LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME POURSUIT SON DEBAT SUR LE DROIT AU DEVELOPPEMENT
Communiqué de Presse
DH/G/1278
LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME POURSUIT SON DÉBAT SUR LE DROIT AU DÉVELOPPEMENT
20000327Elle entend des déclarations du Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Azerbaïdjan et du Secrétaire aux affaires étrangères du Bangladesh
Genève 27 mars 2000 -- La Commission des droits de l'homme a poursuivi, cet après-midi, son débat sur le droit au développement. Elle a également entendu des déclarations du Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Azerbaïdjan et du Secrétaire aux affaires étrangères du Bangladesh.
Le Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Azerbaïdjan, M. Khalaf Khalafov, a attiré l'attention sur les mesures prises par son pays suite aux recommandations du Comité contre la torture et d'Amnesty International. Il a également rappelé que son pays attendait pour cette année une visite du Rapporteur spécial sur la torture, M. Nigel Rodley. Il a par ailleurs appelé la communauté internationale à être plus active dans le cadre du règlement pacifique du conflit armé entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan.
Le Secrétaire aux affaires étrangères du Bangladesh, M. C.M. Shafi Sami, a souligné que l'une des principales réalisations du gouvernement actuel, dans le domaine des droits de l'homme, a été l'abrogation de la loi d'amnistie concernant les responsables de l'assassinat du père fondateur du pays, Bangabandhu Sheikh Mujibur Rahman. Il a ajouté que les responsables de graves violations des droits de l'homme ne devraient pas pouvoir échapper à la justice et trouver refuge dans les pays respectueux des droits de l'homme.
Dans le cadre du débat sur le droit au développement, les représentants des pays suivants sont intervenus : Sénégal, Tunisie, Soudan, Madagascar, Qatar, Inde, Cuba, Norvège, Maroc, Swaziland, Guatemala, Indonésie, Venezuela, Népal, Sri Lanka, Iraq et Panama (au nom du Groupe des pays d'Amérique centrale). Le représentant de la Banque mondiale a également pris la parole.
La plupart des orateurs ont souligné qu'il reste beaucoup à faire en matière de réalisation du droit au développement, quinze ans après l'adoption, par les Nations Unies, de la Déclaration sur le droit au développement. Nombre d'intervenants ont encouragé le Groupe de travail sur le droit au développement, désormais présidé par M. Mohamed-Salah Dembri, d'Algérie, à s'engager dans les travaux de fond qu'il n'a pu commencer jusqu'à présent.
Un grand nombre de délégations ont rappelé que la réalisation du droit au développement exige la mise en oeuvre de politiques nationales adéquates ainsi que de relations économiques équitables et un environnement économique mondial favorable. La dette extérieure des pays en développement, la répartition inéquitable des richesses à l'échelle mondiale ainsi que les sanctions unilatérales imposées par certains pays ont été dénoncées comme constituant d'importantes entraves à la réalisation du droit au développement.
La Commission entamera, demain matin, à 10 heures, son débat sur la question de la violation des droits de l'homme dans les territoires arabes occupés, y compris la Palestine. M. Giorgio Giacometti, Rapporteur spécial sur la question, présentera son rapport (E/CN.4/2000/25).
Déclarations
M. KHALAF KHALAFOV, Vice-Ministre des affaires étrangères de l'Azerbaïdjan, a rappelé que depuis la restauration de son indépendance, l'Azerbaïdjan a fait de la primauté du droit, de la promotion des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'établissement de la démocratie des priorités absolues de sa politique intérieure et extérieure. L'Azerbaïdjan est activement engagé en faveur d'une plus grande intégration européenne. Afin de mettre en oeuvre les dispositions constitutionnelles et d'assurer la promotion et la protection des droits de l'homme, le Président, M. Heydar Aliyev, a publié un décret sur les mesures de protection des droits de l'homme et des droits et libertés civils, ainsi qu'un décret sur des mesures complémentaires visant à garantir la liberté d'expression, de pensée et d'information. L'Azerbaïdjan a en outre adopté un programme d'État dans le domaine des droits de l'homme et a créé un institut de recherche sur les droits de l'homme.
