CS/1172

LE CONSEIL EST DISPOSE A ENVISAGER L'IMPOSITION DE NOUVELLES MESURES CIBLEES POUR ASSURER L'APPLICATION DE SES RESOLUTIONS CONCERNANT L'AFGHANISTAN

7 avril 2000


Communiqué de Presse
CS/1172


LE CONSEIL EST DISPOSE A ENVISAGER L'IMPOSITION DE NOUVELLES MESURES CIBLEES POUR ASSURER L'APPLICATION DE SES RESOLUTIONS CONCERNANT L'AFGHANISTAN

20000407

La déclaration suivante a été faite par M. LLOYD AXWORTHY, Ministre des affaires étrangères du Canada, en sa qualité de Président du Conseil de sécurité :

Le Conseil de sécurité a examiné le rapport du Secrétaire général en date du 10 mars 2000 sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (A/54/791-S/2000/205).

Le Conseil se déclare de nouveau profondément préoccupé par la poursuite du conflit afghan, qui fait peser une menace grave et croissante sur la paix et la sécurité régionales et internationales. Il condamne vigoureusement les Taliban pour avoir lancé de nouvelles offensives, tout particulièrement celle du 1er mars 2000. Il se déclare vivement préoccupé par les informations selon lesquelles les deux parties au conflit se préparent à reprendre des hostilités de grande envergure et rappelle qu’il a exigé à plusieurs reprises que les parties afghanes mettent fin aux combats. Ces événements ajoutent aux souffrances terribles endurées par la population civile afghane.

Le Conseil réaffirme qu’il n’y a pas de solution militaire au conflit en Afghanistan et que seul un règlement politique négocié visant la mise en place d’un gouvernement à large participation, multiethnique et pleinement représentatif, acceptable par tous les Afghans, pourra conduire à la paix et à la réconciliation nationale. Il constate que le Front uni d’Afghanistan est disposé à négocier avec les Taliban, et il rappelle qu’il exige des parties, en particulier les Taliban, qu’elles reprennent les négociations sous les auspices de l’ONU, sans délai et sans conditions préalables et dans le respect total des résolutions pertinentes de l’Assemblée générale et des siennes.

Le Conseil demande à toutes les parties afghanes de respecter les obligations que leur impose le droit international humanitaire et de faire en sorte que le personnel des organisations internationales à vocation humanitaire ait pleinement et librement accès et puisse apporter l’assistance voulue à tous ceux qui en ont besoin. Il se déclare gravement préoccupé de voir la situation humanitaire en Afghanistan continuer de se détériorer du fait de la poursuite des hostilités. Les Taliban sont les principaux responsables de cet état de choses.

Le Conseil condamne vivement le fait que, les 26, 27 et 29 mars 2000, des groupes armés des Taliban aient pénétré à plusieurs reprises par la force dans les locaux des Nations Unies à Kandahar pour les fouiller et aient soumis le personnel des Nations Unies à des actes d’intimidation. Il souligne que les Taliban portent seuls la responsabilité du retrait ultérieur de tout le personnel international de Kandahar et de la suspension des activités d’aide humanitaire dans le sud de l’Afghanistan. Le Conseil exige que les Taliban mettent fin à ces pratiques inacceptables et assurent la sécurité de tout le personnel des Nations Unies, le personnel associé et le personnel humanitaire travaillant en Afghanistan, conformément au droit international.

Le Conseil souligne qu’il est gravement préoccupé par la situation des droits de l’homme en Afghanistan, qui est intolérable. Il est particulièrement alarmé par le mépris que les Taliban continuent d’afficher pour les préoccupations exprimées par la communauté internationale. Il condamne vigoureusement le déplacement forcé de la population civile, notamment les déplacements opérés par les Taliban en 1999, le fait qu’on s’en prend intentionnellement aux civils en détruisant leurs biens et leurs moyens de subsistance, les exécutions sommaires, la détention arbitraire de civils et les travaux forcés imposés aux prisonniers, la séparation d’hommes de leur famille, les bombardements aveugles et les autres violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire. Il engage toutes les parties afghanes, en particulier les Taliban, à mettre un terme à ces pratiques et à assurer la protection des civils.

