En cours au Siège de l'ONU

DH/G/1321

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME SE PENCHE SUR LA QUESTION DE LA RATIONALISATION DE SES TRAVAUX

26 avril 2000


Communiqué de Presse
DH/G/1321


LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME SE PENCHE SUR LA QUESTION DE LA RATIONALISATION DE SES TRAVAUX

20000426

Présentation du rapport du Groupe de travail sur le renforcement des travaux de la Commission

La Commission des droits de l'homme a procédé, cet après-midi, à un débat sur la rationalisation de ses travaux. Dans ce cadre, elle a notamment entendu la Présidente de la session de l'an dernier de la Commission et Présidente du Groupe de travail intersession sur le renforcement de l'efficacité des mécanismes de la Commission, Mme Anne Anderson.

Mme Anderson a indiqué que, dans son rapport, le Groupe de travail recommande notamment de fusionner les mandats de l'Expert indépendant sur l'ajustement structurel et du Rapporteur spécial sur la dette extérieure; de modifier le mandat du Rapporteur spécial sur les conséquences néfastes des mouvements et déversements illicites de produits et déchets toxiques et nocifs pour la jouissance des droits de l'homme afin qu'il s'occupe désormais des droits de l'homme et de l'environnement; de remplacer le Groupe de travail sur la détention arbitraire par un rapporteur spécial sur la détention arbitraire; de mettre fin au mandat du Rapporteur spécial sur l'utilisation de mercenaires et de recommander que cette question soit dorénavant examinée directement par l'Assemblée générale; et de mettre fin au mandat du Groupe de travail des formes contemporaines d'esclavage et transférer celles de ses responsabilités qui ne sont pas actuellement assumées par d'autres mécanismes à un nouveau rapporteur spécial sur les formes contemporaines d'esclavage.

En ce qui concerne la Sous-Commission, le Groupe de travail recommande qu'elle puisse continuer de débattre de situations dont la Commission n'est pas saisie. Selon le Groupe de travail, il conviendrait par contre que la Sous- Commission n'adopte pas de résolutions visant des pays spécifiques. Le Groupe de travail recommande en outre que la session annuelle de la Sous-Commission ait une durée de trois semaines.

Les représentants du Japon, du Brésil, de l'Inde, de la Malaisie, de l'Égypte et de la République islamique d'Iran ont fait des déclarations, ainsi que les représentants des organisations non gouvernementales suivantes : Human Rights Watch et Amnesty International; Human Rights Advocates; Mouvement indien *ðTupaj- Amaru+ð; Centre Europe-tiers monde, South-Asia Human Rights Documentation Centre.

Demain matin, à 10 heures, la Commission se prononcera sur les projets de résolution et de décision qui lui sont présentés au titre des droits civils et politiques et de l'intégration des droits fondamentaux des femmes et de la violence contre les femmes.

Présentation du rapport du Groupe de travail sur le renforcement de l'efficacité des mécanismes de la Commission

MME ANNE ANDERSON, Présidente de la cinquante-cinquième session de la Commission des droits de l'homme et Présidente du Groupe de travail sur le renforcement de l'efficacité des mécanismes de la Commission, présentant le rapport du Groupe de travail, a rappelé que la première contribution au processus visant la rationalisation des travaux de la Commission avait été le rapport présenté sur la question par le bureau de la session de 1998, rapport qui avait été publié sous la cote E/CN.4/1999/104. Tout en reconnaissant que ce rapport avait alors été hautement controversé, Mme Anderson a souligné qu'il avait néanmoins été le résultat d'un travail de fond mené avec sérieux et assurant un ordre du jour ambitieux pour le Groupe de travail.

Mme Anderson a déclaré qu'il est évident qu'aucune délégation n'a été totalement satisfaite par le rapport de cette année. Certaines auraient préféré aller plus loin dans certains domaines alors que d'autres estimaient que l'on était allé trop loin sur tel ou tel point. Le résultat que constitue le rapport du Groupe de travail est donc le fruit de compromis de la part de toutes les délégations. L'approche consistant à privilégier le consensus a bien fonctionné dans le contexte de ce Groupe de travail, a souligné Mme Anderson. La plupart des délégations ont considéré que la tâche consistant à améliorer l'efficacité des mécanismes de la Commission était un défi permanent. Il appartiendra à la Commission de décider le rythme auquel il conviendra désormais d'avancer en la matière.

