LA REFORME ECONOMIQUE, LE RETOUR DES REFUGIES ET LE RENFORCEMENT DES INSTITUTIONS SONT ESSENTIELS POUR LA PAIX EN BOSNIE-HERZEGOVINE, SOULIGNE LE HAUT REPRESENTANT
Communiqué de Presse
CS/1182
LA REFORME ECONOMIQUE, LE RETOUR DES REFUGIES ET LE RENFORCEMENT DES INSTITUTIONS SONT ESSENTIELS POUR LA PAIX EN BOSNIE-HERZEGOVINE, SOULIGNE LE HAUT REPRESENTANT
20000509La réforme économique en Bosnie-Herzégovine constitue l'une des armes les plus puissantes permettant de lutter contre les conséquences dévastatrices de la guerre de 1992-1995 car le système économique en vigueur - qui date de l'ère du communisme - constitue un obstacle majeur aux investissements étrangers, a souligné ce matin devant le Conseil de sécurité M. Wolfgang Petritsch, Haut Représentant pour la mise en uvre de lAccord de paix. Les autorités doivent comprendre qu'il y va de l'avenir de leur pays de cesser toute opposition aux réformes économiques.
Le retour des réfugiés et des personnes déplacées, en particulier des minorités, est essentiel pour normaliser la situation, a estimé M. Petritsch. Le Haut Représentant a expliqué que pour faciliter leur retour et accélérer les procédures de restitution, il a imposé un ensemble de réformes à la législation régissant les biens des réfugiés dans les deux entités. Le Haut Représentant s'est par ailleurs déclaré fermement convaincu qu'il est essentiel de mettre en place un système judiciaire pleinement indépendant, sans lequel un développement économique à long terme et une protection efficace des libertés individuelles seraient impossible.
Plusieurs délégations, et en particulier celle de la France, ont souligné qu'il est impératif d'affaiblir l'emprise des partis nationalistes sur la société, de renforcer et d'améliorer le fonctionnement des institutions, de créer le contexte nécessaire au redémarrage économique et de favoriser les retours des réfugiés et des personnes déplacées. Il faut la mise en place d'un véritable Etat et d'un Etat de droit. A cet égard, les délégations ont noté l'évaluation de l'appareil judiciaire et la mise en place d'un service des frontières accomplies en ce sens par la Mission des Nations Unies et le Bureau du Haut Représentant.
Ont pris la parole dans ce cadre les représentants des membres suivants du Conseil de sécurité: Bangladesh, Canada, France, Tunisie, Fédération de Russie, Royaume-Uni, Pays-Bas, Etats-Unis, Malaisie, Ukraine, Namibie, Mali, Argentine, Jamaïque et Chine.
LA SITUATION EN BOSNIE-HERZÉGOVINE
Exposé de M. Wolfgang Petritsch, Haut Représentant chargé dassurer le suivi de lapplication de lAccord de paix relatif à la Bosnie-Herzégovine
M. WOLFGANG PETRITSCH, Haut Représentant, présentant le rapport sur l'évolution de la situation en Bosnie-Herzégovine depuis novembre 1999, a indiqué que son Bureau se prépare activement pour la tenue du Conseil de Bruxelles sur la mise en uvre de la paix, le 23 mai prochain. Le Comité directeur du Conseil, réuni la semaine dernière à Lisbonne, a permis de dégager un large consensus sur la stratégie qu'il a présentée. Dans la mesure où les ressources allouées pour le règlement des problèmes en Bosnie-Herzégovine sont en diminution, il est impératif que les fonds disponibles soient utilisés au mieux. Le Haut Représentant s'est déclaré convaincu que si l'on procède avec succès à la réforme économique, au retour rapide des réfugiés et à la consolidation des institutions, il sera possible d'engager d'autres réformes. Concernant le secteur économique, à son avis la Bosnie demeure encore trop dépendante de l'aide internationale, qui baisse considérablement. Si la Bosnie-Herzégovine veut avoir un avenir stable, son économie doit devenir rapidement autosuffisante. C'est encore un pays pauvre qui, sans une croissance économique, deviendra encore plus pauvre. A cet égard, M. Petritsch a indiqué qu'en Republika Srpska - de loin l'entité la plus pauvre - le salaire mensuel moyen est de 100 dollars. La réforme économique constitue l'une des armes les plus puissantes pour lutter contre les conséquences dévastatrices de la guerre de 1992-1995. Le pays a besoin dinvestissements. Le système économique en vigueur qui date de l'ère du communisme constitue un obstacle majeur aux investissements étrangers. L'industrie fonctionne encore sur des bases anciennes. C'est pourquoi, il est indispensable d'encourager les petites et moyennes entreprises mieux adaptées à la force de travail en Bosnie-Herzégovine. L'absence d'un système bancaire efficace constitue un autre obstacle aux investissements privés. La réforme du secteur bancaire devrait encourager la participation de banques étrangères et permettre ainsi l'injection nécessaire de capitaux. La privatisation est un des facteurs clé de la modernisation de l'économie du pays. Le processus de privatisation est déjà bien entamé, bien que la première phase - à savoir l'ouverture des livres comptables des grandes entreprises publiques à un audit indépendant avant leur évaluation, se soit heurtée à une résistance politique redoutable.
