L'OIT MET L'ACCENT SUR LA NECESSITE D'INTEGRER LE SOCIAL DANS LA MONDIALISATION
Communiqué de Presse
CNUCED/B/246
LOIT MET LACCENT SUR LA NECESSITE DINTEGRER LE SOCIAL DANS LA MONDIALISATION
20000215Le Directeur général de lOIT reconnaît la complexité de la question du travail
des enfants et appelle les gouvernements à simpliquer davantage dans cette lutte
Bangkok, 15 février -- La révolution technologique est le seul aspect irréversible de la mondialisation, et les politiques commerciales et monétaires qui lont accompagnée peuvent être modifiées, a observé le Directeur général de lOrganisation internationale du Travail (OIT), M. Juan Somavia, au cours du débat interactif de la dixième session de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED). M. Somavia qui sexprimait à la réunion de ce matin sur la dimension sociale de la mondialisation a dressé un tableau sombre des coûts sociaux de léconomie mondialisée. Le travail décent, élément fondamental de lintégration sociale, est devenu, selon le Directeur général de lOIT, une denrée rare. Il a vu dans lexplosion de léconomie informelle, qui avance au même rythme que léconomie de linformatique, un danger qui risque dengendrer la remise en question du fondement même de la mondialisation, louverture des marchés. M. Somavia a imputé léchec social de la mondialisation à labsence dune démarche intégrée dans lélaboration des politiques. Léconomique, le social et lécologie doivent être perçus dans leur complémentarité et limpact quils ont les uns sur les autres. Il faudra changer les politiques, a dit le Directeur général de lOIT, sinon ce modèle qui ne produit pas de résultats positifs pour tous risque de seffondrer. Il sest félicité que le Fonds monétaire international (FMI) ait récemment reconnu cette nécessité après tant dannées dexistence.
Les propos de M. Somavia ont suscité des commentaires au cours desquels laccent a été mis sur la responsabilité des gouvernements quant à la création dun environnement social qui mette à labri des dangers de la mondialisation. A cet égard, des délégations ont mis en exergue le manque de ressources en raison de la baisse de lAPD, au fardeau de la dette extérieure et au manque daccès au marché mondial. Cette question a permis à lAfrique du Sud de marquer son opposition aux tentatives de lOrganisation mondiale du commerce (OMC) dintégrer les questions denvironnement et les normes de travail dans les règles commerciales, et de préciser que ces dernières doivent demeurer dans les prérogatives de lOIT. Concernant les normes de travail, M. Somavia a reconnu le caractère
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complexe de la question du travail des enfants qui, a-t-il convenu, est intrinsèquement lié à la pauvreté. Il ne sagit pas de condamner cela sur la base dune quelconque valeur morale. Il sagit plutôt dattaquer le problème sous un autre angle et de mener une lutte acharnée contre les employeurs qui se livrent à de telles violations des droits de lenfant. M. Somavia a appelé les gouvernements à simpliquer davantage dans cette lutte en leur rappelant lengagement quils ont pris de mettre en oeuvre les conventions pertinentes quils ont eux-mêmes signées.
La lutte contre le travail des enfants, en conséquence, contre la pauvreté, sans lintégration économique, a constitué le thème essentiel du débat général qui a suivi le dialogue avec le Directeur général de lOIT. Le Ministre du commerce extérieur et de lindustrie de la Malaisie a dénoncé le fait que les Accords du Cycle dUruguay ne sont pas réellement mis en application alors quen même temps lOMC demande lapplication de règles que les pays en développement nont ni les moyens ni la volonté dutiliser. Des appels ont été lancés pour que la CNUCED assiste les pays en développement dans la formulation dun ordre du jour pour les prochaines négociations commerciales de lOMC.
Les représentants des pays suivants ont pris la parole : Pays-Bas, Malaisie, Afrique du Sud, République de Corée, Maroc, République tchèque, Mongolie et Chili. LObservateur de lOrganisation de lunité africaine (OUA)et la Présidente du Conseil de lUnion interparlementaire ont fait également des déclarations.
La Xe CNUCED poursuivra son débat général cet après-midi à 15 heures.
