En cours au Siège de l'ONU

CS/1171

CONSEIL DE SECURITE : L'INGERENCE EXTERIEURE ET LE TRAFIC DES DROGUES DENONCES COMME ALIMENTANT LE CONFLIT EN AFGHANISTAN

7 avril 2000


Communiqué de Presse
CS/1171


CONSEIL DE SECURITE : L'INGERENCE EXTERIEURE ET LE TRAFIC DES DROGUES DENONCES COMME ALIMENTANT LE CONFLIT EN AFGHANISTAN

20000407

Sous la présidence du Ministre des affaires étrangères du Canada, M. Lloyd Axworthy, le Conseil de sécurité a tenu, ce matin, une réunion d'information sur la situation en Afghanistan sur la base d'un rapport du Secrétaire général sur les conséquences de cette situation pour la paix et la sécurité internationales. Ce faisant, le Conseil a entendu M. John Renninger, Fonctionnaire de la Division Asie/Pacifique de l’ONU, qui a expliqué que dans l'état actuel des choses, le conflit en Afghanistan qui dure depuis 22 ans ne laisse entrevoir aucune perspective de cessez-le-feu; les Taliban et le Front uni, parties au conflit, préparant même une "offensive bien organisée et à grande échelle" pour ce printemps. Avec le flux de réfugiés, le trafic illicite des drogues et le terrorisme transfrontières, le conflit afghan menace de plus en plus la stabilité régionale, a dit M.Renninger, en ne cachant pas que le plus grand obstacle à la paix réside dans l'ingérence extérieure.

M. Renninger a mis l'accent sur l'arrivée de milliers de mercenaires aux côtés des Taliban provenant du Pakistan, des pays d'Asie centrale ou encore des pays arabes. La difficulté à mettre fin à la guerre a également été imputée à la capacité des Taliban de poursuivre le trafic de drogues; l'Afghanistan étant devenu le plus grand exportateur de drogues du monde. Dans leurs interventions, les délégations ont attiré l'attention sur l'impact de ce conflit sur les populations civiles qui constituent de plus en plus la cible privilégiée des belligérants comme l'indique le rapport du Secrétaire général. Les délégations ont dénoncé la détérioration de la situation humanitaire et renouvelé leur préoccupation face à la situation des droits de l'homme, en particulier en ce qui concerne les femmes et les filles.

La Conseillère spéciale du Secrétaire général sur l'égalité entre les sexes et la promotion de la femme, Mme Angela King, a apporté quelques précisions en faisant état de progrès timides en la matière. Les délégations ont également évoqué le terrorisme international en renouvelant notamment les appels aux Taliban pour qu'ils remettent à la justice Osama bin Laden soupçonné d'avoir été à l'origine des attentats contre les ambassades américaines à Nairobi et à Dar es- Salam. Le Président du Comité des sanctions - embargo sur les vols et gel des avoirs financiers - imposées aux Taliban le 15 octobre 1999 par la résolution 1267 après leur refus de livrer Osama bin Laden, a rendu compte du respect de leur application. L'Ambassadeur de l'Argentine, M. Arnoldo Listre, a souligné la difficulté d'appliquer des sanctions ciblées sur un seul groupe de belligérants.

(à suivre – 1a)

- 1a - CS/1171 7 avril 2000

Des menaces de sanctions supplémentaires contre les Taliban ont été brandies par des délégations alors que d'autres ont appelé à une évaluation préalable des sanctions actuelles. Les délégations ont encouragé les initiatives des Nations Unies pour apporter la paix et mettre fin au trafic illicite des drogues ainsi que celles prises par d'autres pays, comme le Groupe des « six plus deux » - Tadjikistan, Pakistan, Iran, Ouzbékistan, Turkménistan, Chine, Fédération de Russie et Etats-Unis - ou encore l'Organisation de la Conférence islamique.

Les Membres suivants du Conseil ont pris la parole : Argentine, Fédération de Russie, France, Etats-Unis, Bangladesh, Chine, Pays-Bas, Namibie, Royaume-Uni, Mali, Malaisie, Ukraine, Jamaïque et Canada. Le représentant de l’Afghanistan est intervenu.

Rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (S/2000/205)

Dans ce rapport, le Secrétaire général rend compte des progrès accomplis par la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan et de l’évolution de la situation depuis à partir du 16 novembre 1999 jusqu’au 6 mars 2000. Il indique ainsi que son Représentant personnel, M. Francesc Vendrell, également Chef de la Mission de l’ONU, qui a pris effet le 1er février, a effectué sa première visite en Afghanistan et dans plusieurs pays de la région et au-delà, y compris dans les pays membres du Groupe “six plus deux”. Les deux lui ont assuré qu’elles étaient prêtes à coopérer avec lui dans la recherche d’une solution politique au conflit. Au sujet de l’établissement d’un gouvernement multiethnique largement représentatif, les autorités des Taliban ont proposé qu’un tel gouvernement soit responsable envers l’Emir-ul-Momineen et que l’opposition accepte d’adhérer au système de l’Emirat islamique d’Afghanistan comme forme de gouvernement. Pour le Front uni, la solution politique passe par la mise en place d’un gouvernement provisoire composé de toutes les factions et représentant les principaux groupes ethniques, jusqu’à ce qu’une Loya Jirgah (grande assemblée) puisse être convoquée ou que des élections puissent être organisées, d’ici deux ans.

