POUR SURMONTER LES BARRIERES DES CASTES ET DES GENRES, LE GOUVERNEMENT INDIEN ASSURE UN ACCES PLUS LARGE DES PETITES FILLES A L'EDUCATION
Communiqué de Presse
FEM/1103
POUR SURMONTER LES BARRIERES DES CASTES ET DES GENRES, LE GOUVERNEMENT INDIEN ASSURE UN ACCES PLUS LARGE DES PETITES FILLES A L'EDUCATION
20000124La diversité culturelle et religieuse du pays ne doit pas empêcher l'Etat indien de garantir l'égalité entre les sexes, font observer les expertes
"L'accès plus large des petites filles à l'éducation joue un rôle de premier plan en Inde pour surmonter les barrières des castes, des classes et des genres", a déclaré, ce matin, Mme Kiran Aggarwal, Secrétaire du Département pour le développement de la femme et de l'enfant en Inde, lors de la présentation du rapport initial de son pays devant les 23 expertes du Comité sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. Mme Aggarwal a, dans ce contexte, mis en évidence les efforts de l'Inde pour universaliser l'éducation élémentaire par la décision de la Cour suprême de faire du droit à l'éducation obligatoire et gratuite pour les enfants âgés de 6 à 14 ans un droit fondamental. Mettant également en valeur le fait que près de 700 000 femmes en Inde ont été élues au sein des Panchayats, les institutions locales et municipales de l'Inde, Mme Aggarwal a indiqué que cette participation accrue est le fruit d'une politique volontariste et notamment des amendements historiques de la Constitution réservant un tiers des sièges aux femmes dans les Panchayats.
Toutefois, s'agissant de certaines pratiques coutumières, la situation des femmes en Inde reste fortement préoccupante. Ainsi, pour lutter contre l'infanticide des nouveaux-nés de sexe féminin, qui est toujours pratiqué dans le pays, le Gouvernement a strictement réglementé le recours aux méthodes permettant de définir le sexe de l'enfant avant sa naissance. La préférence très marquée pour les enfants mâles et la négligence des bébés filles qui en résulte ont également conduit les autorités centrales à faire de la petite fille le centre de leurs programmes de santé, de nutrition, d'éducation et d'alphabétisation.
Dans des observations générales, les expertes ont souligné l'importance qu'elles accordent au rapport initial de l'Inde, puisque le pays a la deuxième plus large population féminine au monde. Si les expertes ont salué les efforts déployés par le Gouvernement, elles ont clairement affirmé
(à suivre - 1a) - 1a - FEM/1103 24 janvier 2000
qu'en aucun cas, la grande diversité culturelle, religieuse et ethnique du pays ne doit fournir une excuse à l'Etat pour ne pas satisfaire à son obligation de garantir que les lois posent l'égalité entre les sexes. Or, confier les lois sur le mariage et la famille aux communautés ethniques et religieuses constitue indirectement l'autorisation de maintenir la situation en l'état, a estimé une experte, en ajoutant qu'il s'agit là d'une violation de l'essence même de la Convention. Plusieurs expertes ont en outre souligné les informations lacunaires de ce premier rapport, en regrettant notamment l'absence de données sur la violence à l'égard des femmes et le manque d'informations désagrégées par Etat, par territoire et par système de caste.
Cet après-midi, à partir de 15 heures, le Comité poursuivra l'examen du rapport initial de l'Inde.
EXAMEN DU RAPPORT INITIAL DE L'INDE
Rapport (CEDAW/C/IND/1)
La Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femme est entrée en vigueur en Inde le 8 août 1993.
L'instrument de ratification déposé par le Gouvernement indien contient deux déclarations et une réserve. Dans une première déclaration, le Gouvernement indien a indiqué qu'il respectera et fera appliquer les dispositions de l'article 16 de la Convention conformément à sa politique de non-ingérence dans les affaires personnelles de toute collectivité sans son initiative et son consentement. Concernant le même article, le Gouvernement indien a déclaré souscrire au principe de l'enregistrement obligatoire des mariages en ajoutant cependant que le défaut d'enregistrement n'annulera pas le mariage, particulièrement dans un pays comme l'Inde avec sa variété de coutumes, de religions et de niveaux d'instruction. Le Gouvernement de l'Inde a enfin émis une réserve au paragraphe 1 de l'article 29, selon lequel l'arbitrage des litiges relatifs à l'interprétation de la Convention sont soumis à l'interprétation de la Cour internationale de Justice.