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Débat interactif
M. JUAN SOMAVIA, Directeur général de lOrganisation internationale du Travail (OIT), intervenant sur le thème de la dimension sociale de la mondialisation, a souligné que limportant est dessayer de comprendre les problèmes en se mettant à la place des hommes, des femmes et des enfants concernés. Les erreurs politiques viennent, en effet, du manquement à agir de la sorte. Le monde daujourdhui est caractérisé par lincertitude, linsécurité, lanxiété, le sentiment que les choses se produisent très rapidement et simultanément à des endroits différents. Dans ce contexte, personne ne comprend rien et chacun a le sentiment que les gouvernements ne peuvent rien et que les institutions internationales continuent dagir de manière sectorielle sans pouvoir définir de stratégies globales. La question fondamentale est de savoir comment répartir les richesses et assurer ainsi la justice sociale. Aujourdhui, au sortir même de lécole ou de luniversité, le jeune sentend dire quil devra se recycler. Le sentiment général est que l'on ne sait pas où on va. Comment concilier les impératifs de la compétitivité tout en gardant la cohésion sociale ? Telle est la question qui plonge chacun dans lincertitude. La responsabilisation accrue de lindividu, exigée par léconomie de la mondialisation, constitue une trop grande pression; lutter pour ne pas être le perdant du monde mondialisé. Limpact psychologique de cette pression doit être pris en compte car il a un effet réel sur la famille, élément central de la cohésion sociale. Quelle est donc la solution au problème de lexclusion sociale et de la pauvreté ? Chacun est tenté de répondre en affirmant que lemploi représente le premier pas vers lintégration sociale.
Le travail décent et de longue durée, qui constitue laspiration la plus légitime de lêtre humain, est pourtant devenu une denrée rare dans léconomie mondialisée. Les bénéfices de léconomie natteignent pas un grand nombre de personnes. Il faut se demander pourquoi et trouver une réponse à cette question. Aujourdhui, il est préoccupant de constater que léconomie informelle et léconomie dinformation se développent à la même vitesse. Cest une situation dangereuse du point de vue politique, puisquelle peut engendrer une remise en question de louverture des économies. Il faut donc insérer un pilier social dans la mondialisation. Cela signifie quen termes politiques, il faut renforcer simultanément léconomie et le social. Il faut donc une nouvelle pensée économique. Il faut quéconomistes et sociologues pensent à limpact de leurs propositions dans chacune de leur discipline sur la société. Allons plus loin et intégrons léconomie, le social et lécologie. Ce manque dapproche intégrée est la cause principale de léchec de la mondialisation. Comment donc concilier lefficacité sociale et lefficacité économique. La réponse est quil faut que le marché fonctionne pour tout le monde et offre un travail raisonnable pour tout le monde.
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Lon prétend aujourdhui que la mondialisation est inévitable. Cela nest pas vrai. Il y a un aspect inéluctable, en effet, et positif, qui est celui de la révolution de linformation. En revanche, les politiques monétaire, économique, commerciale, sociale, qui ont accompagné cette révolution technologique, ne sont pas irréversibles. Il est possible de les ajuster. La mondialisation nest donc pas intouchable. Les politiques doivent être changées sinon ce modèle, qui ne produit pas les résultats escomptés, ne pourra pas durer. Il nest plus possible de dire « désolé », mais à court terme vous aurez des coûts sociaux très importants et « pardon aux pauvres et aux malades », comme cest le cas aujourdhui pour les programmes dajustement structurel. Pourquoi les retombées de ces programmes doivent dabord toucher les plus vulnérables ? Est-il inévitable que ce soient les plus faibles qui payent le prix le plus fort ? Il faut être sérieux et admettre que si les lois du marché ne respectent pas les priorités des populations, rien ne pourra fonctionner, a observé M. Somavia.
Nous commençons à être excédés par la solution unique qui devrait convenir à tout le monde. Le remède unique est dépassé. La spécificité dune situation nationale ou régionale doit être prise en compte dans cette situation mondialisée. Dans ce contexte, lOIT a entrepris une modernisation sous langle du droit du travail et de la protection sociale. Une des forces de lOIT est que son organe directeur comprend des employeurs et des travailleurs. LOrganisation travaille donc dans le concret. LOIT a également un ordre institutionnel visant à encourager le dialogue social, élément fondamental. Si nous réussissons, nous devrions réussir grâce à ce que feront les PME : les grandes entreprises ne créent pas suffisamment demplois. Il faut donc être prudent quant à la manière dorganiser les lois de la concurrence et savoir que la protection et la promotion des PME sont des éléments clé de la stabilité sociale de lavenir. Sagissant des normes sociales, il faut dire quil existe un ensemble de règles du travail défini par la communauté internationale comme un objectif commun. LOIT a 190 Conventions quil revient aux pays de signer librement. Le Sommet mondial de Copenhague a pris huit de ces Conventions pour les intégrer dans le Programme daction. Il ny a donc pas désaccord. Librement, la communauté internationale a fait de la mise en uvre de ces Conventions un objectif commun. Dans ce contexte, lOIT donne des informations de létat davancement de cette mise en uvre, conformément aux modalités arrêtées à la suite de Copenhague. Le débat qui dure depuis dix ans sur les normes du travail et le commerce fait lobjet de lattention de lOIT. LOrganisation travaille sur le lien entre ces deux éléments et la nature de ce lien. Pour lOIT, il faut sattaquer à ces problèmes en ayant à lesprit la nécessité de travailler ensemble.
