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FEM/1106

LA SEPARATION ENTRE EGALITE DES SEXES ET DROITS DE L'HOMME A FORGE DES STEREOTYPES AU COURS DU REGIME PRECEDENT, DECLARE LA DELEGATION ROUMAINE

23 juin 2000


Communiqué de Presse
FEM/1106


LA SEPARATION ENTRE EGALITE DES SEXES ET DROITS DE L’HOMME A FORGE DES STEREOTYPES AU COURS DU REGIME PRECEDENT, DECLARE LA DELEGATION ROUMAINE

20000623

“La Roumanie sort d’un système dans lequel la politique d’égalité entre les sexes était dissociée des droits de l’homme, ce qui a contribué à créer des stéréotypes et une certaine méfiance à l’égard des débats sur la sexospécificité”, a déclaré, ce matin, Mme Norica Nicolai, Secrétaire d’Etat au Ministère de l’Emploi et de la protection sociale de Roumanie, en présentant devant le Comité sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes les quatrième et cinquième rapports combinés sur l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes en Roumanie. Elle a indiqué que les formalités préparatoires à la signature et à la ratification du Protocole facultatif relatif à la Convention étaient en cours en Roumanie.

Décrivant la situation des femmes dans son pays, la Secrétaire d’Etat a souligné les effets négatifs de la transition et du processus de réforme économique sur le niveau de vie des Roumains et, plus particulièrement, des Roumaines. Au niveau législatif, a-t-elle indiqué, la Constitution, le Code de la famille et le Code du travail garantissent clairement l’égalité des droits, et une loi sur l’égalité des chances entre hommes et femmes est à l’étude. En outre, depuis mars 2000, la Direction de l’égalité des chances du Ministère de l’Emploi et de la protection sociale s’assure de l’accès réel et non discriminatoire des femmes au marché du travail, propose des mesures d’amélioration du cadre légal et formule des propositions en collaboration avec les autres structures gouvernementales et non gouvernementales. Mme Nicolai a expliqué que l’un des quatre départements du Bureau de l’Avocat du peuple protège, depuis décembre 1998, les droits des enfants et des femmes et a reçu, en 1999, 1348 plaintes émanant de femmes sur 4380 plaintes.

Cependant, la représentante a reconnu que les femmes n’accèdent pas encore aux postes de prise de décisions, que ce soit dans les partis politiques, au Gouvernement, dans le secteur de l’éducation ou dans le secteur public ou privé. En outre, le niveau des salaires est bas dans les secteurs où elles sont majoritaires, soit la santé avec 77,7 % de femmes et l’éducation qui en compte 68,1 %. Mme Nicolai a fait part de problèmes liés à la violence à l’égard des femmes ainsi qu’à la prostitution et à la traite des femmes, qui sont d’autant plus difficiles à éliminer qu’ils sont liés à la baisse du niveau de vie et à l’augmentation du chômage. A cet égard, la représentante a indiqué que le taux de chômage des femmes est passé de 10,3 % en décembre 1995 à 11,2 % en avril 2000.

Au cours du dialogue qui a suivi entre la délégation roumaine et les expertes du Comité, Mme Ivanka Corti, Experte de l’Italie, ainsi que Mme Naela Gabr, experte de l’Egypte, ont rappelé que la Convention demande que l’égalité des femmes et des hommes soit réalisée de jure et de facto et a estimé que l’écart qui subsiste entre le droit et les faits en Roumanie révèle des failles dans la politique du Gouvernement. Mme Corti a regretté l’absence d’organe chargé de centraliser et de coordonner l’action des diverses instances chargées de la promotion de la femme et de l’égalité des chances, qu’elle a jugé trop nombreuses. De même, elle a demandé à ce que la loi sur le harcèlement sexuel soit adoptée rapidement et a rappelé que l’adoption de la loi sur l’égalité des chances est à la base de toute action visant à réaliser l’égalité entre les sexes. Elle a également voulu savoir comment le Gouvernement entendait régler le problème du chômage des femmes.

Abordant la question de la santé des femmes, Mme Corti a estimé que les termes de l’article 12 de la Convention ne sont pas respectés. Au vu du nombre d’avortements important, notamment des avortements clandestins qui sont pratiqués en dépit de la loi sur la question, le taux de mortalité maternelle élevé, du nombre d’infections au VIH/sida, elle a voulu connaître les détails de l’action du Ministère de la santé. D’autre part, elle a demandé à savoir la raison pour laquelle le projet, visant à reculer l’âge nubile des filles à 18 ans au lieu de 16, actuellement, avait été rejeté par le Parlement.

