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ONG/371

LES ONG SE DOIVENT DE DONNER L'EXEMPLE DE LA TRANSPARENCE ET DE L'EQUITE FACE AUX ETATS

30 août 2000


Communiqué de Presse
ONG/371


LES ONG SE DOIVENT DE DONNER L’EXEMPLE DE LA TRANSPARENCE ET DE L’EQUITE FACE AUX ETATS

20000830

La Conférence DPI/ONG s’est concentrée, ce matin, sur les facteurs de réussite des programmes de développement et des initiatives de la société civile. Autour d’un thème central intitulé “Les meilleures pratiques : promouvoir notre programme commun”, les participants ont souligné les progrès accomplis sur la voie du développement durable et de la sécurité fondée sur le respect des droits de l’homme. Ils se sont ensuite interrogés sur les facteurs, les politiques et les mesures qui ont contribué au succès de campagnes portant, entre autres, sur la participation des femmes.

Notant l’influence croissante de la société civile, M. Kumi Naidoo, Secrétaire général de CIVICUS : World Alliance for Citizen Participation, a estimé que les ONG doivent accepter le fait qu’elles ont aussi davantage de responsabilités et doivent respecter la plus grande transparence et, dans tous les domaines, “faire mieux que les gouvernements et les organisations internationales”. Il a appelé la société civile à aider les pauvres à prendre leurs destinées en main. A l’instar de M. Naidoo, M. Arnold Hiatt, Président de “Business for Social Responsibility” a appelé le secteur privé des affaires à changer et à ne plus croire que ses intérêts sont basés sur la simple exploitation des individus et des populations. Nous considérons que l'engagement social comme un très bon investissement, et la meilleure manière pour une entreprise de faire des profits à long terme, a-t-il conclu.

Mettant pour sa part l’accent sur l’importance de la spiritualité, de la vérité et des liens sociaux traditionnels des sociétés autochtones, Mme Motarilovoa Hilda Lini, Directrice du Pacific Concerns Resource Center, s’est dite convaincue qu’aujourd’hui, les “sociétés primitives” sont celles qui vivent une vie civilisée, contrairement à celles qui confondent la connaissance scientifique et la simple éducation scolaire avec la sagesse. Elle a estimé que ce que l’on appelle le "Tiers-Monde" et qui se considère comme "le monde des civilisations premières" doit se sortir de ses difficultés en tenant compte de ses propres besoins et de ses propres cultures.

Quant à Mme Yoriko Meguro, Professeur au Département de sociologie de l’Université de Sofia en Bulgarie et animatrice du Groupe de réflexion de ce matin, elle a estimé que la question de la promotion de la femme est probablement le domaine d’intérêt des Nations Unies en faveur duquel les gouvernements, les organisations non gouvernementales et les individus ont pris les engagements les plus fermes. Elle s’est félicitée de ce que la lutte pour la parité ait mis en évidence l’importance de la perspective sexospécifique dans la lutte contre les problèmes de l’environnement, de la population et des droits de l’homme. Mme Meguro a cependant reconnu que les progrès en matière ne se font pas au même rythme dans tous les pays et a regretté que, lors de la session extraordinaire de l’Assemblée générale sur les femmes, la politique ait submergé les négociations visant à promouvoir le rôle des femmes dans la construction de la paix.

M. Mats Karlsson, Vice-Président de la Banque mondiale pour les affaires extérieures et les affaires aux Nations Unies, a invité les ONG à coopérer avec la Banque mondiale pour protéger le "capital social" et "créer une énergie positive" qui leur permette de faire échapper la planète à la pauvreté.

Avant de tenir sa séance spéciale de clôture, la Conférence DPI/ONG réfléchira, cet après-midi, au thème intitulé “Une vision économique qui réussit : un dialogue”.