M. Khalafov a par ailleurs souligné que, suite aux conclusions adoptées par le Comité contre la torture à l'issue de l'examen du rapport initial de l'Azerbaïdjan, en novembre dernier, le Président azerbaïdjanais a signé, le 10 mars 2000, une directive pour la mise en oeuvre de mesures recommandées par le Comité et visant à répondre aux observations d'Amnesty International concernant ce rapport initial. Un groupe de travail a été mis sur pied pour examiner les faits de violations des droits de l'homme mentionnés dans le rapport d'Amnesty International sur le pays. L'attention de la Cour suprême et du bureau du Procureur a été attirée sur la nécessité de tenir compte des recommandations d'Amnesty International afin de remédier aux lacunes signalées. Le Gouvernement de l'Azerbaïdjan coopère de manière active et fructueuse avec la Commission des droits de l'homme et ses mécanismes, a souligné M. Khalafov. La visite attendue dans le pays, pour cette année, du Rapporteur spécial sur la torture, M. Nigel Rodley, constitue un bon exemple de cette coopération.
M. Khalafov a par ailleurs rappelé que, sur les 575 000 Azerbaïdjanais sur le territoire de l'actuelle Arménie en 1918, il ne reste plus un seul Azerbaïdjanais en Arménie suite à la politique délibérée d'expulsion forcée adoptée par le Gouvernement arménien. Le principal obstacle au développement de l'Azerbaïdjan est l'agression que le pays continue de subir de la part de l'Arménie voisine et ses conséquences néfastes. En dépit des demandes sans ambiguïté du Conseil de sécurité pour leur retrait, les forces armées arméniennes continuent d'occuper une partie du territoire de l'Azerbaïdjan et de conforter leur capacité militaire dans cette partie occupée. Il existe près d'un million de personnes déplacées dans la République, ce qui complique singulièrement la situation humanitaire du pays. La situation des conflits prétendument *gelés+ est encore plus tragique que celle qui prévaut dans les régions qui retiennent actuellement l'essentiel de l'attention de la communauté internationale. Cette situation de deux poids, deux mesures qui se manifeste à travers le monde, notamment économique l'ancienne Union soviétique, constitue une grande tragédie pour ces pays. M Khalafov a lancé un appel à la communauté internationale pour rechercher plus activement un règlement pacifique du conflit armé entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan.
M. SHAFI SAMI, Secrétaire d'État aux affaires étrangères du Bangladesh, a souligné que l'une des principales réalisations du gouvernement actuel, dans le domaine des droits de l'homme, a été le retrait de la loi d'amnistie qui a représenté un chapitre sombre de l'histoire constitutionnelle du pays et un affront aux normes et valeurs des droits fondamentaux de l'homme. Cette loi avait assuré l'impunité des auteurs de crimes odieux, responsables de la violation du plus fondamental des droits de l'homme, le droit à la vie du père fondateur de la Nation, Bangabandhu Sheikh Mujibur Rahman et des membres de sa famille. Cette loi d'amnistie n'a pas été seulement une injure aux valeurs et principes des droits de l'homme mais également a représenté un blanc-seing assassinats et à l'aventurisme politique. Ces criminels ont fini par être jugés devant des tribunaux de justice ordinaire en vertu des lois et procédures du droit. Malheureusement, certains de ces tueurs inculpés sont à présent des fugitifs qui ont trouvé un asile à l'étranger. Le Gouvernement du Bangladesh croit fermement que ces responsables de graves violations des droits de l'homme ne devraient pas échapper à la justice et trouver refuge dans des pays attachés au respect des droits de l'homme et de l'état de droit. Les efforts du Bangladesh pour traduire ces criminels devant la justice méritent le soutien et la coopération de la communauté internationale.