Le Conseil réaffirme le principe du non-refoulement des réfugiés énoncé dans les instruments internationaux pertinents, se félicite des efforts que les pays limitrophes de l’Afghanistan ont récemment accomplis à l’appui du rapatriement librement consenti des réfugiés afghans dans la sécurité et la dignité, et prie instamment ces États d’accueil de continuer à assurer une protection internationale aux réfugiés afghans qui en ont besoin. Il encourage la communauté internationale à apporter l’aide nécessaire à cet égard.

Le Conseil condamne les graves violations des droits fondamentaux des femmes et des filles qui continuent d’être commises, y compris toutes les formes de discrimination dont les femmes et les filles sont victimes dans toutes les régions de l’Afghanistan, en particulier celles tenues par les Taliban. Il demeure vivement préoccupé par les restrictions qui continuent de limiter l’accès des femmes et des filles aux soins médicaux, à l’éducation et à un emploi en dehors de leur foyer, ainsi que par les restrictions qui limitent leur liberté de mouvement et leur droit de vivre à l’abri de tout acte d’intimidation, de harcèlement ou de violence. Le Conseil prend note d’informations récentes concernant de légers progrès réalisés quant à l’accès des femmes et des filles à certains services, mais il considère que ces progrès, quoique bienvenus, restent très en deçà des exigences minimales de la communauté internationale et il engage toutes les parties, en particulier les Taliban, à prendre des mesures afin de mettre fin à toutes les violations des droits fondamentaux des femmes et des filles.

Le Conseil réaffirme que toute ingérence dans les affaires intérieures de l’Afghanistan, y compris la participation de personnel militaire et de combattants étrangers et la livraison d’armes et de matériels servant au conflit, doit cesser immédiatement. Il exhorte tous les États à prendre des mesures résolues pour interdire à leur personnel militaire de préparer des opérations de combat en Afghanistan et d’y participer, ainsi qu’à retirer immédiatement leur personnel

et à veiller à ce qu’il soit mis fin à la livraison de munitions et d’autres matériels de guerre. Il se déclare profondément préoccupé par la participation des milliers de non-Afghans qui continuent de combattre aux côtés des forces des Taliban en Afghanistan.

Le Conseil réaffirme que les Nations Unies doivent continuer à jouer un rôle central et impartial dans les efforts internationaux visant un règlement pacifique du conflit afghan. Il se félicite de la nomination du nouveau Représentant personnel du Secrétaire général et salue les activités que la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan poursuit à l’appui d’un règlement politique durable du conflit. Il souscrit au déploiement progressif du Groupe des affaires civiles de la Mission en Afghanistan, selon que les conditions de sécurité le permettront.

Le Conseil se réjouit que les membres du Groupe de « Six plus Deux » aient réaffirmé leur volonté de contribuer à un règlement pacifique du conflit afghan en appuyant les efforts déployés par l’Organisation des Nations Unies et engage les membres du groupe et les parties afghanes à appliquer la Déclaration de Tachkent relative aux principes fondamentaux d’un règlement pacifique du conflit en Afghanistan (A/54/174-S/1999/812, annexe), en particulier la décision des membres du groupe de s’abstenir d’apporter quelque soutien militaire que ce soit aux parties afghanes et de veiller à ce que le territoire de leur pays ne soit pas utilisé à cette fin.

Le Conseil exprime sa gratitude à l’Organisation de la Conférence islamique pour les efforts qu’elle déploie, à l’appui de l’action de l’Organisation des Nations Unies et en coordination avec celle-ci, pour faciliter la tenue de négociations entre les deux parties afghanes. Il encourage le processus lancé à Rome en vue de la convocation d’une Loya Jirgha en Afghanistan et prend acte des autres initiatives qui ont récemment été prises en vue de favoriser la paix en Afghanistan, notamment celles du groupe de Chypre et la réunion de Tokyo.

