COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME : LA HAUT-COMMISSAIRE AUX DROITS DE L'HOMME REND COMPTE DE SA VISITE EN TCHETCHENIE
Communiqué de Presse
DH/G/1293
COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME : LA HAUT-COMMISSAIRE AUX DROITS DE L'HOMME REND COMPTE DE SA VISITE EN TCHETCHENIE
20000405La Commission poursuit son débat sur la question des droits civils et politiques
Genève, le 5 avril 2000 -- La Commission des droits de l'homme entendu, cet après-midi, la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Mme Mary Robinson, qui a rendu compte de la visite qu'elle vient d'effectuer en Tchétchénie et en Russie. La Commission a par ailleurs poursuivi son débat sur la question des droits civils et politiques.
La Haut-Commissaire aux droits de l'homme a déclaré que, pour la Commission, la question la plus urgente concerne la pertinence et la crédibilité de la réponse des autorités russes à l'ampleur des allégations de violations massives des droits de l'homme. Elle a encouragé le Gouvernement russe à établir, conformément aux normes internationalement reconnues, une commission nationale indépendante d'enquête sur les graves allégations qui ont d'ores et déjà été portées à son attention. Mme Robinson a estimé que l'ampleur des graves allégations de violations massives des droits de l'homme en Tchétchénie méritent l'attention et la préoccupation internationales. À cet égard, elle a rappelé que, récemment, dans le contexte d'une autre situation urgente, la Commission a apporté son appui à la fois à une commission nationale d'enquête et à une commission internationale d'enquête.
La délégation de la Fédération de Russie est intervenue pour répondre à la déclaration de Mme Robinson.
La Commission tiendra une séance, le 11 avril prochain dans l'après-midi, afin d'entendre les déclarations des membres de la Commission qui souhaitent intervenir au sujet du rapport que vient de soumettre la Haut-Commissaire aux droits de l'homme.
Dans le cadre de l'examen des questions relatives aux droits civils et politiques, l'Expert indépendant sur le droit à la restitution, indemnisation et réadaptation des victimes de violations flagrantes des droits de l'homme et des libertés fondamentales, M. Charif Bassiouni, a présenté son rapport final, dans lequel figure un projet révisé des principes fondamentaux et directives concernant le droit à un recours et à réparation des victimes de violations du droit international relatif aux droits de l'homme et du droit international humanitaire.
Dans le cadre du débat, la Commission a entendu les délégations des pays suivants : Japon, Norvège, Mexique, Sénégal, Chili, Roumanie, Brésil, El Salvador, Lettonie, Portugal (au nom de l'Union européenne et pays associés), Pologne, Argentine, Venezuela et Iraq. Les délégations du Rwanda, le Burundi et la République démocratique du Congo ont fait des déclarations dans l'exercice de leur droit de réponse.
La Commission poursuit son débat sur la question des droits civils et politiques jusqu'à 21 heures.
Déclaration de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur sa visite en Fédération de Russie
MME MARY ROBINSON, Haut-Commissaire aux droits de l'homme, a rendu compte de la visite qu'elle a effectuée du 31 mars au 4 avril dernier en Ingouchie, au Daghestan, en Tchétchénie et à Moscou (Fédération de Russie) en rappelant que le 24 avril 1996, la Commission avait déjà adopté une déclaration du Président qui abordait plusieurs questions, notamment l'utilisation disproportionnée de la force par les forces armées de la Fédération de Russie, les violations massives des droits de l'homme, le nombre élevé de victimes, les souffrances infligées à la population civile et aux personnes déplacées ainsi que les destructions de villes et de villages tchétchènes. Elle a rappelé que la Commission avait alors demandé au Haut Commissaire de poursuivre les consultations avec le Gouvernement de la Fédération de Russie, sur la situation en Tchétchénie, afin de garantir la mise en oeuvre des objectifs de la communauté internationale.
