LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ADOPTE PAR CONSENSUS UNE RESOLUTION SUR LE DROIT AU DEVELOPPEMENT
Communiqué de Presse
DH/G/1309
LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ADOPTE PAR CONSENSUS UNE RESOLUTION SUR LE DROIT AU DEVELOPPEMENT
20000413Elle poursuit son débat sur les groupes et individus particuliers
Genève, le 13 avril 2000 -- La Commission des droits de l'homme a adopté par consensus, cet après-midi, une résolution sur le droit au développement avant de reprendre son débat sur les *ðgroupes et individus particuliers+ð.
Par cette résolution, la Commission affirme que la coopération internationale est plus que jamais reconnue comme une nécessité découlant d'un intérêt mutuel attesté, et donc qu'une telle coopération devrait être renforcée pour soutenir les pays en développement dans l'action qu'ils mènent en vue de résoudre leurs problèmes sociaux et économiques et d'honorer l'obligation qui leur incombe de promouvoir et protéger tous les droits de l'homme.
Poursuivant son débat sur les travailleurs migrants, les minorités, les personnes déplacées, les victimes des formes contemporaines d'esclavage, et autres groupes vulnérables, la Commission a entendu les déclarations des représentants des pays suivants : Roumanie, Équateur, Argentine, Géorgie, Hongrie, Singapour, Ukrainien, Suède, Irlande, Finlande, Turquie, Costa Rica, Saint-Siège, Bélarus, Suisse, Bulgarie, Autriche, Azerbaïdjan, Chypre, Arménie, et Belgique. Ont également participé au débat les représentants du Comité international de la Croix-Rouge, du Fonds des Nations Unies pour l'enfance, de l'Organisation internationale pour les migrations. de l'Organisation internationale du travail et du Programme alimentaire mondial, ainsi que les représentants de trois organisations non gouvernementales : Conseil International des agences bénévoles (au nom également de World Council of Churches, Fédération luthérienne mondiale et Commission internationale catholique pour les migrations); Association pour l'éducation d'un point de vue mondial; Association internationale pour la liberté religieuse.
Les représentants de Cuba, de la Turquie, de Chypre et de l'Arménie ont exercé leur droits de réponse.
La Commission poursuit son débat sur les groupes et individus particuliers jusqu'à minuit. Demain matin, elle entendra la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, qui fera une présentation de son rapport sur la Colombie, suivie d'un débat sur ce rapport.
Adoption d'une résolution sur le droit au développement
Par une résolution sur le droit au développement (E/CN.4/2000/L.14), la Commission invite instamment tous les États à éliminer tous les obstacles au développement à tous les niveaux, en assurant la promotion et la protection des droits économiques, sociaux, culturels, civils et politiques en mettant en oeuvre, au niveau national, de grands programmes de développement qui intègrent ces droits dans les activités de développement, ainsi qu'en oeuvrant à l'instauration d'une coopération internationale efficace. Elle affirme que la coopération internationale est plus que jamais reconnue comme une nécessité découlant d'un intérêt mutuel attesté, et donc qu'une telle coopération devrait être renforcée pour soutenir les pays en développement dans l'action qu'ils mènent en vue de résoudre leurs problèmes sociaux et économiques et d'honorer l'obligation qui leur incombe de promouvoir et de protéger tous les droits de l'homme. Elle se félicite en outre de la décision prise par le Conseil économique et social d'autoriser la création, par la Commission, d'un mécanisme de suivi constitué d'un groupe de travail à composition non limitée et d'un expert indépendant chargé de présenter au Groupe de travail, à chacune de ses sessions, une étude sur l'état d'avancement de la mise en oeuvre du droit au développement.
