FEM/1076

DES STRATEGIES EFFICACES DE PROMOTION DE LA FEMME PASSENT PAR LA RECONNAISSANCE DE LEUR CONTRIBUTION A LA PRODUCTION ECONOMIQUE

28 février 2000


Communiqué de Presse
FEM/1076


DES STRATEGIES EFFICACES DE PROMOTION DE LA FEMME PASSENT PAR LA RECONNAISSANCE DE LEUR CONTRIBUTION A LA PRODUCTION ECONOMIQUE

20000228

Les progrès réalisés depuis la quatrième Conférence sur les femmes à Beijing en 1995 ne peuvent faire oublier les faits suivants : des millions de femmes vivent dans la pauvreté, 600 000 femmes meurent chaque année des suites d’un accouchement, 600 millions d’entre elles ne savent ni lire ni écrire et deux tiers des 100 millions d’enfants qui quittent chaque année l’école sont des filles. Ces propos ont été tenus par la Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Mme Carol Bellamy, devant la Commission de la condition de la femme qui a poursuivi, cet après-midi, son débat général sur l’évaluation de l’application du Programme d’action de Beijing. Mme Bellamy a également évoqué l’impact d’autres facteurs comme les conflits et des pandémies comme le sida, sur la situation des femmes. Pour remédier à cette situation, les délégations ont cité les instruments des droits de l’homme comme cadre de promotion des droits de la femme, dont en premier lieu le droit à l’éducation et l’accès égal aux ressources productives.

Ainsi, la représentante de la Banque mondiale a expliqué qu’en Afrique subsaharienne, l’expérience a montré qu’en donnant aux femmes un accès égal à la terre et aux moyens de la cultiver, la production augmentait d’un cinquième. La promotion de l’égalité augmente l’efficacité de l’aide au développement, a encore dit la représentante, en expliquant que lorsque les projets d’assistance sont élaborés en tenant compte des besoins des femmes et des hommes, ils sont généralement plus efficaces. La représentante de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a d’ailleurs souligné que les femmes continuent d’être des “partenaires invisibles du développement” alors même qu’elles sont les principaux fournisseurs de biens alimentaires dans la plupart des pays agricoles. Les délégations ont donc demandé l’élaboration, dans les plus brefs délais, d’indicateurs sociaux ventilés par sexe pour mesurer la part des femmes dans les structures économiques et parfaire, en conséquence, les stratégies d’amélioration de la condition de la femme.

Les représentants des pays suivants ont pris part au débat : Colombie (au nom du Groupe de Rio), Italie, Chine, République de Corée, Paraguay, Côte d’Ivoire, Indonésie, Turquie, Fédération de Russie et Equateur.

L’Observateur de la Palestine, la Directrice exécutive de l’UNICEF et les représentants de la Banque mondiale, de la Commission économique pour l’Europe, au nom des cinq Commissions économiques régionales des Nations Unies, et de la FAO ont également pris la parole, ainsi que les représentants de l’Ordre souverain de Malte, du Caucus de la Fédération internationale des femmes universitaires/Caucus des filles et du Caucus des ONG sur les mécanismes institutionnels pour la promotion de la femme.

La Commission a complété son Bureau en élisant Mme Misako Kaji (Japon) à la Vice-Présidence.

La Commission poursuivra son débat général demain mardi 29 février à 10 heures.

Débat général

M. ALFONSO VALDIVIESO (Colombie), prenant la parole au nom des Etats membres du Groupe de Rio, a estimé que l'adoption du Protocole facultatif se rapportant à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes à l'automne dernier constituait une avancée importante qui bénéficierait à toutes les femmes du monde. Dans la perspective de la session extraordinaire, les pays de la région ont organisé récemment à Lima la VIII Conférence régionale sur les femmes en Amérique latine et dans les Caraïbes. Les changements les plus importants au cours des dix dernières années en Amérique latine sont la conséquence de l'entrée massive et rapide des femmes sur le marché du travail, de l'accès universel aux différents niveaux d'éducation, de l'augmentation continue de la participation des femmes dans les processus de décision et de l'élargissement de la couverture des besoins des femmes en matière de santé génésique et maternelle. Des progrès ont également été réalisés au niveau législatif; des plans nationaux fondés sur l'égalité ont été élaborés, une législation instituant des quotas a été adoptée et des mécanismes gouvernementaux ont été créés en faveur des femmes et de la reconnaissance de leurs droits. Il faut également souligner l'indépendance économique croissante des femmes et la reconnaissance plus large de la nécessité de renforcer les droits de l'homme dans tous les domaines.