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Dialogue
Abondant dans ce sens, le représentant de la Tunisie a fait une déclaration pour appeler la communauté internationale à uvrer ensemble pour faire de la mondialisation un instrument au service de tous. La représentante de lUNIFEM a mis laccent sur les emplois à bas revenus que les femmes continuent doccuper majoritairement et leur corollaire les mauvaises conditions de travail et le manque de sécurité de lemploi. Il faut arrêter une stratégie qui consistera à appuyer les femmes entrepreneurs, à collecter des données sur les conditions de travail des femmes dans le contexte de la mondialisation, à comptabiliser le travail des femmes au foyer et à analyser la contribution des femmes à léconomie, a-t- elle notamment dit. Le commerce peut être bénéfique mais il faut regarder de près son impact sur les enfants dans un monde où léconomie informelle est en expansion et où le commerce électronique a explosé, a souhaité la représentante de lUNICEF en appelant à la vigilance. Intervenant à son tour, le représentant de lAfrique du Sud sest opposé à toute idée dinclure dans lordre du jour de lOMC des normes de travail et de lenvironnement. Cette idée, a-t-il dit, reflète un manque de sensibilité aux différences historiques et aux différents stades de développement. LOMC est mal placé pour traiter des questions sociales qui reviennent de plein droit à lOIT. Après lui, le Rapporteur spécial sur la dette à la Commission des droits de lhomme, a rappelé que la création de son poste a suscité les réticences des pays développés montrant ainsi leur opposition à sattaquer sincèrement à cette question. Le problème de la dette, a-t-il dit, est un problème de développement urgent et il faut y faire face. Le Rapporteur sur la dette fait le lien entre le problème de la dette et la Convention sur lélimination des pires formes du travail des enfants. Ce lien nest pas seulement de nature analytique, a-t-il souligné, en se demandant comment sortir les enfants des usines, si ce nest en exhortant les Nations Unies à aider les institutions de Bretton Woods à élaborer des instruments efficaces de lutte contre la pauvreté.
Le représentant de lONG Child Mission a regretté que la pauvreté soit toujours perçue comme une conséquence de léconomie donc comme un élément économique. Or, il serait temps de se pencher sur la pauvreté en tant que problème à part entière. Il est dailleurs intéressant de constater, a-t-il dit, que les Nations Unies ont plusieurs départements, institutions ou fonds chargés de la paix, de léconomie, du social ou du développement, mais pas de la pauvreté. Pourquoi la CNUCED ne tiendrait pas un rôle de chef de file pour créer un réseau voué aux problèmes de la pauvreté, a-t-il proposé. Rassemblons lOIT et la CNUCED et voyons comment mettre au point ce projet. Les organisations internationales ne pourront rien contre la pauvreté tant quelles ne disposeront pas des ressources suffisantes, a estimé pour sa part le représentant de lEgypte. Le nud du problème, cest le financement du développement, a dit le représentant du Guatemala, en trouvant éloquent que le Plan daction de la CNUCED ne parle pas de cette question. Le représentant sest, à cet égard, félicité de la déclaration du Directeur général qui allait dans ce sens, en regrettant toutefois quil ne tienne de tels propos quau moment où il décide de
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quitter son poste. LAlliance internationale de coopération a, par la bouche de son représentant, mis laccent sur ce qui doit être pris en compte dans les stratégies de lutte contre la pauvreté, à savoir les valeurs auxquelles tiennent les pauvres; en particulier les valeurs culturelles. Pour la représentante de la Bolivie, la tâche fondamentale de lOIT doit être de rétablir la confiance dans la capacité de pouvoir sopposer à la vassalisation à un groupe de pays qui veulent imposer une stratégie unique. Il faut renforcer la capacité des gouvernements à réglementer leurs économies à un moment où même les syndicats perdent de le pouvoir.