La Commission se félicite de la confirmation unanime de M. Mohamed-Salah Dembri (Algérie) au poste de Président du Groupe de travail à composition non limitée sur le droit au développement et encourage le Président à engager, à sa discrétion, des consultations officieuses avec tous les acteurs pertinents et/ou parties intéressées afin de se préparer à la convocation de la première session du Groupe de travail pour la fin du mois de septembre 2000 au plus tard. Elle se félicite aussi du consensus auquel sont parvenues toutes les parties quant à la nécessité pour le Groupe de travail à composition non limitée de se réunir en deux sessions avant la prochaine session de la Commission. Elle invite la Haut- Commissaire à lui présenter tous les ans un rapport pendant toute la durée du mécanisme, sur les activités du Haut-Commissariat relatives à l'application du droit au développement et la coordination interorganisations à l'intérieur du système des Nations Unies, s'agissant de l'application des résolutions pertinentes de la Commission. Elle demande au Secrétaire général de présenter à l'Assemblée générale et à la Commission, à leurs prochaines session, un rapport d'ensemble sur l'application des dispositions de cette résolution. Elle demande au Groupe de travail de prendre note des délibérations sur le droit au développement tenues au cours de la présente session de la Commission et de toute autre question afférente au droit au développement:
Suite du débat sur les travailleurs migrants, les minorités, les personnes déplacées et autres groupes vulnérables
M. IOAN MAXIM (Roumanie) a rappelé que sa région a longtemps été considérée comme la poudrière de l'Europe, et ce à juste titre si l'on considère ce qui s'est passé ces dix dernières années. La communauté internationale a réagi et a essayé de mettre un terme à la haine ethnique et religieuse.
Dans ce contexte régional turbulent, la Roumanie a fait de son mieux pour améliorer la protection des droits des personnes appartenant à des minorités ethniques, culturelles, linguistiques ou religieuses. D'abord, elle a adhéré à tous les instruments internationaux et a été la première à ratifier la Convention-cadre européenne pour la protection des personnes appartenant à des minorités nationales. Ensuite, la Roumanie a conclu des traités avec ses pays voisins, notamment afin de préserver l'identité des personnes appartenant à des minorités nationales. L'expérience a montré que les accords bilatéraux sont des instruments de prévention très utiles. De plus, d'importantes mesures ont été prises au niveau national pour faciliter la participation de minorités nationales dans la vie sociale, politique, culturelle du pays. À cet égard, le cadre juridique a été constamment amélioré : que ce soit au niveau de la participation politique des minorités (Roms et Hongrois) ou encore par la restitution aux minorités des biens spoliés pendant le régime communiste.
M. JUAN CARLOS CASTRILLÓN (Équateur) a salué les recommandations de la Rapporteuse spéciale sur les droits de l'homme des migrants, Mme Gabriela Rodríguez Pizarro, parce qu'elles proposent des solutions concrètes aux difficultés de ces personnes. Le représentant a déclaré que les Équatoriens qui ont émigré à l'étranger sont souvent victimes de difficultés graves, comme en témoignent les multiples plaintes reçues par l'administration.
Le représentant équatorien a souligné que les droits de l'homme des migrants doivent être respectés de la même manière que les droits des nationaux. Les États sont souverains en matière d'immigration a reconnu le représentant, mais ils doivent respecter les droits de l'homme des migrants. Il faut que les États prennent les mesures permettant de lutter efficacement contre les préjugés et le racisme. L'Équateur soutiendra le projet de résolution appelant les États à ratifier la Convention des droits de l'homme des migrants.
M. LEANDRO DESPOUY (Argentine) a déclaré que certains pays comme le sien sont favorables à l'accueil de courants migratoires et se dit prêt à recevoir de façon permanente des personnes appartenant à d'autres nationalités. À l'égard des travailleurs migrants, le représentant a déclaré avoir toujours pensé qu'il s'agit d'un groupe vulnérable méritant une attention particulière, notamment par la création de mécanismes spécifiques. Les migrants ont à faire face à de nombreuses difficultés comme le racisme, la discrimination, et bien des difficultés économiques, sociales et culturelles. Le représentant a salué les travaux de la Rapporteuse spéciale sur la question et a appuyé ses conclusions visant à envisager la protection des migrants dans les travaux préparatoires à la Conférence internationale contre le racisme. L'Argentine accorde souvent l'amnistie aux migrants entrés illégalement dans le pays a fait valoir le représentant.
