En cours au Siège de l'ONU

DH/G/1288

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND LE MINISTRE DE LA SANTE DE L'IRAQ

3 avril 2000


Communiqué de Presse
DH/G/1288


LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND LE MINISTRE DE LA SANTÉ DE L'IRAQ

20000403

Elle entend les derniers orateurs au titre de la violation des droits de l'homme dans le monde et entame son débat sur les droits économiques, sociaux et culturels

La Commission des droits de l'homme a entendu, ce matin, une allocution du Ministre de la santé de l'Iraq. Elle a également entendu le représentant du Soudan dans le cadre du débat sur la question de la violation des droits de l'homme où qu'elle se produise dans le monde, ainsi que les représentants de Chypre, de la Grèce, de l'Érythrée, de l'Éthiopie et de la Turquie, qui ont exercé leur droit de réponse au titre de ce point. Elle a ensuite suspendu l'examen de cette question et ouvert le débat sur les droits économiques, sociaux et culturels.

M. Oumid Midhat Mubarak, Ministre de la santé de l'Iraq, a regretté que les institutions des droits de l'homme n'aient pas toute leur indépendance face aux pressions constantes de certains États, en particulier les États-Unis. Il a rappelé que l'Iraq est, depuis 10 ans, exposé au monstrueux crime de génocide perpétré au nom des Nations Unies au vu et au su de la communauté internationale.

Le Président de la Commission a indiqué que durant la journée de vendredi dernier, la Commission a examiné, à huis clos, dans le cadre de la procédure confidentielle 1503, la situation des droits de l'homme dans les neuf pays suivants : Chili, République du Congo, Kenya, Lettonie, Ouganda, Emirats arabes unis, Viet Nam, Yémen et Zimbabwe. La Commission a décidé de ne plus examiner la situation des droits de l'homme dans ces neuf pays. La Commission a par ailleurs décidé de tenir une autre séance privée au titre de la procédure 1503 avant la fin de la présente session.

Le Président de la Commission a par ailleurs indiqué que M. Leonardo Franco, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Soudan n'était pas en mesure de présenter son rapport devant la Commission. Ce rapport serait disponible ultérieurement.

Entamant son débat sur les droits économiques sociaux et culturels, la Commission a entendu le Rapporteur spécial sur les effets de la dette extérieure sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels,

M. Reinaldo Figueredo, qui a présenté le rapport établi conjointement avec l'Expert indépendant sur les effets des politiques d'ajustement structurel, M. Fantu Cheru. Mme Anne-Marie Lizin, Experte indépendante sur l'extrême pauvreté a également présenté son rapport en suggérant, notamment, l'établissement d'une alliance mondiale qui regrouperait tous les acteurs pertinents du développement, la promotion de la bonne gouvernance par le renforcement des capacités nationales, et la solidarité internationale à l'égard des États du tiers monde.

Dans le cadre du débat qui a suivi, les représentants des pays suivants ont pris la parole : Japon, Portugal (au nom des pays de l'Union européenne et pays associés), Pakistan, Chine, Venezuela, Cuba, Inde, Népal, Guatemala et Iraq. Le représentant de la Banque mondiale a également pris la parole.

La Commission des droits de l'homme poursuivra son débat sur les droits économiques, sociaux et culturels cet après-midi, à 15 heures.

Déclarations

M. OUMID MIDHAT MUBARAK, Ministre de la santé de l'Iraq, a regretté le manque d'indépendance des institutions des droits de l'homme du fait des pressions incessantes qu'exercent certains États, en particulier les États-Unis. Ainsi, l'Iraq est depuis 10 ans exposé au monstrueux crime de génocide perpétré au nom des Nations Unies au vu et au su de toute la communauté internationale. L'Iraq est quotidiennement soumis à des agressions aériennes et son espace aérien est continuellement violé. Le silence de la Commission face aux graves violations dont l'Iraq est victime du fait de l'embargo économique, mais aussi face à d'autres cas de violation de droits de l'homme dans d'autres régions du monde, témoignent d'une politique de deux poids, deux mesures et constituent une véritable menace pour les travaux des institutions chargées de la protection des droits de l'homme, limitant leur crédibilité tant qu'elle restera soumise à la politisation.

