En cours au Siège de l'ONU

CS/2047

DES DELEGATIONS CONDAMNENT L'USAGE EXCESSIF DE LA FORCE PAR LES UNITES DE SECURITE ISR'LIENNES

5 octobre 2000


Communiqué de Presse
CS/2047


DES DELEGATIONS CONDAMNENT L'USAGE EXCESSIF DE LA FORCE PAR LES UNITES DE SECURITE ISRAELIENNES

20001005

Le représentant d'Israël regrette une "vision abusivement simpliste et réductrice" des événements

Nous ne devons pas permettre que les incidents tragiques des derniers jours renversent ou sapent les progrès obtenus à ce jour dans le processus de paix, a déclaré cet après-midi devant le Conseil de sécurité, qui achevait son débat sur la situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine, le représentant de Malte, exprimant une opinion largement partagée durant trois jours.

Les représentants ont généralement condamné comme une provocation la visite sur l'Esplanade des Mosquées du chef de l'opposition israélienne, M. Ariel Sharon. Certains ont estimé que le Gouvernement israélien, qui avait autorisé cette visite et fourni des forces de sécurité, était complice. La plupart ont condamné l'usage excessif et injustifié de la force par les unités de sécurité israéliennes, y voyant notamment une violation de la quatrième Convention de Genève de 1949. Beaucoup ont demandé la constitution d'une commission d'enquête internationale chargée d'établir les responsabilités.

En fin de séance, le représentant d’Israël et l’Observateur permanent de la Palestine ont usé de leur droit de réponse. Le représentant d'Israël a souhaité que chacun adopte une retenue salutaire dans les actes comme dans les discours. Il a souligné qu'il est indispensable de procéder à l'arrêt total et immédiat de la violence, ajoutant que seule une vision abusivement simpliste et réductrice et une perception obstinément unidimensionnelle pourraient désigner Israël comme responsable exclusif. Il s'agit, bien au-delà de jeunes Palestiniens lanceurs de pierre, d'actes de violence palestiniens perpétrés par des milices armées du "Tanzim" et par la police palestinienne relevant directement de la hiérarchie de l'Autorité palestinienne et agissant dans sa stricte obédience, a-t-il affirmé. Il a également affirmé qu'en vertu de la démocratie, M. Barak ne pouvait empêcher la visite de M. Sharon sur le Mont du Temple, qui est aussi le Saint des Saints, le premier Haut Lieu du judaïsme. Exprimant sa compassion devant la mort du jeune Mohammed Jamal Al-Doura, le représentant a rappelé que le processus de paix n'est pas encore totalement exempt de contradictions. Notre guérison commune, notre salut doivent se faire dans la paix avec le lointain et avec le proche, a-t-il conclu.

L'Observateur permanent de la Palestine a imputé l'échec des rencontres de Paris et Charm el-Cheikh au refus israélien d’une commission internationale d’enquête, et a jugé regrettable que le Premier Ministre israélien Ehud Barak ne se soit pas rendu à Charm el-Cheikh. Il a également reproché à Israël de continuer à appliquer sa propre loi à la partie Est de Jérusalem, et ce, malgré 24 résolutions du Conseil de sécurité affirmant que la quatrième Convention de Genève s’y applique. Il a également rappelé que les Palestiniens ont accepté le contrôle d’Israël sur le Mur des Lamentations, bien qu’il se trouve dans la partie Est de Jérusalem occupée, et ce, par respect des croyances religieuses. L'Observateur permanent a expliqué que si Israël a exprimé ses regrets après la mort du jeune Mohammed al-Durra, c’est parce que cela s’est produit devant les caméras de télévision. Il a demandé qu’Israël reconnaisse sa responsabilité et présente des excuses aux familles des victimes, ce qui n’a pas encore été fait. Il a souhaité que le Conseil de sécurité puisse demander de toute urgence une enquête sur les incidents des derniers jours.

Les représentants des pays suivants ont pris la parole cet après-midi: Jamahiriya arabe libyenne, Soudan, Indonésie, Oman, Emirats arabes unis, Japon, Maroc, Liban, Népal, Espagne et Malte. Les Observateurs de l’Organisation de la Conférence islamique (OCI) et de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) se sont également exprimés. Le représentant d’Israël et l’Observateur permanent de la Palestine ont exercé leur droit de réponse.

Le Conseil doit se réunir à nouveau pour se prononcer sur la situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine.

