TRANSCRIPTION DE LA CONFERENCE DE PRESSE DONNEE PAR M. KOFI ANNAN, SECRETAIRE GENERAL, AU SIEGE, LE 25 OCTOBRE 2000
Communiqué de Presse
SG/SM/7600
TRANSCRIPTION DE LA CONFERENCE DE PRESSE DONNEE PAR M. KOFI ANNAN, SECRETAIRE GENERAL, AU SIEGE, LE 25 OCTOBRE 2000
20001025Le Secrétaire général : Jai lhonneur dannoncer aujourdhui que je propose à lAssemblée générale la nomination de Ruud Lubbers, ancien Premier Ministre néerlandais, au poste de Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés. Vous savez que jexaminais depuis un certain temps plusieurs candidatures pour remplacer Mme Sadako Ogata, qui a fait un travail tout à fait remarquable pendant ses 10 années à la tête du Haut Commissariat. La décision a été extrêmement difficile à prendre, à cause à la fois de limportance de la fonction et de la qualité exceptionnelle des candidats qui mont fait part de leur intérêt. Jai aussi fait ma propre prospection et sollicité des candidatures supplémentaires. Elles mont toutes paru mériter la plus grande attention, mais en fin de compte je ne pouvais en retenir quune. M. Lubbers a accompli une oeuvre exceptionnelle, à très haut niveau, non seulement en tant que Premier Ministre, fonction quil a exercée pendant 12 ans, ce qui constitue un record dans lhistoire récente des Pays-Bas, mais aussi en tant quhomme de savoir, professeur et participant actif à loeuvre de diverses organisations non gouvernementales ou organismes du secteur privé. Un résumé de sa carrière vous sera remis.
Permettez- moi dajouter quelques mots de remerciement que je voudrais adresser au Premier Ministre Wim Kok ainsi quau Gouvernement et au peuple du Royaume des Pays-Bas, qui ont toujours soutenu activement laction humanitaire de lONU, en particulier laide aux réfugiés. Il est particulièrement agréable de nommer un homme qui a occupé la plus haute charge dans le Gouvernement des Pays-Bas, cest-à-dire du pays qui avait donné en 1951 au HCR son premier Haut Commissaire, M. W. J. Van Hoeven-Goedhart.
Avant de donner la parole à M. Lubbers, je voudrais adresser un mot personnel à chacun et à chacune des femmes et des hommes de grand talent qui se sont proposés pour occuper le poste. Jimagine votre déception, et celle de vos admirateurs de la communauté internationale, de ne pas avoir été choisis. Jespère néanmoins très sincèrement que vous continuerez à mettre vos éminentes qualités personnelles et professionnelles au service de lONU et de lhumanité.
Jai par ailleurs lhonneur dannoncer la nomination de Mme Thoraya Ahmed Obaid, de nationalité saoudienne, au poste de Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP).
Vous savez que jexaminais depuis quelque temps les candidatures de plusieurs personnes pouvant prendre la suite de Mme Nafis Sadik, qui a accompli une tâche remarquable au cours des 13 années quelle a passées à la tête du FNUAP. Bon nombre de candidats exceptionnels ont marqué leur intérêt pour cette fonction, et je remercie les gouvernements davoir proposé tant de personnalités aussi remarquables. Il ma paru quà Mme Nafis devait succéder une femme, de préférence ressortissante dun pays en développement, capable de poursuivre son oeuvre remarquable. Mme Obaid, après 25 ans passés dans le système des Nations Unies et deux ans au FNUAP, ma semblé être la candidate idéale.
Mme Obaid est une éminente administratrice de lONU. Elle est parfaitement consciente des défis à relever à la suite de la Conférence internationale sur la population et le développement et connaît le rôle de lONU dans lélaboration du Programme daction de la Conférence du Caire. Je suis convaincu quelle semploiera à merveille à défendre loeuvre inappréciable du FNUAP. Son apport relatif aux droits des femmes en matière de procréation, à la liberté de choisir et à lamélioration de la santé des femmes est inégalable. Elle sait combien il est capital de promouvoir les droits de la femme et de la jeune fille afin de protéger leur santé en matière de reproduction, et a bien conscience de la menace que représente le sida. Mme Obaid a une solide formation universitaire en sociologie et en anthropologie culturelle, quelle a étudiées aux États-Unis, et ses activités à lONU dans le domaine des affaires sociales lont sensibilisée aux questions culturelles qui se posent dans notre travail.
