CONSEIL DE SECURITE: APPELS POUR LE RETRAIT DES TROUPES ETRANGERES DE LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
Communiqué de Presse
CS/2002
CONSEIL DE SECURITE: APPELS POUR LE RETRAIT DES TROUPES ETRANGERES DE LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
20000615Les affrontements armés entre forces rwandaises et ougandaises dans la localité de Kisangani rendent beaucoup plus difficile aujourd'hui le déploiement d'une force de maintien de la paix de l'ONU en République démocratique du Congo (RDC), a déclaré, ce matin, le Représentant permanent des Etats-Unis, M. Richard Holbrooke, au cours d'une réunion du Conseil de sécurité consacrée à la situation en République démocratique du Congo. Cette réunion sera suivie à 15 heures d'une séance privée avec les membres du Comité politique créé par l'Accord de Lusaka, qui comprend les signataires de l'Accord de Lusaka. M. Holbrooke a fait part du soutien de son pays à la recommandation du Secrétaire général visant un retrait des forces ougandaises et rwandaises de Kisangani. Les Etats-Unis insistent pour que le Gouvernement de la RDC respecte le rôle du Facilitateur de l'Accord de Lusaka, et prenne part au dialogue national intercongolais prévu par cet Accord.
M. Yerodia Abdoulaye Ndombasi, Ministre d'Etat chargé des affaires étrangères de la RDC, a déclaré le soutien de son Gouvernement au déploiement de la Mission de l'ONU en République démocratique du Congo (MONUC), et a demandé que cette opération soit mise en place dans les meilleurs délais. Le Ministre a lancé un appel pour que le Conseil de sécurité et l'ONU appliquent les résolutions qui ont été adoptées sur la situation en République démocratique du Congo, et rappelant la souveraineté de son pays, a demandé le départ de toutes les forces non invitées du territoire congolais.
Le Ministre des affaires étrangères de l'Ouganda, M. Amama Mbabazi, qui est également le Président du Comité politique créé par l'Accord de Lusaka, a fait savoir que sa présence à New York était guidée par un esprit de partenariat. Il a ainsi réitéré l'engagement du Comité politique à l'Accord de cessez-le-feu. Il a regretté la poursuite des combats à Kisangani entre les forces rwandaises et ougandaises qu'il a qualifiée de développements regrettables. Le Comité politique, a-t-il assuré, a demandé à l'Ouganda et au Rwanda de mettre un terme aux affrontements et de mettre en uvre l'accord de démilitarisation de Kisangani. Il a précisé en outre que le plan de désengagement et de redéploiement des forces en RDC adopté le 8 avril dernier n'a pas pu être finalisé en raison du manque de ressources de la Commission militaire mixte et de la MONUC. Toutefois, le Comité politique, lors de sa dernière réunion, a adopté des mécanismes pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration des membres des groupes armés. Le Président du Comité a indiqué que selon les informations qu'il a reçues des parties, la libération et l'échange des prisonniers de guerre pourraient se produire à la fin de cette semaine. Il a également évoqué la tenue de la réunion préparatoire le 6 juin dernier à Cotonou, au Bénin, visant l'instauration du dialogue intercongolais.
(à suivre 1a) - 1a - CS/2002 15 juin 2000
Pour sa part, le Président du Conseil de sécurité, M. Jean-David Levitte (France), a exhorté les parties en conflit à cesser les combats, à retirer leurs troupes de Kisangani et à honorer l'Accord de cessez-le-feu. La tragédie de Kisangani doit constituer un électrochoc permettant la mise en uvre accélérée de l'Accord de Lusaka qui est notre référence, a-t-il insisté. Il a assuré le Comité politique de la volonté de coopération du Conseil de sécurité en vue de donner un nouvel élan au processus de paix de Lusaka.
LA SITUATION CONCERNANT LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO
Troisième rapport du Secrétaire général sur la Mission de lOrganisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (S/2000/566)
Le présent rapport, établi pour donner suite à la résolution 1291 (2000), reflète lévolution de la situation depuis le 18 avril 2000.