Mme Robinson a indiqué qu'à son arrivée à Moscou, le 31 mars, elle a eu des réunions avec les organisations humanitaires internationales oeuvrant dans le Nord du Caucase et avec des organisations non gouvernementales russes. Elle a indiqué s'être également entretenue avec l'ombudsman russe, M. Oleg Mironov. La Haut- Commissaire a ensuite indiqué s'être rendu le 1er avril à Nazran, la capitale de l'Ingouchie, où elle a visité le camps de personnes déplacées internes de Sleptzovskaya où des milliers de personnes vivent sous des tentes. Mme Robinson a dit avoir également vu 96 wagons de chemin de fer dans lesquels vivent 4 000 personnes déplacées, depuis six mois pour certaines d'entre elles. La Haut- Commissaire a dit avoir ensuite rencontré le Président Aushev qui lui a fait part des efforts déployés par son gouvernement pour faire face au flux de personnes déplacées internes en provenance de Tchétchénie, dont le nombre, selon les meilleures estimations, serait d'environ 213 000 personnes.
Au cours de ma visite dans la région, a poursuivi Mme Robinson, j'ai entendu des allégations de meurtres massifs, d'exécutions sommaires, de viols, de torture et de pillage. Dans la soirée du 1er avril, j'ai entendu un témoignage de première main de la part de témoins des allégations de violations massives des droits de l'homme en Tchétchénie. Mme Robinson a indiqué qu'elle considérait ces comptes rendus directs et ces témoignages personnels comme un moment crucial de sa visite dans la mesure où ils confirment la gravité des allégations de violations des droits de l'homme de la part des militaires russes, des milices et des forces du ministère de l'intérieur en Tchétchénie.
Mme Robinson s'est rendue en Tchétchénie le 2 avril, où elle n'a pu se rendre que dans le district de Staropromoslovsky à Grozny. L'ampleur de la destruction de Grozny, même pour ceux qui ont vu les images à la télévision, est *ðchoquante+ð, a déclaré la Haut-Commissaire. Mme Robinson a précisé qu'elle s'est ensuite rendue dans la capitale du Daghestan (Makhachkala) où elle a rencontré le Président Magamedov et des représentants de son gouvernement. Les conditions météorologiques ne lui ont pas permis de se rendre dans la zone frontalière où se produisaient des incursions des combattants tchétchènes. Au Daghestan, le traumatisme causé par les
attaques contre une République qui entretenait jusqu'ici de bons rapports avec le peuple tchétchène était évident. La remarque lui a été faite que la communauté internationale n'avait pas fait preuve de suffisamment d'intérêt face aux graves violations des droits de l'homme commises à l'encontre de la population du Daghestan.
À Moscou, Mme Robinson a été reçue par un certain nombre de ministres fédéraux. Les principaux éléments de la position du gouvernement fédéral était qu'il estimait faire tout ce que l'on pouvait attendre de lui pour autoriser l'accès des personnalités internationales; qu'une attention insuffisante était accordée aux violations des droits de l'homme commises par des combattants tchétchènes; que des violations des droits de l'homme avaient effectivement été commises par certains militaires mais qu'elles n'étaient pas systématiques et que des mesures avaient été prises pour traduire les responsables en justice.
Mme Robinson a rappelé que l'un des principes fondamentaux des situations de conflit est que la réponse doit être proportionnée à la menace, qu'il convient d'éviter toute victime civile et de respecter les droits de l'homme et le droit humanitaire international. Toute résolution du conflit devra inclure un programme de reconstruction des infrastructures, de restauration de la vie économique et d'établissement de la stabilité à long terme. Des solutions négociées et pacifiques doivent être trouvées, a déclaré Mme Robinson.
Soulignant que le Gouvernement russe souhaite obtenir davantage d'aide humanitaire de la part de la communauté internationale, elle a indiqué qu'elle soulèverait cette question demain lorsqu'elle rencontrera le Secrétaire général et les chefs des institutions des Nations Unies à Rome. On comprendra que la principale préoccupation des institutions humanitaires est la sécurité, a ajouté la Haut-Commissaire.
Pour la Commission des droits de l'homme, a poursuivi la Haut-Commissaire, la question la plus urgente concerne la pertinence et la crédibilité de la réponse des autorités russes à l'ampleur des allégations de violations massives des droits de l'homme. Certaines enquêtes ont certes été commencées mais Mme Robinson estime qu'une réponse différente est nécessaire. C'est pourquoi, dans ses discussions d'hier avec le Ministre des affaires étrangères, M. Igor Ivanov, elle a encourager le gouvernement à établir, conformément aux normes internationalement reconnues, une commission nationale indépendante d'enquête sur les graves allégations qui ont d'ores et déjà été portées à mon attention.