Débat sur le droit au développement
M. IBOU NDIAYE (Sénégal) a appelé à une vision consensuelle des droits de l'homme et a réaffirmé son engagement à oeuvrer pour la réalisation de la Déclaration sur le droit au développement et sa promotion, sous ses aspects intégrés et multidimensionnels, tant au niveau national qu'international. Le représentant a encouragé les efforts déployés dans le cadre des Nations Unies, en particulier au sein du groupe de travail de la Commission des droits de l'homme, chargé de suivre et de passer en revue les progrès accomplis dans la mise en oeuvre du droit au développement. Le Sénégal réitère son adhésion aux principes et objectifs de la Déclaration et du programme d'action de Vienne, qui consacrent l'universalité et l'indivisibilité des droits de l'homme, ainsi que son attachement aux droits de l'homme, la démocratie, le développement pour un monde de paix, de justice et de solidarité.
M. RAOUF CHATTY (Tunisie) a constaté que de nombreux obstacles se dressent sur la voie d'une réalisation effective du droit au développement. Pour près d'un cinquième de la population de la planète, ce droit ne signifie rien. Le représentant a souhaité que l'on fasse en sorte que la mondialisation soit un instrument efficace au service du développement. Il est important, a-t-il souligné, de promouvoir les principes de solidarité et d'équité à l'échelle internationale. La Tunisie a choisi d'orienter ses efforts vers la poursuite d'un développement global qui place la personne humaine au centre de toute action. Cela lui a permis d'améliorer sensiblement le niveau de vie de ses citoyens. Ainsi, le revenu par habitant est passé de 927 dinars en 1994 à 2422 dinars en 1998. Des actions d'envergure ont été engagées dans les domaines de l'éducation, de la santé, du logement et de la protection sociale. Un fonds national de solidarité a été mis en place pour venir en aide aux zones défavorisées et pour lutter contre la pauvreté. Le représentant a rappelé l'appel lancé à tous les dirigeants du monde par le Président tunisien en vue de créer un fonds mondial de solidarité. Ce fonds aurait vocation à collecter les donations et contributions volontaires pour les utiliser dans la lutte contre la pauvreté et pour le développement des régions les plus pauvres du monde. Cet appel, a-t-il souligné, a fait l'objet d'une décision lors du Conseil des ministres de l'Organisation de l'unité africaine réuni en mars 2000 à Addis- Abeba.
M. ALI ABDERAHMAN MAHMOUD (Soudan) a rappelé que la déclaration et le programme d'action de Vienne mettent l'accent sur les sérieux obstacles à la réalisation du droit au développement et exhortent la communauté internationale à renforcer la coopération au service de cette cause, sans discrimination. Le droit au développement devrait être appréhendé en prenant en compte la réalité économique dans toutes ses dimensions. Dans le contexte de la mondialisation, il n'est pas exagéré d'affirmer que les pays les moins développés risquent de se retrouver davantage marginalisés. Selon le représentant, le temps est maintenant venu pour les pays les plus développés et les institutions financières internationales de lever le fardeau de la misère qui pèse sur les pays les plus pauvres. Le Soudan lance un appel pour une annulation de la dette de ces pays et la mise en oeuvre d'un programme général de développement visant à satisfaire les besoins de la population en ce qui concerne l'eau, l'éducation, l'électricité, la santé. Par ailleurs, il faudrait revoir les règles du commerce international dans un sens plus équitable pour l'ensemble des pays. Il faudrait également assurer un meilleur transfert de technologies vers les pays en développement dans des conditions raisonnables. Parler de développement économique n'aura pas de sens aussi longtemps que les pays les plus avancés sur les plans économique et technologique ne feront pas preuve d'une véritable volonté politique de briser le cercle de la pauvreté.
M. MAXIME ZAFERA (Madagascar) a souligné que, cinquante ans après l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme et quinze ans après l'adoption de la Déclaration sur le droit au développement, il ne semble pas que la question du droit au développement ait reçu l'attention qu'elle mérite. On s'est surtout préoccupé de ses aspects théoriques et techniques, de sa définition, de ses bénéficiaires, alors qu'à travers le monde, des millions de personnes vivent dans la misère absolue, la plupart dans des conditions révoltantes pour la conscience humaine et pouvant les conduire vers la perte de leur droit le plus précieux : le droit à la vie.