Il subsiste toutefois des lacunes dans d'autres domaines, comme les progrès inégaux en matière de progression économique, l'augmentation des inégalités dans le système d'éducation, la détérioration globale des services de santé. Les gouvernements, en partenariat avec la société civile, ont mis au point plusieurs stratégies visant à intégrer une perspective sexospécifique dans toutes les politiques publiques. Les résultats de ces efforts commencent seulement à se faire sentir. Des bureaux nationaux pour la promotion de la femme existent maintenant dans tous les pays du Groupe de Rio. Tous les Etats membres du Groupe de Rio ont adopté des plans nationaux pour la promotion de la femme, dont la majorité ont été élaborés en collaboration avec la société civile.

Au cours des dernières années, il y a eu aussi un renforcement significatif de la justice du point de vue de l'égalité entre les sexes. Le changement le plus important est la reconnaissance et l'exercice des droits des femmes. La mobilisation et la promotion sociales dans les systèmes législatifs ont contribué à faire évoluer positivement les schémas culturels, à former de nouveaux dirigeants et à stimuler le débat démocratique dans les pays du Groupe de Rio. Les réformes constitutionnelles et juridiques adoptées par ces pays se fondent sur les dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, ainsi que sur la Convention interaméricaine sur la prévention, la punition et l'élimination de la violence à l'égard des femmes. Les pays du Groupe de Rio réaffirment leur engagement solennel à promouvoir la pleine participation des femmes dans tous les domaines de la vie publique sur un pied d'égalité avec les hommes, comme stipulé dans la Déclaration de Veracruz.

Mme BARBARA TERENZI CALAMAI (Italie), indiquant qu’elle fait partie de l’ONG “Associazione Italiana Donne per lo Sviluppo” a expliqué que les ONG féminines qui ont participé à la Conférence de Beijing ont été extrêmement actives pour faire vivre les recommandations de Beijing en Italie. Au cours des années qui ont suivi, les ONG ont apporté une contribution déterminante aux travaux préparatoires de la Commission sur la condition de la femme et à ceux de la session extraordinaire « Beijing+5 » ainsi qu’aux négociations liées au Protocole facultatif se rapportant à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et au statut de la Cour pénale internationale. Au niveau européen, le lobby européen des femmes a déployé tous les efforts pour inclure des articles relatifs à l’égalité entre les sexes dans le Traité d’Amsterdam. La contribution la plus importante a peut-être été, au niveau local, la généralisation de l’approche d’égalité entre les sexes parmi les femmes mais aussi parmi les jeunes hommes et les jeunes femmes qui critiquent souvent le féminisme. La coopération Nord-Sud a elle renforcé les partenariats entre les femmes dans les matières qui les intéressent.

Au niveau gouvernemental, les ONG ont contribué en Italie à la création en 1996 d’un Ministère sur l’égalité des chances. Au moins de mars de cette année, le Ministre doit soumettre au Gouvernement l’évaluation du plan d’action national pour la mise en œuvre des recommandations de Beijing ainsi qu’un autre Plan d’action relatif aux questions du travail et de l’emploi. Le Gouvernement devrait parachever ces documents avant 2001. Les relations entre le Gouvernement italien et les ONG ont été extrêmement fructueuses, a conclu la représentante en jugeant important de développer les mêmes partenariats aux niveaux régional et international.

M. SHEN GUOFANG (Chine) s'est félicité des efforts déployés depuis la Conférence de Beijing pour traduire les engagements pris à cette occasion en actions. L'évaluation entreprise par la Commission aidera à mieux comprendre la situation en ce qui concerne la promotion des femmes et les domaines où des efforts supplémentaires sont nécessaires. Depuis la Conférence de Beijing, le Gouvernement chinois a pris des mesures visant à favoriser la promotion de la femme et des efforts inlassables ont été déployés pour mettre en œuvre les engagements du Programme d'action. A cet effet, a été lancé le Programme pour le développement des femmes chinoises. La surveillance et l'évaluation de la mise en œuvre des plans d'action à tous les niveaux ont été renforcés.

En 1999, les principaux objectifs fixés ont été quasi atteints. On a ainsi notamment constaté, au cours des quatre dernières années, une augmentation du nombre de femmes participant aux processus de décision, une diminution du nombre de celles vivant dans la pauvreté, de celles qui étaient analphabètes, l’apparition d’une véritable lutte contre la violence à l'égard des femmes. Il existe toutefois encore des obstacles, liés aux situations différentes que connaissent les régions, à l'insuffisance des ressources et à la persistance de stéréotypes traditionnels. Des questions comme notamment, les taux de mortalité, la protection des travailleuses dans le secteur privé, la lutte contre le trafic des femmes et l'élimination de la violence familiale doivent être traitées d'urgence. Le Gouvernement chinois a déjà réalisé des études et dégagé des fonds spéciaux, se fixant pour priorité d'agir dans les zones rurales. La Chine poursuivra ses efforts en vue de la promotion de la femme et espère que les gouvernements, les institutions de l'ONU et toutes les organisations et institutions qui œuvrent pour la promotion de la cause des femmes intensifieront leurs échanges et veilleront à promouvoir une coopération pratique et efficace entre les pays, les régions et au sein de la communauté internationale en vue de réaliser les objectifs du Programme d'action de Beijing.