LA SITUATION AU MOYEN-ORIENT Y COMPRIS LA QUESTION PALESTINIENNE

Déclarations

M. ISA AYAD BABAA (Jamahiriya arabe libyenne) a déclaré que les causes profondes du problème palestinien résident dans le déracinement de toute une population et dans les traitements inhumains auxquels sont soumis les Palestiniens des territoires occupés. Le monde entier a vu sur les écrans de télévision des enfants tués de sang-froid et des centaines de blessés, sans parler d’autres faits plus atroces encore non photographiés par les correspondants. Tout se présente comme si se préparait un véritable holocauste, a affirmé le représentant.

Il n’y a aucune solution à l’occupation de la Palestine que le retour du peuple palestinien dans ses foyers et la mise en place d’un Etat indépendant dans l’ensemble de la Palestine, où il pourra pratiquer librement sa religion, a affirmé le représentant. Nous ne pouvons que saluer le peuple palestinien qui lutte contre l’usurpation de ses terres.

Les massacres actuels ne sont pas les premiers et ne seront pas les derniers, tant que les Nations Unies seront soumises aux responsables d’une superpuissance qui cherche à satisfaire le lobby sioniste à des fins électorales, a affirmé le représentant. Le Conseil se doit de prendre les mesures que prévoit la Charte. Que sont devenus l’intervention humanitaire, la défense des droits de l’homme, le respect des Conventions humanitaires sur la protection des civils? a demandé le représentant. S’il s’était agi de la Libye ou du Soudan, le Conseil n’aurait pas attendu pour agir. Nous demandons que le Conseil prenne toutes les mesures nécessaires pour protéger les populations civiles, qu’il condamne les pratiques de type nazi perpétrées continuellement dans les territoires occupés, qu’il condamne l’utilisation des armes à fragmentation, interdites, contre les manifestants et qu’il poursuive et traduise en justice les responsables pour crimes de guerre et génocide.

M. MUBARAK AL-HUSSEIN RAHMTALLA (Soudan) a exprimé ses condoléances aux familles des martyrs du peuple palestinien victimes des actes d'agression récents. Il y a peu de temps, la communauté internationale avait fait preuve d'optimisme face aux efforts accomplis dans le cadre du processus de paix au Moyen-Orient. Toutefois, la visite de provocation délibérée de M. Ariel Sharon sur les lieux saints de l'islam a été à l'origine de l'escalade de la violence à Jérusalem, en Cisjordanie et à Gaza. L'assassinat de civils innocents sans défense dans les territoires palestiniens occupés constitue une violation flagrante de la quatrième Convention de Genève de 1949 concernant la protection de la population civile en période de conflit armé. Le Soudan condamne les actes de provocation et d'agression qui ont causé la mort de plusieurs dizaines de personnes, et blessé des centaines d'autres. L’utilisation d'armes sophistiquées par Israël est disproportionnée et c'est pourquoi, il appartient au Conseil de sécurité d'exiger des autorités israéliennes de mettre fin à un tel recours. Souhaitant que le Conseil de sécurité n'adopte pas de mesures sélectives, le Soudan réaffirme qu'il appuie sans réserve le peuple palestinien dans l'exercice de ses droits inaliénables.

M. MAKARIM WIBISONO (Indonésie) s’est déclaré profondément préoccupé par l’agression d’Israël contre des civils palestiniens non armés et a estimé que de tels agissements méritent une condamnation ferme de la part de la communauté internationale. Le représentant a appelé Israël à mettre immédiatement fin à la violence et aux effusions de sang et a ajouté que la communauté internationale ne peut demeurer passive devant des attaques perpétrées sans pitié par des forces militaires contre un peuple sans défense. Depuis le début du processus de paix en 1991, a estimé le représentant, le peuple palestinien attend qu'on tienne les promesses qu'on lui a faites et qu'on soit moins intransigeant à son égard. L’impasse dans lequel se trouve le processus de paix a déjà exacerbé les tensions dans les territoires; l’espoir et l’optimisme ont été supplantés par la frustration et l’amertume. L’acte provocateur évident de M. Ariel Sharon a été perpétré de façon délibérée et intentionnelle, incitant à la violence et causant des pertes en vie humaine et des dégâts matériels. Il ne fait plus aucun doute, a constaté le représentant, qu’il existe aujourd’hui en Israël des éléments désireux de bloquer le processus de paix en ignorant volontairement les répercussions de leurs actions. Il est même scandaleux, a-t-il ajouté, qu’en dépit des efforts déployés par les dirigeants palestiniens pour conclure un accord de cessez-le-feu, la violence continue et la situation s’empire.

