Il a affirmé que le temps est venu aujourd'hui de traduire les paroles en actes. A cet égard, la question de la volonté politique et de l'engagement est essentielle, a-t-il estimé, mentionnant le manque d'engagement dont font preuve à l'égard de l'Afrique ceux qui disposent des ressources les plus importantes. La résolution adoptée par le Conseil sur le rapport Brahimi doit à présent être suivie par des actions concrètes pour investir dans le domaine de la paix durable dans les nombreuses situations de conflit en Afrique, la plus urgente étant la Sierra Leone.

M. ASDA JAYANAMA (Thaïlande) a déclaré que le débat relatif à la stratégie de retrait des opérations de paix contribuera à fonder de telles opérations sur des mandats clairs et crédibles. Le représentant a estimé que les stratégies de retrait des opérations de paix devraient toujours être liées aux objectifs généraux des missions de maintien de la paix. Poursuivant, il a estimé que lorsque des objectifs ont été clairement définis, les ressources adéquates doivent être allouées et le suivi de leur réalisation assuré. Le représentant a ajouté qu’il est essentiel de consulter l’ensemble des parties concernées par une opération de paix pour assurer le succès de la stratégie de retrait.

Le représentant a ensuite estimé qu’en raison du caractère limité leurs ressources, les Nations Unies ne peuvent pas intervenir dans tous les conflits. Il a estimé que si l’action des Nations Unies est la bienvenue dans certains cas, il est important dans d’autres situations de laisser les organisations régionales jouer pleinement le rôle qui est le leur. Le représentant a enfin appuyé l’initiative du Secrétaire général visant à favoriser l’émergence d’une culture de prévention, la prévention étant le moyen le plus efficace de traiter des risques d’embrasement des conflits. Comme le dit le vieil adage, a conclu le représentant, «mieux vaut prévenir que guérir».

MME PENNY A. WENSLEY (Australie) a déclaré que ce débat doit porter sur la manière plus que sur les termes dont le Conseil de sécurité décide de conclure une opération. Elle a indiqué que sa délégation souhaite, en premier lieu, voir le Conseil adopter une approche plus consistante du point de vue de la planification des opérations. Une approche, a-t-elle précisé, au sein de laquelle la planification regardant la fin d'une mission constitue un aspect indispensable et intégral de toutes les décisions du Conseil visant à autoriser le déploiement du personnel de l'ONU. La représentante a expliqué que sa délégation est d'avis qu'il ne doit pas y avoir de «retrait sans stratégie», mais qu'elle tient aussi à souligner que cela n'est pas suffisant en soi - le Conseil ne doit pas créer d'opérations sans stratégie de retrait. De plus, tout ajustement à la planification concernant la date de fin de mandat d'une opération devrait être transparent et sujet à des consultations préalables avec les pays contributeurs de troupes pour cette opération. La représentante a également affirmé que les stratégies de retrait doivent prendre en compte non seulement la date de retrait militaire, mais aussi les implications politiques et économiques d'un retrait ou d'une réduction substantielle du nombre de Casques bleus et de personnel de l'ONU.