L'Inde est le deuxième pays du monde par sa population qui est actuellement estimée à plus de 970 millions, parmi lesquels 48,09% de femmes. Les indicateurs démographiques font état d'un rapport de masculinité défavorable qui suscite des préoccupations en Inde qui a préparé une législation visant à interdire l'usage des techniques d'identification du sexe de l'enfant avant la naissance.
En Inde, la Constitution garantit aux femmes le droit à l'égalité et interdit expressément la discrimination fondée sur le sexe. Les articles de la Constitution peuvent être invoqués devant les tribunaux. Les principes directeurs de la Constitution imposent aussi à l'Etat diverses obligations concernant le respect de l'égalité et l'élimination de la discrimination. Bien que ces principes ne puissent pas normalement être invoqués en justice, la Cour suprême leur a, par son activisme, donné force et a prescrit à l'Etat de les appliquer. La Constitution prévoit la possibilité de mesures palliatives et positives en faveur des femmes en habilitant l'Etat à prendre des mesures particulières pour elles. L'Etat a eu largement recours à ce concept au cours des dernières années. Grâce à des amendements constitutionnels de 1993 qui ont une valeur historique en ce qui concerne la promotion de la femme indienne, les femmes se voient réserver un tiers du nombre total des sièges dans toutes les fonctions électives des organes locaux, notamment dans les "Panchayats" (assemblées locales dans les zones rurales). Une révolution discrète est donc en cours en ce qui concerne la participation des femmes à la prise de décision, d'autant plus que le service diplomatique de l'Inde compte un nombre important de femmes qui occupent des postes de haut niveau dans des missions diplomatiques à l'étranger ou au Ministère des affaires étrangères.
S'agissant des droits juridiques des femmes, assurer leur protection dans la pratique reste l'un des défis majeurs auquel l'Inde est confrontée, le mariage des enfants, le veuvage forcé et les droits de propriété restant les problèmes majeurs dans ce domaine. Parmi les mesures prises figurent la modification du droit personnel hindou et le droit personnel chrétien afin d'accorder des droits plus étendus en matière d'héritage, d'adoption et de divorce. Il n'en reste pas moins qu'un fossé considérable persiste entre les buts énoncés dans la Constitution, d'une part, et la condition actuelle des femmes indiennes, d'autre part. Afin de réduire cet écart, le Gouvernement a constitué en 1992 une Commission nationale pour la femme à laquelle a été confiée la mission de superviser l'application des mesures constitutionnelles de protection concernant les femmes. Outre cette commission, la question du développement des femmes est traitée par le Département pour le développement de la femme et de l'enfant qui relève directement d'un ministre, lequel est responsable devant le Parlement.
Dans le contexte de la société indienne, la famille joue un rôle essentiel mais, en même temps, la famille est très souvent aussi le cadre dans lequel s'exercent discrimination et subordination. C'est là que la violence à l'égard des jeunes filles et des femmes atteint des proportions alarmantes. L'élimination des foetus de sexe féminin, l'infanticide, les violences liées aux questions de dot restent souvent impunis malgré les garanties constitutionnelles. Par ailleurs, la Constitution de l'Inde proscrit expressément le trafic des êtres humains. En fait, la loi actuelle portant sur la prévention du trafic immoral des personnes (ITPA) tente de faire face au problème de la prostitution et de la traite sans abolir la prostitution en tant que telle. Dans un certain nombre d'études, il est indiqué que les lois actuelles ont tendance à pénaliser davantage les personnes prostituées, qui sont en fait des victimes, que ceux qui les exploitent.
