En cours au Siège de l'ONU

ONG/373

LE COMITE CHARGE DES ONG REFUSE PAR UN VOTE DE REVENIR SUR SA DECISION CONCERNANT LE PARTI RADICAL TRANSNATIONAL

27 septembre 2000


Communiqué de Presse
ONG/373


LE COMITE CHARGE DES ONG REFUSE PAR UN VOTE DE REVENIR SUR SA DECISION CONCERNANT LE PARTI RADICAL TRANSNATIONAL

20000927

Le Comité recommande au Conseil économique et social d’entériner sa proposition de suspendre cette ONG pour trois ans

Le Comité chargé des organisations non gouvernementales a refusé cet après- midi, par 12 voix contre cinq et deux abstentions, de revenir sur sa décision prise le 23 juin par consensus et proposant au Conseil économique et social de suspendre pour trois ans le statut consultatif général du "Parti radical transnational". La France, estimant que le Comité n’avait pas épuisé en juin dernier l’examen de la question, avait demandé qu’il y revienne et qu’il se prononce par un vote.

Le 23 juin 2000, le Comité chargé des organisations non gouvernementales avait décidé de recommander au Conseil économique et social de suspendre pour trois ans le statut consultatif général du "Parti radical transnational" (PRT), suite à une plainte de la Fédération de Russie qui reprochait au TRP d’avoir violé la résolution 1996/31 de l’ECOSOC, en faisant accréditer sous son nom, un représentant des séparatistes tchétchènes, M. Idigov, lors de la 56ème session de la Commission des droits de l'homme, tenue en avril. A cette session, M. Igidov s’était dans un premier temps présenté comme un « représentant du président Makhradov », chef des indépendantistes tchétchènes.

Cependant, l’ECOSOC n’ayant pas pris de décision quant au fond, plusieurs délégations ont fait observer que le rapport de ce denier n’était pas disponible dans toutes les langues officielles des Nations Unies. L’ECOSOC a alors décidé, par consensus, que le Comité des ONG reprenne l’examen de cette question en septembre et formule à son intention une nouvelle recommandation, que l’ECOSOC examinera en octobre 2000. Le 18 septembre, le PRT a présenté un nouveau rapport.

Lors des deux réunions de ce matin et de cet après-midi, les représentants des pays suivants ont commenté la réponse apportée par le PRT: Fédération de Russie, Etats-Unis, France, Algérie, Chili, Bolivie, Chine, Colombie, Turquie, Tunisie, Inde, Allemagne et Soudan.

Deux approches se sont développées au cours des discussions. L’une défendue par les Etats-Unis et la France, faisant valoir que, le PRT ayant reconnu ses torts et présenté des excuses, il n’était plus nécessaire de recommander sa suspension. Ils ont proposé de revenir sur le consensus auquel le comité était parvenu en juin dernier et pour ce faire, le représentant de la France a demandé un vote. Les autres délégations, notamment celles de la Fédération de Russie et de la Chine, ont au contraire défendu la thèse selon laquelle la demande de sanction contre le PRT devait être maintenue, arguant que les nouvelles réponses fournies depuis juin par le PRT n’apportent aucun élément nouveau justifiant une remise en cause de la décision prise le 23 juin dans le cadre d’un consensus obtenu avec difficulté. A la demande de Cuba, le Comité a donc voté pour décider de s’en tenir à sa décision du mois de juin. A l’issue du vote, les représentants des pays suivants ont pris la parole : Allemagne, Algérie, Fédération de Russie, Pakistan, Turquie, France, Etats-Unis et Chili.

Le Comité chargé des organisations non gouvernementales tiendra sa prochaine session à New York, du 15 au 26 janvier 2001.

Déclarations

Le représentant de la Fédération de Russie a déclaré que la réponse fournie par l’organisation politique portant le nom de Parti radical transnational (PRT) n’apporte pas beaucoup de nouveaux éléments. Le caractère de la réponse ne fait que confirmer qu’il s’agit d’une organisation politique fortement orientée qui viole les statuts et les principes de l’ONU et agit contre des Etats Membres des Nations Unies de façon préméditée. Nous avons demandé en juin la suspension pour trois ans du PRT et la décision a été prise par le Comité par consensus. Indépendamment de la conjoncture politique, nous voulons éviter qu’il y ait des doubles mesures à l’ONU. La Fédération de Russie a accompli tous les efforts nécessaires pour parvenir à un consensus, faisant preuve d’une grande souplesse et permettant au Comité de se faire une opinion unanime. Nous confirmons aujourd’hui que nous tenons au consensus et à la suspension pour trois ans du statut consultatif de cette organisation politique qu’est le PRT.