Les meilleures pratiques : promouvoir notre programme commun

Mme YORIKO MEGURO, Professeur au Département de sociologie de l’Université de Sofia, Bulgarie, modératrice du Groupe de réflexion, a estimé que la question de la promotion de la femme est probablement le premier et le plus important domaine d’intérêt des Nations Unies pour lequel les gouvernements, les organisations non gouvernementales (ONG) et les individus ont pris des engagements. Elle a rappelé que les Nations Unies ont établi en 1946 une Commission de la condition de la femme, deux ans avant l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme. D’autres domaines d’intérêts axés sur les problèmes économiques et politiques ont ensuite emergé puis été traités indépendamment les uns des autres. Ce n’est qu’au cours de la dernière décennie que l’on a commencé à considérer que ces domaines globaux, tels que le développement, l’environnement, la population, les conflits et la parité, étaient interdépendants et que résoudre les problèmes dans un domaine permettait des avancées dans les autres. Les partenariats entre gouvernements et ONG ont également pris une place importante.

Depuis 55 ans, les activités de la Division pour la promotion de la femme et de la Commission de la condition de la femme ont connu quatre étapes de développement. D’abord, l’Année internationale de la femme, en 1975. A cette époque, l’accent était mis sur les droits civiques des femmes et leur participation au développement économique ainsi qu'à la lutte contre la pauvreté. La conception de l’assistance au développement était telle que ses ressources n’étaient pas réparties à tous les secteurs de la société. En outre, on attendait des femmes qu’elles participent à l’économie tout en conservant leur rôle “traditionnel” au sein de la famille, ce qui les chargeait de double ou triple fardeaux. Cette situation a inspiré l’organisation de la Conférence mondiale sur les femmes à Mexico, en 1975.

Au cours des années suivantes, la question de la parité a été progressivement incorporée aux politiques de développement. Les organisations de femmes ont contribué à rendre les sociétés plus humanitaires et plus attentives aux voix des personnes défavorisées. Des avancées visibles ont été obtenues, et les plus marquantes ont été l’adoption de la Convention sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes en 1979 et son Protocole facultatif en 1999.

Une série de conférences des Nations Unies, notamment sur l’environnement et sur la population, ont intégré des questions liées au développement durable. Le concept de droits de l’homme existant n’incluait pas tous les droits de la femme, en particulier en matière de santé et de droits reproductifs. C’est pendant la Conférence sur la population que l’on a cessé de considérer les femmes comme une simple “population reproductive”.

La session extraordinaire de Beijing+5 a permis de mesures les progrès accomplis au cours du demi-siècle passé. Des améliorations ont été réalisées au niveau des mécanismes institutionnels, en matière de conditions sanitaires, l’accès à l’éducation et celui à des activités économiques lucratives. Les retombées positives à long terme de ces améliorations ont également été mises en évidence. Par exemple, on a noté que l’éducation permet d’acquérir des connaissances mais aussi la capacité de concevoir sa vie sur le long terme et même de penser l’avenir des générations à venir, ce qui est indispensable dans le cadre du développement durable. A travers les efforts pour la réalisation de la parité, il est devenu évident que la perspective de genre est un outil nécessaire pour lutter contre les problèmes de l’environnement, de la population et des droits de l’homme. Mme Meguro a cependant reconnu que les progrès en matière de parité ne se font pas au même rythme dans tous les pays. Rappelant que la paix est apparue comme un thème central de la Conférence mondiale sur les femmes, elle a également regretté que, lors de la session extraordinaire de Beijing + 5, la politique ait submergé les négociations visant à promouvoir le rôle des femmes dans la construction de la paix.

Exposé

M. ARNOLD HIATT, Président de “Business for Social Responsibility” a déclaré que dans un monde en changement rapide et radical, marqué par une révolution des technologies de l’information et des transports, et où les dictatures cèdent de plus en plus la place à des démocraties, le secteur privé des affaires se devait de changer et de s’adapter. Le monde des affaires a trop longtemps été perçu comme un monde dont les intérêts étaient basés sur la simple exploitation des individus et des populations. L’entreprise pour laquelle nous travaillons, a dit M. Hiatt, exerce ses activités dans le secteur de la fabrication de chaussures et est installée dans la petite ville de Roxbury près de Boston dans le Massachussets. “Stride Rite”, c’est son nom, a décidé de s’impliquer dans la vie communautaire de la région dans laquelle elle est installée. Nous menons des actions de type social qui vont de la construction d’un centre communautaire intergénérationnel au sein de nos usines à la prise de mesures destinées à préserver la qualité de l’air et de l’environnement.

