LE CONSEIL DE SECURITE DISCUTE DES MOYENS D'AUGMENTER LES REVENUS PETROLIERS DE L'IRAQ POUR REPONDRE AUX BESOINS HUMANITAIRES CROISSANTS
Communiqué de Presse
CS/1167
LE CONSEIL DE SECURITE DISCUTE DES MOYENS D'AUGMENTER LES REVENUS PETROLIERS DE L'IRAQ POUR REPONDRE AUX BESOINS HUMANITAIRES CROISSANTS
20000324La remise en état du secteur pétrolier et la solution à la question des contrats en suspens au coeur de la problématique
Le Conseil de sécurité a tenu aujourd'hui, sous la présidence de M. Anwarul Karim Chowdhury, représentant permanent du Bangladesh, sa première réunion sur l'Iraq depuis l'adoption, le 17 décembre 1999, de la résolution 1284, "Résolution omnibus", désignée ainsi parce qu'elle regroupe les questions couvertes par l'ensemble des résolutions adoptées depuis 1991. Composée de 39 paragraphes, la résolution prévoit notamment le remplacement de l'UNSCOM par une Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations Unies et la suppression du plafond des recettes d'exportation de pétrole que l'Iraq est autorisé à effectuer afin d'acquérir les biens nécessaires à sa population - Programme "pétrole contre nourriture".
Ce matin, les membres du Conseil ont commenté le rapport du Secrétaire général sur les progrès réalisés dans le domaine humanitaire et sur les revenus nécessaires à sa cette fin, revenus, selon le rapport, que l'Iraq ne peut percevoir sans une remise en état de son secteur pétrolier. Présentant son rapport, M. Kofi Annan a de nouveau recommandé une augmentation sensible des fonds alloués à l'achat de pièces détachées destinées à l'industrie du pétrole. M. Annan a appelé aussi pour une solution rapide de la question des contrats mises en attente par le Comité des sanctions.
Le nombre des contrats mis en attente est excessivement élevé a reconnu le Président du Comité des sanctions, l'Ambassadeur des Pays-Bas en adhérant aux propositions du Secrétaire général comme l'ensemble des Membres du Conseil. Le Président du Comité a ensuite attiré l'attention sur les mesures qui, dans la résolution 1284, vont dans le sens d'une amélioration notamment des procédures de passation de marchés et d'approbation des demandes. Le nombre des contrats mis en attente a été expliqué par les Etats-Unis et le Royaume-Uni par la nécessité pour le Comité des sanctions de prévenir tout détournement des produits concernés vers le secteur de l'armement; les produits liés aux secteurs de l'eau, de l'assainissement, de l'électricité et du pétrole pouvant être à double usage. "Tant que la Commission de contrôle, de vérification et d'inspection ne sera pas autorisée à commencer ses activités en Iraq, il serait inapproprié voire dangereux d'approuver les contrats pour la plupart des produits à double usage", ont insisté les Etats-Unis.
Les préoccupations légitimes en matière d'abus et de fraudes doivent conduire à une réflexion sur la manière de mieux cibler les sanctions, a estimé le Canada en écho aux préoccupations de nombreuses délégations concernant la situation humanitaire en Iraq. Tout en reconnaissant que le Programme "pétrole contre nourriture" - programme d'urgence - n'a jamais visé à satisfaire l'ensemble des besoins de la population iraquienne, ces délégations ont estimé qu'il a montré ses limites; la France appuyant une suspension des sanctions envisageable, selon elle, dans le cadre de la résolution 1284.
D'autres délégations comme la Chine et la Fédération de Russie ont posé la levée des sanctions comme condition préalable à l'amélioration de la situation actuelle du peuple iraquien. A cela, des délégations comme les Etats-Unis et le Royaume-Uni, ont rappelé que le régime des sanctions vise à réduire la capacité de l'Iraq de menacer la stabilité régionale. Ils ont réaffirmé que sa levée est liée au respect par l'Iraq de toutes les dispositions de la résolution 1284, en particulier celles concernant les activités de la Commission de contrôle, de vérification et d'inspection de l'armement.
Les représentants des Membres suivants du Conseil ont pris la parole : Pays-Bas, Fédération de Russie, Etats-Unis, France, Chine, Canada, Tunisie, Mali, Ukraine, Jamaïque, Royaume-Uni, Namibie, Malaisie, Argentine et Bangladesh. La Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) est également intervenue.
LA SITUATION ENTRE L'IRAQ ET LE KOWEÏT
Rapport présenté par le Secrétaire général (S/2000/208)
Aux fins de l'établissement du présent rapport sur les progrès accomplis pour répondre aux besoins humanitaires du peuple iraquien et sur les revenus nécessaires à cette fin, le Bureau chargé du Programme Iraq (le Programme) a entrepris un examen interorganisations du programme humanitaire mis en place en application de la résolution 986 (1995), avec l'entière participation de fonctionnaires de l'Organisation au Siège et sur le terrain. Il a également entrepris de revoir systématiquement le processus de passation des marchés, de traitement des demandes et d'approbation de ces dernières par le Comité du Conseil de sécurité créé par la résolution 661(1990), de transport et de distribution des différents articles, ainsi que la distribution des fournitures humanitaires en Iraq en temps voulu. Les résultats de cet examen sont exposés aux sections IV et VI du présent rapport. Outre cela, le rapport examine dans quelle mesure les recommandations formulées par le Secrétaire général dans son rapport complémentaire du 1er février 1998, telles que approuvées par le Conseil de sécurité, ont été suivies d'effet. Il présente par ailleurs un certain nombre d'autres mesures visant à rendre le programme plus efficace afin de sensiblement améliorer à la fois la santé de la population iraquienne et son état nutritionnel et de rémédier à la détérioration de l'infrastructure des services sociaux.
Rappelant que le programme est actuellement dans sa septième phase, le Secrétaire général insiste sur la complexité exceptionnelle de ce programme qui ne peut être confondu avec un programme de développement du fait qu'il a été mis en place par le Conseil de sécurité en tant que mesure temporaire pour répondre aux besoins humanitaires du peuple iraquien jusqu'à ce que l'Iraq ait appliqué les résolutions pertinentes dont l'exécution s'inscrit dans le cadre d'un régime de sanction. En dépit du fait que l'on dispose actuellement d'un éventail de ressources beaucoup plus large que par le passé pour répondre aux besoins humanitaires dans l'ensemble de l'Iraq, le Secrétaire général rappelle que ce programme n'a jamais été conçu pour satisfaire tous les besoins humanitaires de la population et doit être évalué en conséquence.
Dans ses différentes sections, le rapport présente un examen des recettes et de la situation de l'industrie pétrolière; fait le point sur les activités d'observation et de supervision; sur l'examen et les approbations des demandes présentées par l'Iraq ainsi que sur la mise en oeuvre du programme en matière d'alimentation, de santé, d'agriculture, d'eau et d'assainissement, d'éducation, d'électricité, de remise en état de logements et de déminage.
Le Secrétaire général note que, depuis le début de l'exécution du Programme Iraq en 1997, l'infrastructure de base s'est détériorée de plus en plus vite, aggravant le mauvais état nutritionnel de la population dans son ensemble et de la santé publique ce qui a exigé la mise en place de systèmes d'achat et de distribution efficaces et une gamme plus élargies d'apports financés à un niveau beaucoup plus élévé que prévu initialement (1 milliard 320 millions de dollars par phase). Bien que le Conseil de sécurité ait autorisé l'accroissement du niveau de financement du programme de ce niveau initial à 3,4 milliards de dollars par phase, le temps nécessaire pour arrêter la détérioration de la situation humanitaire s'est avéré beaucoup plus long en raison du grave déficit de financement lié au cours du pétrole qui a été plus faible que prévu. A cet égard, il rappelle que le déficit total en matière de financement des phases IV et V s'élevait à 2,2 milliards de dollars. Toutefois en dépit des difficultés, de décembre 1996 à janvier 2000, un montant total de 13,2 milliards de dollars a été affecté à l'exécution du programme et, au 31 janvier, la valeur totale des approvisionnements livrés à l'Iraq s'élevait à 6,7 milliards de dollars -y compris plus de 13 millions de tonnes de denrées alimentaires et de fournitures sanitaires. En outre, des fournitures additionnelles approuvées d'une valeur totale de 2,7 milliards de dollars attendent d'être livrées, en plus des approvisionnements faisant l'objet d'un contrat au cours de la phase VII.