Le Conseil condamne énergiquement le fait que le territoire afghan, en particulier les zones tenues par les Taliban, continue d’être utilisé pour accueillir et former des terroristes et organiser des actes de terrorisme, et réaffirme sa conviction que la répression du terrorisme international est indispensable au maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il insiste pour que les Taliban cessent d’offrir refuge et entraînement aux terroristes internationaux et à leurs organisations, prennent les mesures voulues pour que le territoire tenu par eux n’abrite pas d’installations et de camps de terroristes ni ne serve à préparer ou à organiser des actes de terrorisme dirigés contre d’autres États ou leurs citoyens, et coopèrent aux efforts faits en vue de traduire en justice les personnes accusées de terrorisme.

Le Conseil exige une fois de plus que les Taliban remettent sans plus tarder Osama bin Laden aux autorités compétentes, conformément à sa résolution 1267 (1999) du 15 octobre 1999. Il souligne qu’il est inadmissible que les Taliban continuent de refuser de se plier à cette exigence. Il veillera à l’application effective des mesures imposées par la résolution susvisée. Il condamne les attentats qu’ont récemment commis des terroristes liés à Osama bin Laden, de même que ceux qu’ils préparent, qui constituent une menace persistante pour la communauté internationale.

Le Conseil rappelle que la prise du consulat général de la République islamique d’Iran par les Taliban et l’assassinat de diplomates et d’un journaliste iraniens à Mazar-e Sharif, de même que l’assassinat de membres du personnel de l’Organisation des Nations Unies constituent des violations flagrantes du droit international. Il se déclare préoccupé de constater que les Taliban n’ont pas traduit les auteurs de ces crimes en justice. Il exige à nouveau que les Taliban coopèrent sans réserve avec l’Organisation à cet égard.

Le Conseil est profondément préoccupé par l’augmentation alarmante de la culture, de la production et du trafic de drogues en Afghanistan, en particulier dans les zones tenues par les Taliban, ainsi que par ses conséquences pour la poursuite du conflit. Il exige que les Taliban et les autres parties mettent fin à toutes les activités illégales liées aux drogues. Il encourage l’initiative du groupe des « Six plus Deux » qui vise à aborder de manière coordonnée les questions liées aux drogues avec l’appui de l’Office pour le contrôle des drogues et la prévention du crime. Il encourage également les États Membres et les autres parties intéressées à apporter un appui accru à l’action menée en vue de renforcer les capacités des pays limitrophes de l’Afghanistan en matière de lutte contre la drogue.

Le Conseil souligne également qu’il importe que tous les États Membres appliquent sans retard et de façon effective les mesures imposées par sa résolution 1267 (1999) et rappelle aux États Membres les obligations qui leur incombent en vertu de cette résolution, notamment celle d’aider à identifier les avoirs et aéronefs des Taliban. Il souligne que les sanctions ne visent pas le peuple afghan, mais sont imposées à l’encontre des Taliban du fait qu’ils refusent de se conformer à cette résolution. Il réaffirme sa décision d’évaluer les effets, sur le plan humanitaire notamment, des mesures imposées par cette résolution. Il encourage le Comité créé par la résolution 1267 à lui faire rapport à ce sujet dès qu’il le pourra.

Le Conseil tient également la direction des Taliban responsables du refus de prendre des mesures pour satisfaire aux autres exigences formulées dans ses résolutions, en particulier pour ce qui est de conclure un cessez-le-feu et de reprendre les négociations, et souligne que les Taliban doivent se plier sans plus tarder à ces exigences.

Dans ce contexte, le Conseil réaffirme qu’il est disposé à envisager l’imposition de nouvelles mesures ciblées, conformément à la responsabilité qui lui incombe en vertu de la Charte des Nations Unies, en vue d’assurer l’application intégrale de toutes ses résolutions pertinentes.

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