S'agissant de la réponse qu'il convient d'apporter au niveau international, a poursuivi Mme Robinson, *ðc'est sans aucune hésitation que je peux affirmer que l'ampleur des graves allégations de violations massives des droits de l'homme méritent l'attention et la préoccupation internationales+ð. À cet égard, elle a rappelé que, récemment, dans le contexte d'une autre situation urgente, la Commission a apporté son appui à la fois à une commission nationale d'enquête et à une commission internationale d'enquête. Des visites de rapporteurs et de représentants spéciaux figurent parmi les mesures qui pourraient être envisagées afin d'obtenir une meilleure évaluation des faits. Il revient à la Commission d'envisager un rôle éventuel pour tout autre mécanisme.
Mme Robinson a par ailleurs indiqué avoir été invitée par le Ministre russe des affaires étrangères, M. Ivanov, à se rendre de nouveau à Moscou, en Tchétchénie et dans le nord du Caucase dans deux ou trois mois pour évaluer la situation.
M. VASSILY SIDOROV (Fédération de Russie) a déclaré que son pays n'a jamais caché à qui que ce soit la vérité des faits dans cette région. Lors de sa visite, Mme Robinson a pu s'en convaincre, à l'instar des organisations qui se sont rendues dans le Caucase. Le représentant russe a signalé que certaines des informations mentionnées par la Haut-Commissaire n'ont pas été prouvées et déforment la réalité des faits : le Gouvernement de la Russie a lancé cette opération anti-terroriste car le pays était contraint de le faire, avant tout pour faire régner le droit, pour créer les conditions nécessaires au respect des droits de la personne dans cette république où, pendant de nombreuses années, ces droits ont été systématiquement bafoués. En fait les droits de la personne avaient complètement disparu. Certains membres de la communauté internationale sont restés silencieux à ce moment-là.
Mme Robinson a entendu des témoignages et vu aussi des cassettes filmées et mises en scène par les terroristes eux-mêmes. Le représentant a affirmé que des cassettes prouvant que les terroristes ont commis des exactions peuvent aussi être montrées et a prié la Commission d'organiser une séance de projection. La Russie a été accusée d'empêcher les organisations internationales à se rendre dans le Caucase, mais il n'y a pas une semaine sans que des organisations sollicitent un permis de visite, il n'y a pas une région au monde qui a reçu autant d'organisations, nous n'avons jamais refusé leurs demandes, a dit le représentant. Dans le Caucase, il y a en ce moment 70 journalistes accrédités, la plupart étrangers.
Le représentant a souligné que la Russie est consciente des droits de l'homme, qu'elle n'a jamais remis en question le respect des droits de l'homme, que le droit international oblige les États à coopérer dans ce domaine. Il faut rappeler que si nous n'arrivons pas à lutter contre ce terrorisme, ce terrorisme va se répandre hors de nos frontières. Il s'agit de protéger nos citoyens. Il a rappelé le niveau de confiance que les citoyens ont accordé au gouvernement : plus de 70% de la population a voté et souhaité que la Tchétchénie demeure au sein de la Fédération de Russie. La population souhaite que le régime de Doudaiev disparaisse. Les mesures prises pour restaurer la loi ont réussi, un accord a été conclu avec les experts du Conseil de l'Europe la semaine dernière et le Comité international de la Croix-Rouge pour être représentés dans cette république. La Russie est prête à coopérer mais à condition qu'il ne s'agisse pas d'un prétexte pour faire de l'ingérence dans ses affaires intérieures. Elle est disposée à engager un dialogue constructif dont le seul objectif devrait être de trouver une solution à cette situation.