Les femmes indiennes occupent principalement des emplois marginaux et précaires qui sont pour la plupart situés dans le secteur agricole ou le secteur non structuré. Leur taux d'activité général était de 22,27% en 1991. Les femmes rurales, quant à elles, constituent près de 80% de l'ensemble de la population féminine. Bien qu'elles fournissent un apport important à l'économie du pays, elles ont été considérées comme des acteurs économiques (et non comme des récipiendaires d'aide sociale) pour la première fois dans le sixième plan quinquennal, au début des années 80. Sur le plan des crédits, il n'y a pas en Inde d'obstacle juridique à ce que les femmes en obtiennent. Cependant, en réalité, l'accès des femmes au crédit est très limité parce que les banques insistent presque toujours pour avoir des nantissements et des garanties fondés sur des propriétés et que les femmes ont peu accès à la propriété. De même, on constate que si les femmes ont le droit de choisir leur domicile, le système prédominant de résidence patrilocale implique que les femmes vivent avec leur père avant le mariage et avec leur mari après le mariage.
Sur le plan de l'éducation, l'Inde est le pays où se trouve le plus grand nombre de femmes analphabètes (39,29% contre près de 64% pour les hommes) et le taux croissant d'abandons scolaires des filles est fortement préoccupant. Le concept d'après lequel une fille est "une richesse qui appartient à quelqu'un d'autre" et qui peut au mieux enrichir un autre foyer décourage la scolarisation des filles. On a, par ailleurs, enregistré une forte corrélation entre la présence d'enseignantes et les taux d'inscription et de maintien à l'école des filles. Dans cet esprit, un projet appelé "opération tableau noir" a été mis sur pied pour assurer que 50% des enseignants recrutés à l'avenir soient des femmes.
La politique nationale de l'Inde prévoit d'atteindre l'objectif "Santé pour tous d'ici à l'an 2000". Il est admis que les soins de santé primaires, dont le système en Inde est l'un des plus vastes du monde, constituent le principal moyen pour ce faire. L'Inde est par ailleurs résolue à atteindre un taux de reproduction brut égal à l'unité d'ici à l'an 2000. Pour atteindre ce but, on a retenu comme moyens principaux l'accès universel aux services de soins de santé primaires, à la planification familiale et aux services de santé maternelle et infantile. Par ailleurs, au vu du rôle important que jouent les "dais" (accoucheuses traditionnelles), un projet de formation des "dais" a été lancé, il y a plus de 10 ans, pour moderniser les techniques d'accouchement traditionnelles. On estime enfin qu'il pourrait y avoir en Inde à l'heure actuelle entre un et deux millions de personnes contaminées par le VIH, dont au moins un tiers sont des femmes. Des études indiquent que les rapports de force entre les partenaires sexuels ne favorisent pas les femmes qui ont peu de contrôle sur la fréquence et le type des rapports sexuels.
S'agissant des rapports familiaux, ceux-ci sont traditionnellement régis en Inde par le droit personnel lié à la religion. Les cinq principaux organes religieux (Hindous, Musulmans, Chrétiens, Juifs et Parsis) ont leur propre droit personnel. Le droit personnel hindou a été considérablement réformé afin de le rendre conforme en majeure partie à la Constitution. Le droit personnel d'autres minorités, à l'exception des Parsis, n'a, quant à lui, pratiquement pas été modifié parce que le Gouvernement indien a adopté une politique selon laquelle il ne modifie pas le droit personnel d'une collectivité à moins que celle-ci ne demande des changements.
Présentation du rapport par l'Etat partie
Introduisant le rapport initial, Mme KIRAN AGGARWAL, Secrétaire du Département pour le développement de la femme et de l'enfant en Inde, a affirmé que les accomplissements de son pays en matière des droits de l'homme doivent être rappelés à la lumière du fait que l'Inde est un pays aux dimensions subcontinentales caractérisé par une grande diversité géographique, climatique, ethnique et culturelle. S'agissant du mode de vie de la population, il existe de nombreuses différences liées à la région où vivent les personnes ainsi qu'à leur sexe. Ainsi les indicateurs de développement des droits de l'homme sont-ils largement supérieurs à la moyenne dans les Etats du sud de Kerala et de Tamil Naduk, par exemple, alors qu'ils sont très en recul dans les Etats du nord de Punjab et de Haryana. C'est pourquoi, le Gouvernement accorde une attention particulière aux Etats du Nord. Mme Aggarwal a indiqué que le Département du développement de la femme et de l'enfant et la Commission nationale pour la femme, créée en 1992, sont au centre des mécanismes nationaux de la promotion de la femme. Par ailleurs le Comité central pour le bien-être social, mis en place en 1993, travaille en réseau avec 12 000 ONG qui oeuvrent dans ce domaine. Une autre stratégie dans ce domaine se fonde sur la mobilisation communautaire qui passe par la création de groupes d'auto-assistance parmi les femmes, notamment dans les domaines de l'accès au crédit et de la santé. S'agissant des recours juridiques, les procédures complexes et les longs délais sont des obstacles sérieux pour nombre de femmes pauvres et illettrées. L'Inde a besoin à cet égard d'un système d'accès à la justice qui soit moins formel. Les tribunaux du peuple, les "Lok Adalats", créés pour répondre à ces défis représentent une alternative innovatrice au règlement des disputes et qui privilégie un esprit de conciliation. Les "Lok Adalats", qui se sont vus conférer en 1987 des pouvoirs similaires aux tribunaux civils, ont permis la création de tribunaux familiaux pour les femmes.
