ONG/333

LES QUESTIONS DE LA FEDERATION DE RUSSIE, DU SOUDAN, DE L'ALGERIE ET DE LA CHINE CONDUISENT LE COMITE A REPORTER SA DECISION SUR PLUSIEURS ONG

27 janvier 2000


Communiqué de Presse
ONG/333


LES QUESTIONS DE LA FEDERATION DE RUSSIE, DU SOUDAN, DE L'ALGERIE ET DE LA CHINE CONDUISENT LE COMITE A REPORTER SA DECISION SUR PLUSIEURS ONG

20000127

Reprenant ce matin ses travaux, le Comité chargé des organisations non gouvernementales a examiné les nouvelles demandes d'admission au statut consultatif auprès du Conseil économique et social et les nouvelles demandes de reclassement soumises par les ONG. Dans ce cadre, il a continué l'examen de la demande de l'ONG "Admiral Family Circle Islamic Community", qu'il avait entamé lors de la dernière séance. Le représentant de l'Inde a demandé au représentant de cette ONG des réponses aux questions qu'il lui avait posées lors de la fin de la séance du mercredi 26 janvier, notamment sur celles liées au concept d'"autodétermination" dont se réclame l'ONG. Le représentant de l'ONG a répondu que les membres de son organisation sont citoyens des Etats- Unis et ne font qu'exercer, dans le cadre de leurs activités, leur droit à l'expression et au développement personnel et communautaire dans une démocratie. Quant à la désignation des dirigeants de l'ONG, elle se fait par un choix basé sur le consensus entre les membres. Le Centre des droits de l'homme "Malik Al-Shabazz" auquel il est fait référence dans les documents de l'ONG, porte le nom de celui que l'on appelait "Malcolm X" et son but est de donner aux Africains-Américains et autres groupes qui le souhaitent, les éléments de compréhension de la Déclaration universelle des droits de l'homme. Le représentant de l'Inde s'est félicité de la clarté de ces réponses et a déclaré son soutien à la demande de statut consultatif de l'ONG. La représentante de Cuba a dit que cette ONG apportait des éléments positifs à la lutte contre le racisme et la discrimination, par conséquent Cuba recommande et soutient la proposition faite hier par la délégation de l'Algérie de lui accorder le statut consultatif spécial auprès du Conseil économique et social au lieu de l'inscription sur la Liste demandée par l'ONG. Le Comité a en ainsi décidé. Il a ensuite examiné la demande de l'ONG "Al-Haq, le droit au service de l'homme", contenue dans le document E/C.2/1999/R.2/Add.27, à laquelle il a octroyé le statut consultatif spécial tout comme au Groupe de promotion du développement; à Mukono Multi-purpose Youth Organisation (MUMYO); au Conseil norvégien des réfugiés; à l'Association internationale des Anglicans et Episcopaliens francophones; et à Catholic Daughters of the Americas, qui avait postulé à l'obtention du statut général.

Le Comité a, par ailleurs, reporté la demande du statut spécial présentée par Islamic Centre England London (ICEL) en raison de nombreuses questions en suspens. En effet, le représentant de la Tunisie a demandé plus de détails sur les dépenses et les revenus de l'ONG. Les seuls revenus provenant des contrats, quelle est leur nature et quelles sont les parties concernées? De plus, quelles sont ces "autres activités" auxquelles est consacrée la plupart des dépenses. Les activités de l'ONG visent-elles uniquement les personnes de confession musulmane, a demandé, pour sa part, le représentant du Chili avant la représentante de l'Algérie qui a souhaité savoir si l'ONG entretient des relations avec d'autres organisations à l'extérieur du Royaume-Uni. Répondant à cette série de questions, les représentants d'ICEL ont expliqué que les revenus de l'ONG proviennent de donations de personnes réparties dans le monde entier. Ils ont ajouté, pour ce qui est des activités, que la Charte de l'ONG précise qu'elles doivent se concentrer principalement sur les questions d'éducation. L'ONG dispose également d'un service de recherche lié à certaines universités comme celle de Cambridge. Les autres activités concernent principalement le domaine culturel. Répondant à la question du Chili, les représentants ont affirmé que le Centre est ouvert à toutes les religions et a des programmes destinés certes aux pays arabes mais aussi aux pays du sous-continent indien. De nombreux non musulmans s'adressent au Centre. Le Centre est international, ont répondu les représentants à l'Algérie, et travaille avec beaucoup d'organisations affiliées.