Présentation de rapports au titre de la question des droits civils et politiques
M. CHARIF BASSIOUNI, Expert indépendant sur le droit à la restitution, indemnisation et réadaptation des victimes de violations flagrantes des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a présenté son rapport final (E/CN.4/2000/62) en indiquant qu'il a préparé un deuxième projet révisé des *ðprincipes fondamentaux et directives concernant le droit à un recours et à réparation des victimes de violations du droit international relatifs aux droits de l'homme et du droit international humanitaire+ð. L'Expert indépendant a reçu des observations de quelques gouvernements, ainsi que du Comité international de la Croix Rouge, d'organisations non gouvernementales telles que Amnesty International et de plusieurs experts. À partir de ces observations, l'expert a mis au point les principes et directives figurant en annexe de son rapport.
L'expert a ajouté que compte tenu que plusieurs gouvernements et organisations estimaient que certaines expressions manquaient de précision, a donc décidé d'employer l'expression *ðcrimes de droit international+ð pour désigner certains types de violations.
Débat sur les droits civils et politiques
M. KOICHI HARAGUCHI (Japon) a estimé que la torture devrait être considérée comme un des crimes les plus graves. Le représentant a informé la Commission que son pays est devenu partie, au mois de juillet dernier, à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, portant à six le nombre d'instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ratifiés par le Japon. Le Japon a participé activement au Groupe de travail sur un protocole facultatif à la Convention, qui prévoit des visites dans les lieux de détention. Le représentant a ajouté que son pays contribue depuis 14 ans au financement du Fonds des Nations Unies pour les victimes de la torture.
Le Japon est préoccupé par les nombreuses violations des droits de l'homme dans le monde. Pour le représentant, le meilleur moyen d'éviter que de tels actes ne se perpétuent est de s'attaquer à l'impunité dont bénéficient souvent les auteurs de violations des droits de l'homme. Dans ce contexte, le représentant s'est félicité de l'adoption du Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Le représentant a enfin salué les activités des rapporteurs spéciaux et des groupes de travail de la Commission, qui contribuent efficacement à la promotion des droits de l'homme.
MME YLVA BIE (Norvège) a rappelé que l'une des caractéristiques essentielles de l'État de droit réside dans la répartition des pouvoirs entre l'exécutif, le législatif et le judiciaire. Le 16 février dernier, la Norvège est devenue le septième État à ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, a rappelé la représentante. La représentante a exhorté tous les États à prendre les mesures nécessaires en vue d'aboutir à la ratification du Statut de Rome et a dit espérer que les soixante ratifications nécessaires pour que ce tribunal puisse entrer en fonction seront bientôt obtenues.
La représentante norvégienne a par ailleurs exhorté les États à intensifier leurs efforts au sein du Groupe de travail chargé de l'élaboration d'un protocole additionnel à la Convention contre la torture. En effet, l'établissement d'un sous-comité chargé des visites in situ, qui fonctionnerait de manière efficace, permettrait de renforcer le travail important effectué par le Comité contre la torture. Par ailleurs, afin de faciliter le travail du Rapporteur spécial sur la liberté religieuse, la Norvège estime qu'il conviendrait de modifier son titre comme suit : *ðRapporteur spécial sur la liberté de religion ou de croyance+ð.
MME ALICIA PEREZ DUARTE (Mexique) a fait valoir le renforcement du système judiciaire mexicain pour combattre la torture depuis la promulgation de la loi fédérale pour prévenir et sanctionner la torture de 1991. Toutes les instances locales ont pour tâche de réviser leurs propres normes et, à ce jour, tous les États mexicains disposent de dispositions légales nécessaires pour combattre ces actes répréhensibles.
Les autorités mexicaines, à tous les niveaux du gouvernement et au sein des trois pouvoirs de l'Union continuent d'être préoccupées par les informations sur la torture et continuent à combattre, sans trêve, et avec tous les moyens qu'offre la loi, toute forme de torture. Le Mexique lance un appel à tous les membres du Groupe de travail sur l'élaboration d'un projet de protocole facultatif sur la Convention contre la torture pour que soient abandonnées les positions excessives et que l'on trouve des voies réalistes et efficaces pour renforcer les mécanismes de coopération internationale dans le combat contre la torture.