Dans son rapport (E/CN.4/2000/112), le Groupe de travail estime que la situation financière du Haut-Commissariat aux droits de l'homme doit être considérablement améliorée grâce à un accroissement des contributions provenant du budget ordinaire de l'ONU. En ce qui concerne la rationalisation des mandats, le rapport recommande que l'équilibre entre les mandats thématiques reflète grosso modo l'égalité reconnue des droits civils et politiques et des droits économiques, sociaux et culturels. Au titre de la rationalisation des mandats existants, le Groupe de travail recommande de fusionner les mandats de l'expert indépendant sur l'ajustement structurel et du Rapporteur spécial sur la dette extérieure; de modifier le mandat du Rapporteur spécial sur les conséquences néfastes des mouvements et déversements illicites de produits et déchets toxiques et nocifs pour la jouissance des droits de l'homme afin qu'il s'occupe désormais des droits de l'homme et de l'environnement; de remplacer le Groupe de travail sur la détention arbitraire par un rapporteur spécial sur la détention arbitraire; de mettre fin au mandat du Rapporteur spécial sur l'utilisation de mercenaires et de recommander que cette question soit dorénavant examinée directement par l'Assemblée générale (sixième Commission); et de mettre fin au mandat du Groupe de travail des formes contemporaines d'esclavage et transférer celles de ses responsabilités qui ne sont pas actuellement assumées par d'autres mécanismes à un nouveau rapporteur spécial sur les formes contemporaines d'esclavage. Le Groupe de travail recommande d'autre part que la Commission envisage d'examiner les résolutions thématiques sur une base biennale autant que possible.

S'agissant de la procédure confidentielle d'examen de communications sur des situations de pays (conformément à la résolution 1503 du Conseil économique et social), le Groupe de travail recommande que la phase précédant les débats de la Commission qui se déroule actuellement en trois temps ne comprenne désormais que deux étapes. Il pense que cette solution permettrait, tout en continuant d'assurer le méticuleux filtrage indispensable, de réduire les délais excessifs dont souffre la procédure actuelle. Le Groupe de travail des communications se réunirait tous les ans immédiatement après la Sous-Commission, examinerait les communications reçues et toutes réponses adressées par des gouvernements, puis établirait son rapport, notamment des recommandations sur les situations qu'il conviendrait de renvoyer au Groupe de travail des situations. Ce dernier se réunirait alors un mois au moins avant la Commission et examinerait le rapport du Groupe de travail des communications, déciderait de renvoyer ou non une situation dont il serait saisi à la Commission et établirait un rapport dans lequel il dégagerait les principaux sujets de préoccupation. En renvoyant une situation à la Commission, le Groupe de travail des situations devrait normalement proposer un projet de résolution ou de décision concernant cette situation. Le rapport précise qu'il conviendrait de rendre plus constructif l'examen des situations 1503 par la Commission et recommande de tenir deux sessions privées en vue d'examiner les recommandations du Groupe de travail des situations.

En ce qui concerne la Sous-Commission, le Groupe de travail recommande qu'elle puisse continuer de débattre de situations dont la Commission n'est pas saisie. Elle devrait aussi être autorisée à examiner des questions urgentes concernant des violations graves des droits de l'homme dans n'importe quel pays. Il conviendrait par contre que la Sous-Commission n'adopte pas de résolution visant des pays spécifiques. Le Groupe de travail recommande en outre que la session annuelle de la Sous-Commission ait une durée de trois semaines.

Débat sur la rationalisation des travaux de la Commission

M. KOICHI HARAGUCHI (Japon) a estimé que le Groupe de travail sur le renforcement de l'efficacité des mécanismes de la Commission des droits de l'homme a bien travaillé. Toutefois, il faut aller encore plus loin dans la réforme. Le Japon se félicite que les thèmes de l'approfondissement des relations entre la Commission des droits de l'homme et la troisième Commission, de l'élargissement de la base de recrutement des rapporteurs ou représentants spéciaux ou encore du renforcement du Haut-Commissariat aux droits de l'homme aient été privilégiés par le Groupe de travail. Le Japon souhaite que la Sous-Commission reste un organe consultatif et ne devienne pas un organe décisionnel qui serait fondé à adopter des résolutions. Le Japon n'est pas non plus favorable à l'augmentation du nombre des titulaires de mandats. Une telle augmentation serait susceptible de porter atteinte à la qualité des rapports, faute de soutien suffisant. C'est pourquoi le Japon espère que le critère général de la rationalisation des mandats, décrit dans le rapport du Groupe de travail, sera pleinement respecté. Le représentant japonais a enfin estimé que la réforme des méthodes de travail de la Commission devrait s'attaquer à la question du nombre trop élevé de résolutions et de séances de nuit.