L'une des questions qui se pose aujourd’hui est celle de la protection des civils sous occupation, a indiqué le représentant, avant d’affirmer que seule la mise en œuvre de la Convention de Genève sur la protection des civils en temps de guerre pourra rétablir un certain degré de normalité en attendant la fin de l’occupation étrangère. Le fait que le Conseil examine cette question depuis si longtemps l’oblige à assumer ses responsabilités dans la mise en œuvre de la résolution dont il est saisi, a insisté le représentant en expliquant que le recours à la force armée ne saurait en aucun cas cacher le fait “historique et indiscutable” que Haram al-Charif est une partie intégrante du territoire palestinien occupé, comme l’ont d’ailleurs confirmé les nombreuses résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité. La rhétorique doit aujourd’hui être accompagnée de mesures concrètes de suivi des accords de paix. Il n’y a aucune autre alternative pour Israël que le respect de ses obligations et la poursuite des négociations de paix. Pour conclure, le représentant a émis l’espoir que les discussions de Paris puis celles du Caire mettront fin au conflit et conduiront à la reprise des pourparlers de paix.

M. FUAD MUBARAK AL-HINAI (Oman) a exprimé sa profonde tristesse et ses condoléances aux familles endeuillées des victimes innocentes des affrontements sanglants survenus à Haram al-Charif. Sa délégation condamne les attaques des forces militaires israéliennes qui constituent une violation flagrante de la Charte des Nations Unies et de la quatrième Convention de Genève de 1949 concernant la protection de la population civile en période de conflit armé et qui s'applique aux territoires depuis 1967. Les attaques perpétrées contre des enfants et des personnes âgées par la machine de guerre israélienne montrent de toute évidence que le Conseil de sécurité doit prendre une position ferme et responsable contre ceux qui ont commis ces actes. Le coeur de cette crise grave réside dans la question même d'Al Qods Al Charif, en particulier la partie orientale d'Al Qods et la vieille ville dans lesquelles Israël s’est installé par la force en 1967, au même titre que tous les autres territoires occupés. De toute évidence, la communauté internationale, le Conseil de sécurité et l'opinion publique internationale ont pleinement réalisé que la cause de ce massacre a été la visite provocatrice de M. Ariel Sharon, chef du parti de l'opposition israélienne, à Haram al-Charif, et le défi qu'elle pose pour les sentiments des musulmans à l'intérieur et à l'extérieur des territoires occupés.

La décision du Gouvernement israélien, non seulement d'avoir autorisé la visite mais également assuré la protection militaire à cette visite provocatrice, a été prise en connaissance de cause des conséquences qu'elle pourrait engendrer. On peut donc s'interroger sur la véritable intention du Gouvernement israélien à l'égard du processus de paix et de sa détermination à parvenir à un règlement pacifique et définitif du conflit au Moyen-Orient. Il incombe au Conseil de sécurité de s'acquitter pleinement de son mandat conformément à la Charte des Nations Unies et aux principes du droit international, en prenant des mesures concrètes pour exiger d'Israël de mettre fin à ses attaques militaires et de retirer ses forces des territoires occupés, tout en respectant la quatrième Convention de Genève de 1949 concernant la protection de la population civile en période de conflit armé. Il est impératif que le Conseil de sécurité adresse un message clair contre cette forme de terrorisme d'Etat contre des populations civiles et appelle à mettre fin à l'extrémisme militaire israélien.

M. MOHAMMAD J. SAMHAN (Emirats arabes unis) a déclaré que les attaques brutales et sans précédent des forces israéliennes contre les croyants en prière ont provoqué la colère non seulement au sein du peuple palestinien, mais aussi dans le monde arabe et musulman et auprès de la communauté internationale. Les images vues à la télévision sont une honte pour l’humanité. Il est inacceptable que les forces de sécurité israéliennes se soient déguisées en forces de sécurité palestiniennes pour arrêter des manifestants, comme cela l’a été lors de massacres antérieurs.

Les Emirats arabes unis ont été parmi les premiers à établir des contacts diplomatiques pour que soient prises des mesures efficaces en vue d'assurer la protection du peuple palestinien et de mettre fin aux abominables crimes commis par les Israéliens en violation de la quatrième Convention de Genève de 1949, a déclaré le représentant, qui a demandé une enquête internationale, impartiale et neutre. Malgré la réunion de Paris, le Gouvernement israélien continue de commettre des massacres et des actes d’agression. Les Emirats arabes unis condamnent fermement ces actes brutaux et considèrent le Gouvernement israélien pleinement responsable. En conséquence, les Emirats arabes unis demandent aux coparrains du processus de paix et au Conseil de sécurité d’assumer leur responsabilité en prenant des mesures immédiates pour mettre fin aux actes d’agression et de violence lâches commis par les forces israéliennes. Les Emirats arabes unis rappellent leur solidarité avec le peuple palestinien.