Insistant sur la nécessité daccélérer le retour des réfugiés, M. Petritsch a loué le rôle fondamental joué par les institutions spécialisées. Quatre ans et demi après la guerre, environ 800 000 personnes demeurent déplacées dans l'ensemble du territoire. En outre, on compte 300 000 réfugiés à l'étranger. Pour normaliser la situation en Bosnie-Herzégovine, il faudrait faciliter leur retour. A cet égard, M. Petritsch a expliqué quil avait pris des mesures pour accélérer ce processus, ayant notamment fait apporter des réformes à la législation régissant les biens des réfugiés dans les deux entités en vue déliminer les obstacles bureaucratiques à la restitution des biens des réfugiés et personnes déplacées qui ont été exploités sans scrupules par les politiciens de toutes les parties dans l'objectif majeur d'empêcher la mise en uvre des Accords de Dayton. M. Petritsch a indiqué quil avait par ailleurs renvoyé 22 fonctionnaires ayant volontairement paralysé la mise en uvre de l'Annexe 7 des Accords de Dayton relative au retour des réfugiés. La contribution du Haut Commissariat pour les réfugiés et du Groupe de police internationale a été précieuse pour accomplir des progrès dans ce domaine. Le Haut Représentant s'est déclaré fermement convaincu qu'il est essentiel de mettre en place un système judiciaire pleinement indépendant, sans lequel un développement économique à long terme et une protection efficace des libertés individuelles seraient impossibles. Comme l'avait soulignée la Présidence de la Bosnie-Herzégovine devant le Conseil de sécurité en novembre 1999, il est nécessaire d'établir des frontières sûres. Lorsque les frontières sont poreuses comme elles l'étaient dans le passé, le Trésor public perd des millions et la voie est ouverte à la corruption dans les services douaniers. M. Petritsch a expliqué que face à linertie de la présidence, il avait dû exercer ses pouvoirs et imposer les Services frontaliers de l'Etat.
Rappelant que depuis 1997 la présidence du Conseil des Ministres qui est léquivalent dun rôle de Premier Ministre - a été assurée par rotation, le Haut Représentant a estimé que ce compromis était probablement nécessaire pour assurer le fonctionnement de linstitution au début. L'année dernière, la Cour constitutionnelle avait, toutefois, statué que la rotation était inconstitutionnelle et devrait donc être remplacée par un autre système. Depuis février 2000, cette institution commune, qui est centrale à l'instauration de la démocratie en Bosnie-Herzégovine, ne fonctionne plus. La nouvelle loi sur le Conseil des ministres est loin de résoudre avec succès ce problème. Les élections municipales tenues le 8 avril 2000 se sont déroulées calmement, sous la supervision de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), du Groupe international de police et de la Force de stabilisation multinationale (SFOR). A cet égard, M. Petritsch a fait observer que le pluralisme politique montre que la démocratie en Bosnie-Herzégovine prend forme et que les électeurs commencent à prendre conscience de la défense de leurs intérêts. De l'avis du Haut Représentant, les Accords de Dayton fonctionnent en Bosnie-Herzégovine. La solution qui y est apportée, à savoir l'adhésion au principe de la multiethnicité et l'élimination de l'épuration ethnique, ainsi que l'insistance sur la réforme politique et économique, est appropriée, a estimé le Haut Représentant. C'est une solution que l'on peut également appliquer ailleurs, notamment au Kosovo.
