En cours au Siège de l'ONU

SG/SM/7525

TRANSCRIPTION DE LA CONFERENCE DE PRESSE TENUE PAR LE SECRETAIRE GENERAL, M. KOFI ANNAN, AU SIEGE DES NATIONS UNIES, LE 5 SEPTEMBRE 2000

5 septembre 2000


Communiqué de Presse
SG/SM/7525


TRANSCRIPTION DE LA CONFERENCE DE PRESSE TENUE PAR LE SECRETAIRE GENERAL, M. KOFI ANNAN, AU SIEGE DES NATIONS UNIES, LE 5 SEPTEMBRE 2000

20000905 M. Eckhard (interprétation de l’anglais) : Le Secrétaire général de l’ONU.

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Bonjour, Mesdames et Messieurs. Je suis très heureux de vous voir si nombreux ici. Je crois que votre présence montre bien l’intérêt mondial porté au Sommet du Millénaire. C’est surtout, et c’est plus important, le témoignage des espérances et des attentes de millions d’êtres humains dans le monde, des attentes qui ne peuvent être satisfaites que par leurs dirigeants, réunis ici cette semaine.

C’est un moment décisif pour les dirigeants du monde et pour l’Organisation des Nations Unies. Comme instance mondiale unique, et en tant qu’instrument indispensable pour le progrès mondial, l’Organisation des Nations Unies doit se montrer à la hauteur de ce moment. Le Sommet offre une chance réelle aux dirigeants du monde de faire de l’Organisation des Nations Unies un serviteur plus efficace des peuples du monde. Je ne fais pas d’illusions qu’un simple sommet pourrait en soi changer le monde, mais je crois que la présente réunion constituera une occasion exceptionnelle permettant aux dirigeants de renouveler notre mission et notre but. Et nous avons fait de notre mieux pour leur fournir un programme d’action, une instance de prise de décisions et le moyen d’évaluer les progrès accomplis tandis que nous avançons.

Lorsque j’ai proposé le présent Sommet, en 1997 déjà, mon intention était de rassembler le pouvoir symbolique du Millénaire en le rapprochant des besoins réels et urgents des gens partout dans le monde. Au cours des trois dernières années, les événements mondiaux n’ont fait que renforcer ma conviction qu’il est décisif pour les États Membres de se réunir au niveau le plus élevé pour donner une direction au nouveau siècle.

Les conflits en Afrique et ailleurs ont mis en lumière la nécessité de renforcer les opérations de maintien de la paix de l’ONU en leur permettant de réussir dans des lieux où aucune autre organisation ne peut ni ne veut agir. Le rapport Brahimi contient des idées très fortes en faveur du changement, et j’ai déjà commencé à appliquer les recommandations qui relèvent de mon autorité. Les peuples du monde se tournent vers leurs dirigeants pour qu’ils en fassent autant.

La pauvreté – même à l’heure de la mondialisation – est une réalité affreuse pour des milliards d’êtres humains. Leur permettre de se soustraire à la pauvreté reste notre plus haute priorité – au même niveau que la tâche de maintien de la paix, avec des liens inséparables entre ces deux tâches. Nous avons proposé des idées nouvelles pour réduire la pauvreté extrême d’ici à 2015, et nous réexaminons nos propres stratégies de développement pour mettre l’accent sur la croissance et la gouvernance. Les peuples du monde se tournent vers leurs dirigeants pour qu’ils traduisent les engagements du passé en mesures concrètes.

Ce ne sont là que deux défis parmi les très nombreux défis que l’Organisation des Nations Unies devra traiter du fait de sa Charte. C’est aux dirigeants qui se réuniront au Sommet qu’il appartiendra de déterminer comment nous le ferons et par quels moyens. Ils décideront si nous pourrons répondre aux attentes du monde, et si nous le ferons avec imagination, avec efficacité, avec succès.

Et maintenant, je vais répondre à vos questions.

Question (interprétation de l’anglais) : Je vous souhaite la bienvenue, Monsieur le Secrétaire général, au nom des correspondants de l’Association des journalistes accrédités auprès de l’ONU. Nous vous félicitons et nous vous souhaitons tout le succès pour le Sommet.