M. MOKHTAR LAMANI, Observateur permanent de l'Organisation de la Conférence islamique (OCI), a fait observer qu'Israël exprime du bout des lèvres son souhait de poursuivre les efforts de paix tout en recourant à la force à l'encontre de la population civile palestinienne sans défense. Les actes de violence perpétrés par les forces militaires israéliennes à Haram al-Charif constituent une violation flagrante de la quatrième Convention de Genève concernant la protection de la population civile en période de conflit. L'OCI appuie la position palestinienne visant à la restitution des territoires occupés depuis 1967. Le Conseil de sécurité doit prendre des mesures fermes pour exiger d'Israël le respect de ses résolutions pertinentes concernant la question de Palestine.

M. HIDEAKI KOBAYASHI (Japon) a déploré l'escalade de la violence entre les Palestiniens et les autorités israéliennes à Jérusalem et dans d'autres villes, causant la mort de plus de soixante personnes, essentiellement des civils dont des enfants. Sa délégation condamne les actes de provocation et se dit préoccupée par l'usage excessif de la force au cours de ces derniers jours. Au nom du Gouvernement et du peuple japonais, M. Kobayashi a adressé ses sincères condoléances aux familles éprouvées et a exprimé ses vœux de bon rétablissement aux blessés. En réponse à la demande faite par l'Autorité palestinienne, le Japon a décidé de verser, par le biais du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), une contribution d'un montant de 500 000 dollars pour financer les équipements médicaux indispensables actuellement à Gaza et en Cisjordanie. Il faudrait en outre épargner de nouvelles victimes. La tâche immédiate est de mettre fin dès que possible aux affrontements. A cette fin, la délégation japonaise prie instamment les parties concernées à faire preuve de la plus grande retenue et à s'abstenir de nouveaux actes de provocation et de violence. Rien ne peut être accompli par la violence, surtout quand elle engendre des pertes en vies humaines. Dans ce contexte, le Japon se félicite des efforts diplomatiques que les parties concernées ont déployés à Paris pour mettre fin au cycle de violence, et salue les initiatives prises par les Etats-Unis, la France et l'Egypte visant à faciliter ces efforts. M. Kobayashi a appelé les parties concernées à répondre à l'appel lancé par la communauté internationale en faveur de la cessation de la violence et des bains de sang. La crise actuelle montre qu'il est indispensable de parvenir à une paix juste, durable et globale au Moyen- Orient. C'est ce que les peuples de la région souhaitent profondément et ce que la communauté internationale s'est engagée à réaliser. C'est pourquoi, nous ne pouvons permettre que cette crise fasse dérailler le processus de paix en cours.

M. ELHASSANE ZAHID (Maroc) a déclaré avoir regardé avec effroi les scènes inimaginables qui se sont déroulées ces derniers jours sur l’Esplanade des mosquées et dans différentes villes de Palestine, et avoir vu avec effarement les forces israéliennes déployer tant de violence face à des manifestants légitimement révoltés après la provocation monstrueuse du chef de l’opposition israélienne. De quelque manière qu’on veuille analyser les faits, ce qui s’est passé est résolument condamnable. Les chiffres des morts et des blessés dénombrés sont ceux que l’on relève quand on fait la guerre à une armée et non à une population, a ajouté le représentant.

Au moment où nous commencions à nourrir une lueur d’espoir de voir la Palestine et Israël retrouver enfin la paix, où nous avions réellement pensé que la sagesse allait dominer la haine, on a permis à un homme de remettre en cause tout ce qui a été tissé si patiemment et si courageusement par les hommes de bonne volonté, a ajouté M. Elhassane Zahid. Il faudra longtemps aux familles endeuillées, et encore plus longtemps aux millions de croyants de part le monde, pour oublier ce qui s'est passé. Cette bavure est inexcusable, ces fanfaronnades auraient pu être empêchées. Cette violence est inadmissible et rien ne peut la justifier. Le peuple palestinien n’avait pas besoin de cette terrible épreuve. Qu’on le laisse donc vivre en paix et qu’on le laisse panser ses profondes blessures.

Tout ce qui s’est passé est tellement horrible que les responsables devraient avoir honte, a affirmé le représentant. Ils doivent pourtant savoir que ceux qui ont déclenché l’événement et les massacres voulaient sans aucun doute détruire tous les efforts de paix entrepris à ce jour, et ils ont presque réussi. Ils auront, en tout cas, détruit une grande part du capital de confiance déjà très largement entamé. Cela est aussi grave, aussi répréhensible que ces victimes tombées sous les balles de la police.