Le représentant de l'Inde est revenu sur la question des revenus en demandant si les dons qui s'élèvent à 1 million de livres sterling proviennent seulement de particuliers ou parfois de gouvernements. Comment se déroule la collecte de fonds que l'ONG effectue pour les sans-abris en Tchétchénie et en Iraq, a demandé le représentant de la Fédération de Russie. La Tchétchénie faisant partie de la Fédération de Russie, est-ce que l'ONG reconnaît ce fait et par quels moyens et par quels acheminements l'aide est-elle fournie et à qui est-elle destinée? De plus, quelle est cette région de l'Afghanistan à laquelle l'ONG dit apporter une aide? Inclut-elle la région Nord de l'Afghanistan? Par ailleurs, quels sont les liens de l'ONG avec la Mouhadjiroune, Société de la culture musulmane et le Front musulman international. Intervenant une nouvelle fois, le représentant de la Tunisie a souhaité connaître le type de représentations que l'ONG a dans les pays arabes.

Les représentants de l'ONG ont répété que les dons et les fonds reçus par l'ONG émanent uniquement de particuliers, essentiellement des entrepreneurs de différentes régions du monde. S'agissant de l'action en Tchétchénie, il s'est agi pour l'essentiel de répondre à une demande de collecte de fonds pour apporter une aide strictement humanitaire dénuée de connotation politique. Par ailleurs, l'ONG n'a pas encore de représentation dans les pays arabes mais espère en ouvrir très bientôt. Le représentant de la Fédération de Russie a souligné le caractère concret de ces questions qui n'ont pas, a-t-il dit, reçu de réponses de la même nature. Il s'est proposé de réitérer ses questions par écrit.

Tout comme pour Minbyun-Lawyers for a democratic society, le Comité a également reporté sa décision sur la demande de statut consultatif spécial présentée par le Conseil norvégien des réfugiés. La raison en est que le représentant du Soudan a voulu d'abord connaître les relations de l'ONG avec l'Agence d'aide norvégienne (NORAD). Soulignant après cette intervention, le travail utile et reconnu de l'ONG, le Président du Comité a proposé que le Comité accède d'emblée à la demande de l'ONG avant réception de la réponse à la question du Soudan. Commentant cette proposition, la représentante de l'Algérie, appuyée par Cuba,l'Ethiopie et la Chine, a émis l'espoir que cette souplesse dans la procédure sera aussi appliquée à l'avenir pour d'autres organisations. Le représentant du Pakistan s'est, pour sa part, élevé contre toute exception à la procédure. Soulignant le caractère légitime de la question du Soudan, la représentante de la France a tout de même souhaité savoir quel problème pourrait venir des relations de l'ONG avec NORAD, institution publique honorable connue du Haut Commissariat des Nation Unies pour les réfugiés (HCR) et d'autres institutions des Nations Unies.

