En cours au Siège de l'ONU

CS/1134

PRESIDANT LE CONSEIL DE SECURITE, LE VICE-PRESIDENT AL GORE ANNONCE QUE LES ETATS-UNIS CONSACRERONT 325 MILLIONS DE DOLLARS A LA LUTTE CONTRE LE SIDA

10 janvier 2000


Communiqué de Presse
CS/1134


PRESIDANT LE CONSEIL DE SECURITE, LE VICE-PRESIDENT AL GORE ANNONCE QUE LES ETATS-UNIS CONSACRERONT 325 MILLIONS DE DOLLARS A LA LUTTE CONTRE LE SIDA

20000110

Le Conseil consacrera ce mois de janvier 2000 essentiellement à l'Afrique

Le Conseil de sécurité a tenu aujourd'hui sous la présidence de M. Albert Gore, Vice-Président des Etats-Unis dont le pays assume la présidence du Conseil en ce mois de janvier, sa première séance formelle de l'année 2000, consacrée à l'impact du sida sur la paix et la sécurité en Afrique. C'était la première fois de son histoire que le Conseil de sécurité portait publiquement son attention sur une question de santé. A cette occasion, le Vice- Président Al Gore, a annoncé que les Etats-Unis allaient consacrer, après adoption par le Congrès américain du budget 2001 proposé par l'Administration, 325 millions de dollars à la lutte contre le sida en Afrique et dans le reste du monde en développement. "En Afrique subsaharienne, le sida n'est pas seulement une crise humanitaire. C'est une crise de sécurité", a souligné le Vice-Président. De son côté, le Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, a souligné que dans le cadre du Mois de l'Afrique, il était tout à fait indiqué que le Conseil consacre sa première séance au problème du sida.

Selon les estimations du Programme ONU-sida, le sida touche, 23,3 millions de personnes sur le continent africain, soit 70% du total des cas signalés dans le monde et l'espérance de vie des individus, qui en Afrique australe était de 59 ans au début des années 90, tombera à 45 ans en l'an 2005. Si en 1998, 200 000 personnes ont été victimes des conflits qui déchirent le continent, ce nombre est largement dépassé par le nombre des victimes du sida, qui a été de 2,2 millions de personnes la même année. Continent lourdement touché par une longue crise économique, l'Afrique voit ainsi, dans certaines de ses régions, ses élites intellectuelles, ses ressources humaines et ses forces de production les plus qualifiées décimées par le sida, situation qui met en danger les espoirs de relance et les équilibres sociaux. Le sida aggrave ainsi le sous-développement qui de son côté aggrave l'épidémie.

(à suivre 1a) - 1a - CS/1134 10 janvier 2000

Pour le Président de la Banque mondiale et l'Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le développement économique et la lutte contre la pauvreté sont essentiels à une mise en oeuvre efficace des stratégies de lutte contre le sida dans les régions affectées.

De son côté, M. Peter Piot, Directeur exécutif du programme ONU-sida, s'est engagé à la demande des Membres du Conseil, à mobiliser tous les acteurs internationaux et les organes opérationnels de l'ONU autour d'un plan d'intensification des actions visant à trouver des solutions à l'épidémie du sida en Afrique. Le programme ONU-sida et la Présidence du Conseil travailleront en collaboration pour un suivi étroit de la réunion d'aujourd'hui et en tiendront les Etats Membres informés.

Les ministres de la santé de la Namibie, de l'Ouganda, du Zimbabwe ainsi que le Secrétaire adjoint à la santé des Etats- Unis ont tous insisté sur le renforcement de la coopération internationale et des partenariats, qui peuvent seuls permettre de trouver des réponses collectives à une pandémie qui ne connaît pas les frontières.

Outre tous ses membres, le Conseil de sécurité a entendu les représentants des pays suivants: Algérie (au nom de l'Organisation de l'unité africaine), Portugal (au nom de l'Union européenne et des pays associés), Cap-Vert (au nom du Groupe africain), Norvège, Afrique du Sud, Japon, Brésil, République de Corée, Jamahiriya arabe libyenne, Djibouti, Mongolie, Indonésie, Cuba, Italie, Nouvelle-Zélande, Zambie, Chypre, Nigéria, Australie, Ethiopie, République démocratique du Congo et Sénégal.

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LES INCIDENCES DU SIDA A L'ÉGARD DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ EN AFRIQUE

Allocution d'ouverture du Vice-Président des Etats-Unis

M. ALBERT GORE, a déclaré que la tendance à croire à la menace à la sécurité en termes de guerre et de paix tend à disparaître. L'essence même de l'ordre du jour en matière de sécurité est de protéger des vies humaines et nous savons maintenant que le nombre de personnes qui sont mortes du sida au cours de la première décennie du XXIème siècle équivaudra à celui des personnes qui ont péri au cours de toutes les guerres qui ont marqué le XXème siècle. Lorsque dix personnes en Afrique subsaharienne sont infectées chaque minute, lorsque 11 millions d'enfants sont déjà orphelins et de nombreux d'entre eux doivent être élevés par d'autres enfants, lorsqu'une seule maladie menace tout, en passant de la stabilité économique au maintien de la paix, on est confronté clairement à la menace à la sécurité de manière considérable. Cette réunion historique ne reconnaît pas seulement la menace réelle et actuel à la sécurité mondiale que pose la pandémie du sida, mais elle consacrera un mois aux défis particuliers auxquels le continent africain continue de faire face. Le fait important que nous ouvrons nos travaux par l'examen de la questions relative à la pandémie du sida atteste de l'importance que nous accordons à la question. Il crée un précédent pour les préoccupations et les actions du Conseil de sécurité sur un ordre du jour plus élargi en matière de sécurité. La présente réunion exige de nous que l'on perçoive le Conseil de sécurité à travers un prisme nouveau et plus étendu, ce qui nous permettra de réfléchir sur une base nouvelle et plus exhaustive.

Au cours du siècle dernier, le Conseil de sécurité a traité de questions traditionnelles en matière de sécurité, sur la base d'efforts communs pour résister à l'agression et mettre fin aux conflits armés. On a connu des guerres entre Etats et des violences internes à l'échelle nationale pour des raisons religieuses ou de supériorité raciale, la course au pouvoir, la domination du plus fort au détriment du plus faible, la pauvreté qui met fin aux espoirs et aux attentes. Toutefois, alors que les vieilles menaces auxquelles notre communauté mondiale est encore confrontée n'ont pas disparu, il existe de nouvelles situations - de nouvelles forces émergentes défieront l'ordre mondial et nous obligeront à redéfinir les questions de paix et de guerre. Au seuil de l'an 2000, ce n'est pas le changement de date au calendrier qui importe. Ce qui importe est que, dans cette transition symbolique vers une nouvelle ère, il est temps de changer la nature de la manière de vivre sur cette planète. An partir de là, nous devons forger et suivre un nouvel agenda pour la sécurité mondiale, qui comprendra notamment le défi écologique mondial, le défi mondial de la lutte contre les stupéfiants et la corruption, le défi mondial de la terreur et les nouvelles pandémies. Notre nouvel agenda pour la sécurité devra être dressé avec détermination et des ressources appropriées aussi que l'utilisation créatrice de nouveaux instruments à la disposition du monde devront permettre de nous rapprocher pour garantir le succès de nos efforts communs.

Ces instruments sont notamment l'Internet et l'infrastructure d'information mondiale émergentes qui, si ils sont utilisés de manière intelligente, nous permettront d'acquérir des connaissances approfondies et de renforcer la coopération entre les Etats, les ONG et les populations à tous les niveaux. Notre tâche ne vise pas seulement à reconnaître et à confronter ces défis, mais à réaliser nos idéaux et à oeuvrer ensemble pour faire de nos rêves une réalité dans la vie de nos enfants. Pour réussir, M. Gore a estimé que, comme tous les milliards de personnes vivant sur la planète, il faudra créer un monde où la foi des peuples en leur propre bonne gouvernance permette de penser que tout peut être partagé dans un cercle encore plus étendu de dignité humaine et d'auto-suffisance. Un monde de liberté dans lequel la libre entreprise est favorisée. Un monde où le libre échange d'idées et d'informations ainsi qu'un accès plus facile à l'éducation, garantissent le respect de nos libertés les plus fondamentales. Un monde où les parents sont libres de choisir la taille de leurs familles avec la conviction que les enfants qu'ils ont mis au monde survivront pour devenir des adultes en bonne santé, qui auront leurs chances économiques dans des communautés prospères et pacifiques.

Si nous réussissons à répondre à ce nouvel agenda pour la sécurité, nous devons reconnaître qu'en raison de notre croissance démographique rapide et du pouvoir historiquement sans précédent des nouvelles technologies à notre disposition, les erreurs qui étaient autrefois tolérables peuvent avoir maintenant des conséquences multidimensionnelles. En tant que communauté mondiale, nous devons montrer à nos citoyens que nous sommes suffisamment raisonnables pour contrôler ce que nous avons savamment créé. Nous devons comprendre que l'ancienne concept de la sécurité mondiale - qui était essentiellement axé sur les armées, les idéologies et la géopolitique - doit être élargi. Nous devons montrer que nous ne pouvons pas seulement contenir l'agression, prévenir la guerre et régler des conflits, mais que nous pouvons oeuvrer en étroite coopération pour anticiper et faire face à un nouveau siècle avec de nouveaux impératifs mondiaux. L'esprit humain a créé ce moment. Maintenant, la volonté humaine - non pas individuelle mais collective - doit en avoir le contrôle. L'avenir n'est pas quelque chose que l'on peut prédire. L'avenir est quelque chose que l'on peut réaliser. Pour nous-mêmes. Ensemble. Il nous incombe de faire des progrès en ayant confiance dans nos principes, nos prévisions et notre humanité commune. Comme le disait le poète espagnol Antonio Machado, "Promeneur, il n'y a pas de chemin, nous établissons ce chemin à mesure que nous marchons". M. Gore s'est déclaré convaincu qu'il y a un grand espoir dans cette réunion historique. Nous vivons dans une ère nouvelle. Nous sommes confrontés à des responsabilités nouvelles et plus importantes. Nous devrons nous acquitter de ces obligations ou faisons de sorte que ces obligations ne deviennent pas un fardeau.

Déclaration du Secrétaire général

M. KOFI ANNAN, a noté à l'aube du nouveau millénaire que nous avons des raisons de nous estimer heureux parce que la paix règne presque partout dans le monde, mais toutefois nous sommes confrontés à de nouveaux problèmes — ou à des problèmes de longue date mais qui prennent aujourd'hui des formes nouvelles et alarmantes. Il a cité entre autres, la dégradation de l'environnement, les conflits ethniques, les erreurs ou carences dans la gestion des affaires publiques, les violations généralisées des droits de l'homme; l'analphabétisme, les problèmes de santé, l'inégalité croissante à la fois entre les Etats et entre les citoyens d'un même Etat; et surtout la mise à l'écart de tant de peuples, près de la moitié de l'humanité, qui loin de bénéficier des avantages de la mondialisation, sont condamnés à stagner dans une inexorable pauvreté. Il a fait remarquer que l'Afrique est la plus mal lotie de toutes les régions puisque sur les 48 pays les moins avancés que compte la planète, 33 se trouvent en Afrique. Sur les deux douzaines de conflits, ou plus, qui font rage dans le monde, près de la moitié ont pour théâtre le continent africain. Quinze pays de l'Afrique subsaharienne sont actuellement aux prises avec des situations d'urgence alimentaire exceptionnelles et 90% des 11 millions d'orphelins qu'a faits à ce jour la pandémie de sida sont des enfants africains, a noté M. Annan.