Mme KANG GUI-WON (République de Corée)a fait part des efforts de son pays pour donner corps aux recommandations de Beijing. ELle a ainsi attiré l’attention sur la Loi sur la prévention de la discrimination datant de 1999, sur la Loi révisée sur les partis politiques; et sur la prochaine création d’un ministère des affaires féminines. En outre, des plans à moyen et à long terme sont en train d’être mis au point pour renforcer la compétitivité des femmes dans la société du 21ème siècle caractérisée par le savoir et les connaissances. Se fondant sur son expérience nationale, la République de Corée a intensifié ses efforts pour accroître la participation des femmes dans la coopération régionale. La République de Corée a ainsi contribué à l’élaboration d’un Cadre général pour l’intégration des femmes dans la région de la Coopération économique de la zone Asie-Pacifique (APEC). Le pays est convaincu de l’importance qu’il y a à partager les meilleures pratiques sur l’intégration des femmes dans les organisations régionales et entre ces dernières et les organisations internationales. Concluant sur les travaux préparatoires de la session extraordinaire de l’Assemblée sur « Beijing+5 », la représentante a mis l’accent sur le fait que le succès de cette réunion dépendra de la participation effective des ONG.

Mme SOMAIA BARGHOUTI, Observatrice de la Palestine, a déclaré que les femmes palestiniennes partagent les mêmes problèmes que les autres femmes, faisant face elles aussi à l'inégalité, à la discrimination, à la violence, à la pauvreté, tout en étant confrontées à la dure réalité de la poursuite de l'occupation israélienne qui constitue l'obstacle principal à leur promotion. Mme Barghouti a souligné l'impact négatif des politiques et pratiques israéliennes sur la condition des femmes palestiniennes. Cette situation se manifeste sous diverses formes malgré le processus de paix en cours. La poursuite de l’implantation des colonies de peuplement israéliennes et leur expansion, ainsi que la construction de routes de détournement ont un effet négatif sur la situation socioéconomique et constituent une source majeure de préoccupation. En outre, les politiques de bouclage affectent négativement la vie économique et sociale des Palestiniens. Malgré une légère amélioration des conditions économiques, le potentiel existant dont le développement permettrait des changements véritables a été sérieusement affecté et sapé par la poursuite des politiques israéliennes. Il est significatif que les Palestiniens ne peuvent toujours pas contrôler directement leurs ressources naturelles, ce qui constitue un obstacle majeur aux améliorations réelles de leur situation économique.

Bien que le nombre de femmes emprisonnées dans les geôles israéliennes soit faible, le fait que 2.200 Palestiniens soient toujours détenus par Israël ne peut qu'affecter négativement la vie des femmes palestiniennes et de leur famille. En outre, la séparation des familles et l'absence d'une solution pour les réfugiés palestiniens constituent des problèmes sérieux qui continuent de freiner les progrès des Palestiniennes. Il est regrettable que cela ne soit pas mentionné dans le rapport du Secrétaire général sur la question, a souligné l'Observateur de la Palestine. Au vu de cette situation, les femmes palestiniennes continuent d'avoir besoin d'une attention particulière. C'est pourquoi, la délégation de la Palestine présentera un projet de résolution sur la situation des femmes palestiniennes à la Commission. L'ONU et, en particulier, la Commission de la condition de la femme, ont la responsabilité de continuer de surveiller la situation des femmes palestiniennes et de leur fournir une assistance jusqu'à la réalisation de l'indépendance qui permettra enfin à ces femmes de joindre leurs sœurs du monde entier dans leurs efforts quotidiens pour la promotion des femmes.