Le Ministre iraquien de la santé a rappelé que M. Hans von Sponeck, coordinateur des Nations Unies pour les affaires humanitaires à Bagdad, a démissionné récemment, estimant que la situation en Iraq était une véritable tragédie humaine à laquelle il faut mettre un terme et que la nature de sa mission le contraignait à briser le silence. Le Ministre a également évoqué la démission de Mme Jutta Buggart, représentant le Programme alimentaire mondial des Nations Unies à Bagdad, qui a ainsi exprimé sa protestation face à l'incapacité des Nations Unies à résoudre la situation humanitaire dans le pays. Elle a affirmé qu'elle n'était pas en mesure d'exécuter son mandat pour cause de pressions et contraintes imposées par le Conseil de sécurité.

Fin du débat sur la violation des droits de l'homme dans tous les pays

M. OMER SIDDIQ (Soudan) a déclaré que son gouvernement se félicite que le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme au Soudan ait pris note des efforts déployés dans ce domaine par le Soudan. Le représentant a indiqué que son gouvernement que dans l'Est du pays, les rebelles se comportent avec la population locale comme une armée d'occupation, en allant jusqu'à exiger la fermeture de 27 écoles de la région.

Après avoir évoqué un passage du rapport affirmant que le Gouvernement soudanais a empêché le Rapporteur de se rendre à Lockichoggio, M. Siddiq a précisé qu'il s'agit d'une zone contrôlée par l'armée rebelle (SPLA). Rappelant que le Rapporteur spécial a également évoqué le cas de civils pris pour cibles dans un contexte de guerre, mais le représentant a affirmé que ce n'est pas la politique de son gouvernement, qui respecte les dispositions de la quatrième Convention de Genève. Il a ajouté qu'en temps de guerre, il est impossible, en matière de bombardements aériens, d'atteindre 100 % de précision. En effet, des erreurs surviennent comme dans l'incident malheureux de l'école de Kouda, ce que le gouvernement déplore. Une commission d'enquête a été établie afin de déterminer les circonstances du drame et éviter que d'autres erreurs semblables ne se reproduisent.

Concernant les cas de torture évoqués par le Rapporteur spécial, le représentant soudanais a estimé que le rapport manquait de précision mais que les cas soulevés feront néanmoins l'objet d'enquêtes et que, le cas échéant, les responsables seront traduits en justice conformément aux lois en vigueur.

Exercice du droit de réponse

En réponse aux propos tenus jeudi dernier par le représentant de la Turquie, le représentant de Chypre a affirmé que son pays a bien été envahi par la force. Aucune rhétorique n'occultera le fait que la Turquie occupe 37 % de notre territoire au mépris des règles de droit international et notamment de la résolution 5555/1984 du Conseil de sécurité.

Le représentant de la Grèce a déclaré que l'action de la Turquie à Chypre ne relève pas de l'intervention. Il s'agit d'agression et d'occupation militaire. L'occupation de 37% du territoire chypriote, le maintien de 35 000 militaires à Chypre, l'éviction de 100 000 personnes et l'installation de personnes en provenance de Turquie attestent de la réalité. Puisque la Turquie préconise une solution durable au différend qui l'oppose à Chypre, a déclaré le représentant, serait-elle prête à mettre en oeuvre les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité ?

Le représentant de l'Érythrée a répondu à l'intervention faite jeudi soir par l'Ethiopie pour rappeler que son pays et l'Ethiopie ont tous deux accepté un accord-cadre. Or, il ne sert à rien d'accepter un accord si, par la suite, on n'envisage pas de le signer ensuite, comme cela est le cas pour l'Ethiopie. Le représentant éthiopien considère comme insignifiant le nombre d'Érythréens et d'Ethiopiens d'origine érythréenne déportés. Même si le nombre de 70 000 peut sembler modeste pour certains, il représente cependant 2% de la population de l'Érythrée. Il appartient à l'ONU de déterminer qui est l'auteur de l'agression. Pour trancher la question, il faudrait enquêter notamment sur les événements qui se sont produits le 6 mai 1998.