En ce qui concerne un cessez-le-feu, le Représentant personnel a eu le sentiment qu’aucune des deux parties n’excluait une nouvelle offensive au printemps ou en été, les Taliban, parce qu’ils espéraient encore une victoire militaire, et le Front uni, parce qu’il tentera peut-être de reprendre le territoire conquis par les Taliban. Pour ce qui est de l’exigence du Conseil de sécurité de remettre Osama bin Laden sans retard aux autorités compétentes, les Taliban ont argué de la non-existence de preuves suffisantes établissant son intervention dans les attentats terroristes à l’explosif perpétrés à Nairobi et Dar es-Salaam. Les Taliban avancent que, de toute façon, il est actuellement impossible à M. bin Laden de lancer des activités à partir du territoire afghan. Pour leur part, les gouvernements des pays membres du Groupe “six plus deux” ont indiqué qu’ils souhaitaient un renforcement de leur rôle comme moyen d’amener les parties à la table de négociations et de contribuer à la recherche d’un règlement politique durable.

Abordant l’évolution de la situation politique, le Secrétaire général fait part des divers contacts diplomatiques établis. Ainsi, pour faire suite à l’initiative de l’ancien Roi d’Afghanistan relative à la convocation d’urgence d’une Loya Jirgah, une réunion a été organisée à Rome du 22 au 25 novembre 1999, avec l’assistance du Gouvernement italien. Plus d’une soixantaine de personnalités afghanes, résidant en Afghanistan et à l’étranger, y ont participé ainsi qu’un observateur de l’ONU et des représentants de l’Allemagne, de l’Arabie saoudite, des Etats-Unis, de la Fédération de Russie, de la France, d’Iran, du Japon, du Pakistan, du Royaume-Uni, de la Suisse et de la Turquie. Les participants ont conclu qu’une Loya Jirgah était la manière de réaliser la paix. Ils ont donc décidé de dépêcher, dans les six mois suivant la réunion de Rome, des délégations auprès de l’ONU, d’autres organisations internationales et des pays concernés, ainsi qu’auprès des principales factions belligérantes afghanes, afin de solliciter leur coopération et leur participation à la Loya Jirgah.

A la même période, indique le Secrétaire général, le Comité exécutif de la “Réunion de Chypre” s’est réuni à Téhéran pour examiner les mesures concrètes à prendre en vue de la réalisation de son objectif ultime, qui consiste également à convoquer une Loya Jirgah en Afghanistan. En janvier, le Comité a dépêché des délégations afin d’informer les Taliban et le Front uni de ses objectifs.

Pour ce qui est des activités à New York, le Secrétaire général indique que le Groupe “six plus deux” a convoqué une réunion le 28 février, à New York, au niveau des représentants permanents et à un niveau supérieur, afin d’examiner la question des drogues illicites provenant d’Afghanistan. A la fin de la réunion, les membres du groupe ont décidé de poursuivre les consultations au niveau opérationnel, afin de convoquer une réunion technique appuyée par l’Office pour le contrôle des drogues et la prévention du crime au début d’avril, à Vienne.

Donnant un aperçu de la situation militaire, le Secrétaire général souligne que des armes et d’autres matériels de guerre ont continué d’arriver en Afghanistan, permettant aux deux parties de préparer leurs offensives de printemps qui ont en fait repris dès le 1er mars. En ce qui concerne les activités humanitaires, il indique que la difficulté d’obtenir l’autorisation d’effectuer des évaluations dans les secteurs récemment affectés par le conflit limitent l’accès humanitaire à quelques régions du pays. Au titre des mesures encourageantes, le Secrétaire général cite la signature en février entre le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et l’Iran d’un accord sur un programme commun de rapatriement librement consenti d’Afghans réfugiés en Iran. Ce programme, qui doit démarrer le 8 avril 2000, prévoit le retour en Afghanistan de 3000 réfugiés afghans par semaine.

Le Programme d’action antimines de l’Afghanistan, poursuit le Secrétaire général, continue à établir des relevés des champs de mines et des zones de combat et à les déminer. Au total, 442 kilomètres carrés ont été déminés depuis le début du Programme. On estime la superficie totale des zones qui restent à déminer à 716 kilomètres carrés, sur lesquels plus de 90% sont des terres agricoles et des pâturages hautement prioritaires. Pour le reste de l’année, le Programme a un déficit de financement de 17,9 millions de dollars.

Pour ce qui est des drogues, le Secrétaire général estime qu’à la suite de l’augmentation record de la production en 1999, chiffrée à 43%, il y a de bonnes raisons de penser, sur la base de l’enquête, que la culture du pavot va diminuer en 2000. L’Office pour le contrôle des drogues relève le bon déroulement de deux initiatives visant à lutter contre la drogue en Afghanistan. Des financements ont maintenant été trouvés pour l’Initiative du Grand Azro, que l’Office doit mettre en œuvre en partenariat avec le HCR. Les activités de planification du Programme de développement intégré interorganisations pour la province de Helmand progressent également.

En conclusion de son rapport, le Secrétaire général observe qu’il est non seulement probable que les combats se poursuivront, malgré les appels réitérés au cessez-le-feu qu’ont lancé le conseil de sécurité et l’Assemblée générale, mais aussi, ainsi que l’indiquent les rapports, qu’une offensive majeure se prépare pour le printemps, ce qui donne à penser que les approvisionnements en fournitures militaires provenant des pays voisins se poursuivent. Dans ces conditions, le Secrétaire général a demandé à son Représentant personnel de tenter avant tout de persuader les parties d’engager un dialogue susceptible de conduire à un cessez- le-feu durable et vérifiable, et, finalement, à un accord sur la constitution d’un gouvernement doté d’une large assise, multiethnique et pleinement représentatif.