M. Lubbers : Je suis évidemment très sensible à lhonneur que me fait le Secrétaire général. Quoiquun peu soudaine, je suis vraiment honoré par son invitation et par la proposition quil va faire à lAssemblée générale. Cest pour moi un immense privilège de succéder à Mme Ogata, avec qui jai collaboré personnellement, pendant les quatre premières années de son mandat, alors que jétais Premier Ministre des Pays-Bas.
Pour parler brièvement de moi-même, je suis entré dans la vie politique aux Pays-Bas en 1973. Je suis resté dans la politique pendant 21 ans, dont 12 ans en tant que Premier Ministre. Je lai fait bien sûr, dès mes débuts en 1973, pour servir lintérêt public. En 1994 après mes 12 années à la tête du Gouvernement, jai jugé préférable de me retirer préférable pour la démocratie, et peut-être aussi pour moi-même. Jai peut-être eu tort de ne pas perdre des élections mais de men aller simplement, mais jai pensé que cétait mieux. Je me suis alors efforcé de servir la société dune autre façon. Je suis devenu professeur à temps partiel de la mondialisation et de développement durable et jai beaucoup travaillé avec des organisations non gouvernementales, ce qui ma amené au 1er janvier à la présidence du Fonds mondial pour la nature (WWF).
Au moment où je me retirais de la scène politique et des institutions intergouvernementales, le Secrétaire général est venu me solliciter. Cela a été un peu un choc, mais un choc agréable parce que jai pensé « Oui, cest bien ». Cest probablement la dernière chance pour moi de servir lONU et de la servir en tant que Haut Commissaire pour les réfugiés, cest-à-dire pour moccuper essentiellement, comme vous le savez, des gens qui ont le plus de problèmes. Je ressens comme un grand privilège le fait de servir, et de servir dans cette position. Je ne ménagerai pas mes efforts pour faire ce qui doit être fait et pour succéder à Mme Ogata dune manière qui massure son approbation.
Mme Obaid : Je tiens à vous remercier une nouvelle fois, Monsieur le Secrétaire général, de mavoir accordé votre confiance en me choisissant comme Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour la population. Je suis dans la fonction publique internationale depuis 25 ans et ces années garantissent la force de mon engagement envers lONU et ses objectifs, et maintenant plus spécialement envers la Conférence internationale pour la population et le développement et sa mission.
Jaimerais dire au Secrétaire général que je suis fière des nombreuses marques quil a déjà laissées dans lhistoire mais aujourdhui il a vraiment accompli un nouvel exploit pour la cause des femmes saoudiennes, et nous toutes len remercions.
Je voudrais également rendre hommage à Mme Sadik, dont le travail, le dynamisme et le courage ont permis de faire du FNUAP linstitution forte dont jhérite aujourdhui. Je veillerai tout particulièrement à ce que les programmes mis en oeuvre puissent se poursuivre. Fort heureusement, et nous en sommes très honorés, bon nombre de points pour lesquels nous luttons au FNUAP ont été adoptés lors du Sommet du Millénaire. Ainsi, les questions relatives à la mortalité maternelle, à léducation scolaire des filles, à la prévention du VIH/sida et à la lutte contre la pauvreté figurent en bonne place dans la Déclaration du Millénaire. Je pense donc que toute léquipe de lONU, sous limpulsion du Secrétaire général, oeuvrera avec ensemble et que jaurai ma place dans cette équipe dynamique.
Question : Monsieur le Secrétaire général, nous savons tous combien vous réfléchissez aux causes profondes des problèmes auxquels vont être confrontées les personnes que vous venez de désigner. Pensez-vous que dans un avenir proche, nous aurons un moindre flux de réfugiés se déplaçant de pays en pays et que tous ces problèmes qui sont du ressort du Fonds des Nations Unies pour la population vont diminuer?
Le Secrétaire général : Jaimerais être optimiste et pouvoir vous dire que le volume des cas à traiter par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et éventuellement le Fonds des Nations Unies pour la population va se réduire. À terme, oui, mais pour le moment, à cause de la situation dans de nombreux endroits du monde et des crises qui nous préoccupent, le nombre de réfugiés est toujours très important, que ce soit en Afrique ou en Asie. Prenez la situation en Afrique centrale, la situation des réfugiés afghans au Pakistan, en Iran et dans toute la région il y a à lintérieur des pays et entre pays, un mouvement constant de personnes et des déplacements de personnes qui vont demander toute lattention, la créativité et lénergie du nouveau Haut Commissaire et de son équipe.