M. CELSO AMORIM (Brésil) a déclaré que l'examen des mécanismes de la Commission des droits de l'homme devait être placé dans une perspective à long terme. Il a expliqué qu'il était satisfait du travail réalisé dans la tentative de rationalisation du travail de la Commission. Il s'est déclaré convaincu que ces améliorations devraient avoir un impact dans la protection et la promotion des droits de l'homme. Nous devons affiner nos instruments et les renforcer, a-t-il souligné. Le représentant a attiré l'attention sur le fait qu'aujourd'hui, les peuples du monde sont plus que jamais liés les uns aux autres. Il a remarqué que les débats au sein de la Commission des droits de l'homme sont parfois politiquement motivés et très vifs, ce qui n'incite pas à la solidarité. Il serait utile de trouver des critères universellement acceptés pour étudier la situation des droits de l'homme dans toutes les parties du monde. La légitimité ne serait plus discutable comme c'est le cas aujourd'hui. On éviterait ainsi les distorsions de certains programmes nationaux par rapport aux objectifs de départ. Le Haut Commissariat a suffisamment d'expérience pour pouvoir procéder maintenant à une rationalisation.

M. A. GOPINATHAN (Inde) a passé en revue les points importants contenus dans le rapport du Groupe de travail sur le renforcement de l'efficacité des mécanismes de protection des droits de l'homme de la Commission. Il a ainsi souligné qu'une importance égale devrait être accordée aux différentes catégories de droits de l'homme, à savoir les droits civils et politiques d'une part et les droits économiques sociaux et culturels d'autre part. L'Inde souhaiterait qu'un nombre équivalent de mandats concernent les deux catégories de droits de l'homme et que des mesures soient prises pour éviter le double emploi. Étant donné que la promotion des droits de l'homme incombe en premier lieu aux États, l'Inde est d'avis que le rôle des mécanismes des droits de l'homme de la Commission doit être celui de catalyseur du renforcement des capacités nationales en la matière. L'Inde souligne par ailleurs que la Commission doit faire preuve de davantage de transparence dans la préparation des résolutions et avancer encore dans la rationalisation de ses méthodes de travail.

M. ALI AMIDON (Malaisie) s'est déclaré extrêmement déçu par le rapport du Groupe de travail, car le rapport ne clarifie pas la question de la durée des mandats des rapporteurs spéciaux. Il a rappelé que sa délégation avait insisté pour qu'une règle de deux mandats maximum soit immédiatement mise en oeuvre pour les rapporteurs spéciaux. Il a regretté de ne pas pouvoir faire avancer ses opinions, mais a déclaré qu'il ne bloquerait pas le consensus sur ce rapport. Il a souligné que la Malaisie avait beaucoup coopéré avec les mécanismes des Nations Unies. Nous n'avons pas d'obligation de coopérer, surtout si un rapporteur spécial est manifestement contre le pays. Il a félicité en conclusion tous ceux qui ont participé à ce long et difficile processus.

M. MOHAMED MOUNIR (Égypte) a salué les efforts déployés par Mme Anderson et pour l'objectivité dont elle a fait preuve en présidant l'une des négociations les plus difficiles menées ces dernières années sur des questions ayant trait aux droits de l'homme. Ces négociations ont attesté que le dialogue équitable et le respect mutuel des points de vue est indispensable pour parvenir à un résultat utile. La réforme est un processus global et c'est pourquoi mettre l'accent sur certains aspects au détriment d'autres aspects serait improductif. Il ne sera possible de juger les résultats exacts de ce rapport qu'en observant la manière dont seront concrètement appliquées toutes les recommandations qu'il contient.

M. ALI KHORRAM (République islamique d'Iran) s'est félicité des avancées concrètes réalisées par le Groupe de travail sur le renforcement des méthodes de travail de la Commission des droits de l'homme. Le représentant a toutefois estimé que le rapport final ne présente aucune solution pratique au problème sensible des mandats visant la situation des droits de l'homme dans certains pays. Les allégations de sélectivité, de politisation, de confrontation n'ont pas reçu l'attention qu'elles méritent a déclaré le représentant. Rien n'a été fait, a-t- il ajouté, pour renforcer les chances d'instaurer un dialogue constructif ou pour approfondir la coopération en tant qu'alternatives à la confrontation entre États. L'Iran estime par ailleurs que l'on n'a pas accordé l'attention requise à la question du renforcement des capacités des États de promouvoir les droits de l'homme. L'Iran souhaiterait enfin que la question des procédures spéciales soit abordée de façon globale.

En dépit de toutes ces remarques, la délégation de l'Iran a décidé de se joindre au consensus sur l'adoption du rapport du Groupe de travail. Elle espère qu'une pleine application des recommandations et considérations contenues dans le rapport permettront quand même de renforcer l'efficacité des mécanismes de protection des droits de l'homme de la Commission, dans le sens de davantage d'objectivité, d'impartialité, d'universalité et de non-politisation.