Le représentant du Costa Rica est revenu sur la responsabilité des gouvernements dans la définition des politiques qui ne se font pas seulement au niveau des organisations internationales. Il faut aussi évoquer cette responsabilité dans la création dun environnement interne propre à faire que la mondialisation profite à tous. Il sagit des politiques de santé, demploi ou encore déducation. Il est fondamental que devant les défis de la mondialisation, les gouvernements assument leur responsabilité pour ce qui est du développement et de lamélioration des conditions de vie de toutes les populations. La mondialisation à visage humain ne peut venir que de la volonté politique de tous, a dit le représentant de Cuba.
Commentant ces observations, le Directeur général de lOIT sest arrêté sur la question des ressources. Pour lui, elles doivent provenir du secteur public mais aussi du secteur privé. Il faut donc étudier la manière dont les ressources de ce dernier peuvent venir en appui aux activités sociales. Ce ne sont pas les ressources qui manquent, cest leur affectation qui pose problème. Le Directeur général sest aussi félicité de lintervention de lUNICEF qui a, a-t-il dit, abordé un problème éthique qui doit devenir une préoccupation mondiale. LOIT reconnaît la complexité de la question du travail des enfants. Il ne sagit pas de condamner la chose sur une base morale mais lon est tout de même en droit de se demander quel type de patron ou de société commet de tels actes. La communauté internationale a loccasion unique de demander aux gouvernements de simpliquer dans la lutte contre le travail des enfants.
Débat général
M. VIJAY S. MAKHAN ( Secrétaire général adjoint de lOrganisation de lunité africaine - OUA) : la Xe CNUCED devra définir les termes susceptibles de conduire les pays, notamment en développement, sur le chemin du développement en ce début de siècle. Au moment des indépendances des pays africains, la compétition qui existait entre idéologies rivales définissait le développement en des termes antagonistes, promettant chacun la plénitude à toutes les nations et à tous les peuples. Aujourdhui, après la fin de la guerre froide, savoir comment la mondialisation peut se construire en faveur de tous les peuples et de tous les pays, nest pas seulement une question technique mais implique aussi une série de choix politiques. On ne pourra pas nier quil est indispensable de redonner aux
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pays la pleine responsabilité de leurs propres développements, qui varient selon les circonstances et réalités de chacun, et le dernier Sommet de lOrganisation de lunité africaine (OUA) à Syrte (Libye), a réitéré cette donnée. Les politiques de développement doivent appartenir aux peuples et aux pays qui en ont besoin, et elles doivent exprimer et refléter les vrais besoins de ces pays. La propriété des décisions de développement implique la prise de responsabilité, et les pays africains nhésitent pas aujourdhui à reconnaître leur part de responsabilité dans les échecs du passé. LAfrique connaît des problèmes majeurs qui sont autant dobstacles sur la voie du développement, notamment les différents conflits qui la déchirent, et la balkanisation du continent qui en rend les marchés nationaux totalement inopérants et improductifs dans le contexte actuel. Les maladies, dont notamment la pandémie de sida constituent des fléaux sérieux et des obstacles à toute projection dans le futur, en particulier au développement. Nous espérons que la Xe CNUCED pourra dégager les recommandations permettant de donner au continent africain lexpertise et lassistance dont il a tant besoin pour se repositionner dans le contexte actuel.
Le développement est possible, mais nest pas inévitable, et lhistoire a surtout montré quil résulte aussi des échanges techniques ou culturels entre les peuples. Linterdépendance est une donnée immuable du développement. Mais en ce qui concerne lAfrique, la solidarité internationale en sa faveur a souvent fait défaut et les courants financiers ont été cruellement absents au moment où le continent en avait le plus besoin. Nous pensons que le plan daction de la CNUCED devrait inclure une proposition sur une revue indépendante de la situation de la dette de lAfrique, dont la résolution est indispensable pour donner au continent toute chance de redressement. LAfrique a besoin de traitements préférentiels et de temps, et ceci encore pour longtemps. Concernant lOMC, malgré léchec de Seattle, les questions qui devaient y être discutées restent pertinentes. Linterdépendance doit prévoir une base morale de relance de la coopération entre riches et pauvres, et de considération du développement comme base de toute politique économique internationale. Le remaniement de la Convention de Lomé est un exemple qui prouve que des avancées sont possibles quand la bonne volonté existe.