Le rapport souligne que l'efficacité du programme a considérablement pâti non seulement du déficit en matière de financement mais également du trés grand nombre de demandes mises en attente, notamment celles concernant l'électricité, l'eau et l'assainissement, les transports et les télécommunications, qui ont une incidence sur tous les autres secteurs. Au 31 janvier, la valeur totale des demandes mises en attente était supérieure à 1,5 milliards de dollars. Le Secrétaire général souhaite par conséquent que toutes les parties concernées s'emploient à collaborer efficacement afin d'améliorer l'exécution du Programme. Il réitère son appel en faveur d'un réexamen des positions adoptées au sujet des demandes mises en attente. A cet égard, il a donné pour instruction au Bureau chargé du Programme Iraq d'examiner à nouveau les exigences du Comité du Conseil de sécurité en ce qui concerne les informations à fournir au sujet des demandes mises en attente et d'améliorer les procédures d'observation s'agissant des questions qui présentent un intérêt particulier pour le Comité du Conseil de sécurité.
Par ailleurs, le Secrétaire général attire l'attention du Gouvernement iraquien sur les recommandations figurant dans son rapport complémentaire (S/1998/90) qui n'ont pas encore été appliquées et l'invite notamment à abandonner la conception du plan de distribution fondée sur les produits en faveur d'une approche axée sur des projets; à communiquer au programme toutes les données de base et les données techniques concernant le réseau électrique; et à faire en sorte que, compte tenu de l'important déficit de financement dans le secteur de la santé au titre des phases IV à VI, des fonds suffisants soient alloués pour, à la fois, couvrir les dépenses de fonctionnement et établir le cadre de la restauration du système de soins de santé publique de base.
Il recommande au Comité du Conseil de sécurité d'améliorer davantage ses méthodes de travail et de prise de décision afin d'accélérer l'approbation des demandes et d'indiquer plus clairement les raisons pour lesquelles les demandes sont mises en attente; de rationnaliser les procédures permettant de lever ces mises en attente et de renouveler ses efforts pour parvenir à un consensus sur la proposition présentée par le Bureau chargé du Programme de l'Iraq tendant à l'instauration d'un nouveau système de remboursement du compte ESC (13%) au compte ESB(53%); et de se pencher sur les difficultés rencontrées dans la nomination de nouveaux superviseurs afin de remédier à la situation actuelle. .
Compte tenu de la détérioration constante de l'état de l'industrie pétrolière iraquienne, détérioration confirmée une nouvelle fois par l'étude approfondie effectuée récemment par le groupe d'experts de l'industrie pétrôlière qu'il a créé en application du paragrapghe 30 de la résolution 1284 (1999), le Secrétaire général recommande au Conseil de sécurité d'approuver pour la phase VII l'allocation d'un montant supplémentaire de 300 millions de dollars pour les pièces de rechange et le matériel destinés au secteur pétrolier et de porter ainsi ce montant pour la phase VII à 600 millions de dollars, pour maintenir les niveaux de production à leurs niveaux actuels et afin de compenser les dommages permanents causés aux structures pétrolifères iraquiennes. L'allocution d'un montant minimumde 6000 millions de dollars est aussi requise pour la phase VI. Par ailleurs, il insiste sur la nécessité de rapidement approuver les demandes concernant les pièces détachées et le matériel. En outre, le Secrétaire général recommande au Conseil de sécurité d'envisager de renoncer à ce qu'un rapport sur l'exècution du programme lui soit présenté tous les 90 jours. Il espère également que le Conseil trouvera le moyen de surmonter effectivement les obstacles qui continuent d'empêcher les pélerins de s'acquitter de leurs obligations religieuses à La Mecque et se déclare prêt à aider le Conseil à chercher un arrangement acceptable pour toutes les parties concernées.
Le Secrétaire général constate que, en dépit des mesures adoptées pour améliorer le niveau de financement et élargir la portée du programme, celui-ci na pas atteint son plein potentiel en raison de nombreuses difficultés. Il lance un appel à toutes les parties concernées pour quelles intensifient leurs efforts afin de permettre au programme de faire face plus efficacement à la situation difficile dans laquelle le peuple iraquien continue de vivre.
Déclarations
Le Secrétaire général des Nations Unies, M. KOFI ANNAN, a rappelé que le programme "pétrole contre nourriture" qui existe depuis un peu plus de trois ans, a pour objectif d'atténuer l'impact des sanctions sur la population iraquienne, dans la mesure où elle ne constitue pas une cible. Ce programme a indéniablement soulagé la population iraquienne, mais de nombreux besoins essentiels demeurent insatisfaits. A l'origine, le programme était soumis à des restrictions très sévères, à la fois sur la nature des marchandises que l'Iraq était autorisées à importer - qui se limitaient à la nourriture et aux médicaments et autres produits strictement humanitaires - et sur les revenus que les exportations de pétrole devaient générer. Depuis lors, suite aux décisions prises par le Conseil de sécurité au cours de ces trois dernières années, la liste des produits que l'Iraq est autorisé à importer a été considérablement étendue et libéralisée. Et le plafond des ventes de pétrole a été totalement éliminé, mais l'industrie pétrolière de l'Iraq a été gravement handicapée par l'absence de pièces détachées et d'équipement, et cela menace de saper les ressources du Programme à long terme. C'est pourquoi, a dit le Secrétaire général, j'ai constamment recommandé une augmentation sensible des fonds alloués, dans le cadre du Programme, à l'achat de pièces détachées destinées à l'industrie du pétrole. Selon le Secrétaire général, il est aussi nécessaire de mettre en place un mécanisme qui examine les mesures en attente des contrats en vue de garantir un fonctionnement souple du Programme.
Nous avons aussi besoin, bien sûr, de la coopération du Gouvernement iraquien, a poursuivi M. Kofi Annan. Aussi, a-t-il exhorté le Gouvernement iraquien à prendre toutes les mesures nécessaires visant à assurer une distribution efficace et prompte des produits importés. Si le Programme tel qu'il a été amendé par la résolution 1284 (1999) est pleinement mis en oeuvre, la situation humanitaire en Iraq s'améliorera bientôt. Toutefois, même si sa mise en oeuvre est parfaite, il est possible que nos efforts ne répondent pas suffisamment aux besoins de la population, a fait observer M. Annan.
La situation iraquienne pose un dilemme moral grave pour les Nations Unies, a estimé le Secrétaire général qui rappelle que l'Organisation a toujours été aux côtés des personnes vulnérables et faibles, et a toujours cherché à atténuer les souffrances alors qu'elle est accusée ici de causer les souffrances d'une population tout entière. En Iraq, les Nations Unies risquent d'être perdantes dans les discussions ou la propagande de guerre sur la question de qui est responsable de la situation, le Président Saddam ou les Nations Unies. Le Secrétaire général s'est déclaré particulièrement préoccupé par la situation des enfants iraquiens dont les souffrances ont été largement décrites dans le rapport de l'UNICEF et par le Ministère iraquien de la santé. Ce rapport a montré que les taux de mortalité infantile et de la morbidité ont augmenté de manière vertigineuse et atteint des niveaux inacceptables. On ne peut ignorer ces rapports ou prétendre qu'ils sont erronés. Il incombe donc à tous - à savoir le Secrétariat, le Conseil de sécurité ainsi que le Comité des sanctions créé par la résolution 661 - de mettre en oeuvre pleinement et rapidement les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Le Conseil de sécurité devrait explorer toute possibilité pour alléger les souffrances de la population qui, après tout, n'est pas visée par les sanctions. Le seul moyen qui permettra à un Etat de sortir d'une telle situation est de se conformer pleinement aux résolutions du Conseil de sécurité afin que ces sanctions puissent être levées aussi rapidement que possible.