Ces chiffres sont éloquents et justifient la décision des Etats-Unis de faire de ce premier mois de l'ère nouvelle un "mois de l'Afrique". Et, il est tout à fait indiqué que le Conseil de sécurité consacre sa première séance au problème du sida, a noté le Secrétaire général. Conscient des objections exprimées selon lesquelles il appartient à d'autres organismes des Nations Unies de se pencher sur la question, le Secrétaire général a répondu qu'il serait regrettable que le Conseil consacre un mois à l'Afrique sans aborder ce que l'Ambassadeur Holbrooke, Président actuel du Conseil de sécurité, a appelé "le problème numéro un" de l'Afrique d'aujourd'hui. Nulle part ailleurs, a poursuivi le Secrétaire général, le sida ne fait peser sur la stabilité économique, sociale et politique une menace aussi grave qu'en Afrique australe et orientale. L'impact du sida sur cette région est à différents égards, bien plus grave que celui de la guerre. L'année dernière, le sida a fait environ 10 fois plus de morts en Afrique que les conflits armés.

En submergeant les services sanitaires du continent, en créant des millions d'orphelins, en décimant agents sanitaires et enseignants, le sida cause des crises sociales et économiques qui, à leur tour, menacent la stabilité politique. Il menace également la bonne gouvernance du fait des taux de mortalité élevés parmi les élites, qu'elles appartiennent au secteur public ou privé, a indiqué le Secrétaire général. Dans des sociétés déjà instables, a-t-il affirmé, ce cocktail de catastrophes est une recette infaillible pour d'autres conflits. Et ces conflits, à leur tour, sont une pépinière de nouvelles infections.

L'effondrement des services sanitaires et éducationnels, l'obstruction de l'assistance humanitaire et le déplacement de populations entières sont autant de facteurs qui contribuent à l'expansion de plus en plus rapide de l'épidémie. Le VIH/sida n'est pas seulement un problème africain. Il s'agit d'un problème de portée mondiale et il doit être reconnu en tant que tel. Au titre des obligations de la communauté internationale, la lutte contre le sida en Afrique doit être la priorité des priorités, une tâche qui doit faire partie intégrante de notre oeuvre en faveur de la paix et de la sécurité sur ce continent. Comme la plupart des gouvernements africains l'ont maintenant compris, la première bataille qu'il leur faut gagner dans la guerre contre le sida est celle qui consiste à abattre le mur de silence et à dissiper les stigmates qui entourent la maladie.

Il y a un mois, a noté le Secrétaire général, le Siège de l'Organisation des Nations Unies a accueilli la première réunion de haut niveau de représentants de gouvernements africains et d'institutions des Nations Unies qui participent directement à la lutte contre le sida, en présence de gouvernements donateurs, de sociétés privées et d'ONG. Le Secrétaire général a exprimé, dans ce contexte, son "immense plaisir" d'accueillir le Conseil en tant que partenaire supplémentaire dont le rôle est d'empêcher les conflits de contribuer à la propagation du sida et d'entraver les efforts que déploient les autres partenaires pour maîtriser l'épidémie.

Déclarations

M. ALBERT GORE (Vice-Président des Etats-Unis) a déclaré que le problème du sida en Afrique n'était pas seulement celui des peuples de ce continent, mais également celui des dirigeants et des citoyens de toute la planète. Ce sont là les mots de M. Thabo Mbeki, Président de l'Afrique du Sud, et nous pensons que le monde entier doit les reprendre et les adopter, a dit M. Al Gore. Le sida ne connaît en effet pas de frontières, car c'est un agresseur mondial auquel il faut donc faire face de manière mondiale. Plus de la moitié des pays d'Afrique vivent désormais sous des régimes et des gouvernements élus, et le continent a fait des efforts importants en matière de réforme économique et d'assainissement de ses structures de production et de gestion. Mais ces acquis sont mis en danger par la propagation de la pandémie du sida, qui affaiblit la main-d'oeuvre, les forces de l'ordre et du maintien de la paix et les populations. Les Etats-Unis sont conscients qu'il faut faire davantage pour lutter contre ce mal. Nous devons faire plus pour éliminer les préjugés qui, sur le continent, rendent difficile la mise en place de stratégies viables de lutte contre la maladie. Mais il y a cependant des exemples qui prouvent que l'on peut réussir et l'Ouganda en est un. Il prouve que l'on peut lutter efficacement contre le sida, et d'abord par la prévention. Nous inscrivons aujourd'hui le sida comme objet de souci et de débat public, et nous devons en parler avec compassion et sans honte. Nous devons faire beaucoup plus, pour fournir les soins de santé dont ont besoin les personnes affectées.

Nous savons que nous pouvons donner aux mères et aux enfants atteints un espoir de vivre en favorisant l'accès aux méthodes médicales actuelles. Le Président Clinton s'est ému de la situation des pays très pauvres et a demandé que nous prenions des initiatives en vue de les aider à lutter efficacement contre cette pandémie. C'est pourquoi nous proposerons au Congrès le mois prochain de voter un budget de 300 millions de dollars pour la lutte contre le sida dans le monde, soit une hausse de 100 millions de dollars par rapport à l'an dernier. Nous affecterons aussi 50 millions de dollars aux organes opérationnels de l'ONU pour assurer les efforts de vaccination destinés aux enfants dans les pays pauvres et, pour la première fois, notre budget comprendra aussi un volet destiné à nos structures militaires pour qu'elles participent à des opérations en faveur de la santé publique dans les pays défavorisés. De plus, dans la perspective de l'initiative prise dans le cadre du G7 en faveur de l'allégement de la dette des pays pauvres très endettés, nous encourageons nos partenaires à veiller à ce que les mesures prises soient effectivement favorables aux opérations destinées à l'amélioration de la santé des populations. Le sida est la menace majeure que le monde rencontre à notre époque, et nous aimerions citer ici un poète africain qui disait que nous devons savoir que la vie est une promesse, et que cette promesse c'est nous. Nous devons donc devenir cette promesse de vie et d'espoir, et reconnaître notre devoir moral pour que, quand on parlera aux générations futures de l'histoire du sida, ce soit finalement en termes de victoire.

M. JAMES WOLFENSOHN, Président de la Banque mondiale, a estimé que le sida ne peut plus être considéré uniquement comme une question de santé ou une question sociale. A travers toute l'Afrique, le sida est en train de faire reculer le développement et constitue le plus grand défi à la paix et à la stabilité des sociétés africaines. On fait face à une crise majeure de développement et plus encore, à une crise de sécurité. Sans espoir économique et social, il ne peut y avoir la paix, et le sida sape ces espoirs. Il faut donc briser le cercle vicieux du sida, de la pauvreté et des conflits. Si le sida menace la stabilité, la guerre favorise le sida. La moitié des pays africains qui enregistrent les plus hauts taux de prévalence du sida connaissent, en effet, une situation de conflit. Le sida se propage par les soldats, lorsque les populations se déplacent, parmi les réfugiés. Pour vaincre le sida, il faut d'abord être convaincu que nous pouvons gagner. Gagner cette lutte exige un monde sans pauvreté. Un autre impératif est de bâtir sur la dignité de l'individu et la capacité des communautés. Trop souvent, seuls le silence, la honte et le rejet répondent au sida, a souligné M. Wolfensohn. La communauté internationale doit, pour sa part, oeuvrer de concert avec un seul objectif en tête: gagner. Chaque institution doit apporter le meilleur de ses forces à cette lutte.

De l'avis du Président de la Banque mondiale, le programme ONU-sida, dont la Banque mondiale est partenaire depuis le début, a été une innovation majeure. Le partenariat contre le virus VIH/sida en Afrique, lancé le mois dernier, constitue un pas supplémentaire. M. Wolfensohn a assuré que la Banque mondiale qui travaille en partenariat avec de nombreux gouvernements africains de manière novatrice, s'engageait à marcher avec les pays africains sur ce long chemin. La Banque est aussi prête à travailler avec le Conseil de sécurité sur un large éventail de questions affectant la sécurité humaine. Il a préconisé la recherche de moyens novateurs de rendre les soins et les traitements disponibles, y compris les médicaments, suggérant l'élaboration de nouvelles stratégies avec le secteur privé dans lesquelles chacun serait gagnant. Il faut aussi parler ouvertement de la sexualité et des inégalités entre les sexes, ainsi que du viol; mettre à disposition davantage de ressources et donner la priorité à la prévention. Dans cet effort, les Africains doivent jouer le rôle de chefs de file, a-t-il dit.

Il y a trois mois, la Banque mondiale a lancé à Lusaka une nouvelle stratégie contre le VIH/sida en Afrique. La Banque a placé le sida au premier rang de ses priorités en Afrique et s'engage dans un effort sans précédent, en partenariat avec ONU- sida, à soutenir les pays et les communautés dans leur lutte contre le fléau. La Banque mondiale prendra désormais la question du sida en considération dans tout ce qu'elle fait en Afrique et y allouera davantage de fonds. Si l'on fournit les ressources et un environnement favorable, les solutions viendront des communautés elles-mêmes, a estimé M. Wolfensohn. La Banque estime que le coût total de la prévention en Afrique est de l'ordre de 1 à 2,3 milliards de dollars. Or, aujourd'hui, l'Afrique ne reçoit que 160 millions de dollars d'aide publique pour la lutte contre le VIH/sida. M. Wolfensohn a indiqué qu'il avait demandé à tous les bureaux de la Banque en Afrique de fournir aux gouvernements le maximum de fonds disponibles pour créer et mettre en oeuvre des programmes de lutte contre le sida. La question du sida sera, en outre, discutée lors de la réunion du Comité du développement en avril prochain. Le Président de la Banque mondiale a appelé en conclusion à bâtir une coalition pour le changement, à se mobiliser pour la guerre contre le sida, une guerre pour l'avenir de l'Afrique et le nôtre. Le temps est compté. Si le coût de l'action est relativement faible, celui de l'inaction sera grand, a-t-il dit.