Le représentant des Etats-Unis a rappelé que le comité a travaillé de longues heures pour parler du cas du PRT. Les membres du comité ont cherché à parvenir à un consensus et certains ont fait preuve de souplesse, notamment le représentant de la Fédération de Russie. Pour les Etats-Unis, des actes contraires à la Charte de l’ONU et à la résolution 1996/31 ont été commis par le PRT et il faut qu’il y ait sanction. Toutefois, il existe des circonstances atténuantes dans la mesure où le PRT s’est excusé à plusieurs reprises, au moment de l’erreur commise, puis devant le Comité. Il a immédiatement cherché à corriger certains points de son site internet pouvant prêter à malentendu. Le PRT essaie de respecter les règles. Il a fourni des réponses au Comité, présentant des arguments qui ont donné satisfaction aux Etats-Unis. En juin, nous avons hésité à nous dissocier du consensus au sein du comité. Aujourd’hui, les Etats-Unis estiment que nous pouvons accepter les excuses du PRT et sont opposés à tout autre sanction.

Le représentant de la France s’est félicité de ce que le Comité des ONG ait adopté par consensus la décision d’examiner la réponse du PRT, conformément à l’esprit de la résolution de l’ECOSOC. Il a précisé que la réponse du PRT a fait l’objet d’un examen approfondi de la part des autorités françaises et qu’il en ressort que la sanction demandée n’apparaît pas justifiée. Sans doute, a-t-il souligné, peut-on regretter l’erreur de M. Idigov lorsqu’il s’est exprimé devant la Commission des droits de l’homme, mais il a immédiatement reconnu qu’il s’agissait d’une erreur. Il a rappelé que des excuses publiques ont été faites aussitôt par M. Idigov et par le PRT, et encore dernièrement par celui-ci dans son rapport. Il a déclaré que cette péripétie ne devait pas entraîner la sanction demandée, aucun abus manifeste n’ayant été constaté de la part de cette organisation ni aucun acte contre les Nations Unies. La France apprécie les efforts des délégations pour trouver un consensus et ceux de la Russie pour atténuer la sanction. Le représentant de la France a demandé un vote enregistré sur la décision qui sera prise par le Comité.

La représentante de Cuba a posé la question de savoir si l’on devait revenir par un vote sur une décision prise en juin, et par consensus, dans une situation particulière difficile.

La représentante de l’Algérie a déclaré ne pas avoir de problème si on devait recourir à un vote, mais elle a néanmoins jugé anormal que l’on entame le processus de vote avant que les autres délégations aient pu prendre la parole. Il n’est pas normal que deux délégations seulement puissent s’exprimer avant le vote.

Le représentant de la France a déclaré qu’il n’était pas dans son intention de priver quiconque de son droit à la parole. En outre, la demande d’un vote n’est pas une nouvelle initiative mais une proposition bien antérieure.

Le représentant du Soudan a déclaré qu’il ne comprenait pas les explications du délégué de la France et s’est enquis sur le sujet qui allait faire l’objet du scrutin.

Le représentant de la Chine a appuyé le représentant de l’Algérie: tous les membres du Comité doivent pouvoir se prononcer sur les réponses fournies. En juillet, l’ECOSOSC a d’ailleurs prévu qu’une séance serait consacrée à l’examen des réponses du PRT et nous avons la journée pour le faire. Nous prendrons ensuite notre décision. Par ailleurs, nous avons pris une décision en juin. Allons nous maintenant voter sur cette décision. Est-ce une nouvelle décision ?

Le Président a fait remarquer que le Comité est en train d’examiner la réponse de l’organisation. Il a invité les représentants à présenter leurs commentaires. A ce stade, trois délégations seulement ont présenté de tels commentaires.

La représentante de l’Algérie a déclaré que les informations fournies dans la réponse du PRT ne réveillaient aucun élément nouveau pouvant amener sa délégation à changer sa position.

Le représentant du Chili a rappelé que la Russie demandait qu’on ne change rien à la décision de sanction et que la France demandait un vote, avant de donner son point de vue sur la réponse fournie. Il a rappelé que lorsque le comité a pris sa décision, sa délégation s’est associée au consensus pour ne pas entraver les travaux du comité, même si les réponses du PRT paraissaient satisfaisantes. Compte tenu des nouveaux éléments satisfaisants, la délégation du Chili a déclaré accepter les excuses présentées par l’ONG et a félicité la Russie pour ses efforts. Elle a déclaré que sa délégation s’oppose à la suspension du statut consultatif de cette ONG.