M. GERRIT YBEMA (Ministre du commerce extérieur du Royaume des Pays- Bas) : la mondialisation est là pour rester, et aucun de nous ne pourra larrêter. Elle peut apporter beaucoup de bienfaits et de bénéfices si elle est bien gérée. Chacun de nos pays peut bien sen servir pour promouvoir ses produits, attirer les investissements étrangers directs, profiter de la connaissance et des technologies nouvelles, tirer profit des opportunités demplois générées par les investissements étrangers, bâtir des infrastructures et des institutions nationales grâce au produit généré par les exportations et les investissements, payer sa dette et promouvoir la santé et léducation. Cest là la perception optimiste de la mondialisation. Lautre face de la médaille, cest celle de la pauvreté, qui va grandissante et est devenue le principal défi à relever.
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Malheureusement, pour la combattre, les pays en développement sont obligés de se battre sur plusieurs fronts à la fois. Ils doivent faire face à la faim, à la maladie, au manque demplois, et à la corruption. Ils doivent aussi faire face au protectionnisme des riches, en même temps quils essaient dassainir leur environnement daffaires, de construire leurs capacités dexportations, de libéraliser leurs marchés et de bâtir leurs institutions nationales. On ne devrait pas demander à ces pays de porter seuls la responsabilité de leur développement. Les pays développés et les institutions internationales ont des devoirs envers les pays du Sud. Ils doivent les aider à intégrer léconomie mondiale.
Plusieurs pays en développement ont montré quils pouvaient instaurer et travailler sur des bases de bonne gouvernance et améliorer la vie de leurs nationaux. Ceci leur serait facilité sils navaient pas non plus à honorer décrasants services de la dette. Cest pourquoi les Pays-Bas ont pris les devants en ce qui concerne la contribution au financement de linitiative dallégement de la dette en faveur des pays pauvres très endettés. Nous croyons fermement quil y a, dautre part, un lien très fort entre réduction de la dette et amélioration de laccès aux marchés. Laccès aux marchés est un facteur important de rétablissement ou du maintien dun équilibre financier extérieur sain. Plus de cohérence entre les institutions internationales actives dans le domaine du développement, aiderait à obtenir les meilleurs résultats du lien dette-accès aux marchés. Cest une des raisons pour laquelle les Pays-Bas apprécient et soutiennent lapproche intégrée adoptée et préconisée par la CNUCED pour répondre aux défis du développement.
M. KERK CHOO TING (Vice-Ministre du commerce international et de lindustrie de la Malaisie) : les pays dAsie du Sud-Est sont sortis de la crise quils avaient connue grâce aux bons fondamentaux économiques quils ont volontairement appliqués. Cette crise a clairement démontré quune mondialisation basée sur un système exclusif de marché, joue contre la croissance des économies des pays en développement. La mondialisation nest donc pas la réponse miracle aux problèmes de développement de ces pays, où elle ne sest pas traduite en termes de relèvement qualitatif des niveaux de vie et na pas généré demplois ou de hausse des revenus des travailleurs. Au contraire, elle a rendu nos pays plus vulnérables aux manipulations de toutes sortes. La libre circulation des capitaux, présentée comme une panacée, a au contraire conduit à la contraction de la croissance des économies, à linflation, et au sous-emploi, avec des conséquences sociales et politiques dramatiques. Les institutions et les règles du système financier actuel doivent être régulées pour assurer la stabilité financière qui donnerait une véritable chance au développement. Il y a quelques années, à Midrand, nous avons favorablement accueilli la création de lOrganisation mondiale du commerce (OMC), née de la bonne conclusion des négociations commerciales multilatérales du Cycle dUruguay. Mais depuis, nous avons constaté que les Accords de ce Cycle nétaient pas réellement mis en application et quen même temps, lOMC demandait que lon exécute de nouvelles règles que les pays en développement nont ni les
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moyens, ni la volonté de se servir, étant données la brièveté des délais et les conditions que lon veut leur imposer. Il est difficile daccepter que des politiques dusage de crêtes tarifaires progressives, de nouvelles normes environnementales et de travail soient, dans le même temps, utilisées pour bloquer lactivité économique des pays en développement.
Sous les règles de lOMC, seules les grandes firmes transnationales tirent profit du système commercial multilatéral. Lactivité de ces transnationales domine les marchés et marginalise les petites et moyennes entreprises des pays en développement, qui sont condamnées soit à disparaître, soit à être phagocytées par les multinationales. La compétition dont on crédite donc tant la mondialisation nest quun leurre, les règles de son équité nexistant pas, et nous estimons que des traitements spéciaux et préférentiels en faveur des pays en développement devraient être maintenus. Ceci, devrait notamment, sappliquer en vue de promouvoir les petites et moyennes entreprises, qui sont les créatrices principales demplois, en leur assurant un accès aux marchés, aux financements et à la connaissance. Le succès du processus du développement repose dabord sur une réforme et une stabilité de larchitecture financière internationale conjuguée à un fonctionnement harmonieux du système commercial international.