Le Comité poursuivra, cet après-midi à 15 heures, l’examen des quatrième et cinquième rapports périodiques combinés de la Roumanie.

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 18 DE LA CONVENTION SUR L’ELIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION A L’EGARD DES FEMMES [4]

Quatrième et cinquième rapports périodiques de la Roumanie (CEDAW/ROM/4 et 5)

Le présent rapport décrit l’évolution de la situation en Roumanie en matière d’application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes depuis novembre 1992 jusqu’à mars 1999. Les femmes représentent 50,6% de la population en Roumanie. En octobre 1995, des structures responsables de la promotion et du respect des droits de la femme ont été établies en créant le Département pour la promotion des droits de la femme et pour la coordination des politiques familiales au sein du Ministère du travail et de la promotion sociale. Ce département est dirigé par une Secrétaire d’Etat. Au niveau du Parlement, on a créé une Sous-Commission parlementaire pour l’égalité des chances entre hommes et femmes. En outre, un projet de loi sur l’égalité des chances a été adopté par le Gouvernement en mai 1998. Toutefois, le phénomène de la discrimination à l’égard des femmes continue de se manifester en Roumanie, notamment à cause de mentalités traditionnelles très discriminatoires. Ainsi, la présence des femmes dans la vie publique et politique reste faible.

Parmi les problèmes auxquels sont confrontées les femmes de Roumanie, le rapport met l’accent sur le chômage et la violence. La période actuelle de transition et les changements économiques radicaux qui sont intervenus en Roumanie ont entraîné une dégradation des relations sociales. Les femmes sont les plus exposées aux licenciements, à l’emploi temporaire, au sous-emploi et au manque de couverture sociale. A la fin du mois de juin 1998, les femmes représentaient 48,5% du total des chômeurs. Le salaire moyen des femmes est inférieur de 10,9% à celui des hommes. Le phénomène de la violence familiale est en augmentation constante, et le rapport souligne que les victimes n’ont généralement pas les moyens d’engager des poursuites. A ces phénomènes qui contribuent à la marginalisation des femmes, s’ajoute celui de la prostitution et du proxénétisme. Pour la période allant de 1990 à 1995, la police a enregistré 2 024 prostituées, dont 524 mineures. Cette pratique s’est répandue et a pris la forme d’entreprises privées qui s’occupent du placement des jeunes femmes dans des réseaux nationaux et étrangers. Le Ministère de la santé a élaboré un projet de légalisation pour lutter contre la prostitution. La lutte contre la pornographie pâtit du fait que le cadre juridique est déficitaire et que les dangers de ce phénomène n’ont pas été pleinement évalués.

Liste des thèmes et questions en vue de l’examen des quatrième et cinquième rapports périodiques combinés de la Roumanie (CEDAW/PSWG/2000/II/CRP.1/Add.4)

Le groupe de travail présession relève, dans ce document, l’absence de statistiques ventilées selon le sexe dans les domaines de l’éducation, de l’emploi, de la santé, en particulier du VIH/sida, et concernant les femmes rurales. Il relève également le peu d’informations fournies sur l’impact de la nouvelle législation, des politiques et des programmes.

En ce qui concerne l’intégration du principe de l’égalité entre les sexes dans la législation roumaine, le groupe de travail demande si le texte de la Convention a été traduit en langue roumaine ainsi que dans les langues des minorités ethniques et si les autorités roumaines ont procédé à un examen systématique de tous les codes de loi roumains en ce qui concerne l’égalité entre les sexes. Le groupe de travail pose également des questions sur les structures mises en place pour promouvoir des politiques en faveur des femmes et de leur participation à la vie politique, et notamment sur le nombre de plaintes qui ont été soumises au médiateur portant sur la discrimination sexuelle ainsi que sur le harcèlement sexuel de la part des autorités publiques. Le Gouvernement est invité à fournir des renseignements sur les mesures prises pour augmenter le nombre de femmes dans la politique aux niveaux national et local ainsi que dans l’administration.