La représentante a déclaré que, d'un point de vue politique, ces stratégies pourraient tenir compte et comporter des facteurs tels que la durabilité du processus politique une fois la mission partie, l'état du processus de réconciliation entre les parties au conflit ou le rétablissement des conditions nécessaires à la tenue d'une élection. Elle a cependant indiqué que le Conseil ne doit pas placer la barre trop haut, estimant qu'il se trouve rarement des situations dans lesquelles l'ONU partira en laissant une situation politique parfaitement stable. C'est pourquoi, a-t-elle poursuivi, le critère doit être celui de savoir si les processus politiques sont tels qu'ils ne représentent plus une menace pour la paix et la sécurité internationales. D'un point de vue économique, elle a expliqué que l'impact du retrait de l'ONU peut avoir des conséquences aussi bien négatives que positives. Elle a notamment déclaré que dans le cas du retrait d'une mission ayant un impact majeur sur l'économie, il convient de mettre en place la coordination d'une planification et d'une mise en œuvre de projets d'aide au développement à moyen terme. Pour cela, le Conseil devra nécessairement faire appel au Secrétaire général et aux autres organes et institutions spécialisées du système. Dans cette optique, elle a engagé le Conseil à travailler en collaboration plus étroite avec les organes principaux de l'ONU. La représentante a également fait valoir que s'il est effectivement souhaitable que le retrait d'une mission coïncide avec la réalisation des objectifs de son mandat, cela n'est pas toujours possible. Dans certains cas, le Conseil doit retirer une opération parce qu'elle n'a pas réussi à mener à bien son mandat. A cet égard, elle a lancé un appel pour que ce retrait ne corresponde pas à un arrêt définitif, indiquant que le Conseil devrait alors développer de nouveaux objectifs ou stratégies pour atteindre les buts fixés par d'autres moyens. M. AHMED ABOULGHEIT (Egypte) s'est félicité de l'initiative prise par les Pays-Bas visant la tenue aujourd'hui d'un débat sur le thème de «Pas de retrait sans stratégie». Il faut avoir une vision claire et des étapes précises pour envisager le retrait d'une opération de maintien de la paix. Le Conseil de sécurité, en mettant fin à une opération de maintien de la paix, doit examiner la situation au cas par cas. Une solution ne peut s'appliquer à toutes les situations de conflit. Dans certaines régions en conflit, lorsqu'une opération de maintien de la paix est laissée, on ne doit pas céder aux pressions exercées par l'une ou l'autre partie visant à servir les intérêts d'un seul pays. A chaque fois que le Conseil de sécurité décidait du retrait d'une opération, cette décision avait des conséquences tragiques sur la population ou la situation économique et sociale du pays hôte. Le Conseil de sécurité doit tirer les leçons des expériences passées. Pour sa part, l'Assemblée générale - conformément au mandat qui lui est confié par la Charte des Nations Unies - doit jouer un rôle crucial en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il faut tenir compte du fait que le mandat n'est pas indéfini et que le Conseil de sécurité doit y mettre fin à un moment ou à un autre. C'est pourquoi, le Conseil doit consulter l'Assemblée générale et les autres organes compétents pour déterminer dans quelles conditions ce retrait doit s'effectuer.

M. SERGIO VENTO (Italie) a déclaré qu’il ne saurait y avoir de stratégie de retrait sans définition, en amont de l’opération de paix, d’une stratégie globale. Nous avons besoin d’une vision politique claire pour éviter que des situations telles que celle de la Sierra Leone ne se reproduisent. Nous devons nous départir d’une logique d’action dictée par l’urgence et des intérêts partiaux et provisoires pour bâtir cette connexion fondamentale entre prévention des conflits et possibilités d’action lorsqu’une crise dégénère en une menace à la paix et à la sécurité internationales. Le représentant a insisté sur l’importance des mesures de construction de la paix et sur la notion d’état de droit, dont la promotion est, selon lui, essentielle au succès de toute stratégie de paix. Il a par ailleurs insisté sur la nécessité pour les Etats Membres de ratifier le plus rapidement possible le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, institution qui favorisera la réconciliation à travers la recherche de la vérité. Dans ce contexte, il a rappelé que le rapport Brahimi propose de façon opportune d’établir un système de normes transitoires en matière de droit pénal, afin de faciliter la tâche de la police et de l’administration de la justice dans le cadre de missions complexes. De telles nécessités se font particulièrement sentir dans le cas du Kosovo et du Timor oriental. Nous devons toutefois veiller à ce que de telles normes respectent les systèmes juridiques et sociaux locaux, en les dotant de la souplesse et de la flexibilité nécessaires à l’adaptation à la situation sur le terrain. Le représentant a par ailleurs souligné la nécessité d’accorder une attention particulière aux causes économiques et sociales des conflits. L’organisation d’élections est également un moment déterminant des opérations de paix, a-t-il estimé. A cet égard, le représentant a appelé de ses vœux, le renforcement du Département de l’assistance électorale. Poursuivant, il a affirmé que les Nations Unies doivent s’assurer que les conflits ont bien été réglés avant de démanteler leurs opérations de paix. Dans ce contexte, il s’est félicité de la volonté du Conseil de sécurité de définir des mandats clairs, crédibles et réalistes. A cet égard, il a insisté sur la nécessité d’intégrer de façon plus régulière et systématique les pays contributeurs de troupes aux activités du Conseil, dans toutes les phases de déroulement des opérations de paix. Le représentant a évoqué les missions des Nations Unies en Somalie, en Albanie et au Mozambique, insistant sur la nécessité de tirer les leçons du passé.