S'agissant des travaux du Rapporteur spécial sur les personnes handicapées, l'Argentine estime que ses propositions représente un progrès important pour le traitement de la question au niveau international. Il a toutefois souligné que l'élaboration d'une convention sur les handicapés nécessitera encore plusieurs années de négociations.
M. DANIEL HELLE (Comité international de la Croix-Rouge) a souligné que le besoin de trouver des réponses efficaces au problème des déplacements de population à l'intérieur des frontières s'est accentué ses dernières années. Le représentant a salué les délibérations en cours et a émis l'espoir qu'elles pourront contribuer à promouvoir une coopération institutionnelle efficace. Le Comité international de la Croix-Rouge s'efforce de porter secours à ceux qui en ont le plus besoin selon le principe d'impartialité. Il considère que les personnes déplacées à l'intérieur des frontières ressortissent au droit humanitaire. Le Comités'efforce d'accomplir son mandat en préservant la confiance de toutes les parties. Le représentant a conclu en se félicitant de l'attention accrue donnée à ces questions par les institutions internationales, y compris au Conseil de sécurité.
M. AMIRAN KAVADZE (Géorgie) a déclaré que les séparatistes abkhazes sont à l'origine de la mort de 10 000 Géorgiens et du déplacement de 230 000 autres. Il n'est toujours pas permis à ces personnes de rentrer chez elles. Le régime séparatiste pille les biens de la population locale et tente d'utiliser les Géorgiens qui reviennent comme des travailleurs réduits à l'esclavage. Le Gouvernement de la Géorgie appuie pleinement les efforts déployés par les différents organes des Nations Unies pour assurer la paix et la sécurité dans la région. Toutefois, la Géorgie souhaiterait que les forces de maintien de la paix des Nations Unies se voient attribuer un mandat qui leur permette de prévenir et d'exercer un contrôle sur les violations des droits de l'homme dans la zone de conflit.
Vivement préoccupée par les tentatives des séparatistes de chasser les personnes d'origine ethnique géorgienne de chez eux, la Géorgie se félicite de l'initiative de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Mme Mary Robinson, de créer une force de réaction rapide qui pourrait être rapidement déployée lorsque cela est nécessaire.
M. ISTVAN LAKATOS (Hongrie) a déclaré que sa délégation se félicite du projet du Haut-Commissariat aux droits de l'homme en faveur de la protection des minorités. Il a souhaité que ce projet attire l'attention de la communauté internationale sur l'importance de la protection des minorités et qu'elle apportera le soutien dont le Groupe de travail a besoin pour renforcer la capacité du Haut-Commissariat à cet égard.
Le représentant hongrois a estimé que, dans le cadre des efforts de résolution des conflits, le processus de restauration de la paix post- conflit ne peut aboutir sans la prise en compte des droits des minorités nationales sans laquelle les situations sont potentiellement porteuses de risques de conflits à venir.
M. ANN HEE KYET (Singapour) a souligné que le bien-être des migrants est important pour tous les États, y compris le sien. Nous soutenons tout le travail fait pour protéger les droits civils et sociaux des migrants, a-t-il affirmé. À Singapour, tous les migrants, permanents ou temporaires ont les mêmes droits que les autres citoyens. Toute politique d'immigration doit se fonder sur de nombreux critères, et le droit des migrants ne représente qu'une seule de ces considérations. L'accueil de ces personnes ne saurait se faire automatiquement. Il faut gérer les questions de migration afin d'éviter les risques sociaux.
Le représentant singapourien a estimé qu'il fallait faire la distinction entre les migrants légaux et les illégaux. Les politiques d'immigration appartiennent aux États, mais beaucoup peut être fait au niveau international. Les migrants illégaux sont particulièrement vulnérables. Il faut une plus grande coopération internationale pour lutter contre cette forme d'immigration.
MME OKSANA BOYKO (Ukraine) a déclaré qu'en tant que pays où vivent des populations appartenant à plus de 110 nationalités, l'Ukraine a toujours accordé son attention aux problèmes des minorités. La loi interdit de façon formelle la discrimination, a précisé la représentante qui a affirmé qu'il n'y a pas dans son pays d'hostilités ou de violence fondées sur l'origine ethnique ou raciale. La participation des minorités au processus de décision politique est assurée par une représentation proportionnelle au Parlement. La représentante a regretté que les ressortissants ukrainiens qui vivent à l'étranger ne soient pas toujours traités de la même façon.