M. MARK MALLOCH BROWN (Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement-PNUD) a déclaré que le VIH/sida affecte 23,3 millions de personnes en Afrique, sur les 36 millions de personnes infectées dans le monde. L'Afrique est pratiquement en état de siège, a poursuivi M. Malloch-Brown. Plus de personnes y sont tuées par la maladie aujourd'hui qu'au cours des guerres mondiales que la planète a connues, et c'est un nouveau sujet alarmant de sécurité internationale. En réduisant dramatiquement les forces vives de tous les secteurs de la société, le sida mine toute perspective de croissance économique, et entraînera une réduction d'un tiers du produit national brut (PNB) des pays les plus touchés dans les 20 prochaines années.

La pandémie exacerbe les difficultés des gouvernements à décider l'allocation des ressources publiques déjà faibles. C'est là le drame actuel de l'Afrique, qui en outre, perd une part importante de son capital humain. Par exemple, on estime que le nombre de médecins et d'instituteurs actifs sera réduit de plus d'un tiers dans les pays les plus gravement touchés. Les comportements sociaux sur le continent requièrent des changements drastiques. Des initiatives doivent aussi être prises pour modifier les réalités africaines, que sont l'augmentation du nombre de travailleurs migrants, et l'inégalité entre les sexes, qui rend difficile le contrôle par les femmes de leur propre sexualité et qui conduit à une forte prévalence du VIH chez les jeunes filles.

Des actions doivent être prises par la communauté internationale en vue d'aider à changer les comportements, actions auxquelles devront participer les leaders d'opinion et les dirigeants du continent africain eux-mêmes. Il faut aussi promouvoir la coopération entre Etats pour généraliser les pratiques adoptées par l'Ouganda. Ensuite, il faudrait résoudre la question des ressources, sans lesquelles des actions en profondeur ne sont pas possibles. Les Etats-Unis, qui comptent 40 000 personnes nouvellement infectées par an, consacrent 880 millions de dollars en argent public et 10 milliards globalement pour promouvoir la prévention, les soins, et la recherche, alors que l'Afrique, où 4 millions de nouveaux cas se déclarent chaque année, ne reçoit que 165 millions de dollars en tout chaque année. Une réponse coordonnée doit aussi être apportée à la pandémie, et dans ce cadre, le PNUD préside en ce moment le partenariat créé avec l'ONU-sida, le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), l'Organisation mondiale de la santé (OMS), et la Banque mondiale. Ensemble, a dit M. Malloch- Brown, nous devons faire plus avec le soutien du secteur privé et des organisations non gouvernementales pour arriver à des résultats satisfaisants aux niveaux nationaux et mondial. Enfin, nous pensons que malgré leur coût, les traitements de la maladie ne doivent pas seulement être réservés aux seuls pays riches, et que le défi contre le sida doit être lié à la lutte contre la pauvreté et pour le développement.

M. PETER PIOT, Directeur exécutif d'ONU-sida, a observé que d'une région à l'autre en Afrique, le VIH affaiblit la stabilité des familles aussi bien des communautés des riches que des pauvres qu'ils soient éduqués ou non. Pour la plupart d'entre nous, il est presque impossible de déterminer l'ampleur de la pandémie du sida. On ne peut sous-estimer les incidences à long terme des tragédies personnelles sur le développement et la stabilité de l'Afrique. Ces chocs démographiques s'accompagnent de déséquilibres économiques et sociaux, dont la véritable magnitude ne peut être établie. Le VIH/sida a coûté la vie de 2,2 millions de personnes en 1998, soit dix fois plus que le nombre des victimes des conflits sur le continent. La guerre est un instrument du sida et le viol est un instrument de la guerre. Les conflits et les déplacements de personnes qui en découlent, qu'ils soient soldats ou réfugiés, alimentent l'épidémie.

Une étude montre que 17% des femmes violées sont devenues séro- positives. Les réfugiés, en particulier les femmes, sont plus vulnérables à l'infection du VIH. Une autre étude révèle que les femmes sont six fois plus infectées dans les camps de réfugiés que la population extérieure. De l'avis de M. Piot, un personnel humanitaire, les enseignants, le personnel de santé et les forces militaires et de police qui sont bien formés en matière de prévention du VIH et un changement de comportement peuvent contribuer considérablement à prévenir la pandémie du sida dans la mesure où cela constitue une de leurs priorités.

En Ouganda, le taux des nouvelles infections est en déclin: le taux d'infection chez les femmes enceintes dans les villes est réduit de moitié. Au Sénégal, les infections causés par le VIH ont diminué de manière considérable grâce à des campagnes d'information et de prévention massives. Deux décennies d'expérience ont identifié les éléments essentiels d'une stratégie efficace. Ces éléments sont les suivants: la visibilité et l'ouverture, la réponse à la vulnérabilité par des politiques sociales; la reconnaissance de la synergie entre la prévention et les soins; des interventions ciblées en faveur des plus vulnérables; l'appui d'une forte participation de la communauté aux efforts de lutte et des mesures axées sur les jeunes qui représentent l'avenir du continent. Sur le plan international, on note des progrès notables. En juin 1999, la communauté internationale a fait face à la pandémie du sida en négociant une nouvelle stratégie internationale pour le développement. La session extraordinaire de l'Assemblée générale a établi une stratégie pour 2005 visant à réduire les nouvelles infections de 25% parmi les jeunes de 15 à 24 ans dans les 25 pays les plus affectés du monde et dont 24 se trouvent en Afrique. Au cours de l'année dernière, de nombreux dirigeants africains ont rompu le silence et le stigma de l'épidémie. Le défi est extraordinaire. En 1997, la communauté internationale n'a mobilisé que 150 millions de dollars pour la prévention du sida en faveur des pays les plus affectés. Pour garantir et étendre le succès des efforts en Ouganda et au Sénégal, il est nécessaire de mobiliser entre 1 et 3 milliards de dollars par an. L'année dernière, les gouvernements africains, les Nations Unies et les autres partenaires se sont réunis pour établir un nouveau partenariat international contre le sida en Afrique. Que doit faire chaque membre de ce partenariat. Les gouvernements africains doivent s'engager à créer un climat propice pour une action efficace, être déterminés à protéger et à promouvoir les droits de l'homme afin que ce stigma puisse être réduit, et assurer par le biais de la décentralisation des actions locales. Pour sa part, l'ONU et, en particulier, les coparrains de l'ONU-sida - OMS, UNICEF, UNESCO, FNUAP, PNUD et PNUCIP, ainsi que la Banque mondiale - doivent mobiliser des ressources supplémentaires et réaffecter les ressources existantes pour faire face à la pandémie du sida, et faire preuve d'une action concertée pour appuyer les gouvernements et la société civile. Il est en outre nécessaire de continuer à faire participer la population aux programmes de prévention contre le sida et développer des méthodes de prévention contrôlées par les femmes et renforcer la participation du secteur privé aux efforts de prévention.

Les donateurs doivent agir de manière concertée pour oeuvrer ensemble au niveau des pays dans le cadre des plans stratégiques nationaux. Le secteur privé, quant à lui, doit oeuvrer de concert avec les gouvernements pour équilibrer les questions difficiles des droits de propriété intellectuelle avec la nécessité urgente de développer des produits de survie à des prix raisonnables. Les ONG doivent renforcer les activités. M. Piot a souligné qu'il est indispensable de développer et de fabriquer des vaccins qui soient accessibles à tous ainsi que les autres technologies requises pour la prévention des infections du VIH. Il faut faire tout ce qui est dans notre pouvoir pour appliquer ce qui peut réussir, pour réduire la vulnérabilité, pour prévenir les infections du VIH par un changement de comportement et pour appuyer la mise en oeuvre à grande échelle des efforts visant à assurer des soins et l'accès aux médicaments et services nécessaires pour prolonger et améliorer la vie.

Mme LIBERTINE AMATHILA (Ministre de la santé et des services sociaux de la Namibie) a déclaré que tout ce qui pose une menace au développement économique et social de l'Afrique est aussi une menace à sa stabilité politique et à la paix, et l'expansion du sida est une des menaces les plus graves auxquelles doit faire face le continent. L'Afrique n'a pas les structures et les moyens de faire face à cette pandémie. Plus de 21 millions de personnes sont aujourd'hui touchées en Afrique, ce qui affecte sérieusement la croissance économique et sociale du continent. Les conflits qui sévissent sur le continent africain contribuent à l'expansion de la maladie, la violence sexuelle étant courante dans les zones en conflit, où les femmes en situation de réfugiées sont souvent victimes de viols systématiques. La Ministre a rappelé que 250 000 enfants-soldats sexuellement actifs, et certains porteurs du virus, prennent part aux différents conflits que connaît le monde et notamment le continent africain.

La Namibie, a poursuivi Mme Amathila, pense que l'examen par le Conseil de la question du sida peut contribuer efficacement à minimiser l'impact de ce mal sur le continent. Nous espérons que le Conseil sera aussi prêt à assister les gouvernements dans les efforts qu'ils déploient pour faire face à la pandémie. Nous proposons à cet égard que toute force de maintien de la paix soit aussi formée à la prévention contre le sida et sache elle-même s'en préserver. Cette formation pourrait aussi être mise en valeur lors de l'application des mesures de retour à la vie civile d'ex-combattants, et la réintégration des enfants-soldats pourrait aussi en bénéficier. La tragédie que représente le sida en Afrique requiert que des ressources et des moyens adéquats soient mis à la dispositions des initiatives de prévention et de lutte contre la maladie, car il est anormal que l'Afrique, dont les besoins financiers en la matière sont de 2,5 milliards de dollars, n'en reçoive que 165 millions. Nous appelons donc la communauté internationale à assister notre continent dans le lancement de mesures de prévention, et pour

l'acquisition des médicaments qui, s'ils existent, sont cependant inabordables pour les pauvres. Enfin, la Namibie souhaiterait que la Journée mondiale contre le sida soit marquée de manière plus visible, et qu'elle mette chaque année l'accent sur un seul thème, par exemple celui de la prévention.

M. ANWARUL KARIM CHOWDHURY (Bangladesh) a déclaré que le Bangladesh est heureux que le Conseil, sous la présidence des Etats-Unis, reconnaisse que la sécurité internationale doit désormais être pensée sous une forme plus large incluant de nouveaux paramètres comme celui de la pandémie du sida. La présence de M. Albert Gore, Vice-Président des Etats-Unis est le signe de l'intérêt que son pays attache aux Nations Unies et à l'Afrique, a poursuivi M. Chowdhury qui a dit que parmi les 33 millions de personnes affectées par le sida dans le monde, deux tiers se trouvent sur le continent africain, et parmi les 2,6 millions de morts causées par la maladie au cours de l'année écoulée, la majeure partie se trouvait sur le continent africain.

M. ALAIN DEJAMMET (France) a déclaré que l'épidémie du sida constitue désormais en Afrique une crise majeure du développement. Elle représente un risque majeur pour la stabilité et la sécurité des pays et régions concernés. La pauvreté et l'insécurité sont intimement liées. De la même manière, la pauvreté aggrave l'épidémie du sida qui a son tour aggrave le sous-développement. Elle frappe, en effet, en priorité les secteurs les plus actifs des populations, notamment les jeunes, et provoque ainsi une véritable saignée parmi la tranche de population sur laquelle repose en grande partie l'avenir des pays. Le sida crée des générations d'orphelins, favorise un processus de déstructuration familiale et sociale, réduit à néant les progrès réalisés sur le plan social depuis plusieurs décennies dans les pays les plus touchés. Si nous n'y prenons garde aujourd'hui, une crise sanitaire, économique et politique durable prendra le pas en Afrique sur les stratégies de développement durable que nous nous efforçons de promouvoir, a fait remarquer M. Dejammet.