M. ARNE B. HONNINGSTAD (Norvège) a estimé que le retrait d'une opération de maintien de la paix devrait résulter du succès de la restauration de la paix et de la sécurité dans le pays ou la région en question. Lorsque les Nations Unies décident d'intervenir dans un conflit complexe, l'objectif doit viser à passer d'une situation qui a conduit à l'éclatement du conflit à une situation où la paix et la sécurité ont repris pied. Cela implique que l'opération doit appuyer le développement d'une société et d'une structure politique qui peuvent à la fois répondre aux causes profondes du conflit et au règlement des conflits d'intérêts par le biais d'un système légitime et participatif. Il faut examiner de manière approfondie le rôle des ressources naturelles en tant que cause et moyen alimentant les conflits armés. De l'avis de la délégation norvégienne, il faut faire une distinction entre la date d'expiration du mandat et la fin d'une situation dans l'élaboration des stratégies de retrait. La planification d'un retrait militaire doit donc être coordonnée avec un transfert progressif des responsabilités d'une mission internationale aux autorités locales dans la mesure où cette coordination est essentielle pour normaliser la situation après le conflit.

Une stratégie de retrait bien définie est également importante pour bénéficier de l'appui de la population et de ses représentants pour la mission. En vue de réduire la possibilité d'un retrait unilatéral des forces ou les pressions en faveur d'une stratégie de retrait axée sur une date-butoir, les pays contributeurs de troupes doivent bénéficier de la confiance et être soutenus dans leurs efforts visant à garantir le succès du mandat de la mission. A cet égard, la Norvège est convaincue que des mandats clairement définis et des objectifs précis pour le retrait y contribueront. La planification est la clef du succès des stratégies de retrait, a souligné M. Honningstad, rappelant que le rapport Brahimi contient plusieurs recommandations importantes visant à renforcer et à améliorer la capacité de planification du Département des opérations de maintien de la paix. Le mandat de l'opération de maintien de la paix devrait également répondre à l'importance des activités visées et disposer de ressources adéquates. Enfin, les Nations Unies doivent jouer un rôle dans toutes les phases, de la prévention du conflit à la consolidation de la paix après le conflit.

M. JORGEN BOJER (Danemark) a souligné que son pays déploie des efforts importants en matière de coopération et d’assistance afin de prévenir l’apparition de conflits violents. Comme l’a déclaré le Secrétaire général, toute étape franchie en matière de réduction de la pauvreté et de renforcement de la croissance économique participe de la prévention des conflits. Le représentant a fait sienne l’idée développée la semaine dernière par Mme Ogata, Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, d’appuyer les initiatives locales visant à promouvoir les mécanismes de mise en œuvre du droit. Il a par ailleurs estimé que toute stratégie de retrait devrait reposer sur l’idée que le processus de construction de la paix doit être entre les mains des parties. Le renforcement de la capacité des autorités locales à exercer les responsabilités relatives à la construction de la paix devrait être partie intégrante de toute stratégie de retrait d’opérations de la paix, a estimé le représentant. Il a également insisté sur l’importance des programmes de désarmement, de démobilisation, de réintégration sociale des anciens combattants, de contrôle des élections le cas échéant, de surveillance des droits de l’homme et de formation des forces de police locales. Par ailleurs, a-t-il poursuivi, toute stratégie de retrait devrait être fondée sur un retrait des troupes et sur un plan à long terme destiné à promouvoir une paix durable dans la zone de conflit. Pour le Danemark, un tel plan devrait insister sur le recours à la police civile en vue de promouvoir l’état de droit. En effet, la police, les experts judiciaires sont indispensables à la reconstruction de la société civile et de l’économie. Leur action doit absolument être prévue dans une stratégie solide de construction de la paix. Le représentant a par ailleurs souligné l’importance de la coordination avec les institutions humanitaires et de développement déjà présentes dans la région concernée. Les dirigeants d’une mission de maintien de la paix devraient toujours travailler en étroite collaboration avec ces institutions, a-t-il ajouté. Concluant son intervention, le représentant a déclaré que le Conseil devrait approfondir ses consultations avec le Secrétariat, les institutions humanitaires et de développement du système des Nations Unies, lorsqu’il élabore ses décisions de retrait d’opérations de paix.