Reprenant la parole, le représentant de la Fédération de Russie a confirmé sa position à l’égard de la décision du mois de juin. Il a aussi proposé d’autres éléments pour faire avancer le débat tout en souhaitant que les autres délégations fassent preuve de compréhension. La délégation russe, a-t-il expliqué, souhaite que toute la vérité soit faite et que soit ainsi rectifiée la réponse de l’ONG. Il a rappelé que lorsque M. Idigov s’est présenté comme le représentant du Président, il semblerait qu’il a commis une erreur technique, même si des excuses ont été présentées. C’est sur cette base qu’est demandée la sanction, sachant qu’il ne s’agissait pas d’une erreur mais d’une position séparatiste agressive qui viole la souveraineté de la Russie. Il a attiré l’attention du comité sur le site web du PRT, où il est dit que M Idigov a des liens spéciaux avec le Président de la Tchétchènie et que la République tchétchène souhaite se séparer de la Fédération de Russie. Il a souligné que la réponse du PRT attire l’attention sur la République de Tchétchènie en disant qu’il s’agit de trouver des solutions au conflit en cours et alléguant que la République tchétchène ne veut pas que lui soit appliquée la constitution russe. La délégation de Russie a précisé qu’elle n’a pas connaissance que des excuses avaient été faites sur-le-champ par M. Idigov. Il a fait remarquer que le PRT n’est pas une ONG puisqu’il se reconnaît lui-même comme un parti politique. Le PRT jouit donc d’un statut consultatif que n’a aucune autre organisation politique, cette ONG continuant à fonctionner comme une force politique et commettant des actes politiques dirigés contre un Etat Membre. Il a demandé que le secrétariat fasse figurer sa déclaration dans le rapport officiel.

La représentante de la Bolivie a déclaré qu’il était normal de réexaminer ce cas, mais a indiqué qu’elle ne trouvait aucun élément nouveau. Elle a expliqué que sa décision du mois de juin, se ralliant au consensus, n’avait pas été facile à prendre. La délégation qui s’était ralliée au consensus a déjà pris sa décision.

Le représentant de la Chine a lui aussi estimé que le Comité a pris en juin une décision, après un long examen et de nombreuses consultations. Cette décision de juin est sérieuse et a été difficile à prendre. Cette fois-ci encore, nous nous sommes penchés sur les réponses fournies par le PRT. Pour la délégation chinoise, ces réponses n’apportent aucun élément nouveau susceptible de faire changer la position du Comité. Le représentant a rappelé que le PRT avait admis avoir publié un article affirmant qu’il fallait renverser le Gouvernement chinois pour protéger les droits de l’homme dans ce pays. Le PRT est une organisation de la société civile qui émet des critiques à l’égard de plusieurs gouvernements, dont celui de la Chine. Nous pouvons accepter certaines critiques, mais jamais un appel à renverser un gouvernement.

La représentante de la Colombie a elle aussi estimé qu’il n’y avait pas dans les réponses du PRT d’éléments nouveaux qui permettraient à sa délégation de changer sa position du mois de juin. En outre, il est préoccupant de vouloir changer une décision prise par consensus. La délégation française devrait nous expliquer pourquoi il faut un vote.

Le représentant de la Turquie a rappelé que la décision de juin a été prise par consensus. Après examen des réponses du PRT, il apparaît que la décision prise en juin par le Comité est la bonne, il n’est pas nécessaire de revenir là-dessus. Il en va de la crédibilité de notre Comité.

Le représentant de la Tunisie a déploré que l’issue de la réunion ait été en fait décidée dès son ouverture. La demande de vote de la part de la France, faite en début de séance, interdit en fait la possibilité de dégager un consensus en cours de séance. Le consensus obtenu en juin l'a été dans la difficulté et il serait inacceptable pour la Tunisie de le rompre aujourd’hui.

Le représentant de l’Inde a rappelé qu’on était arrivé en juin à un consensus, après des discussions difficiles. La tendance à nous en écarter aujourd’hui montre que le fonctionnement du Comité n’est pas parfait. Quant aux réponses fournies par le PRT, il s’agit d’une répétition de ses arguments qui n'apporte rien de nouveau.

Le représentant de l’Allemagne a demandé qu’on passe désormais au vote, appuyé par la représentante du Soudan, qui a constaté qu’on allait voter sur une décision prise par consensus, ce qui met sa délégation mal à l’aise. La représentante de l’Algérie a déclaré qu’elle ne s’opposait pas à ce qu’on passe ce matin à un vote, à condition que les services d’interprétation soient pleinement assurés. Le Président ayant constaté que ces services ne seraient pas disponibles durant un temps suffisant, a levé la séance.