La délégation malgache est convaincue que M. Mohamed Salah Dembri, Président du Groupe de travail sur le droit au développement, saura imprimer à ses travaux un élan suffisamment dynamique pour donner effet au droit au développement. M. Zafera a rappelé que les problèmes sociaux et économiques des pays les moins avancés sont tels que les États ne peuvent pas honorer pleinement l'obligation qui leur incombe de promouvoir et de protéger les droits de l'homme. Il y a donc pour toutes les nations un intérêt primordial à renforcer la coopération multilatérale et à favoriser l'instauration d'une société internationale équitable, juste et équilibrée.
M. KHALED AL-THANI (Qatar) s'est félicité que la communauté internationale ait reconnu que le droit au développement fait partie intégrante des droits de l'homme. Le représentant a estimé que la pleine réalisation du droit au développement exige une coopération étroite entre tous les acteurs sur le plan national et international. Le Qatar est préoccupé par le fait que l'on n'accorde pas toute son importance au droit au développement, sachant que, sans sa pleine mise en oeuvre, il n'est pas possible d'imaginer la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels. Il a estimé nécessaire d'établir le droit au développement sur une base juridique et lui donner un caractère contraignant. Le Qatar est préoccupé par la mondialisation dont tous les aspects ne sont pas aisément saisissables. Il s'est inquiété que la mondialisation pourrait se réaliser sans les pays en développement. Le représentant a évoqué le problème de la dette, qui représente un obstacle au droit au développement. Il a rappelé que les pays développés devraient aider les pays en développement afin de leur permettre de faire face aux effets négatifs de la mondialisation.
MME SAVITRI KUNADI (Inde) a insisté, dans le cadre de la réalisation du droit au développement, sur la nécessité d'assurer la promotion de la femme. Elle a également insisté sur la nécessité de construire des sociétés civiles vigoureuses afin de permettre la participation populaire à la réalisation du droit au développement. Si les États ont une responsabilité au premier chef s'agissant de la création d'un environnement favorable à la réalisation du droit au développement, il faut *discipliner le processus de mondialisation+ afin de renverser la tendance actuelle à la marginalisation d'une partie importante de l'humanité. L'Inde regrette que le Groupe de travail sur le droit au développement n'ait pas pu tenir un débat de fond et espère qu'il pourra rattraper le retard accumulé. L'Inde exprime l'espoir que la Haut-Commissaire aux droits de l'homme intensifiera les activités du Haut-Commissariat directement liées au droit au développement. La représentante indienne a enfin évoqué les mesures prises par son gouvernement en matière de droit au développement en précisant que l'accent a été mis tout particulièrement sur le renforcement des facteurs de croissance dans le monde rural, sur l'éducation primaire, la santé des femmes et des enfants et sur la promotion de la femme dans l'économie nationale.
M. JORGE-ALBERTO FERRER RODRÍGUEZ (Cuba) a déploré que le Groupe de travail sur le droit au développement soit resté paralysé jusqu'à une date récente et n'ait pu mener à bien une seule session de fond. Le représentant cubain a souligné que la différence de revenus entre les pays les plus riches, qui regroupent 20% de la population mondiale, et les 20% de la population mondiale qui vivent dans les pays les plus pauvres présentait un écart de 1 à 30 dans les années 1960 et avait atteint une proportion de 1 à 74 en 1997. Les 20% de personnes les plus riches de la population mondiale - qui vivent dans les pays développés - disposent de 86% du PIB mondial, contrôlent 82% des marchés d'exportation et consomment 45% de la viande et du poisson consommés dans le monde ainsi que 86% de l'ensemble des produits consommés. Il est possible de réduire cet abîme croissant, a affirmé le représentant cubain, soulignant qu'il suffirait que les pays du G7 consacrent l'équivalent du montant de 40 jours de leurs PIB pour annuler la dette extérieure de tous les pays en développement. On ne peut pas prétendre que vouloir transformer le monde est une question politique ou une utopie. La clef du problème, en fait, c'est la volonté politique, en particulier celle des pays développés en raison de leur rôle prépondérant dans les domaines économique, financier, commercial, technologique et dans l'élaboration des politiques mondiales dans ces domaines.