M. FELIPE H. MABILANGAN (Philippines) a fait observer que le débat d'aujourd'hui permet de dresser un bilan du rôle du Conseil de sécurité en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales. Toute stratégie de retrait d'une opération de maintien de la paix doit reposer sur un mandat clairement défini et réaliste, doté des ressources appropriées. La coopération entre les cinq Etats membres permanents du Conseil de sécurité était, dans le passé, une forme d'élitisme. Aujourd'hui, le mécanisme des consultations avec les pays contributeurs de troupes encourage plus de transparence. La transparence dans les travaux du Conseil de sécurité doit toutefois être axée sur la participation active des contributeurs de troupes et sur un échange d'informations adéquates et précises. Il faut mettre en confiance les pays fournissant des troupes afin de mieux appuyer la conception et le déploiement d'une opération de maintien de la paix. Par ailleurs, a souligné le représentant, il faut s'attaquer aux causes profondes des conflits et établir un véritable partenariat entre le Conseil de sécurité et les autres organes des Nations Unies, ainsi que les institutions financières internationales, pour mettre en place les programmes de consolidation de la paix après les conflits.

MME MARJATTA RASI (Finlande) a émis l’espoir que le Conseil de sécurité saura tirer tout le parti de la présente discussion pour améliorer, à l’avenir, ses opérations de maintien de la paix. La Finlande estime que la stratégie de retrait des opérations de paix doit être considérée comme l’étape ultime d’un processus plus général et doit être fondée sur un mandat clair. Le retrait est en effet une phase d’un processus plus général de prévention des conflits, de règlement des conflits et de leur consolidation après la paix. La représentante a estimé que toute opération de retrait doit être menée au vu d’informations fiables sur la situation qui prévaut sur le terrain. Elle a souligné que les pays contributeurs de troupes devraient pouvoir participer à toutes les étapes du déroulement de l’opération de paix. Elle a par ailleurs déclaré que sans engagement des acteurs régionaux et locaux dans la construction de la paix, on ne peut s’attendre à un retrait réussi. Elle a enfin estimé que la consolidation de la paix doit être considérée comme partie intégrante des opérations de maintien de la paix. Partant, elle a insisté sur l’importance des mesures visant la consolidation de la paix après les conflits.