Déclarations
M. ANWARUL KARIM CHOWDHURY (Bangladesh), relevant les problèmes mentionnés par le Haut Représentant en ce qui concerne la mise en uvre de la Déclaration de New York, a dit craindre que cela soit la véritable réalité en Bosnie-Herzégovine. Il s'est dit inquiet du fait que le Haut Représentant ait dû lui-même utiliser ses pouvoirs pour imposer des services frontaliers. La participation active de toutes les autorités de Bosnie-Herzégovine, a dit le représentant, déterminera, dans une large mesure, le degré de participation de la communauté internationale aux efforts de reconstruction en Bosnie-Herzégovine. La lassitude des donateurs est bien réelle, a dit le représentant, avant de juger utile de concentrer les ressources disponibles sur les priorités fixées par le Haut Représentant. Abordant le volet économique, M. Chowdhury s'est félicité des initiatives prises jusqu'ici surtout en matière de privatisations. Il a terminé en soulignant combien il est important que les différentes entités redoublent defforts pour se conformer aux récentes décisions relatives aux droits de l'homme. Il a, par ailleurs, salué les efforts pour régler le problème des réfugiés et plaidé pour l'indépendance du système judiciaire.
M. ALFONS HAMMER (Pays-Bas) a noté que l'incapacité des autorités en Bosnie- Herzégovine constitue un des obstacles majeurs à la mise en uvre des Accords de paix de Dayton. Le retour des réfugiés et des personnes déplacées est une priorité car il permettra de garantir le succès de cette mise en uvre. La délégation des Pays-Bas est encouragée par le fait que les électeurs en Bosnie- Herzégovine veillent à ce que leurs intérêts soient défendus par les candidats élus.
M. YVES DOUTRIAUX (France) a souligné que le temps presse et que l'assistance internationale ne pourra demeurer au niveau actuel. D'autres dossiers mobilisent l'attention et les ressources. Les acteurs locaux doivent être incités à prendre leurs responsabilités et ce n'est pas simple, a dit le représentant. Pour lui, le dilemme se trouve entre la nécessité pour le Haut Représentant d'imposer des réformes et son souhait de faire prendre conscience à ces autorités des responsabilités qui doivent être les leurs. Les priorités de la France, a poursuivi le représentant, recoupent celles du Haut Représentant. Il s'agit d'affaiblir l'emprise des partis nationalistes sur la société, de renforcer et d'améliorer le fonctionnement des institutions, de créer le contexte nécessaire au redémarrage économique et de favoriser les retours des réfugiés et des personnes déplacées. En ce qui concerne le problème des réfugiés, il faut profiter de la situation nouvelle, liée notamment au changement politique en Croatie, pour résoudre ce problème dans un cadre régional. Les dernières municipales ayant apporté un degré croissant de pluralisme dans la vie politique bosnienne, il faut espérer, a dit le représentant, que cette tendance soit confortée par les prochains scrutins. Les exemples régionaux mais aussi les réformes à mener dans le secteur des médias et les actions à prendre dans le domaine du financement des partis politiques doivent contribuer à cette évolution nécessaire vers plus de démocratie. L'adoption d'une loi électorale permanente, conformément aux décisions maintes fois réitérées de la communauté internationale, nous paraît également être une des voies importantes pour conforter cette évolution avant de s'attarder aux questions économiques.