Ma première question est la suivante : Compte tenu des efforts des dirigeants des nations et des organes de l’Organisation des Nations Unies, et de votre contribution remarquable pour orienter ces efforts et ainsi ramener l’Organisation des Nations Unies à l’épicentre de la politique mondiale, que pensez-vous faire pour rendre ces efforts encore plus transparents?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je crois que depuis que je suis devenu Secrétaire général, j’ai essayé d’ouvrir l’Organisation. Je me suis efforcé de créer une transparence à l’intérieur de l’Organisation des Nations Unies elle-même pour que les différentes parties du système coopèrent beaucoup plus étroitement ensemble. En outre, j’ai ouvert la porte à la société civile, aux fondations et aux universités, je les ai encouragées à travailler en étroite collaboration avec nous pour attaquer certaines questions que nous affrontons aujourd’hui. À l’avenir, je crois qu’il y aura de plus en plus d’ouverture de la part de l’Organisation des Nations Unies vers le monde extérieur. Évidemment, nous devons continuer à nous ouvrir de plus en plus. Je pense que nous vous fournissons plus d’informations, davantage de dialogue et nous allons continuer dans cette voie.

Question (interprétation de l’anglais) : Je suis ici en tant que représentant d’une organisation à but non lucratif basée à New York. J’écris également pour un journal.

Vous avez tenu une réunion sur les technologies de l’information. Que compte faire l’Organisation des Nations Unies pour combler le fossé numérique entre les riches et les pauvres? Il me semble que cela revient à une question d’économie : seuls les gens qui ont les moyens d’acheter des ordinateurs peuvent les utiliser. Comment l’Organisation compte combler la fracture numérique?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Dans le rapport du Millénaire, nous avons formulé des propositions très concrètes. Nous avons aussi établi un corps de Volontaires de l’Organisation des Nations Unies qui enverra des jeunes des pays développés et en développement vers le tiers monde pour tenter de partager leurs connaissances en technologie informatique avec les pays en développement. En outre, nous encourageons les gouvernements, le secteur privé et les organisations non gouvernementales à collaborer avec nous afin de rendre ces connaissances disponibles. Nous encourageons également les gouvernements à promouvoir le transfert des connaissances qui peuvent réellement faire une différence. Non seulement cela peut produire un changement, mais cela est susceptible d’aider les pays du tiers monde à éviter certains des processus douloureux et des étapes difficiles que les autres pays ont dû traverser.

Question (interprétation de l’anglais) : Je suis le correspondant de Earth Times. Nous avons un forum mondial qui se poursuit à travers la ville. À travers le monde, il y a tant de forums qui affirment « nous allons rassembler toutes les parties prenantes au débat sur la mondialisation ».

Comment allez-vous pouvoir convaincre les dirigeants du monde qu’ils doivent canaliser des fonds par le biais de l’ONU? En d’autres termes, comment allez-vous démontrer aux dirigeants que l’ONU continue d’être une tribune essentielle et un organe capable de mettre en oeuvre le développement?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : En premier lieu, permettez-moi de vous signaler que le fait qu’ils arrivent ici, cette semaine, en si grand nombre montre qu’ils considèrent l’ONU comme une tribune essentielle et indispensable.

Nous faisons des efforts pour encourager et pour insister auprès des gouvernements afin qu’ils fournissent davantage d’aide au développement. Nous encourageons également les investissements privés directs. Nous encourageons le renforcement des institutions à l’échelon local. Et je voudrais ajouter ici que je ne crois pas que l’ONU doit être vue comme faisant tout elle-même ni qu’elle devrait essayer de tout faire elle-même. Les questions vont de l’élimination de la pauvreté à la lutte contre le sida en passant par la protection de l’environnement, et ces questions exigent la participation de tous.

Ni les gouvernements, ni l’ONU ne peuvent travailler en vase clos. C’est pour cela que nous voulons encourager les organisations internationales, les gouvernements, le secteur privé, les organisations non gouvernementales et les fondations à agir en partenariat afin d’exercer une pression collective sur tous ces problèmes. Et je crois que les peuples et les gouvernements commencent à comprendre cela, c’est une responsabilité qui incombe à tous. Nous allons jouer un rôle catalyseur. Nous allons faire pression. Nous allons soulever les problèmes. Nous allons utiliser le peu de ressources dont nous disposons, mais tout le monde doit contribuer.

