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ONG/343

LE COMITE REJETTE LA DEMANDE D'ADMISSION AU STATUT CONSULTATIF

18 mai 2000


Communiqué de Presse
ONG/343


LE COMITE REJETTE LA DEMANDE D'ADMISSION AU STATUT CONSULTATIF

20000518

DE l'ONG "TAMIL CENTER FOR HUMAN RIGHTS"

Le Sri Lanka et les Etats-Unis fournissent des informations liant l'ONG à des actes de violence

Réuni cet après-midi sous la Présidence de M. Levent Bilman (Turquie) le Comité des organisations non gouvernementales a poursuivi l’examen des nouvelles demandes d’admission au statut consultatif auprès de l’ECOSOC qui lui ont été soumises pour cette session de l’an 2000. Le Comité a, dans ce cadre, reporté à plus tard sa prise de décision sur la demande de l’ONG “Hague Appeal for Peace”. Il a ensuite décidé de recommander l’admission au statut consultatif spécial de “International HIV/AIDS Alliance”, et de la “Fédération internationale pour le planning familial” (Région de l’Asie du Sud), toutes deux basées à Londres.

Le Comité a ensuite examiné la demande d’accréditation auprès de l’ECOSOC de l’ONG “Tamil Centre for Human Rights” (TCHR). Au vu des informations fournies par la délégation des Etats-Unis, qui a déclaré que cette organisation soutenait l’Organisation des Tigres de l’Eylan tamoul (LTTE), qui est classée parmi les organisations terroristes par le Gouvernement américain, et des précisions apportées par le Représentant permanent du Sri Lanka auprès de l’ONU, le Comité a décidé, par consensus de ses membres, de rejeter le dossier de demande d’accréditation de cette ONG. Selon le Gouvernement du Sri Lanka, le TCHR n’est qu’une façade servant à la collecte de fonds et d’armes destinés à la lutte armée du mouvement des Tigres tamouls contre l’Etat du Sri Lanka.

Au cours de cette réunion, le Comité a également discuté de l’état d’avancement des procédures relatives aux plaintes portées par Cuba, la Chine, la Fédération de Russie et le Soudan, contre des ONG qui ont mené des actions contraires aux dispositions de la résolution 1996/31. Aux termes des plaintes déposées et examinées en ce moment par le Secrétariat, les ONG concernées s’étaient attaquées, lors des travaux de la Commission des droits de l’homme à Genève, aux délégations des Etats Membres plaignants.

Examen des nouvelles demandes d’admission au statut consultatif

Les membres du Comité sont d'abord revenus en début de séance sur le dossier de l'ONG "Hague Appeal for Peace" sur laquelle il s'était déjà penché ce matin. Le Président du Comité a déclaré que cette ONG avait bien été enregistrée au Pays-Bas en septembre 1997. Mais l'ONG ayant envoyée sa demande au Secrétariat au mois de juin 1999, elle n'a pas respecté le délai de deux années d'existence préalable qu'imposent les règlements à toute ONG pour être admissible. Le Comité a donc décidé qu'il n'est pas en mesure d'étudier ce dossier de demande d'admission.

Le Comité a ensuite décidé de répondre favorablement à la demande d’admission au statut consultatif spécial de l’ONG “International HIV/AIDS Alliance” (AHAA), dont le siège est à Londres (Royaume-Uni). Selon les informations fournies au Comité, la première source de financement de cette ONG vient de contributions en provenance de divers gouvernements. AHAA s'est donnée pour mission de fournir une aide technique et financière aux collectivités des pays en développement afin que ces dernières soient à même de jouer un rôle efficace dans les activités mondiales de lutte contre le sida. Après examen des informations soumises par l'ONG, la représentante de l'Algérie a tenu à souligner que bien que les fonds de cette ONG proviennent de gouvernements, sa délégation ne s'opposerait pas à accorder à AHAA le statut qu'elle demande. Mais il ne faudrait pas que plus tard certains membres du Comité fassent la politique du deux poids mesures envers des ONG en provenance de pays du Sud, qui parfois reçoivent aussi des fonds gouvernementaux. Le Soudan a partagé le point de vue de l'Algérie.