M. SHAMSHAD AHMAD (Pakistan) a fait observer que, le plus souvent, lorsque les agents de la paix de l'ONU arrivent dans un pays dévasté par la guerre, ils peuvent au mieux maintenir le statu quo et repartir sans avoir contribué au règlement à long terme du conflit ou, au pire repartir et être les témoins de la reprise des combats et du carnage après leur départ. L'explication, a-t-il estimé, repose dans le fait que le Conseil de sécurité s'attache trop souvent à décider d'arrangements temporaires de dernière minute plutôt qu'à élaborer des stratégies bien formulées visant le rétablissement de la paix dans les zones de conflit, en s'attaquant aux symptômes du conflit plutôt qu'à ses causes profondes. Il a également dénoncé le fait que trop souvent le Conseil échoue dans la mise en œuvre de ses résolutions. Il a déclaré qu'il ne peut y avoir de stratégie de retrait crédible sans un plan complet incluant la solution au conflit. La solution n'est pas de mettre fin à ces opérations de maintien de la paix traditionnelles ou d'imposer des clauses-couperet, ni de faire durer le statu quo, a-t-il déclaré. La solution réside dans l'engagement continu des Nations Unies, à la fois sur le terrain et avec les acteurs concernés, à rechercher et à trouver activement un règlement politique au différend ou à la crise. Une fois que l'opération de maintien de la paix est en place, a-t-il poursuivi, les Nations Unies doivent s'assurer que le conflit est résolu avant de se désengager. Se retirer sans avoir réalisé une paix durable est inacceptable et coûteux, a déclaré M. Ahmad. Le maintien de la paix doit être lié à la résolution du conflit et à la consolidation de la paix après le conflit. Le fait que le maintien de la paix n'est qu'une composante du rétablissement de la paix ne doit pas être perdu de vue. Une telle approche est essentielle dans la résolution des conflits, qu'ils soient intra-Etats ou inter-Etats, et aussi pertinente au Sierra Leone ou au Kosovo qu'au Moyen-Orient ou au Cachemire. Le Conseil de sécurité ne doit pas s'affranchir de ses responsabilités en déployant seulement une opération de maintien de la paix dans une zone de conflit, il doit également avoir une stratégie de paix solide et réalisable pour résoudre le conflit en s'attaquant à ses causes profondes et avec la volonté politique de le résoudre.

Il a par ailleurs appelé le Conseil de sécurité à passer à l'action. Le Conseil doit réaffirmer sa crédibilité perdue et son autorité en réalisant les obligations qui lui incombent en vertu de la Charte sur le maintien de la paix et de la sécurité internationales, a-t-il déclaré. Dans la mise en œuvre de ses décisions, le Conseil ne doit pas faire montre de discrimination à l'égard de régions ou de situations mais doit agir justement et défendre les principes de la justice et du droit international. Il a, en outre, déclaré que l'ONU doit tenir sa promesse à l'égard du peuple du Cachemire en assurant la mise en œuvre des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Le Cachemire n'est pas seulement une menace à la paix et à la sécurité mondiales mais également un défi à la crédibilité de l'ONU, a-t-il déclaré. M. Ahmad a conclu en réaffirmant que le rétablissement et la préservation de la paix ne doivent pas être laissés aux agents de maintien de la paix tant ce domaine est celui du Conseil de sécurité.

M. SERGEI S. LING (Bélarus) s'est déclaré convaincu que l'initiative des Pays-Bas contribuera à mieux rationaliser les travaux du Conseil de sécurité et encouragera une participation plus active d'un plus grand nombre d'Etats Membres à des délibérations visant l'amélioration du rôle des Nations Unies en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationale. Il est essentiel d'adopter une stratégie de retrait appropriée, fondée sur un mandat clair et réaliste et des ressources adéquates afin d'éviter les conséquences négatives d'un retrait brutal sur la population locale et la situation économique et sociale du pays hôte. Pour ce faire, il faut insister sur les causes profondes des conflits avant de créer une opération de maintien de la paix.

M. KAMALESH SHARMA (Inde), mentionnant la question à l'étude, à savoir «pas de retrait sans stratégie», a fait valoir que prévaut actuellement une confusion sur ce que représente vraiment le maintien de la paix. Bien qu'on ait, il y a 5 ans, corrigé l'euphorie engendrée par l'Agenda pour la paix, à la lumière crue des expériences, dans son Supplément, le Conseil est à nouveau invité à se tourner vers le même évangélisme brumeux qui a causé la perte de plusieurs opérations de maintien de la paix, a-t-il déploré. Des voix influentes expliquent à nouveau que les forces modernes de maintien de la paix doivent être préparées à défaire les forces violentes persistantes. Ceci, a-t-il poursuivi, semble possible mais non réalisable dans les faits, pour plusieurs raisons et les opérations que le Conseil mettra en place s'il suit cette voie, dans laquelle il n'y a pas de retrait sans embarras, échoueront inévitablement. Le représentant a, par ailleurs, rappelé la règle essentielle qui veut que les opérations soient menées par des Etats neutres sans intérêts dans la région de déploiement, faisant valoir que ce principe de neutralité a été violé à maintes reprises aux cours des dernières années. En effet, l'ONU a coopté des partenaires régionaux, bien que ceux-ci soient naturellement parties au problème et non à la solution.