Près de 700 000 femmes occupent à présent des postes élus au sein des Panchayats, les institutions locales et municipales de l'Inde, a déclaré Mme Aggarwal. 33,33% des sièges sont réservés aux femmes dans les Panchayats et dans certains Etats, la proportion de ces dernières atteint même 40%. Par ailleurs, le taux de femmes dans le service diplomatique est de 12,3%, a fait remarquer Mme Aggarwal. Le défi consiste aujourd'hui pour le Gouvernement à transformer cette large participation des femmes par des mesures efficaces de délégation de pouvoirs et de responsabilités. S'agissant de la prostitution des femmes en Inde, la loi sur le trafic immoral des personnes a été amendée en 1986 afin d'étendre sa portée à toutes les personnes, femmes ou hommes, qui sont exploitées sexuellement pour à des fins commerciales. Par ailleurs, des initiatives nouvelles ont été mises en place par les travailleuses sexuelles elles-mêmes qui ont instauré un Comité, notamment à Sonagachi, afin de défendre leurs droits et ont créé une coopérative pour s'assurer une source de revenu.
Reconnaissant que l'éducation des femmes joue un rôle déterminant dans la baisse des taux de fertilité et de mortalité et que les principes de l'éducation et du développement se renforcent mutuellement, Mme Aggarwal a indiqué que l'accès plus large des petites filles à l'éducation joue un rôle de premier plan en Inde pour surmonter les barrières des castes, des classes et des genres. Ainsi, les efforts de l'Inde pour universaliser l'éducation élémentaire ont-ils été renforcés par la Cour Suprême dans sa décision de constituer en un droit fondamental le droit à l'éducation obligatoire et gratuite pour les enfants âgés entre 6 et 14 ans. Par ailleurs, l'Inde s'est engagée à augmenter ses dépenses pour l'éducation de 3,8% à 6% de son produit intérieur brut. Le taux d'alphabétisme des femmes en Inde a atteint 50% en 1997 alors que celui des hommes était pour la même année de 73%, ce qui démontre la subsistance de différences basées sur le sexe. Parmi les obstacles les plus sérieux que rencontrent les petites filles dans l'accès à l'éducation figurent le manque d'enseignantes qualifiées, le manque de toilettes séparés pour les petites filles et le fardeau des tâches ménagères qui leur incombe.
La Constitution indienne pose le principe de l'égalité des chances pour tous les citoyens en matière d'emploi, a poursuivi Mme Aggarwal. La loi sur la rémunération égale interdit, par exemple, toute discrimination salariale envers les femmes dès le recrutement. Outre les inspecteurs du travail, les associations de volontaires sont désormais autorisées à déposer des plaintes pour violation de cette loi. Mais bien que les femmes représentent une part importante de la main-d'oeuvre indienne, elles se concentrent surtout dans le secteur informel et elles n'ont, par conséquent, pas de garde-fous, permettant notamment de leur garantir un salaire minimum. Pour améliorer la visibilité de ces femmes, le recensement de 1991 a cherché à étendre la liste des activités économiques réalisées par les femmes. Ce processus sera renforcé lors du prochain recensement qui aura lieu en 2001. Les femmes employées dans le secteur structuré du travail ne représentent que 15,9% en 1997 de la population active totale. Bien que la loi ne pose aucune restriction au choix de leur profession, les femmes occupent toujours des emplois traditionnellement perçus comme féminins. Pour garantir aux femmes la possibilité de travailler même si elles sont mères de famille, plusieurs dispositions de lois demandent aux employeurs du secteur structuré de prévoir des crèches s'ils emploient un nombre minimum de femmes. En matière de harcèlement sexuel, le cas Vishaka porté devant la Cour suprême en 1997 a permis d'élaborer des directives et des normes à suivre par les employés pour lutter contre ce problème sur le lieu de travail et dans différentes institutions. Les entreprises doivent désormais disposer d'une unité où les plaintes peuvent être examinées et le Code de conduite et disciplinaire des salariés a été amendé, qualifiant le harcèlement sexuel de mauvaise conduite. Par ailleurs, il a été demandé à la Commission nationale pour la femme d'élaborer un projet de loi, a ajouté Mme Aggarwal.