Le Comité a décidé de recommander l’octroi du statut consultatif spécial à la Fédération internationale pour le planning familial (Région de l’Asie du Sud. Basée à Londres (Royaume-Uni), cette ONG comprend les Associations de planning familial du Bangladesh, de l’Inde, des Maldives, du Népal, du Pakistan, de la République islamique d’Iran et du Sri Lanka. L’un de ses objectifs est d’assurer une plus grande disponibilité et un meilleur accès aux services de santé sexuelle et en matière de procréation.

Le Comité a ensuite examiné la demande d’admission au statut de la Liste de l’ONG internationale “Tamil Center for Human Rights”, basée à Garges-les-Gonesses (France) et créée pour suivre les violations des droits de l’homme en améliorant la sensibilisation du public à ces questions et en faisant campagne contre l’intolérance raciale. Selon ses informations, l’ONG compte des membres dans dix pays et une partie de ses revenus proviennent des cotisations de ses membres. Prenant la parole, le représentant des Etats-Unis a fait remarquer que dans ses informations, l'ONG niait toute attache avec le mouvement des Tigres de libération de l'Eylan Tamoul (LTTE)et la "libération du peuple tamoul au Sri Lanka". Mais la délégation des Etats-Unis a pris connaissance d'articles publiés par cette ONG sur l'Internet. Le ton de ces articles est très partisan et exprime de la sympathie pour le mouvement LTTE que les Etats-Unis ont inscrit sur la liste des organisations terroristes. La délégation des Etats-Unis ne peut donc soutenir l'octroi du statut consultatif à cette ONG. Le représentant du Sénégal est intervenu pour demander plus de détails de la part des Etats-Unis, le représentant de ce pays lui répondant pour sa part que son pays ne soutiendrait pas de toute façon la demande de cette ONG.

Le délégué de la Fédération de Russie a estimé que le doute qui pouvait planer sur le soutien de l'ONG aux Tigres tamouls est très grave, le terrorisme étant une des plaies que combat la communauté internationale. Le représentant de cette ONG pourrait peut-être aller à la tribune et répondre à des questions directes du Comité. Le représentant de la Chine a estimé que si les soupçons américains s'avéraient vrais, il faudrait ouvrir une enquête. La déléguée du Soudan a dit que le Comité devait examiner avec soin la demande d'accréditation de l'ONG. Son représentant étant dans la salle, il faut lui donner la parole et entendre également le représentant du Sri Lanka.

Intervenant après le Soudan, le représentant du Chili a aussi souhaité entendre le représentant de l'ONG et celui du Sri Lanka. La délégation de l'Inde a dit avoir vu cette ONG organiser une manifestation lors des travaux de la Commission des droits de l'homme à Genève. Ce qu'ont dit les Etats-Unis est d'une extrême gravité. Les activités des organes de l'ONU visent d'abord à promouvoir les idéaux de la Charte, et si une ONG menait des activités qui y sont contraires, le Comité ne pourrait lui être favorable. L'Ethiopie a exprimé son soutien au point de vue de l'Inde et a déclaré ne pas soutenir la demande de l'ONG.

Prenant la parole, le Représentant permanent du Sri Lanka auprès des Nations Unies a dit que son Gouvernement l'avait spécialement mandaté pour dénoncer l'ONG "Tamil Center for Human Rights" (TCHR). L'organisation des Tigres Tamoul, LTTE est mondialement reconnue comme une organisation terroriste, responsable de l'assassinat de plusieurs hauts dirigeants politiques. Le Gouvernement du Sri Lanka tient à faire savoir au Comité que le TCHR n'est pas l'ONG qu'elle prétend être, mais c'est plutôt une organisation de façade du LTTE. Les dirigeants du TCHR prennent régulièrement la parole lors de manifestations du LTTE, et le TCHR a même publié des communiqués justifiant l'assassinat de personnalités de la société civile sri-lankaise. Les individus qui ont demandé l'accréditation du TCHR auprès de l'ECOSOC sont les mêmes qui demandent le démantèlement du Sri Lanka en entités ethniques. Le gouvernement du Sri Lanka pense que les ressources et les armes qui servent aux Tigres tamouls sont canalisées par des organisations de passage comme le TCHR. Nous exhortons donc le Comité, au nom du gouvernement du Sri Lanka, de ne pas accéder à la demande d'admission de cette ONG, a dit le représentant.