Je pense que le FNUAP non plus ne va pas manquer douvrage. Je ne crois pas quon puisse ralentir leffort et simaginer que le volume des cas à traiter va diminuer. Au contraire, nous devons pousser les feux et nous atteler à tous ces problèmes. Malheureusement, je ne pense pas quil y ait diminution au rythme où nous le souhaiterions; dans certaines régions, il y a même augmentation.
Question : Jai une question pour vous, Monsieur le Secrétaire général, et une question pour M. Lubbers. Monsieur le Secrétaire général, vous avez dit avoir vous-même fait votre prospection en vue de trouver un candidat. Pourquoi avez-vous pensé à M. Lubbers, et quand avez-vous eu lidée de le proposer? Et vous, M. Lubbers, quand avez-vous su quil était question de vous pour succéder à Mme Ogata?
Le Secrétaire général : Quand vous avez ce genre de poste à remplir, et que vous avez défini les critères de sélection et le profil recherché, vous espérez pouvoir trouver lindividu qui convient parmi ceux qui ont été candidats, présentés par les gouvernements. Mais vous ne pouvez pas en être sûr. Cest pourquoi il marrive de faire aussi ma propre prospection pour avoir vraiment un large éventail de candidats.
Comme je vous lai dit, le choix na pas été facile. La décision a été très difficile parce quil y avait beaucoup de candidats exceptionnels. Mon choix sest finalement porté sur M. Lubbers, pour les raisons que je vous ai détaillées il y a un instant. En fait, son nom est venu sur le tapis assez tard; et jai commencé à songer à lui il y a environ trois semaines, alors que javais déjà commencé les consultations avec les États Membres au sujet de la nomination du nouveau Haut Commissaire. Je suis heureux quil ait pu se libérer et être parmi nous aujourdhui.
Vous comprendrez que dans une procédure de ce genre, je ne puisse expliquer en détail pourquoi lun a été retenu et lautre pas, parce que vraiment les candidats sont tous tout à fait remarquables. Certains dentre eux ne se sont même pas proposés; on a pensé à eux pour diverses raisons. Donc, ne me demandez pas dentrer dans les détails.
M. Lubbers : Jai donc été prévenu trois semaines peut-être après la première partie des pourparlers. Jai été très étonné lorsque le Secrétaire général ma demandé mon avis sur les qualités excellentes, je crois, de Jan Pronk, le candidat néerlandais, qui se trouve être mon ami depuis des années. Le Secrétaire général savait que mon avis était sincère et ma dit quil appréciait Jan Pronk, mais que par ailleurs il nétait pas convaincu par cette candidature. Il ma demandé de réfléchir au moins à la possibilité de me porter candidat.
Alors, jai dit « Mon candidat est Jan Pronk et mon Premier Ministre est Wim Kok. Je crois que vous devriez consulter le Premier Ministre. Parlez-lui. » Le Secrétaire général ma alors demandé de ne pas bouger et de ne parler à personne. Je nai donc rien dit durant ces deux dernières semaines et puis lundi soir jai reçu un appel me demandant de venir ici le plus vite possible. Le Premier Ministre Wim Kok ma aussi appelé pour parler dans le même sens, et voilà.
Le Secrétaire général : Maintenant vous avez tous les éléments.
Question : Le nom de Jan Pronk a été mentionné. Il était en tête de la liste du Gouvernement néerlandais. Il était le candidat néerlandais. Vous avez dit que la situation était très difficile et que vous aviez introduit dans la compétition vos propres candidats. En quoi la candidature de M. Jan Pronk faisait-elle problème? Où y a-t-il eu résistance, et qui a dit « non, il nest pas le meilleur candidat »?
Le Secrétaire général : Je ne souhaite pas métendre sur le sujet. Je crois que vous avez assez dinformations pour alimenter vos articles. Je ne souhaite pas entrer dans les détails et expliquer qui a exclu qui, qui na pas voulu de qui. Je crois que la correction lexige, quil sagisse de la procédure elle-même ou des gouvernements et autres qui y ont pris part.