Le représentant de l'Ethiopie a affirmé que le régime érythréen démantèle des villes et des villages entiers pour modifier la composition démographique de zones entières. Les dirigeants érythréen perçoivent le droit de l'Ethiopie à se développer comme une menace pour l'Érythrée. Il faut que la Commission condamne les exactions commises contre les ressortissants de l'Ethiopie en Érythrée.

Le représentant de la Turquie a déclaré qu'il n'a pas l'intention de faire perdre du temps à cette auguste assemblée, en répondant aux déclarations *ðabsurdes+ð de la Grèce. Il a attiré l'attention de la Commission sur la situation étrange que constitue l'alliance de l'Arménie, de la Grèce et l'administration chypriote grecque, uniquement liés par leur hostilité commune à l'encontre de la Turquie. Il s'agit d'une situation quelque peu inquiétante car la Commission est utilisée et exploitée à des fins politiques, ce qui risque de poser des problèmes quant à sa crédibilité.

Le représentant de Chypre a expliqué que sa déclaration, qualifiée d'absurde par le représentant turc, est pourtant fondée sur des faits condamnés, entre autres, par le Conseil de sécurité. Ces organes prendraient-ils des décisions absurdes ? A t-il demandé. Si la Turquie ne répond pas à nos déclarations, c'est que sa position à Chypre est indéfendable. Et lorsqu'un peuple proteste et demande l'assistance de la communauté internationale, je pense que la situation est claire.

Le représentant de la Grèce a attiré l'attention de la Commission des droits de l'homme sur le refus du représentant de la Turquie de dire si son pays est prêt à mettre en oeuvre les dispositions pertinentes du Conseil de sécurité. Pour le représentant de la Grèce, la communauté internationale n'a pas d'autre choix que de demander à la Turquie de respecter et d'appliquer le droit international.

Présentation de rapports au titre des droits économiques, sociaux et culturels

M. REINALDO FIGUEREDO, Rapporteur spécial sur les effets de la dette extérieure sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels, a présenté le rapport (E/CN.4/2000/51) qu'il a établi conjointement avec l'Expert indépendant sur les politiques d'ajustement structurel, M. Fantu Cheru. M. Figueredo a rappelé qu'en juin 1999, le G7 a lancé à Cologne une importante initiative de réduction de la dette des pays pauvres les plus endettés. Il fut alors proposé d'améliorer graduellement, mais significativement, l'initiative en faveur de ces pays qui est administrée par la Banque mondiale et par le Fonds monétaire international (FMI). Ces mesures d'allégement de la dette ne sont pas suffisantes, estiment le Rapporteur spécial et l'Expert indépendant. Ils se disent préoccupés que les signes précurseurs d'un changement de fond dans la manière d'aborder les politiques d'ajustement structurel en ce qui concerne les pays en développement lourdement endettés sont maigres, voire nuls.

M. Figueredo a attiré l'attention sur trois types de situations d'urgence humanitaire critiques qui exigent une réponse immédiate de la part de la communauté internationale en raison de leurs conséquences considérables sur la promotion et la protection des droits de millions de pauvres. Ces trois situations d'urgence humanitaire ont trait à la situation des pays africains confrontés à l'épidémie de VIH/sida; à la situation des pays affectés par le passage de l'ouragan Mitch, en particulier le Honduras et le Nicaragua, ainsi que la situation au Mozambique suite aux inondations qui ont récemment frappé ce pays; et au travail des enfants. En effet, s'agissant de cette dernière question, il conviendrait de créer un lien direct entre l'allégement de la dette et la mise en oeuvre de la Convention de l'OIT sur l'élimination des pires formes de travail des enfants.

M. Figueredo a par ailleurs rappelé qu'en 1998, le Parlement italien a demandé à son gouvernement de porter à l'attention de l'Assemblée générale des Nations Unies une requête déposée devant la Cour internationale de justice de La Haye visant à obtenir un avis consultatif quant à la légitimité de la dette extérieure des pays en développement. La République dominicaine a présenté cette requête devant la deuxième Commission des Nations Unies en 1998. Peut-être un thème comme celui-ci gagnerait-il à être débattu devant la Commission juridique de l'Assemblée générale, a suggéré le Rapporteur spécial.