Le Président du Comité a pris note des faits énoncés contre le TCHR. La représentante du Soudan a estimé que le Comité devait prendre rapidement une décision sur ce dossier. Les activités de l'ONG sont incompatibles avec la Charte de l'ONU et le Soudan ne peut lui apporter son soutien.

Le représentant du Pakistan, comme les représentants du Sénégal, de la France et de la Chine, a estimé qu’on ne peut pas appuyer la demande d’une ONG ayant des liens avec une organisation terroriste et menant des activités contraires à la promotion de la paix et des principes de la Charte des Nations Unies. Les représentants de la France, de la Colombie et de la Turquie ont cependant souhaité connaître la réponse de la représentante de l’ONG devant le Comité.

La représentante de Tamil Center for Human Rights a déclaré que son ONG est très sérieusement et exclusivement engagée dans la protection et la promotion des droits de l’homme. Les Tamouls représentent une très large population dont l’ONG examine les besoins depuis une dizaine d’années. L’organisation fonde ses travaux sur la Charte des Nations Unies. Elle a nié que le TCHR ait distribué des informations à des terroristes. Son ONG ne collecte de fonds pour aucun groupe terroriste. Elle a jugé que ces allégations mensongères sont une insulte dirigée contre le Secrétariat de l’ONU plus encore que contre son ONG. Elle n’a participé qu’à des conférences sur la paix et sur les droits de l’homme et n’a jamais préconisé la constitution d’un Etat tamoul séparé. Elle a regretté que les enseignants, juristes, médecins, directeurs d’école à la retraite qui se sont engagés à faire connaître les principes de la Charte des droits de l’homme, ne puissent pas agir librement juste parce qu’ils appartiennent à une ONG qui contient le mot “Tamil” dans son nom. Elle a nié avoir organisé la très grande manifestation qui s’est tenue à Genève. La seule façon de revenir vers la paix est de travailler à la dignité de tous, a-t-elle conclu.

Suite à son intervention, la représentante de l’Algérie a demandé si le THRC est concerné par les violations des droits de l’homme à travers le monde ou uniquement au Sri Lanka. Les représentants de l’Inde, du Soudan, de Cuba et du Pakistan ont souhaité savoir comment, l’ONG avait pu participer aux travaux de la Commission des droits de l’homme et de la Sous-Commission pour la promotion et la protection des droits de l’homme, et collaborer avec le PNUD et l’OMS, entre autres, sans pour autant être dotée du statut consultatif. Quelle ONG dotée du statut consultatif a donné au THRC la possibilité de participer à la Commission des droits de l’homme, ont-ils également demandé. La représentante de Cuba a demandé si la représentante a connaissance des activités exactes de ses membres tamouls et si elle a des garanties qu’ils n’appartiennent pas au LTTE.

La représentante de Tamil Human Rights Center a confirmé que son organisation est engagée dans la défense des droits de l’homme dans tous les pays mais que, du fait des ressources très limitées dont elle dispose, l’ONG se concentre sur le Sri Lanka. Elle s’occupe de cas de concrets de violence. L’ONG a des liens officieux avec le PNUD et l’UNESCO. La lutte contre l’intolérance raciale mobilise des Sri lankais et des Européens dans le cadre de l’ONG. Elle connaît depuis plusieurs années le personnel humanitaire avec lequel elle travaille et peut se porter garante de son éthique. Ils sont tous des citoyens exemplaires dans les pays où ils résident. Elle a dit que son ONG n’a pas d’affiliation formelle avec d’autres organisations. Quant au budget, il est très modeste et donc l’ONG a pensé qu’il n’était pas nécessaire de procéder à un audit extérieur. Les ONG qui connaissent la valeur des travaux du Tamil Human Rights Center lui offrent la possibilité de participer par leur truchement à la Commission des droits de l’homme. L’ONG n’a aucun représentant au Sri Lanka, elle ne fait qu’y collecter des informations.

Le Comité a décidé de recommander au Conseil économique et social le rejet de la demande d’attribution du statut consultatif à l’ONG Tamil Center for Human Rights.