M. IBOU NDIAYE (Sénégal) a déclaré que son pays est partie à la Convention contre la torture depuis 1986, ce qui témoigne de l'attachement du Sénégal à la promotion d'un respect universel des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La loi sénégalaise prévoit des dispositions visant à empêcher les cas de torture. Le régime de la détention garantit par ailleurs le respect des libertés individuelles. Le représentant a déclaré que la procédure pénale impose désormais la présence d'un avocat pendant la garde à vue.
Fort de ces constatations, le représentant a déclaré que son pays est un État de droit, qui a démontré sa volonté politique de promouvoir et protéger les droits de l'homme. Il a fait valoir que les conclusions adoptées par le Comité contre la torture à l'issue de l'examen du rapport périodique du Sénégal, le 1er mai 1996, reconnaissent la consolidation de l'état de droit dans le pays. Le représentant s'est enfin félicité du nombre croissant d'États parties à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.
M. GERARDO ATEAGA (Chili) a indiqué que son pays est favorable à l'élaboration d'un protocole additionnel à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en tant qu'instrument complémentaire de prévention et de protection susceptible de contribuer de manière déterminante à l'amélioration des conditions de détention des personnes privées de liberté et d'éviter des situations dramatiques de torture et de mauvais traitements.
Au Chili, la pratique systématique de la torture a définitivement pris fin avec l'instauration des gouvernements démocratiques. La loi nEð19 567, en vigueur dans le pays depuis le 1er juillet 1998, est un instrument visant l'éradication de la torture qui qualifie le délit de torture et impose des sanctions sévères. Cette loi établit en outre clairement les droits des détenus, ce qui implique d'importants moyens de prévention des actes de torture. Un autre aspect de la réforme de la justice est la modernisation de la police d'investigation.
M. IOAN MAXIM (Roumanie) a affirmé son soutien au Secrétaire général et aux recommandations figurant dans son rapport présenté lors de la cinquante-quatrième session l'Assemblée générale sur le rôle des nouvelles démocraties dans le processus mondial de démocratisation. La Roumanie soutient les conclusions contenues dans le rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme et les mesures prises en vue de l'application de la résolution pour la promotion du droit à la démocratie. Le représentant a ajouté que sa délégation compte sur les États démocratiques pour soutenir et faciliter les efforts de la Commission en vue de faire progresser la démocratie à travers le monde.
M. CELSO LUIZ NUNES AMORIM (Brésil) a déclaré le Pacte international relatif aux droits civils et politiques repose sur une *ðutopie réaliste+ð, celle de la jouissance pour tous, des droits civils et de la liberté politique. En effet, a affirmé le représentant, il faut encourager partout dans le monde l'acceptation de la démocratie comme seul système politique garant de la jouissance des droits de l'homme.
Une vigueur démocratique nouvelle se fait sentir en de nombreux endroits du monde, a poursuivi le représentant. Depuis les années 80, de nombreux pays d'Amérique latine se sont engagés sur la voie de la démocratie. Au-delà de la démocratie, c'est une certaine idée de la démocratie qui se répand aujourd'hui à travers le monde. L'idée que l'élection est par elle-même fondatrice de la démocratie n'a plus cours. Le représentant brésilien a invité la Commission à se pencher davantage sur les menaces qui pèsent sur la démocratie. À cet égard, il a fait remarquer que la démocratie est incompatible avec le racisme et que le racisme menace la démocratie. Partant, il a indiqué que la délégation du Brésil présentera projet de résolution illustrant cette incompatibilité.
M. MARIO CASTRO GRANDE (El Salvador) a souligné que le système d'administration de la justice et d'indépendance du pouvoir judiciaire au Salvador a été renforcé en vue d'accroître son efficacité. Il a rappelé que la question des quelque 2000 personnes disparues entre 1980 et 1983 figure toujours à l'ordre du jour des droits de l'homme en El Salvador, en tant qu'héritage du conflit armé. Leur recherche n'est cependant pas aisée, a-t-il souligné, pas plus qu'elle ne l'est dans aucun autre pays. Au niveau juridique, a-t-il poursuivi, la disparition forcée a été incorporée dans le code pénal en vigueur depuis avril 1998 au titre des crimes contre l'humanité. En outre, se poursuivent les démarches visant à obtenir des informations et à transmettre les plaintes reçues aux institutions officielles compétentes.