M. Doutriaux a ainsi estimé que la prochaine réunion de la Conférence sur la mise en uvre des accords de paix au niveau ministériel devrait accorder une importance particulière aux priorités économiques, véritable outil de réforme, y compris par l'effet de ces mesures dans le domaine politique. Il a plaidé pour la création d'un espace économique commun qui passe par l'élimination des barrières de tous ordres et l'harmonisation des législations entre les deux entités. Il faut relancer les privatisations, en particulier la privatisation des services publics, a dit le représentant en soulignant que la réforme de l'économie doit viser entre autres à promouvoir l'investissement étranger. Tout cela, a ajouté le représentant, doit s'accompagner d'un renforcement de la lutte contre la corruption et contre la criminalité organisée.
L'Union européenne et ses Etats membres, qui sont de loin les plus importants contributeurs en Bosnie-Herzégovine, ont la capacité de jouer un rôle déterminant, a dit le représentant en soulignant que la perspective européenne s'accompagne de conditions à respecter. La "feuille de route" et le processus des accords de stabilisation et d'association sont des instruments utiles à cette fin. Le représentant a terminé en posant quatre questions au Haut Représentant. Comment perçoit-il la possibilité, dans un délai limité, de faire la différence sur certains dossiers cruciaux tout en favorisant le passage de relais, dans le cadre de l'appropriation, aux autorités locales? Quelles conséquences peuvent être attendues des prochaines élections pour la poursuite des réformes nécessaires? Que peut-on faire, à plus long terme, pour assurer une cohésion durable de ce pays? Quelles conséquences peuvent avoir les évolutions régionales?
M. OTHMAN JERANDI (Tunisie) a estimé que la Bosnie-Herzégovine connaît une évolution lente mais certaine malgré les manuvres d'obstruction et les retards. Le représentant s'est particulièrement félicité des premières élections municipales qui se sont déroulées sans incident majeur et qui ont abouti à une avancée du parti multiethnique. Il a aussi salué les mesures prises par la Mission des Nations Unies en matière de restructuration de la police pour en modifier le caractère et favoriser une meilleure intégration. Pour le représentant, ces mesures contribuent sans aucun doute au renforcement du sentiment d'unité nationale. Il a appelé la communauté internationale à assurer le succès de la réforme judiciaire. Une justice impartiale et fiable contribuera au rejet de la culture de l'impunité et à la naissance d'un Etat de droit, a insisté M. Jerandi, avant d'appeler à davantage d'efforts en ce qui concerne le problème des réfugiés et des personnes déplacées et l'insécurité. Ces efforts doivent être appuyés par la communauté internationale, a dit le représentant en saluant, par ailleurs, l'initiative relative à la création d'un contingent de police de Bosnie-Herzégovine pour les opérations de paix de l'ONU. Selon lui, une telle initiative ne pourra qu'avoir un effet bénéfique sur l'image d'une Bosnie multiethnique et prospère. Il a conclu en insistant sur limportance de l'engagement de la communauté internationale car, a-t-il dit, la paix ne peut être réelle sans un développement économique durable que la communauté internationale peut encourager.
M. GENNADI M. GATILOV (Fédération de Russie) a estimé que la Bosnie- Herzégovine doit compter sur elle-même et faire appel à ses ressources internes. Il n'existe aucune alternative à la mise en uvre intégrale et effective des Accords de paix de Dayton. On note quelques progrès notables dans cette mise en uvre. L'adoption d'une loi électorale et la délivrance d'un passeport unique figurent parmi les mesures positives prises par les autorités de Bosnie- Herzégovine. Le retour des réfugiés, en particulier des minorités ethniques, devrait être réglé rapidement comme l'a souhaité M. Petritsch. La Bosnie- Herzégovine reste en grande mesure un protectorat de la communauté internationale et donc assujettie à l'aide internationale. Le renforcement des institutions de Bosnie-Herzégovine et la restructuration économique du pays sont indispensables pour garantir un développement durable et une stabilité dans le pays.