L'un des principaux défis auxquels la communauté internationale est confrontée concerne l'ampleur du phénomène des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays partout dans le monde. Une des priorités de la politique ukrainienne en matière d'immigration est le retour des Tatares de Crimée et autres représentants de minorités qui ont été déportés sous le régime communiste.
MME CATHERINE VON HEIDENSTAM (Suède, au nom des pays nordiques) a déclaré que certains groupes sont plus exposés que d'autres à la discrimination. Une personne handicapée a le droit d'exercer tous ses droits sur un pied d'égalité avec les autres citoyens. Une personne handicapée ne peut être considérée comme un problème ou un fardeau. La Conférence mondiale sur les droits de l'homme de Vienne en 1993 a reconnu que le principe de participation devrait garantir l'égalité des chances pour les personnes handicapées.
Soulignant qu'il existe un lien très fort entre le handicap et la pauvreté, la représentante a rappelé qu'il y aurait 500 millions de personnes ayant des besoins particuliers. Il est estimé que quelques 80% des personnes handicapées dans le monde se trouvent dans les pays en développement et que la plupart d'entre elles sont très pauvres et manquent de l'aide et des services nécessaires à l'amélioration de leur vie quotidienne. Aussi, la représentante a déclaré qu'en dépit des difficultés économiques, les gouvernements devraient accorder une considération particulière à l'intégration de ces personnes dans leurs politiques.
MME LESLEY MILLER (Fonds des Nations Unies pour l'enfance - UNICEF) a rappelé que le Fonds travaille dans plus de 40 pays en partenariat avec les femmes et enfants déplacées en raison des conflits armés ou des catastrophes naturelles. La plupart des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays sont des enfants. La représentante a souligné que la Convention sur les droits de l'enfant demande de prendre en priorité en compte les enfants déplacés à l'intérieur de leur propre pays. Dans le but de renforcer la complémentarité entre les différentes réponses à ce problème, une approche sous-régionale est essentielle pour gérer les crises des personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays, mais aussi à l'extérieur. En d'autres termes, les ressources ne
devraient pas dépendre d'une seule ligne budgétaire, mais devraient être ciblées en fonction des besoins, c'est-à-dire à la fois pour les réfugiés et la population locale, ainsi que pour assurer la sécurité des équipes des institutions spécialisées. Il est essentiel d'envisager la question des déplacements internes de façon globale, a-t-elle réitéré.
M. EAMONN MAC AODHA (Irlande) a déclaré qu'il est essentiel de s'attaquer aux problèmes des personnes handicapées qui sont souvent isolées et victimes de discrimination. À cette fin, il faut se doter de législations et de ressources au niveau national, ainsi que de normes internationales. Il faut également une attention constante et un contrôle de la part des organes internationaux compétents. Les Règles des Nations Unies pour l'égalisation des chances des personnes handicapées est un outil essentiel. Malheureusement, ces règles ayant valeur de principes directeurs, elles n'ont pas force contraignante et n'ont qu'un effet limité. L'adoption d'une convention renforcerait l'autorité morale des règles pour l'égalisation des chances des handicapés, a estimé le représentant.
M. PETKO DRAGANOV (Bulgarie) a appelé l'attention de la Commission sur la population rom, qui ne bénéficie presque nulle part dans les États d'Europe d'un véritable effort d'intégration sociale. Le mode de vie traditionnel de cette population et sa culture sont utilisés comme excuse pour ne pas prendre de mesures en sa faveur. La Bulgarie a adopté, en avril dernier, un programme- cadre pour la réintégration de la population rom dans la société, dont l'un des principaux objectifs est de permettre aux Roms de participer activement aux processus de décision et de gouvernance aux niveaux local, régional et national.
Le représentant a ajouté que les programmes bilatéraux signés avec plusieurs pays européens favorisent l'adoption de mesures pratiques pour une plus grande participation des Roms à la vie et la gestion économique et sociale des pays concernés.