Ce qui importe cest que, ce matin, à lissue dune longue procédure, nous avons un candidat remarquable qui, je lespère, aura notre soutien à nous tous, gouvernements, organisations non gouvernementales et fonctionnaires, pour mener à bien sa tâche. Comme je lai dit, je regrette que certains autres candidats éminents ne laient pas emporté, et jespère quils continueront à mettre leurs talents au service de lONU et de la communauté internationale. Je crois que nous pouvons en rester là.
Question : Les deux questions des réfugiés et de la population sont sujettes à controverse et les deux organismes qui en sont respectivement chargés ont connu des difficultés pour récolter des fonds et obtenir un appui international. À lheure où ils se dotent de nouveaux dirigeants, quelles devraient être, selon vous, leurs priorités, et comment la communauté internationale pourrait-elle leur apporter son soutien?
Le Secrétaire général : Le soutien de la communauté internationale nous sera nécessaire à plusieurs niveaux. On pense souvent en termes dargent, de ressources matérielles et financières, mais il faudra aussi que les gouvernements nous aident à protéger les réfugiés. Nous souhaiterions travailler avec les gouvernement pour que les immigrés soient traités avec équité. On a tendance à croire que seul le tiers monde est confronté à ce genre de situations; à vrai dire, limmigration est en passe de devenir un problème majeur dans les pays industrialisés, en Europe, mais aussi dans une certaine mesure ici aux États-Unis. Les gouvernements doivent être sensibilisés aux besoins des réfugiés et à la nécessité de les protéger.
Nous leur serions reconnaissants également de continuer à apporter leur appui financier à lONU et doeuvrer avec nous afin de protéger les plus vulnérables par le biais de ces deux programmes qui, comme vous lavez vous-même souligné, revêtent une importance capitale pour des millions de personnes dans le monde. Les soutiens demandés sont donc, en résumé : soutien financier, protection juridique des réfugiés, et appui politique.
Question : Monsieur le Secrétaire général, M. Lubbers, certains des candidats avaient beaucoup dexpérience pour le poste de haut commissaire aux réfugiés : connaissance du terrain, travail avec les populations, expérience des situations durgence. Il y a des cas où les choses se passent mal, et où votre réaction immédiate peut être décisive. Vous, M. Lubbers, avez plutôt lhabitude du travail dans les bureaux de la capitale, au gouvernement. Monsieur le Secrétaire général, pourquoi lavez-vous choisi lui personnellement je veux dire sans revenir sur la question des candidats non retenus? Il ne semble pas avoir beaucoup dexpérience du terrain. Peut-être M. Lubbers aurait-il des remarques à faire à ce sujet?
Le Secrétaire général : Lorsque vous devez remplir ce genre de poste, une option évidente est de chercher quelquun ayant une expérience du terrain. Le HCR, fort heureusement, est fort bien pourvu en personnes ayant une expérience du terrain et une expérience opérationnelle considérables. Ce que M. Lubbers apporte, cest son aptitude à diriger au niveau le plus élevé, son expérience, son jugement et sa capacité de se faire entendre des gouvernements, de les amener à travailler avec nous et à appuyer nos programmes. Il vient donc avec une expérience considérable, une capacité de jugement, lexpérience de la direction dun pays tout cela nest pas rien. Dans les organisations, on ne souhaite pas que tous soient pareils; on cherche des personnes ayant des talents différents, qui se complètent. Et je crois que M. Lubbers apporte au Haut Commissariat quelque chose qui risquerait de manquer au départ de Mme Ogata.
M. Lubbers : Que de sagesse ici, et spécialement ce matin! Jaimerais ajouter une chose. Je ne méloigne pas sans regret de mes activités en relation avec les organisations non gouvernementales. Ayant été pendant 21 ans dans la politique, ce nest pas un handicap, je crois, davoir travaillé avec des organisations non gouvernementales. Deuxièmement, cest lexpérience dont a parlé le Secrétaire général quoique de manière différente. Je souhaite réellement servir la cause de ceux qui sont vraiment dans la détresse et y appliquer ma créativité. Jespère que ce sera une créativité positive.
La motivation est là. Et, comme la dit le Secrétaire général, jaurai pour maider léquipe excellente dont dispose déjà le Haut Commissariat.