La société indienne étant essentiellement patriarcale, les femmes ne bénéficient pas des soins et services de santé au même niveau que les hommes et de manière générale on constate que les femmes ont tendance à négliger leur santé. Néanmoins, ces dix dernières années des progrès sanitaires importants sont intervenus, puisque le taux brut des naissances a diminué presque de moitié et que l'espérance moyenne de vie a continué d'augmenter. La stabilisation démographique est la première priorité du Gouvernement. La nécessité de la planification familiale étant maintenant presqu'universellement acceptée dans la population indienne, l'accent est désormais porté non plus sur un seul moyen de contraception, à savoir la stérilisation, mais sur toute une palette de méthodes contraceptives répondant aux besoins des couples. La participation des hommes aux programmes de bien-être familial est encouragée. La nouvelle politique de santé reproductive prend en compte, de manière intégrée, la situation sanitaire des femmes et des enfants au lieu de se limiter à fournir des services de contraception. C'est par ce biais que l'Inde s'efforce de résoudre le problème de la forte mortalité maternelle (437 pour 100 000). L'objectif est d'augmenter la proportion des accouchements réalisés en milieu hospitalier et parallèlement de former les sages-femmes traditionnelles. Conscient que l'absence de docteurs, et notamment de docteurs femmes, est un problème majeur en milieu rural, les autorités encouragent le secteur privé et médical, ainsi que les ONG à y fournir des soins de santé primaire. Le Gouvernement entend maintenant lancer un programme de santé destiné tout particulièrement aux populations tribales, aux personnes résidant dans les bidonvilles et aux adolescents.
Une enquête réalisée en 1998 a montré que les personnes atteintes par le VIH/sida se rencontrent dans presque toutes les régions du pays et que l'épidémie n'est plus limitée aux populations à risque. 25% des personnes séropositives sont des femmes, a ajouté la Secrétaire du Département pour le développement de la femme et de l'enfant. C'est pourquoi un programme national de contrôle du sida a été lancé. Il s'attache à prévenir la transmission sexuelle, prénatale et parentale du virus. L'accent est mis sur l'information, l'éducation et la mobilisation de la société. Une vaste campagne multimédia a été réalisée. Les ONG, et tout particulièrement les organisations féminines, sont encouragées à participer à ces campagnes.
Mme Aggarwal a expliqué ensuite que l'infanticide contre les petites filles est toujours pratiqué en Inde, surtout dans les zones rurales. L'un des problèmes majeurs sur cette question est l'incidence des méthodes permettant de définir le sexe de l'enfant avant sa naissance et les foeticides qui en découlent. L'infanticide comme le foeticide sont contraires au Code pénal et depuis 1994, il existe une loi interdisant la sélection du sexe par diagnostic prénatal hors des centres médicaux et cliniques dûment immatriculés. Les techniques de diagnostic prénatal sont autorisées uniquement pour détecter les anomalies et handicaps. Depuis 1971, les femmes peuvent, selon certaines conditions, bénéficier d'une interruption
thérapeutique de grossesse pour les grossesses non désirées. L'objectif de cette loi est avant tout de réduire la mortalité maternelle et la morbidité découlant des avortements illégaux ou dangereux. La préférence très marquée pour les enfants mâles et la négligence des bébés filles qui en résultent sont une grande source de préoccupation pour le Gouvernement, a affirmé Mme Aggarwal, ajoutant que les autorités centrales ont fait de l'enfant fille le centre de leurs programmes de santé, de nutrition, d'éducation et d'alphabétisation.