Afin de prévenir et de combattre les effets de cette crise sanitaire et de développement, la France - premier bailleur de fonds de l'Afrique - a apporté depuis le milieu des années 80 son aide à la lutte contre le VIH/sida. Au cours de la dernière décennie, 600 millions de francs ont été mobilisés au titre du seul Fonds d'aide et de coopération, au travers de 60 projets, axés en priorité sur la prévention, la sécurité transfusionnelle, la prise en charge médicale, l'appui aux associations intervenant dans ce domaine ainsi que la recherche appliquée. A cet effort s'ajoutent les contributions françaises aux agences multilatérales, les contributions complémentaires d'intervention des postes diplomatiques français ainsi que les apports liés à la coopération décentralisée. Au total, c'est environ 100 millions de francs que la France consacre chaque année à la lutte contre le VIH/sida dans les pays en développement. La France soutient l'initiative d'ONU-sida sur le partenariat international contre le sida en Afrique à laquelle elle participe activement.

C'est également dans cet esprit que la France a souhaité la mise en place d'un fonds international pour une solidarité thérapeutique destiné à favoriser un meilleur accès des populations des pays en voie de développement au traitement contre le sida, y compris aux antiretroviraux, et bénéficiant de contributions publiques et privées. Une telle initiative doit contribuer, outre son impact immédiat sur ceux qui en bénéficient, à redonner espoir aux populations des pays du sud affectés par la maladie.

En effet, la question de l'accès au traitement dans les pays en développement ne peut être éludée lorsque 23 millions d'Africains sont d'ores et déjà infectés. Le sida accentue l'écart immense existant entre les pays riches et les pays les plus démunis, créant des inégalités difficilement supportables lorsqu'elles touchent le droit essentiel, à savoir le droit à la vie. Il faut que l'industrie pharmaceutique puisse proposer plus systématiquement à ces pays des conditions financières adaptées moyennant l'obtention de garanties sur l'absence d'exportation parallèle vers les pays développés. A cet égard, les autorités françaises estiment que les Nations Unies pourraient utilement organiser une concertation sur cette question, réunissant les fabricants, les pays donateurs et les pays bénéficiaires. De même, il serait très opportun que puisse être dressé, sous l'égide d'ONU-sida, un fichier de l'ensemble des actions bilatérales et multilatérales entreprises en matière de lutte contre le VIH/sida, afin de s'assurer de la cohérence et de la complémentarité géographique et médico-sociale de ces actions. En outre, l'ensemble des donateurs pourrait s'engager à examiner chacune des actions de coopération au regard du VIH/sida et à rechercher pour chacune d'elles comment diminuer l'impact de l'épidémie et renforcer la prévention et l'accès aux soins.

M. CRISPS KIYONGA (Ministre de la santé de l'Ouganda) a déclaré que son pays ayant souvent été cité comme un exemple de prévention et de lutte contre le sida en Afrique subsaharienne, il faut cependant préciser que le manque de moyens et de ressources adéquats continue de poser un obstacle à la propagation des politiques et des mesures initiées par le gouvernement ougandais. L'épidémie du sida a touché notre pays depuis le début des années 80, a précisé le Ministre, et selon les données en notre possession, la population urbaine est beaucoup plus touchée que la population rurale. Les femmes et les jeunes filles sont plus affectées que la population masculine, le taux de prévalence étant plus élevé dans ces groupes, et le sida a contribué à la réapparition de la tuberculose, alors que ce mal était sous contrôle avant l'émergence de la pandémie. Le sida a, d'autre part, fait beaucoup d'orphelins, et il touche les couches à la fois les plus productives et souvent les plus éduquées de la société.

Le programme sectoriel de contrôle du sida a été mis en place aussi bien dans les forces armées qu'au sein de la société civile et de la jeunesse, avec l'aide des ONG, et le gouvernement ougandais a utilisé les médias publics de masse pour appuyer les campagnes de prévention. Concernant le traitement, seul un petit nombre d'Ougandais seulement a pu bénéficier des traitements par produits pharmaceutiques rétroviraux, à cause du coût de ces médications. L'Ouganda, dont les moyens sont limités, ne pourrait se permettre d'étendre ces traitements à l'ensemble des personnes infectées. Des efforts sont aussi déployés pour renforcer et appliquer toutes les recherches qui se font dans les laboratoires aussi bien nationaux qu'étrangers quand cela est possible. 12 500 enfants pourraient naître chaque année sans être infectés par le virus si des moyens adéquats étaient mis à la disposition des formations médicales. Nous pensons avoir remporté des succès notables en ce qui concerne le changement de comportement social des personnes, et en particulier des hommes, en Ouganda. La monogamie et l'usage des préservatifs sont désormais entrés dans les moeurs, et parler de la maladie et de ses conséquences n'est plus un sujet tabou. Nous avons assisté à un déclin du taux de prévalence dans notre pays et souhaitons continuer sur cette lancée. Aussi encourageons-nous certaines populations à remettre en question leurs normes culturelles et leur comportements matrimoniaux, a dit M. Kiyonga. Nous tenons aussi à remercier les chercheurs ougandais, qui ne ménagent pas leurs efforts pour trouver des solutions locales et abordables à la maladie, et nous demandons à la communauté internationale de nous aider à faire face aux difficultés que nous pose le nombre croissant d'orphelins causés par la maladie.

M. THIMOTHY STAMPS, Ministre de la santé du Zimbabwe, a déclaré que l'homme étant mu par le désir insatiable d'explorer et d'exploiter des destinations inconnues et même dangereuses, quelles que soient les précautions logiques recommandées, il est futile pour la communauté internationale de tourner le dos à la destruction ethnique que l'actuelle épidémie cause à son pays et son continent. Nous sommes habitués, a-t-il dit, aux injures lancées contre nos dirigeants. Pourtant, le Zimbabwe a accompli l'impossible. Il a sensibilisé sa population à comprendre que l'exercice d'une fonction humaine normale, nécessaire et complètement agréable peut avoir des conséquences fatales. Le Zimbabwe connaît actuellement les taux les plus élevés de séroposivité de VIH dans le monde. Ce taux est déterminé par les données de surveillance et les sites choisis à l'origine en vue de détecter rapidement de nouvelles infections. Aussi les statistiques reposent essentiellement sur les tests réalisés chez des personnes utilisant des services médicaux. Les nouvelles statistiques qui seront calculées à partir de rapports réalisés dans des centres de tests et de consultations volontaires, nouvellement établis, sont attendues avec impatience. Il suffit de dire que la petite cohorte de donateurs bénévoles de sang - environ 8 000 personnes - a constamment montré des taux nettement plus faibles de séroposivité du VIH, et ces taux ont décliné progressivement tout en montrant une réduction considérable des taux de séro-conversion depuis 1994, indiquant que le changement de comportement positif peut être accompli de manière réaliste.

Le Zimbabwe - fait unique en Afrique - a passé en revue tous les dons de sang pour le VIH depuis septembre 1985. A la fin de 1999, la politique nationale contre le sida a été achevée et le statut établissant le Conseil national contre le sida a été approuvé par le Parlement. Les services fiscaux ont fixé une taxe de 3% sur les revenus et les sociétés pour financer les activités du Conseil. Cette innovation a été lancée par le Président à l'occasion de la Journée mondiale du sida, le 1er décembre 1999. Le défi est maintenant de faire face à l'épidémie de manière efficace, soutenue et intégrale. Aucun pays d'Afrique subsaharienne - déjà frappé par de sévères contraintes budgétaires - ne peut supporter le poids des incidences économiques, sociales et en matière de santé du sida. C'est pourquoi, le Zimbabwe se félicite de la préoccupation exprimée par le Conseil de sécurité, présidé par les Etats-Unis, et de l'occasion qui lui est offerte de présenter non seulement des statistiques, mais également quelques progrès que nous avons réalisés et des propositions, convaincus que notre voix sera entendue.

Au Zimbabwe, près de 1 000 personnes meurent chaque semaine du sida/VIH, dont 15% sont des enfants de moins de 5 ans qui l'ont contracté de leurs parents; 27% des dépenses des institutions nationales de santé sont consacrées aux traitement - généralement sans succès - des infections liées au VIH. Le Ministre a fait observer que la population du Zimbabwe n'a pas accès à des thérapies modernes. L'allaitement maternel est pratiqué de manière générale et l'accès à ce que l'ONU-sida appelle des "alternatives acceptables" n'est faisable que pour certains. La question est de savoir s'il s'agit d'un simple refus de comprendre, ou plutôt d'une nouvelle forme de discrimination raciale ou processus de nettoyage ethnique. La maladie affecte toute personne, sans distinction de sa condition sociale ou de son âge. Citant Mary Fischer - victime du sida -, le Ministre a déclaré que le VIH ne demande qu'une chose à ceux qu'il infecte "Etes-vous humain?"

M. PETER VAN WALSUM (Pays-Bas) a déclaré que toute considération de la pandémie du VIH/sida en Afrique devra insister sur l'urgence que requiert son traitement pour soulager les populations du continent. Si nous nous demandons ce que le Conseil de sécurité peut réellement faire en matière de lutte contre le sida, nous pensons qu'il peut d'abord jouer un rôle dans la sensibilisation des opinions en faveur de la prévention de la maladie, a dit M. Van Walsum. L'impact du sida sur les conditions de sécurité en Afrique semble évident, ce mal dévastant les capacités humaines et économiques et surpassant largement ses capacités de réaction sanitaire et détruisant totalement, si l'on n'y prend pas garde, le tissu même des sociétés qu'il affecte. Le désespoir qu'engendre la pandémie peut, à lui seul, être une source de déstabilisation et de conflits, les guerres qui existent déjà en Afrique en plus ayant un effet indiscutable d'accélération de la propagation de la maladie. Les soldats et les combattants, de même que les populations déplacées, par leur comportement et leur mode de vie, sont une source de propagation du virus, et selon des statistiques, la prévalence de l'immunodéficience acquise parmi les troupes et les hommes en armes, est de deux à cinq fois ce qu'elle est dans la population civile. Le Conseil de sécurité doit donc lancer un appel aux gouvernements africains pour qu'ils encadrent et surveillent mieux leurs armées et leurs forces de l'ordre sur cette question. Que la prévention, l'information, la responsabilité et la discipline commencent donc par les armées. Selon des informations bien documentées provenant de l'ONU-sida et de l'Institut pour la lutte internationale contre le sida de l'université de Harvard, les Pays-Bas sont le deuxième contributeur de fonds au monde pour la lutte contre le sida. Nos contributions se font aussi bien de manière bilatérale que multilatérale, et nous nous associerons, en matière de coopération et d'aide, à la déclaration que fera la délégation du Portugal au nom de l'Union européenne.