Question : Une question pour M. Lubbers : On commence ici, comme vous savez, à faire une distinction entre les personnes déplacées à lintérieur de leur propre pays et les réfugiés au sens classique. Vous navez eu que 30 heures pour y réfléchir, mais considérez-vous quil y a dans votre mandat, ou voyez-vous personnellement une différence entre ces deux catégories, et en tout cas comment pensez-vous quil faille aborder le problème de plus en plus pressant des personnes déplacées à lintérieur de leur propre pays?
Le Secrétaire général : Permettez-moi de dire dabord quelques mots moi-même, car cest un sujet dactualité brûlante. La thèse soutenue par certains est que les personnes déplacées à lintérieur de leur propre pays devraient être assimilées aux réfugiés, et relever du HCR. Je me suis opposé à cela parce que le HCR croule déjà sous le travail et que, si nous lui imposions de se charger aussi des millions de personnes déplacées à lintérieur de leur propre pays, nous casserions les reins de cette organisation qui marche si magnifiquement. Ce que nous avons fait, concernant le problème des personnes déplacées à lintérieur de leur propre pays, a consisté à mettre en commun les efforts et à faire travailler ensemble tous les organismes et programmes des Nations Unies. Dans certains cas nous demandons à lUNICEF de prendre la tête, dans dautres à la Croix-Rouge, et cela pourrait être le HCR. Nous réfléchissons à tout ce que nous pouvons faire dautre pour gérer plus efficacement ce problème des personnes déplacées à lintérieur de leur propre pays.
Le problème est que les gouvernements nous demandent de prendre en charge la question des personnes déplacées à lintérieur de leur propre pays sans nous en donner les moyens. Nous étudions le problème, nous ferons des propositions, et jespère que les gouvernements non seulement nous appuieront mais mettront à notre disposition les ressources nécessaires car, comme pour les réfugiés, il y va du sort de millions de personnes.
Vous souhaiteriez peut-être ajouter quelque chose.
M. Lubbers : Non, je suis tout à fait daccord, et je puis vous assurer que le problème nest pas nouveau pour moi. Je nétais pas à lONU mais, comme je vous lai dit, je me suis occupé de la mondialisation et jai rencontré le problème très tôt. Mais comme la dit le Secrétaire général, il faut avancer avec prudence car linstitution doit être forte. Mais le problème est réel, et je songe aux possibilités, éventuellement par un travail déquipe entre tous les organismes du système des Nations Unies, de prendre en compte aussi cette autre catégorie qui est celle des personnes déplacées à lintérieur de leur propre pays.
M. Eckhard : Nous avions prévu quelques questions sur les sujets internationaux. Quelquun a-t-il une question concernant le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP)?
Question : Les responsables américains qui critiquent lONU trouvent souvent que votre programme, le Fonds des Nations Unies pour la population, est un de ceux qui leur inspirent le moins de confiance. Est-il trop tôt pour vous demander ce que vous comptez faire vis-à-vis de Washington, à la fois au plan politique et pour rassurer les donateurs?
Mme Obaid : Je crois que nous avons des relations très solides avec Washington. De très nombreuses négociations sont en cours sous la direction actuelle concernant nos problèmes. Quant à ce que nous ferons, je pense quil faut attendre de voir le résultat des élections.
Question : Mme Obaid, quelles sont vos relations avec le Gouvernement saoudien? Vous avez à traiter de nombreux aspects de la condition de la femme, au sujet desquels le Gouvernement saoudien nest pas vraiment du côté du progrès. Donc, quelles sont exactement vos relations avec le Gouvernement de votre pays?
Mme Obaid : Écoutez, jai été appuyée par le Gouvernement. Je suis au service de lONU depuis 25 ans, et je suis, depuis le 1er janvier 1975, responsable des programmes en faveur des femmes dans la région arabe, région difficile sil en est. Pendant toutes ces années, mes activités nont nullement été entravées. Je suis fonctionnaire internationale et je suis responsable devant le Secrétaire général et devant notre Conseil dadministration. Je pense donc quil ny aura aucune interférence, si cest à cela que vous pensez.
Le Gouvernement saoudien a récemment pris des mesures de réelle ouverture en vue de jouer un rôle dynamique au sein du système des Nations Unies. Il est entré à la Commission des droits de lhomme et il a signé la Convention sur lélimination de toutes les formes de discrimination à légard des femmes. Cette ouverture aura très certainement un impact sur la condition de la femme saoudienne.