Il est indispensable de mettre en place une coopération internationale efficace et sans condition et de démocratiser le système financier international, a poursuivi le représentant cubain. Il faut aussi réformer le régime de distribution des richesses, devenu insoutenable. Les recettes prônant de prétendus ajustements structurels, qui préconisent des privatisations sauvages et une réduction des dépenses sociales publiques, sont contre- productives et doivent être abandonnées. Le représentant cubain a par ailleurs rappelé que les États-Unis maintiennent actuellement 61 sanctions économiques unilatérales contre des dizaines de pays représentant 42% de la population mondiale. La plus ancienne sanction est celle constituée par le blocus qui frappe Cuba depuis bientôt 40 ans. Les conséquences néfastes de telles mesures unilatérales, en particulier du point de vue de la réalisation du droit au développement, méritent de retenir rapidement l'attention du Groupe de travail sur le droit au développement.
M. JANIS BJØRN KANAVIN (Norvège) a déclaré qu'aujourd'hui, la communauté internationale a une réelle occasion d'utiliser l'aspect universel des droits de l'homme en faveur d'une action concertée. L'esprit de partenariat, le dialogue et les portes ouvertes ont remplacé la confrontation. Le monde est néanmoins toujours confronté à la violence et à l'instabilité dans un certain nombre de pays, ainsi qu'à une accentuation des disparités à l'intérieur des pays et entre eux. Ces menaces existent aussi en Europe. Le représentant norvégien a ajouté que le renforcement de la lutte en faveur des droits de l'homme dépend de la promotion des droits de l'homme dans chaque pays; de l'élaboration d'une approche globale; de la correction des dysfonctionnements de l'ordre social et économique international; de l'acceptation une fois pour toutes que le respect des droits de l'homme est *bon pour les affaires+ et de la solidarité avant tout avec l'individu dont les droits et libertés fondamentaux doivent être à la base de nos politiques et pratiques.
M. MOHAMED MAJDI (Maroc) a souligné que la réalisation du droit au développement doit être abordée sous un angle pragmatique et novateur. Les inégalités entre les pays développés et le tiers-monde sont toujours criantes, a-t-il souligné. Le représentant a rappelé que selon le Programme des Nations Unies pour le développement, 1,3 milliard d'individus vivent avec moins d'un dollar par jour et un tiers des 4,5 milliards habitants des pays en développement ne disposent pas d'eau potable. Dans nombre de pays africains, le revenu par habitant est plus bas qu'en 1970. Au moment où ces écarts s'accentuent chaque jour davantage, l'aide publique au développement a chuté d'environ 20% depuis 1992, du fait des coupes pratiquées par les pays membres du G7, a souligné le représentant.
La réalisation du droit au développement incombe aux États, mais les efforts des pays en développement ne peuvent être fructueux sans un environnement mondial favorable et un appui ferme de la communauté internationale, a souligné le représentant marocain. La mise en place du droit au développement exige une stratégie à long terme fondée sur le respect mutuel des nations. Elle exige aussi la mise en oeuvre d'une stratégie efficace, ce qui passe par la création d'une synergie entre les différentes instances internationales, moyennant notamment une plus grande cohérence des politiques monétaires, financières et commerciales des gouvernements et des organisations internationales.
MME NONHLANHLA MLANGENI (Swaziland) a rappelé que la réalisation du droit au développement requiert l'élaboration de politiques de développement efficaces au niveau national ainsi que l'existence de relations économiques équitables et un environnement économique favorable au niveau international. Or, la pauvreté largement répandue entrave la pleine jouissance de tous les droits de l'homme dans les pays en développement. La rapidité avec laquelle se développe le processus de mondialisation est certes porteuse d'opportunités nouvelles en faveur d'une vie meilleure, mais elle constitue également un danger pour les moyens de subsistance des plus pauvres. La lutte contre la pauvreté au Swaziland est malheureusement entravée par des facteurs tels que la forte incidence du VIH/SIDA. Le fossé persistant voire grandissant entre pays développés et pays en développement nuit à la participation de ces derniers au processus de mondialisation et continuera à entraver leurs efforts en faveur du développement. Si cette question n'est pas résolue, ces pays risquent une marginalisation accrue et une exclusion des bénéfices de la mondialisation. Plus gravement encore, le droit au développement continuera d'être bafoué. À cet égard, il convient de rappeler que la solution passe par la coopération internationale. Des stratégies telles que l'Initiative sur les pays les plus lourdement endettés fournissent un bon exemple de coopération internationale. Il faut poursuivre les consultations sur cette stratégie afin de lever l'un des principaux obstacles au développement.