Le secteur de la chaussure est extrêmement compétitif, et certains de nos concurrents se sont souvent demandé pourquoi nous nous engagions dans des initiatives qui ne semblaient pas purement productives. Mais les mesures que nous avons prises en faveur d’un mieux-être de notre environnement et d’un meilleur traitement de nos employés et de la communauté locale dans laquelle ils vivent, ont plutôt contribué à faire de notre entreprise un lieu qui attire les personnels les plus qualifiés, ce qui se traduit positivement sur la qualité de notre production. La responsabilisation sociale d’une entreprise améliore son image et fidélise sa clientèle. Mais, pourront se demander certains, comment ces investissements sociaux, influent-ils sur la tenue en bourse de l’entreprise? En 1992, Stride Rite était cotée parmi les sociétés les plus rentables à la bourse de New York. La valeur de Stride Rite est passée en quelques années de 38 millions de dollars à 1,5 milliard de dollars en 1992, malgré les 5% de bonus hors taxes que nous versions à la Fondation Stride Rite qui travaille sur nos programmes sociaux.

Nous considérons cet engagement social comme un très bon investissement. Milton Friedmann, le "pape" de la théorie de l’économie de marché, disait que le profit était la seule raison d’être du monde des affaires. Mais nous pensons, même si M. Friedmann n’avait pas perçu cet autre aspect des affaires, que l’investissement social est la meilleure manière pour une entreprise de faire des profits à long terme. Stride Rite dépense 8 500 dollars pour assurer l’éducation d’un enfant dans son centre social, tandis qu’au même moment, l’Etat du Massachusetts dépense 32 000 dollars par an pour assurer le traitement d’un adolescent détenu dans ses prisons. Beaucoup des jeunes qui sont passés par nos structures sociales sont aujourd’hui des individus responsables et productifs dans ce pays. Nous avons, au cours des années 80, essayé de faire connaître nos idées au milieu des affaires. Ce fut un dialogue difficile, mais aujourd’hui l’évolution du monde semble nous donner raison.

M. MATS KARLSSON, Vice-Président de la Banque mondiale pour les affaires extérieures et les affaires relatives aux Nations Unies, a déclaré que les manifestations de la société civile lors des réunions de Seattle et de Washington ont démontré l’émergence d’une grande énergie positive. Il a cependant regretté que les chefs d’Etat des pays en développement qui s’étaient déplacés pour ces conférences dans le but de réfléchir, entre autres, aux problèmes liés au VIH/sida et à ses répercussions sur le développement n'aient pas pu mener à bien leurs réunions.

M. Karlsson a déclaré que les personnes vivant dans la pauvreté constituent le plus grand groupe de population dans le monde. Encore plus que le manque d’argent, les personnes vivant dans la pauvreté souffrent de l’impossibilité à faire entendre leur voix et des atteintes à leur dignité. Dans la lutte contre la pauvreté, M. Karlsson a recommandé que l'on considère les personnes comme des facteurs d’action, que l'on renforce le secteur privé pour augmenter les ressources disponibles pour ces populations. Dans le cadre de programmes par pays, la Banque mondiale doit également travailler avec la société civile et les médias et adopter une approche holistique. Grâce à ce cadre de développement global, la Banque peut désormais prendre également en compte les questions du domaine social et écologique. Dans un grand nombre de pays, les programmes d’assistance sont élaborés en consultation avec la société civile. Cette nouvelle manière de travailler est très exigeante mais porte ses fruits.

M. Karlsson a estimé que l’on ne peut faire des progrès dans le domaine de la santé sans travailler au niveau mondial, avec le secteur des affaires, la société civile et avec les gouvernements. Il a ajouté que la libre-entreprise ignorante des responsabilités sociales conduit à l’échec. Il faut donc équilibrer les points forts et les points faibles de l’économie financière et contrôler les flux financiers. En ce qui concerne la crise de la dette, la Banque espère passer des accords d’annulation de la dette avec 20 pays, a annoncé le représentant.