La communauté internationale doit comprendre que si la paix ne voit pas bientôt le jour et n’est pas protégée par tous, c’est l’avenir proche et lointain de toute la région qui sera condamné, a affirmé M. Elhassane Zahid. Le Maroc réaffirme son appui au processus de paix et estime qu’il ne peut y avoir de paix juste, durable et globale dans la région que si les principes issus de la Conférence de Madrid sont respectés, et notamment celui de «la terre contre la paix», et la mise en œuvre intégrale des résolutions 242 et 338 du Conseil, afin d’aider le peuple palestinien à recouvrir ses droits légitimes et inaliénables et en premier lieu son droit d’établir son Etat indépendant sur son territoire, avec pour capitale Al Qods Al Charif.

M. SELIM TADMOURY (Liban) a déclaré que le chef de l’opposition israélienne est bien connu des Libanais en raison du massacre de 1982. Cet homme, le 28 septembre, est revenu pour susciter un ressentiment dans le cadre d’un scénario bien orchestré, afin de saper la paix, en collusion avec les autorités israéliennes. Le Liban n'a jamais cessé de condamner la répression et lance un appel au Conseil pour qu’il oblige Israël à respecter la quatrième Convention de Genève de 1949. Israël n’a pas le droit de chercher à imposer sa volonté en dehors du cadre des résolutions internationales et des décisions de la Conférence de Madrid. Nous demandons au Conseil de sécurité d’essayer de faire cesser les provocations délibérées à Al Qods et de mettre en place les conditions nécessaires à la paix sur la base des résolutions 242 et 338. Les exigences de la paix sont bien connues, a rappelé le représentant, et les autorités israéliennes doivent bien comprendre que persister dans la violence ne permettra jamais de parvenir à la paix et à la sécurité.

M. MURARI RAJ SHARMA (Népal) s'est déclaré profondément consterné par la perte d'un nombre considérable de vies humaines palestiniennes innocentes causées par l'intervention des forces de sécurité israéliennes à Haram al-Charif, en Cisjordanie et à Gaza. A cet égard, la délégation népalaise adresse ses profondes condoléances aux familles des victimes. Nous avons tous émis l'espoir que le Moyen-Orient connaîtra bientôt la paix. Toutefois, le récent regain de violence rappelle tristement que le processus de paix au Moyen-Orient est encore précaire. Il y a des personnes qui font dérailler ce processus sans que cela les gêne. Le recours excessif à la force pour contrôler les manifestations a contribué davantage à aggraver la situation.

Le Népal prie fermement les parties concernées à faire preuve de la plus grande retenue pour mettre fin aux hostilités et empêcher que le processus de paix ne soit compromis. La paix pourrait ne pas être aussi urgente pour ceux qui ont effectué des visites de provocation dans les Lieux saints, bénéficiant d'une escorte militaire disproportionnée. Mais elle est véritablement urgente pour des gens ordinaires en Palestine et en Israël, à savoir ceux qui sont fatigués de vivre dans la peur comme les mères de ces enfants tués par des actes de violence alors qu'ils se trouvaient sur le chemin de l'école, comme ces femmes que la

violence a rendues veuves. Le cycle actuel de la violence souligne qu'il est indispensable de parvenir à une paix globale, juste et durable. Dans ce contexte, le Népal appuie pleinement les droits inaliénables du peuple palestinien, y compris son droit à retrouver ses terres et la création d'un Etat indépendant avec Jérusalem pour capitale. Saluant les efforts accomplis par les Etats-Unis, la France et l'Egypte pour contribuer à restaurer le calme, la délégation népalaise souhaite que le Conseil de sécurité prenne des mesures concrètes pour qu'il soit mis fin à ces affrontements sanglants.

M. NGUYEN THAH CHAU (Viet Nam) s'est déclaré profondément consterné et horrifié par le nombre considérable de victimes innocentes; ce qui marque un nouveau cycle de violence et le recours excessif à la force à Jérusalem, en Cisjordanie et à Gaza. Ces évènements tragiques posent une grave menace au fragile processus de paix en cours au Moyen-Orient, et exigent la nécessité pour les parties concernées de redoubler d'efforts afin que les négociations puissent reprendre et que le processus de paix redémarre. La délégation du Viet Nam adresse ses plus profondes condoléances aux familles des victimes des récentes violences. M. Nguyen a appelé toutes les parties à agir avec la plus grande responsabilité et beaucoup de retenue, afin d'éviter que tout acte de provocation ne vienne compliquer une situation déjà très fragile. Il a réaffirmé que son pays appuie fermement le règlement pacifique de la question de Palestine, y compris le droit de créer un Etat indépendant avec Jérusalem pour capitale et le droit des réfugiés palestiniens de retourner dans leurs terres, comme le souligne la Déclaration d'Hanoï adoptée par la Conférence des Nations Unies sur les droits inaliénables du peuple palestinien, tenue au Viet Nam en mars 2000. Le Viet Nam appelle les deux parties au conflit à déployer tous les efforts possibles pour surmonter les obstacles en cours et préserver la recherche d'un règlement juste et durable de leur conflit. La paix dans la région ne peut être restaurée que par le biais d'un règlement fondé sur la base des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, de l'Assemblée générale et des différents accords conclus par les parties.