M. ARNOLDO LISTRE (Argentine) a noté l'ampleur du problème du sida en Afrique démontrée au cours de la présente séance du Conseil de sécurité par le Vice-Président des Etats-Unis, et de nombreuses délégations. Les actions qui doivent être prises au cours des cinq prochaines années pour lutter contre le sida pourraient être décisives pour l'avenir des pays d'Afrique subsaharienne et pour l'humanité tout entière. A cet égard, la délégation argentine propose de prendre une série de mesures. Il s'agit notamment de reconnaître que le sida ne constitue pas seulement un problème de santé, mais également une question qui affecte le développement et la sécurité, faits essentiels à l'élaboration de politiques aux niveaux national et régional. La lutte contre le sida doit être intégrée aux programmes nationaux de développement au même titre que les questions liées à la lutte contre la pauvreté, à la bonne gouvernance et à la réduction de la dette. Il faudra augmenter l'assistance financière. Actuellement, la communauté internationale verse des contributions faibles aux programmes de lutte contre le sida.

Le représentant a estimé qu'il faudra augmenter l'aide publique au développement dont le montant est actuellement en déclin. Dans ce contexte, et dans l'esprit du Sommet du Groupe des huit tenu en juin 1999, il faudra réduire la dette des pays d'Afrique les plus gravement touchés par le sida et qui disposent de très faibles ressources pour le combattre.

En outre, il faudrait que la société civile participe plus activement aux efforts de lutte contre le sida. Enfin, il faudra renforcer au maximum la coopération des organisations internationales ainsi que la coordination des efforts des organisations internationales, des organisations non gouvernementales et des gouvernements. Appuyant la recommandation du Secrétaire général, M. Listre a souligné qu'il faudra faire de la lutte contre le sida une priorité de nos travaux en Afrique, de la même manière que nous oeuvrons en faveur de la paix et de la sécurité.

M. MICHEL DUVAL (Canada) a souligné que les efforts des Gouvernements africains visant à contenir le "raz-de-marée" que représente le sida sont entravés par la guerre civile, l'afflux de réfugiés, une urbanisation rapide et la misère qui eux-mêmes contribuent à la propagation de l'infection par le VIH et le sida. Le représentant a attiré l'attention sur l'impact que la pandémie risque d'avoir sur la capacité des Etats africains à jouer leur rôle dans les opérations de maintien de la paix. Il a indiqué qu'en Afrique subsaharienne, les ministères de la défense affichent des taux moyens d'infection se situant entre 20 et 40% de l'effectif de l'armée. A mesure que la maladie gagnera du terrain, ces pays souffriront d'un manque de continuité au niveau du commandement et dans les rangs de l'armée, a souligné le représentant. Le Canada, a-t-il déclaré, participe à la lutte internationale contre le sida depuis 1987. En 1999, les fonds affectés aux projets pertinents dans les pays en développement ont atteint 22 millions de dollars et cette action a largement privilégié l'Afrique. Les engagements du Canada, a expliqué le représentant, consiste à soutenir les gouvernements africains dans la mise en oeuvre de leurs plans stratégiques de lutte contre le sida; appuyer les communautés et les groupes communautaires dans cette lutte; établir des priorités dans les programmes pour assurer aux interventions un impact maximum; et promouvoir un développement humain durable en adoptant une approche globale englobant l'éducation de base, les soins de santé primaire et l'égalité entre les sexes.

M. HASMY AGAM (Malaisie) a estimé que la première réunion sur le partenariat international dans la lutte contre le sida en Afrique, qui s'est tenue au Siège des Nations Unies, le 6 décembre dernier, a été une étape importante dans la bonne direction, à savoir la coordination de l'action mondiale dans la lutte contre le sida, "fardeau de cette génération". Le représentant a attiré l'attention sur le fait que bien qu'étant un phénomène mondial, le sida et ses conséquences affectent surtout les pays en développement les plus pauvres.

Il a notamment appelé les pays développés à faire pression sur leurs industries pharmaceutiques pour qu'elles réduisent les prix des médicaments ou à mettre en place des modalités de licence obligatoire pour les médicaments essentiels. Les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) permettant la licence obligatoire, il est regrettable, a souligné le représentant, que certains pays aient choisi d'aligner leurs politiques sur celles des compagnies pharmaceutiques niant ainsi aux pays en développement le droit de produire des médicaments à des prix abordables.

Plaidant pour la promotion d'une véritable synergie dans la lutte contre le sida, le représentant a estimé qu'elle ne pourrait provenir que d'objectifs et d'approches communes fondées sur une compréhension partagée de l'épidémie et de ses forces sous-jacentes. Dans ce contexte, le rôle des Nations Unies est d'autant plus important que leur mandat est de protéger et de promouvoir les droits de l'homme, la paix et la sécurité. Les efforts en matière de sida nécessitent une collaboration entre les gouvernements, le monde des affaires, les universités, les organisations non gouvernementales (ONG), les organisations religieuses et les médias. Il est vrai, a conclu le représentant, que de nouvelles ressources seront nécessaires mais il faut garder à l'esprit que le coût de l'action sera bien moindre que celui de l'inaction.

M. JEREMY GREENSTOCK (Royaume-Uni) a souligné que sa délégation ne voulait pas se lancer dans des déclarations formelles et rigides dans le débat qui s'ouvre au Conseil de sécurité sur la question du sida et ses impacts sur la sécurité en Afrique. Cette question, a dit M. Greenstock, a besoin d'être franchement débattue et ouvertement débattue, et ce sera là l'un des mérites de l'ordre du jour adopté par le Conseil, certains gouvernements, notamment en Afrique, ayant encore du mal à reconnaître que le problème existe sur leur territoire et parmi leurs populations. La reconnaissance de la question commence à se faire, et cette reconnaissance montre que les gouvernements prennent enfin conscience de ses implications.

Le sida et son expansion sont cependant un échec de toute la communauté internationale et pas seulement de l'Afrique, même si elle est la plus affectée, et il faut que la communauté internationale accepte ses responsabilités. La question des ressources à affecter à la lutte contre la pandémie, que la délégation des Etats-Unis et le Vice-Président Al Gore ont bien mis en lumière aujourd'hui, doit être résolue par des contributions substantielles e prévisibles, et le Royaume-Uni est prêt, pour sa part, à affecter un fonds de 40 millions de livres sterlings cette année en faveur des programmes de prévention et de lutte. La tenue de la réunion, aujourd'hui, du Conseil est un premier pas dans la bonne direction mais elle n'est pas en soi une finalité. Davantage d'efforts et de persévérance doivent être déployés à la fois par les gouvernements, par la société civile, par les ONG et par les organismes internationaux.

L'ONU, a estimé le représentant, est bien placée pour assurer le leadership et la coordination des efforts dont a besoin la lutte contre la pandémie du sida, et la volonté politique et la capacité de mise en oeuvre sur le terrain des stratégies recommandées au niveau international sont cruciaux. C'est en remplissant ces différentes conditions que les efforts de lutte et de prévention pourront aboutir à des résultats concrets et positifs.

M. PIOT, Directeur exécutif d'ONU-sida, répondant à une question posée par les délégations, a indiqué que l'ONU-sida oeuvre activement pour établir un inventaire détaillé de ce qui a été accompli par les différents partenaires dans la lutte contre le sida, à savoir les gouvernements, le secteur privé, les ONG et les bailleurs de fonds. Il a émis l'espoir que le débat d'aujourd'hui pourra contribuer à faire progresser les efforts accomplis dans cette lutte.

M. SAID BEN MUSTAPHA (Tunisie) a estimé que l'initiative du Conseil de sécurité de consacrer un débat à la question des incidences du sida sur la stabilité et la sécurité en Afrique est très pertinente. La Tunisie souhaite que tous les problèmes qui affectent les pays africains soient traités avec le même intérêt. Le sida est un fléau qui menace tout le monde, sans distinction sociale, ethnique ou d'âge. Il faudrait changer les comportements en mettant un terme à la stigmatisation de cette maladie et s'engager à oeuvrer en étroite coopération pour garantir le succès des efforts déployés pour lutter contre l'épidémie. Le Sommet de Dakar de 1992 avait adopté une déclaration appelant les gouvernements à accorder la priorité à la lutte contre le sida. Il est nécessaire de renforcer la coopération internationale et d'appuyer la recherche scientifique pour venir à bout de ce fléau. Le représentant a estimé qu'il est indispensable d'adopter une approche claire pour déterminer des mesures efficaces de prévention du sida. Il a par ailleurs salué la décision des Etats-Unis d'augmenter les ressources destinées à financer les efforts de lutte contre le sida.

M. VOLODYMYR YEL'CHENKO (Ukraine) a rappelé que c'est la première fois que son pays siège au Conseil de sécurité, et qu'à ce titre, il s'efforcera d'équilibrer les travaux du Conseil par l'apport culturel. Sur le sida en Afrique, le représentant a mis l'accent sur le lien entre la contagion et les conflits armés. Dans les années 90, a-t-il dit, l'augmentation des conflits interétatiques et interethniques en Afrique et le nombre important de réfugiés qui en découle sont devenus le catalyseur de l'explosion du virus. En conséquence, en traitant des conflits sur le continent et en prévenant l'irruption de nouveaux conflits, le Conseil de sécurité ne fera que contribuer au travail entrepris en matière de lutte contre le sida par les différentes institutions et organisations. Le représentant a émis l'espoir que la réunion d'aujourd'hui fournira l'élan nécessaire au lancement d'une nouvelle étape de la lutte contre le VIH/sida, au niveau international. Il s'est dit convaincu qu'il est grand temps que les Nations Unies élaborent un ordre du jour complet de l'action contre cette épidémie.

Le représentant a jugé approprié que le Conseil de sécurité use de ses prérogatives en vertu de l'Article 11 de la Charte des Nations Unies et recommande à l'Assemblée générale de convoquer une session extraordinaire chargée de proposer de nouvelles stratégies, méthodes, activités pratiques et mesures spécifiques pour renforcer la coopération internationale en matière de lutte contre le sida.

M. MOCTAR OUANE (Mali) a estimé que les solutions à la problématique du sida passent au moins partiellement par la recherche de solutions à chacune des crises qui secouent le continent. Pour vaincre le sida, la communauté internationale doit mettre en oeuvre une stratégie globale et coordonnée. A cet égard, la réflexion pourrait s'articuler sur les trois questions suivantes: Comment réaménager les services de santé pour faire face à l'épidémie du sida, et notamment à l'explosion du coût des soins? Comment gérer les problèmes éthiques du séropositif et de la personne affectée du sida? Quelle politique de communication à adopter afin d'amener l'individu à adopter un comportement nouveau en matière de sexualité? Les sociétés africaines ont déjà saisi à bras le corps le problème du sida. Des expériences enrichissantes ont vu le jour dans plusieurs régions du continent. Il es impératif de renforcer ces méthodes pour combattre le fléau. Ici également, on peut identifier trois grands axes d'action. Il s'agit notamment de la décentralisation de la lutte anti-sida, de la définition d'un cadre institutionnel pour résoudre les problèmes juridiques et les problèmes éthiques soulevés par le sida, ainsi que de l'identification de nouveaux canaux de communication visant à amener l'individu à changer de comportement.