M. LUIS ALBERTO PADILLA MENÉNDEZ (Guatemala) a estimé que l'étude de l'Expert indépendant présente une approche importante dans la recherche d'une conception qui puisse supplanter la vision stricte et économiste de ce qui a été appelé le *Consensus de Washington+. Aussi, le Guatemala insiste pour que l'Expert indépendant non seulement approfondisse ses travaux dans cette direction mais travaille à l'élaboration de propositions concrètes sur les mécanismes manquant à une meilleure coordination au sein même du système des Nations Unies, afin que les travaux en cours dans les autres organismes et instances puissent être pris en compte par la Commission des droits de l'homme et contribuer au débat.
M. SUSANTO SUTOYO (Indonésie) a rappelé que la personne humaine doit être au coeur des politiques de développement. Une participation effective de la population aux décisions, à leur mise en oeuvre et aux bénéfices qui en sont tirés est un élément essentiel d'un développement durable. L'Indonésie considère que la promotion de la société civile est importante et permettra aux personnes marginalisées et exclues d'être plus visibles pour les décideurs politiques aux niveaux national et local. L'Indonésie a pris des mesures en ce sens, s'assurant notamment que le Parlement, tant aux niveaux national que régional, soit véritablement représentatif de la population. Toutefois, le défi à relever est énorme. En effet, il faut lutter contre un manque de culture de participation. De plus, la crise qui a frappé l'Indonésie récemment a sérieusement affecté sa capacité à réaliser effectivement le droit au développement des citoyens. Au plan international, les États ont le devoir d'assurer des relations économiques équitables et de favoriser la naissance d'un environnement économique favorable à la réalisation du droit au développement. Les disparités économiques entre les différentes régions du monde doivent être éliminées pour que tous puissent tirer parti de la mondialisation. Le représentant a enfin insisté sur la nécessité d'éradiquer l'extrême pauvreté et de renforcer la coopération entre les États au service du droit au développement. L'Indonésie attache la plus grande importance au fonctionnement du Groupe de travail intersession sur le droit au développement et espère qu'il pourra identifier les éléments d'une stratégie en matière de droit au développement.
M. ALFREDO MICHELENA RODRÍGUEZ (Venezuela) a insisté sur l'importance du droit au développement de tous les pays et de tous les individus en tant que composante essentielle des droits de l'homme fondamentaux. Il a jugé nécessaire l'adoption d'une nouvelle stratégie en faveur du développement qui vise non seulement la croissance du PIB mais aussi l'intégration et l'amélioration des conditions de vie de toute la société. La stratégie de développement humain mise en avant par le Gouvernement du Venezuela consiste à promouvoir un ensemble de réformes sociales et normatives visant à réduire la pauvreté, la marginalisation et l'exclusion sociale. Les gouvernements ne peuvent échapper à leurs responsabilités, mais tous les problèmes qui entravent le droit au développement ne sont pas dus uniquement à des lacunes dans la gestion ou dans la politique interne de nos pays, a poursuivi le représentant du Venezuela. En effet, des groupes de pays parmi les plus avancés du monde appliquent des politiques internationales qui affectent la jouissance du droit au développement et restreignent l'accès des exportations des pays en développement à leurs marchés lorsqu'ils ne ruinent pas, tout simplement, avec leurs propres exportations subventionnées, les industries agro-alimentaires des pays les plus faibles. En outre, le poids de la dette externe contribue à la marginalisation des pays en développement et à leur instabilité sociale, avec le cortège de conséquences politiques qui peut en découler.