M. AMADOU KEBE, Observateur permanent de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), a donné lecture de la déclaration d’hier du Secrétaire général de l'Organisation, M. Salim Ahmed Salim. L’OUA est profondément préoccupée par l'escalade déplorable de la violence en Cisjordanie et à Gaza où de nombreux Palestiniens et Israéliens ont trouvé la mort et des centaines de Palestiniens ont été blessés. Cette situation fait suite à la visite que le Général Ariel Sharon, chef du Parti israélien du Likoud, a entrepris sous forte escorte militaire à Haram al-Charif, l'un des plus importants lieux saints de l'islam. Le peuple palestinien a interprété cette visite comme une provocation. Les manifestations qui en ont résulté ont dégénéré en confrontations entre Palestiniens et forces de sécurité israéliennes. Ces dernières ont tenté de réprimer les mouvements de protestation de manière violente en recourant à une force brutale excessive, faisant ainsi de très nombreuses victimes. C'est pourquoi, l’OUA lance un vibrant appel aux autorités israéliennes afin qu'elles prennent toutes les dispositions nécessaires pour s'attaquer aux causes sous-jacentes de ce dernier regain de violence en Cisjordanie et à Gaza, et qu'elles fassent preuve de retenue pour éviter de nouvelles pertes en vies humaines de part et d'autre. Le Secrétaire général de l'OUA en appelle en

particulier aux autorités palestiniennes et israéliennes afin qu'elles créent des conditions propices pour mettre un terme à la violence qui sévit et qu'elles reprennent les négociations directes en vue de parvenir à une paix globale et durable dans la région. A cet égard, il salue la récente initiative des Etats- Unis et forme le voeu qu'elle contribue à désamorcer la crise. L'OUA réaffirme son soutien au peuple palestinien dans sa lutte pour l'exercice de ses droits inaliénables et pour la restitution de ses terres.

M. INOCENCIO F. ARIAS (Espagne) s’est dit extrêmement préoccupé par les événements actuels dans les territoires occupés, qui montrent à quel point il est facile à une provocation ouvertement déstabilisante et inacceptable de provoquer une spirale de violence aux conséquences aussi dramatiquement inimaginables; une situation dans laquelle l’intervention disproportionnée des forces de sécurité constitue la meilleure motivation pour ceux qui ont intérêt à ce que la situation échappe à tout contrôle.

L’Espagne estime que les parties concernées et la communauté internationale doivent prendre d’urgence toutes les mesures nécessaires pour réduire la tension et les violences. Il est plus important que jamais de respecter strictement la légalité internationale et le droit international humanitaire, a déclaré le représentant. Il est indispensable que les parties honorent leur engagement de mettre fin à la violence. Pour que cesse la violence, il est impératif de réduire la présence des forces armées. L’Espagne est favorable à la mise en place d’une commission internationale d’enquête objective, qui pourrait largement contribuer à faire baisser la tension. Elle permettrait d’aborder ensuite, dans le cadre du processus de paix, les causes profondes qui sous-tendent cette crise.

Le processus de paix, dont les principes sont fondés sur la Conférence de Madrid et les accords qui ont suivi, de même que les résolutions du Conseil de sécurité et les accords qu’ils ont engendrés, constituent le seul cadre commun permettant de trouver une solution à cette crise, a affirmé M. Arias. Le représentant a souhaité que les réunions de Paris et du Caire permettront de prendre les mesures nécessaires pour relancer le processus de paix. Ne faisons pas le jeu de ceux qui sabotent le processus de paix, dont les Palestiniens, les Israéliens et la communauté internationale ont besoin. Il faut un accord juste et satisfaisant pour les deux parties, y compris en ce qui concerne Jérusalem. Ce n’est qu’ainsi que l’on parviendra à la paix juste à laquelle aspirent tous les peuples de la région.

M. WALTER BALZAN (Malte) a condamné sans réserve les provocations irresponsables des éléments hostiles au processus de paix qui ont déclenché les violentes réactions des derniers jours et provoqué la mort tragique de civils et de victimes innocentes, y compris des enfants. De même, l’usage honteux de la force par ceux qui sont responsables du maintien de l’ordre constitue une claire violation de la quatrième Convention de Genève. Nous sommes d’accord avec les propos du Président Chirac qui a déclaré: «on ne combat pas l’émotion d’un peuple avec des blindés», a ajouté le représentant.