Pour ce qui est de la violence à l’égard des femmes, de la prostitution et du trafic de femmes, le groupe de travail demande quel est exactement le message didactique destiné aux très jeunes femmes concernant la violence à l’égard des femmes, et comment ces jeunes femmes sont formées pour s’en protéger. Le groupe de travail demande également des précisions sur la situation des filles vivant dans les rues. Il souhaite savoir si le Gouvernement a l’intention de légaliser la prostitution et d’adopter une loi spécifique interdisant et réprimant le trafic des femmes.

Au sujet de l’application des articles de la Convention sur l’éducation et sur l’emploi, le groupe de travail demande des précisions sur les taux de fréquentation scolaire des filles roms et des informations sur les efforts du Gouvernement pour alphabétiser la population rom, entre autres. Il demande si les cours sur les droits de l’homme sont obligatoires dans les facultés de droit, les écoles de police et à l’Ecole supérieure de la magistrature ainsi que pour les professions de santé.

Le groupe de travail s’enquiert des écarts de salaire entre les hommes et les femmes dans les différents secteurs du marché du travail. La santé des femmes rurales, des mères célibataires et des femmes âgées fait également l’objet de plusieurs questions.

Présentation du rapport de l’Etat partie

Présentant le quatrième rapport périodique de la Roumanie, Mme NORICA NICOLAI, Secrétaire d’Etat au Ministère de l’emploi et de la protection sociale de Roumanie, a rappelé que la ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, en 1981, par son pays était l’une des 20 premières. La Roumanie a levé, en 1990, sa réserve à l’article 29 de la Convention. La Constitution de la Roumanie facilite l’intégration législative des dispositions des instruments internationaux des droits de l’homme en leur accordant, dans son article 20, la priorité sur les lois nationales. Le Programme adopté par le Gouvernement pour la période 2001-2004 est axé sur la justice et la cohésion sociale, y compris à travers l’application du principe de l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. La Secrétaire d’Etat a souligné la complexité du processus de réforme qui se déroule en Roumanie ainsi que les difficultés liées à la transformation d’une société étatique en une société démocratique.

Présentant le cadre législatif d’application de la Convention, Mme Nicolai a déclaré que la législation roumaine ne permet pas de discrimination. La Constitution contient des dispositions claires sur l’égalité des droits quels que soient la race, la nationalité, l’origine ethnique, la langue, la religion et le sexe. Le Code de la famille établit des droits et des obligations égaux dans le mariage. Le Code du travail garantit l’égalité des hommes et des femmes concernant l’accès à l’emploi, les salaires ainsi que la couverture sociale. En 1999, une loi sur le congé parental du père favorisant la prise de responsabilité du père au sein de la famille est entrée en vigueur. Une loi sur l’égalité des chances des hommes et des femmes est actuellement à l’examen au Parlement.

Pour ce qui est des structures institutionnelles chargées de l’avancement de la femme, la représentante a signalé que l’ancien Département de la promotion et de la protection des droits des femmes a été remplacé, en 1998, par la Direction de l’égalité des chances. Depuis mars 2000, cette structure se trouve sous la coordination du Ministère de l’emploi et de la protection sociale. La Direction est notamment chargée de s’assurer du respect de facto du principe de l’accès non discriminatoire au marché du travail ainsi que l’amélioration de leurs conditions de travail; de proposer des mesures d’amélioration du cadre légal en vue d’améliorer la réalisation des droits de l’homme des femmes; d’élaborer des rapports et des études sur la situation des femmes et de formuler des propositions en collaboration avec les autres structures gouvernementales et non gouvernementales.

La représentante a estimé que les différentes autorités publiques responsables des questions relatives aux femmes doivent encore améliorer leur coopération dans le cadre de l’application des politiques et des mesures. Elle a signalé la mise en place du Bureau de l’Avocat du peuple dont l’un des quatre départements protège, depuis décembre 1998, les droits de l’homme des enfants et des femmes ainsi que les droits familiaux. En 1999, 1348 des 4380 plaintes que cette institution d’ombudsman a reçues émanaient de femmes. Seuls quelques-uns de ces cas étaient liés à une discrimination à l’égard des femmes.

En ce qui concerne la participation des femmes à la vie politique, la représentante a admis que les femmes sont encore sous-représentées, notamment dans les fonctions à responsabilité élevée. Bien qu’un grand nombre de femmes figure dans l’un des neuf partis politiques nationaux, elles n’accèdent pas à des postes de prise de décision. Dans les structures gouvernementales, les femmes sont également peu représentées. On compte 5 femmes vice-ministres et 2 femmes ministres.