De par sa complexité, le sida nécessite l'engagement de l'individu et de la société, des élites et des communautés. Le défi qu'il lance à l'humanité est un stimulant pour cet engagement qui doit être sans faille car il y va de la survie même de l'humanité. L'Afrique, alourdie par ces multiples handicaps, est dans une situation dramatique. C'est pourquoi, elle a besoin de la solidarité internationale pour optimaliser ses capacités de lutte. A cet égard, la délégation malienne souscrit pleinement à l'initiative du Programme ONU-sida à la mise en place d'un partenariat international contre le VIH/sida en Afrique. Un tel partenariat, qui nécessitera une mobilisation de la communauté internationale, aura pour objectif principal de circonscrire le mal afin de réduire de façon significative son coût humain, social et économique.

Mme PATRICIA DURRANT (Jamaïque) a estimé qu'ignorer les effets de l'épidémie du sida en Afrique serait se dégager de responsabilités qui incombent à la communauté internationale. Le sida est en effet un fléau mondial dont les effets se font sentir dans toutes les régions du monde, y compris dans les Caraïbes. Les statistiques montrent que le sida ne peut plus être traité uniquement comme une crise de la santé, a-t-elle déclaré, en soulignant les liens entre le sida, la pauvreté, l'instabilité politique et les conflits.

Il semble qu'on ne verra pas la fin du cycle de l'épidémie, à moins que la communauté internationale agisse de concert pour éradiquer ce fléau. De l'avis de la Jamaïque, les liens entre le sida et la paix et la sécurité en Afrique montrent que le Conseil de sécurité a un rôle à jouer et la responsabilité de se joindre à la recherche de solutions à ce problème. Partant, la représentante a appelé le Conseil à reconnaître le lien dans l'exercice de ses mandats dans le domaine du maintien et de l'établissement de la paix et à rechercher des moyens de coopération avec toutes les parties concernées. Pour la Jamaïque, le rôle du Conseil de sécurité dans la prévention des conflits doit être renforcé afin d'éliminer tout environnement favorable à la propagation du VIH/sida. A cet égard, davantage de ressources doivent être allouées à la formation du personnel de maintien de la paix, des observateurs militaires et des membres du personnel humanitaire.

La paix et la sécurité ne peuvent pas être séparées des causes socioéconomiques profondes des conflits, a poursuivi la représentante. Elle a souligné la nécessité d'une plus grande coordination entre le Conseil de sécurité, l'Assemblée générale, les institutions spécialisées, les institutions de Bretton Woods et les Fonds et Programmes de l'ONU. Le Partenariat international contre le sida en Afrique, lancé récemment, constitue une étape importante dans le rapprochement des gouvernements, des Nations Unies, de la société civile et du secteur privé. Le Conseil de sécurité peut et devrait fournir l'engagement moral et politique nécessaire pour réunir les ressources financières et techniques requises pour appuyer ce Partenariat, a déclaré Mme Durrant. Pendant que se poursuivent les recherches en vue d'un remède, la communauté internationale doit bâtir sur les expériences et les leçons tirées des pays qui ont réussi à freiner la propagation de l'épidémie. La représentante a préconisé d'axer les efforts sur l'éducation en vue d'éliminer les comportements à risque; de faciliter les tests de dépistage, en particulier pour les femmes en âge d'enfanter; de réduire le coût des médicaments et des traitements et de les rendre largement disponibles; et de fournir un appui social et économique, aux orphelins du sida en particulier.

M. ABDELKADER MESDOUA (Algérie), au nom de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), a rappelé que depuis deux décennies, l'Afrique subit de plein fouet les effets d'une redoutable pandémie qui s'attaque à ce qu'elle a de plus cher, son capital humain, et qui de plus en plus compromet ses chances de se redresser et de retrouver sa place dans le concert des nations. Ainsi, sur les 25 pays les plus affectés au monde, 24 sont africains dont certains comptent plus de 25% de personnes infectées par le virus. Soixante-dix pour cent des personnes infectées par le sida dans le monde vivent en Afrique. Les conséquences de ce redoutable fléau sont graves et multiples et concernent autant les populations que les économies des pays affectés, dont les efforts d'assainissement et de relance se retrouvent compromis, que l'Etat lui-même qui se trouve menacé dans sa stabilité et sa sécurité. Au plan humain et social, la facture est extrêmement lourde.

De plus, ce sont les femmes et les enfants qui paient le prix le plus élevé, et dans certains pays, les trois-quarts des lits des services pédiatriques sont occupés par des enfants malades du sida. Le sida affecte jusqu'à 10% de la population active dans certains pays. Au plan politique, parce que les services publics et de sécurité sont également affectés par la maladie, que les structures politiques et sociales sont mises à mal, et que les équilibres sociaux sont ébranlés, les Etats se trouvent menacés dans leur stabilité et leur sécurité. Déjà en 1992, lors du Sommet de l'OUA tenu à Dakar, les chefs d'Etat et de gouvernement africains avaient adopté la "Déclaration de l'OUA sur l'épidémie du sida en Afrique" qu'ils ont assortie d'un Programme d'action en six points avec des cibles ou des résultats quantifiables. Conscients de l'impact de ce fléau sur les enfants, les dirigeants africains ont également adopté, dès 1994, la "Déclaration de Tunis sur le sida et l'enfant en Afrique" assortie, elle également, d'un Plan d'action couvrant des aspects spécifiques et complétant le Plan de Dakar.

La lutte contre le sida en Afrique requiert une action coordonnée, déterminée et durable à travers la conjugaison des efforts à la fois nationaux et internationaux. C'est dans cet esprit que le Sommet de l'OUA, tenu en 1998 à Ougadaougou, a lancé un appel à l'aide internationale. Et, c'est mût par le même esprit que les chefs d'Etat africains ont, lors du Sommet d'Alger de juillet 1999, approuvé le partenariat international pour la lutte contre le VIH/sida en Afrique, en tant que cadre novateur pour mobiliser d'urgence les gouvernements, la société civile, les partenaires au développement et les organismes internationaux d'assistance afin d'ouvrer d'une manière proportionnelle aux défis qui s'attachent à la situation de la pandémie en Afrique. De l'avis de la délégation de l'Algérie, l'une des priorités est de faire en sorte qu'en 2005, 90% au moins des jeunes de 15 à 24 ans aient accès à l'information et aux compétences nécessaires pour réduire leur infection au VIH, et réduire de 25% son incidence du sur cette tranche d'âge. Il faut, en outre, éviter de traiter la maladie comme un simple phénomène médico-sanitaire. En termes concrets, l'Afrique attend un effort réel de solidarité de la communauté internationale.

M. ANTONIO MONTEIRO (Portugal) a déclaré, au nom de l'Union européenne et des pays associés, que le problème mondial que pose la pandémie du sida requiert des stratégies fondées sur la responsabilité et sur des partenariats de collaboration. C'est pourquoi l'Union européenne soutient l'idée de développer de forts partenariats aux niveaux national et international pour la lutte contre le sida. A cet effet, l'Union européenne réaffirme que les conséquences négatives de l'épidémie sur la vie des individus, des communautés et des nations, peuvent être surmontées par les efforts combinés des gouvernements nationaux, de la communauté internationale, des ONG et de la société civile, auxquels il faut associer ceux des organisations religieuses,

du secteur privé, des diverses fondations, du système des Nations Unies et des personnes victimes du sida. Ces initiatives doivent cependant être coordonnées, et l'Union européenne estime que sur cet aspect de la question, l'ONU-sida a un rôle important de coordination à jouer. C'est pourquoi, a dit M. Monteiro, nous soutenons les travaux menés par ce programme de l'ONU.

L'éducation, l'information et la mise en place de services sociaux accessibles aux jeunes, consistent la base des actions à mener, et à cet égard, l'Union européenne accueille favorablement le Programme d'action pour une décennie de l'éducation, arrêté par les ministres africains de l'éducation lors du sommet de l'Organisation de l'Unité africaine à Alger, qui reconnaît la nécessité d'une éducation au VIH/sida. Cette décision est le signe que les gouvernements africains prennent au sérieux la question du sida sur le continent, et cette initiative devrait être encouragée. L'Union européenne, en ce qui la concerne, a concrètement, au cours des dix dernières années, alloué 1,5 milliard d'Euros aux pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP) en faveur des programmes de santé. Ce montant est venu s'ajouter aux fonds alloués par les Etats européens à leurs partenaires africains de manière bilatérale. La part des programmes contre le sida représente 10% de l'aide européenne aux pays ACP, et devrait augmenter au cours des années à venir. Nous soutenons, en matière de population et de santé, les conclusions atteintes lors de l'examen du Programme d'action de la Conférence internationale sur la population et le développement (Le Caire+5), et nous continuerons à coopérer avec les gouvernements africains pour en mettre en oeuvre les recommandations.

M. JOSE LUIS MONTEIRO (Cap-Vert) s'exprimant au nom du Groupe africain, a déclaré que la pandémie du sida est venue s'ajouter et a aggravé l'autre grand fléau auquel est confronté le continent, et qui est celui de la pauvreté. Tant que des réponses efficaces ne seront pas apportées au sous-développement et à l'environnement général de pauvreté qui caractérisent le continent, a dit M. Monteiro, il sera difficile de mettre en place les conditions d'une lutte efficace contre le sida. Les Etats africains sont reconnaissants au Secrétaire général des efforts qu'il a déployés avec succès pour promouvoir la mise en place d'un Partenariat international contre le sida en faveur de l'Afrique. L'appel lancé par les Chefs d'Etats africains pour une mobilisation internationale de ressources contre le fléau a trouvé là un début de réponse. Le Partenariat international tel qu'il est actuellement envisagé, semble doté des données conceptuelles et organisationnelles qui lui donneront une efficacité opérationnelle crédible.

Comme l'a déclaré le Secrétaire général, la réponse à apporter à la pandémie du sida doit être exceptionnelle et "sans précédent", et nous espérons que le poids politique du Conseil de sécurité et la capacité de mobilisation de ressources de nombre de ses membres, seront un stimulus efficace pour la mise en oeuvre d'une réponse collective. Aux moyens humains qu'il est appelé à mobiliser, le Partenariat international contre le sida devra ajouter la réhabilitation et le renforcement des systèmes et des

structures de santé africains qui sont en ce moment obsolètes et débordés par la demande. Une attention particulière doit être accordée à la transmission du sida de la mère à l'enfant et à la protection des femmes enceintes. L'Afrique, qui n'a pas les moyens d'acquérir les médications rétrovirales dont elle a tant besoin, a besoin d'aide en ce domaine, et si possible, notre continent devrait pouvoir bénéficier de médicaments génériques moins coûteux aussitôt que possible. Les coûts généraux d'une lutte efficace contre le sida sur notre continent se montent en ce moment à 2,5 milliards de dollars, et seule l'action de la communauté internationale peut permettre de mobiliser ces ressources.