Déclarations

M JOHN RENNINGER, Fonctionnaire de la Division Asie/Pacifique (ONU), a souligné que le conflit afghan est arrivé à sa 22ème année sans espoir d'une solution pacifique dans un avenir proche. Le peuple afghan continue de souffrir et le conflit a commencé à s'étendre par delà les frontières avec le flux de réfugiés et de trafiquants de drogue, et les activités terroristes transfrontières. Faisant une mise à jour de la situation depuis la parution du rapport du Secrétaire général, le 10 mars, M. Renninger a mis l'accent sur la réunion, qui s'est tenue du 7 au 9 mars en Arabie saoudite, entre les Taliban et le Front uni, sous les auspices de l'Organisation de la Conférence islamique. Aucune des parties n'ayant changé sa position, l'Organisation de la Conférence islamique a décidé d'organiser une autre réunion entre les deux parties qui aura également lieu à Djeddah. Les initiatives des afghans non-belligérants se poursuivent également, a indiqué M. Renninger, en attirant l'attention sur la réunion convoquée par le Comité exécutif de Rome du 11 au 12 mars avec pour objectif de préparer une "Grande assemblée" en Afghanistan. De son côté, le Groupe des « six plus deux » a convoqué une réunion de haut niveau à la fin du mois de février sur la question des drogues qui a donné lieu à une réunion technique qui se tiendra à Vienne du 8 au 10 mai, avec la participation des membres du Groupe « six plus deux » et des grands pays donateurs.

Poursuivant sur l'évolution de la situation politique, M. Renninger a indiqué que le 26 mars, Ismail Khan, l'ancien Gouverneur de Herat et un des prisonniers les plus importants des Taliban s'est échappé avec l'aide d'un garde Taliban. Les autorités taliban ont aussitôt lancé une chasse à l'homme dans le sud-ouest du pays. Dans l'état actuel des choses, a dit M. Renninger, il n'est pas possible d'être optimiste quant à un cessez-le-feu entre les parties en guerre. Il a mis l'accent sur le fait que les conditions climatiques et le Ramadan ont forcé les belligérants à réduire l'intensité des combats. Mais des luttes ont été signalées en plusieurs lieux notamment depuis la mi-janvier. Il est clair qu'une offensive organisée et à grande échelle se prépare des deux côtés, a dit M. Renninger, en faisant part des informations sur le recrutement de nouveaux combattants, l'arrivée de renforts et la fourniture continue de matériel de guerre en provenance de l'extérieur. Une nouvelle fois, les belligérants semblent prêts à répéter le cycle vicieux de la violence avec l'arrivée du printemps. M. Renninger a souligné, à l'instar du Secrétaire général, que l'ingérence extérieure est un des grands obstacles à la paix. Des informations font état de recrutement de combattants non afghans dans des écoles religieuses au Pakistan. L'implication de combattants arabes ou de l'Asie centrale a également été signalée.

M. Renninger a poursuivi sur la question des droits de l'homme, et a dénoncé les violations massives des droits de l'homme et du droit humanitaire international, les exécutions sommaires, les détentions arbitraires et les déplacements forcés des populations. En ce qui concerne, en particulier, les femmes, M. Renninger a indiqué que leur accès à l'éducation, à la santé, à l'emploi et à la vie publique a été limité avec les victoires militaires des Taliban même si des progrès commencent à être enregistrés. Il a souligné que malgré la différence de position entre les Taliban et le Front uni, les femmes qui vivent dans les zones contrôlées par ce dernier souffrent tout autant. Il a toutefois imputé cette situation à la situation économique de ces zones en soulignant que la mobilisation de ressources peut changer la situation.

M. ARNOLDO M. LISTRE (Argentine), en sa qualité de président du Comité des sanctions, a fait part de l’action du Comité pour mettre en œuvre les dispositions de la résolution 1267. Il a indiqué que le Comité a pu mettre à jour la liste des aéronefs mentionnée dans la résolution et a autorisé un vol humanitaire pour transporter des enfants afghans pour qu'ils soient soignés en Allemagne. En ce qui concerne le pèlerinage à la Mecque, il a déclaré que 350 vols ont été autorisés pour que 12 000 pèlerins afghans puissent se rendre à la Mecque et a précisé que ces vols avaient été contrôlés. Les vols de retour ont commencé la semaine dernière et doivent se terminer le 23 avril, a-t-il ajouté, en espérant qu'ils puissent se réaliser avec succès. A cet égard, il s'est félicité de la coopération entre les membres du Comité et le PNUD et a mentionné que la somme de 20 000 dollars qui avait été allouée pour cette opération étant insuffisante, le Comité avait dû utiliser les fonds prévus pour les déplacements de son Président. A cet égard, il a insisté sur la nécessité d'établir un mécanisme de financement souple pour faire face à ce type de dépenses et éviter ce genre de problème.

Concernant l'application des dispositions du paragraphe 4, il a annoncé que le Comité a adopté une série de dispositions afin d'aider les Etats qui ne l'ont pas encore fait à mettre en œuvre le paragraphe 4b. En conclusion, le Président du Comité a signalé que l'efficacité du régime de sanctions dépend de l'application complète des mesures prévues, particulièrement dans le cas d'un régime de sanctions ciblées. Ainsi, il a demandé instamment à tous les Etats de veiller à leur mise en œuvre.