Mme CRISTINA MUNOZ, Ministre au Secrétariat de la femme du Paraguay, a rappelé qu’en 1992, une nouvelle constitution a été élaborée dans son pays qui consacre l’égalité entre les hommes et les femmes. Dans le cadre d’un vaste programme de réformes, il a fallu alors modifier le Code du travail, le Code électoral et le Code de procédure pénale. En ce moment, le Congrès examine une législation concernant l’enfant et l’adolescent et une autre sur la violence au foyer. De plus, un Secrétariat de la femme a été créé qui travaille en collaboration avec le secteur public et privé. Pour ce qui est des mécanismes pour la mise en œuvre des recommandations de Beijing, le pays dispose d’une commission tripartite comprenant les ONG, le Gouvernement et à laquelle participent les institutions des Nations Unies. Un Plan d’action pour l’égalité des chances a été lancé avec un accent particulier sur les domaines critiques identifiés à Beijing. Depuis 1998, le pays a institutionnalisé ce Plan national. Il est en train de mettre en place un espace concernant les femmes en prenant en compte les 17 administrations existantes dans le pays dont un certain nombre a créé des secrétariats pour la femme. Il faut ajouter à cela, l’action des réseaux créés par la société civile. Un programme de santé génésique, lancé en 1994, est dirigé par le Ministre de la santé publique et celui des affaires sociales.

Mme CONSTANCE YAI, Ministre de la solidarité et de la promotion de la femme de la Côte d'Ivoire, a expliqué que la politique de promotion de la femme de son pays se fonde notamment sur la protection juridique des femmes. L'adoption en 1998 de lois portant répression de la violence à l'égard des femmes et l'élaboration du Code de la famille renforcent cette protection. Des campagnes de sensibilisation sur les pratiques traditionnelles néfastes, des conférences sur la violence à l'égard des femmes organisées par les ONG, soutiennent les mesures législatives et celles initiées par le Gouvernement. Un autre axe de la politique de la Côte d'Ivoire est la promotion économique des femmes. Cela touche l'encadrement et l'accès au microcrédit. Des groupements villageois de femmes ont été créés en vue d’encadrer ces dernières dans les activités de production agricole et de commercialisation des produits vivriers. Les femmes rurales jouent un rôle essentiel dans l'économie nationale en particulier dans la production agricole. Malgré leur importante contribution, leurs revenus ne représentent en moyenne que 22% de celui des hommes. C'est pourquoi, un fonds "Femmes et développement" a été mis en place en 1994 qui a permis de financer de nombreux projets en faveur des femmes. En matière de formation, l'alphabétisation des femmes, la formation de 1000 animatrices rurales, la formation aux techniques des foyers améliorés ont permis d'accroître les chances de ces femmes d'accéder à un emploi. Des campagnes de sensibilisation, des mesures incitatives et l'encadrement des filles sont organisés pour favoriser leur accès à l'éducation dans les régions caractérisées par la faible scolarisation.

Des progrès ont été enregistrés dans le domaine de la santé. Des campagnes de sensibilisation sur la santé en matière de procréation se déroulent en milieu scolaire sur toute l’étendue du territoire à travers une caravane familiale. Malgré ces efforts importants, beaucoup reste encore à faire. La promotion effective des femmes se heurte en effet à des obstacles majeurs constitués par l'environnement économique, la faiblesse du cadre institutionnel de conception et de mise en œuvre des décisions, les insuffisances de coordination des activités de recherche et d'utilisation des résultats de recherche et le contexte socioculturel. Pour contrer ces difficultés, le Gouvernement a élaboré un Plan national d'action de la femme qui s'intègre dans les objectifs et stratégies de développement de la Côte d'Ivoire pour la période 2000-2005. Dans ce cadre, un livre blanc, fruit d'une consultation nationale, a été élaboré. Il reflète les préoccupations et les aspirations des femmes ivoiriennes dans divers domaines. Les nouveaux dirigeants se sont, en outre, engagés à abroger les lois discriminatoires qui existaient jusqu'à là, a encore indiqué la Ministre.

Mme KHOFIDAH INDAR PARAWANSA, Ministre d’Etats pour la promotion de la femme de l’Indonésie, a d’abord fait part des efforts de son Gouvernement pour lutter contre la violence à l’égard des femmes, efforts qui se sont matérialisés par la création d’une Commission sur l’élimination de la violence contre les femmes; l’adoption d’un plan d’action en la matière, la préparation d’une réforme du cadre juridique de la protection des victimes et des témoins ainsi que la poursuite des coupables; et la mise en œuvre d’une stratégie sexospécifique. Ce matin, a poursuivi la représentante, l’Indonésie a signé le Protocole facultatif de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Cet acte sera suivi de la mise en place d’une équipe de travail composée par des membres du Gouvernement, du Parlement, de la Commission nationale des droits de l’homme, de la Commission nationale sur la violence contre les femmes, du Comité pour la protection des droits de l’homme, des médias et des ONG. L’Indonésie, a poursuivi la représentante, est toujours confrontée à divers problèmes en ce qui concerne la promotion de la femme. La crise asiatique ayant surtout touché les femmes, un nombre accru d’entre elles a été forcé de se tourner vers le secteur informel où il est difficile de faire respecter les normes de travail. Beaucoup de femmes sont devenues domestiques ou ont accepté des emplois mal rémunérés à l’étranger pour subvenir aux besoins de leur famille. La pauvreté a aussi entraîné une augmentation du trafic des femmes et d’enfants. De plus, les nombreuses valeurs traditionnelles et culturelles continuent d’assujettir les femmes au foyer, sur les lieux de travail et dans la société en général. Compte tenu du fait que 52% des 200 millions d’Indonésiens sont des femmes, il faut espérer que le travail de promotion et de renforcement des droits des femmes effectué, au niveau international, contribuera, de manière déterminante, aux efforts nationaux pour faire naître une culture de droits de l’homme en Indonésie. Pour l’Indonésie, il convient donc de réaffirmer l’engagement à créer une société plus juste et plus prospère par un véritable partenariat entre les nations, entre les Gouvernements et les ONG et entre les femmes et les hommes.