M. ARNE B. HONNINGSTAD (Norvège) a déclaré que les conséquences dévastatrices de la pandémie du sida sur le développement humain, social et économique de l'Afrique exigent des mesures de grande ampleur qui ne soient pas limitées au secteur de la santé. L'épidémie du VIH/sida est devenue l'un des principaux obstacles au développement dans de grandes parties du continent. Il s'est félicité de ce que le Conseil, en tenant ce débat, reconnaisse le lien entre le sida et la paix et la sécurité, rappelant notamment que, dans les camps de réfugiés, un individu court six fois plus de risques de contracter le virus VIH que la population en général. La Norvège espère que le Partenariat international contre le sida en Afrique facilitera le lancement d'une action large et concertée à tous les niveaux. La lutte contre le VIH/sida jouit d'une très haute priorité dans le cadre de la coopération au développement de la Norvège qui est l'un des principaux contributeurs au Programme ONU-sida. Le mois dernier, la Norvège a ainsi accordé une allocation spéciale de 28,5 millions de couronnes norvégiennes au Programme au titre du nouveau Partenariat en Afrique. Il est clair que davantage de ressources sont nécessaires, tant de la part de la communauté internationale que de sources nationales et privées, a déclaré le représentant qui a aussi souligné la nécessité de faire preuve d'une volonté politique et d'un engagement au plus haut niveau. La communauté internationale doit être préparée à appuyer les efforts nationaux. Disposée à faire sa part, la Norvège envisage d'accroître son appui à la lutte contre le sida au cours des prochains mois.

M. Honningstad a souligné l'importance des mesures préventives et de l'information sur la maladie, en particulier à l'attention des jeunes. De l'avis de la Norvège, des mesures doivent aussi être prises pour éduquer les fillettes, de plus en plus nombreuses à être victimes de ce virus, et changer le comportement sexuel dangereux des hommes, ce qui implique que l'on se montre disposé à traiter ces questions difficiles de manière ouverte et franche. Il faut, en outre, intensifier les efforts internationaux visant au développement d'un vaccin contre le virus VIH et trouver les moyens de rendre les médicaments existants plus accessibles à ceux qui en ont besoin. A cette fin, les partenariats entre les secteurs public et privé sont d'une importance cruciale. Il faut enfin faire en sorte que les malades du sida reçoivent les soins appropriés et que leurs droits de l'homme soient respectés. Le nombre important d'orphelins du sida constitue un autre défi qui mérite l'attention de la communauté internationale.

En conclusion, le représentant a préconisé le développement d'une approche multi-sectorielle visant à pallier les conséquences de la pandémie sur le développement social et économique en Afrique, ainsi que sur la paix et la sécurité.

M. DUMISANI S. KUMALO (Afrique du Sud) soulignant que la pauvreté et le sous-développement détruisent des familles et les systèmes de santé, a déclaré que l'on doit continuer à explorer de nouveaux moyens d'enrayer l'avancée du VIH/sida et trouver un traitement efficace, mais que le seul moyen immédiat d'arrêter la progression de la pandémie est de relever le niveau de vie des populations dans les pays en développement. Si la population est éduquée, il est facile de communiquer les programmes de prévention du sida de manière à faire changer les comportements. En Afrique du Sud par exemple, les communautés savent qu'il existe le VIH/sida mais n'établissent pas le lien entre cette maladie et leur comportement sexuel. Ce lien est mieux compris par les communautés plus éduquées. Des ressources plus importantes consacrées aux services de santé permettent d'augmenter les moyens de prévention, notamment d'améliorer l'accès des communautés aux préservatifs. Dans les milieux aisés, une meilleure nutrition assure une résistance plus forte contre la maladie. A la troisième Conférence africaine tenue à Durban (Afrique du Sud), en décembre 1999, on a noté que le sida peut à 100% être prévenu par le biais d'une meilleure franchise et d'une éducation appropriée. De nombreux pays en développement sont surchargés à cause du paiement de leur dette internationale qui ne leur laisse que de maigres ressources pour leur développement. La Charte des Nations Unies stipule qu'il incombe en premier lieu au Conseil de sécurité d'assurer le maintien de la paix et de la sécurité internationales. A l'ère de la mondialisation, il est devenu important de définir la sécurité en termes plus larges. La définition de la sécurité comprend la sécurité économique, alimentaire et de santé. Le Conseil de sécurité, dont le rôle est de garantir la sécurité dans le monde, doit utiliser ses opérations de maintien de la paix pour créer un espace et un environnement propices pour les autres institutions spécialisées, organisations régionales et sous-régionales, qui peuvent mieux répondre aux divers aspects de la sécurité.

Le Conseil de sécurité a déjà établi un précédent remarquable en Sierra Leone où son mandat en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies permet aux troupes de maintien de la paix d'être accompagnées de personnel qualifié des Nations Unies pour traiter des problèmes sociaux qui résultent du conflit. Le Conseil de sécurité doit être salué pour avoir adopté cette décision novatrice, a estimé M. Kumalo qui a émis l'espoir que la même créativité prévaudra bientôt lorsque le Conseil autorisera la création d'une force de maintien de la paix pour la République démocratique du Congo. Peut-être est-il temps que les 188 Etats Membres de l'ONU participent à l'Assemblée générale à un débat sur le défi posé par le VIH/sida dans le monde, et élaborent un plan global pour faire face efficacement à cette épidémie.

En outre, les pays donateurs doivent réduire les restrictions sur l'argent qu'ils versent pour le traitement du VIH/sida en Afrique afin que les pays récipiendaires puissent l'utiliser pour atténuer la pauvreté et améliorer les conditions de vie de leurs citoyens.

M. YUKIO SATOH (Japon) a estimé qu'en raison de la gravité du problème du sida en Afrique, un engagement plus ferme en faveur de la lutte contre cette maladie était nécessaire tant de la part des pays africains que de leurs partenaires en dehors de la région. Le Japon déploie, pour sa part, des efforts sur plusieurs plans en vue de lutter contre le sida en Afrique et est déterminé à les renforcer au cours des prochaines années. Ainsi, il accorde une haute priorité à la question du sida dans sa politique publique à moyen terme relative à l'aide publique au développement, et octroie une assistance technique et des prêts à de nombreux pays africains pour les aider à lutter contre cette maladie mortelle dans le cadre de son "Initiative sur les questions mondiales relative à la population et au sida", lancée en 1994. Certains de ces programmes sont d'ailleurs intégrés dans l'Ordre du jour commun que le Japon et les Etats-Unis se sont fixés sur une large gamme de questions mondiales. Les deux pays ont, par exemple, envoyé une mission conjointe en Zambie en 1998 afin d'élaborer des projets sur la population, le sida et la santé des enfants. La contribution financière du Japon dans le cadre de cette Initiative a atteint environ 3,7 milliards de dollars à la fin de l'année fiscale 1998 et le Gouvernement japonais est déterminé à étendre son soutien à la lutte contre le sida.

Le Japon a contribué, par ailleurs, pour un total de 23 millions de dollars aux activités du Programme ONU-sida depuis sa création en 1996 et envisage d'augmenter son soutien financier à ses programmes en Afrique. Lors de la deuxième Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l'Afrique, coparrainée par le Japon et le PNUD en octobre 1998, il a été décidé que les pays africains et leurs partenaires du développement devaient renforcer leur coopération dans la lutte contre le sida et les autres maladies sexuellement transmissibles. En réponse, le Japon a annoncé qu'il était disposé à fournir environ 90 milliards de yen à titre de prêts sur une période de cinq ans à partir de 1998 en faveur de domaines comme l'éducation, les soins de santé, les services médicaux et la fourniture d'eau potable. Un accent particulier sera mis sur la lutte contre le sida dans ce cadre. Le représentant a encore souligné que les pays africains et asiatiques avaient beaucoup à apprendre les uns des autres en ce qui concerne la lutte contre le sida et a préconisé d'augmenter les échanges d'informations et d'expériences entre les deux continents, proposition qui a d'ailleurs reçu un large soutien des participants à la réunion régionale de suivi de la Conférence internationale sur le développement de l'Afrique qui s'est tenue en Zambie en novembre dernier, a-t-il fait observer.

M. SATCHER (Secrétaire adjoint à la santé des Etats-Unis) a dit, paraphrasant un haut fonctionnaire américain du milieu du 20ème siècle, que le monde ne pouvait se permettre d'avoir une de ses moitiés malade et l'autre en bonne santé. La communauté internationale, a poursuivi M. Satcher, a réussi dans le passé à éradiquer des menaces de santé graves comme celles de la poliomyélite ou de la tuberculose et aujourd'hui des pays comme l'Ouganda et la Thaïlande sont là pour prouver que l'on peut obtenir de bons résultats contre le sida. On peut dire que les Etats-Unis sont, pour leur part, dans la bonne voie dans la lutte contre cette maladie, bien que tout ne soit pas encore parfait. Il est de l'intérêt des Etats-Unis de collaborer avec les Nations Unies pour mettre en place des mesures d'aide et de traitement du sida et de ses corollaires dans toutes les régions du monde et notamment en Afrique, a dit M. Satcher. Les Etats-Unis continuent d'investir dans la recherche d'un vaccin et dans la mise en place d'un système international d'évaluation et de surveillance de la propagation de la maladie. Notre gouvernement pense que la prévention reste le meilleur moyen de ralentissement de la pandémie et nous reconnaissons que cette épidémie met en danger des aspects cruciaux de la sécurité et de la santé internationale. Nous avons fait d'autre part, des progrès substantiels grâce à la coopération que nous développons avec différentes nations du monde et nous continuerons à promouvoir cette collaboration.

M. GELSON FONSECA (Brésil) faisant observer que le sida constitue une menace mondiale qui ne respecte aucune frontière, a souligné qu'il faudra oeuvrer en étroite coopération et ne pas se livrer à une rhétorique inutile. Il est clair que l'action internationale pour lutter contre la pandémie du sida ne relève pas du mandat du Conseil de sécurité. Notre débat d'aujourd'hui ne vise pas à ouvrir la voie pour le Conseil de s'acquitter des tâches et responsabilités des autres organes, programmes et organisations, en particulier l'OMS, l'UNICEF et l'ONU-sida. Son importance réside dans la sensibilisation au niveau mondial à la destruction sociale et économique causée par le sida et à la plus grande menace qui pèse sur l'avenir si l'on ne prend pas de mesures efficaces. Ce débat place le problème du sida en Afrique au centre de l'attention internationale et souligne ses incidences au-delà des questions de santé. Au cours des années 80, le Brésil a bénéficié de la coopération internationale et a depuis consolidé son programme national pour la prévention et la lutte contre le sida. Au niveau régional, le Brésil a participé activement à la mise en place en mars 1996 d'un Groupe de coopération technique horizontal contre le VIH/sida. La contribution du Brésil à ce Groupe est axée sur la formation et le renforcement des capacités visant à organiser des programmes locaux pour la prévention et le contrôle du sida et des autres maladies sexuellement transmissibles. Sur la base de son expérience régionale, le Gouvernement brésilien a développé en 1997 un mécanisme similaire de coopération avec les pays lusophones d'Afrique. En 1999, les experts du ministère brésilien de la santé se sont rendus au Kenya, au Zimbabwe, en Afrique du Sud, en Namibie et au Botswana en vue de déterminer les projets de coopération qui pourraient être rapidement mis en place.