Abordant la question de la violence à l’égard des femmes, Mme Nicolai a déclaré que, par manque de visibilité, la violence familiale est un problème très difficile à éliminer. La pauvreté, la baisse du niveau de vie et le chômage sont des facteurs aggravants. La loi roumaine ne contient pas de dispositions condamnant la violence familiale en tant que telle mais ses manifestations sont punies par des articles du Code pénal en tant qu’”atteinte à la personne”, “à la vie, à l’intégrité physique et à la santé”, ou en tant qu’atteintes à “la vie sexuelle”, ou encore en tant qu’infractions à l’ordre public. Le viol et l’agression sexuelle sont sanctionnés par le Code pénal. Pour lutter contre la violence, le Gouvernement a créé un centre pilote de protection et d’assistance aux victimes de violence et un centre d’information et de conseil familial. Il a également l’intention d’amender sa législation afin d’améliorer la protection des victimes de violence familiale et de renforcer sa coopération avec les organisations non gouvernementales et la société civile. La représentante a évoqué le problème de la prostitution et de la traite internationale des femmes et des fillettes. La traite ne fait pas l’objet d’une loi mais le Ministère de la Justice et la Commission des droits de l’homme du Sénat ont proposé au Parlement un amendement du Code pénal allant dans ce sens. Sous les auspices de l’Initiative de Coopération d’Europe du Sud-Est, un Centre régional de prévention et de lutte contre le crime transfrontière a récemment été ouvert à Bucarest et réunit neuf pays de la région ainsi que des envoyés de pays occidentaux. Le Ministère de l’éducation a incorporé dans les programmes scolaires des informations visant à accroître la prise de conscience parmi les jeunes des graves conséquences de la prostitution et de la traite internationale des femmes et des fillettes en vue de leur exploitation sexuelle.

Dans le domaine de l’éducation, il n’y a pas de décalages importants entre les taux d’inscription et d’abandon scolaire des filles et des garçons. Cependant, en dépit de leur présence massive dans le système d’éducation, seul un petit nombre de femmes y occupe une position importante. Il n’y a pas de femmes Secrétaire d’Etat au Ministère de l’éducation nationale, pas de femmes recteur et beaucoup moins de femmes proviseur ou professeur que d’hommes. En outre, le taux d’inscription scolaire des femmes rurales est inférieur à celui des femmes qui vivent en milieu urbain. En 1996, le taux d’inscription scolaire des femmes rurales était de 8,8% et celui des femmes des zones urbaines de 93,2%. Le taux d’analphabétisme féminin est également élevé avec un pourcentage de 4,6% en 1997, comparé à 5% en 1992.

Mme Nicolai a indiqué que la réforme économique en cours a entraîné une augmentation du chômage et une réduction de la sécurité sociale, avec un impact plus fort sur les femmes. Au premier trimestre 1999, les femmes représentaient 45,1% de la population active. Le taux de chômage des femmes est passé de 10,3% en décembre 1995 à 11,2% en avril 2000. Cependant, le développement du secteur privé a profité aux femmes, qui représentent 49% de sa population active, dans des secteurs tels que la banque, le commerce, la santé, le journalisme et la culture. Mme Nicolai a admis que la répartition professionnelle de la population active démontre des disparités car, entre 1997 et 1999, le nombre de femme occupant des postes de responsabilité dans l’administration et dans les affaires est passé de moins de la moitié à un tiers de ces postes. Au début de l’année 1999, les femmes occupaient 77,7% des emplois dans le domaine de la santé et de l’assistance sociale, 68,1% des postes dans l’éducation, 68,1% dans la banque et les assurances, 66% dans le secteur hôtelier et 54,8% dans le commerce.

La transition économique a également provoqué une augmentation du nombre de femmes dans le secteur du travail temporaire, souvent non déclaré, ainsi que du nombre de femmes employées domestiques. En outre, le niveau des salaires est inférieur dans les secteurs où les femmes sont prédominantes. Pour remédier à ces problèmes, le Ministère de l’Emploi et de la protection sociale a mis en place un programme pilote de promotion de l’égalité des chances dans la gestion de l’emploi et le Centre pilote d’information, de conseil et d’appui pour les femmes a été chargé d’aider les femmes sans emploi ou en difficulté dans la province de Prahova. Un autre programme est à l’étude pour encourager les femmes à créer leur propre entreprise et aider les femmes sans emploi à se réinsérer sur le marché de l’emploi.