Mme ESSER SENAY (Turquie) a déclaré que son pays attachait une grande importance à la réalisation des engagements qu'il a pris à Beijing et qui étaient le retrait de ses réserves à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, l'éradication de l'analphabétisme parmi les femmes et la réduction de la mortalité maternelle et infantile de moitié d'ici à l'an 2000, tout en veillant à réaliser des progrès dans tous les domaines critiques. Au cours des cinq dernières années, le mécanisme national pour la promotion de la femme s'est efforcé de rechercher l'objectif de l'égalité, de la paix et du développement en étroite collaboration avec les autres organes gouvernementaux et les organisations non gouvernementales de femmes dans le cadre du Plan d'action national de la Turquie. Un certain nombre d'initiatives ont été lancées pour renforcer les capacités des mécanismes existants et pour créer de nouveaux organes indépendants. Des unités de femmes ont, en outre, été créées au sein des bureaux des gouverneurs en vue de l'intégration d'une perspective sexospécifique. Il s'agit d’amener à une nouvelle compréhension des droits des femmes, de réaliser une égalité de jure et de facto, et une véritable parité. Sur cette voie, la Turquie s'est cependant heurtée à des obstacles dus aux valeurs patriarcales ancrées dans la société et au système politique. La représentation inégale des femmes ou leur absence dans les décisions politiques, économiques et sociales, de même que leur accès limité aux ressources demeurent des obstacles majeurs en Turquie.

Des progrès importants ont cependant été réalisés. Ainsi, des efforts ont été déployés pour accroître la scolarisation des fillettes et relever l'âge du mariage, ce qui permet d’éviter les grossesses précoces. Une autre avancée importante a été l'adoption de la Loi de protection de la famille en 1998 qui traite notamment de l'élimination de la violence familiale. Cette loi donne à un tiers le droit de porter plainte en cas de violence familiale et autorise les juges à émettre des injonctions interdisant les auteurs de ces violences d'approcher les victimes. La Turquie a retiré ses réserves à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes conformément à son nouveau Code civil. Dans certains domaines, des améliorations sont encore nécessaires. La santé des femmes est un des domaines où la Turquie est encore bien en deçà des objectifs fixés. Bien que des progrès aient été réalisés en matière de mortalité maternelle et infantile, un certain nombre de problèmes subsistent. Le domaine économique est un autre secteur où une approche globale est nécessaire pour améliorer les possibilités d'emploi des femmes, a déclaré la représentante.

Mme PARCHENTSEVA (Fédération de Russie) a regretté que les changements qu’enregistre le monde aient fait naître de nouveaux risques. Parmi ces changements, elle a cité les conflits ethniques, les mouvements sécessionistes, le fardeau de la dette, la pandémie du Sida, tous phénomènes qui compliquent davantage la situation des femmes. Ce n’est qu’en unissant les efforts, a estimé la représentante, qu’il sera possible de répondre aux défis de l’heure. La réunion européenne en prévision de « Beijing+5 » qui a eu lieu en janvier à Genève, a-t-elle poursuivi, a permis de faire des progrès en matière de coopération. La représentante s’est félicitée du fait que la réunion a accordé une attention particulière à la situation des femmes dans les pays à économie en transition. Elle a espéré que les recommandations adoptées par la Conférence européenne seront reflétées dans le document final de la session extraordinaire.