Avant de passer au vote, le représentant de la Fédération de Russie a demandé sur quoi celui-ci allait porter, puisque la décision du comité avait déjà été prise. Il a invoqué l’article 57 du règlement intérieur de l'ECOSOC, qui dispose qu’une proposition adoptée ou rejetée par le comité ne peut être revue à moins que le Conseil économique et social n’en décide autrement. Il a demandé que lui soit confirmé que le vote allait porter sur cette question de procédure. Le président ayant confirmé qu’il en était ainsi le représentant de la France a invoqué, outre l'article 57, le paragraphe 56 de la résolution 1996/31, qui prévoit le cas d’une procédure en cours, et en a conclu que le comité devait mener l’examen de la question jusqu’à son terme afin d’être en mesure de prendre sa décision ultime. Le représentant de l’Allemagne a demandé un éclaircissement sur le fondement du vote, puisque la procédure n’est apparemment pas terminée. Le Président a confirmé que le vote se faisait dans le cadre de l’article 57. La représentante de Cuba a fait remarquer qu’il faudrait d’abord décider si le Comité voulait ou non revenir sur sa décision adoptée par consensus en juin. En effet a- t-elle expliqué, il faudrait d’abord décider si le Comité veut revenir sur sa décision et seulement si cette réponse est oui, le Comité peut rouvrir le débat sur le fond.

Le Comité s'est donc prononcé sur l’opportunité de réexaminer sa décision du 23 juin. Avant le vote, le représentant de la Fédération de Russie s’est dit opposé à la remise en cause de la décision, en répétant qu’il n’existe pas d’élément nouveau et que le PRT menace la souveraineté territoriale des Etats et appuie des actes ne correspondant pas du tout aux objectifs de la Charte des Nations Unies. La représentante de Cuba a estimé elle aussi qu’il n’était pas nécessaire de réexaminer la décision.

Lors du vote, le Comité s’est opposé, par 12 voix contre cinq et deux abstentions, au réexamen de la décision prise le 23 juin. Ont voté contre le réexamen les représentants des pays suivants: Algérie, Bolivie, Chine, Colombie, Cuba, Fédération de Russie, Ethiopie, Inde, Liban, Soudan, Tunisie et Turquie. Ont voté en faveur du réexamen les représentants de l’Allemagne, du Chili, des Etats-Unis, de la France et de la Roumanie. Les représentants du Pakistan et du Sénégal se sont abstenus.

Après le vote, le représentant de l’Allemagne a précisé que son pays s’était d’abord difficilement associé au consensus obtenu en juin mais avait ensuite considéré que la plainte de la Fédération de Russie n’était pas fondée. La représentante de l’Algérie a déclaré n’avoir ménagé aucun effort pour aboutir à un consensus et a regretté que certains membres aient insisté pour réexaminer la décision prise en juin, après que l’ONG en question eut reconnu ses erreurs. C’est ainsi, a-t-elle précisé, qu’elle n’a pas voulu revenir sur la décision prise. Le représentant de la Fédération de Russie a remercié les délégations qui ont voté contre la décision de révision du consensus et qui se sont ainsi exprimées contre les tentatives d’atteinte à la souveraineté et contre le fait qu’un parti politique dicte sa conduite au comité. Il a ajouté que cela permettait aussi de lutter contre la pédophilie, le terrorisme et les atteintes à l’autorité du comité et à son indépendance. Il a souligné que la délégation de la Russie a fait son possible pour parvenir à un consensus.

Le représentant du Pakistan a rappelé la durée de la discussion qui avait été menée au mois de juin avant de parvenir à un consensus. Il a regretté que le consensus n’ait pas pu être trouvé aujourd’hui. Le représentant de la Turquie a réitéré qu’il ne voyait aucun élément nouveau dans la réponse du PRT. C’est pourquoi il a voté contre la révision de la décision.

Le représentant de la France s’est associé à la déclaration du représentant de l’Allemagne, qui reflète très exactement celle de son pays. La France, a-t-il ajouté, ne se sent pas liée par le vote qui vient d’avoir lieu et se réserve le droit de revenir sur ce point à l’ECOSOC. Le représentant a en outre expliqué la lecture que la France fait de l’article 57 du règlement intérieur de l’ECOSOC, selon laquelle le Comité ne devrait pas envoyer de recommandation à l’ECOSOC avant d’avoir épuisé l’examen d’une question. Le représentant des Etats-Unis a rappelé que son pays s’était, en juin, dissocié du consensus, et comme la France, ne se sent pas liée par le vote de ce jour en ce qui concerne la position future de son pays à l’ECOSOC. Le représentant du Chili a regretté l’absence de consensus et a jugé inacceptables les explications de la Fédération de Russie.

Le Président s’est dit très déçu par la façon dont les choses ont tourné, alors que le Comité était parvenu en juin à un consensus. Il a précisé qu’on pouvait toujours compter sur lui pour protéger le Comité de toute atteinte à son intégrité et à son indépendance.

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