M. Listre a poursuivi par une déclaration au nom de son pays, et s'est déclaré préoccupé par le fait que les deux parties semblent prêtes à mener de nouvelles offensives et a condamné l'intimidation que les Taliban ont exercée, fin mars, sur le personnel des Nations Unies à Kandahar et a appelé toutes les parties au conflit à respecter les normes internationales concernant la sécurité du personnel des Nations Unies et du personnel associé. Il est inquiété de la situation alimentaire dans le pays, des conditions de santé de la population, particulièrement des enfants, et de la situation des familles qui sont obligées d'avoir recours à la mendicité pour survivre.

Reconnaissant que la production et le trafic de stupéfiants alimentent le conflit, il a appelé les parties à faire preuve de leur volonté d'y mettre fin. En outre, il a regretté que les dispositions de la résolution 1267 du Conseil de sécurité n’aient pas été respectées ce qui force les membres du Conseil de sécurité à recourir aux mesures prévues au paragraphe 4 de cette résolution. Il a exhorté toutes les parties afghanes à intensifier leurs efforts pour reprendre les négociations et à renoncer à la voie militaire. Il a également demandé aux pays voisins de cesser d'approvisionner les parties belligérantes en armes.

M. SERGEY LAVROV (Fédération de Russie) a appelé le Conseil de sécurité à réagir face aux événements en Afghanistan en condamnant l'escalade des actions militaires des Taliban. Le représentant s'est dit préoccupé par les attaques des Taliban contre le personnel et les locaux de l'ONU. La politique des Taliban et leur velléité de domination religieuse et ethnique sont vouées à l'échec, a affirmé M. Lavrov, avant d'estimer que seul un règlement politique, sous l'égide de l'ONU, pourra mettre fin à ce conflit et que seul un gouvernement largement représentatif et multiethnique pourra garantir les droits de tous les Afghans et engager le pays vers la paix. Pour M. Lavrov, le Conseil doit mettre en garde les Taliban contre toute tentative de reprendre l'offensive et les sommer d'engager les pourparlers. Poursuivant, le représentant s'est dit préoccupé par l'ingérence extérieure et l'implication de milliers de combattants étrangers en Afghanistan. Il a fait appel à tous les Afghans pour qu'ils prennent des mesures visant à arrêter l'aide militaire aux parties belligérantes. Venant à la question du terrorisme "appuyé par les Taliban", le représentant a indiqué que ses manifestations avaient fini par toucher son pays. Il a condamné le refus des Taliban de se conformer aux demandes du Conseil de remettre le terroriste international Osama bin Laden à la justice. Il a également condamné l'entraînement donné par les Taliban aux mercenaires en vue de mener des activités terroristes dans d'autres pays. Ces actions, a dit M. Lavrov, représentent un défi flagrant lancé à la communauté internationale et un acte d'ingérence. Etant donné la situation, il faut poser la question du renforcement des sanctions contre les Taliban, a estimé le représentant, en demandant au Conseil de trouver les moyens de contraindre les Taliban à respecter les dispositions de la résolution pertinente. M. Lavrov a terminé sur la question du trafic illicite des drogues en soulignant que 40% de l'héroïne en Europe et en Amérique du Nord proviennent d'Afghanistan en passant surtout par le Kosovo. Le représentant a demandé des mesures en la matière ainsi qu'en ce qui concerne la situation humanitaire et celle des droits de l'homme, et surtout des droits des femmes.

M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) s'est tout d'abord associé au Président du Conseil de sécurité dans l'expression de ses condoléances au représentant et au peuple tunisiens après la mort du Président Bourguiba. Il a précisé que le Président Chirac se rendrait aux obsèques.

Il s'est inquiété de la situation humanitaire en Afghanistan, de la situation des femmes et de l'accroissement de la production et du trafic de drogue. A cet égard, il a appuyé la déclaration présidentielle qui exprime la position ferme du Conseil pour l'établissement d'un régime démocratique aux larges assises. M. Levitte a insisté sur le fait que ce message ferme du Conseil aux Taliban fait l'objet d'un consensus et a espéré qu'il serait suivi d'effets.

M. Levitte s'est déclaré très préoccupé par la reprise des hostilités et surtout par la présence d'éléments étrangers, plusieurs milliers, aux côtés des Taliban. Il a appelé à l'arrêt de cette ingérence étrangère en Afghanistan. Il s'est félicité de l'action du Représentant personnel du Secrétaire général et de la réunion convoquée à Djeddah à l'initiative de l'Organisation de la Conférence islamique. Il a marqué son intérêt vis-à-vis de l'initiative visant à convoquer une Loya Jirgah (grande assemblée) qui émane de la société civile et a estimé qu'il fallait y accorder une grande attention. A cet égard, a-t-il ajouté, il serait utile que le Secrétariat de l'ONU appuie cette initiative auprès de toutes les parties afghanes.