Le Secrétaire général souligne que la situation en République démocratique du Congo (RDC) et les perspectives de progrès du processus de paix sont devenues particulièrement incertaines. Les combats qui se déroulent autour de Mbandaka, dans la province de lEquateur, les récents accrochages à Kisangani et les combats dans le Nord et le Sud Kivu font douter du respect de laccord de cessez-le-feu signé à Kampala le 8 avril, bien que les dispositions en soient largement appliquées dans le reste du pays.
La décision qua prise le Gouvernement de ne pas participer à la réunion préparatoire du dialogue intercongolais, les tentatives quil a faites pour bloquer la participation de lopposition non armée à Kinshasa, et les problèmes financiers et les retards chroniques dont souffrent les activités du facilitateur hypothèquent lourdement lavenir du dialogue intercongolais. Cette situation est particulièrement navrante si lon considère le lien étroit qui existe entre le succès de ce dialogue et les progrès du processus de paix dune manière générale, y compris la mise en uvre des aspects militaires de lAccord de cessez-le-feu de Lusaka. Ces difficultés ont été aggravées par lannonce officielle du 9 juin, selon laquelle le Gouvernement retirait sa confiance au Facilitateur, M. Ketumile Masire, ancien président du Botswana, et demandait à lOrganisation de lunité africaine de nommer un nouveau facilitateur.
En dépit de tous ces évènements, le Secrétaire général exprime sa gratitude aux gouvernements donateurs qui ont déjà honoré les promesses quils avaient faites au Facilitateur, et à ceux qui envisagent activement de procéder à un règlement, soit à titre bilatéral, au Fonds daffectation spéciale, soit directement au compte spécial créé à Gaborone à cette fin. A cet égard, il réaffirme son soutien à laction du Facilitateur et exprime à nouveau lespoir sincère de voir aboutir le dialogue intercongolais. Convaincu que la population de la République démocratique du Congo aspire à la paix, le Secrétaire général souligne que le Gouvernement, les groupes rebelles et les gouvernements des pays belligérants doivent montrer que tel est aussi leur désir. Or, leurs promesses répétées de coopération avec la Mission de lOrganisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) ne sont pas toujours suivies dactes. Le refus daccorder la liberté de circulation à la MONUC, et les déplorables éruptions de violence qui marquent les manifestations à lextérieur du siège de la MONUC à Kinshasa, jettent une ombre de plus sur lattitude du Gouvernement à légard du déploiement des soldats de la paix de lONU. A cet égard, a rappelé le Secrétaire général, cest au Gouvernement quil incombe de garantir la sécurité du personnel des Nations Unies dans le territoire soumis à son autorité. De plus, les flambées ininterrompues de violence, au mépris du cessez-le-feu, et les difficultés auxquelles se heurte le dialogue intercongolais sont de mauvais augure pour le déploiement de la deuxième phase de la MONUC. Ce déploiement est également retardé par les difficultés auxquelles se heurtent les pays fournissent des contingents qui avaient promis denvoyer des bataillons et dautres unités. Un grand nombre de contingents manquent déquipements essentiels. Pour toutes ces raisons et, à la lumière de lexpérience récente en Sierra Leone, le Secrétaire général a demandé que les effectifs nécessaires et les autres besoins soient entièrement réexaminés et réévalués avant quil ne soit procédé au déploiement. Le Secrétaire général fait observer que, si la signature de laccord sur le statut des forces conclu entre le Gouvernement de la RDC et la MONUC durant la visite de la mission du Conseil de sécurité en mai est fort bienvenue, on constate toutefois quelle na pas eu pour résultat de donner à la MONUC la pleine liberté de ses mouvements. Il regrette profondément que des évacuations sanitaires par voie aérienne aient été refusées, comme cela sest produit le 30 mai et que le Mouvemente de libération du Congo (MLC) et le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) aient entravé la liberté de mouvements de la MONUC ces dernières semaines. Les combats autour de Mbandaka, qui violent manifestement lAccord de Lusaka et laccord de dégagement signé à Kampala le 8 avril, marquent aussi un grave recul pour le processus de paix. Cest pourquoi, le Secrétaire général demande au MLC et au Gouvernement de collaborer avec son Représentant spécial, M. Kamel Morjane (Tunisie) pour rétablir sans retard larmistice dans la province de lEquateur. Tant que persisteront les affrontements et les incertitudes, les éléments de la phase II de la MONUC ne pourront être déployés à Mbandaka. Soulignant que la situation est extrêmement inquiétante à Kisangani, le Secrétaire général estime que, dès que les combats auront cessé et que les conditions fondamentales de sécurité auront été restaurées, la communauté internationale pourrait envisager dentreprendre une grande campagne de distribution de vivres, de construction dabris et de services médico-sanitaires, ainsi que de vastes opérations de restauration et de reconstruction pour réparer les dégâts subis ces derniers jours. Ces opérations humanitaires durgence devraient être considérées comme tout à fait distinctes du fonctionnement de la MONUC.
