FEM/1108

CEDAW: LE CAMEROUN DEVIENT PLUS SENSIBLE AUX QUESTIONS LIANT LE DEVELOPPEMENT ET LA PARITE ENTRE LES SEXES, DECLARE LA MINISTRE

26 juin 2000


Communiqué de Presse
FEM/1108


CEDAW: LE CAMEROUN DEVIENT PLUS SENSIBLE AUX QUESTIONS LIANT LE DEVELOPPEMENT ET LA PARITE ENTRE LES SEXES, DECLARE LA MINISTRE

20000626

“Le Cameroun a créé un environnement favorable à l’épanouissement de la femme camerounaise et notre société devient de plus en plus sensible aux questions de genre et de développement” a déclaré, ce matin, Mme Julienne Ngo Som, Ministre de la condition féminine du Cameroun, qui présentait les réponses de son pays aux questions des expertes du Cedaw qui avaient examiné le rapport initial du Cameroun le 20 juin (voir nos communiqués FEM/1101 et FEM/1002). Donnant les détails du plan d’action national de promotion de la femme, elle a indiqué que la Commission chargée de la révision de la législation civile devrait achever l’étude du Code de la famille à la fin du mois de juin 2000 et envoyer son projet auprès des autorités compétentes pour qu’il soit déposé devant l’Assemblée nationale.

La Ministre de la condition féminine a précisé que son Ministère disposait pour l’exercice 2000-2001 d’un budget de 2,3 milliards de francs CFA, ce qui révèle une augmentation de 30 % par rapport à l’année dernière, provenant directement des ressources allouées par l’Etat. Elle a ajouté qu’en 1999, la contribution de l’Etat aux projets de coopération avec les institutions des Nations Unies (PNUD, FNUAP, UNICEF), sous forme de fonds de contrepartie, s’est élevée à 145 millions de francs CFA. Les effectifs du Ministère se composent de quelque 600 personnes réparties dans les services administratifs et les structures techniques d’encadrement, reconnaissant toutefois qu’il était nécessaire d’améliorer les compétences et que les trois quarts du budget de l’Etat étaient consacrés aux salaires et au fonctionnement des services et qu’un tiers seulement était réservé aux projets d’encadrement des femmes sur le terrain.

Face aux inquiétudes exprimées par les expertes dans le domaine de la santé et de l’éducation, la Ministre a également présenté les actions de son Gouvernement en insistant sur sa volonté politique. Elle a précisé que le Ministère de l’éducation nationale avait, cette année, « reçu la plus forte enveloppe budgétaire ». Elle a également expliqué la politique de partenariat du Ministère de la santé avec l’Organisation mondiale de la santé, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance, et diverses institutions spécialisées, ainsi que le fonctionnement du comité chargé d’appliquer le Programme national de lutte contre le sida. Sur la situation des femmes rurales, la Ministre a fait part des initiatives visant à favoriser l’accès des femmes rurales au crédit ou au microfinancement et a expliqué le fonctionnement des tontines qui sont plus répandues dans les villes.

Le Comité entendra, demain 27 juin à 10 heures, les réponses de la République de Moldova qui avait présenté son rapport initial, mercredi 21 juin dernier (voir nos communiqués FEM/1103 et FEM/1104).

SUITE DE L’EXAMEN DU RAPPORT INITIAL DU CAMEROUN

La première partie de l’examen des rapports du Cameroun figure dans nos communiqués du 20 juin dernier (FEM/1101 et FEM/1102)

Réponses de l’Etat partie

Répondant aux questions posées par les expertes du Comité lors de la présentation du rapport initial du Cameroun, Mme JULIENNE NGO SOM, Ministre de la condition féminine du Cameroun, a souligné que les obstacles entravant l’avancement des femmes existent depuis des siècles. Certains sont ancrés dans les mentalités et, par conséquent, très difficiles à enrayer. Il n’est donc pas question de donner un calendrier précis. Elle a insisté sur la volonté politique du Gouvernement, et sur le fait que le cadre constitutionnel est implant et que les plans d’action sont mis en œuvre. La représentante a assuré le Comité que des évaluations périodiques seraient faites pour mesurer les progrès accomplis.

La Ministre a déclaré que, malgré un contexte macro-économique défavorable lié à la crise économique et au fardeau de la dette, le Gouvernement camerounais a fait beaucoup d’efforts pour l’amélioration de la situation des femmes dans plusieurs domaines critiques du Programme d’action de Beijing. Le Gouvernement a créé un environnement favorable à l’épanouissement de la femme camerounaise. Notre société devient de plus en plus sensible aux questions sexospécifiques et de développement et la majorité des Camerounais sait aujourd’hui que les femmes ont des droits, qu’il faut les respecter et qu’il faut éliminer les violences et les discriminations dans tous les secteurs clés, notamment l’emploi, la politique et la santé.