M. Karlsson a indiqué que la Banque mondiale a déjà mis en place de nombreux partenariats et qu’elle a notamment une collaboration concrète avec le “Partenariat mondial de l’eau”. Il est évident que nous devons élargir nos différentes collaborations, en particulier dans le domaine sanitaire, a-t-il ajouté. Les technologies de l’information ont permis la révolution de l’ouverture et la Banque mondiale pense mettre l’ensemble des connaissances sur l’Internet afin que les connaissances les plus à jour soient accessibles à tout le monde. En effet, a estimé M. Karlsson, la connaissance donne le pouvoir. Le domaine de la cohésion sociale, ou le capital social qui complète le capital financier et le capital naturel, doit également être structuré par des politiques concrètes locales et mondiales. Les ONG doivent coopérer avec la Banque mondiale pour protéger ce capital. Le représentant a appelé les ONG à créer une énergie positive qui les rapproche de la Banque mondiale et leur permette de faire échapper la planète à la pauvreté.

Mme MOTARILOVOA HILDA LINI, Directrice du Pacific Concerns Resource Center, a estimé que les problèmes de décolonisation, de dénucléarisation et d’émancipation des peuples autochtones de la région du Pacifique, qui va de l’Amérique du Sud à l’Australie, devaient être sérieusement discutés par la communauté internationale. Il est étrange que ce ne soit qu’en l’an 2000 que l’ONU pense à travailler avec les ONG et la société civile. Pourquoi cela ne s’est-il pas fait dès la naissance de l’Organisation? En tant que ressortissante et ancien membre du gouvernement du Vanuatu, a dit Mme Lini, nous savons ce que représente la survie des populations et des peuples autochtones. Tellement de pays ont été colonisés et occidentalisés, au nom de la modernité, que les crises identitaires qui secouent aujourd’hui de nombreuses régions du monde seront difficilement résolues. Ce que l’on appelle le "Tiers-Monde" et que nous appelons "le monde des civilisations premières" doit se sortir de ses difficultés en tenant compte de ses propres besoins et de ses propres cultures. Il est étrange que les gouvernements continuent, au niveau international et sur le plan de la gestion nationale, de maintenir une division entre eux-mêmes et les peuples qu’ils prétendent représenter et sans lesquels ils n’existeraient pas.

Dans le passé nous avons connu des révolutions initiées par des sociétés civiles qui en avaient eu assez du joug dictatorial de leurs gouvernements. Dans nos cultures autochtones, nous avons appris à traiter les autres de manière respectueuse. Tout ce qui représente la vie doit être respecté. On nous appris la valeur de la spiritualité et du respect de l’univers. Plus tard, l’école occidentale nous a inculqué d’autres notions, souvent contraires aux nôtres. Et le drame de nos gouvernements c’est qu’ils ne semblent s’inspirer que de ce qui est venu d’ailleurs et ne tiennent pas compte de la sensibilité et des valeurs de leurs propres peuples.

Le mensonge est aujourd’hui partout au niveau international, alors que dans nos sociétés autochtones, la vérité était une valeur sacrée. En matière de sécurité, on nous dit par exemple que la construction de boucliers antimissiles et d’arsenaux nucléaires est le seul moyen qui peut garantir la paix. Mais les dirigeants ont-ils pensé que si tout le monde acceptait de se désarmer, la paix serait alors véritablement universelle? Nous sommes las de la vision paternaliste du monde que les prétendues grandes nations et grands leaders veulent imposer à tous les peuples. C’est encore là l’expression d’un mensonge officialisé. A quoi servent les recommandations et les plans d’action que nous élaborons tous les jours? Qui doit les appliquer? Et comment? Sont-ils réalistes? Sur le plan social par exemple, nos civilisations n’ont jamais eu la notion de “maisons pour les personnes âgées”. Mais les plans d’action internationaux, adoptés après des conférences internationales prétendent inculquer et imposer cette notion à tout le monde. Nous sommes convaincus qu’aujourd’hui les “sociétés primitives” sont celles qui vivent une vie civilisée, contrairement à celles qui confondent la connaissance scientifique et la simple éducation scolaire avec la sagesse. Ce que nous demandons, c’est que l’on laisse nos terres et leurs ressources naturelles en paix. Et que l’on nous en laisse l’entière propriété, au lieu de prétendre nous imposer de prétendus “nouveaux modes de création de richesses”, inhumains et exploiteurs.