Question (interprétation de l’anglais) : Au début, vous avez parlé de « mettre fin à un siècle de cruauté et de destruction et d’inaugurer un millénaire de paix et d’espérance ». Que répondez-vous aux cyniques qui disent que depuis les temps bibliques, nous parlons de mettre fin à la cruauté et d’instaurer la paix sans y parvenir, que leur répondez-vous?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je leur répondrai que nous devons continuer à faire des efforts de plus en plus intenses et que le fait que nous ayons connu les guerres et la cruauté ne veut pas dire que nous ne devons pas continuer à essayer. De même, le fait qu’il y a toujours eu des pauvres ne signifie pas que nous ne devons pas tenter d’améliorer leur sort. D’aucuns ont dit que je suis un rêveur mais sans rêve, il n’y pas moyen de faire quoi que ce soit.

Je crois que ces grandes questions très graves exigent précisément de chacun d’entre nous de contribuer. C’est pour cela que je demande aux dirigeants du monde de faire beaucoup plus que d’adopter un plan d’action. Je leur dis que j’attends d’eux qu’ils retournent dans leur pays et passent à l’action.

Question (interprétation de l’anglais): Croyez-vous donc que les rêves dans ce cas sont réalistes?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : C’est au moins un début. Je ne pense pas qu’il s’agisse d’utopies. Ce ne sont pas des rêves utopiques parce que nous avons les moyens. Nous avons les compétences et les capacités. Il faut seulement de la volonté. Dans ce sens là, je suis réaliste, non pas utopique. La volonté est la seule chose qui manque, et je compte sur vous tous pour transmettre ce message.

Question (interprétation de l’anglais) : La question est en deux parties, je sais que vous ne pourrez pas très bien répondre à la deuxième partie.

La première partie de la question concerne le projet de déclaration du Sommet : De toute évidence, vos initiatives y ont été appuyées. Quand est-ce que cela se traduira en action concrète et combien cela coûtera-t-il?

La deuxième partie de ma question est la suivante : Dans vos consultations avec les gouvernements, a-t-on parlé de votre deuxième mandat et dans l’affirmative, dans quel sens?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je prendrais la première question.

On nous a offert un très large appui et je suis heureux que les recommandations aient pour base le rapport que j’ai présenté, la plupart des recommandations que j’ai faites ont été acceptées et on a ajouté des suggestions. J’espère, comme je l’ai déjà dit, qu’ils reprendront aussi le programme d’action qui sera mis aux voix ici le 8 septembre et qui sera traité très sérieusement quand ils rentreront chez eux car ce n’est pas la peine de convenir ici de lutter contre la pauvreté quitte à rentrer chez soi ensuite pour dire : cela appartient à l’ONU. Voilà pourquoi j’ai dit que chacun doit accepter un programme de lutte contre la pauvreté, un programme d’allégement de la pauvreté, un programme d’aide plus grande à l’élimination de la pauvreté, un programme destiné à accélérer l’allégement de la dette, pour que les pauvres ne soient pas accablés par le paiement de la dette. Chacun a une responsabilité à honorer et j’espère que nous ferons le nécessaire.

S’agissant de votre deuxième question, très franchement, je ne l’attendais pas aussi vite à la conférence de presse, mais puisque vous avez posé la question, je commencerai par dire que ce n’est pas la question la plus importante dans mon esprit; ce n’est pas ma préoccupation première. Mais très franchement, en temps utile, je devrais dire au Conseil et à tous les États Membres si je suis prêt à envisager un deuxième mandat, ce n’est pas une décision facile, vous le comprendrez. C’est une décision personnelle difficile dont je devrais parler avec ma femme, ma famille et mes amis. Mais en temps voulu, je ferai connaître mon intention. Merci.

Question : Le rapport Brahimi préconise des mesures extrêmement sévères qui, si vous les appliquez, risquent de déplaire à bon nombre d’États Membres. Comment allez-vous faire dans ces conditions?