La Ministre a déclaré que, pour que les programmes de coopération contribuent à la réalisation des droits des femmes, il convient d’y intégrer la composante “genre”. C’est le cas avec le Programme global pour l’avancement des femmes et l’Egalité de Genre mis en place en coopération avec le PNUD, le programme du FNUAP sur la santé reproductive, sans oublier tous les projets et programmes concernant la lutte contre la pauvreté financés par l’Union Européenne, la BAD et l’IFAD. Pour sa part, le Ministère de la Condition féminine veillera à ce que les femmes bénéficient réellement de ces programmes et une étude de leur impact sur l’amélioration des conditions de vie de la femme sur l’ensemble du territoire va être lancée.

Mme Ngo Som a précisé que, dès lors qu’elle a été ratifiée, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes fait partie de l’arsenal juridique du Cameroun et peut être invoquée devant les tribunaux par tous les citoyens camerounais sans distinction quant au sexe. Elle a indiqué que la Commission chargée de la révision de la législation civile, créée en 1993, est chargée depuis février 2000 de préparer l’élaboration d’un Code de la famille. Cette Commission veille à ce que les dispositions de la CEDAW soient intégrées dans ce projet. Elle devrait achever ses travaux en juin 2000.

Les organisations non gouvernementales (ONG) et les associations professionnelles constituent des groupes de pression non négligeables et le Ministère de la Condition féminine poursuivra son partenariat avec ces institutions nationales, non seulement pour accélérer le processus de modification des lois existantes mais aussi pour en proposer d’autres plus répressives. La Ministre a signalé que tous les citoyens camerounais, sans distinction de sexe, peuvent avoir recours aux juridictions camerounaises.

En ce qui concerne les rapports entre le Comité consultatif des femmes et le Ministère de la condition féminine, Mme Ngo Som a expliqué que le Comité a été créé en 1984, en même temps que le Ministère de la Condition féminine, pour accélérer la promotion de la femme. En principe, le Comité devait travailler en étroite collaboration avec le Ministère mais, après avoir tenu trois réunions, il n’a malheureusement plus jamais fonctionné. Sa remise en activité constitue l’une des actions prioritaires de la stratégie du Ministère de la Condition féminine.

La représentante a apporté des précisions sur le budget du Ministère de la Condition féminine dont le budget pour l’exercice 2000/2001 tourne autour de 2.300.000.000 FCFA (environ 383 333 333,33 Dollars) et a augmenté de 30% par rapport à l’année dernière. Le budget du Ministère provient des ressources allouées par l’Etat et ne comprend pas d’apports extérieurs. En 1999, la contribution de l’Etat aux projets de coopération avec les institutions des Nations Unies (PNUD, FNUAP, UNICEF), sous forme de fonds de contrepartie, s’est élevée à 145 000 000 FCFA (environ 24 166 666,66 Dollars). La Ministre de la Condition féminine a souligné que les trois quart du budget de l’Etat sont consacrés aux salaires et au fonctionnement des services administratifs, et qu'un tiers est réservé aux projets d’encadrement des femmes sur le terrain. Ma politique est d’inverser la situation, a-t-elle déclaré, car si nous voulons améliorer la situation de la femme camerounaise, nous devons augmenter le budget des structures d’encadrement et celui alloué à la formation, à l’information, au renforcement des capacités, à la santé et à l’éducation des femmes.

Le Ministère de la Condition féminine dispose d’environ 600 employés, répartis dans les services administratifs et les structures techniques d’encadrement, a poursuivi Mme Ngo Som. Elle a reconnu qu’à l’heure actuelle, il existe un déséquilibre sur le plan socioprofessionnel qu’elle s’efforcera de corriger en attirant toutes les compétences requises pour la promotion de la femme au sein de son Ministère. Dans le cadre de la lutte contre la pauvreté, l’amélioration de la santé et l’allègement du travail des femmes, il faudra également mettre l’accent sur les cadres ayant une formation scientifique et technologique.