Aucun pays n’a connu autant de bouleversements que la Fédération de Russie, a affirmé la représentante avant d’indiquer que pour surmonter les conséquences de la crise, le Gouvernement a tout mis en œuvre pour assurer une certaine stabilité en matière économique et sociale. La politique sociale a enregistré des progrès puisque les salaires dans la fonction publique ont augmenté de même que les bourses et les pensions. Toutes ces mesures touchent les femmes qui constituent la majorité de la population russe. Le Gouvernement a en outre élaboré un ensemble de mesures pour assurer l’égalité entre les hommes et les femmes. Une Commission interinstitutions sur les questions d’amélioration de la condition de la femme a été créée et est dirigée par une Vice-Premier Ministre. Elle est chargée d’examiner des questions telles que le développement d’entreprises dirigées par les femmes, la prévention de la violence, ou encore la coopération du Gouvernement avec les ONG féminines. L’année dernière a vu un naître un nouvel élément qui est la Commission des affaires féminines auprès du Président de l’Assemblée nationale. Parlant de la participation des femmes au processus de prises de décisions, la représentante s’est félicitée des progrès et a cité comme exemple la nomination d’une femme au poste de Premier suppléant du Président de la Douma nouvellement élue.

Mme VILLAQUIRAN DE ESPINOSA (Equateur) a indiqué que des progrès considérables avaient été réalisés en Equateur en ce qui concerne la promotion de la femme, notamment du point de vue juridique. Ainsi, le système institutionnel a été renforcé en vue de mieux garantir les droits des femmes. Il s'agit aussi de renforcer les mouvements de femmes et leur incidence sur la vie du pays. La lutte contre la violence familiale est en train d'être institutionnalisée. Des progrès à court terme ont été enregistrés sur le front de la parité. Les indicateurs montrent, en effet, des signes certains que l'on avance sur la voie d'une parité au niveau de la vie publique. Des progrès peuvent aussi être relevés en matière de santé. La Constitution protège les droits génésiques et en matière sexuelle des femmes. Des initiatives ont également été prises pour améliorer l'éducation des femmes. Dans ce cadre, des services de défense de l'élève ont été créés en vue notamment de les protéger contre le harcèlement. Pour assurer son développement, l'Equateur a toutefois besoin de compter davantage sur la participation des femmes. Pour cela, celles-ci doivent avoir davantage accès aux processus de prise de décisions. L'élargissement des mécanismes de participation et le renforcement de la femme en tant que citoyenne permettra de progresser sur tous les fronts, a estimé le représentant.

Mme CAROL BELLAMY, Directrice exécutive du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), a expliqué que depuis la Conférence de Beijing, la réalité du monde montre les chiffres suivants : des millions de femmes vivent dans la pauvreté; 600 000 femmes meurent chaque année des suites d’un accouchement; 600 millions de femmes ne savent ni lire ni écrire; les deux tiers des enfants qui ont quitté l’école sont des filles. Pour remédier à la situation, Mme Bellamy a avancé trois propositions. La première consiste à comprendre qu’aucun changement véritable ne se fera sans un engagement, au plus haut niveau, en faveur de l’établissement de droits égaux entre les hommes et les femmes et sans la reconnaissance du fait que les droits de l’homme sont le seul cadre effectif d’une pleine contribution des femmes aux efforts de développement. La deuxième proposition concerne l’élargissement de l’accès des filles à l’éducation, qui, pour Mme Bellamy, constitue la clé de la jouissance par les filles et les femmes de leurs droits. La troisième proposition consiste à établir des partenariats forts entre les gouvernements, la société civile et les institutions spécialisées des Nations Unies, a conclu Mme Bellamy en mettant un accent particulier sur la contribution des ONG.

Mme KAREN MASON, Banque mondiale, a déclaré que la Banque mondiale a fait siens les objectifs du Programme d'action de Beijing car l'habilitation des femmes et les efforts visant à l'égalité entre les sexes sont justifiés du point de vue de la nécessité d'assurer les droits humains des femmes, du point de vue de l'efficacité du développement et du point de vue de l'amélioration de la qualité de vie de tous les peuples. Ce dernier aspect est au cœur de la mission de la Banque qui s'efforce de réduire la pauvreté. Ainsi, en Afrique subsaharienne, la Banque a constaté qu'en donnant aux femmes le même accès à la terre, aux semences, aux fertilisants, à l'eau et au travail, on pouvait augmenter la production agricole totale d'un cinquième. Cela montre que l'égalité entre les sexes dans la distribution des "inputs" agricoles rendrait les fermiers plus productifs. Les expériences récentes mettent, en outre, en –évidence que la promotion de l'égalité entre les sexes augmente l'efficacité de l'aide au développement. Lorsque les projets d'assistance sont élaborés en tenant compte des besoins des femmes et des hommes, ils sont généralement plus efficaces. En outre, lorsque les femmes peuvent faire entendre leur voix comme les hommes dans le choix des mesures de développement, la mise en application de ces dernières en est renforcée. L'habilitation des femmes constitue donc un élément essentiel d'une action efficace en faveur du développement.