Le Secrétaire général : M. Brahimi a soumis un rapport compétent et très clair. J’espère que les États Membres vont l’accepter. Je vais essayer de les convaincre d’accepter les recommandations du rapport Brahimi, et de les mettre en

application. Parce que le moment est venu de décider que si on fait des opérations de maintien de la paix, on les fait efficacement. Autrement on n’a qu’à se croiser les bras. Ce qui est sûr, c’est qu’on ne peut pas continuer à travailler comme on le fait en ce moment.

Question (interprétation de l’anglais) : Six ans après les événements d’Haïti, la question persiste; une question qui a coûté trois milliards de dollars aux contribuables américains. Le Président sera ici. Vous allez lui parler. Qu’allez-vous lui dire?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je vais parler au Président Préval. Je vais lui parler de la situation en Haïti. Je compte lui faire part de la déception que nous ressentons tous qu’il n’y ait pas plus de progrès en Haïti. Je lui parlerai de la nécessité de trouver des moyens de faire avancer la situation. Je suis aussi déçu que votre question le laisse entendre que nous n’ayons pas fait plus, que nous ne soyons pas allés plus loin en Haïti. Il y avait beaucoup de promesses et d’espérances.

(Le Secrétaire général parle en français)

Disons que je suis un peu déçu; on a fait beaucoup d’efforts. Le peuple haïtien a besoin de la paix, il a beaucoup souffert. J’espère que les leaders haïtiens vont se mettre ensemble et trouver une solution entre eux, avec la communauté internationale, pour apaiser le pays et trouver une solution pacifique pour permettre à la société d’aller de l’avant dans le domaine économique et social.

Question (interprétation de l’anglais) : On parle tellement de démocratiser la façon dont l’Organisation des Nations Unies prend ses décisions, surtout au niveau du Conseil de sécurité. Est-ce que cela va se passer maintenant?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je suis certain que les chefs d’État réunis ici parleront d’une réforme du Conseil de sécurité. Selon certaines indications, il y a des pays qui voudraient aller plus loin. Le Gouvernement britannique a fait une déclaration hier. Le Gouvernement des États- Unis, par le truchement de M. Holbrooke, a également indiqué une certaine souplesse. Je crois que les débats continueront au Sommet mais je ne peux pas être sûr qu’il y aura un règlement au moment du Sommet. Nous allons peut-être faire des progrès mais nous n’arriverons pas à un accord durant le Sommet. Il faudra continuer de travailler au cours de l’année prochaine.

Question (interprétation de l’anglais) : Deux questions difficiles. D’une part, les signes de rapprochement entre l’Iran et les États-Unis ... [inaudible] qui apparaissent aujourd’hui en la présence de Mme Albright et [inaudible] organisation [inaudible]. Je sais que vous tenez beaucoup à jouer un rôle en vue d’un rapprochement. Allez-vous assumer un rôle au niveau du Président Clinton et du Président Khatami? Que pensez-vous de ce rapprochement?

En second lieu, vous avez vu M. Barak hier. Pouvez-vous nous dire si vous avez des raisons d’être optimiste quant à la réunion bilatérale de demain, le règlement de la question de Jérusalem, et avez-vous un rôle particulier à cet égard?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Pour ce qui est du rapprochement entre les États-Unis et l’Iran, je voudrais voir cela se faire. J’ai toujours encouragé le dialogue entre les nations. Je ne crois pas qu’il faille isoler les nations ni les laisser s’isoler. Cela ne résout pas les problèmes que nous cherchons à régler, et je crois qu’il est bon aussi qu’aujourd’hui nous ayons une conférence sur le dialogue des civilisations, et il a été remarquable de voir le nombre de chefs d’État et de différents pays qui participent à ce dialogue. Comme vous l’avez dit, le Président Khatami a parlé à Mme Albright qui se trouvait dans le public et il l’a écoutée. C’est un très bon signal.

Au cours des trois prochains jours, tous les pays, dont les États-Unis et l’Iran, auront la possibilité de s’écouter l’un et l’autre, quand le Président Clinton prendra la parole ici et quand le Président Khatami parlera. Je crois donc que nous avançons. Je ne dirai pas que nous ayons beaucoup avancé. Mais disons que la glace a été rompue. Il commence à y avoir un mouvement dans le bon sens.