M. MURAT SUNGAR (Turquie) a rappelé que les citoyens turcs vivant en Europe occidentale sont 2,7 millions, dont la plupart appartient à une troisième génération. Selon les statistiques, 80% d'entre eux n'envisagent pas de revenir en Turquie. Pourtant, ils ne participent pas sur un pied d'égalité à la vie politique.
Le représentant a déclaré que les gouvernements devraient mener des politiques d'intégration, et non d'assimilation. Un élément important de ce processus d'intégration serait d'autoriser ces personnes à participer à la vie politique de leur pays de résidence. À cette fin, il faudrait leur garantir le droit de vote et la possibilité d'être élues aux élections locales. Une autre solution consisterait à leur accorder la double nationalité, a-t-il déclaré.
M. ESTEBAN PENROD (Costa Rica) a déclaré que la réflexion sur les droits de l'homme des migrants doit prendre en compte les causes des phénomènes migratoires. Au Costa Rica, plus de 15% de la population est composée de migrants, c'est pourquoi l'État accorde une attention particulière à la protection des travailleurs migrants. Tout doit être fait par les gouvernements pour éliminer les différences entre les habitants. Dans le domaine de la santé, le Costa Rica permet un accès gratuit aux hôpitaux et cliniques à toute la population migrante sur l'ensemble du territoire. Il en va de même en matière d'éducation où un accès égal est garanti aux enfants de migrants.
Le Costa Rica s'efforce également de régulariser la situation des migrants. Plusieurs centaines de milliers d'entre eux ont pu en bénéficier, la majorité en provenance du Nicaragua.
M. GIUSEPPE BERTELLO (Saint-Siège) a déclaré que, dans les pays développés, l'offre de main d'oeuvre étrangère est excessive par rapport aux exigences de leur économie, qui n'arrive même pas à absorber l'offre intérieure. La disparité croissante entre pays développés et en développement, la marginalisation économique et financière de beaucoup de ces derniers, le taux élevé de croissance démographique ainsi que d'autres conditions d'ordre socio- culturel et religieux aggravent la pression migratoire en poussant une foule de personnes s'expatrier pour chercher un futur meilleur pour eux et pour leur famille. En même temps, les gouvernements des pays industrialisés ont tendance à durcir les lois concernant l'entrée de travailleurs étrangers et à renforcer le contrôle aux frontières.
Face à ce tableau, la Rapporteuse spéciale a esquissé un plan d'action en vue de lancer un programme de prévention de la discrimination et de lutte contre les différentes formes de violence contre les migrants ainsi que pour entamer un dialogue entre les gouvernements et la société civile qui puisse déboucher sur des mesures concrètes, car ceux qui subissent les conséquences de cette situation sont des milliers de personnes vulnérables, victimes d'un phénomène qui, loin de s'arrêter, semble être en expansion.
MME SYLVIE AREZES (Organisation internationale pour les migrations - IOM) a rappelé que l'OIM est attachée au principe selon lequel les migrations qui s'effectuent en bon ordre et dans le respect de la dignité humaine sont bénéfiques aux migrants et à la société. La représentante a dressé le tableau de ce qu'elle attend du Rapporteur spécial. D'abord, doit être le porte-parole des sans- parole: il doit représenter les migrants. De plus, le Rapporteur doit être le promoteur de mesures préventives positives qui doivent être prises en amont, afin de respecter le droit des migrants. Enfin, il doit être le trait d'union entre les partenaires intéressés, à savoir les acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux, internationaux et nationaux. En conclusion, la représentante de l'OIM a déclaré que le maître-mot doit être l'effectivité de la protection.
M. M. YUSHKEVICH (Bélarus) a déclaré que son pays compte plus de 100 nationalités. Il a fait valoir que l'attention portée au problème des minorités nationales s'est considérablement accrue et qu'aujourd'hui, une égalité de droit est garantie par la constitution et la loi, sans distinction aucune. Ces minorités bénéficient d'une représentation politique. La minorité polonaise dispose ainsi de son propre parti politique et d'écoles où la langue polonaise est enseignée.