Le Secrétaire général a rappelé que ce nest uniquement que lorsque tous les signataires de lAccord de cessez-le-feu de Lusaka se seront montrés véritablement prêts à en respecter les termes et à sacquitter des obligations auxquelles ils ont souscrit que lONU pourra espérer réussir à les aider dans cette entreprise. La voie sera alors ouverte au déploiement e la deuxième phase de la MONUC, si les toutefois les moyens nécessaires sont disponibles et les unités militaires concernées entièrement équipées et à pied duvre. Cest pourquoi, il se dit convaincu que la réunion du Comité politique, se tenant à New York les 15 et 16 juin à linvitation du Président du Conseil de sécurité, offre à toutes les parties loccasion opportune de procéder sérieusement à la réévaluation dune situation déliquescente. Elle sera également pour les membres du Conseil de sécurité loccasion de faire bien comprendre aux parties que les assurances dappui au processus de paix et les garanties de sécurité et de liberté de mouvements quelles ont données ne peuvent plus être prises pour argent comptant et doivent se traduire par des actes. Aussi, invite-t-il le Conseil de sécurité, en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, à exiger que le Gouvernement rwandais et le Gouvernement ougandais ordonnent à leurs armées respectives de sabstenir dorénavant de combattre et de se retirer immédiatement de Kisangani puis, sans tarder davantage, de la RDC. Ces deux armées devraient être tenues responsables des pertes humaines et des dégâts matériels quelles ont infligés à la population civile de Kisangani. En outre, il invite instamment le Conseil, agissant également au titre du Chapitre VII de la Charte, à exiger ensuite le retrait rapide de toutes les autres forces étrangères du territoire de la RDC, comme le prévoit lAccord de Lusaka.
Déclarations
M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) a rappelé que cette réunion est née de la rencontre le 6 mai dernier entre les membres du Comité politique et 7 membres du Conseil de sécurité qui accomplissaient leur première visite en Afrique. Le dialogue qui a suivi entre le Conseil de sécurité et les Etats signataires de l'Accord de Lusaka témoigne de l'importance qu'attachent les membres du Conseil aux questions africaines. L'ONU n'abandonne pas l'Afrique. L'essentiel de son ordre du jour est consacré aux dossiers africains. Le contexte actuel est pourtant difficile, a reconnu le représentant qui a évoqué les graves difficultés que connaît la Mission des Nations Unies en Sierra Leone et la guerre entre l'Ethiopie et l'Erythrée. Chaque crise a ses propres spécificités mais toutefois les problèmes rencontrés en Sierra Leone sont à l'origine des hésitations des pays contributeurs de troupes à s'engager en RDC.