En matière bancaire et d'accès au crédit, la loi interdit toute discrimination en fonction du sexe, de la caste ou de la race. Outre les conditions de garanties, les coûts élevés des transactions et la complexité des procédures découragent grandement les femmes. Le Gouvernement a donc adopté une approche volontariste dans ce domaine en réservant des quotas (30 à 40%) aux femmes dans les prêts accordés aux familles se situant en-dessous du seuil de pauvreté. Un nouveau programme fournissant une aide à l'entrepreunariat et au commerce vise à créer 45 000 emplois indépendants pour les femmes dans les zones rurales et urbaines. Les femmes rurales représentent 80% de la population féminine du pays. Depuis les années 80, la stratégie nationale est d'assurer aux femmes leur juste part du développement rural et des programmes agraires, qui en 1997 touchaient près de 60 millions de famille. En avril 1999, un programme global de fourniture de crédits et de développement de l'emploi indépendant dans les campagnes a été lancé. D'autres programmes mis en oeuvre dans les zones rurales visent à améliorer les compétences des femmes.
Même si les textes posent l'égalité des hommes et des femmes devant la loi, l'Inde doit encore donner une véritable dimension de facto à ces dispositions de jure, a reconnu ensuite Mme Aggarwal. La société étant essentiellement patriarcale, les femmes n'ont pas le choix de leur résidence. Elles vivent avec leur père avant le mariage, puis ensuite avec leur mari. Leur mobilité est aussi limitée par leur manque d'indépendance économique. Les relations familiales et maritales sont traditionnellement réglées par les lois religieuses. Selon le principe de non-ingérence dans les lois touchant à la sphère privée, sauf si la communauté concernée le demande, peu de changements législatifs sont intervenus dans ce domaine, a expliqué la Secrétaire du Département du développement de la femme et de l'enfant. En ce qui concerne la violence domestique, le Code pénal pose que les actes de "cruauté contre la femme commis par le mari ou des parents" sont passibles d'une peine d'emprisonnement allant jusqu'à 3 ans et d'une amende. La loi sur la présentation des preuves a été amendée. Dans les cas où une femme se suicide dans les 7 années suivants son mariage, alors que l'on soupçonne qu'elle a été victime d'actes cruels de la part de son mari, le tribunal peut considérer que le suicide a été provoqué par les violences infligées par le mari. En outre, un loi sur la violence domestique, préparée par la Commission nationale pour la femme, est actuellement examinée par les institutions gouvernementales.
Observations générales
La présidente du Comité, Mme AIDA GONZALEZ MARTINES, experte du Mexique, a souligné le rôle important joué par les femmes en Inde dans leur lutte pour l'indépendance. Les femmes en Inde représentent la deuxième population féminine du monde, a-t-elle rappelé, il est donc important de connaître la situation actuelle des femmes dans ce pays et les mesures prises par le Gouvernement pour assurer l'égalité de leurs droits.
Dans les observations générales, Mme SAVITRI GOONESEKERE, experte du Sri Lanka, a salué l'amélioration des indicateurs sociaux notamment l'augmentation de l'espérance de vie des femmes, ainsi que la création de tribunaux locaux qui ont entre leurs mains des litiges touchant à l'intérêt public. Elle s'est félicitée des amendements constitutionnels réservant 33,33% des sièges aux femmes dans les instances locales et communales. Elle s'est cependant inquiétée des deux déclarations faites par l'Inde lors de son adhésion à la Convention. Elle a demandé quels efforts étaient entrepris en Inde pour intégrer les décisions de la Cour suprême, marquée par un fort activisme judiciaire, aux lois nationales concernant l'enseignement libre et obligatoire qui est un élément indispensable pour que les femmes puissent faire des études. Selon l'experte, il semblerait que la Plate-forme de Beijing n'ait pas été intégrée au Plan national de promotion de la femme de l'Inde, ce qui constitue un fait inquiétant si l'on considère que l'Inde connaît le problème supplémentaire de la préférence des fils. Mme Goonesekere a par ailleurs évoqué la question de la répartition des ressources allouées au Département du développement de la femme et de l'enfant et à la Commission nationale pour la femme. Attirant l'attention sur une grande lacune du rapport présenté par l'Inde, l'experte a déploré l'absence totale d'informations relatives à la violence à l'égard des femmes, des statistiques montrant un nombre élevé de viols de femmes en Inde.