M. STEWART ELDON (Royaume-Uni) a déclaré que son pays appuie particulièrement les efforts du Haut Représentant pour la mise en uvre des Accords de paix en Bosnie-Herzégovine, visant à accorder la priorité à la réforme économique et à veiller à ce que les autorités de Bosnie-Herzégovine s'acquittent de leurs obligations pour assurer un meilleur avenir à leur pays. La réforme institutionnelle doit être accompagnée d'une restructuration économique et de progrès dans le domaine des droits de l'homme. Le Royaune-Uni fait siennes les inquiétudes concernant l'échec du parlement d'adopter une nouvelle loi sur les élections, et les obstacles dressés par la partie serbe au sein de la Cour constitutionnelle. A cet égard, M. Eldon a souhaité que le Haut Représentant exprime ses vues sur les moyens permettant de régler ces difficultés. Bien que l'économie nationale ait enregistré des progrès plus importants que ceux escomptés, il subsiste de grandes faiblesses sous-jacentes. C'est pourquoi, le peuple de Bosnie-Herzégovine doit prendre conscience qu'une réforme économique est essentielle. De même, il faudrait accomplir des progrès importants pour faire face aux conséquences de la guerre. Le Royaume-Uni se félicite de l'arrestation de Momcilo Krajisnik et estime que cette arrestation est un message clair aux prévenus qui ne devraient se faire aucune illusion sur leur impunité. Le Royaume-Uni se félicite également du retour des réfugiés des minorités ethniques et émet l'espoir que le nouveau gouvernement en Croatie aura un impact positif sur le retour des réfugiés dans la région.
M. MICHEL DUVAL (Canada) a rappelé que le Haut Représentant arrive d'Ottawa où il a eu des réunions extrêmement constructives avec les ministres canadiens des affaires étrangères et de la coopération internationale ainsi qu'avec deux des commissions parlementaires. Compte tenu de ces entretiens, je ne juge pas utile, a dit le représentant, de réitérer le point de vue du Canada sur le travail du Haut Représentant en Bosnie-Herzégovine. Il a assuré le Haut Représentant de l'appui du Canada à ses efforts tendant à instaurer une paix durable dans le pays. Le représentant a posé une question pour savoir ce que le Haut Représentant et la communauté internationale peuvent faire pour éliminer le paradoxe entre l'avancée des partis modérés comme l'ont montré les dernières élections municipales d'avril dernier et l'attitude moins progressiste des dirigeants actuels de la Bosnie- Herzégovine?. Comment tirer parti de la tendance politique mise à jour par les élections municipales?
M. JAMES B. CUNNINGHAM (Etats-Unis) a noté que la Bosnie-Herzégovine commence la transition vers la paix et la démocratie et à cet égard, il a encouragé le Haut Représentant et son équipe à poursuivre leurs efforts. Il est essentiel de continuer à se pencher sur les domaines prioritaires, à savoir la réforme économique, le retour des réfugiés et des personnes déplacées et la mise en place d'un système judiciaire efficace. Les dirigeants doivent prendre conscience de la défense des intérêts de leur pays. Le succès de la mise en oeuvre des Accords de paix en Bosnie-Herzégovine devrait inspirer les pays de la région. C'est pourquoi, il ne faudrait épargner aucun effort.
M. AGAM HASMY (Malaisie) a estimé que les progrès dans le processus de mise en uvre de l'Accord de Dayton sont bien réels même s'ils restent lents. Il s'est particulièrement félicité de la tenue des élections municipales d'avril dernier en saluant la participation élevée surtout en Republika Sprska malgré les appels au boycott. C'est un échec des extrémistes et il faut encourager cette tendance, a dit le représentant en estimant que le signal est clair; le peuple s'achemine vers une politique de modération. Cette tendance, a-t-il ajouté, aura une incidence très forte sur l'ensemble de la région, en particulier au Kosovo. Beaucoup reste à faire et le succès du processus de paix dépend tout autant de l'appui de la communauté internationale que de l'engagement de la population et de ses dirigeants. La participation de toutes les populations est importante et il faut se féliciter du concept de prise en charge du Haut Représentant, a souligné le représentant. Il a appelé, dans ce contexte, à des mesures politiques fermes pour faire obstacle aux manuvres d'obstruction de certains individus. Saluant les trois priorités fixées par le Haut Représentant, le représentant a souligné que le développement économique et la création des institutions démocratiques sont un enjeu essentiel pour une paix durable en Bosnie-Herzégovine. Il a encouragé le Haut Représentant à collaborer avec le Tribunal international pour l'ex- Yougoslavie.