Nous ne devons pas permettre que ces incidents renversent ou sapent les progrès obtenus à ce jour dans le processus de paix, a déclaré M. Balzan. Les circonstances tragiques ne doivent pas décourager la communauté internationale, et encore moins les parties intéressées. Ces circonstances doivent renforcer notre engagement en faveur d’une paix globale fondée sur les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et le respect du droit international. Au nom du Gouvernement de Malte, le représentant a lancé un appel à l’arrêt de la violence et au retour immédiat à la table des négociations. Ce n’est que par le dialogue constructif et la volonté politique que l’on pourra parvenir à une paix durable, globale et juste, une paix qui permettra à la fois aux Palestiniens et aux Israéliens de vivre pacifiquement côte à côte. Ne perdons pas espoir, et les parties concernées non plus. La communauté internationale doit continuer de croire à un accord négocié pacifiquement.

Droits de réponse

M. YEHUDA LANCRY (Israël) a estimé que, pour faire avancer la logique de paix envers et contre toutes les dérives et régressions qui viennent saper, dans de douloureux et tragiques épisodes, le processus de paix entre Israéliens et Palestiniens, il importe d'adopter une retenue salutaire dans les faits comme dans le discours. Dans notre esprit, a-t-il précisé, un choix s'impose: le langage de paix et la pédagogie de paix ne peuvent charrier une rhétorique chauffée à blanc. M. Lancry a souligné qu'il est indispensable de procéder à l'arrêt total et immédiat de la violence, ce qui permettra de fournir un appui concret et psychologique adéquat aux consultations de Paris et de Charm el-Cheikh entre les partenaires de la paix israéliens et palestiniens. Seule une vision abusivement simpliste et réductrice, seule une perception obstinément unidimensionnelle pourrait désigner Israël comme responsable exclusif. La réalité est autrement plus complexe que le cliché cultivé systématiquement ici autour d'une machine de guerre israélienne lancée contre des civils palestiniens sans défense, a-t-il fait observer. Il s'agit, bien au-delà de jeunes Palestiniens lanceurs de pierre, d'actes de violence palestiniens perpétrés par des milices armées du "Tanzim" et par la police palestinienne. Cette violence palestinienne armée, organisée - dans sa composante civile ou militaire - relève directement de la hiérarchie de l'Autorité palestinienne et agit dans sa stricte obédience. Cette campagne constitue en elle-même une source permanente de provocations et pèse lourdement sur le cours tragique des évènements. L'appel récent de M. Marwan Barghouti, membre du Parlement palestinien et chef du Tanzim, en faveur du meurtre généralisé des Israéliens se fonde sur la milice dont il dispose et du feu vert que lui donne l'Autorité palestinienne.

Concernant la visite de M. Ariel Sharon au Mont du Temple, M. Lancry a souligné que quelles qu'en soient ses motivations et ses connotations, elle s'est déroulée selon les principes fondamentaux de la démocratie israélienne. En vertu de cette même démocratie, M. Barak ne pouvait empêcher la visite de M. Sharon sur le Mont du Temple. C'est dans le respect absolu de l'islam et de ses lieux saints - Haram al-Charif notamment - que M. Lancry a tenu à préciser que le Mont du Temple est aussi le Saint des Saints, le premier Haut Lieu du judaïsme. Face à l'essai d'occultation de cette révélation première, il incombe à sa délégation d'affirmer que le Mont du Temple, sacré pour l'islam dans son versant Haram al- Charif, l'est également pour le judaïsme dans ses strates antérieures, dans ses nappes fondatrices de l'identité et de la mémoire juive. De l'avis de la délégation israélienne, seule

une prise en charge et une conciliation des fonctions symboliques et des fonctions politiques des uns et des autres, pourront permettre à la paix d'advenir. Les négociations de Camp David - comme les suivantes - ont enregistré des progrès aussi fulgurants qu'inédits directement inspirés de la politique de paix du Gouvernement Barak. Au cours de ces négociations, l'intouchable devint tangible, l'interdit devint palpable, certaines inhibitions colossales furent levées. C'est précisément dans cette étape cruciale que se trouvent actuellement l'Autorité palestinienne et Israël. Le Président Arafat et le Premier Ministre Barak sont convoqués par l'Histoire pour contracter la paix réelle, c'est-à-dire celle qui ne pourra contenir tous les rêves et toutes les utopies des uns et des autres.