M. Sharma a rappelé que quasiment toutes les opérations de maintien de la paix comprennent à présent un volet consacré au désarmement, démobilisation et réintégration (DDR) et le résultat de cela est souvent d'une qualité douteuse. Selon lui, l'expérience de l'ONU montre que dans certains cas le désarmement n'est ni utile et ni efficace, et ce, dans la mesure où sans sécurité et sans emploi, les jeunes hommes ne laissent pas tomber les armes dont dépendent leur vie et leur subsistance. Face à cela, le Conseil pourrait déployer, dès le départ, une force de maintien de la paix si importante et si bien armée qu'elle apporterait à chacun le sentiment d'être en sécurité, mais persuaderait aussi les dirigeants des différentes factions d'abandonner les armes. Concernant le rôle de l'aide humanitaire, le représentant a rappelé que Mme Ogata a mis en avant, il y a peu, devant le Conseil, les contradictions qui prévalent entre les besoins du maintien de la paix et ceux du secours humanitaire. Il a toutefois estimé que l'impulsion humanitaire du Conseil est naturelle, mais que le fait de dispenser une aide humanitaire par le biais du maintien de la paix est nuisible aux deux activités.

Le représentant a estimé que la demande faite au Conseil par son Président de structurer les opérations de maintien de la paix de façon à ce qu'elles laissent une paix durable derrière elles est des plus exigeantes. Rappelant que Mme Ogata a indiqué qu'il existe un fossé entre le secours d'urgence et les programmes de développement et de reconstruction à long terme et que ce fossé offre aux conflits l'occasion de reprendre, il a souligné, à l'instar de Mme Ogata, qu'il est impossible pour répondre à cela de maintenir en place les opérations jusqu'à ce que la reconstruction soit en bonne voie. Par ailleurs, a- t-il poursuivi, avant que la paix ne s'installe, les donateurs disent, avec raison, qu'ils ne peuvent investir sans qu'un semblant de sécurité prévale. Mais sans investissements, pas d'emploi et donc pas de démobilisation ni de réintégration possibles, et donc pas de vraie sécurité, ni de paix durable. De même, une fois qu'une mission a rétabli la paix, l'absence de crise conduit à un désintérêt de la part des donateurs. M. Sherma a déclaré que ce cercle vicieux devait être brisé, mais que le maintien de la paix n'en a pas les moyens. La consolidation de la paix après conflit ne peut être menée par le biais du maintien de la paix, elle ne relève pas du mandat du Conseil et elle est par trop ambitieuse pour être entreprise par une opération de maintien de la paix.

Enfin, le représentant a également mis l'accent sur la nécessité que le Conseil tienne bien plus de consultations qu'il ne le fait actuellement, lorsqu'il modifie un mandat, avec les acteurs principaux qui connaissent bien la situation sur le terrain, à savoir les pays contributeurs de troupes. Ceux-ci sont rarement consultés et, quand ils le sont, leur avis est rarement pris sérieusement en compte. Il a donc vivement engagé le Conseil à poursuivre le dialogue essentiel avec les pays fournisseurs de contingents, leur avis sera juste et objectif, et des plus utiles pour le Conseil.