M. VALERI KUCHYNSKI (Ukraine) a noté qu'en dépit des problèmes liés à la mise en uvre des aspects civils des Accords de paix, la situation générale en Bosnie-Herzégovine semble plus prometteuse. Peu à peu, le pays - grâce à l'assistance de la communauté internationale, progresse vers un meilleur avenir. Les activités du Haut Représentant et de son Bureau continuent de jouer un rôle vital en vue de restaurer la paix et la stabilité dans cette région des Balkans. C'est pourquoi, l'Ukraine continuera à apporter son appui au Haut Représentant. Evoquant la question de l'application des lois relatives à la propriété foncière, la délégation ukrainienne a demandé au Haut Représentant d'expliquer les retards liés à l'examen des réclamations présentées par certains propriétaires. Comment le Haut Commissariat va-t-il procéder en la matière? Quelles sont les mesures prises par le Bureau du Haut Représentant pour éliminer les actes de discrimination à l'encontre des minorités et des réfugiés et personnes déplacées en ce qui concerne le respect de leurs droits sociaux et économiques, en particulier la délivrance de cartes nationales d'identité. Quelles sont les vues du Bureau du Haut Représentant sur les perspectives de création de forces armées unifiées en Bosnie-Herzégovine?
Mme SELMA ASHIPALA-MUSAVYI (Namibie) s'est félicitée de divers développements positifs intervenus en Bosnie-Herzégovine depuis l'année dernière et notamment de l'adoption par l'Assemblée parlementaire, en novembre 1999, d'une loi sur l'asile et l'immigration et d'une autre sur les réfugiés et les personnes déplacées. Elle a aussi noté avec satisfaction qu'un projet de Règles de procédure parlementaire permanentes doit être incorporé à la procédure législative, et qu'une loi sur le Conseil des ministres a été adoptée le 13 avril 2000. La représentante a également salué la proclamation du "district de Brcko", accompagné de la nomination d'un gouvernement par intérim et d'une Assemblée de district, qui représente la première étape à partir de laquelle une Bosnie- Herzégovine multiethnique et multireligieuse pourra être bâtie. Toutefois, elle s'est dite préoccupée par le peu de progrès accomplis dans le cadre des programmes de privatisation, par le manque de volonté politique manifesté au plus haut niveau et particulièrement par les législateurs de la Haute chambre du Parlement. La représentante a également critiqué la manière dont les droits de l'homme et le droit humanitaire sont appliqués et pratiqués dans ce pays.
Mme Ashipala-Musavyi a espéré que, dans le cadre du retour des personnes réfugiées et déplacées à l'intérieur du pays dans leurs foyers et régions, les dirigeants des deux entités prendront les mesures nécessaires pour que la Loi sur la propriété soit appliquée dans le pays. Elle a espéré que la réalisation du Pacte de stabilité contribuera à une accélération de la reprise économique et à la création d'emplois. Selon la représentante, en dépit des problèmes que soulève l'application des Accords de Dayton/Paris, les autorités des deux entités n'ont pas de possibilité plus significative que la coopération avec le Bureau du Haut Représentant et avec la communauté internationale pour l'instauration d'une paix complète en Bosnie-Herzégovine.
M. CHEICKNA KEITA (Mali) a lancé un appel à la Présidence collégiale à faire montre de volonté politique pour assurer la mise en uvre des Accords de Dayton/Paris. Le représentant s'est félicité des efforts visant à la restructuration de la police, la consolidation de l'état de droit et la réforme judiciaire. Saluant les autres progrès enregistrés dans la situation générale du pays, le représentant a toutefois reconnu que malgré l'importante contribution de la Mission des Nations Unies, les initiatives continuent de se heurter à des manuvres d'obstruction. A cet égard, il a qualifié d'indispensable l'appui du Conseil pour anéantir les forces réticentes au changement. Le représentant a terminé en soulignant que le développement économique est le meilleur garant de la paix et en appelant, en conséquence, les autorités à coopérer avec les organisations financières internationales pour intégrer le pays dans les structures euro-atlantiques. Il a aussi apporté son appui aux trois priorités fixées par le Haut Représentant.