Le Bélarus a signé les instruments internationaux relatifs à la protection des minorités et a créé un comité des affaires religieuses et des nationalités. Le Bélarus est un des rares États où aucune goutte de sang n'a été versée en raison de conflits d'origine ethnique, a fait valoir le représentant.
M. JEAN-DANIEL VIGNY (Suisse) a déclaré qu'il est important de répondre favorablement à l'appel 2000 lancé par la Haut-Commissaire aux droits de l'homme en versant, à l'instar de la Suisse, des contributions volontaires permettant aux minorités sous représentées à Genève de participer au Groupe de travail sur les minorités. Pour intéresser les États à participer davantage à ces activités, le Groupe de travail a décidé de communiquer aux États absents de ses travaux les appréciations faites par leurs minorités sur leur situation dans ces pays, en demandant aux autorités de répondre par écrit à ces allégations et de participer ensuite au débat de la session suivante afin d'y nouer le dialogue avec leurs minorités et ainsi de prévenir tout conflit en la matière.
Dans le même ordre d'idées, le Groupe de travail a fait part de sa volonté de se rendre dans les pays où vivent des minorités à l'invitation de leurs gouvernements. À ce titre, il est réjouissant de constater que la Slovénie et l'île Maurice ont convié le Groupe de travail à venir s'informer sur place de la situation des minorités.
MME GLORIA MORENO FONTES CHAMMARTIN (Organisation internationale du travail - OIT) s'est déclarée très préoccupée par la situation des droit des travailleurs migrants à une époque où la mobilité des travailleurs devient de plus en plus importante. Il y a en fait une détérioration dans de nombreuses parties du monde ; les flux de capitaux se sont accrus mais les lieux de destination de ces flux ce sont concentrés sur un petit nombre de pays. Le fossé dans les salaires entre pays riches et pays en développement s'est creusé ces dix dernières années. Les travailleurs migrants servent à conserver des secteurs qui, sans eux, auraient disparu ; par exemple, 73% des travailleurs agricoles aux États-Unis sont des étrangers. Traitement inhumains, salaires extrêmement bas, tel est le lot commun des travailleurs migrants. L'OIT estime que le Rapporteur spécial pourra aider à la constitution d'une documentation qui aidera à dénoncer les violations des droits des migrants et proposera des mécanismes pour assurer le respect des migrants.
M. PEKKA HUHTANIEMI (Finlande) a déclaré que le principe de non- discrimination est essentiel à la promotion et à la protection des droits des minorités. Il a encouragé les États parties à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale à optimiser la protection de leurs minorités en reconnaissant la compétence du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale pour connaître de plaintes de minorités s'estimant lésées. Le représentant a attiré l'attention de la Commission des droits de l'homme sur la situation des minorités rom et sinti. Si les législations discriminatoires ont été de façon générale abrogées, il importe que les gouvernements contrôlent et répondent aux pratiques de cette nature lorsqu'elles se produisent dans le domaine privé. Le représentant a appelé les gouvernements concernés à prendre les mesures permettant aux membres des minorités rom et sinti de bénéficier pleinement de leurs droits économiques, sociaux, culturels et politiques.
Le représentant finlandais a ensuite abordé la question de la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Il a demandé aux gouvernements de protéger les droits des défenseurs des droits des minorités sexuelles et, là où cela s'avère nécessaire, de légaliser leur activité.
M. CHRISTIAN STROHAL (Autriche) a déclaré que les arrangements internationaux sont des outils importants pour la protection des minorités. En Europe, la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales a été ratifiée par 29 États membres du Conseil de l'Europe, dont l'Autriche, et deux non-membres. Le représentant a estimé que davantage d'efforts sont nécessaires pour donner plus d'effet aux principes contenus dans la Déclaration sur les droits des personnes appartenant à des minorités nationales, ethniques, religieuses ou linguistiques.
Le travail entrepris par le Groupe de travail sur les minorités représente une importante contribution pour que les engagements qui ont été pris en vertu de la Déclaration soient mieux compris par les gouvernements et les minorités et pour contribuer à son application. Le Gouvernement autrichien a réitéré son ferme engagement en faveur de la protection des minorités dans son programme de gouvernement signé en février dernier et dont témoignent les mesures qui ont été prises depuis lors. Afin de promouvoir davantage les droits des minorités, le Gouvernement autrichien commencera le processus de ratification de la Charte européenne sur les langues régionales et minoritaires au début de l'année prochaine.