M. PETER TOMKA (Slovaquie) s'est déclaré d'avis que les opérations de maintien de la paix - en tant qu'une des formes fondamentales d'assistance internationale dans les situations de conflits d'aujourd'hui - ne peuvent être couronnées de succès que si elles sont fondées sur un mandat clairement défini et réaliste, reflétant les exigences de la situation à l'examen. Ce n'est que par une stratégie bien établie pour la participation des opérations de maintien de la paix que l'on réussira à renforcer la crédibilité des Nations Unies pour ses efforts de paix dans le monde. De l'avis de la délégation slovaque, l'élaboration d'un mandat clair pour une opération de maintien de la paix incombe en premier lieu au Conseil de sécurité, avec la coopération étroite et l'appui du Secrétariat des Nations Unies. A cet égard, le Secrétariat ainsi que le Conseil de sécurité devraient recourir de manière efficace et appropriée aux instruments dont ils disposent, notamment les missions d'établissement des faits, les missions du Conseil de sécurité et les représentants spéciaux du Secrétaire général, pour recueillir des informations appropriées et précises sur la véritable situation sur le terrain. Ces informations devraient être discutées de manière franche, en vue de s'attaquer aux problèmes existants et d'explorer les moyens appropriés pour régler les conflits.

Pour permettre aux Nations Unies de s'acquitter du mandat d'une opération de maintien de la paix et pour appuyer la bonne administration du déploiement des opérations de maintien de la paix, les Etats Membres doivent être en mesure de vouloir fournir des troupes bien formées et équipées. A cet égard, la Slovaquie encourage le Secrétariat à assister les Etats Membres et à renforcer la coopération, en vue d'assurer une formation appropriée de leurs troupes.

MME PHILOMENA MURNAGHAN (Irlande) a déclaré que toute stratégie de retrait devrait viser l’avènement d’une paix durable et traiter des causes même du conflit. La représentante a par ailleurs souligné «qu’une bonne stratégie de retrait est une bonne stratégie à l’entrée». Dans ce contexte, la représentante a fait siennes nombre de recommandations du rapport Brahimi et notamment la nécessité de fonder les mandats des opérations de paix sur des objectifs clairs, crédibles et réalistes. La représentante a en outre souligné la nécessité de traiter des causes socioéconomiques des conflits. Il convient en effet d’analyser soigneusement les situations. Dans ce contexte, la représentante a insisté sur l’importance pour le Conseil de sécurité, dans la mesure du possible, de disposer d’informations objectives et de première main, sur les situations en cause. La représentante a par ailleurs déclaré que les opérations de paix doivent être dotées des ressources adéquates. Finalement elle a réitéré qu’il est important que les membres du Conseil parviennent à une analyse commune des situations, et fassent en sorte que les différences d’intérêts et de perception ne portent pas atteinte à la qualité des décisions.

M. IVAN SIMONOVIC (Croatie) s'est félicité que son pays, compte tenu du rôle crucial des Nations Unies, se soit acquitté avec succès de la mise en œuvre d'une stratégie globale pour mettre fin au mandat de l'Administration transitoire des Nations Unies la Slavonie orientale (ATNUSO), rappelant que lors de son déploiement, la zone visée par le mandat était encore sous occupation. Depuis le début, le Conseil de sécurité avait établi un mandat clair, crédible et réaliste, fondé sur l'Accord de 1995 conclu par les parties concernées. Par sa résolution 1079 (1996) en date du 15 novembre 1996, le Conseil de sécurité avait confirmé la date-butoir d'un mandat de deux ans. Par une autre résolution, le Conseil avait déployé une mission de suivi composée de 180 observateurs de police civile pour une période de neuf mois. Aujourd'hui, on peut déclarer que la coopération du pays hôte a contribué largement au succès de l'ATNUSO. Pour leur part, les Nations Unies, et en particulier le Conseil de sécurité, ont également joué un rôle fondamental pour garantir ce succès.