Des études récentes concluent que la réduction des inégalités en matière de pouvoir et de ressources nécessite une approche multidimensionnelle au niveau politique dans le cadre de la réduction de la pauvreté et de la croissance économique, a poursuivi Mme Mason. Les pays qui ont adopté, dans le même temps, des politiques visant à améliorer les droits des femmes et leur accès aux ressources tout en luttant contre la pauvreté et en faisant la promotion de la croissance dans l'équité ont enregistré les taux les plus élevés de réduction des inégalités entre les sexes. Tous les secteurs du gouvernement, en partenariat avec la société civile et les donateurs, doivent adopter des politiques qui permettront de transformer les engagements de Beijing en réalité sur le terrain. Les gouvernements doivent améliorer le statut juridique des femmes, leur accès à l'éducation et aux soins de santé, renforcer leur protection face à la violence, en particulier dans les conflits armés, augmenter leurs opportunités et leurs droits économiques, et renforcer leur participation au pouvoir décisionnel. Dans le même temps, ils doivent renforcer l'efficacité de leurs institutions et chercher à réduire la pauvreté. La Banque mondiale est déterminée à réaliser en partenariat avec les gouvernements, les autres organismes du système de l'ONU et les ONG, un monde sans pauvreté et sans discrimination contre les femmes.

M. ROBINEAU, Commission économique pour l’Europe, au nom des cinq Commissions économiques régionales des Nations Unies, a fait part des réunions que les cinq commissions ont tenues pour parfaire les stratégies de mise en œuvre des recommandations de Beijing. Les réunions, a-t-il expliqué, ont fait ressortir le fait que le commissions régionales jouent un rôle unique pour faciliter, dans une région donnée, les échanges d’expérience et mettre au point des stratégies précises. Des progrès ont été pratiquement enregistrés dans toutes les régions où l’on voit une participation accrue des femmes au travail ou à l’éducation, un renforcement de la législation pour lutter contre la violence contre les femmes et un dynamisme renouvelé de la société civile. Des sujets de préoccupation subsistent pourtant dont la pauvreté structurelle, la discrimination sur le marché du travail, l’insécurité de l’emploi, la différence des salaires ou encore les mauvaises conditions de travail. Il faut ajouter à cela, une recrudescence de la violence due aux conflits armés, de la violence domestique et du trafic des femmes. Faisant état des difficultés propres à chaque région, M. ROBINEAU a proposé des recommandations visant notamment à revoir les politiques macroéconomiques pour synchroniser l’économie et le social; à établir une véritable égalité des droits entre hommes et femmes; sà reconnaître que la démocratie exige une participation réelle des femmes; à renforcer le rôle des ONG; ou encore à modifier les législations existantes.

Mme MARY REINER BARNES, Ordre militaire souverain de Malte, a rappelé que depuis sa création, l'Ordre militaire souverain de Malte a servi les autres, y compris les femmes, et des femmes en ont fait partie depuis ses débuts. L'Ordre qui mène des projets humanitaires dans le monde entier, a des projets spécifiquement destinés aux femmes et aux fillettes. Ainsi, il parraine la Maternité de la Sainte Famille à Bethléem qui joue un rôle vital dans la communauté palestinienne en offrant des soins obstétriques. Il appuie aussi un projet en faveur des femmes au Kerala, en Inde. Ce programme "Health for One Million", vise à améliorer les conditions de vie des femmes et des enfants dans les zones rurales du district de Kanyakumari du Tamil Nadu, en fournissant, notamment, des soins de santé primaire, des infrastructures sanitaires et d'hygiène, des soins alimentaires et infantiles, et en appuyant des activités génératrices d'emplois visant à améliorer la qualité de vie des femmes. D'autres projets sont menés en Haïti et en Afrique, notamment. Dans ces projets, l'Ordre reconnaît et appuie le rôle des femmes dans le développement de la société, ainsi que la signification sociale de la maternité. Il fournit une éducation aux femmes et aux fillettes et offre aux mères célibataires la possibilité de travailler. Depuis ses débuts, l'Ordre a compté des femmes dans

ses activités. Etant politiquement neutre et représenté dans plus de 80 pays, l'Ordre est dans une situation unique pour servir davantage encore les besoins des femmes et des filles, a souligné l’Observatrice.