M. PETER VAN WALSUM (Pays-Bas) a d'abord indiqué qu'en sa qualité de Président du Comité des sanctions contre l'Iraq, il attend toujours la permission de l'Iraq pour se rendre dans le pays et rencontrer les autorités pertinentes. Parlant ensuite au nom des Pays-Bas, le représentant a décelé un contraste saisissant entre le rapport du Secrétaire général qui fournit des informations sur les progrès réalisés en matière humanitaire et les messages provenant de différentes sources qui demandent que l'on mette fin à la situation humanitaire catastrophique en Iraq. Face à ce contraste, le représentant a rappelé que le Programme humanitaire en Iraq a été mis en oeuvre dans le contexte d'un régime de sanctions. Il ne faut donc pas le confondre avec un programme de développement. Le régime des sanctions prendra automatiquement fin dès que le Gouvernement iraquien se sera acquitté de ses obligations en vertu des résolutions du Conseil de sécurité adoptées depuis 1991. Dans le cas de l'Iraq, a poursuivi le représentant, il est vain de vouloir présenter une position unifiée du Conseil de sécurité. Certes, tous les Membres sont préoccupés par la situation humanitaire et mus par la volonté d'empêcher le pays d'acquérir des armes de destruction massive. Mais très vite, les divergences politiques entrent en jeu qui montrent que certains pays ont l'objectif majeur de minimiser l'appétit de l'Iraq pour les armes de destruction massive alors que d'autres pays s'emploient à présenter une image de tolérance à l'égard de l'Iraq.
Au-delà de ce tableau, a estimé le représentant, il existe un niveau remarquable de consensus. Le consensus concerne le fait que l'Iraq n'a pas encore convaincu la communauté internationale de son intention de mettre fin à son programme d'armes de destruction massive. Le consensus concerne aussi le fait que la population iraquienne ne doit pas continuer de pâtir d'une absence de régime démocratique; ceci expliquant l'existence dans la résolution omnibus de mesures visant à améliorer la situation humanitaire. Ces mesures concernent notamment la levée du plafond pétrolier. Les améliorations apportées par les mesures de la résolution omnibus aboutiront inévitablement à une réflexion plus avant sur les mises en attente des commandes de l'Iraq. A cet égard, le représentant a souhaité que les délégations qui ne sont pas concernées par la question s'abstiennent de critiquer les délégations qui prennent leur devoir au sérieux. Il a toutefois estimé que les demandes en attente sont à un niveau insupportablement élevé et a invité les délégations concernées à se montrer plus sensibles à l'impact humanitaire de leurs décisions, comme dans le domaine de l'épuration de l'eau. Tout doit être fait pour améliorer les procédures. Si le représentant a insisté sur ce qu'il a appelé un problème persistant à savoir les obstructions du Gouvernement iraquien. La communauté internationale est pratiquement sans défense contre une telle attitude, a-t-il dit, en jugeant donc peu étonnant que conjuguée aux informations négatives sur la situation humanitaire, l'attitude des dirigeants iraquiens puisse convaincre certains que la levée des sanctions est le seul moyen de sortir de l'impasse. L'Iraq, a dit le représentant se leurre si du fait des résultats du vote de la résolution omnibus - quatre abstentions - il considère que le texte n'est pas contraignant. Le Conseil de sécurité est sérieux et si l'Iraq insiste pour dire que la situation humanitaire ne peut s'améliorer sous un régime de sanctions, il suffit qu'il permette la reprise des inspections, a conclu le représentant.
M. SERGEI LAVROV (Fédération de Russie) a déclaré que le rapport du Secrétaire général sur la situation en Iraq témoigne des difficultés auxquelles est confrontée chaque jour la population iraquienne. L'infrastructure industrielle de l'Iraq s'est détériorée de manière considérable. Les communications, les transports ne permettent pas d'acheminer dans des conditions normales les médicaments et autres équipements humanitaires. M. Dennis Halliday, ancien Coordonnateur du programme humanitaire en Iraq, continue de déployer des efforts inlassables et de plaider en faveur de la population iraquienne. Des mesures urgentes sont nécessaires pour faire face à l'état catastrophique de l'infrastructure pétrolière en Iraq. Le représentant a estimé qu'outre le fait de doubler le montant alloué aux importations iraquiennes de pièces détachées, il est nécessaire d'examiner les mises en attente excessives. Il faut accélérer les procédures d'approbation des contrats. M. Lavrov a notamment regretté les obstacles imposés par certaines délégations pour mettre en attente des contrats de matériels indispensables à la remise en état des centrales électriques et infrastructures de santé en Iraq. Le représentant a rappelé que depuis décembre 1998, les aviations américaine et britannique ont fait près de 20 000 incursions aériennes dans l'espace aérien de l'Iraq. Les frappes aériennes ont tué 144 personnes et blessé 466 personnes, tout en détruisant une partie de l'infrastructure du pays. Contrairement aux allégations faites, des rapports montrent que ces frappes aériennes n'ont pas épargné la population civile.
Les frappes aériennes assorties d'activités auxquelles le Conseil de sécurité ne donne pas son aval créent une situation difficile dans les relations entre les Nations Unies et le Gouvernement iraquien. Ce n'est pas par ce moyen que l'on parviendra à dissuader l'Iraq de faire obstruction à l'inspection de ses sites. Il est nécessaire de lever les sanctions dans le cadre de l'application de la résolution 1284 (1999), qui est le seul moyen, de l'avis de M. Lavrov, de surmonter les obstacles à la coopération franche de l'Iraq.
JAMES B. CUNNINGHAM (Etats-Unis) a, dans une déclaration appuyée par des graphiques et des photographies, fait l'état des lieux des sanctions imposées à l'Iraq, de son secteur pétrolier et de sa situation humanitaire. Il a affirmé qu'aussi longtemps que l'Iraq ne respectera pas ses obligations en vertu des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité, les sanctions demeureront essentielles pour empêcher le pays d'acquérir du matériel destiné à nourrir ses ambitions de développer des armes de destruction massive. Passant en revue les actes d'obstruction du Gouvernement iraquien, le représentant a souligné que le régime des sanctions n'est pas le problème étant donné qu'il n'a jamais été adopté contre la population iraquienne et qu'il n'a jamais limité l'importation de nourriture et de médicaments par le pays. Les privations en la matière, a insisté le représentant, sont imputables au Gouvernement iraquien, à son refus de respecter les résolutions du Conseil de sécurité et à la manipulation cynique qu'il fait de la souffrance de son peuple pour obtenir la levée des sanctions sans avoir à se conformer aux résolutions du Conseil. Si l'Iraq n'avait pas attendu cinq ans pour accepter le Programme "pétrole contre nourriture" au lieu d'y adhérer dès 1991, des millions d'innocents auraient pu éviter les souffrances qu'ils connaissent aujourd'hui, a poursuivi le représentant en précisant que même lorsqu'il a accepté le Programme, le Gouvernement a, à plusieurs reprises, réduit le flux du pétrole, privant ainsi le Programme de millions de dollars; le dernier épisode ayant eu lieu en décembre 1999. Le Programme "pétrole contre nourriture", a insisté le représentant, est le programme humanitaire le plus important de l'histoire des Nations Unies. Et il faut constater, a-t-il dit, que là où Bagdad est seul chargé du Programme, la situation humanitaire est déplorable. Le représentant s'est d'ailleurs félicité que le Secrétaire général ait fait part du refus de l'Iraq de mettre en oeuvre des programmes alimentaires supplémentaires que l'ONU défend depuis longtemps. Le représentant a donc fait une proposition en déclarant que si l'Iraq est incapable de gérer le Programme "pétrole contre nourriture", les institutions spécialisées des Nations Unies actives dans le nord devraient être habilitées à mettre en oeuvre des programmes similaires dans le sud et au centre du pays.
Le Conseil de sécurité, a poursuivi le représentant, est responsable d'assurer un équilibre entre les demandes concernant le secteur pétrolier iraquien et les demandes concernant les secteurs de la nourriture ou des médicaments. Le représentant a, à cet égard, regretté que le rapport du Secrétaire général ne présente pas un plan complet pour l'avenir. Il a toutefois appuyé la recommandation d'allouer une somme supplémentaire de 300 millions de dollars pour le secteur pétrolier, en rappelant que son pays est auteur de la résolution présentée dans ce sens. Consacrant une grande partie de sa déclaration à la contrebande à laquelle se livrent les autorités iraquiennes, le représentant a proposé qu'Al Faw, l'installation pour l'exportation de pétrole dans le Golfe et Abu Flus, une installation utilisée actuellement pour la contrebande soient désignées comme points de contrôle par l'ONU des exportations de produits raffinés. Il est temps, a dit le représentant, que tous les revenus pétroliers de l'Iraq soient regroupés dans le Programme "pétrole contre nourriture" pour que le potentiel de ce programme soit pleinement exploité. Le Programme pourrait d'ailleurs aussi récupérer pour les secteurs dont il s'occupe une somme annuelle estimée entre 500 à 8000 millions de dollars, a affirmé le représentant.