La Croatie accueille actuellement la Mission d'observation des Nations Unies à Prevlaka (MONUP), la dernière opération de maintien de la paix en cours sur le territoire croate. A cet égard, M. Simonovic a fait remarquer que les tentatives par les parties, y compris au niveau local - entre les autorités croates et les autorités monténégrines - visant à régler la situation de Prevlaka en matière de sécurité ont, au cours de ces dernières années, été bloquées par le refus catégorique de l'ancien régime du Président Milosevic. La Croatie n'a cependant jamais renoncé à l'objectif de rétablir des relations normales et la prospérité à l'ensemble de la région sous la supervision de la Mission d'observation des Nations Unies. Elle a en outre pris des mesures concrètes pour attirer des investisseurs afin de construire des stations touristiques des deux côtés de la frontière internationale. Le gouvernement a par ailleurs convenu de financer conjointement la construction de postes douaniers et frontaliers à Prevlaka. A cet égard, M. Simonovic s'est déclaré convaincu que les nouvelles autorités démocratiques à Belgrade poursuivront leur approche constructive à l'égard de leurs voisins.

M. JOSEPH MUTABOBA (Rwanda) a fait remarquer que de la phase du maintien de la paix à la phase de la consolidation de la paix après les conflits, de nombreux évènements peuvent survenir et de nombreuses décisions peuvent être prises. Toutefois, lorsque ces évènements se produisent, ils ne suivent pas le cours normal et les décisions appropriées ne sont pas prises pour éviter que les erreurs des expériences passées ne se reproduisent plus. Le débat que tient aujourd'hui le Conseil de sécurité sur le thème "Pas de retrait sans stratégie" offre donc l'occasion à toutes les délégations de s'exprimer de manière franche ou de tirer des leçons des expériences du passé. S'il y a un retrait, cela devrait impliquer que l'opération de maintien de la paix a réussi et non pas le contraire.

Il est impératif que les Etats Membres s'acquittent de leurs obligations de même manière au sein de ce Conseil que dans les autres instances examinant une situation de maintien de la paix. Pour ce faire, des stratégies appropriées sont nécessaires et doivent résulter d'un mandat clair, crédible et réaliste, d'un appui logistique adéquat et d'une volonté politique soutenue de la part de tous les Etats Membres. Les échanges entre les délégations contribuent à garantir le succès des opérations de maintien de la paix et aussi à tout ce que nous souhaitons accomplir ensemble et avec l'assistance de chaque partenaire, a déclaré M. Mutaboba.

Les erreurs de l'histoire récente ont conduit naturellement à établir le principe des «deux poids, deux mesures» et réduit la crédibilité des activités de l'Organisation. Tout en félicitant le Conseil de sécurité pour la rapidité avec laquelle les forces de maintien de la paix ont été déployées en Erythrée et en Ethiopie, M. Mutaboba a regretté qu'il n'en a pas été de même pour la Sierra Leone et la République démocratique du Congo. Les stratégies sont définies par des objectifs et des mandats clairs, un appui logistique approprié et une volonté politique qui continuent de faire défaut, répétant les erreurs du passé. Rappelant que le rapport Brahimi montre clairement que les tragédies de Srebrenica et du Rwanda auraient pu être évitées, M. Mutaboba a émis l'espoir que les leçons tirées du passé peuvent toujours contribuer à élaborer des stratégies rationnelles empêchant ces atrocités d'être commises une nouvelle fois.

M. PETER VAN WALSUM, Président du Conseil de sécurité, a estimé que le débat tenu aujourd’hui par le Conseil démontre la pertinence des questions liées aux décisions du Conseil visant au retrait des opérations de maintien de la paix. Il a toutefois souligné qu’un tel sujet mérite une étude plus approfondie que celle qui a eu lieu aujourd’hui. Il a informé les membres du Conseil de sa decision d’inscrire la question à l’ordre du jour des consultations officieuses du Conseil. Il a aussi affirmé que le débat aura permis de souligner l’importance qu’il y a à assurer une transition ordonnée de la phase de fin d’un conflit à celle de reconstruction de la paix après le conflit. Il y a un vide entre ces deux phases qui doit être comblé, a-t-il estimé. La situation actuelle de la Guinée-Bissau en témoigne.

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