La représentante de Cuba, de même que le représentant de la Fédération de Russie, ont invité le Comité à faire preuve de cohérence et d’adopter, à l’avenir, la même attitude face à toutes les ONG contre lesquelles un Etat Membre aurait des preuves d’activités contraires aux principes de la Charte.

Amélioration des méthodes de travail

A la suite de cette décision, le Président du Comité a demandé aux membres du Comité de revenir sur la question de l'amélioration des méthodes de travail, et notamment de la suite des plaintes portées par certains membres contre des ONG. Le Bureau du Comité a pris contact avec les instances compétentes de l'ONU en la matière pour régler les contentieux en cours, et la procédure est largement engagée, a dit le Président, des lettres ayant notamment été envoyées à la présidence de la Commission des droits de l'homme, où se sont produits les incidents en cause.

La représentante de Cuba a pris la parole pour décrire les différents incidents occasionnés par certaines ONG qui ont mené des attaques systématiques contre le Gouvernement cubain. Ces attaques ont notamment porté sur les questions de démocratie et de droits de l'homme et ont été provoqués par des ONG, dont l'une est basée en Espagne. Ces ONG se sont alliées à la communauté cubaine des Etats-Unis pour porter préjudice au gouvernement cubain. La "Fondation cubano américaine" a été mêlée à l'affaire Elian Gonzalez et a monté des individus pour agresser les délégués cubains lors des travaux de la Commission des droits de l'homme à Genève, a dit la déléguée. Cuba demande que le Comité demande un rapport à ces ONG pour qu'elles donnent des explications sur leur comportement. La délégation cubaine a aussi un contentieux avec l'ONG "Freedom House", du fait de ses liens avec des organisations terroristes. Elle demande que la résolution 1996/31 soit strictement respectée et appliquée.

La déléguée du Soudan est intervenue après la délégation de Cuba pour rappeler qu'une lettre avait été envoyée au Président de l'ECOSOC après les actions menées par "Christian Solidarity International" contre le Soudan. CSI a mené des actions inacceptables contre la délégation du Soudan à Genève, allant même jusqu'à harceler les délégués et à introduire dans les locaux qui leur étaient réservés des documents insultants. CSI avait pourtant déjà perdu son statut consultatif. Le Soudan demande donc qu'une enquête soit ouverte pour savoir qui a permis aux membres de cette ONG de s'introduire dans les locaux de la réunion de la Commission des droits de l'homme et de distribuer des documents. Le Président du Comité a répondu que des correspondances avaient déjà été envoyées à cette fin.

Intervenant après lui, le représentant de la Fédération de Russie a dit que son pays avait porté plainte contre l'ONG "Transnational Radical Party".(TRI). A Genève, des membres de cette ONG se sont introduits dans les salles de la Commission des droits de l'homme pour faire de la propagande pro-tchétchène et anti-russe. L'un d'entre eux s'est même présenté comme l'envoyé du "Président tchétchène". Plusieurs membres de cette ONG ont, d'autre part, été arrêté pour trafic de stupéfiants. Ces actes violent plusieurs aspects de la résolution 1996/31, et la Fédération de Russie estime que le Comité doit engager une action visant à retirer à TRI son statut consultatif auprès de l'ECOSOC. TRI doit soumettre, avant la session de juin, toute information qui lui sera demandée en rapport avec la plainte déposée par notre délégation, a dit le représentant.

Le Président du Comité a dit au représentant de la Fédération de Russie, que le Secrétariat avait déjà contacté l'ONG concernée.

Le représentant de la Chine a dit qu'après la plainte portée par sa délégation contre "Freedom House", cette ONG n'avait encore apporté aucune réponse sur les incidents qu'elle a causés à Genève. La Chine veut que le Comité demande un rapport spécial à cette ONG et que des photos de ses membres soient prises à des fins de sécurité. La délégation chinoise demande aussi au Secrétariat d'envoyer à cette ONG une lettre la sommant de ne plus jamais répéter le genre d'actes qu'elle a commis contre la Chine à Genève, et que l'ONG lui réponde en donnant des garanties dans ce sens.

Le Comité poursuivra ses travaux demain vendredi 19 mai, à 10 heures.

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