Abordant la question des contrats mis en attente, le représentant a expliqué la politique d'examen et d'approbation des contrats de son pays qui se fonde sur deux principes; empêcher l'Iraq d'acquérir les moyens de menacer la stabilité régionale et améliorer la situation humanitaire du peuple iraquien. L'équilibre entre ces deux objectifs est une responsabilité grave que les Etats- Unis entendent bien assumer. Partant, le représentant a souligné que les plaintes concernant les mises en attente imputables à son pays ne concernent qu'un petit pourcentage de contrats présentés au Comité des sanctions. Il a expliqué que ces mises en attente sont dues à la manière dont sont rédigés les contrats. Illustrant ces propos, il a indiqué que si une société veut vendre des pompes à l'Iraq, le pays dont elle est originaire doit savoir que certaines pompes sont inscrites sur la liste 1051 du Comité des sanctions concernant les produits à double usage. L'absence de ce type d'informations dans le contrat ne peut conduire qu'à une mise en attente. Tant que la Commission de contrôle, de vérification et d'inspection des Nations Unies et l'AIEA ne seront pas en mesure de reprendre leurs activités en Iraq, il serait inapproprié voire dangereux d'approuver les contrats pour la plupart des produits à double usage, a insisté le représentant. Il a également fait état de plusieurs contrats servant de couverture à l'Iraq. De plus, un petit nombre de contrats sont en attente en raison de dispositions financières irrégulières, a ajouté le représentant. Il a assuré que les mises en attente ne sont jamais motivées par des raisons politiques ou économiques. La croissance des achats de l'Iraq ne s'est pas faite dans les secteurs de l'alimentation et des médicaments mais dans les secteurs de l'électricité, de l'eau, de l'assainissement et de la production pétrolière, qui eux peuvent impliquer des doubles usages, a souligné le représentant. Il a donc appelé l'ONU à accroître son personnel pour soutenir le rythme de la croissance des demandes en souhaitant un meilleur équilibre entre les experts techniques et le personnel humanitaire. Les Etats-Unis, a dit le représentant, auraient ainsi moins de mises en attente si une structure assurait un meilleur contrôle des produits dans le cadre du Programme "pétrole contre nourriture".
Le Conseil doit rester uni et contraindre l'Iraq à se conformer à toutes les dispositions de la résolution omnibus, a dit le représentant en regrettant que le rapport du Secrétaire général n'ait pas fait le point en la matière. Il a appelé le Secrétaire général à être plus énergique lorsqu'il rappelle à l'Iraq ses obligations.
Pour finir, le représentant a demandé à l'Iraq d'adopter pour ses contrats une approche fondée sur les projets; de partager les données sur les infrastructures électriques dans le nord du pays; d'envisager une inspection avant l'embarquement des produits pétroliers et d'avoir recours à de meilleurs fournisseurs; et de renforcer sa coopération avec les inspecteurs. D'autres recommandations avancées par le représentant concernant le domaine humanitaire.
M. JEAN-DAVID LEVITTE (France) a rappelé que selon un rapport de l'UNICEF, la mortalité des enfants de moins de 5 ans est passée d'un taux de 56 pour 1000 pendant la période 1984-1989 à un taux de 131 pour 1000 pour la période actuelle. Ce taux de mortalité infantile est parmi les plus élevés au monde. Comme l'indique un rapport du Parlement britannique, si les progrès sanitaires observés dans les années 1980 avaient été maintenus au cours de la décennie suivante, 500 000 enfants auraient pu survivre. La situation n'est guère meilleure dans le secteur de l'éducation. Selon l'UNICEF, la scolarisation des enfants a diminué de 20 points entre 1991 et 1999. Dans le domaine des services sociaux, la situation s'est également détériorée. 41% de la population seulement a régulièrement accès à de l'eau potable, dont la qualité s'est également détériorée. En outre, les bombardements quasi-quotidiens ont eu des effets humanitaires négatifs sur la population civile. Ces actions militaires ont causé la mort de 144 civils et en ont blessé 466. 42% de ces victimes sont des civils.
Tout en reconnaissant que le Gouvernement iraquien a une lourde part de responsabilité dans l'origine de cette situation désastreuse, M. Levitte a estimé que le Conseil de sécurité ne peut plus méconnaître ses propres responsabilités en la matière. De l'avis de sa délégation, seule la suspension des sanctions civiles, envisageable dans le cadre de la mise en oeuvre de la résolution 1284, puis leur levée, lorsque les conditions seront réunies, permettront la relance du développement économique de ce pays. Dans l'attente, les membres du Conseil de sécurité ont une responsabilité dans l'amélioration du programme Iraq, a souligné M. Levitte.
Les recommandations formulées par le Secrétaire général et adressées d'une part à l'Iraq et d'autre part au Comité des sanctions et au Conseil de sécurité, visent à améliorer l'efficacité du programme humanitaire et sont donc les bienvenues, a estimé M. Levitte. Concernant les propositions adressées à l'Iraq, il a souhaité que les services du programme à New York et sur le terrain examinent avec les autorités iraquiennes les voies et moyens de leur mise en oeuvre rapide. S'agissant des recommandations adressées au Comité des sanctions, M. Levitte a souhaité qu'elles soient toutes appliquées résolument et rapidement. A cet égard, il a rappelé que la délégation française qui a formulé de nombreuses propositions de compromis, est prête à reprendre les discussions sans délai pour sortir le Comité de l'impasse actuelle.
La France espère que la recommandation du Secrétaire général concernant la question, très grave par ses effets, des mises en attente, sera enfin entendue par le Conseil de sécurité. Toutefois, cette mesure n'aura d'effet favorable que si les pièces détachées sont livrées rapidement. Il faut mettre fin aux mises en attente excessives qui frappent ce secteur. Des pièces détachées pour un montant de 250 millions de dollars seulement ont été livrées, alors que le Conseil a débloqué sur quatre phases l'équivalent de 1,2 milliard de dollars. Les décisions prises par le Conseil de sécurité sont donc largement ignorées, s'est indigné M. Levitte.
Pour remédier à ces dysfonctionnements, la France avait insisté pour que la résolution 1284 contienne un volet humanitaire ambitieux et a beaucoup contribué à l'élaboration de cette section de la résolution qui contient de nombreuses améliorations techniques. Quatre mois après l'adoption de la résolution, a regretté M. Levitte, peu de mesures sont entrées en vigueur. Le mécanisme de notification au Secrétariat des contrats de nourriture, de médicaments, d'agriculture et d'éducation va enfin pouvoir être mis en oeuvre car les mises en attentes sur les dernières listes de produits ont été levées hier. La délégation française souhaite que le Conseil de sécurité soit mieux informé de la situation sur le terrain, notamment par l'audition plus régulière de représentants des agences des Nations Unies et du coordonnateur humanitaire. Le Conseil de sécurité devrait travailler de bonne foi, dans un esprit de consensus, à la mise en oeuvre des orientations positives de la résolution 1284, afin d'inciter l'Iraq à coopérer et rendre ainsi possible la suspension puis la levée des sanctions, a conclu M. Levitte.
M. WANG YINGFAN (Chine) a souligné qu'il est essentiel de maintenir la production et la capacité des exportations de pétrole de l'Iraq dans la mesure où cela sert de base pour la mise en oeuvre du programme "pétrole contre nourriture". Le Conseil de sécurité avait décidé par sa résolution 1284 de lever le plafond des exportations de pétrole par l'Iraq, a poursuivi le représentant. En dépit de cette mesure, la production récente de pétrole iraquien a décliné. La cause en est évidente. A plusieurs occasions, le Groupe des experts Saybolt a souligné dans ses conclusions que le secteur pétrolier iraquien est en retard d'une dizaine d'années et a recommandé que davantage de ressources soient allouées de manière urgente pour le restaurer et le moderniser. A la lumière de ces circonstances, il est à la fois nécessaire que le montant des ressources nécessaires pour l'achat de pièces détachées passe de 300 millions de dollars à 600 millions de dollars. C'est pourquoi, le Conseil de sécurité devrait adopter immédiatement une résolution pertinente en la matière, a estimé M. Wang.