M. RAIMONDS JANSONS (Lettonie) a fait valoir que la constitution de son pays détermine les principes d'un pouvoir judiciaire indépendant, que la supervision des cours et des juges est organisée par le système judiciaire. La cour suprême supervise les tribunaux et toute interférence des autorités ou des administrations de l'État dans les décisions des tribunaux est inadmissible. Étant donné l'importance que son gouvernement attache au sujet, le représentant a exprimé son soutien au travail important fourni par le Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats. En nommant ce rapporteur spécial, la Commission a ainsi démontré le lien existant entre la faiblesse des garde-fous du système judiciaire et des juristes et la gravité et la fréquence des violations des droits de l'homme.
M. ALVARO MENDONÇA E MOURA (Portugal) au nom de l'Union européenne, a déclaré que la priorité devrait être donnée à l'allocation de ressources suffisantes pour assister les victimes de la torture. L'Union européenne souhaiterait également que l'on accorde la plus grande importance à la formation en matière de droits de l'homme des agents de l'autorité. L'Union européenne est gravement préoccupée par les cas de détention arbitraire dans certains pays. Ainsi, elle demande à la Chine de faire en sorte que les détentions administratives ainsi que la rééducation par le travail soient fondées sur des procès équitables, une assistance judiciaire et l'intervention d'un juge le plus rapidement possible. L'Union européenne demande encore à la Chine de ne pas prononcer de peine de rééducation aux personnes qui n'ont fait qu'exercer leurs libertés fondamentales.
L'Union européenne, qui a participé de près aux délibérations du Groupe de travail sur le protocole additionnel à la Convention contre la torture ou autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, se félicite des avancées réalisées et espère que le Groupe pourra achever ses travaux le plus rapidement possible. Il est en effet très important que soit défini un mécanisme de contrôle permettant de prévenir l'apparition de cas de torture. L'Union européenne se félicite de la définition de principes d'enquêtes efficaces et de documentation sur la torture, en ce qu'ils constituent des outils essentiels de prévention de cas de torture. L'Union européenne regrette que les gouvernements de l'Algérie, de Bahreïn, du Brésil, de l'Égypte, de l'Inde, de l'Indonésie et de la Tunisie n'aient pas répondu aux demandes formulées par le Rapporteur spécial sur la torture. Elle lance un appel à ces pays afin qu'ils accèdent à ces demandes.
L'Union européenne appuie pleinement le travail accompli par le Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats. Elle regrette que sa mission en Afrique du sud ait dû être interrompue faute ressources budgétaires suffisantes. L'Union européenne demande au Gouvernement de la Malaisie de respecter l'avis de la cour internationale de justice du 29 avril 1999 sur l'immunité du Rapporteur spécial pour des déclarations faites dans le cadre de son mandat d'expert indépendant des Nations Unies.
L'Union européenne est préoccupée par les peines récemment prononcées à l'encontre de membres du Parti démocratique chinois et d'adeptes de la secte Falun Gong. Elle condamne fermement le fait que des personnes encourent de graves peines pour avoir simplement exercé leur droit à la liberté d'expression et demande à la Chine, signataire du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, de procéder à sa ratification.
M. ROMAN KUZNIAR (Pologne) a rappelé que la Déclaration et le Programme d'action de Vienne plaident en faveur du renforcement et de la promotion de la démocratie. C'est dans cet esprit que la Pologne, la République tchèque, le Chili, l'Inde, le Mali, la République de Corée et les États-Unis ont décidé d'organiser une conférence sur le thème *ðVers une communauté de démocraties+ð les 25 et 27 juin de cette année, à Varsovie. Le représentant a insisté sur l'interdépendance entre les droits de l'homme et la démocratie. Toute violation des droits de l'homme marque le recul de la démocratie, toute démocratie stable est la meilleure garantie de protection des droits de l'homme. Le représentant a déclaré que, comme les droits de l'homme, la démocratie est universelle. Ses valeurs et ses mécanismes sont en progrès à travers le monde, a-t-il fait remarquer. Bien sur, a reconnu le représentant, elle ne se manifeste pas de la même façon selon les États. En Europe par exemple, on peut constater des différences dans le profil des institutions démocratiques.