M. RAMBHAKTA P.B THAKUR (Népal) a souligné qu'une pleine réalisation des droits civils et politiques sans jouissance des droits économiques, culturels et sociaux est impossible. Malheureusement, les populations des pays en développement ont été marginalisées et négligées au cours du siècle précédent. L'écart entre pays riches et pauvres s'est accru de façon considérable, si bien qu'un milliard de personnes vit encore en dessous du seuil absolu de pauvreté. Pour le Népal, le sort de ces personnes implique une action immédiate. Si le cercle vicieux de la pauvreté dans les pays en développement n'est pas traité correctement, il pourrait y avoir des conséquences toucheront tous les pays sans exception. Le représentant népalais a ajouté que son pays croit que le droit au développement est le meilleur moyen de parvenir à la paix globale et au respect des droits de l'homme et que pour atteindre les objectifs du droit au développement, il en va de la responsabilité des États - nationalement et internationalement -, des organisations internationales et de tous les organes de la société civile.
M. A. SAJ U. MENDIS (Sri Lanka) a regretté que l'action en faveur du droit au développement n'a pas véritablement progressé. Les obstacles et défis en la matière ne sont pas confinés à la sphère nationale mais se situent essentiellement au niveau international. C'est pourquoi le Sri Lanka appelle de ses voeux la convocation d'un forum intergouvernemental pour discuter plus avant des moyens de réaliser le droit au développement. Le Sri Lanka investit en matière de développement humain, d'éducation, de sécurité sociale et de santé, considérant cette action comme une priorité nationale. Si nous reconnaissons que la mise en oeuvre du droit au développement est essentiellement du ressort des gouvernements nationaux, il n'en reste pas moins que les gouvernements ne sauraient donner un contenu pratique à la notion de droit au développement sans un contexte international favorable.
M. ALFREDO SFEIR-YOUNIS (Banque mondiale) a déclaré que désormais, il ne saurait être question d'élaborer des politiques ou de prendre des mesures qui finiraient par apporter des avantages économiques aux dépens des droits de tierces personnes. Il a assuré que la Banque mondiale est pleinement consciente de la relation qui existe entre l'élaboration des politiques économiques et la matérialisation de tous les droits. Elle est également consciente de la nécessité de faire en sorte que les approches en matière de gestion macro- économiques aient un visage humain. C'est pourquoi la Banque mondiale a défini sa mission comme visant l'éradication de la pauvreté. Il a assuré que la Banque mondiale est dotée d'un personnel soucieux des droits de l'homme, en particulier des droits des pauvres et des sans-abri.
M. AZIZ RAID (Iraq) a dénoncé les sanctions économiques et certaines mesures coercitives imposées de façon unilatérale par le Conseil de sécurité contre certains pays, dont la plupart sont des pays en développement. Ces sanctions constituent un obstacle majeur à la réalisation du droit au développement et ont pour conséquences d'importantes pertes humaines et matérielles auxquelles il est difficile de répondre et de remédier, surtout quand de telles sanctions économiques se perpétuent pendant une longue période, sans limitation de durée. L'exemple le plus évident est celui de l'Iraq, où les sanctions ont non seulement entravé mais mené à un effondrement total de tous les plans de développement du pays. Le processus de développement ne peut être poursuivi sans un environnement adéquat et des moyens vitaux pour assurer sa continuité. Il ne sera possible à l'Iraq de se développer qu'après la levée de l'embargo économique et l'arrêt des offensives militaires contre le pays. Le Gouvernement iraquien en appelle à la Commission pour mettre fin au génocide que constituent les sanctions économiques imposées à son peuple.
M. ANEL BELIZ (Panama, au nom du Groupe des pays d'Amérique centrale) a déclaré que les pays d'Amérique centrale sont convaincus de la nécessité de faire des propositions concrètes et viables qui en vue de mettre sur pied des politiques efficaces destinées à la pleine réalisation du droit au développement. Dans ce cadre, les pays d'Amérique centrale lancent un appel aux institutions de Bretton Woods pour qu'elles examinent avec toute l'attention requise toutes les propositions qui seront présentées par le Groupe de travail sur le droit au développement.
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