Aux faiblesses sous-jacentes du programme "pétrole contre nourriture", s'ajoute le problème plus grave des mises en attentes excessives qui a aggravé la situation humanitaire tragique en Iraq. Au 6 mars 2000, le nombre de contrats mis en attente a dépassé 1,7 milliards de dollars. En moins de six mois, le nombre de contrats mis en attente a doublé. Ces chiffres montrent la gravité du problème et présentent au Conseil de sécurité un tableau très alarmant.
Les résolutions du Conseil de sécurité interdisent strictement aux Etats Membres d'exporter tout matériel ou équipement vers l'Iraq à des fins militaires et à ce jour, aucune violation n'a été constatée, a fait remarquer M. Wang. Pour sa part, le Secrétaire général, en approuvant les projets de distribution présentés par l'Iraq, a examiné de manière approfondie tous les produits devant être achetés afin que l'achat de tous les matériels et équipements y compris ceux ayant un double usage ne soit fait qu'à des fins civiles. C'est pourquoi, la délégation chinoise estime que tous les contrats approuvés par le Comité des sanctions ont été examinés conformément à toutes les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. La Chine a toujours coopéré de manière constructive pour répondre aux demandes formulées par certains Etats Membres concernant des informations techniques supplémentaires sur les sociétés exportatrices, afin de contribuer à l'amélioration de la situation humanitaire en Iraq.
Rappelant que de nombreux contrats pétroliers, les centrales électriques et l'eau potable sont interdépendants, un contrat mis en attente entrave l'exécution des autres contrats, a fait remarquer M. Wang. Par exemple, l'Iraq a été autorisé à importer des groupes électrogènes, mais s'est vu refuser l'importation de câbles électriques. Il va sans dire que sans ces câbles, les groupes électrogènes sont inutiles. De plus, le Secrétariat et les autres institutions opérant sur le terrain sont d'avis que les télécommunications en Iraq devraient être améliorées immédiatement pour garantir une meilleure mise en oeuvre du programme "pétrole contre nourriture". Dans ce domaine, 100% de ces contrats sont mis en attente, a fait observer M. Wang, ajoutant que les prétextes techniques invoquées pour ces mises en attente sont loin d'être convaincants. Comme le rapport du Secrétaire général l'indique, presque la moitié des fonds disponibles n'ont pas été utilisés pour la mise en oeuvre du programme.
Les sanctions imposées à l'Iraq durent depuis dix ans et leurs conséquences humanitaires sont à la fois considérables et profondes. Selon un rapport de l'UNICEF, publié l'été dernier, le taux de mortalité infantile au cours de ces dernières années a doublé, de même que le taux de mortalité maternelle. Pour sa part, le Comité international de la Croix-Rouge indique que le salaire mensuel minimal en Iraq n'excède pas 2 dollars et le taux de chômage s'élève à 50%. La Chine estime donc que le Conseil de sécurité devrait faire face à la situation humanitaire en Iraq, en particulier l'impact des sanctions, en adoptant une approche globale et intégrée à long terme. Le Secrétariat devrait préparer et soumettre au Conseil de sécurité un tel rapport dès que possible. La délégation chinoise souhaite être informée de manière régulière sur les résultats des contrôles concernant les exportations vers l'Iraq. L'efficacité du Comité des sanctions est également essentielle pour assurer un meilleur fonctionnement du programme "pétrole contre nourriture". Le Comité des sanctions devrait accélérer la levée des mises en attente et discuter de la modification éventuelle des méthodes de travail pour améliorer de manière générale la mise en oeuvre du programme. Il faudrait aussi que les revenus restreints des exportations de pétrole iraquien servent au maximum à acheter des fournitures humanitaires plutôt qu'à couvrir des dépenses administratives ou à d'autres fins. Réaffirmant que le maintien des sanctions contre l'Iraq ne contribuera pas à régler le problème, la délégation chinoise estime qu'il faudrait lever les sanctions. Comme il est difficile d'éviter les divergences opposant les membres du Conseil de sécurité concernant la politique à adopter à l'égard de l'Iraq, il ne faudrait pas que la population civile, et en particulier les femmes et les enfants, soient les victimes de ces divergences politiques, a souligné M. Wang.
M. ROBERT FOWLER (Canada), soulignant que la priorité doit être d'améliorer la situation humanitaire du peuple iraquien, a estimé que le débat sur la question de savoir qui est responsable de cette situation, n'a pas lieu d'être. Pour le représentant, les préoccupations légitimes relatives aux abus et à la contrebande dans le cadre du Programme "pétrole contre nourriture", doivent conduire à une réflexion sur la manière de mieux cibler les sanctions. Il est clair, a précisé le représentant, que tant que les autorités iraquiennes ne se conformeront pas aux résolutions du Conseil de sécurité, les sanctions économiques ne sauraient être levées. La résolution omnibus, a poursuivi le représentant, prévoit d'ailleurs des étapes intermédiaires de suspension si l'Iraq fait des progrès acceptables pour le Conseil. Il est donc de l'intérêt de l'Iraq d'accepter les termes de cette résolution, a affirmé le représentant. Insistant aussi sur la nécessité d'accroître les revenus pétroliers de l'Iraq et de lever les mises en attente pour les biens humanitaires essentiels, le représentant a souligné, à l'instar du rapport du Secrétaire général, que l'état actuel de son secteur pétrolier rend l'Iraq incapable de tenir le rythme requis de production. Le représentant a donc appuyé l'augmentation des crédits pour les pièces détachées. L'augmentation des revenus, a-t-il poursuivi, n'a aucun sens si les biens essentiels ne sont pas effectivement livrés au peuple iraquien. Il a donc partagé la conclusion selon laquelle les mises en attente constituent un obstacle à la mise en oeuvre du Programme humanitaire. Il a appelé à la mise en place de procédures simplifiées en Europe et en Iraq et à une réévaluation des mises en attente par rapport au risque réel de détournement.
En ce qui concerne la part de responsabilité de l'Iraq, le représentant a salué le refus du Secrétaire général d'exonérer le Gouvernement iraquien des nombreux problèmes qui ont entravé la mise en oeuvre du Programme "pétrole contre nourriture". Le rapport dit dans quels domaines la coopération de l'Iraq peut s'améliorer, a souligné le représentant en appelant les autorités iraquiennes à travailler dans ce sens. La résolution omnibus, a conclu le représentant, constitue une nouvelle phase qui peut atténuer les souffrances du peuple iraquien en même temps qu'elle offre une voie claire pour la suspension et la levée de sanctions. Il est temps que l'Iraq manifeste son attachement à cette résolution.
M. SAID BEN MUSTAPHA (Tunisie) a rappelé que le Conseil avait institué en 1995, par sa résolution 986, un programme humanitaire destiné à parer aux besoins fondamentaux du peuple de lIrak, pays auquel est imposé depuis une dizaine dannées un régime global de sanctions. Le rapport soumis aujourdhui par le Secrétaire général reconnaît quen dépit des améliorations enregistrées, les résultats du programme ne répondent pas encore aux attentes, notamment dans certains secteurs-clé de léconomie. Ce rapport livre un état des lieux préoccupant du secteur pétrolier, dont tout le monde connaît limportance fondamentale pour léconomie irakienne, ce secteur étant le seul pourvoyeur des recettes nécessaires à limportation des produits dont lIrak a besoin pour satisfaire ses besoins humanitaires. Le secteur pétrolier se trouve dans une situation de manque évident dinvestissements substantiels qui sont urgents pour le remettre en état et lui permettre datteindre les capacités de production quil faudrait pour parvenir à lobjectif des termes de la résolution 1284 du Conseil, qui prévoit la levée du plafond des exportations pétrolières de lIrak. Le Secrétaire général attribue les limites de production de linfrastructure pétrolière de lIrak au manque de pièces de rechange. Il réitère la demande quil avait déjà formulée dans le passé daccroître lenveloppe réservée à lachat de pièces de rechange en la portant à 600 millions de dollars pour chacune des phases VI et VII du programme. La Tunisie se réjouit de laccord qui a pu se faire au sein du Conseil en vue de ladoption dune résolution permettant une telle augmentation.