Le débat du Conseil est on ne peut plus grave et amer, marqué par des commentaires calomnieux. Ainsi, en est-il de l'insinuation biaisée au régime nazi, froidement conçue par la délégation de Bahreïn, ou le déni du droit à l'existence d'Israël requis par la délégation iraquienne. Quant à l'Algérie, M. Lancry lui souhaite de tout coeur qu'elle puisse décréter la fermeture de ses nombreuses "boucheries" sur son propre territoire. Cela la mettrait certainement en meilleure adéquation morale quand elle a à dénoncer l'existence de "boucheries" ailleurs. Dans cette période triste et tragique, comment ne pas compatir - non pas dans la condescendance ou l'arrogance, mais dans un langage du coeur, à la vive émotion du représentant permanent de la Palestine lors de son intervention de mardi dernier. Comment ne pas compatir, l'âme rompue, devant la mort bouleversante du jeune Mohammed Jamal Al-Doura. C'est avec les Palestiniens, et non contre eux, que nous le pleurons, comme nous pleurons nos morts. A cet égard, M. Lancry a rappelé que le processus de paix n'est pas encore tout à fait exempt de contradictions. Par moments, il nous rapproche, en d'autres, il nous éloigne. Notre guérison commune, notre salut doivent se faire dans la paix avec le lointain et avec le proche, a-t-il conclu.

M. NASSER AL-KIDWA (Observateur permanent de la Palestine) a d’abord voulu informer le Président du Conseil des incidents survenus ce jeudi, notamment d’une victime frappée à Bethléem par une balle dum-dum qui explose à l’intérieur du corps. Un autre Palestinien a été tué alors qu’il tentait de retirer un drapeau israélien à un croisement qui se trouve au cœur de Gaza, a-t-il ajouté. Et ces événements ont lieu malgré les efforts déployés hier à Paris et aujourd’hui à Charm el-Cheikh, qui, malheureusement, n’ont pas donné de résultats positifs. Il n’y a pas eu d’accord, a estimé M. Al-Kidwa, essentiellement parce qu’Israël a rejeté l’idée d’une commission internationale d’enquête. Il est également regrettable que le Premier Ministre israélien Ehoud Barak ne se soit pas rendu à Charm el-Cheikh, alors que Yasser Arafat et Mme Madeleine Albright s’y sont rendus.

Il est d’autres preuves des intentions israéliennes, a affirmé l’Observateur permanent. Affirmant n’avoir pas l’intention d’entrer dans les détails de la nature de la démocratie israélienne et de son modus operandi, M. Al-Kidwa a estimé qu’il suffit de dire que nous parlons de territoires occupés, y compris la partie Est de Jérusalem. Or, ce Conseil dans 24 résolutions, a dit que la quatrième Convention de Genève s’y applique. Et, après 24 résolutions du Conseil de sécurité, Israël préfère suivre sa loi plutôt que le droit international. Haram al-Charif est situé dans Jérusalem-Est qui fait partie de la partie palestinienne occupée, a répété l’Observateur permanent. Il a affirmé que jamais, ni maintenant

ni à l’avenir, les Palestiniens n’accepteront une allégation de souveraineté israélienne dans cette partie. Nous avons dit que nous acceptions le contrôle d’Israël sur le Mur des lamentations, bien qu’il se trouve dans la partie Est de Jérusalem occupée, et ce, par respect des croyances religieuses, a-t-il ajouté. Or, désormais, Israël revendique des droits sur un autre sanctuaire, ce qui peut avoir à l’avenir des conséquences pour les lieux saints musulmans. Ceci ne relève pas d’un respect religieux sincère.

M. Al-Kidwa a noté les propos de compassion du représentant israélien à propos de Mohammed al-Durra, l’enfant de 12 ans tué devant les caméras de télévision. Mais quelle différence y a-t-il entre cet enfant et les autres? C’est parce qu’il a été abattu devant les caméras qu’Israël exprime ses regrets, a déclaré l’Observateur permanent, qui a enjoint Israël à reconnaître sa responsabilité, non seulement pour la mort du jeune Mohammed, mais aussi pour les autres, et à présenter des excuses aux familles des victimes, ce qui n’a pas été fait.

Comment proférer des allégations telles que celle de l’incitation à la violence commise par les Palestiniens? a demandé l’Observateur permanent. Nous avons vu grâce aux caméras les orchestrations israéliennes, y compris à l’intérieur d’Israël. Israël doit immédiatement s’abstenir d’invoquer de telles allégations honteuses. Ce pourrait être pour Israël un début de reconnaissance de sa responsabilité. Sinon Israël ne pourra pas prétendre qu’elle veut la paix. Nous espérons que le Conseil de sécurité pourra demander de toute urgence une enquête sur les incidents des derniers jours. L’Observateur a remercié les membres du Conseil et tous les autres participants au débat, qui ont tous exprimé leur sens de l’humanité.

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