Mme LINDIWE HENDRICKS (Vice-Ministre du commerce et de lindustrie de lAfrique du Sud) : la Déclaration de Midrand, adoptée à lissue de la IXe CNUCED, portait en elle la volonté de la communauté internationale de développer le partenariat. Lorsque les pays en développement se sont lancés dans la tâche de développement, ils comptaient sur un partenariat que les pères fondateurs des Nations Unies avaient imaginé. Or, ce partenariat sest révélé décevant. La mondialisation souligne pourtant limportance du multilatéralisme, compte tenu de linterdépendance accrue entre les pays. On ne peut plus concevoir le développement dune manière fragmentée. Il faut assumer une responsabilité collective pour gérer linterdépendance et faire de la mondialisation un outil au service du développement. Une nouvelle dynamique de léconomie mondiale exige des pays développés quils apportent des changements à leur politique économique et ouvrent leurs marchés aux produits pour lesquels les pays en développement ont un avantage comparatif. Il ne sagit pas de charité mais de donner à chacun sa place dans le commerce mondial pour la prospérité de lhumanité. Les négociations de lOMC sont le défi à relever. Il faut être clair quant à la nature de ces négociations. Elles doivent sattaquer aux déséquilibres du système commercial international. La réunion de Seattle ayant révélé de grandes faiblesses, un cadre de négociations transparent doit être établi pour faire avancer les négociations.
Le partenariat défini par la Déclaration de Midrand concerne un ensemble de partenariats liés entre eux aux fins de développement. Cela exige une approche intégrée qui doit viser le règlement de nombreux problèmes dont celui de la dette extérieure. A cet égard, sil faut se
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féliciter de lInitiative renforcée en faveur des pays les plus endettés, il faut appeler à une simplification des procédures et à une baisse des coûts daccession. De plus, les conditions concernant la pauvreté liées à cette Initiative pourraient, pour beaucoup de pays, être difficiles à satisfaire. LAfrique du Sud estime, en outre, que le secteur privé doit contribuer davantage au développement.
M. HAN DUCK-SOO (République de Corée) : même si le modèle de développement, adopté par la République de Corée, il y a quelques décennies, ne peut plus aujourdhui servir de référence absolue aux pays pauvres, trois de ses principes fondamentaux restent dactualité et sont indispensables et inévitables. Ce sont : lengagement à mobiliser les ressources et le capital humain de qualité, la participation active aux échanges internationaux, et la mobilisation dun engagement national sincère et irréversible en faveur de la cause du développement. Concernant le premier principe, il est indéniable que notre pays doit ses succès passés à léducation de sa population et de sa force de travail. Les familles coréennes ont appris à faire des sacrifices pour léducation de leurs enfants, perçue comme le meilleur investissement pour lavenir. Des populations dotées dune bonne formation sont créatrices demplois et de richesse. Il ny a quà voir ce qui se passe dans la région de Bengalore, en Inde, où se développent des compagnies de produits informatiques. Les dirigeants de ces firmes de haute technologie situées dans un pays en développement, témoignent que la location géographique nest pas un handicap pour leurs entreprises, qui sont directement intégrées aux marchés mondiaux, grâce au flot dinformation rendu possible par les nouvelles technologies. Concernant les investissements étrangers, ils ont atteint 15,5 milliards de dollars en République de Corée au cours de lannée qui sachève, et nous ne partageons pas lavis de ceux qui pensent quil faudrait imposer des contraintes à leur libre circulation.
Concernant lengagement à la cause du développement, nous pensons quil est facilité lorsque des structures démocratiques véritables sont en place. Dans le passé, certains avaient estimé quune direction politique forte et centralisée était à même de forger un consensus national. Mais ce genre de système nest pas soutenable dans le temps, et notre pays en a expérimenté les limites. Les disparités nées de la mondialisation ne peuvent être discutées et trouver des solutions dans un cadre non démocratique. Les consensus dans ce genre de contexte sont plus délicats à réaliser, puisquils doivent réellement faire participer tous les acteurs sociaux. Cest à ce prix que lon maintient lengagement national envers le développement. Notre pays réaffirme son engagement à la cause de la démocratie, des valeurs universelles et des droits de lhomme. De ce fait, lassistance aux pays en développement est pour nous un devoir, et ceci explique notre soutien total à la CNUCED et à ses missions.