Mme ANA MARIA MOGLIA (Argentine) s'est félicitée du rapport très détaillé présenté ce matin par le Haut Représentant pour la mise en uvre des Accords de paix en Bosnie-Herzégovine. Elle a déploré les obstructions imposées par certains représentants des autorités de Bosnie-Herzégovine. Il est important de souligner la forte participation aux élections municipales qui témoigne de l'intérêt accru des électeurs à légard de la défense de leurs droits et de la stabilité future en Bosnie-Herzégovine. La délégation argentine se félicite de l'augmentation des retours de réfugiés et personnes déplacées issues des minorités.
Mme PATRICIA DURRANT (Jamaïque) a estimé que dans l'ensemble, les deux exposés faits jusqu'ici par le Haut Représentant, montrent que son Bureau et les différentes organisations responsables de la mise en uvre des Accords de paix font face à des défis énormes d'autant qu'il s'agit, en Bosnie-Herzégovine, de mettre en place des institutions multiethniques. Il est vrai, a reconnu la représentante, que tout dépend de la participation de toute la population bosniaque et de ses dirigeants ainsi que de l'appui de la communauté internationale. Pour elle, la paix et la stabilité sont intrinsèquement liés à la coexistence pacifique et à la réconciliation nationale. Sans ces deux éléments, les efforts de développement durable resteront vains. La représentante a souligné que la Déclaration de New York est un élément essentiel au processus en cours. Elle a souhaité savoir ce qu'il en est de la loi relative à l'asile et à l'immigration et aux personnes déplacées? Ont-elles contribué à la mise en place d'un cadre juridique adapté concernant les réfugiés et les personnes déplacées, a demandé la représentante. Elle a de plus estimé que la consolidation des institutions officielles est un élément important et s'est, à cet égard, montrée inquiète du rythme lent de l'adoption des lois. La représentante a aussi souhaité savoir ce qu'il en est du travail du Conseil consultatif. Elle a, par ailleurs, espéré que le manque de ressources ne retardera pas la mise en uvre des mesures relatives aux personnes disparues et des exhumations. La représentante a également demandé au Bureau du Haut Représentant de mieux cibler ses interventions pour faire face aux obstructions au retour des minorités. Sur le volet économique, elle a souhaité connaître les mesures prises pour le renforcement des capacités, fondement d'un développement économique durable.
M. WANG YINGFENG (Chine) a estimé que la situation en Bosnie-Herzégovine a beaucoup évolué depuis novembre 1999. Toutefois, la formation des institutions nationales a peu progressé et cette lenteur entraîne des difficultés à la mise en uvre des autres volets des Accords de paix. La population a un rôle crucial pour garantir le succès de ces Accords.
Réponses aux déclarations
Répondant aux questions posées par les délégations, le Haut Représentant a commencé par le volet économique pour dire que l'instauration d'une atmosphère propice aux activités économiques suppose des mesures de privatisation ainsi quun cadre institutionnel et un cadre judiciaire favorables aux investissements. Il s'agit, a-t-il dit, de créer un système de réglementation impliquant par exemple des réformes bancaires et fiscales. Le Haut Représentant a poursuivi sur le volet politique et expliqué qu'en ce qui concerne les élections générales prévues en automne, il faut s'attendre à d'autres progrès et faire comprendre à l'électorat l'importance des questions économiques pour leur vie quotidienne par rapport aux questions politiques. Il faut espérer, a dit le Haut Représentant, l'émergence d'une génération nouvelle qui viendrait donner un espoir de renouveau dans la vie politique. L'instauration d'un système politique digne de ce nom exige l'examen attentif des problèmes de réconciliation dont la solution permettra de donner une certaine cohésion à la société. Dans ce contexte, l'arrestation des criminels de guerre et la réforme éducative sont des projets à long terme mais nécessaires. La nature de la multiethnicité doit, par exemple, être bien reflétée dans les programmes et manuels scolaires. Le retour des réfugiés et des personnes déplacées sont également un facteur de cohésion, a dit le Haut Représentant avant de souligner la place particulière du développement économique. Il faut faire comprendre aux gens qu'ils ont tout à gagner d'un processus de prospérité sociale et économique et que la tolérance serait le premier pas vers un futur meilleur. En ce qui concerne la loi électorale, le Haut Représentant a indiqué que le Conseil de mise en uvre de l'OSCE qui doit se tenir à la fin de ce mois, aura à réexaminer la question pour décider de la transmettre au Parlement. En effet, les élections de l'automne ne pourront se faire selon cette loi puisqu'elle n'a pas été adoptée par le Parlement. Ces élections se dérouleront donc selon les règles provisoires de l'OSCE en attendant la prochaine décision du Conseil ministériel.