M. KUMI NAIDOO, Secrétaire général de CIVICUS : World Alliance for Citizen Participation, a affirmé qu'avec l’augmentation de l’influence de la société civile, les ONG doivent aussi accepter le fait qu’elles ont davantage de responsabilités et s’assurer qu’elles respectent la plus grande transparence et rendent des comptes. Il faut également élire des gouvernements responsables. Par ailleurs, la société civile doit établir activement ses normes de fonctionnement afin de déterminer, notamment, jusqu’où elle doit aller pour obtenir des fonds. M. Naidoo a appelé les ONG à participer à l’élaboration de la politique et à veiller à ne pas se limiter à constituer une main-d’oeuvre bon marché au service du reste de la société. La participation du citoyen aux institutions politiques est importante et les ONG peuvent refléter leurs intérêts et relever des défis en leur faveur, a-t-il ajouté.

M. Naidoo a ensuite rappelé que l’âge moyen de la population mondiale est de 25 ans et que la population des pays en développement est majoritairement jeune, ce qui pose un grand nombre de défis aux ONG, qui doivent également réfléchir à leur avenir.

En matière d’égalité des sexes, M. Naidoo a appelé les ONG à faire mieux que les gouvernements et les institutions internationales. Il a estimé que les problèmes de parité touchent autant les pays du Nord que ceux du Sud. Pour faire avancer le débat, il faut reconnaître les contradictions auxquelles le réseau d’organisations du monde entier se heurte. En tant que représentant d’une ONG issue d’un pays en développement, il a souligné les atteintes à la libre circulation des personnes qui se matérialisent notamment dans le traitement des demandeurs de visas, traités comme des “sous-êtres humains”.

Rappelant que le Ku Klux Klan en fait partie, le représentant a également estimé qu’il faut préciser la définition de la société civile. M. Naidoo a conclu en déclarant que l’inégalité augmente de plus en plus, que le niveau de bien-être dans le monde n’augmente pas, et qu’il est donc flagrant que les gouvernements et les autorités mondiales en place ne sont pas en mesure d’améliorer cette situation eux-mêmes. Dans ce contexte, la tâche de la société civile est peut-être d’aider les pauvres à accéder au pouvoir.

Dialogue

Répondant aux différentes questions posées par les ONG à l’intention de la Banque mondiale, M. Mats Karlsson a dit, parlant de la question de la dette que les racines en étaient profondes et anciennes. Les initiatives prises par la Banque en faveur de la réduction de la dette ont été jugées insuffisantes par de nombreux observateurs. Le sommet des institutions de Bretton Woods qui se tiendra à Prague le mois prochain, se penchera sur cette question, et la Banque espère qu’à la fin de l’année elle aura conclu des accords sur son initiative PPTE (initiative de réduction de la dette en faveur des pays pauvres très endettés) avec 20 pays, leur permettant de sortir de la crise de la dette qu’ils traversent. La question la plus difficile à résoudre par l’initiative PPTE est celle d’un accès des pays qui y sont éligibles aux capitaux libres du marché. Les capitaux à long terme seront difficiles à obtenir pour ces pays. C’est pour cela que certaines nations, comme le Ghana, ont décidé de ne pas se porter candidats à l’initiative PPTE, en vue de préserver leurs chances d’accès au marché des investissements financiers à long terme.