Concernant l'ONG "Union of Kuwaiti Women Associations", la représentante de Cuba a déclaré sa satisfaction vis à vis des réponses que lui avait apporté cette ONG. Nous avons eu une conversation par téléphone avec les dirigeantes de cette association qui travaille à la promotion sociale de la femme et dans la lutte contre le sida et les autres maladies sexuelles transmissibles, a-t- elle dit, et Cuba soutient par conséquence la demande d'octroi de statut consultatif général de cette ONG. La délégation du Liban a soutenu la proposition cubaine. Mais les représentants de la Tunisie, de l'Algérie, de la Chine, de l'Irlande, tout en exprimant leur soutien à la demande d'accréditation de l'ONG ont cependant estimé qu'il fallait par esprit d'équité, respecter les procédures de travail du Comité, qui a besoin d'une réponse écrite de l'ONG aux questions qui lui avaient été posées par la délégation cubaine. Les représentants de l'Irlande et des Etats-Unis ont d'autre part déclaré que cette ONG méritait le statut spécial et non le statut général, la délégation de la France souhaitant quant à elle avoir des précisions sur les finances et le budget de l'ONG. La représentante de la Colombie est alors intervenue pour faire remarquer que Cuba avait été la seule délégation à poser des questions à l'ONG. Il aurait donc été normal qu'une décision soit prise après la satisfaction exprimée par la délégation cubaine sur les réponses reçues. La Colombie soutient l'octroi du statut spécial à cette ONG.

La délégation de Cuba a exprimé son étonnement devant les objections faite par certaines délégations à la proposition d'octroi immédiat du statut consultatif à la Union of Kuwaiti Women Associations. Pratiquerait-on la politique du deux poids deux mesures, quand on sait que des décisions ont été prises dans le passé sur ce genre de dossiers au cours de circonstances semblables? Le Comité a reporté sa décision.

Il a ensuite examiné le cas de l'ONG "Centre mondial d'information", contenue dans le document E/C.2/1999/Add.15, à laquelle il a accordé le statut consultatif spécial, puis s'est penché sur la demande de l'ONG "Peaceways". Concernant cette demande d'admission, la délégation de la Chine a déclaré qu'elle n'était pas satisfaite des réponses concernant les activités de l'ONG en République populaire de Chine et particulièrement dans la province de Taïwan. Le Comité a reporté sa décision sur cette demande.

Venant à la demande de statut spécial présentée par le National Opinion Research Center (NORC), contenue dans le document E/C.2/1999/R.2/Add.26, la représentante de l'Algérie a réitéré sa question sur le fait que des "contrats" soient les seules sources de financement de cette ONG qui s'élèvent tout de même à 53 820 000 dollars. Le représentant du Pakistan a soulevé la question du statut de cette organisation; un institut de recherche peut-il prétendre au statut d'ONG? Par le passé, a rappelé le représentant de la Chine, le Comité a prôné la prudence pour ce qui est des instituts de recherche. Le statut de cette organisation doit être examiné dans le cadre des travaux sur les méthodes de travail du Comité qui doivent aussi porter sur la démarche à suivre en ce qui concerne les ONG de la "zone grise", a estimé, pour sa part, la représentante de l'Algérie.

Reprenant les demandes contenues dans le document E/C.2/1999/R.2/Add.28), le Comité a accordé le statut spécial à la National Association of Negro Business and Professsional Women's Clubs. S'agissant de l'ONG Olabisi Olaleye Foundation, la représentante de l'Algérie a déploré le ton de la réponse donnée par l'ONG qui "se déclare préoccupée d'être constamment obligée de consacrer de heures de travail indues afin de fournir indéfiniment au Comité les mêmes informations". La représentante a, pour sa part, réitéré ses questions; pourquoi l'ONG se dit internationale alors qu'elle est formée par deux individus venant d'un seul pays, le Nigéria? Comment l'ONG fait-elle pour réaliser ses objectifs en matière notamment de droits de l'homme, de droits à la santé et de droits des enfants alors que la modicité des fonds déclarés et obtenus, de surcroît, par emprunt, rend la chose impossible. Enfin, pourquoi la création de l'ONG se fonde sur une loi régissant les sociétés commerciales?