Pour le moment, il est prévu que les élections soient organisées et financées par l'OSCE. A la question concernant la mise à l'écart du nationalisme par les électeurs, le Haut Représentant a jugé essentiel d'exploiter toutes les possibilités des élections et de répéter que le succès est possible. Il faut insister sur la réforme économique et en fait, sur l'habilitation économique. Le Bureau du Haut Représentant veille d'ailleurs à ce que les dirigeants assument leur responsabilité pour ce qui est de l'intérêt de leur population. A cet égard, la communauté internationale doit maintenir ses conditions, a souligné le Haut Représentant avant d'attirer l'attention sur les programmes qui ont été lancés pour encourager les journalistes locaux à transmettre avec plus de vigueur les informations. Il a ajouté que, dans ce contexte, le journalisme d'investigation revêt une importance particulière. L'indépendance des médias doit être encouragée étant donné le rôle "terrible" qu'ils ont joué pendant la guerre.
S'agissant de la réforme militaire, le Haut Représentant a réaffirmé que la constitution de forces armées unifiées sont une perspective à plus long terme. Aujourd'hui, il faut commencer à procéder à une refonte des trois groupes existants. Soulignant la question de la sécurité humaine, il a mis l'accent sur le rôle déterminant du Comité permanent. Le Bureau, a-t-il poursuivi, a déjà réussi à faire réduire cette année le budget militaire de 50%. Dans ce contexte, le nouveau gouvernement de Zagreb a contribué à accroître la transparence et ceci vient renforcer les efforts du Bureau, a dit le Haut Représentant avant de s'arrêter sur la question concernant les lois sur la propriété. Il s'agit cette année, a-t-il dit, d'accélérer les choses en se félicitant des initiatives de certains donateurs comme les Etats-Unis d'apporter des sommes d'argent pour renforcer la capacité locale de mise en uvre de ces lois. Pour ce qui est des mesures visant à prévenir la discrimination à l'égard des anciens réfugiés et la distribution des cartes d'identité, le Haut Représentant a indiqué que son Bureau veille à la pleine application de la loi et qu'il est même intervenu pour imposer la distribution des cartes d'identité lorsque les autorités s'y refusent. Le Pacte de stabilité, a-t-il souligné, se concentre sur le retour des réfugiés au niveau régional. La contribution du Pacte est une chose importante dans la région.
Venant aux droits sociaux et économiques, le Haut Représentant a indiqué que son Bureau est actif dans les questions touchant l'accès aux pensions, l'emploi et l'élimination de la discrimination de certaines entreprises publiques de service à l'égard des minorités et des anciens réfugiés. Répondant à la question concernant les lois sur l'asile et l'immigration adoptées en novembre dernier, il a estimé qu'il s'agit d'un élément qui contribué à l'effort global dans de domaine. Il a d'ailleurs ajouté que la Bosnie-Herzégovine, qui est surtout un pays d'émigration, a accueilli, cette année, des réfugiés du Kosovo. Pour ce qui est du travail du Conseil consultatif, le Haut Représentant a déclaré qu'il a apporté une contribution très importante et reçu un appui du Conseil de l'Europe en ce qui concerne le respect des droits sociaux et économiques. Concluant sur l'adhésion de la Bosnie-Herzégovine au Conseil de l'Europe, le Haut Représentant a dit espérer que les trois conditions fondamentales posées jusqu'ici seront remplies au cours des prochains mois par les autorités de ce pays.
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