M. RICHARD HOLBROOKE (Etats-Unis) a appelé les Taliban et les autres belligérants à mettre tout en œuvre pour renforcer le respect des droits des femmes. Le représentant s'est dit encouragé par les mesures visant à élargir l'accès des filles et des fillettes aux soins de santé. Adressant une question à la Conseillère spéciale du Secrétaire générale sur la promotion de la femme, M. Holbrooke a demandé ce que les Etats Membres peuvent faire pour améliorer la situation des femmes. Le représentant a poursuivi en indiquant que l'année dernière, l'aide humanitaire de son pays au peuple afghan s'est élevé à plus 70 millions de dollars. Les Etats-Unis ont également élargi leur programme de relogement pour les Afghans persécutés. Le pays s'attend donc à recueillir près de 1 500 femmes afghanes et leurs familles, au cours de cette année. Le représentant a appelé les autres pays à se joindre à ces efforts aux côtés du Pakistan et de l'Iran. Les Etats-Unis, a dit le représentant, sont prêts à appuyer ce genre d'efforts. Il a donc appelé toutes les factions afghanes, en particulier les Taliban, à appuyer toutes ces actions. Plaidant pour la poursuite de l'aide humanitaire, le représentant s'est attardé sur les questions de terrorisme et de trafic des drogues. Les Taliban, a-t-il insisté, doivent respecter les termes de la résolution pertinente et remettre Osama bin Laden à la justice. Il a conclu en faisant part de sa conviction que l'Afghanistan ne pourra retrouver la paix que par des négociations tenant compte des droits et des intérêts de tous. Les Etats-Unis sont disposés à se joindre aux efforts en la matière.

M. SHAMIM AHMED (Bangladesh) a estimé qu'il n'y a pas d'autre solution au conflit que la formation d'un gouvernement multiethnique et bénéficiant d'une large assise représentative. Il s'est inquiété de la menace d'une reprise du conflit avec le printemps et a déploré les combats du mois dernier. A cet égard, il importe particulièrement de persuader les parties d'engager des négociations en vue d'un cessez-le-feu vérifiable et il est indispensable de mettre fin à l'approvisionnement en armes des parties en conflit.

Il a condamné la violation de la sûreté du personnel de l'ONU et a estimé que tout doit être mis en œuvre pour faciliter son retour à Kandahar. Faisant état de la gravité de la situation humanitaire, il s'est notamment inquiété de la situation des 2,5 millions de réfugiés afghans qui se trouvent encore en Iran et au Pakistan. Il a espéré que le processus de rapatriement, commencé le mois dernier, continuera et que les réfugiés pourront rentrer volontairement et dans des conditions sûres.

Il a estimé que l'ONU a un rôle important à jouer et a espéré que son action sera renforcée, notamment par d'autres initiatives. Au vu de la gravité de la situation alimentaire, il a souhaité que le Programme alimentaire mondial puisse intensifier ses efforts et a appelé toutes les parties afghanes à permettre un accès libre et sans entrave aux populations touchées. De la même manière, a-t-il ajouté, il convient de s'assurer de l'accès libre de l'UNICEF et de l'Organisation mondiale de la santé qui doivent lancer une campagne de vaccination des enfants contre la polio en mai et juin.

M. CHEN XU (Chine) a estimé que seul un gouvernement largement représentatif en Afghanistan pourrait aider à rétablir la paix en disant son appréciation pour les efforts du Secrétaire général et de son Représentant personnel. La communauté internationale, a insisté le représentant, doit multiplier les efforts pour sortir du cercle vicieux annuel de la violence où l'on voit les parties négocier en hiver et lancer des offensives au printemps. Le représentant a appelé le Groupe des « six plus deux » et les pays voisins de l'Afghanistan à travailler aux efforts de paix. Sur la question du trafic illicite des drogues, le représentant a souhaité que cette question soit une des priorités de la communauté internationale. Il a salué les efforts des Nations Unies en la matière avant de se dire également préoccupé par la situation humanitaire et celle des droits de l'homme, en particulier en ce qui concerne les femmes et les filles.

M. ARNOLD PETER VAN WALSUM (Pays-Bas) a estimé que les parties belligérantes sont les seules à pouvoir trouver la solution politique qui mettra fin au conflit. A cet égard, il les a appelées à revenir à la table des négociations et à mettre fin aux combats. En outre, il a appelé les pays voisins à adhérer strictement à la Déclaration de Tachkent et à respecter leur engagement à ne pas fournir de soutien militaire aux parties afghanes.

Il s'est inquiété de la situation humanitaire et a indiqué que l'offensive du 1er mars dernier avait créé de nouveaux flots de réfugiés et de personnes déplacées. Reconnaissant la gravité de la situation, il s'est inquiété de l'entrée des forces des Taliban à Kandahar qui a forcé l'ONU à retirer son personnel de cette ville, ce qui a entraîné la suspension de l'aide humanitaire au sud du pays.

M. Walsum a insisté sur la souffrance des femmes et des filles et a condamné cette violence systématique à l'égard des femmes qui est un instrument d'humiliation et d'intimidation vis-à-vis de groupes entiers de population. Reconnaissant les progrès enregistrés récemment dans le domaine de la scolarisation, il a précisé que dans la mesure où une grande partie du corps enseignant féminin n'a plus le droit d'enseigner, ces restrictions mettent également en danger l'éducation des garçons, ce qui fait peser de graves menaces sur les perspectives de développement économique et social du pays. Insistant sur le fait que l'aide humanitaire ne saurait compenser la marginalisation de la moitié de la population, il a appelé les Taliban à mettre leur législation concernant l'emploi et l'éducation en accord avec les normes internationales.

M. MARTIN ANDJABA (Namibie) s'est dit convaincu que seul un règlement politique négocié visant à créer un gouvernement largement représentatif et multiethnique en Afghanistan peut conduire à la paix et à la réconciliation nationale. Il a, à cet égard, accueilli avec satisfaction l'engagement des membres du Groupe des « six plus deux » de contribuer à la recherche d'une solution pacifique au conflit afghan. Le représentant s'est également félicité des efforts d'autres pays, tels que les pourparlers récents tenus en Arabie saoudite sous les auspices de l'Organisation de la Conférence islamique. En ce qui concerne la culture et la production des drogues en Afghanistan, le représentant s'est dit frappé par l'ampleur du problème et le rôle qu'il joue dans la continuité du conflit. Il s'est félicité des efforts des Nations Unies, en particulier du Bureau du contrôle des drogues ainsi que des initiatives du Groupe des « six plus deux ».