Faisant l'analyse de la situation sur le terrain, le Représentant a évoqué l'effort notable de tous les Etats de la région qui s'est concrétisé par la signature le 10 juillet 1999 de l'Accord de Lusaka. Un an après, l'on peut dire qu'il y a eu des efforts dans la bonne direction. Un cessez-le-feu et un accord de désengagement a été conclu le 8 avril à Kampala. A New York, les Nations Unies ont rempli leur part du contrat. Le Conseil de sécurité a décidé le 24 février dernier de créer la Mission des Nations Unies en RDC (MONUC) avec une force de 5000 hommes. Malheureusement, le bilan global que nous pouvons tirer est aujourd'hui négatif dans 5 domaines. Le représentant a évoqué la poursuite des combats dans la province de l'Equateur, au Kasaï depuis le mois de mars, dans le Kivu et à Kisangani; le coût humain du conflit qui est de plus en plus lourd à la lumière du nombre de personnes déplacées et des besoins alimentaires énormes; les massacres perpétrés dans le Kivu et les massacres ethniques dans le Nord-Est. D'après une organisation des droits de l'homme, le nombre de victimes du conflit se monte à 1,3 millions. Le représentant a mentionné le blocage du dialogue intercongolais et l'absence de coopération du Gouvernement congolais avec le facilitateur du dialogue. Le règlement du conflit doit s'appuyer sur une réconciliation nationale dans le cadre de ce dialogue. Au rang des développements négatifs figurent également un climat d'insécurité qui entrave le déploiement de la MONUC et le lancement de sa phase II et enfin les manifestations hostiles à la MONUC qui se sont déroulées à Kinshasa. Ceci n'est pas acceptable, a souligné le représentant.
La reprise des combats le 5 juin à Kisangani entre les troupes rwandaises et ougandaises constituent une aggravation brutale du conflit et ont paru sonner le glas de l'Accord de Lusaka. Les combats ont fait de nombreuses victimes congolaises parmi la population civile. Ces développements ont provoqué un choc profond au sein de la communauté internationale. «Cessez les combats, retirez vos forces de Kisangani et honorez l'Accord de cessez-le-feu», a exhorté le représentant. La guerre doit cesser immédiatement. La tragédie de Kisangani doit constituer un électrochoc permettant la mise en uvre accélérée de l'Accord de Lusaka qui est notre référence. Le représentant a demandé la libération de tous les prisonniers de guerre. Nous souhaitons examiner avec vous la situation et donner ensemble un nouvel élan au processus de paix de Lusaka, a dit le Représentant aux membres du Comité politique.
M. AMAMA MBABAZI, Ministre des affaires étrangères de l'Ouganda et Président du Comité politique créé par l'Accord de Lusaka, a expliqué que les violations de l'Accord de cessez-le-feu se sont produites car les mécanismes visant la gestion du processus de mise en uvre n'ont pas été pleinement déclenchés. Les Nations Unies ont adopté ce qui a semblé être une approche très prudente pour ce qui touche à leur engagement dans le processus de mise en uvre de l'Accord. Le Comité politique s'est alors réjouit lorsqu'en janvier dernier, le Conseil de sécurité a décidé de porter une attention plus soutenue au conflit. Nous avons grandement apprécié la visite qu'a rendue la délégation du Conseil de sécurité sous la délégation de Richard Holbrooke à la région, le mois dernier. Nous avons eu l'impression pour la première fois qu'à l'issue de cette visite, un réel partenariat entre le Comité politique et les Nations Unies se mettait alors en place. Nous sommes présents aujourd'hui à New York guidés par cet esprit de partenariat, dans le contexte du dialogue instauré le 6 mai à Lusaka en vue de la réalisation de la paix non seulement en RDC mais dans la région dans son ensemble.
Le Ministre a indiqué que le Comité politique, en coopération avec la Commission militaire mixte et la MONUC a préparé le terrain pour la mise en uvre de l'Accord de Lusaka. Nous avons adopté le 8 avril dernier à Kampala un plan de désengagement et de redéploiement des forces en RDC qui n'a pas pu être finalisé en raison du manque de ressources de la Commission militaire mixte et de la MONUC qui sont essentielles aux activités de vérification des informations émanant de chaque partie. Lorsque cela sera fait et que l'on sera parvenu à un accord relatif aux positions défensives, les forces commenceront à se retirer. Le Comité politique, lors de sa dernière réunion, a adopté des mécanismes pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration des membres des groupes armés.