Présentation de rapports sur les droits économiques, sociaux et culturels

MME ANNE-MARIE LIZIN, Experte indépendante sur les droits de l'homme et l'extrême pauvreté, présentant son rapport (E/CN.4/2000/52 et add 1, à paraître, a souligné que la liberté économique ne peut mener, à elle seule, à la réalisation du progrès social, ni faire triompher la lutte contre la pauvreté. Des règles correctives, de cohérence sociale, doivent lui être apportées pour assurer le respect, pour chaque homme et femme sur terre, de ses droits économiques et sociaux. Plus il y a de liberté, plus il faut des règles sociales, a affirmé Mme Lizin.

L'Experte indépendante a déclaré que le fléau de l'extrême pauvreté demeure un des obstacles majeurs du développement des femmes et des hommes dans le monde. L'extrême pauvreté est un phénomène à la fois universel et multidimensionnel. Elle ôte à 1,3 milliard de personnes dans le monde, dont une majorité de femmes, la possibilité de jouir de tous leurs droits en tant qu'êtres humains. Pour Mme Lizin, la pauvreté est la cause la plus importante des violations des droits de l'homme dans le monde.

Mme Lizin a insisté sur la responsabilité de l'État en matière de lutte contre l'extrême pauvreté. L'absence de volonté politique demeure un obstacle majeur de la lutte contre l'extrême pauvreté. Dans ce contexte, elle a souligné l'importance de la décentralisation et le rôle des forces de police et des travailleurs sociaux au niveau local. Pour Mme Lizin, l'action réelle contre l'extrême pauvreté ne peut être matérialisée que si elle atteint la personne concernée.

Mme Lizin a évoqué 13 types de bonnes pratiques en matière de lutte contre l'extrême pauvreté, énumérés dans son rapport. L'évaluation de ces pratiques a fourni les bases d'un projet éventuel de coopération technique pour le Haut- Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, a-t-elle précisé. L'experte indépendante a notamment recommandé l'établissement d'une alliance mondiale qui regrouperait tous les acteurs pertinents du développement, la promotion de la bonne gouvernance par le renforcement des capacités nationales, et la solidarité internationale à l'égard des États du tiers monde. Mme Lizin a indiqué que son rapport traite également des objectifs et de l'utilité d'une déclaration sur les droits de l'homme et l'extrême pauvreté. Mme Lizin a enfin déclaré que de nombreux aspects de l'extrême pauvreté sont encore à approfondir et nécessitent une attention particulière de la part de la Commission des droits de l'homme. À cet égard, elle a insisté sur la nécessité de poursuivre l'évaluation de la relation entre la promotion des droits de l'homme et l'élimination de l'extrême pauvreté.

La Commission était en outre saisie du rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur le droit à l'alimentation (E/CN.4/2000/48), dans lequel elle rappelle que selon l'estimation la plus récente de la FAO, qui porte sur la période 1995-1997, le nombre de personnes sous-alimentées dans le monde serait de 825 millions (791 millions dans les pays en développement), soit une baisse de 8 millions en moyenne par an seulement. Or, pour atteindre l'objectif du Sommet mondial de l'alimentation consistant à réduire de moitié le nombre de personnes sous-alimentées d'ici à 2015, il faudrait que leur nombre ait diminué en moyenne de

près de 20 millions par an à compter de 1997. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels ayant adopté le 11 mai 1999 l'Observation générale 12, la communauté internationale dispose maintenant d'une définition dûment fondée des droits liés à l'alimentation qui sont énoncés à l'Article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Cette observation générale propose en outre des moyens de mettre en oeuvre et de réaliser ces droits de façon à tenir les engagements et objectifs du Sommet mondial de l'alimentation. La priorité doit désormais être accordée à la mise en oeuvre des recommandations correspondantes.