M. STEWART ELDON (Royaume-Uni), rappelant l'entrée des forces des Taliban à Kandahar, a appelé les Taliban à garantir la sûreté du personnel de l'ONU et à respecter les normes internationales en vigueur dans ce domaine. S'inquiétant de la reprise des combats, le mois dernier, il a rappelé qu'une solution militaire n'est pas possible et a demandé aux parties afghanes de reprendre les négociations. Il a déploré l'ingérence extérieure et a appelé les pays concernés à s'abstenir de toute ingérence dans le conflit afghan.

Il a estimé que le Groupe "six plus deux" a un rôle important à jouer et a demandé à ce qu'il intensifie ses efforts en vue de ramener les parties à la table des négociations. S'inquiétant de la situation humanitaire, particulièrement des souffrances des femmes et des filles, il a estimé qu'il importe de mettre fin à la discrimination à l'égard des femmes, notamment aux restrictions qui pèsent sur leur déplacement, sur l'éducation et sur l'emploi. Il s'est alarmé de la tendance de plus en plus accrue à viser les civils, ce qui est inacceptable. Il a exhorté les Taliban à abroger les lois discriminatoires à l'égard des femmes en rappelant que d'autres sociétés islamiques leur accordent plus de droits. Il a regretté l'écart qui persiste entre promesse et action et a déploré la faiblesse et la lenteur des progrès. Il a fait part des efforts humanitaires de son pays qui finance le poste de Conseiller à Islamabad (Pakistan) et demandé de savoir les mesures visant son renforcement.

M. MOCTAR OUANE (Mali) s'est dit gravement préoccupé par la poursuite du conflit afghan en condamnant la nouvelle offensive lancée par les Taliban et en dénonçant le matériel de guerre fourni aux belligérants en provenance de l'extérieur. Le représentant a souligné que seul un gouvernement largement multiethnique et représentatif pourra conduire à la paix dans ce pays. Il a donc salué les processus de Rome, de Chypre et de Tokyo ainsi que les efforts de l'Organisation de la Conférence islamique et du Groupe des « six plus deux ». Dans ce contexte, le représentant a souhaité que l'ONU continue de jouer son rôle impartial dans la recherche de la paix. Commentant la situation humanitaire, le représentant a appelé les parties à prendre toutes les mesures voulues pour garantir l'acheminement sans interruption de l'assistance humanitaire. Il a salué, dans ce cadre, les pays voisins qui ont pris des mesures en vue du rapatriement librement consenti des réfugiés se trouvant sur leur sol. Ayant jugé la situation des droits de l'homme inacceptable, le représentant a commenté la question du terrorisme pour appuyer la détermination de la communauté internationale à lutter contre le terrorisme international. Pour ce qui est de la production et du trafic illicites des drogues, le représentant a souhaité, à l'instar du Secrétaire général, que la question soit traitée de manière coordonnée par la mise en œuvre d'un plan d'action régional détaillé et équilibré. Le représentant a salué le rôle du Bureau des Nations Unies pour le contrôle des drogues et la contribution du Groupe des « six plus deux ».

M. MOHAMMAD KAMAL YAN YAHAYA (Malaisie) a évoqué les conséquences du conflit armé en Afghanistan. Il s’est insurgé plus particulièrement contre le sort réservé aux femmes qui n’ont pas accès à l’éducation. Ce droit, celui de subvenir à ses propres besoins et de participer aux autres aspects de la vie sont parfaitement compatibles avec l’Islam. Nous estimons que les femmes ont le droit légitime et l’obligation de jouer un rôle constructif dans la société. Abordant la situation en matière de sécurité, le représentant a regretté les intrusions récentes des Taliban dans les locaux des Nations Unies à Kandahar, en violation du principe de l’immunité diplomatique. Le retrait du personnel international qui a suivi, y compris les ONG, a eu un impact sur les efforts déployés dans un environnement difficile. Le représentant a regretté l’absence de progrès pour ce qui est de traduire en justice les meurtriers des diplomates et du journaliste iraniens assassinés à Mazar-e Sharif en août 1998. Nous sommes consternés devant l’absence de coopération des Taliban avec les Nations Unies.

Nous réaffirmons notre conviction selon laquelle une paix durable ne sera possible que par la négociation politique et pas par des moyens militaires. Nous soutenons dans ce contexte les efforts déployés sous les auspices des Nations Unies pour un règlement négocié qui passe par le dialogue et la formation d’un gouvernement représentatif et multiethnique. Nous encourageons fermement des activités de suivi de la réunion de Djeddah et du processus de Rome. Les parties afghanes doivent reconnaître que la recherche de la paix doit se faire sur la base d’une réelle volonté politique libre de toute influence extérieure. Il est regrettable qu’en dépit des nobles idéaux de la Déclaration de Tachkent, les parties afghanes continuent de recevoir un soutien militaire extérieur. Il est impératif que les groupes ethniques et religieux du pays coopèrent entre eux et choisissent leurs propres dirigeants plutôt que d’accepter ceux qui leur sont imposés. Nous estimons que le processus de Rome, à savoir la convocation de la Grande Assemblée ou “Loya Jirgah” doit être encouragé.