M. TOFIG MUSAYEV (Azerbaïdjan) a rappelé que son pays compte le plus grand nombre de personnes déplacées dans le monde, soit une personne sur huit. Bien qu'un régime de cessez-le-feu soit appliqué depuis 1996, le règlement politique du conflit n'est pas encore réalisé. Comme il s'agit d'un *ðconflit gelé+ð, l'attention de la communauté internationale s'en est détournée. L'Azerbaïdjan partage l'opinion du Représentant spécial du Secrétaire général selon laquelle une solution durable pour les centaines de milliers de personnes déplacées durant le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan ne sera trouvée que dans un règlement pacifique du conflit.
Le représentant a souligné que la promotion et la protection des droits des personnes appartenant aux minorités contribuent à la stabilité sociale et politique des pays dans lesquels ils résident. L'exercice des droits et des libertés inscrits dans les différents instruments internationaux implique aussi que chaque personne appartenant à une minorité doit respecter la législation nationale du pays où elle se trouve.
M. PETROS EFTYCHIOU (Chypre) a rappelé que l'invasion de son pays par la Turquie en 1974 a provoqué des déplacements massifs de personnes et des violations de droits de l'homme. Cette invasion ne s'est pas produite en raison d'une absence d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ou au droit humanitaire, mais bien en dépit de leur existence et parce qu'un pays avait décidé de mettre à exécution ses propres objectifs politiques.
Pour le représentant chypriote, le cas de Chypre montre que ce qui fait défaut c'est la volonté politique des pays de respecter leurs engagements conventionnels et leurs obligations contractuelles. Partant, il a insisté sur la nécessité d'assurer l'application des textes internationaux. Si un État juge qu'il peut poursuivre ses propres objectifs au mépris d'engagements internationaux auxquels il a souscrit sans avoir à en payer le moindre coût, alors rien ne l'arrêtera. Il faudrait que ceux qui utilisent la force ou violent les droits de l'homme aient conscience qu'ils n'ont rien à y gagner.
MME DEBORAH MINES (Programme alimentaire mondial - PAM) a souhaité que les efforts soient poursuivis en faveur des déplacés internes. L'alimentation représente souvent un besoin urgent pour les déplacés internes puisqu'ils sont dans l'incapacité de produire ou de se procurer la nourriture nécessaire. Être sensible aux besoins des personnes déplacées ne doit pas se traduire par des programmes d'assistance qui peuvent entraîner une discrimination et des tensions avec les populations locales. Il y a des situations où les personnes déplacées internes, regroupées dans des camps par exemple, bénéficient directement d'une assistance alimentaire, mais, dans certains cas, elles seront mieux assistées à travers des programmes plus ciblés en faveur des segments extrêmes de cette population. Il n'est pas souvent approprié de cibler spécifiquement les personnes déplacées comme un groupe nécessitant une assistance alimentaire, surtout lorsque le déplacement est accompagné de tensions ethniques.
M. JEAN-MARIE NOIRFALISSE (Belgique) a abordé la question de la lutte contre la traite des enfants. Il a souligné que la délégation et les autorités belges sont à l'entière disposition de la Commission dans l'esprit de confiance, de totale transparence et de dialogue dans ce domaine, et a regretté que l'engagement de son pays dans la lutte contre la traite des enfants ait été implicitement mis en cause.
La législation belge de 1995 sur la répression de la traite des êtres humains, la pornographie enfantine et les abus sexuels à l'égard des mineurs a été évaluée suite aux événements tragiques qu'à subi son pays il y a quatre ans. Les ajustements nécessaires ont été effectués. Par ailleurs, le Parlement a pris de nouvelles initiatives pour renforcer la protection pénale des mineurs. Un accord a été conclu en 1999 entre le gouvernement et les fournisseurs de service de l'internet. À l'initiative de la Belgique, l'Union européenne a pris des dispositions ambitieuses contre la traite des être humains et la pornographie enfantine. En conclusion, il a expliqué que toutes les dispositions qu'a prises son pays ne prendront effectivement leur ampleur que dans le cadre d'une législation européenne globale.