La Pologne se félicite des progrès accomplis par la démocratie dans le monde. Toutefois, il importe de souligner que ce système n'est pas à l'abri de menaces. Chaque étape franchie vers sa consolidation fait surgir de nouvelles menaces qui pèsent sur lui. La démocratie, dans sa dimension la plus profonde doit être sans cesse confortée, a affirmé le représentant. C'est cette idée qui a conduit les pays susmentionnés à convoquer une conférence entièrement consacrée à la démocratie. Tous les organisateurs et participants à la conférence *ðVers une communauté de démocraties+ð sont convaincus que cet événement renforcera la marche mondiale vers la démocratie et servira la cause des droits de l'homme.
MME NORMA NASCIMBENE DE DUMONT (Argentine) a souligné que l'une des premières mesures prises par le nouveau Président argentin M. Fernando de la Rua lorsqu'il a pris ses fonctions le 10 décembre dernier fut de transférer du Ministère de l'intérieur vers le Ministère de la justice le Sous-secrétariat d'État aux droits de l'homme. Cette mesure n'est pas un changement purement administratif ; elle reflète plutôt une conception différente des droits de l'homme qui ne sont désormais plus perçus comme une question devant être traitée par le gouvernement mais comme une question au sujet de laquelle les autorités de l'État doivent prendre l'initiative.
Soulignant que son pays appuie toute mesure à caractère préventif susceptible, aux niveaux national et international, d'empêcher que ne se produisent des actes de torture, la représentante argentine a apporté son soutien aux travaux du Groupe de travail chargé d'élaborer un projet de protocole à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Elle a par ailleurs indiqué que l'Argentine invite aujourd'hui le Rapporteur spécial sur la liberté d'opinion et le Rapporteur spécial sur l'intolérance religieuse à effectuer une visite dans le pays. La représentante a par ailleurs rappelé que l'Argentine possède, en matière de disparitions forcées, un triste passé hérité de la dictature militaire. Elle a précisé que son pays s'est récemment opposé aux tentatives visant à démanteler Groupe de travail sur les disparitions forcées. L'Argentine est d'ailleurs d'avis que le moment est venu d'engager l'élaboration d'un instrument international à caractère contraignant en matière de disparitions forcées.
MME MARÍA CRISTINA PÉREZ DE PLANCHART (Venezuela) a déclaré que le soutien au processus d'ouverture et de consolidation est la meilleure contribution que la Communauté internationale puisse apporter à la promotion du processus de démocratisation dans le monde. elle a indiqué que sa délégation était co-auteur du projet de résolution sur le droit à la démocratie, convaincue d'engager un processus d'élaboration d'un droit fondamental des citoyens. La communauté internationale doit, prudemment mais sûrement, commencer le processus de reconnaissance de ce droit, qui constitue sans aucun doute, l'étape fondamentale à l'exercice de tous droits humains.
M. TAHA CHUKR MAHMOUD (Iraq) a rappelé que son pays a ratifié le Pacte international relatif aux droits civils et politiques afin de promouvoir les principes humanitaires auquel son pays est attaché. Depuis lors, le pays a connu de grands bouleversements politiques qui attestent de sa volonté de promouvoir les droits civils et politiques. Le représentant a ainsi évoqué la mise en place du multipartisme, l'adoption d'une loi d'autonomie afin de promouvoir les droits culturels des minorités. Une loi renforçant la participation de la population à la vie publique a été promulguée, ainsi que des lois visant la promotion des droits de La femme.
Mais l'Iraq ne pourra pas continuer de promouvoir les droits de l'homme tant que se prolongeront les offensives sur son territoire. Le représentant a toutefois déclaré que ces attaques n'ont pas conduit au déclenchement de l'état d'urgence, le gouvernement étant soucieux d'assurer une vie normale à sa population. L'Iraq s'efforce de maintenir un exercice normal des droits et libertés. Le représentant a rappelé que les États-Unis et le Royaume Uni continuent de causer des dommages à son pays, en violation de l'article 20 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. La paix et la sécurité sont nécessaires à la protection des droits de l'homme. Partant, le représentant a lancé un appel à la Commission afin qu'elle condamne les ingérences extérieures menées contr