En matière de santé, Mme Nicolai a révélé que les maladies cardiovasculaires et le cancer sont les premières causes de mortalité chez la femme en Roumanie. Du fait de certaines maladies chroniques et de la baisse du niveau de vie, le taux de mortalité à la naissance est cinq fois plus élevé que dans le reste de l’Europe. Depuis la légalisation sur l’avortement, en 1990, le taux de mortalité maternelle a considérablement baissé mais le nombre d’avortement a pris des proportions alarmantes et représente aujourd’hui un problème pour les autorités sanitaires roumaines. Bien que le Ministère de la Santé ait conçu et mis en œuvre un programme de planification familiale en 1992, les méthodes de contraception moderne sont encore peu connues, particulièrement dans le milieu rural. Une réforme du système de santé a été entreprise en 1997 et des mesures de protection de la mère et de l’enfant ont été adoptées. En outre, le Ministère a développé une stratégie nationale pour la promotion de la santé reproductive dont l’objectif est notamment d’informer les jeunes sur les modes de contraception moderne et sur les pratiques sexuelles saines. Une Commission nationale multisectorielle de lutte contre le VIH/sida a été créée en coopération avec des organisations non gouvernementales œuvrant dans ce domaine et avec les Nations Unies.

Mme Nicolai a décrit la situation des fillettes en Roumanie et a indiqué que le Gouvernement a adopté une stratégie pour le bien-être des fillettes pour la période 2000-2003. L’autorité centrale chargée de l’élaboration, de la coordination et du suivi des politiques de protection de l’enfance est l’Agence nationale de protection des droits de l’enfant. Elle est chargée des questions relatives aux enfants qui se trouvent dans des institutions, de la lutte contre l’abandon des enfants, protéger les enfants des rues, les enfants handicapés et de réhabiliter les enfants en difficulté.

La représentante a mis l’accent sur l’apparition de nombreuses organisations non gouvernementales (ONG) en Roumanie suite à la fin de la guerre froide, dont beaucoup sont actives dans le domaine de la promotion de la femme. Le Gouvernement roumain reconnaît le rôle important des ONG dans ce domaine. Mme Nicolai a indiqué que la Roumanie a entamé les procédures internes de préparation à la signature et à la ratification du Protocole facultatif relatif à la Convention.

Dialogue avec les expertes

Mme AIDA GONZALEZ MARTINEZ, experte du Mexique et Présidente du Comité, s’est félicitée que la Roumanie ait annoncé son intention de ratifier prochainement le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.

Mme IVANKA CORTI, experte de l’Italie, a noté avec satisfaction les efforts entrepris par le Gouvernement roumain pour harmoniser la législation existante avec les directives européennes. Toutefois, elle a rappelé que la Convention demande que l’égalité des femmes et des hommes soit réalisée de jure et de facto et a estimé que l’écart qui subsiste entre le droit et les faits en Roumanie met en évidence les failles de la politique du Gouvernement. Elle a regretté l’absence d’organe chargé de centraliser et de coordonner l’action des différentes instances chargées de la promotion de la femme et de l’égalité des chances, qu’elle a jugées trop nombreuses. Elle a posé des questions relatives au budget total consacré à l’égalité entre les sexes. Si elle s’est félicitée de l’institution d’un ombudsman chargé de la femme, de l’enfant et de la famille, elle a relevé qu’il serait nécessaire que celui-ci s’occupe des questions féminines à plein temps plutôt que de morceler ses activités et a demandé qui est spécifiquement chargé de veiller à l’élimination des discriminations à l’égard des femmes. Notant la multiplicité de projets de loi en cours d’examen, elle a estimé que l’urgence de la situation du pays demandait que ces projets soient adoptés et appliqués rapidement. A son avis, des mécanismes plus musclés qui ne traiteraient que des problèmes des femmes, et cela de manière coordonnée, permettraient d’agir plus rapidement. Elle a également estimé qu’il fallait avoir une action plus efficace pour éliminer les comportements patriarcaux.