Le Ministre a indiqué que selon les informations qu'il a reçues des parties, la libération et l'échange des prisonniers de guerre pourraient se produire à la fin de cette semaine. Le dialogue intercongolais n'a pas commencé, a ajouté le Ministre, mais nous nous réjouissons de la tenue de la réunion préparatoire qui a eu lieu le 6 juin dernier à Cotonou au Bénin qui constitue un pas dans la bonne direction. Il est clair que la mise en uvre de l'Accord de Lusaka ne s'est pas faite selon le plan d'origine. Le Comité politique reconnaît que des obstacles importants entravent la mise en uvre de l'Accord. Les combats à Kisangani entre les forces rwandaises et ougandaises constituent des développements regrettables et les membres du Comité ont demandé au Rwanda et à l'Ouganda de cesser les combats et de mettre en uvre l'accord qu'ils avaient conclu pour la démilitarisation de Kisangani. Le Ministre a réitéré l'engagement du Comité politique à l'Accord de cessez-le-feu de Lusaka.
M. RICHARD HOLBROOKE (Etats-Unis) a déclaré que les Etats-Unis sont satisfaits du leadership de la France sur la question de la situation en RDC. Le travail effectué par l'ONU et le Représentant spécial du Secrétaire général dans des circonstances difficiles au Congo doit être loué, a-t-il dit. L'ONU ne se détourne pas de l'Afrique qui reste au centre de l'attention du Conseil de sécurité. En dehors de la RDC, la Sierra Leone et le conflit entre l'Ethiopie et l'Erythrée sont là pour le prouver. Le peuple du Congo a besoin de paix, et depuis le mois de janvier, nous nous sommes penchés sur les problèmes de l'Afrique. La visite d'une mission du Conseil dans les pays de la région des Grands Lacs prouve aussi l'engagement du Conseil de sécurité et de la communauté internationale envers l'Afrique. Mais les événements de ces dernières semaines à Kisangani sont totalement inexcusables. Les différents cessez-le-feu qui ont été violés par les deux parties et la poursuite des combats ont entraîné des destructions terribles et ont mis en péril la survie même de la population. Le cessez-le-feu actuellement en place reste lui-même très fragile. Il est plus difficile en ce moment de déployer des forces de maintien de la paix qu'il y a quelques semaines. Les parties qui se sont affrontées se rejettent mutuellement la faute du déclenchement des combats, et seule une véritable détermination politique au plus haut niveau pourra ramener la situation à la normale.
Les combats qui se déroulent dans la province de l'Equateur doivent aussi prendre fin, et le Gouvernement de la RDC doit assumer ses responsabilités à cet égard. D'autre part, renoncer au Facilitateur de l'Accord de Lusaka est indéniablement une atteinte à l'esprit et au processus initié par l'Accord. En janvier, les parties avaient promis de redoubler d'efforts en faveur de la paix. Cette promesse doit être tenue. La recommandation du Secrétaire général pour un retrait des troupes ougandaises et rwandaises de Kisangani doit être soutenue. Mais en même temps, les Etas-Unis insistent aussi sur le retrait total de toutes les parties au conflit. Une discussion du retrait des forces ougandaises et rwandaises n'absout pas le Gouvernement de la RDC de la participation à un dialogue national intercongolais, et la question des garanties de sécurité à assurer en vue d'arrêter les incursions des Interhamwes au Rwanda et ailleurs, doit aussi rester une priorité. Nous voudrions que les dirigeants africains comprennent que l'ère des conflits est révolue, a dit M. Holbrooke. Ils devraient apprendre et tirer des leçons des erreurs de l'Europe. Les Etats-Unis rejettent complètement l'idée selon laquelle la démocratie et le droit seraient prématurés pour l'Afrique. Ce sont là des points de vue à connotation raciste. Les frontières héritées par les Etats africains au moment des indépendances doivent absolument être respectées, et nous estimons que la qualité du leadership doit faire la différence dans chaque pays du continent. En Afrique comme ailleurs, nous devons accepter que des revers se produisent, mais ils ne devraient pas diminuer notre détermination à y mener à bon port les opérations visant à promouvoir la paix et la sécurité.