Le deuxième obstacle à la bonne exécution du programme Pétrole contre nourriture que décrit le rapport est celui des mises en attente des contrats dexportation de produits humanitaires. Le Secrétaire général note, à cet égard, que le nombre de contrats mis en attente est inacceptablement élevé au regard des impacts de ces mises en attente sur lexécution du programme humanitaire. Des secteurs entiers, comme ceux de lélectricité, de leau, de lagriculture, ou des transports, sont entravés à cause de l'absence de pièces détachées essentielles qui ne peuvent être importées. Le Conseil pourrait, tout en respectant lobjectif des sanctions, en rectifier les effets collatéraux. Il pourrait procéder à des évaluations régulières de limpact des sanctions sur le terrain; améliorer la mise en oeuvre du programme pétrole contre nourriture en faisant preuve de souplesse et de flexibilité dans lapplication des modalités dapprobation des contrats; accélérer la mise en oeuvre des dispositions de la résolution 1284 relatives au domaine humanitaire, et trouver une solution à la question de laccumulation des mises en atteintes. Lhumanitaire est un concept unique et global, et constitue une composante fondamentale de la paix et de la stabilité. Ce concept ne doit pas souffrir de sélectivité. Si nous parlons aujourdhui du peuple irakien, cela ne nous permet pas docculter dautres situations dans la région, comme celle des disparus koweïtiens. La solution de ce problème contribuerait sans doute à létablissement de la confiance entre les peuples de la région. La Tunisie estime que la situation humanitaire nest cependant quune partie de la question irakienne dans son ensemble; cest une partie qui doit être vue de manière prospective, afin de permettre à lIrak de reprendre sa place dans la région et au sein de la communauté internationale.
M. MOCTOR OUANE (Mali) a relevé que la rapport met en lumière la dégradation continue de linfrastructure de base iraquienne affectant ainsi les besoins humanitaires du peuple iraquien. Le Mali est vivement préoccupé par la situation décrite dans le rapport, même si, comme indiqué, le programme humanitaire, qui est actuellement dans sa septième phase, na été conçu pour satisfaire tous les besoins humanitaires du peuple iraquien.
Selon le représentant, le Gouvernement iraquien doit, parce quil a sa part de responsabiltié dans la situation en Iraq, notamment dans la condition humanitaire de son peuple, sengager à appliquer les recommandations figurant au paragraphe 207 du rapport du Secrétaire général ainsi que celles énoncées dans son rapport du 1er février 1998 qui nont pas encore été appliquées. De même, M. Ouane a estimé que les recommandations adressées au Comité des sanctions méritent dêtre mises en oeuvre assez rapidement. Sagissant des recommandations faites au Conseil de sécurité, le Mali considère quelles doivent être suivies deffet en vue de remédier aux insuffisances du programme humanitaire actuel.
M. VOLODYMYR YEL'CHENKO (Ukraine) a noté que le rapport du Secrétaire général fait à la fois état des progrès réalisés dans la mise en oeuvre du Programme "pétrole contre nourriture" et de l'impact négatif des sanctions sur la situation humanitaire en Iraq. Ce n'est pas un hasard que le premier chapitre du rapport du Secrétaire général aborde la question de la situation du secteur de l'industrie du pétrole, a noté le représentant. Cette industrie est l'épine dorsale de l'ensemble du programme humanitaire. Les conclusions du Groupe d'experts pétroliers créé par le Secrétaire général conformément au paragraphe 30 de la résolution 1284 (1999) sont véritablement alarmantes. La situation dans le secteur de l'industrie du pétrole est lamentable et continue de se détériorer. L'Iraq ne peut plus assurer un niveau élevé de production de pétrole sans reconstruire ses installations pétrolières.
La délégation de l'Ukraine estime que le Groupe d'experts a accompli des travaux importants en Iraq et leurs recommandations devraient être appliquées utilement par le Conseil de sécurité. C'est pourquoi, elle appuie pleinement la proposition du Secrétaire général visant à consacrer 600 millions de dollars à l'achat de pièces détachées et d'équipement, soit le double du montant approuvé par la résolution 1281 (1999). M. Yel'chenko a également estimé qu'il faudrait prier le Comité des sanctions d'accélérer les procédures d'approbation des contrats de pièces détachées et de créer un groupe d'experts conformément au paragraphe 18 de la résolution 1284 (1999). Ce Groupe d'experts contribuerait à accélérer les procédures d'approbation et la livraison des pièces détachées et des équipements en Iraq. Les mises en attente excessives des contrats continuent de faire gravement obstacle à la mise en oeuvre effective du programme. A cet égard, la délégation ukrainienne reconnaît que le Conseil de sécurité n'a pas réussi à mettre en oeuvre les recommandations contenues dans sa résolution 1153 (1998) pour examiner les annexes aux plans de distribution en vue de déterminer dès que possible ces produits qui pourraient faire l'objet de mises en attente. Il est regrettable que le régime des sanctions créé en tant que puissant instrument pour mettre fin à l'agression, serve à punir la population civile en Iraq, a conclu M. Yel'chenko.
M. CURTIS WARD (Jamaïque), estimant que le Conseil doit trouver un équilibre entre la nécessité de garantir lapplication de ses diverses résolutions et lobligation humanitaire de minimiser les conséquences négatives des sanctions sur les civils iraquiens, sest félicité de la création dun Groupe de travail du Conseil sur les sanctions qui examinera cette question et a déclaré son intention dy participer activement. Le Conseil doit satteler à trouver une solution à la situation humanitaire en Iraq et évaluer dans quelle mesure le régime actuel des sanctions est responsable de la situation présente. Cela fait trop longtemps quune telle évaluation est due, a-t-il ajouté.
Rappelant la résolution 1284, adoptée en vue daméliorer la situation humanitaire en Iraq, M. Ward a suggéré au Conseil demployer tous les moyens à sa disposition pour assurer la réalisation de cet objectif. Tout en appuyant les efforts du Bureau du Programme Iraq en vue dévaluer les procédures de passation des contrats, lapprobation des demandes présentées et la distribution de laide humanitaire, M. Ward a indiqué que laide humanitaire ne saurait remplacer la relance durable de léconomie iraquienne, indispensable pour ramener les indices de santé publique à leurs niveaux davant 1991. Compte tenu du mauvais état des infrastructures des industries pétrolière et électrique, il a appelé les pays concernés à mener rapidement les enquêtes nécessaires pour pouvoir procéder à lapprobation des demandes mises en attente, notamment celles qui portent sur les pièces détachées et le matériel à destination de ces industries.
A linstar du Secrétaire général, il sest déclaré préoccupé par létat du secteur de la santé publique. Rappelant quil est moins onéreux de prévenir les maladies que de les soigner, il a jugé indispensable de garantir laccès de la population à leau potable, la fourniture des services sanitaires et la réalisation de programmes de vaccination. En dernier lieu, il sest alarmé de la situation des enfants iraquiens, victimes dun système quils nont pas choisi, et des taux élevés de mortalité infantile et maternelle et a demandé aux membres du Conseil de prendre toute la mesure de la situation qui leur est présentée afin dy répondre de manière constructive.