Débat sur la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels

M. KOICHI HARAGUCHI (Japon) a jugé vital d'assurer une promotion et une protection des droits économiques, sociaux et culturels autant que des droits civils et politiques. Toutefois, le sous-développement ne doit pas être utilisé comme une excuse permettant de négliger des droits de l'homme universellement reconnus. Le représentant japonais a néanmoins reconnu que la pauvreté est un obstacle de taille pour la réalisation et la jouissance des droits de l'homme. Le Japon entend contribuer de manière positive à la session spéciale de l'Assemblée générale qui sera consacrée, en juin prochain, à Genève, au suivi de la Conférence mondiale sur le développement social (Copenhague, 1995). Le Japon se félicite en outre de la tenue, en février 2000, à Sanaa (Yémen) d'un atelier sur les droits économiques, sociaux et culturels et le droit au développement dans la région Asie-Pacifique. Cet atelier a insisté sur la nécessité, pour tous les États qui ne l'ont pas encore fait, de ratifier le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

Le représentant japonais a rappelé que des initiatives ont été prises en vue de traiter de questions d'environnement et des effets néfastes de facteurs tels que les mesures coercitives unilatérales, la dette extérieure et les politiques d'ajustement structurel. Tout en reconnaissant l'importance de ces questions, le Japon souligne que ces questions sont hautement techniques et que, pour les traiter, il conviendrait d'impliquer divers organes pertinents. Le Japon estime que la Commission n'est pas l'instance adéquate pour aborder ces questions. Il se félicite des efforts de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme d'intégrer la dimension droits de l'homme dans d'autres instances telles que le Programme des Nations Unies pour le développement ou la Banque mondiale qui disposent de l'expertise et des moyens de parvenir à des résultats positifs.

La Commission était en outre saisie du rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur le droit à l'alimentation (E/CN.4/2000/48), dans lequel elle rappelle que selon l'estimation la plus récente de la FAO, qui porte sur la période 1995-1997, le nombre de personnes sous-alimentées dans le monde serait de 825 millions (791 millions dans les pays en développement), soit une baisse de 8 millions en moyenne par an seulement. Or, pour atteindre l'objectif du Sommet mondial de l'alimentation consistant à réduire de moitié le nombre de personnes sous-alimentées d'ici à 2015, il faudrait que leur nombre ait diminué en moyenne de près de 20 millions par an à compter de 1997. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels ayant adopté le 11 mai 1999 l'Observation générale 12, la

communauté internationale dispose maintenant d'une définition dûment fondée des droits liés à l'alimentation qui sont énoncés à l'article 11 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Cette observation générale propose en outre des moyens de mettre en oeuvre et de réaliser ces droits de façon à tenir les engagements et objectifs du Sommet mondial de l'alimentation. La priorité doit désormais être accordée à la mise en oeuvre des recommandations correspondantes.

M. ALVARO MENDONÇA E MOURA (Portugal), au nom de l'Union européenne et des pays associés, a déclaré que la liberté et le droit de vivre dans la dignité ne sont possibles que par l'exercice de tous les droits civils et politiques, mais aussi économiques, sociaux et culturels, ces derniers n'étant pas plus précieux ni moins importants. Le représentant a souligné que la réalisation de ces droits tels que le droit à l'alimentation, l'éducation, la santé, la sécurité sociale, un logement décent, contribuent à l'exercice des droits politiques et civils.

L'Union européenne soutient la mise au point d'indicateurs dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels comme une contribution décisive pour assurer la mise en oeuvre de ces droits et une réalisation optimale. L'Union européenne estime qu'il faut renforcer l'application globale des droits économiques sociaux et culturels. À cet égard, l'Union a retenu l'idée d'un projet de protocole optionnel régissant un système de communications en relation avec le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le représentant a d'ailleurs rappelé qu'au sein du Conseil de l'Europe, un protocole additionnel à la Charte sociale européenne régissant un système de plaintes collectives est entré en vigueur et est d'ores et déjà opérationnel.

MME TEHMINA JANJUA (Pakistan) a déclaré que la priorité de son gouvernement est de promouvoir les droits économiques, sociaux et culturels. La constitution du Pakistan consacre le droit à l'éducation pour les personnes les plus pauvres, ainsi que le droit à l'alimentation et à l'assistance médicale. La représentante a souligné que son pays a décidé de réduire de 5% le budget de la défense pour les consacrer à la réalisation des droits économiques et sociaux. Le Pakistan regrette que l'Expert indépendant sur les politiques d'ajustement structurel et le Rapporteur spécial sur la dette extérieure n'aient pas défini, comme le prévoyait leur mandat, de projet de lignes directrices sur les politiques d'ajustement structurels. La représentante a en outre regretté qu'ils ne se penchent pas, dans leur rapport, sur la question de l'accès des pays en développement aux marchés mondiaux et au progrès technologique. Elle a également déploré que la question de la participation des pays en développement aux délibérations et activités des institutions financières internationales n'ait pas été traitée.