M. YERODIA ABDOULAYE NDOMBASI, Ministre d'Etat chargé des affaires étrangères et de la coopération internationale de la République démocratique du Congo, a déclaré que le moment était venu pour la communauté internationale de reconnaître et de déplorer les crimes commis contre la population congolaise. Le conflit en République démocratique du Congo ne peut être justifié par de prétendues préoccupations d'ordre sécuritaire. Les deux ans de guerre en RDC ont fait plus dun million sept cent mille morts, principalement des femmes et des enfants, selon une étude menée par l'agence américaine "Leading Refugee Agency". Les batailles rangées à l'arme lourde qui se sont déroulées à Kisangani entre troupes rwandaises et ougandaises sous les yeux de la Mission des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) doivent amener le Conseil de sécurité à condamner vigoureusement les massacres et imposer des sanctions exemplaires en vue de mettre fin au récidivisme des agresseurs, non seulement à Kisangani mais aussi sur les autres parties du territoire de la RDC qu'ils occupent.
Le Rwanda et l'Ouganda ont plusieurs fois mentionné quils ont signé les Accords de cessez-le-feu, mais tous ces Accords ont ensuite été violés par leurs signataires. Cette situation résulte de l'absence de volonté politique de la part des pays agresseurs de la RDC qui ne veulent pas mettre fin à la guerre. C'est pourquoi, a dit le Ministre, le Conseil de sécurité et le Comité politique de l'Accord de Lusaka ont le devoir de réévaluer la situation sur le terrain et de prendre les mesures qui s'imposent. Le Gouvernement de la RDC demande que les agresseurs se retirent sans condition du territoire congolais.
Notre Gouvernement, a dit M. Yerodia, pense que toutes les parties se doivent d'appliquer intégralement l'Accord de Lusaka et uvrer à sa mise en uvre effective. Le processus de retrait des forces non invitées doit être accéléré. Le Gouvernement de la RDC est disposé à travailler avec la communauté internationale pour que les garanties de sécurité des uns et des autres soient assurées afin de mettre en uvre une paix durable au Congo. Le Gouvernement de la RDC demande au Conseil et au Comité politique de reconnaître que cette guerre est une guerre d'agression et que dans cette guerre d'agression se déroule un autre conflit entre deux pays étrangers membres de l'ONU sur le territoire d'un troisième pays membre. Concernant le calendrier de l'Accord de Lusaka, le Gouvernement de la RDC y souscrit entièrement, ainsi qu'à la tenue du dialogue intercongolais dans les conditions fixées par l'Accord de Lusaka, dont il promet d'assurer la facilitation. Notre Gouvernement tient, d'autre part, à déclarer au Conseil que la Mission des Nations Unies en République démocratique du Congo est la bienvenue et nous en demandons le déploiement rapide, total et complet. Le peuple congolais a, c'est vrai, manifesté quelque humeur quand des pierres ont été lancées contre les bâtiments de l'ONU par des bandes de jeunes. Mais le Représentant spécial du Secrétaire général sait bien que les portes du Ministère congolais des affaires étrangères et du Gouvernement de la RDC lui sont ouvertes pour régler tout incident. Le Gouvernement de la RDC tient, d'autre part, à rappeler au Conseil de sécurité ses propres résolutions et il demande que le Secrétaire général et l'ONU appliquent ces textes, dont certains ont été adoptés à la suite dun vote unanime. Le Gouvernement de la RDC créera toutes les conditions nécessaires pour une application rapide de toutes les résolutions relatives à la situation en RDC.
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