Répondant aux questions sur les mesures adoptées pour pallier aux effets des politiques d’ajustement structurel, la Ministre a expliqué que le Gouvernement avait été amené à réviser les horaires de travail et à instituer la journée continue. Des campagnes ont été menées pour inciter à la consommation de produits locaux et le contrôle des prix a été intensifié. Des réformes portant sur la liberté d’association ont permis aux femmes de se regrouper en coopératives, en groupes d’initiatives communes et d’intérêts communs. Des structures de financement ont également été mises en place pour soutenir ces initiatives. Elle a cité notamment le Fonds d’appui aux organisations rurales, le Crédit rural décentralisé, le Fonds national de l’emploi, les coopératives d’épargne et de crédit, le Projet femmes-population et développement qui finance les activités génératrices de revenus des femmes, le Projet microprojets en faveur des femmes, le Programme des Premières Dames d’Afrique pour la promotion économique des femmes rurales.

Expliquant le fonctionnement du régime de protection sociale, la Ministre a indiqué qu’il n’existe pas de service de sécurité pour les chômeurs et que la sécurité sociale est basée sur l’épargne des individus exerçant un emploi rémunéré. La femme rurale ne remplissant pas ces conditions, elle a expliqué l’action engagée par la Première Dame du Cameroun afin d’alléger le travail des femmes rurales et de lutter contre la pauvreté. Ce programme permet de distribuer aux femmes rurales du matériel de production et de transformation alimentaire, des machines à coudre, etc. Notant que les femmes rurales n’ont pas accès au crédit, la Ministre a fait part de la mise en place d’un fonds pour le financement des activités génératrices de revenus qui dispose pour l’exercice en cours de 100 000 000 francs CFA. Elle a également expliqué le fonctionnement des tontines qui sont plus répandues dans les villes que dans les campagnes et servent à financer des activités génératrices de revenus ou des investissements dans la production de biens ou de services.

Abordant les questions de la violence contre les femmes, particulièrement au sein de la famille, et de la lutte contre les stéréotypes, Mme Ngo Som a précisé que le Ministère de la condition féminine annexera aux centres de promotion de la femme des services d’accueil pour les femmes victimes de violence. Elle a apporté des précisions sur l’action des associations camerounaises, notamment de SOS femmes battues, et d’autres associations professionnelles qui apportent leur appui aux femmes. Dans le cadre de la lutte contre les stéréotypes, la Ministre a fait part d’actions visant à améliorer le statut juridique de la femme et d’études menées par l’observatoire sur la femmes qui aideront à élaborer des actions spécifiques.

Pour ce qui est de la polygamie, Mme Ngo Som a déclaré qu’elle avait été légalisée par une ordonnance de 1981, mais que le Gouvernement prendra des mesures juridiques et législatives contre les mariages polygamiques précoces et forcés. Sur la question de l’âge nubile, la Commission des réformes de la législation civile a retenu 18 ans pour les filles et pour les garçons. La Ministre a assuré que son Ministère veillera à l’application de cette mesure et continuera ses campagnes d’information sur ce sujet. Sur la question des droits de successions des enfants illégitimes, la Ministre a reconnu que son Ministère devrait se pencher sur cette question car les dispositions en vigueur reconnaissent des droits réduits aux enfants nés hors-mariage. En ce qui concerne la politique de planification familiale du Cameroun, la Ministre a rappelé que son pays avait adopté une déclaration de politique générale sur la population en 1992 dont la révision est à l’étude. Il existe des centres de planification sur l’ensemble du territoire et plusieurs ONG travaillent dans ce domaine.

Répondant aux questions sur le domaine de l’éducation, la Ministre a fait valoir les résultats des actions engagées par son Gouvernement, indiquant que les taux de scolarisation des filles était de 86,80% en 1995/6, de 72,10% en 1997/8 et de 73,38 en 1998/9. Elle a expliqué la baisse enregistrée à partir de 1991 par les effets conjugués de la réduction des salaires et de la dévaluation du franc CFA en raison de la crise économique. Soulignant la volonté politique de son Gouvernement dans ce domaine, elle a indiqué que le Ministère de l’éducation avait reçu cette année la plus forte enveloppe budgétaire. Elle a présenté plusieurs initiatives destinées à encourager les filles à embrasser des carrières scientifiques.

Présentant les efforts faits par son pays pour lutter contre la prostitution, Mme Ngo Som a dit qu’une étude était actuellement menée par plusieurs ministères, expliquant que l’accent était mis sur l’éducation, la lutte contre la pauvreté et la sensibilisation de tous les intervenants sociaux. Elle a expliqué que la loi camerounaise pénalise également le client et que le Code pénal prévoit la fermeture des maisons closes.