Mme SISSEL EKAAS, Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a attiré l’attention de la Commission sur le plan d’action pour les femmes dans le développement élaboré par la FAO. Ce plan, a-t-elle expliqué, a donné lieu à un processus consultatif et participatoire novateur impliquant une coopération entre 24 divisions de la FAO. Son objectif premier est de stimuler la croissance tout en réduisant la pauvreté rurale et en réalisant la sécurité alimentaire, grâce à un accès adéquat et équitable aux ressources productives et aux services d’appui.

Un élément important des efforts d’intégration de la FAO a été la création d’un Comité des femmes dans le développement, a poursuivi la représentante. En dépit du fait que les femmes sont les principaux producteurs de nourriture, leur contribution demeure invisible dans le développement. La FAO a donc pris l’initiative d’organiser une consultation de haut niveau sur les femmes rurales et l’information, en octobre dernier, avec pour objectif de faciliter l’échange de vues sur les moyens d’apporter un appui aux femmes rurales et au développement de l’agriculture et du milieu rural. La FAO continue de faire des progrès dans la mise en œuvre du Programme d’action de Beijing, en particulier, dans la promotion du renforcement des capacités institutionnelles et humaines pour améliorer la participation des femmes dans le développement. Elle se félicite particulièrement du programme socioéconomique et d’analyse sexospécifique mis en place qui vise à renforcer les méthodologies analytiques et de gestion ainsi que les outils aux niveaux macro, intermédiaire et local pour faciliter l’intégration de la dimension sexospécifique dans les politiques et les stratégies. Au cours des quatre dernières années, le programme a été testé, adopté et utilisé dans plusieurs parties du monde.

Mme PURCELL, Fédération internationale des femmes universitaires, Caucus des filles/Groupe de travail sur les filles, a déclaré que les petites filles continuent de souffrir d'une discrimination fondée sur leur sexe et sur leur âge qui les rend vulnérables à l'exploitation et à la violence. Or, l'exploitation et la violence peuvent provoquer chez elles des dommages irréparables, faisant obstacle à leur développement physique, psychique et émotionnel. En situation de conflit armé, y compris dans les camps de réfugiés, les fillettes constituent souvent des cibles pour les militaires. L'infanticide des fillettes et les mutilations génitales féminines sont trop souvent acceptées. Il y a aussi l'inceste et les sévices sexuels, les conditions de servitude dans lesquelles travaillent les fillettes dans l'industrie du vêtement et du tapis, la prostitution. Le sida constitue également un autre problème auquel elles doivent trop souvent faire face. Mme Purcell a invité les gouvernements à faire preuve de volonté politique et à engager les ressources nécessaires pour tenir les promesses faites à Beijing. Elle a lancé un appel pour que les fillettes aient accès à l'éducation dès leur plus jeune âge et jusqu'à 18 ans. Les programmes et les politiques concernant les fillettes devraient être élaborés autour du principe de leur pleine participation. Les Gouvernements devraient collaborer davantage avec les ONG et tirer parti de leur expérience sur le terrain. Enfin, les gouvernements devraient faire tous les efforts pour sensibiliser davantage tous les secteurs de la société à l'impact néfaste des attitudes et pratiques négatives sur les fillettes et les jeunes filles.

Les pratiques gouvernementales doivent inclure la collecte d'informations par âge et par sexe. Dans ce contexte, les gouvernements doivent s'associer aux ONG pour recueillir des données. Il faut valoriser la fillette pour que la femme de demain devienne une partenaire égale de l'homme. Pour ce faire, les droits de la fillette doivent être respectés, a conclu la représentante.

Mme EVANS, Caucus des ONG sur les mécanismes institutionnels pour la promotion des femmes, estimant que les mécanismes actuels doivent être renforcés, a proposé la prise de mesures pour assurer que la perspective sexospécifique soit incluse dans toutes les législations, politiques et programmes. Elle a aussi souhaité l’établissement d’un calendrier pour la mise en place des mécanismes pertinents tel que le recommande la section H du Programme d’action de Beijing. Elle a aussi demandé la réalisation de statistiques reflétant les préoccupations sexospécifiques. Les mécanismes nationaux doivent être placés aux plus hauts niveaux des structures gouvernementales, a poursuivi Mme Evans en soulignant l’importance pour les gouvernements d’intégrer une démarche soucieuse d’équité entre les sexes dans toutes leurs politiques. Les initiatives sur l’égalité entre les sexes doivent se faire avec la participation des hommes qui doivent devenir partenaires dans la promotion de la femme. Il revient aussi aux gouvernements d’établir un processus politique transparent et de reconnaître le droit à l’information en ouvrant l’accès à toute la société civile. Les gouvernements doivent considérer le partenariat avec les ONG, comme partie intégrante des mécanismes nationaux, et leur permettre ainsi d’identifier les obstacles à la promotion de la femme et développer des stratégies pertinentes.

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