Sur la question de la participation des femmes à la vie politique et publique, elle a observé qu’il semblait y avoir eu un déclin ces dernières années. Observant que la violence à l’égard des femmes, particulièrement dans les foyers, demeure un problème important, elle a suggéré que la législation soit modifiée pour que ce crime soit qualifié de crime contre l’ordre public et non seulement contre la femme qui la subit. De même, elle a demandé à ce que la loi sur le harcèlement sexuel soit adoptée rapidement et a rappelé que l’adoption de la loi sur l’égalité des chances est à la base de toute action visant à réaliser l’égalité entre les sexes.

Alarmée par l’ampleur de la traite des femmes pour leur exploitation sexuelle, elle a demandé comment avançait la discussion sur la légalisation de la prostitution. Elle a également voulu savoir comment le Gouvernement entendait régler le problème du chômage des femmes. Notant que les femmes qui ne trouvent pas d’emploi s’efforcent de créer leur propre entreprise, elle a demandé ce que fait le Gouvernement pour faciliter l’accès des femmes au crédit. Concernant les entreprises étrangères qui investissent en Roumanie, dans la mesure où celles-ci ont tendance à ne pas respecter la législation en vigueur et pratiquent des salaires très bas, accordant des contrats à très court terme, elle a demandé à savoir comment le Gouvernement entendait protéger ses citoyens face à ce type d’employeurs.

Abordant la question de la santé des femmes, Mme Corti a estimé que les termes de l’article 12 de la Convention ne sont pas respectés. Au vu du nombre d’avortements importants, notamment des avortements clandestins qui continuent à être pratiqués en dépit de la loi sur la question, le taux de mortalité maternelle élevé, du nombre d’infections au VIH/sida, elle a voulu connaître les détails de l’action du Ministère de la santé. Elle s’est inquiétée que le Centre pour le sida n’a pas les moyens de fonctionner de manière régulière. Elle a voulu savoir quel budget était consacré aux dépenses de santé. Félicitant la Secrétaire d’Etat roumaine pour l’attention qu’elle porte à la santé et la situation des femmes âgées, elle a demandé des détails sur le régime des retraites. D’autre part, elle a demandé pourquoi le projet visant à reculer l’âge nubile des filles à 18 ans au lieu de 16 actuellement avait été rejeté par le Parlement.

Mme NAELA GABR, experte de l’Egypte, s’est jointe à Mme Corti pour demander que tous les projets de lois en cours d’examen soient rapidement adoptés et appliqués. Elle a reconnu que des progrès avaient été réalisés dans le régime de protection sociale. Elle a voulu connaître les détails de l’élaboration du rapport. Elle a demandé quel était le statut des instruments internationaux par rapport à la législation nationale.

Mme FENG CUI, experte de la Chine, a noté que le rapport indique la révision de certaines lois ayant trait à la famille sans en préciser les détails. Elle a demandé quelle était désormais la définition de la violence dans les foyers. Concernant la création de centres pour les femmes, dont l’un fourni une assistance aux victimes de violence et l’autre des conseils, elle a demandé à savoir si ces centres existent dans tout le pays. Ces centres fournissent-ils des abris aux victimes? Existe-t-il des numéros d’urgence pour les femmes victimes de violence? Quelle collaboration existe-t-elle entre le Conseil national et les centres gérés par les ONG? Qu’en est-il des deux centres qui sont gérés par le Ministère du travail?

Répondant à ces questions, Mme NORICA NICOLAI, Secrétaire d’Etat et Ministre de l’emploi et de la protection sociale de Roumanie, a expliqué que, selon elle, il est difficile de décrire les politiques sexospécifiques. Elle a souligné les difficultés pour la société roumaine de discuter des questions relatives à l’égalité des sexes. Elle a rappelé que le pays traverse une période de transition, sortant d’un système où la politique d’égalité entre les sexes était dissociée des droits de l’homme, ce qui a contribué à créer des stéréotypes et une certaine méfiance à l’égard des débats sur la sexospécificité. Elle a expliqué la multiplicité des structures chargées de l’égalité entre les sexes et de la promotion de la femme par la transition entre les deux systèmes et les débuts de l’institutionnalisation de ces questions.

Concernant le budget de l’Etat, la Ministre a fait part des difficultés financières de son Gouvernement tout en se félicitant que de nombreux projets aient été réalisés en coopération avec des institutions européennes. Elle a indiqué que le premier souci de son pays avait été d’harmoniser sa législation avec la législation européenne en vue de l’intégration dans l’Europe. Elle a reconnu les écarts qui subsistent entre la législation et son application dans la vie courante. Elle a estimé qu’il était très important pour promouvoir une véritable égalité entre les sexes d’engager véritablement la société civile. Elle a fait part d’un projet de loi permettant de soutenir financièrement les ONG qui travaillent dans le domaine de la promotion de la femme.