MME YUONNE TERLINGEN (Human Rights Watch et Amnesty International) a estimé que ce rapport est une occasion manquée. Il manque de substance. Les gouvernements ne manifestent pas leur coopération avec les mécanismes de procédures spéciales. La Commission devrait s'assurer que le Secrétaire général soit informé des États qui refusent de coopérer de façon persistante avec les procédures spéciales, a-t-elle estimé. Des contributions volontaires peuvent fournir des ressources de façon temporaire, mais ce ne peut être une alternative au soutien stable du budget ordinaire. À cet égard, la Commission devrait demander aux États membres de voter les fonds nécessaires dans le cadre du budget ordinaire. En conclusion, la représentante a déclaré que la faiblesse des recommandations contenues dans le rapport du Groupe de travail démontre une fois de plus le manque de volonté politique de la part de nombreux membres de la Commission. Des étapes radicales doivent être franchies pour que les procédures spéciales de la Commission survivent en tant que pierre angulaire du système des Nations Unies dans la promotion et la protection des droits de l'homme.

MME ANNA-LENA SVENSSON-MC CARTHY (Human Rights Advocates, au nom de plusieurs organisations non gouvernementales) a regretté que le rapport du Groupe de travail sur le renforcement des mécanismes de la Commission ne réponde pas aux espoirs que son organisation avait placés dans les travaux de ce groupe. Elle s'est néanmoins félicitée des changements suggérés en ce qui concerne la procédure 1503. Elle a demandé à tous les gouvernements de répondre comme il se doit aux appels urgents qui leur sont adressés par des mécanismes de la Commission. La représentante a exprimé sa profonde déception en ce qui concerne les recommandations du Groupe de travail relatives à la Sous-Commission. En effet, a- t-elle poursuivi, la limitation du mandat de la Sous-Commission et le raccourcissement de ses sessions, sans parler de la manière dont est abordée la question de l'indépendance des membres de la Sous-Commission, constituent autant d'éléments d'insatisfaction susceptibles de contribuer à un affaiblissement de l'efficacité de la Sous-Commission, en particulier dans le domaine de l'action préventive.

M. LAZARO PARY (Mouvement indien *ðTupaj-Amaru+ð) a rappelé que la Déclaration de Vienne souligne la nécessité de rationaliser les mécanismes de protection des droits de l'homme des Nations Unies, afin de les adapter aux changements politiques et économiques. Le représentant a déclaré qu'un des buts de la rationalisation des méthodes de travail de la Commission doit être de remédier aux déséquilibres dans l'intérêt inégal accordé aux deux catégories de droits de l'homme. Le représentant a par ailleurs dénoncé certains États, et notamment la première puissance économique mondiale, qui utilisent les mécanismes de la Commission des droits de l'homme à des fins politiques, n'accordent pas une attention suffisante aux droits de l'homme de la troisième génération que sont le droit à l'alimentation, au logement, au développement ou encore à l'éradication de la pauvreté. Le représentant a estimé que la Commission devrait renforcer les prérogatives des titulaires de mandats. Par ailleurs, la composition de la Sous- Commission devrait être modifiée dans le sens d'une représentation géographique plus équitable. Il a également déclaré que les rapporteurs spéciaux devraient être assujettis aux principes d'indépendance, d'impartialité, de transparence et d'objectivité. Le représentant a enfin rejeté toute idée visant à mettre fin au mandat du Groupe de travail sur les populations autochtones.

M. MALIK OZDEN (Centre Europe-tiers monde) a noté que le rapport du Groupe de travail sur le renforcement de l'efficacité des mécanismes de la Commission des droits de l'homme prévoit toute une série de mesures en cas de refus de coopération s'agissant des droits civils et politiques alors que cette préoccupation doit aussi s'appliquer s'agissant des violations des droits économiques, sociaux et culturels. De plus, il faudra assurer la répartition équilibrée des ressources entre différents mandats au sein du Haut Commissariat.

M. SIRHA CHAKMA (South Asia Human Rights Documentation Centre) s'est dit préoccupé que le consensus auquel est parvenu le Groupe de travail sur le renforcement des mécanismes de la Commission n'ait pas tenu compte de certaines des préoccupations soulevées par les organisations non gouvernementales d'Asie lors de la précédente session de la Commission. Certaines des recommandations du Groupe de travail ne visent pas le renforcement de l'efficacité des mécanismes de la Commission mais plutôt leur destruction et font

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