La réalisation des droits économiques, sociaux et culturels passe en premier lieu par une évaluation objective des principaux obstacles à leur réalisation, a estimé la représentante. Dans ce contexte, elle a attiré l'attention de la Commission sur le caractère inéquitable des structures commerciales et financières internationales. Sans une promotion équitable et universelle des droits

économiques et sociaux, les conflits continueront de proliférer dans le monde. La représentante s'est félicitée des avancées réalisées dans le cadre de l'initiative lancée par la Haut-Commissaire aux droits de l'homme en faveur de la promotion du Pacte international sur les droits économiques, sociaux et culturels, soulignant toutefois la nécessité de mieux évaluer les progrès réalisés.

M. LIU XINSHENG (Chine) a rappelé que sur les 6 milliards d'individus que compte la population mondiale, 3,3 milliards vivent dans la pauvreté dont 90% se trouvent dans les pays en développement. Le nombre de pauvres dans le monde augmente en moyenne de 25 millions chaque année. Actuellement, 1,3 milliard de personnes vivent avec moins de un dollar par jour. C'est pourquoi cette Commission devrait prendre des mesures pratiques pour assumer sa responsabilité en matière de promotion et de protection des droits de l'homme et jouer le rôle qui lui revient en matière de réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. La Commission devrait ainsi s'attacher de toute urgence à redresser la tendance qui consiste à insister démesurément sur les droits civils et politiques au détriment des droits économiques, sociaux et culturels. La Commission devrait en outre plaider en faveur du renforcement de la coopération internationale sur la base de l'égalité et du respect mutuel de manière à lever les obstacles à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. Elle devrait exhorter la communauté internationale, en particulier ses membres les plus développés, à faire preuve de la volonté politique adéquate afin de réduire la dette extérieure des pays en développement et d'accroître leur aide publique au développement en leur faveur. Les pays développés devraient également encourager les pays en développement à participer au processus de prise de décision s'agissant des questions de commerce mondial et ils devraient s'attacher à réduire les effets néfastes de la mondialisation. La Commission devrait par ailleurs encourager le Haut Commissariat aux droits de l'homme à accorder l'attention qui convient aux droits économiques, sociaux et culturels en allouant davantage de ressources humaines et autres en faveur de la promotion de ces droits.

En 1999, a souligné le représentant chinois, la Chine a atteint un PIB 122 fois supérieur à ce qu'il était en 1949. Désormais, la Chine nourrit 22% de la population mondiale alors qu'elle ne dispose que de 7% des terres arables de la planète. L'espérance de vie moyenne en Chine est passée de 35 ans en 1949 à 71 aujourd'hui. Le taux d'anaphabétisme est passé de 80% en 1949 à 14,5% actuellement. De par son expérience en matière de développement économique et de promotion des droits économiques, sociaux et culturels, la Chine est d'avis que pour réaliser pleinement ces droits, il est indispensable d'élaborer une politique de développement et de choisir un rythme de développement qui tiennent compte des circonstances nationales. En outre, la stabilité sociale et nationale ainsi que l'unité du pays sont des garanties nécessaires.

M. VICTOR RODRÍGUEZ CEDEÑO (Venezuela) a estimé nécessaires des changements importants dans les politiques appliquées jusqu'à aujourd'hui par les organismes internationaux. Le Venezuela accueille favorablement les annonces faites par les autorités du Fonds monétaire international et de la Banque Mondiale en vue d'élaborer des plans stratégiques de réduction de la pauvreté. Ces efforts

traduisent la nécessité de renforcer la coopération internationale entre débiteurs, créditeurs, la société civile et le système des Nations Unies lui-même, afin d'appréhender au mieux cette problématique et ainsi favoriser le développement et la pleine réalisation des droits de l'homme.

Le représentant vénézuélien a souligné qu'il fallait faire preuve de souplesse en matière de réduction du capital et du service de la dette publique externe. Il faut donc un rééchelonnement opportun et des conditions avantageuses qui permettent aux pays en développement de mieux faire face aux problèmes auxquels ils sont confrontés dans le système financier et monétaire international.