Question : Emma Bonino a-t-elle figuré sur votre liste de finalistes? Tout le monde aimerait savoir.
Le Secrétaire général : Emma Bonino a été parmi les candidats examinés, oui. Il y avait deux candidats italiens sur cette liste : Emma Bonino et le sénateur Migone.
M. Eckard : Peut-être une ou deux questions sur dautres sujets?
Question : Monsieur le Secrétaire général, cest la première fois que nous avons loccasion de vous interroger depuis que la Jordanie a confirmé quelle se retirait de la force de maintien de la paix en Sierra Leone. Puis-je vous poser deux questions, en rapport naturellement avec laspect du problème intéressant la Grande-Bretagne. Avez-vous été déçu que loffre britannique dune force daction extérieure nait pas suffi à convaincre les Jordaniens de rester? Et envisageriez- vous de faire appel dans certaines circonstances à cette force, pour couvrir le retrait des contingents partants, par exemple?
Le Secrétaire général : Les Jordaniens ont dit quils étaient prêts à jouer leur rôle ils sont dailleurs très actifs dans les opérations de maintien de la paix de lONU, et bien que se retirant de Sierra Leone, ils participeront aux opérations en Éthiopie et en Érythrée. Ils avaient espéré que davantage de pays développés les rejoindraient pour participer à ces opérations de maintien de la paix. Ils nont pas pensé que loffre britannique était suffisante. Ils avaient espéré que dautres viendraient aussi. Les Britanniques ont au moins fait un geste, les autres non. Bien sûr, ceci soulève une question très sérieuse à laquelle nous devons tous réfléchir, et en particulier le Conseil de sécurité : le Conseil peut-il adopter des résolutions qui nous imposent de déployer des troupes quand les pays siégeant au Conseil ne font rien, en particulier les grands pays qui disposent de forces importantes? La question posée par la Jordanie sera-t-elle posée pour des opérations futures?
Pour ce qui est de la deuxième question, je crois quune force daction extérieure pouvant venir en aide aux troupes sur le terrain est toujours utile. Vous vous rappelez quau début du conflit, lorsque 500 soldats ont été retenus en otage, jai demandé une force de réaction rapide. Nous ne lavons pas obtenue, mais larrivée des troupes et du navire de guerre britanniques ont eu limpact psychologique voulu et ont permis de conforter et de renforcer les contingents.
Nous allons essayer de remplacer les contingents partants; cela prendra du temps. Jai demandé aux gouvernements intéressés de faire preuve dune certaine flexibilité lors du retrait de leurs troupes. Leur décision est souveraine. Mais en pratique, il serait bon quils montrent une certaine souplesse afin de nous laisser le temps de pourvoir au remplacement des contingents; jespère que nous obtiendrons gain de cause.
Question : Une petite question pour en terminer sur ce sujet : quand avez-vous lintention de désigner un nouveau commandant de la Force en Sierra Leone? Ma vraie question porte sur la situation en Côte dIvoire et sur les résultats des élections. Avez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
Le Secrétaire général : Je désignerai un nouveau commandant de la Force dans les jours qui viennent, dans une semaine au plus tard. Ce sera quelquun qui a déjà une expérience du maintien de la paix, et qui devra être capable de diriger des troupes sur le terrain et den faire une force active et unie.
Pour ce qui est de la Côte dIvoire, je suis la situation de très près et javoue que je suis stupéfait de laudace du général Guei, qui tente de bafouer les droits du peuple deux fois en un an. Je ne dispose pas des informations relatives aux derniers développements, mais je suis très attentif quant à lévolution de la situation dans le pays. Certains prétendent que le général Guei aurait quitté le pays. Dautres affirment le contraire. Je ne sais pas où il se trouve, ni comment les choses vont évoluer.
Les événements de Côte dIvoire et de Serbie prouvent que les gens commencent à connaître leurs droits et à en exiger le respect. Les coups dÉtat et les manipulations électorales appartiennent désormais au passé. Quiconque voudrait sy risquer devra être très prudent. La transparence, la conscience quont les individus de leurs droits et leur volonté de se faire entendre sont, je crois, larme la plus efficace. Sil continue den être ainsi, la démocratie se portera de mieux en mieux.
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