Concernant les questions relatives à l’exploitation des ressources naturelles et à la préservation de l’environnement, la Banque se penche sur la manière de trouver des sources de financement d’un développement durable et respectueux de l’environnement. La conférence qui devrait se tenir l’année prochaine sur le financement du développement examinera et résumera les mesures qui pourraient permettre d’avancer dans la résolution du manque de ressources en faveur du développement. Cela s’impose face à la baisse drastique de l’aide publique au développement. La Banque travaille à cet égard de très près avec le système de l’ONU, notamment à travers la collaboration qu’elle a établi avec le Conseil économique et social (ECOSOC). S’agissant des questions liées à l’amélioration et au renforcement du capital social, elles sont plus difficiles à résoudre. Un renforcement du capital social de différentes sociétés ou pays court le risque de devenir source de conflits s’il ne se fait pas de manière coordonnée entre ces sociétés qui, inéluctablement, vont finir par devenir rivales à la fois sous l’aspect de la production, mais aussi sur l’accès à des marchés qui restent toujours limités. Concernant la corruption, la Banque en parle aujourd’hui, alors qu’auparavant c’était un mot tabou que ses Etats membres ne voulaient pas entendre. La Banque multiplie, d’autre part, l’injection de financements dans le secteur social, les mécanismes de l’économie de marché ne pouvant en eux-mêmes prévoir et assumer des investissements et un développement des structures sociales.

L’augmentation de la pauvreté rend indispensables ces investissements, qui représentent aujourd’hui 22% des interventions de la Banque. La mondialisation ne doit pas être perçue comme l’ennemie des peuples, mais plutôt comme un processus générateur d’opportunités. Le téléphone cellulaire, qui pour nous est le symbole de cette mondialisation, traduit son caractère universel et sans frontières.

En réponse à une question sur la validité de l’expérience de Vanuatu pour le reste du monde, Mme MOTARILAVOA HILDA LINI a estimé que chaque pays doit examiner les faiblesses de sa propre société et de ses communautés locales pour savoir comment y remédier. Les mesures préconisées pour le Vanuatu ne pourraient évidemment pas s’appliquer aux Etats-Unis où la cohésion sociale et la spiritualité ne sont pas comparables. Les situations dans lesquelles des chefs tribaux ont pris des décisions préjudiciables à leur population et à leur pays sont le produit d’une confusion entre la civilisation occidentale, qui leur a été imposée, et les valeurs autochtones. Aujourd’hui, certains chefs sont justes et ont des valeurs solidement ancrées tandis que d’autres sont faciles à manipuler et à corrompre. Nous avons besoin de chefs qui soient remplis de sagesse, qui possèdent une vision de la reconstruction de la société et qui soient honnêtes. A l’époque des médias, la transmission de la sagesse se fait encore, dans certaines sociétés, par l’intermédiaire des anciens. Refléter cette sagesse dépend des enjeux des personnes qui détiennent le pouvoir dans les médias ou dans l’éducation.

Poursuivant les réponses aux questions, M. Kumi Naidoo a tenu à réaffirmer le rôle que, selon lui, les femmes doivent jouer dans leurs communautés en matière de leadership. Il faudrait faire en sorte que les femmes soient représentées à tous les niveaux de réflexion et de prise de décision des Etats, des Parlements et des organisations de la société civile, a-t-il estimé. Parlant ensuite des jeunes, il a déploré que ceux des pays en développement soient laissés en dehors de la révolution actuelle des technologies de la communication. Concernant la représentation de la société civile à l’ONU, il a mis en garde contre une trop forte institutionnalisation de cette représentation qui pourrait simplement mener à de nouvelles bureaucraties.

Pourquoi, d’autre part, ne pas concevoir une représentation démocratique des peuples et des nations à l’ONU? Pourquoi cinq pays auraient-ils le droit de veto au Conseil de sécurité aujourd’hui du seul fait qu’ils étaient en position plus ou moins de force au lendemain de la deuxième guerre mondiale? Concernant les problèmes des femmes, ils ne seront pas résolus sans un honnête engagement des hommes et un changement drastique de leur mentalité et de celle des mères, qui éduquent à la fois les petits garçons et les petites filles selon des schémas stéréotypés.

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