Quant au processus de paix au Moyen-Orient, vous avez raison. J’ai rencontré le Premier Ministre Barak et nous avons parlé des progrès concernant la Palestine. Nous avons parlé des négociations qui auront lieu cette semaine même à New York. Nous avons, bien entendu, parlé aussi du retrait d’Israël du Liban et de ses effets sur la situation dans la région et avons reconnu que cela représentait un tournant important dans la région. Pour la première fois une résolution de l’ONU a été appliquée et semble tenir. La région est en paix, même s’il y a des tensions sporadiques à certains endroits.

Je crois que M. Barak s’est montré disposé, décidé à oeuvrer pour la paix, et qu’il espère qu’il y aura du mouvement quand ils se réuniront tous. Au cours de mes entretiens avec le Président Arafat, j’ai constaté qu’il souhaitait lui aussi qu’il y ait des progrès, mais il nous faut avoir sur la table un ensemble de propositions acceptables pour les deux parties. Je ne crois pas que les parties aient jamais été plus rapprochées qu’aujourd’hui. On considère Camp David comme un échec, mais j’estime pour ma part que Camp David a permis de beaucoup avancer et j’espère que l’on pourra tirer profit de ces progrès et arriver à un accord.

Mais évidemment, il y a également une question de temps. Le temps presse. Je ne crois pas que le temps donné à chacune des parties soit très considérable. On pense au Président Clinton, à son mandat. On pense au calendrier politique israélien. On pense aux questions auxquelles doit faire face le Président Arafat lui-même. J’espère que nous serons en mesure de faire un pas de plus ici à New York cette semaine. Mais ne nous leurrons pas : les questions sont très complexes. Il existe cependant un désir réel et une quête réelle de paix non seulement de la part des deux parties, mais dans le monde arabe et dans le monde en général. Le Président Chirac aussi est très engagé dans cette question. Le Président Moubarak également. Et je continuerai de donner mon appui et tout ce que je pourrai offrir en tant que Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies pour favoriser ce processus.

Question (interprétation de l’anglais) : Vous venez de dire, il y a quelques minutes, quelles étaient les grandes questions. Le Sommet du Millénaire a des objectifs très ambitieux à atteindre en très peu de temps. Quelles pressions les Nations Unies pourraient-elles exercer pour favoriser la réalisation de ces objectifs? Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je dirai, tout d’abord, que le Sommet a effectivement des objectifs ambitieux. Mais nous ne commençons pas aujourd’hui. Nous avons commencé les préparatifs il y a plusieurs mois; les chefs d’État ont reçu un rapport il y a six mois pour qu’ils l’étudient et se préparent en vue du Sommet. Ayant étudié le rapport, ils se sont mis d’accord sur un communiqué et un programme d’action, qui, je l’espère, sera approuvé quand ils seront tous présents.

Je pense que votre question est : comment assurer la mise en oeuvre de nos objectifs? Ce sont peut-être nos objectifs. Allons-nous les surveiller? Allons- nous publier un rapport annuel? Allons-nous montrer qui fait quoi? Qui a accompli du progrès? Qui agit avec sérieux et qui ne le fait pas? Je pense que nous essaierons de le faire. Je pense que l’effort qui consiste à montrer les activités de chacun permettra peut-être aussi d’avancer.

Qu’il me soit permis de répéter une fois de plus que les problèmes semblent énormes. Mais dans le monde actuel, étant donné la technologie et les ressources disponibles, nous avons les moyens de nous attaquer à ces problèmes. Si nous voulons, nous pourrons en venir à bout.

Question (interprétation de l’anglais) : Ma question porte sur le sujet de Chypre. Pouvez-vous nous dire qui est responsable de l’impasse à Chypre?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Est-ce que vous vous attendez réellement à ce que je vous le dise? Et que je siège à leur côté le 12 septembre.

D’accord, permettez-moi de dire que j’espère que lors de notre réunion de la semaine prochaine, nous pourrons aborder des questions fondamentales. Nous aimerions aller au coeur du sujet. Je pense que nous avons dépassé l’étape où nous réunissons pour parler d’entretiens. Je pense que nous devons vraiment cibler le coeur des problèmes. C’est ce que nous avons l’intention de faire, et j’espère que les dirigeants seront prêts à le faire.