M. ALAMI TAZI (Ministre de lindustrie, du commerce et de lartisanat du Maroc) : la mondialisation a permis la relance de léconomie mondiale et elle continuera de constituer un énorme réservoir dopportunités pour le développement de nos économies. Cependant, cette évaluation positive ne saurait nous empêcher de constater que cette croissance est répartie de manière inégale. Cest dire que lintégration
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économique globale reste encore un objectif à atteindre. Bon nombre de pays en développement et de PMA, en particulier dans le continent africain, nont pas pu tirer profit des avantages de la mondialisation ni à sintégrer pleinement dans léconomie mondiale. Toutefois, je voudrais insister sur un certain nombre dactions qui devraient être engagées pour redresser cette situation déséquilibrée et qui avaient fait lobjet de discussions approfondies à loccasion de la réunion du groupe des 77 et de la Chine à Marrakech. Dans le domaine du financement du développement, force est de constater la diminution de laide publique au développement qui est passée de 60 milliards de dollars US en 1995 à 49 milliards de dollars US en 1997, ce qui va avoir, inéluctablement, des effets sur les efforts dadaptation que plusieurs pays en développement et pays les moins avancés sont en train de fournir actuellement. Il en est de même pour le problème de la dette qui continue de peser lourdement sur nos économies et risque de compromettre nos efforts de développement.
Dans le domaine des négociations commerciales multilatérales, trois idées essentielles sont à souligner ici : laccès aux marchés demeure une préoccupation majeure pour les économies en développement; les problèmes de mise en uvre des accords du Cycle dUruguay devront occuper une place centrale dans les futures négociations; le traitement spécial et différencié devrait être revu afin de tenir compte des nouvelles réalités du commerce international, de même quune nouvelle vision dynamique et pragmatique de la coopération technique devrait voir le jour. En matière de renforcement des capacités des PED, et pour une meilleure gestion des contraintes internes au développement, les efforts nationaux et internationaux consentis dans ce cadre devraient se poursuivre.
M. VLASTIMIL LORENZ (République tchèque) : la République tchèque tient à exprimer sa reconnaissance et limportance quelle accorde à la CNUCED, dont les travaux nous ont beaucoup aidé au cours des quatre dernières années. Les experts tchèques ont tiré dimportants enseignements de leur participation aux réunions de la CNUCED et tiennent compte des idées et des points de vue de la Conférence en ce qui concerne les politiques commerciales. Nous considérons le rapport sur le commerce et le développement de la CNUCED comme la meilleure publication mondiale en la matière. Nous sommes un pays industriel, et en vue daméliorer nos résultats économiques et accélérer la croissance de notre produit national brut, nous payons une attention extrême aux informations sur lindustrie, lexportation et la science ainsi que la technologie, et, dans la mise en application des évolutions mondiales en ces domaines, nous bénéficions de la coopération et de lassistance de la CNUCED. Notre économie est sous- capitalisée, et notre industrie a profondément besoin de restructuration. Dans ce cadre, nous avons besoin et apprécions le travail analytique accompli par la CNUCED dans le domaine des investissements, travail que nos décideurs politiques et lAgence tchèque pour linvestissement extérieur mettent à profit. Dans ce domaine, nous considérons aussi le Rapport sur linvestissement mondial de la CNUCED comme un ouvrage de référence.
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Concernant les pays en développement, nous considérons comme cruciale leur intégration à léconomie et aux courants déchanges mondiaux. Ces pays, et notamment les moins avancés, continuent malheureusement dêtre victimes dune inacceptable marginalisation. Cette injustice doit être redressée le plus vite possible, et nous pensons que laccès aux marchés des biens et services de ces pays devrait être amélioré sur une base transparente et non discriminatoire. Dautres aspects à respecter dans le processus de la libéralisation du commerce, doivent être ceux de lenvironnement, de la diversité culturelle, de la santé, et des spécificités sociales de chaque pays.