Sur la participation des femmes à la vie politique et publique du pays, la Ministre a estimé que les femmes camerounaises se montrent très actives dans ce domaine, notamment dans le parti au pouvoir qui a une branche féminine. Seules les pesanteurs sociologiques bloquent encore la participation massive des femmes et de nombreuses associations travaillent dans ce domaine. Les femmes sont en outre nombreuses dans l’armée et la police. En revanche, il n’y a pas de femmes occupant des postes de commandement dans l’administration territoriale. Elle a expliqué que de nombreuses femmes chefs de foyer n’ont pas la formation suffisante pour occuper un emploi et travaillent principalement dans l’agriculture et le secteur informel.

Répondant aux questions portant sur la santé des femmes et la lutte contre la pandémie du VIH/sida, la Ministre a donné des détails sur la politique sectorielle qui vise à faciliter l’accès des populations défavorisées aux soins de santé primaires et se fonde sur un système de districts de santé gérés de manière communautaire. Elle a cité divers programmes de vaccination et des partenariats avec les institutions internationales spécialisées. Pour lutter contre le VIH/sida, le Gouvernement a créé un comité chargé d’appliquer le Programme national de lutte contre le sida qui vise surtout à sensibiliser les groupes de population les plus vulnérables, ainsi que les leaders traditionnels et les autorités religieuses. Elle a également donné des précisions sur les actions de son pays visant à pallier au manque d’eau potable. En conclusion, elle a souligné la volonté politique de son Gouvernement et a estimé que si le Cameroun bénéficiait de l’Initiative en faveur des pays très endettés, des sommes importantes seraient dégagées pour accélérer la mise en œuvre des programmes engagés.

Mme AHOUA OUEDRAOGO, experte du Burkina Faso, a réitéré les félicitations du Comité au Cameroun pour la création d’un Plan d’action et la création de points focaux dans les différents ministères pour accélérer la promotion de la femme. Elle a encouragé le Gouvernement à accélérer les mesures législatives destinées à lutter contre certaines manifestations traditionnelles, notamment la polygamie, les mutilations génitales et le lévirat, une coutume qui fait de l’épouse une propriété de son mari revenant au son frère ou au cousin de l’époux lorsqu’elle devient veuve. Les programmes spéciaux à l’intention des femmes rurales que le Gouvernement compte mettre en place grâce à des fonds spéciaux représentent également des mesures positives, ainsi que l’attribution du budget le plus élevé au secteur de l’éducation, clé pour les femmes de l’instauration d’une réelle égalité des chances. Mme Ouedraogo a appelé la Ministre de la Condition féminine camerounaise à insister afin de pouvoir accélérer les progrès en cours et a recommandé que le Cameroun présente au plus tôt ses second et troisième rapports périodiques combinés.

Mme CHARLOTTE ABAKA, experte du Ghana, a espéré que l’important budget alloué par le Gouvernement camerounais au secteur de l’éducation permettront aux filles non seulement de s’inscrire à l’école mais aussi de continuer à la fréquenter jusqu’à l’âge prévu pour l’instruction obligatoire, sans devoir la quitter pour faire les récoltes ou d’autres travaux. Il conviendrait donc d’inciter les familles camerounaises à laisser leurs filles aller à l’école. Mme Abaka a également été d’avis qu’il est important de diffuser les résultats du dialogue entre le Gouvernement camerounais et le CEDAW dans l’ensemble de la population, y compris les hommes, afin que la population commence elle aussi à réfléchir à des solutions au problème de la discrimination à l’égard des femmes. Ainsi, lorsque le Gouvernement établira son prochain rapport, les Camerounais sauront les progrès qui ont été réalisés. Cette diffusion pourrait notamment être facilitée par la tenue d’ateliers. Mme EMMA AOUIJ, experte de la Tunisie, a insisté que la Loi est la base juridique indispensable pour mobiliser les énergies et joue un rôle de catalyseur pour toute la société. La loi est capable de faire évaluer les mentalités. Elle a estimé qu’il faut des lois contraignantes pour faire évoluer la situation, notamment pour assurer le maintien des filles à l’école.

Mme AIDA GONZALEZ MARTINEZ, experte du Mexique et Présidente du Comité, s’est félicitée des diverses preuves de la volonté politique du Cameroun qui ont été apportées au Comité. Revenant sur le processus d’élaboration des rapports, elle a insisté qu’il faut solliciter la participation de tous les intervenants sociaux ce qui permet en outre de les sensibiliser à l’application de la Convention. Elle s’est félicitée de l’adoption d’un mécanisme institutionnel aussi fort que la création d’un Ministère spécialisé comme celui de la condition féminine et de son action pour intégrer une perspective de genre dans tous les programmes et politiques du son Gouvernement. Elle a encouragé Mme Ngo Som à diffuser largement les questions soulevées par le Comité.

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