Question (interprétation de l’anglais) : Vous avez fait allusion au rapport du Gouvernement du Royaume-Uni sur la réforme de l’Organisation des Nations Unies, sur le maintien de la paix et sur le Conseil de sécurité. Puis-je me permettre de vous poser quelques questions à ce sujet. D’abord, et de manière plus spécifique, le Gouvernement du Royaume-Uni propose de créer un collège de formation militaire pour éviter des problèmes et des rivalités qui ont surgi au sein de quelques missions de maintien de la paix des Nations Unies. La Grande-Bretagne a offert d’accueillir ce collège militaire de l’Organisation des Nations Unies. Puis-je avoir vos commentaires à ce sujet?

Deuxièmement, de façon générale, sur la réforme du Conseil de sécurité, la Grande-Bretagne propose un élargissement assez radical, aussi bien des membres permanents que de la composition générale du Conseil de sécurité. Un rapport actuel du Gouvernement et du troisième parti dans notre parlement, les démocrates libéraux, considèrent la situation actuelle avec cinq membres permanents seulement comme injuste et déraisonnable. Cela semble un geste énorme de la part d’un membre permanent de faire un tel commentaire. Pensez-vous que cela présuppose qu’il y aura éventuellement une volonté générale de changement radical? Si le Conseil de sécurité – voici ma question – venait à être élargi, et si cela rendait la prise de décisions plus juste, la rendrait-il plus efficace? Est-ce que l’élargissement du Conseil de sécurité risquerait de rendre plus difficiles les décisions à prendre au sujet des questions délicates et complexes et de mener à des décisions moins claires, plus faibles, affaiblissant ainsi l’Organisation?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je pense qu’en ce qui concerne le maintien de la paix, j’ai toujours considéré qu’il faut des soldats bien entraînés et bien équipés. L’idée de créer un collège de formation pour les soldats est une idée qui mérite tout notre appui. Je pense que l’offre du Gouvernement du Royaume-Uni d’accueillir ce collège est un pas très positif. Nous préférerions avoir des hommes et des femmes sur le terrain qui ont travaillé ensemble auparavant et qui ont suivi une formation analogue, et qui savent comment utiliser les équipements. Je me réjouis donc de cette décision de créer un collège de formation militaire pour les soldats de la paix en provenance du monde entier.

Je suis également heureux de l’annonce britannique sur la réforme du Conseil de sécurité. Votre question reflète le débat qui a lieu depuis longtemps à l’Organisation des Nations Unies. Pendant très longtemps, les membres ont considéré que le Conseil devait rester restreint pour être plus efficace. D’autres considèrent qu’il faut le mettre à jour pour tenir compte de réalités plus démocratiques et plus représentatives d’aujourd’hui, et qu’autrement il perdrait sa légitimité. La déclaration britannique reconnaît le fait qu’il nous faut rendre le Conseil plus démocratique et plus représentatif et je suis persuadé que le Gouvernement britannique partage cet avis – sinon il n’aurait pas fait sa proposition – mais il devrait être possible de réformer le Conseil, de l’élargir, de le rendre plus démocratique et plus représentatif tout en garantissant son efficacité. Je pense que nous en sommes tout à fait capables.

Je ne suis pas d’accord que l’élargissement mènera nécessairement à un Conseil de sécurité confus et affaibli. Je crois que si ce problème se pose, il sera insoluble. Je voudrais présenter nos excuses auprès d’une demi-douzaine de journalistes qui attendent encore.

Question (interprétation de l’anglais) : Que se passe-t-il dans ce bâtiment? Quelle est votre vision et quelle est celle de ces hommes et de ces femmes qui se tiennent le long de ce mur? Vous avez eu un Sommet religieux; vous avez eu le Sommet de la paix, maintenant vous avez le Sommet du Millénaire. Vous ne pouvez avoir un autre sommet après celui-ci. Quelle est la stratégie qui sous- tend toutes ces sessions? Que répondez-vous à ceux qui critiquent la mondialisation et à ceux qui disent que l’entrée des milieux d’affaires à l’Organisation des Nations Unies est pour le moins inappropriée, qu’elle ouvre la porte à des possibilités troublantes et qu’elle diminue l’Organisation?