MME MERCEDES DE ARMAS GARCÍA (Cuba) a déclaré que le droit au développement reste un mirage pour de nombreuses populations dans le monde. La réalisation des droits économiques, sociaux et culturels ne figure pas en bonne place à l'ordre du jour des droits de l'homme, a-t-elle fait remarquer. La représentante a par ailleurs rappelé que les États-Unis mettent en oeuvre de façon systématique des mesures coercitives et unilatérales entraînant des violations de ces droits économiques et sociaux dans de nombreux États du monde, y compris à Cuba. La représentante a déploré que les États-Unis font fi, depuis huit ans, des résolutions adoptées par l'Assemblée générale des Nations Unies visant la levée de l'embargo qui frappe son pays. Elle a déclaré que le maintien et le renforcement de cet embargo font naître des obstacles majeurs à la réalisation du développement économique et social de son pays. La représentante a qualifié une telle politique de génocidaire. Cuba souhaite que la Commission des droits de l'homme approuve largement la résolution présentée par le Mouvement des pays non alignés, rejetant l'application de mesures unilatérales et coercitives de façon générale, et l'embargo contre Cuba en particulier.

M. SHARAT SABHARWAL (Inde) a souligné qu'en dépit des progrès qui ont été enregistrés sur le plan conceptuel en ce qui concerne les droits économiques, sociaux et culturels, la pauvreté, l'exclusion et la marginalisation des individus et des sociétés perdurent. Le représentant indien a relevé que dans son rapport sur l'examen et l'évaluation de la Déclaration de Copenhague (Sommet social de 1995), la Commission du développement social a conclu que peu, voire aucun progrès n'a été réalisé en matière de réalisation des objectifs fixés il y a cinq ans. À cet égard, il convient de déplorer l'impact de la mondialisation ainsi que le déclin du niveau de coopération internationale alors que seuls quatre pays remplissent leurs engagements en matière d'aide publique au développement.

Commentant le rapport conjoint présenté par l'Expert indépendant sur les politiques d'ajustement structurel et le Rapporteur spécial sur l'effet de la dette extérieure, le représentant indien a par ailleurs regretté que ce rapport ne traite pas de l'effet des politiques d'ajustement structurel sur la pleine jouissance des droits économiques, sociaux et culturels. Il a également rappelé que les recommandations du rapporteur spécial de la Sous-Commission sur le droit à l'alimentation demandaient à la Haut-Commissaire aux droits de l'homme d'assurer la mise en oeuvre de mesures nécessaires à la réalisation du droit de tous à une nourriture adéquate et d'élaborer une stratégie des Nations Unies cohérente à cette fin. L'Inde attend que ces recommandations soient suivies d'effet. Il conviendrait en outre de se pencher sur la question du commerce émergent des

services éducatifs et sur le phénomène de la fuite des cerveaux des pays en développement, réapparu suite à la mondialisation des qualifications universitaires. En ce qui concerne les indicateurs en matière de réalisation des droits économiques, sociaux et culturels, il faut examiner la question attentivement car des indicateurs globaux, valables pour tous et qui ne tiendraient pas compte des conditions et des problèmes au niveau national, ne seraient pas d'une grande utilité. S'agissant du protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, concernant une procédure de plaintes pour violation de ces droits, l'Inde est d'avis qu'il faut continuer à recueillir l'avis des pays sur la question.

M. RAMBHAKTA P. B. THAKUR (Népal) a déclaré que pour apporter une aide économique additionnelle aux pays en développement, il faudrait mettre en place une stratégie de la dette accompagnée d'un environnement économique international favorable et de soutien. Il a notamment préconisé la pleine application des résultats de l'Uruguay Round relatifs aux négociations commerciales multilatérales ainsi que la décision ministérielle de Marrakech en faveur des pays les moins avancés (PMA) et les pays en développement important le plus de produits alimentaires. Le représentant a estimé que pour réaliser l'initiative préconisée lors de la réunion du G8 à Cologne, relative à la réduction de la dette pour les pays pauvres les plus endettés. Une action vigoureuse est recommandée. Il a par ailleurs demandé davantage de modération au sujet de la proposition du Fonds monétaire international sur la vente d'or. Une telle éventualité doit être considérée comme une mesure régressive, simplement car elle peut avoir un impact inverse sur l'économie de pays en développement produisant de l 'or. Il a suggéré au Fonds monétaire international de chercher un nouveau mécanisme.