Formulant également des observations générales, Mme AYSE FERIDE ACAR, experte de la Turquie, a fait remarquer que pour être véritablement effective, la démocratie doit garantir l'égalité des citoyens aussi bien dans le domaine public que dans le domaine privé. Cela n'est pas le cas en Inde, alors que l'on sait combien la séparation de ces deux sphères porte préjudice à la promotion de la femme. La vraie démocratie passe également par l'élimination des stéréotypes et des schémas sociostructurels traditionnels. Il faudrait donc que les valeurs culturelles et normes religieuses, qui chargent les femmes de perpétuer les valeurs patriarcales, soient réinterprétées du point de vue de la promotion des femmes. En aucun cas, la grande diversité culturelle, religieuse et ethnique du pays ne doit fournir une excuse à l'Etat pour ne pas satisfaire à son obligation de garantir que les lois posent l'égalité entre les sexes. Or, confier les lois sur le mariage et la famille aux communautés ethniques et religieuses constitue indirectement l'autorisation de maintenir la situation en l'état, alors que de toute évidence les femmes vivent dans des conditions discriminatoires,
a estimé l'experte, ajoutant qu'il s'agit d'une violation de l'essence même de la Convention. L'Etat a-t-il l'intention de mettre fin à cette situation? S'efforce-t-il au-moins de préparer les mentalités des chefs communautaires ou religieux à des changements favorables aux femmes?
Passant aux questions article par article, Mme SILVIA ROSE CARTWRIGHT, experte de la Nouvelle-Zélande, s'est dite préoccupée par l'absence apparente de toute politique législative visant à promouvoir et à protéger les droits des femmes ainsi que leur intégrité physique. Est-il prévu d'amender la Constitution indienne s'il s'avère que le principe de l'égalité substantielle n'y est pas inscrit. L'experte a en outre demandé des informations supplémentaires sur la violence à l'égard des femmes. Le Gouvernement entend-il par exemple publier des lois qui s'appliqueraient à tous les secteurs de la société, interdiraient toutes les formes de violence à l'égard des femmes et puniraient les attaques sexuelles contre les femmes et les enfants? Notant que les travaux des ONG indiennes ne se traduisent pas par des projets de lois et des mesures prises par le Gouvernement, elle s'est interrogée sur leur participation réelle aux politiques en faveur de la femme. Mme Cartwright a par ailleurs demandé si le Gouvernement indien entend adopter des lois assurant des droits égaux aux femmes en matière de droits fonciers. Elle a aussi estimé que des dispositions légales garantissant le partage équitable des biens en cas de dissolution du mariage est nécessaire.
Pour ce qui est du droit pénal, Mme CHIKAKO TAYA, experte du Japon, a estimé que la Loi sur les preuves, laissant à la défense du violeur la possibilité de présenter des éléments indiquant que la victime menait une vie "immorale", est clairement discriminatoire à l'égard des femmes. A son avis, l'amendement envisagé et prévoyant simplement d'aggraver les peines appliquées au violeur est insuffisant.
Quel est le statut dont jouit la Convention dans le système législatif indien, s'est pour sa part interrogée Mme ROSARIO MANALO, experte des Philippines. Elle a estimé que les divers projets législatifs évoqués dans le rapport devraient être assortis d'un calendrier d'adoption précis. L'experte a aussi souhaité savoir s'il existe des mécanismes permettant de mesurer l'efficacité et l'adéquation des programmes visant à assurer l'égalité entre les sexes.
Poursuivant sur l'article 2 de la Convention, Mme HANNA SCHOPP- SCHILLING, experte de l'Allemagne, a estimé que le rapport ne permet pas de saisir véritablement la relation entre le Gouvernement central et les autorités des Etats, notamment quant à la promulgation des lois et l'affectation des ressources. Le Gouvernement national veille-t-il à ce que les lois nationales soient bien appliquées au niveau des Etats? Elle a aussi estimé que le rapport manque d'informations désagrégées par Etat, par territoire et par système de caste. Se félicitant de la loi sur la prévention des atrocités tribales et ethniques, qui prévoit notamment des dommages pour les victimes, elle a demandé dans quelle mesure ce texte est véritablement appliqué.
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