Au sujet des sanctions imposées à l’encontre des Taliban et de l’imposition éventuelle de mesures coercitives supplémentaires, le représentant a demandé que le Conseil de sécurité évalue l’impact des sanctions en cours. Il a rappelé qu’aucune évaluation préalable n’a été réalisée avant leur imposition. En l’absence d’une évaluation préalable, a ajouté le représentant, il est important de mener un travail d’évaluation périodique pour modifier le régime de sanctions si cela est nécessaire.

M. VOLODYMYR Y. YEL'CHENKO (Ukraine) a noté la dégradation de la situation humanitaire en Afghanistan, qui est en outre aggravée par la recrudescence du trafic de drogue et le recrutement d'enfants soldats. Il s'est alarmé dans la perspective d'une reprise prochaine des combats et du danger qui pèse sur le personnel humanitaire en Afghanistan. Il a insisté sur la nécessité de ramener les parties afghanes à la table des négociations et s'est félicité du texte de déclaration présidentielle qui exige des Taliban qu'ils mettent fin aux combats et qu'ils respectent les droits de la personne et le droit international humanitaire. Il a demandé aux parties de cesser les hostilités et aux membres du Groupe "six plus deux" d'intensifier leurs efforts pour amener les parties afghanes à envisager une solution politique.

M. CURTIS A. WARD (Jamaïque) a jugé que la situation humanitaire et le sort des populations dans les zones de conflit nécessitent l'attention continue du Conseil de sécurité en se disant particulièrement préoccupé par la situation en Afghanistan. Le représentant a renouvelé son appel en faveur d'un règlement négocié de ce conflit en vue de créer un gouvernement représentatif et multiethnique. Il a souhaité que les efforts humanitaires soient appuyés par les ressources appropriées. Le représentant a poursuivi en faisant part de sa préoccupation face aux difficultés rencontrées par les institutions des Nations Unies en ce qui concerne l'accès aux populations les plus vulnérables. Il a, à cet égard, demandé aux Taliban d'assurer la sécurité du personnel des Nations Unies en lui rendant hommage pour continuer de travailler dans des conditions difficiles. Le représentant a insisté sur l'importance qu'il y a à respecter les droits de l'homme et le droit humanitaire international en plaidant pour que les responsables des violations en la matière soient traduits en justice. Les violations continues des droits de l'homme, a insisté le représentant, sont très préoccupantes notamment en ce qui concerne les femmes et les fillettes. Il a adressé des questions à la Conseillère spéciale du Secrétaire général pour en savoir davantage sur les possibilités de progrès plus avant dans la situation des femmes, les mesures prises pour garantir les droits des femmes afghanes, sur les programmes visant à sensibiliser les femmes à leurs droits et l'état de l'application des recommandations formulées par les institutions spécialisées des Nations Unies. Le représentant a terminé sur la question du trafic illicite des drogues en demandant une action internationale immédiate.

M. LLOYD AXWORTHY, Ministre des affaires étrangères du Canada, s'est inquiété de la situation humanitaire en Afghanistan, particulièrement celle des femmes dont les droits et la mobilité ont été considérablement réduits par les Taliban. Il s'est déclaré inquiété par les actions visant à empêcher la fourniture de l'aide humanitaire. Il a insisté sur le fait qu'il s'agit d'une politique active qui a des effets complexes sur la situation des femmes et des filles et a indiqué que le taux de mortalité maternelle en Afghanistan est au deuxième rang mondial. Reconnaissant l'existence depuis quelques mois d'une légère amélioration, quoique localisée, il a estimé qu'il faudra redoubler d'efforts pour que ce progrès graduel représente même un premier pas dans le sens du respect des normes minimales qu'exige la communauté internationale. Il a fait part au Conseil des initiatives de la société civile canadienne, notamment de la mise sur pied d'une Coalition nationale à l'appui des Afghanes qui s'emploie à mobiliser les énergies dans le monde entier pour que l'on s'occupe de la condition féminine en Afghanistan.

Il a annoncé que le Canada apportera une contribution de 300 000 dollars au Fonds d'affectation spéciale pour les droits de l'homme des Nations Unies afin d'appuyer les activités des organisations non gouvernementales locales et internationales qui s'occupent de la formation et de programmes concernant les droits de la personne.

Face à la désintégration de l'Etat afghan, il a déclaré que les Taliban prétendent être un gouvernement de bonne foi, mais se comportent comme une bande de criminels, donnent refuge à des terroristes internationaux et permettent que leur pays devienne le plus grand exportateur mondial de produits opiacés illégaux. Ils doivent mériter l'acceptation qu'ils sollicitent, grâce à la réconciliation nationale, la formation d'un gouvernement représentatif aux larges assises, la fin de la tolérance à l'égard du terrorisme et du trafic de la drogue et, par-dessus tout, au respect des droits de la personne, ce qui comprend les droits des femmes, a-t-il ajouté.

Le Groupe des "six plus deux", a-t-il poursuivi, a une responsabilité particulière dans la recherche d'une solution pacifique en Afghanistan. Reconnaissant que seuls les Afghans eux-mêmes peuvent amener la paix dans leur pays, il a observé que les membres du Groupe des "six plus deux" peuvent changer grandement les choses. Il s'est inquiété que certains membres de ce groupe ne soutiennent que du bout des lèvres l'objectif de paix et continuent d'appuyer les belligérants.