M. KAREN NAZARIAN (Arménie) a déclaré que son pays a pris toutes les mesures permettant de garantir les droits des minorités. Des droits identiques sont ainsi reconnus aux Russes, Kurdes, Juifs, Grecs, Ukrainiens ou Géorgiens vivant en Arménie. L'organisation d'une conférence sur les minorités a permis d'identifier les domaines pour lesquels il est encore nécessaire de faire des progrès, a indiqué le représentant. L'Arménie a ratifié la Convention-cadre européenne de protection des minorités nationales. Elle est déterminée à participer aux efforts déployés par les membres du groupe de travail sur les minorités en réfléchissant aux moyens de résoudre leurs problèmes.
MME BRITA SYDHOFF (Conseil international des agences bénévoles, au nom également de World Council of Churches, Fédération luthérienne mondiale et Commission internationale catholique pour les migrations) a déclaré que les 20 à 25 millions de personnes, la plupart des femmes et des enfants, qui ont été forcées de quitter leurs foyers, leurs écoles et leurs communautés pour chercher refuge dans une autre partie de leur pays sont parmi les plus vulnérables au monde, certains les appellent les gens oubliés. À cet égard, la représentante a appelé la Commission à exhorter les gouvernements à respecter pleinement leurs obligations internationales en matière de droits de l'homme et de droit
humanitaire afin de prévenir les déplacements forcés. Elle doit demander à tous les gouvernements de reconnaître et d'assumer leurs responsabilités pour assurer la protection et l'assistance aux personnes déplacées conformément aux principes directeurs des Nations unies.
M. DAVID LITTMAN (Association pour l'éducation d'un point de vue mondiale) a indiqué à la Commission qu'il préparait un document sur le quarantième anniversaire des massacres des Coptes en Égypte. Par ailleurs, il s'est déclaré hostile à la proposition du Groupe de travail sur l'esclavage de remplacer le mot esclavage et traite des esclaves par le terme enlèvement.
M. GIANFRANCO ROSSI (Association internationale pour les libertés religieuses) a attiré l'attention de la Commission sur la situation au Cachemire où l'extrémisme ethnique prend la forme du terrorisme contre les minorités hindoue et sikh. Un massacre de 36 sikhs a eu lieu dans la nuit du 21 au 22 mars derniers. En Iran, les baha'is sont encore victimes d'emprisonnement prolongé et les protestants évangéliques continuent d'être harcelés par les forces de sécurité. En Chine, les minorités religieuses qui n'acceptent pas le contrôle des autorités sont persécutées. La Commission des droits de l'homme devrait protéger d'une manière plus concrète que par le passé les minorités, et notamment les minorités religieuses. Il ne suffit pas d'adopter une résolution sur les minorités : il faut protéger les minorités persécutées.
Droit de réponse
Le représentant de Cuba a répondu à la déclaration faite ce matin par le ministre canadien en déplorant que le Canada prétende s'ériger en juge non élu des droits des pays du Sud.
Le représentant de la Turquie a déclaré que le *ðreprésentant chypriote grec+ð avait parlé de la question de Chypre en employant les termes d'*ðinvasion et d'occupation+ð. Or, dans une entrevue accordée le mois dernier au journal chypriote grec Simerini, la fille du dirigeant chypriote grec actuel a souligné que la question de Chypre n'est pas un problème d'invasion et qu'elle date de 1960 et non de 1974. Le Gouvernement turc n'a aucune juridiction sur la République turque du Nord de Chypre qui dispose de son propre gouvernement démocratiquement élu. Quant aux allégations de génocide en Arménie, il faudrait aussi parler du génocide des Turcs par les Arméniens.
Le représentant de Chypre a déclaré que l'attitude de la Turquie, bien avant l'invasion elle-même, montre que les déclarations d'aujourd'hui sont de mauvaises excuses pour justifier l'invasion. Le représentant de la