Sur la question du chômage, elle a indiqué que la situation des hommes n’était guère plus enviable, tout en soulignant les difficultés particulières qui pèsent sur les femmes de plus de 50 ans. Elle a déclaré que, par le passé, de nombreuses femmes choisissaient de rester à la maison et a expliqué les difficultés du Gouvernement à réintégrer ces femmes qui n’ont aucune formation dans la vie active. Elle a donné des précisions sur les mesures de discrimination positive visant à faire prendre en charge par le Gouvernement une partie du salaire des femmes de plus de 50 ans qui étaient au chômage de plus d’un an, à condition toutefois que celles-ci conservent leur poste pendant plus de 3 ans. D’autres projets ont été mis en place pour développer l’entreprise privée, ce qui n’est pas facile au vu des mentalités persistantes.

Pour ce qui est du droit à la retraite, elle a indiqué qu’une loi adoptée cette année fait passer l’âge de la retraite pour les femmes à 65 ans, ce qui paraît plus approprié compte tenu du fait qu’elles ont une espérance de vie plus longue. Toutefois cette loi n’entrera en vigueur que dans 12 ans, a-t-elle précisé.

Concernant les investissements étrangers en Roumanie, elle a d’abord expliqué que le Gouvernement roumain est un Gouvernement de coalition composé principalement d’hommes. Ainsi, la loi sur les investissements étrangers qui a été adoptée l’an dernier risque de ne jamais être appliquée si un nouveau Gouvernement est issu des prochaines élections qui se tiendront à l’automne. Elle a observé que l’instabilité législative du pays ne favorise pas l’application des lois, même quand celles-ci ont déjà été adoptées.

Mme VICTORIA POPESCU, Membre du Ministère des affaires étrangères de Roumanie, a pris la parole pour expliquer comment le rapport avait été rédigé. Elle a précisé que la responsabilité de la rédaction finale avait été celle du Ministère du travail qui a rassemblé les diverses informations qui lui ont été fournies par les autres ministères et les ONG. Elle a expliqué que les ONG étaient très actives dans le pays, notamment en vue de l’élimination de la violence à l’égard des femmes, mais que cette information n’apparaît pas dans le rapport.

Concernant le statut des instruments internationaux, Mme Popescu a expliqué que les traités relatifs aux droits de l’homme prévalent sur le droit national aux termes de l’article 20 de la Constitution. Elle a reconnu toutefois que la différence entre le droit et les faits subsiste car les juges, les policiers, les enseignants ne sont pas toujours au courant des mesures qu’ils doivent appliquer. Revenant sur les questions portant sur la multitude de structures chargées des affaires féminines, la représentante a estimé que cette multiplicité favorisait la visibilité de ces questions. A propos de l’instauration d’un ombudsman, elle a indiqué que le médiateur avait déjà pu traiter un grand nombre de plaintes. Cette institution est structurée autour de quatre départements de façon à traiter des questions relatives aux femmes, aux enfants et à la famille en général. Elle a observé que si la plupart des plaintes ont été déposées par des femmes, elles portent surtout sur des questions connexes.

Mme NORICA NICOLAI, Secrétaire d’Etat au Ministère de l’emploi et de la protection sociale, a indiqué que le Code pénal roumain s’inspire du code pénal français et s’attaque à la violence en général. La politique pénale représentant la “philosophie” et la culture d’un pays, il serait difficile de le modifier, a-t-elle estimé. Mme Nicolai a déclaré que la définition légale de la discrimination a été très difficile en Roumanie car les parlementaires ont jugé qu’elle provenait des pays occidentaux et ne correspondait pas à la “philosophie” roumaine. Il a été très difficile de susciter une solidarité entre les femmes dans le cadre de l’adoption de cette loi, a regretté Mme Nicolai. Quant aux quotas, seuls deux partis politiques en ont établi. En ce qui concerne la prostitution, la représentante a expliqué qu’il est dangereux de légiférer sur la prostitution car cela peut avoir des répercussions sur la santé de la société.

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À l’intention des organes d’information. Document non officiel.