Le Conseil de sécurité a un rôle essentiel à jouer, a-t-il indiqué, avant d'énoncer certaines mesures concrètes que celui-ci pourrait prendre pour corriger la situation. Il conviendrait notamment d'insister pour que les membres du personnel des Nations Unies et du personnel associé aient complètement accès, sans entrave aux populations touchées; de demander que toutes les parties assument leurs responsabilités à l'égard de l'ensemble de la population civile et d'accorder une attention particulière au rétablissement des droits de la personne pour les femmes. Il importerait en outre de demander la cessation immédiate des hostilités, l'amorce de négociations honnêtes et l'intervention du Secrétaire général dans la recherche de la paix et de la réconciliation nationale; de trouver des moyens d'exercer des pressions sur les factions belligérantes pour les amener à la table des négociations; et d'envisager des mesures pour couper les approvisionnements en armes aux belligérants. Il a rappelé la dernière résolution du Conseil qui condamnait les Taliban pour avoir donné refuge à Osama bin Laden et demandait l'imposition de sanctions, si les Taliban ne livraient pas aux autorités compétentes le terroriste mis en accusation et la position de son pays à ce propos.

Il a réitéré l'opinion de son pays selon laquelle le Conseil de sécurité a un important rôle à jouer dans la lutte contre le terrorisme et devrait s'occuper de la sérieuse situation humanitaire et des droits de la personne dans le pays. Il a fait valoir que la déclaration présidentielle qui sera adoptée aujourd'hui devrait souligner davantage la consternation profonde du Conseil devant la souffrance incessante du peuple afghan et sa détermination à exercer des pressions en faveur de la recherche de moyens visant à contribuer de manière utile à la résolution du conflit.

M. RAVAN A. G. FARHADI (Afghanistan) a dénoncé la présence de mercenaires aux côtés des Taliban qui demeure une réalité en dépit des changements politiques intervenus au Pakistan. Cela n'est pas étonnant, a expliqué le représentant, puisque la junte militaire, aujourd'hui au pouvoir au Pakistan, contrôlait déjà les affaires afghanes avant son arrivée au pouvoir. Les affaires afghanes sont gérées par l'armée du Pakistan. Les militaires pakistanais continuent d'envoyer aux Taliban armes et munitions, convaincus du triomphe de la voie militaire. Ils continuent, a insisté le représentant, d'utiliser des groupes religieux extrémistes à des fins politiques. Cette politique préoccupe toute la région et elle n'est pas seulement dangereuse mais elle constitue également un obstacle majeur à la paix et à la stabilité du Pakistan. Mme ANGELA KING, Sous-Secrétaire générale et Conseillère spéciale pour la parité entre les sexes et la promotion de la femme, s'est félicitée de la décision prise, le 8 mars dernier, d'intégrer la situation des femmes et des filles dans toutes les discussions du Conseil qui ont trait au maintien ou au rétablissement de la paix. Exprimant le souhait que les institutions des Nations Unies poursuivent leur action en faveur de la participation des femmes au processus de prise de décisions, elle a observé que l'on rencontre moins d'obstacle dans les communautés afghanes rurales que dans les villes. A cet égard, elle a noté que certains mollahs se sont montrés ouverts à la participation des femmes. Elle a estimé qu'il est indispensable d'intégrer une perspective sexospécifique dans toutes les actions et programmes menés par les institutions et organes des Nations Unies sur le terrain. Elle a choisi l'exemple de l'eau pour illustrer son propos. Ainsi, il faut savoir que ce sont les femmes qui sont chargées du ravitaillement en eau et s'en souvenir lorsque l'on choisit l'emplacement des puits. Si ceux-ci sont trop éloignés de l'école, par exemple, les fillettes devront manquer l'école pour s'acquitter de leur tâche, alors que si on les installe près des écoles, on évite ce problème.

Pour ce qui est de la participation à la société civile et à la vie électorale, elle a indiqué qu'il conviendrait d'accroître la formation pour faire accepter leur participation aux prises de décisions. Elle a cité l'exemple des organisations non gouvernementales qui travaillent dans cette voie et bénéficieraient d'un appui plus ferme de l'ONU. Pour ce qui est de l'emploi, elle a estimé qu'il faudrait plus de ministères ouverts aux femmes, à l'exemple des 17 femmes qui sont désormais employées au Ministère des affaires sociales. Il conviendrait d'encourager ce type d'initiatives, a-t-elle ajouté.

En ce qui concerne l'obtention d'un meilleur traitement, elle a déclaré que cela repose sur une solution politique. Elle a observé que les femmes qui prennent position sont souvent intimidées ou condamnées. Il faut adopter une démarche globale qui examine à la fois l'accès à l'emploi et la participation aux prises de décisions. Elle s'est inquiétée de la situation matérielle des femmes dans les prisons et a cité l'exemple de celle de Kandahar qui ne dispose pas de facilités sanitaires.

Dans l'optique de faciliter le travail de l'ONU sur le terrain, elle a indiqué qu'il serait utile d'intégrer plus de femmes en provenance de pays islamiques qui seront en mesure d'identifier les relations entre la loi islamique, les droits de l'homme et la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Elle a indiqué qu’elle a élaboré un plan d'action avec les organisations gouvernementales et les institutions de l'ONU afin de déterminer l'attitude à adopter.

Elle a regretté la lenteur des progrès qui risque de continuer à ce rythme si on ne parvient pas à une paix négociée. Elle s'est félicitée que le 8 mars 2000, la Journée de la femme a été célébrée pour la première fois en Afghanistan. A cette occasion, le représentant du mollah a fait une déclaration et différents médias internationaux ont eu l'autorisation de suivre l'événement qui a également donné lieu à la libération de quelques prisonnières.

* *** *

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.