M. JEREMY GREENSTOCK (Royaume-Uni) a réaffirmé que la mise en oeuvre de la résolution 1284 (1999) du Conseil de sécurité est la clé et il existe un consensus sur la question au sein du Conseil. La section "humanitaire" de cette résolution est en cours d'application, mais plus vite nous évoluons vers sa pleine mise en oeuvre, plus vite nous serons en mesure de réaliser l'objectif de la suspension des sanctions et la sécurité, y compris le contrôle du désarmement des armes de destruction massive, sera assurée. M. Hans Blix a été nommé, avec l'appui de nous tous, pour créer et diriger la Commission des Nations Unies pour le contrôle et la vérification (UNMOVIC), a rappelé M. Greenstock. La délégation espère que l'Iraq consentira à accepter l'UNMOVIC afin que la Commission puisse s'acquitter du désarmement en Iraq et poursuivre de manière efficace le contrôle, rétablissant ainsi la sécurité dans la région. C'est pourquoi, le Royaume-Uni encourage l'Iraq à coopérer. Si l'Iraq fait ce choix, le Royaume-Uni s'engage à réaliser la suspension des sanctions et, lorsque l'Iraq s'acquittera de ses obligations, les sanctions seront levées. Une fois que l'Iraq prendra cette décision, la suspension aura lieu en quelques mois, s'est déclaré convaincu M. Greenstock. Même si l'Iraq ne saisit pas cette opportunité, la résolution 1284 offre en même temps la possibilité de générer un montant important de revenus au peuple iraquien. Ce n'est pas uniquement la position du Royaume-Uni, c'est également celle exprimée par le Secrétaire général et qui a été soutenue par ceux qui ont pris la parole aujourd'hui. Le plafond des ventes de pétrole iraquien a déjà été levé, permettant à l'Iraq d'exporter pour un montant de 1,7 milliard de dollars cette année, ce qui représente une augmentation très sensible par rapport aux années précédentes, et le niveau le plus élevé depuis 1980. Le Comité des sanctions envisage d'autres mesures positives.
Nous devons mettre en oeuvre ces mesures de manière rapide, constructive et effective, a souligné M. Greenstock, ajoutant que le Royaume-Uni est prêt à approuver la recommandation du Secrétaire général pour doubler le montant des achats de pièces détachées, à savoir 600 millions de dollars. Conscient que de nombreux membres sont préoccupés par le nombre de contrats mis en attente pour l'Iraq, le représentant a estimé qu'il est temps de se pencher sur ce problème. Le Conseil doit mettre en oeuvre toutes ses résolutions. L'Iraq ne doit pas importer des produits qui serviront à rétablir son arsenal militaire ou sa capacité de construire des armes de destruction massive. Il incombe à tous de veiller au respect de cette obligation. Le Royaume-Uni procèdera rapidement et de manière objective à l'examen des contrats, mais il ne faut pas se détourner de notre obligation d'empêcher l'Iraq de se réarmer, a souligné M. Greenstock. Sa délégation encourage les travaux accomplis par les Nations Unies avec l'Iraq et ses fournisseurs pour améliorer la soumission des contrats. L'absence d'informations sur la destination finale des produits acquis dans le cadre du programme "pétrole contre nourriture" constitue une des causes des mises en attente des contrats. Cela pourrait être amélioré par un contrôle et une surveillance plus efficaces en Iraq, a suggéré M. Greenstock. Chaque résolution concernant le programme humanitaire - notamment les résolutions 986, 1153 et 1284 - appelle les Nations Unies à s'assurer que les marchandises sont utilisées à des fins autorisées en Iraq. Rappelant que l'examen des procédures d'approbation des contrats a servi à réduire les délais, M. Greenstock a fait sienne la proposition du Secrétaire général de mettre en place un mécanisme qui sera chargé d'examiner les mises en attente. Pour sa part, le Royaume-Uni a approuvé 98,8% de tous les contrats soumis au Comité des sanctions en vertu du programme "pétrole contre nourriture".
Que peut-on faire pour maximaliser les revenus pour le programme humanitaire, s'est interrogé M. Greenstock, rappelant qu'hier, le Comité des sanctions a entendu une présentation par le Groupe d'experts multinational d'interception sur les opérations dans le Golfe et l'exécution des résolutions du Conseil de sécurité selon laquelle depuis la mi-1999, des contrebandiers ont réussi à exporter illégalement plus de 400 000 tonnes de pétrole iraquien, utilisant les eaux territoriales iraniennes pour le fournir à des clients dans les Emirats arabes unis. A cet égard, M. Greenstock a préconisé de suivre l'exemple donné par le Comité des sanctions concernant l'Angola, présidé par M. Robert Fowler. Depuis la guerre du Golfe, l'Iraq a constamment sapé les efforts concernant la disparition des 600 disparus koweïtiens. L'Iraq a refusé depuis 1999 de participer aux réunions de la Commission tripartite, organe chargé de régler ces affaires. L'Iraq a également nié sa responsabilité pour le vol de biens considérables appartenant à des Koweïtiens. Le Royaume-Uni se félicite de la nomination de l'Ambassadeur Yuliy Vorontsov au poste de Coordonnateur pour le Programme humanitaire en Iraq. Il attend son rapport et déploiera tous les efforts nécessaires pour l'assister dans ses travaux.
Mme SELMA ASHIPALA-MUSAVYI (Namibie) a souligné que si le Programme "pétrole contre nourriture" n'a jamais eu pour objectif de répondre à tous les besoins humanitaires de la population iraquienne, il n'a pas non plus été conçu pour accroître les souffrances du peuple iraquien. Il est clair, a dit la représentante, que l'efficacité du Programme peut être améliorée si une volonté politique existe et s'il est vrai que le Gouvernement de l'Iraq a sa propre responsabilité, il faut constater aussi le manque de volonté apparent du Conseil d'atténuer les souffrances du peuple iraquien. Cela fait longtemps, a rappelé la représentante, que le Secrétaire général demande l'augmentation des fonds alloués à l'achat de pièces détachées, dans le cadre du Programme "pétrole contre nourriture". Il faut souligner aussi, a-t-elle dit, que le Conseil n'a pas attendu le rapport des experts pétroliers pour connaître l'état du secteur pétrolier iraquien. Comment s'étonner alors que le Gouvernement iraquien a choisi de ne pas atteindre le niveau de production de pétrole permis par le Conseil, a demandé la représentante en soulignant qu'aujourd'hui encore tout porte à croire que le Conseil n'autorisera pas l'augmentation des fonds alloués à l'achat de pièces détachées. Seul le redressement de l'économie iraquienne permettra de répondre réellement aux besoins humanitaires du peuple iraquien, a- t-elle dit en ajoutant que l'état actuel de cette économie et des infrastructures ne saurait pas non plus profiter aux Etats voisins.
La représentante a poursuivi en rappelant le rapport de l'UNICEF selon lequel les enfants ont été touchés, de manière disproportionnée, par le régime des sanctions. Cette situation, a-t-elle prévenu, risque à long terme de provoquer un véritable éclatement du tissu social et économique du pays. Abordant également la question des mises en attente et des retards dans la livraison des produits, la représentante a souligné leur impact négatif sur les secteurs essentiels aux enfants comme l'eau, l'assainissement ou encore l'électricité. Faut-il considérer qu'il n'existe plus d'enfants en Iraq et que tous les Iraquiens doivent être pris comme des adultes, a insisté la représentante en rejetant tout recours à des considérations politiques pour aborder les problèmes humanitaires. Le moment est venu, a-t-elle estimé, d'organiser une évaluation complète de l'impact des sanctions.
M. HASMY AGAM (Malaisie) a approuvé les recommandations du Secrétaire général en ce qui concerne le financement des pièces de rechange et le matériel destiné au secteur pétrolier afin de réparer les dommages permanents subis par les infrastructures pétrolières en Iraq. Le représentant a fait remarquer que si les revenus provenant de lindustrie pétrolière sont essentiels au succès du Programme "pétrole contre nourriture", ceux-ci ne devraient pas être considérés comme une source inépuisable de financement. Il a suggéré que les nouveaux montants alloués soient utilisés pour garantir la sécurité du personnel qui travaille dans de dangereuses conditions de même que pour acquérir léquipement nécessaire à la protection de lenvironnement. A cet égard, la Malaisie a mis en garde contre la potentielle crise environnementale qui risque de se produire sur la plateforme de Mina-al-Bark.