M. LUIS ALBERTO PADILLA (Guatemala) a souligné qu'en matière de droits économiques, sociaux et culturels, l'Etat, loin de devoir s'abstenir comme pour les autres droits et libertés, doit au contraire agir pour satisfaire les besoins de la population. Le représentant a déclaré que c'est le manque de ressources qui est à l'origine de la difficulté à promouvoir de tels droits. Il a également souligné les difficultés entraînées par les politiques d'ajustement définies par le Fonds monétaire international. Partant, le représentant a insisté sur la nécessité d'accorder toute l'attention nécessaire aux propositions concrètes ainsi qu'aux résolutions formulées par la Commission des droits de l'homme et relatives à l'extrême pauvreté, à la dette extérieure ou encore au droit à l'éducation et à l'alimentation. Le Guatemala insiste également sur la nécessité de mettre en oeuvre les propositions contenues dans le rapport conjoint de l'Expert indépendant sur les politiques d'ajustement structurel et du Rapporteur spécial sur la dette extérieure. Le représentant a souligné l'intérêt d'une plus grande coordination de l'action menée par le système des Nations Unies s'agissant de la mise en oeuvre des résolutions de la Commission des droits de l'homme relatives aux droits économiques, sociaux et culturels.

M. SAID HUSSAIN (Iraq) a rappelé que la plupart des pactes et instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ont souligné la nécessité, pour assurer la réalisation de ces droits, de jouir d'un certain degré de stabilité et de paix, d'un certain niveau de ressources à l'échelle nationale et d'une bonne coopération à l'échelle internationale. Or, certaines puissances continuent d'exercer une véritable hégémonie, sous toutes ses formes, sur les pays du tiers- monde - une hégémonie qui vise à exploiter les ressources et les richesses de ces pays. Pour atteindre leurs objectifs, ces puissances ont recours à divers moyens - tels que les mesures coercitives, les sanctions économiques, l'embargo, la mondialisation, les sociétés transnationales et une certaine politique à l'égard des dettes extérieures - dont les effets se font principalement sentir sur les populations les plus vulnérables.

L'Iraq, qui est l'un de ces pays en développement pris pour cible, est soumis au régime d'embargo le plus rigide et le plus complet qui soit depuis août 1990. Cet embargo a gravement affecté tous les aspects de la vie publique en Iraq et est parvenu à démanteler le tissu social de la société iraquienne. La population iraquienne s'est vue privée du droit de jouir et de disposer des revenus de sa principale ressource, à savoir le pétrole. En raison de la profonde détérioration de la situation économique, des milliers d'Iraquiens n'ont eu d'autre choix que de quitter leur pays à la recherche de nouveaux moyens de subsistance pour leurs familles. Les opérations militaires hostiles menées par les États-Unis et le Royaume-Uni contre l'Iraq ont gravement porté préjudice aux infrastructures de tous les équipements publics. La Commission devrait donc se pencher sur cette situation.

M. ALFREDO SHEIR-YOUNIS (Banque Mondiale) a déclaré que le processus d'ajustement demande beaucoup plus de temps que prévu mais que les intérêts des pauvres seront pris en compte. Tous les gens décident de leur propre destin, donner le pouvoir aux pauvres a beaucoup d'importance et nous travaillons avec plus de 300 organisations non gouvernementales sur ce thème. L'annulation de la dette libérerait tellement plus de ressources, d'importantes liquidités qui deviendraient autant de ressources pour les pauvres. De l'avis du représentant de la Banque Mondiale, il faudrait toutefois ramener le présent débat à des préoccupations plus générales. Il faudrait aussi garder à l'esprit que la dette n'a pas toujours été utilisée de façon productive.

Concernant le rapport du Rapporteur spécial sur l'éducation, le représentant a déclaré qu'il contient des éléments utiles, mais à l'égard du financement du système d'éducation primaire, les activités ne sont pas financées

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