Mme NYAMOSOR TUYA (Ministre des relations extérieures de la Mongolie) : le pays se félicite des efforts de la CNUCED pour traiter des besoins et problèmes particuliers des pays en développement sans littoral. Pour compléter ces efforts, il est important que lOMC apporte sa contribution et examine attentivement les questions liées au transport en transit et élabore plus avant larticle V des Accords du GATT de 1994. Les efforts de la CNUCED tendant à encourager lintégration régionale peut contribuer à identifier les options disponibles pour faciliter le commerce et le flux des investissements au niveau régional et renforcer ainsi un système commercial multilatéral plus large. Dans ce cadre, il est nécessaire que la CNUCED aide les pays en développement, en général, à renforcer leurs capacités dans la formulation et la mise en uvre de politiques dinvestissement. Une recherche sur lattraction dinvestissements pour le développement de linfrastructure en Mongolie, ainsi que sur la mise en uvre de politiques intégrées dinvestissement, de technologie et dinternationalisation des entreprises serait du plus grand intérêt. La CNUCED doit mettre au rang de ses priorités la diffusion dinformations sur les meilleures pratiques en matière daccès à la technologie, y compris la technologie de linformation. La Mongolie estime aussi que la CNUCED doit renforcer ses activités visant à assister les pays en développement dans la formulation dun ordre du jour en prévision des négociations de lOMC. Elle appuie fermement la participation de la CNUCED aux activités des centres de formation nationaux et régionaux pour les matières liées au commerce et accueille avec satisfaction linitiative de la Thaïlande de créer un Institut pour le commerce à Bangkok.
Mme CARMEN LUZ GUARDA (Ambassadeur, Représentant permanent du Chili auprès de lOrganisation mondiale du commerce) : la mondialisation ne peut être arrêtée. Nous en connaissons les effets de façon empirique sans pouvoir pour le moment en expliquer tous les tenants et aboutissants. Du fait de ce phénomène, la souveraineté des pays a perdu de sa substance et de son importance, et la mondialisation se manifeste aussi par une montée spectaculaire de la pauvreté. La mondialisation exige de nouvelles règles internationales, notamment dans le domaine monétaire, où le besoin de la réforme de larchitecture financière internationale se fait sentir de manière aiguë depuis quelques années, et notamment à la suite de la crise asiatique. Malgré les réformes économiques faites par beaucoup de pays, dont le Chili, en matière macroéconomique, les résultats se sont fait
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attendre. Le Chili a cependant pu accroître de 66% la masse de ses exportations extérieures grâce aux mesures quil a adoptées en matière de libéralisation et douverture commerciale. La mise en place de cette politique sest accompagnée de mesures de lutte contre la pauvreté. Nous regrettons léchec des négociations de Seattle, en particulier dans le domaine agricole. Ce sont en effet les distorsions existant dans ce domaine, qui sont le plus responsables de laggravation des conditions de pauvreté dans les pays en développement.
Il nexiste pas de commerce sans investissement, et la CNUCED a fait un excellent travail analytique sur la question qui a été publié dans son rapport sur le développement mondial. Nous espérons que les conclusions quelle tire et les recommandations quelle fait dans ce document seront prises en considération. Avec les autres pays de notre région, nous soutenons linitiative de mettre en place un centre de formation de la CNUCED sur la formation et linformation touchant aux questions et aux négociations commerciales. Les activités de ce centre nous donneraient les moyens de mieux participer aux débats de lOMC.
Mme NAJMA HEPTULLA (Présidente du Conseil de lUnion interparlementaire) : la déclaration qui a été adoptée par la réunion de lUnion interparlementaire a reconnu que la mondialisation a donné lieu à un désenchantement dans les pays en développement et que la mondialisation nest profitable quaux élites et quelle entraîne des inégalités entre les nations et dans les pays. Il est urgent aussi de se préserver de toutes les répercussions néfastes de la mondialisation. Lélaboration de mécanismes du commerce, des finances et de la protection sociale est de la plus haute importante. Il faut intégrer les communautés dans le processus de prise de décisions. La transparence dans ce processus fait encore défaut et il faut remédier à cette situation. Cest la raison pour laquelle les parlementaires de lUnion ont intensifié leurs intérêts sur ce qui se fait dans les organisations internationales. La bonne gouvernance et la démocratie sont essentielles aux processus de prise de décision. La plupart des problèmes apparus dans le commerce international viennent du fait que les décisions ont été prises avec trop de hâte sans tenir compte du point de vue propre des pays en développement. Le commerce nest toujours pas un libre commerce et le protectionnisme na pas disparu. LUnion interparlementaire se préoccupe aussi des questions de la dette extérieure, du déclin de lAide publique au développement, de laccès aux ressources financières multilatérales et de lélaboration de la nouvelle architecture financière internationale. Elle félicite le FMI pour avoir reconnu que la lutte contre la pauvreté est une donnée importante. A cet égard, la CNUCED a encore beaucoup de travail à faire pour que laspect du développement soit davantage enraciné dans les décisions financières internationales.
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