Depuis maintenant près de dix ans, les sanctions les plus générales et punitives quun peuple n'ait jamais eu à subir détruisent lIraq, décime sa population, ruine son agriculture, son système éducatif ainsi que son système de santé et ses infrastructures. Leurs effets dévastateurs démontrent léchec de sanctions totales qui violent des droits de lhomme fondamentaux - le droit de vivre dans la dignité et le droit de vivre tout court. Personne ne peut contester l'énorme ampleur de la crise humanitaire générée par les sanctions, a affirmé le représentant, mais on laisse les dommages se poursuivre. Cest au nom de la communauté internationale que les sanctions économiques des Nations Unies sont en train de paralyser toute une société, le comble étant que le programme de privation imposé au peuple iraquien et les mécanismes instaurés dans ce but sont financés par son pétrole, a-t-il souligné. La Malaisie comprend les préoccupations dordre sécuritaire du début de linvasion du Koweït par lIraq et demande à ce dernier de remplir tous ses engagements internationaux et de continuer à participer à la Commission tripartite et au Sous-Comité technique. Indiquant que les sanctions imposées depuis 1991 ont surtout infligé des souffrances aux populations civiles, en particulier aux malades et aux enfants, M. Agam a demandé combien de temps encore devrait durer cette punition collective. Il a estimé que les pertes en vies humaines et les souffrances des populations sont excessives par rapport aux bénéfices directs et concrèts provenant des efforts de désarmement de lIraq. Ainsi, il est temps que la communauté internationale envisage une nouvelle politique qui prenne en compte les préoccupations légitimes en matière de sécurité mais ninflige pas de souffrances systématiques au peuple iraquien. La plupart des infrastructures de lIraq ont été détruites au cours de la guerre et par des bombardements qui se poursuivent encore aujourdhui. Le représentant a signalé que lIraq nétait pas en mesure de réparer ces dommages puisque le déboursement de largent du Programme "pétrole contre nourriture" est contrôlé par le Conseil de sécurité.
En 1990, lorsque fut adoptée la résolution 661, aucune étude navait été faite pour informer le Conseil de sécurité sur les conséquences humanitaires possibles des sanctions. Aujourdhui, le système éducatif de lIraq est en ruine, son système de santé ne peut assurer la prévention des maladies et une nouvelle génération dIraquiens grandit pleine de ressentiment envers les sanctions, amère et en colère, a expliqué le représentant. Il a, par ailleurs, signalé que des rapports troublants ont été faits sur les effets de luranium provenant des cartouches utilisées contre lIraq pendant la guerre du Golfe. Selon lui, ce problème doit être examiné tout comme une aide doit être fournie à ce pays pour vaincre le problème des déchets toxiques.
Les résolutions initiales des Nations Unies imposaient des sanctions pour amener lIraq à éliminer son programme darmes de destruction massive. Toutefois, des déclarations provenant de certains gouvernements ont suggéré que ces sanctions ne seraient pas levées tant que certains objectifs politiques nauraient pas été atteints, a noté M. Agam. Cette attitude transforme clairement lobjectif premier des sanctions contre lIraq sur lequel sest à lorigine bâti le consensus international. Sil maintient les sanctions économiques contre lIraq en connaissant leurs conséquences déplorables, le Conseil de sécurité continuera à saper la Charte des Nations Unies. Dans ce contexte, la Malaisie demande instamment au Conseil de sécurité dordonner une évaluation immédiate et totale de limpact de ces sanctions sur lIraq. Malgré leur utilité et leur pertinence, les rapports périodiques des Nations Unies ne font pas état de toute la situation, a estimé le représentant.
M. LUIS ENRIQUE CAPPAGLI (Argentine) a rappelé que c'est en raison de l'impact des sanctions sur la population civile que les Nations Unies ont adopté le Programme "pétrole contre nourriture" pour alléger les souffrances de la population. Les ressources provenant de la vente de pétrole autorisée par le Conseil de sécurité se sont avérées insuffisantes. En outre, le différend entre l'Iraq et les Nations Unies concernant le rôle de l'UNSCOM n'a pas contribué à améliorer la situation humanitaire en Iraq. La délégation argentine se dit profondément préoccupée par le nombre considérable de contrats mis en attente qui ralentissent la livraison de pièces détachées et d'équipement indispensable au bon
fonctionnement du programme humanitaire. M. Cappagli a appuyé la proposition visant à doubler le montant des achats de pièces détachées et d'équipement pour permettre à l'industrie du pétrole iraquienne de fonctionner. Il a émis l'espoir que dans un avenir proche, le peuple iraquien pourra non seulement faire face à ses besoins essentiels mais aussi vivre dans un climat politique meilleur.
Reprenant la parole, M. VAN WALSUM (Pays-Bas), est revenu sur la question du rapatriement de tous les ressortissants koweïtiens pour se féliciter de la nomination d'un Haut Coordonnateur. Il a souligné que le Conseil se doit de rappeler au Gouvernement iraquien ses obligations en matière de rapatriement des ressortissants koweïtiens et autres conformément au paragraphe 13 de la résolution 1284.
M. ANWARUL KARIM CHOWDHURY (Bangladesh) a noté que le rapport du Secrétaire général décrit de manière détaillée la situation catastrophique de l'industrie du pétrole en Iraq. Le Groupe d'experts mandaté par les Nations Unies a indiqué que la situation généralement lamentable de l'industrie du pétrole iraquienne ne s'est pas améliorée et que le déclin dans certains cas continue de causer une profonde dégradation de l'environnement. Les experts ont noté qu'à moins que les pièces détachées et l'équipement essentiels soient disponibles et livrés dans de brefs délais, la production de pétrole iraquien sera considérablement réduite, affectant ainsi gravement le Programme "pétrole contre nourriture" lui-même. La délégation du Bangladesh appuie donc fermement la recommandation du Secrétaire général visant à doubler le montant des achats des pièces détachées et de l'équipement, et se réjouit d'appuyer le projet de résolution prévu à cet effet. Elle estime toutefois que l'augmentation de ce montant est vaine si les contrats de pièces détachées nécessaires à l'industrie du pétrole sont mis en attente. Selon le rapport du Secrétaire général, au 1er janvier 2000, le montant total des contrats mis en attente s'élève à 291 millions de dollars. C'est pourquoi, M. Chowdhury a appelé le Conseil de sécurité à parvenir à un consensus sur la sélection des experts devant assister le Groupe d'experts pétroliers à accélérer l'examen des contrats d'achats de l'Iraq.
Le rapport du Secrétaire général rappelle de manière poigante le fait qu'il existe une grave détérioration de la situation humanitaire en Iraq et cette situation exige une attention urgente. La délégation du Bangladesh se tient entièrement prête à apporter son plein soutien aux mesures visant à atténuer les souffrances de la population iraquienne et à améliorer la situation humanitaire. En raison des mises en attente excessives, les hôpitaux sont gravement handicapés par l'absence d'équipements et comme l'indique le rapport de l'UNICEF, le taux de mortalité infantile a considérablement augmenté. Il incombe donc au Conseil de sécurité de faire face à ce problème des conséquences dévastatrices du régime des sanctions sur la population iraquienne et de faire tout son possible par le biais de mesures concrètes et efficaces, pour atténuer les souffrances et améliorer la situation humanitaire en Iraq. A cet égard, nous devons oeuvrer ensemble et de manière constructive, a souligné M. Chowdhury qui rappelle que l'importante décision prise le mois dernier par le Conseil concernant le pèlerinage à la Mecque illustre bien comment le Conseil peut agir rapidement et de manière créative, en tenant compte des intérêts de la population iraquienne.
Le représentant a attiré l'attention sur le sort des prisonniers de guerre en Iraq. La question exige un règlement urgent pour atténuer les souffrances ignorées du nombre important de familles affectées non seulement au Koweït mais également dans d'autres pays, y compris le Bangladesh. La délégation du Bangladesh se félicite de la nomination de M. Yuliy Vorontsov au poste de Coordonnateur du programme humanitaire en Iraq.
Mme CAROL BELLAMY, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a souligné le caractère critique des modalités de collecte des liquidités pour les achats ainsi que pour l'efficacité et la durabilité des programmes sociaux. Le programme de nutrition qui sera bientôt lancé pourrait être l'occasion de mettre en oeuvre des modalités-pilote, a estimé la Directrice.
En ce qui concerne l'impact de sanctions sur les populations, Mme Bellamy a souhaité qu'à l'avenir les régimes de sanctions ne puissent être imposés sans une exemption humanitaire immédiate. Dans le cas de l'Iraq, elle est d'avis que les sanctions ne sont qu'un facteur de la situation humanitaire de la population iraquienne en citant parmi les autres causes les deux guerres qu'a connues le pays et l'échec des autorités iraquiennes à investir dans les services sociaux. Il serait trop simpliste d'imputer la situation actuelle aux seules sanctions, a déclaré la Directrice exécutive, en appelant à une meilleure coopération du Gouvernement de l'Iraq dans la mise en oeuvre des futurs programmes sociaux.
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