Le Comité a examiné ensuite les rapports quadriennaux des organisations non gouvernementales qui avaient été renvoyés à la présente session et figurant au document E/C.2/1999/CRP.4. Les membres du Comité ont commencé par l'examen du rapport de l'ONG "Robert F. Kennedy Memorial" sur lequel des compléments d'informations et des éclaircissements avaient été demandés. Prenant la parole, le représentant du Soudan a déclaré que toute ONG devait respecter les règles définissant le fonctionnement des ONG, et le Robert F. Kennedy Memorial semble mener des activités conformes aux objectifs de l'ONU. Ses activités en matière de défense des droits de l'homme et des libertés

amènent cependant à lui poser des questions. L'ONG déclare décerner des prix chaque année à des individus qui se seraient distingués dans le domaine des droits de l'homme, et elle dit avoir accordé cette distinction à certaines personnes au Soudan, personnes dont elle ne veut pas dévoiler les noms et l'identité. Il apparaît, au vu du rapport qu'elle présente, que le Soudan soit le seul pays où elle agisse de la sorte. Pour respecter les règles de transparence qui régissent les activités des ONG accréditées auprès de l'ECOSOC, la délégation du Soudan aimerait que la lumière soit faite sur cet aspect des choses.

Le représentant de la Chine a souhaité obtenir des éclaircissements. Le Robert F. Kennedy Memorial déclare déléguer ses prérogatives à d'autres ONG pour qu'elles le représentent lors de certaines manifestations. Cela semble être fait en contradiction des règles qui régissent l'accréditation accordée aux ONG auprès de l'ECOSOC, car les accréditations sont individuelles. Si les ONG auxquelles le RFKM délégué ses privilèges se révélaient être des ONG à caractère politique ou terroriste, ne reconnaissant pas la souveraineté de certains Etats Membres, ou ayant été rejetées dans le passé par ce Comité, cela serait grave. La Chine demande des éclaircissements sur ce point.

La représentante du Robert F. Kennedy Memorial a répondu que le Robert Kennedy Memorial décerne ses prix après décisions prises par un jury indépendant qui décide de l'octroi du prix. Dans le cas du Soudan c'est le lauréat lui-même qui a demandé que son nom ne soit pas publiquement révélé. Il ne s'agit pas d'une mesure prise contre le Soudan et son gouvernement. Quant aux observations de la Chine, le RFKM permet au Centre des droits de l'homme de parler au nom des lauréats de son prix. C'est une mesure visant à laisser parler des gens qui sont experts dans ce domaine. Le RFKM respecte scrupuleusement les dispositions de la résolution 96/31. Les personnes avec lesquelles le RFKM entretient ce genre de relations s'expriment toujours au nom du Mémorial, a-t-elle tenu à préciser. Le délégué du Chili a déclaré que l'accréditation de personnes qui ne sont pas membres d'une ONG mais qui s'expriment en son nom est une question délicate. Le RFKM a cependant agit dans la transparence et le Comité pourrait faire preuve de souplesse. Concernant l'anonymat de certains lauréats de son prix, il est normal que l'ONG tienne compte du souhait exprimé par ces personnes. La délégation de Chili qui vient d'un pays qui a connu des violations des droits de l'homme, comprend parfaitement cette attitude et soutient l'acceptation du rapport de l'ONG.

Le représentant de la Chine a insisté que l'attitude adoptée par le RFKM constituait clairement un abus et une violation. Ce sont clairement des activités illicites par la résolution 96/31. Ce Comité a, dans le passé rejeté de telles ONG, qui ne respectent pas le principe de la transparence. Intervenant, le représentant de la France a argué que les dangers qui peuvent planer sur la vie et la sécurité des personnes peuvent justifier les mesures prises par le RFKM. Il n'existe pas, a-t-il dit, de mesures strictes

interdisant à une ONG de laisser s'exprimer, sous son accréditation, des personnes qu'elle juge bon de laisser parler en son nom. La représentante de l'Algérie a déclaré que sa délégation ne voyait aucun obstacle à accepter le rapport du RFKM. Faisant une observation d'ordre général, la délégation algérienne estime qu'elle devrait prendre la pleine responsabilité des déclarations des gens qui parlent en son nom. L'Algérie insiste sur le plein respect par toutes les ONG des règles et procédures relevant de la résolution 96/31 et de la Charte.

Le Comité a décidé de poursuivre dans l'après-midi l'examen du rapport quadriennal de cette ONG. Sa prochaine réunion aura lieu à 15 heures.

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