Le Secrétaire général (interprétation de l’anglais) : Je crois que nous sommes tous d’accord sur le fait qu’il s’agit d’une année plutôt extraordinaire. C’est l’année du millénaire et une année du jubilé. Lorsque j’ai suggéré qu’il y ait un Sommet du Millénaire, j’ai également proposé de tenir des consultations les plus vastes possibles. En préparation du Sommet, nous avons tenu des consultations régionales en Afrique, en Amérique latine, en Asie et ailleurs. Nous avons eu un forum d’organisations non gouvernementales au mois de mai qui nous a aussi préparés à ce Sommet. Les dirigeants religieux se sont réunis ainsi que les parlementaires, qui devraient d’ailleurs jouer un rôle plus efficace dans notre Organisation en cette ère de mondialisation. Les parlementaires sont en contact direct avec leurs peuples et nous savons déjà que nous ne pouvons plus agir en termes strictement locaux. Ce qui se passe à l’échelon mondial affecte ce qui se passe au niveau local et vice-versa. Les législateurs, les parlementaires, qui sont responsables de la législation dans leur pays, doivent donc être sensibles à toutes ces questions. Je crois qu’ils ont aussi un rôle à jouer en expliquant cette nouvelle ère et la mondialisation. J’ai été donc très heureux de pouvoir les recevoir ici et d’écouter leur apport. Les représentants des ONG et les parlementaires auront donc également la possibilité de s’adresser au Sommet présentant leurs vues aux dirigeants mondiaux. Tout cela atteint son point culminant cette semaine avec le Sommet du Millénaire. Je le redis : c’est une année très spéciale. Nous n’avons pas l’intention de répéter cette expérience chaque année et j’espère que cela nous mettra du vent en poupe et que les participants pourront réaffirmer leur foi dans notre Organisation et nous donner l’appui dont nous avons besoin. Il est important également qu’ils sachent, ce faisant, ce que les régions ont dit et quelles sont les vues des dirigeants religieux et des parlementaires.

Pour ce qui est de la mondialisation et des milieux d’affaires, je pense avoir lu plusieurs rapports au sujet du contrat mondial et de mes tentatives d’entrer en contact avec les milieux d’affaires. Que cela nous plaise ou non, nous devons accepter que les entreprises et le secteur privé ont un pouvoir énorme dans le monde actuel. Ce sont eux qui créent la richesse, qui disposent de l’argent, de la technologie et des capacités de gestion pour promouvoir nombre des causes dont nous parlons ici. Ce sont également eux qui gèrent ces entreprises qui, selon nous, pollueraient le monde. Comment assainir la planète et promouvoir de bonnes pratiques si nous ne parlons pas avec les acteurs principaux? Ce sont eux qui emploient les gens, qui paient ou ne paient pas de salaires décents. Ce sont ces sociétés qui, parfois, emploient les enfants. Nous devrions donc tous être favorables à l’idée de les réunir et de leur dire « N’employez pas d’enfants. Payez un salaire décent » et de leur dire également de respecter les droits de leurs travailleurs.

Permettez-moi d’ajouter que dans le contrat mondial, nous avons trois partenaires : les entreprises, les syndicats et les organisations non gouvernementales, c’est-à-dire la société civile. C’est un processus très transparent. Les sociétés indiquent ce qu’elles vont faire pour respecter les principales normes internationales du travail et pour respecter l’environnement et les droits de l’homme. Leurs travailleurs et les syndicats veilleront à ce que cela soit fait et la société civile aussi. C’est un processus tout à fait transparent. Et je pense que plus d’entreprises seront sensibilisées sur ces questions, le mieux cela sera pour nous tous. Certaines des sociétés parties au contrat mondial ont une mauvaise réputation. Je pense que c’est précisément pour cette raison que nous avons besoin d’elles. Si elles faisaient ce qu’elles doivent faire en matière d’environnement, de normes du travail et de droits de l’homme, il ne serait pas nécessaire d’avoir un contrat mondial. Si nous pensons de façon claire, simple et sincère, nous arrivons à la conclusion que les choses dont nous parlons –allégement de la pauvreté, lutte contre le sida, éducation, diffusion de technologies informatiques – ne sont pas possibles sans la participation du secteur privé. Nous devons être réalistes à ce sujet.

Je vous remercie et vous souhaite un très bon Sommet du Millénaire.

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