En tant que pays en développement, le Brésil n'est pas un bailleur de fonds important. Toutefois, il a mis à la disposition d'autres pays son expertise technique et continuera à oeuvrer étroitement avec l'ONU-sida et la communauté des donateurs de fonds pour aider les pays en développement à lutter contre le sida. Le système de santé brésilien distribue gratuitement à tous les patients des médicaments contre le VIH. Cette politique a contribué à réduire le nombre des hospitalisations. En outre, des campagnes publiques dynamiques par le biais des médias ont été vitales pour la stratégie préventive. L'éducation et l'information concernant le sida constituent le meilleur moyen de mettre fin à la propagation de la maladie en Afrique et dans le monde. Il est également essentiel que les projets de coopération avec les pays africains tiennent compte de la nécessité de garantir une couverture médicale à tous, y compris le traitement pour tous les patients affectés par le sida. Le représentant a souligné que les incidences du sida en Afrique constituent un test pour la capacité des Nations Unies à la fois pour servir de catalyseur de la solidarité internationale et de véhicule pour transformer des voeux pieux en une action tangible.

M. LEE SEE-YOUNG (République de Corée) a déclaré que la communauté internationale devrait faire face à la question du sida en Afrique de manière unie et en mettant en place une réponse institutionnelle. La République de Corée soutient à cet égard la suggestion du Secrétaire général de créer un Groupe de travail chargé, entre autres tâches, d'encourager la mise en oeuvre de partenariats en vue de réduire les taux d'infection en Afrique. L'Assemblée générale a, par la suite, demandé à son Président de convoquer une réunion d'organisation du Groupe de travail à composition non limitée avant le mois de mars 2000. Nous espérons que ce groupe commencera rapidement ses activités d'évaluation de la situation du sida en Afrique et fera des recommandations. La République de Corée, a dit M. Lee-Young, pense que le mandat du Groupe de travail devrait être étendu, pour y inclure la conception d'une stratégie coordonnée et globale mettant à contribution tous les acteurs du système de l'ONU et ceux de l'extérieur, en les faisant étroitement travailler avec l'ONU-sida.

M. ABUZED OMAR DORDA (Jamahiriya arabe libyenne) a fait remarquer que l'Afrique a non seulement besoin de voeux pieux, mais également d'une action tangible pour lutter efficacement contre le sida. Outre les Nations Unies, les organisations non gouvernementales, le secteur privé et les donateurs devront oeuvrer en étroite coopération pour garantir le succès de leurs efforts dans ce domaine. C'est un grand défi. L'Afrique ne tient pas à la publicité que l'on fait de ses problèmes; elle souhaite plutôt des mesures efficaces pour lui permettre de venir à bout de ce fléau. Les instituts de recherche doivent, pour leur part, contribuer de manière considérable aux efforts de lutte contre le VIH/sida.

M. ROBLE OLHAYE (Djibouti) a rejeté les assertions selon lesquelles le sida devra être perçu comme un "problème africain". Le sida, a-t-il dit, est un problème humain ou plutôt une tragédie humaine de dimension mondiale. Comme il tue plus que les conflits, il est juste que le Conseil lui accorde l'attention requise. Le représentant a poursuivi en convenant que les pays africains ont la première responsabilité de trouver une solution à cette maladie. Il a ajouté qu'il n'en demeure pas moins que ces pays ont besoin d'une certaine reconnaissance, d'une assistance plus efficace et un appui à long terme. Le péril du sida en Afrique, a-t-il précisé, trouve sa source dans la pauvreté et dans un contexte de déclin des flux des ressources internationales vers l'Afrique, il faut craindre que ce péril continue à ravager le bien le plus vital du continent, à savoir ses ressources humaines limitées. La lutte contre le sida exige une approche plus holistique. Elle exige de nous que nous améliorons les sociétés, les institutions et les économies pour éliminer la pauvreté, source de toutes les maladies de l'Afrique, a conclu le représentant.

Reprenant la parole, la Ministre de la santé de la Namibie, a souligné que le problème du sida n'est pas uniquement africain. Un partenariat est nécessaire pour garantir le succès des efforts de lutte contre le sida. Les pays africains déploient pour leur part des efforts dans la limite des ressources existantes. Le Ministre a invité les instituts de recherche à développer des vaccins. Elle a indiqué que le ministère namibien de l'éducation a prévu dans les programmes d'enseignement la question du VIH/sida.

M. JARGALSAIKHANY ENKHSAIKHAN (Mongolie) a déclaré que le problème du sida avait des incidences graves sur la paix et la sécurité internationales. Depuis l'apparition des premiers cas de sida, la maladie a tué plus de 14 millions de personnes dans le monde, et on estime aujourd'hui que 87% des enfants atteints par ce mal vivent sur le continent africain. Tout au long de l'année 1999, le Conseil de sécurité a eu à se pencher sur les multiples conflits qui mettent en danger la paix et la sécurité internationales, notamment en Afrique, et il s'avère que le sida en particulier son expansion, peut entraîner l'instabilité et des conflits déstabilisateurs.

Les Nations Unies doivent aider les gouvernements et les peuples africains à faire face aux causes de la propagation du virus du sida, dont l'une est la pauvreté qui frappe le continent et paralyse ses systèmes d'éducation et de santé. Nous demandons que les organismes financiers internationaux, au lieu de réduire les ressources qu'ils accordent à l'Afrique, qu'ils les renforcent plutôt et les augmentent. Nous espérons que le débat d'aujourd'hui au Conseil contribuera à une discussion au terme de laquelle des actions concrètes pourront être lancées.

M. MAKARIM WIBISONO (Indonésie) a fait observer que la propagation de la pandémie du sida qui affecte actuellement de nombreux pays en Afrique peut être clairement discernée comme ayant des incidences non seulement sur le développement mais constituant également une cause indéniable d'insécurité et d'instabilité. La propagation rapide et les conséquences dévastatrices du VIH/sida sont considérables. En 1998, 33,4 millions de personnes étaient infectées par le sida et leur nombre augmente de 10% par an, faisant de cette maladie la quatrième cause de mort dans le monde. Il est maintenant largement reconnu que le VIH constitue la menace la plus grave au développement économique en Afrique, créant une crise de développement massive qui pourrait saper les progrès réalisés en matière de santé et de développement social au cours de plusieurs décennies. L'espérance de vie a décliné considérablement, atteignant le niveau des années 60. On estime que dans un pays considérablement touché, le sida exigera 60% du budget consacré à la santé d'ici 2005. En outre, les taux d'alphabétisation sont en déclin dans les familles frappées par le sida et les jeunes, en particulier les fillettes sont particulièrement vulnérables au virus VIH.

La délégation indonésienne estime que, pour faire face à cette crise complexe en Afrique, la communauté internationale devrait s'engager fermement à éradiquer ce fléau en adoptant une approche de développement. La communauté internationale doit aider à répondre besoins de l'Afrique. L'approche multisectorielle du programme ONU-sida offre les meilleurs chances de succès et une coordination efficace. Il est donc nécessaire d'adopter une approche multisectorielle coordonnée et appuyée par des ressources appropriées. Il faudrait renforcer le Programme ONU-sida et lui fournir les ressources nécessaires. En outre, la délégation indonésienne estime que l'élimination du VIH/sida devrait être intégrée au processus de développement mondial ainsi qu'aux stratégies nationales de développement.

M. BRUNO RODRIGUEZ (Cuba) a souligné que le développement sera impossible et il n'y aura aucune solution structurelle ou durable au problème du sida en Afrique à moins que l'ordre mondial injuste et précaire que l'on subit aujourd'hui ne change. Il est impératif de trouver des solutions à la pandémie du sida par le biais des efforts intégrés déployés par la communauté internationale. Seuls les pays développés - qui contrôlent 86% du PNB mondial, 82% des exportations, 68% des investissements et 74% des télécommunications - peuvent contribuer aux ressources nécessaires. Ces ressources pourraient être versées par les sociétés les plus fortunées qui consomment des milliards de dollars en cosmétiques, en cigarettes, en aliments pour animaux et en automobiles, et produisent des armes. Le sida en Afrique, comme la famine, constitue un problème de sous-développement et non pas de sécurité. Il est nécessaire de passer aux faits. Cuba renouvelle sa proposition visant à assurer gratuitement le personnel médical nécessaire pour lancer une campagne médicale intégrée et urgente au nord de l'Afrique subsaharienne. La délégation cubaine propose que les institutions des Nations Unies - fonds et programmes - et les pays développés fournissent les ressources indispensables, principalement les médicaments et les équipements médicaux.

Avec un seul médecin et des sels pour l'hydratation orale - qui ne coûtent que quelques centimes -, on peut sauver la vie d'un enfant. Le peuple cubain - uni de la même façon que dans leur lutte en faveur d'un seul de leur enfant illégalement et arbitrairement retenu aux Etats-Unis - fournira un médecin. Cet effort est réalisable et n'exigera que peu de ressources. Cuba a déjà 43 équipes médicales dans onze pays, assurant des soins à plus de 11 millions de personnes. Dans le cadre de la coopération, une université des sciences médicales latino-américaine a été créée en vue d'accueillir 6 000 étudiants. D'autres mesures ont été prises pour créer en Afrique des facultés de médecine avec des professeurs. Une campagne de vaccination est en cours à Haïti. Des centaines de jeunes étudient à Cuba, où près de 27 000 cadres et techniciens ont été formés. Environ 1 165 médecins et dentistes ont été diplômés.

Avec la volonté politique et des programmes sociaux efficaces, l'exploitation des ressources, la création de systèmes globaux de santé et d'éducation, ainsi qu'une distribution équitable des richesses, un petit pays pauvre et isolé comme Cuba peut témoigner du succès de son expérience en matière de traitement et de contrôle du sida. On ne compte que 0,03% de la population âgée entre 15 à 49 ans affectée par le VIH/sida. Tous les Cubains affectés par la maladie bénéficient d'une couverture médicale étendue et de la solidarité humaine. Le projet cubain concernant le vaccin contre le sida, actuellement expérimenté sur des personnes, figure parmi les plus avancés du monde.

M. SERGIO VENTO (Italie) a déclaré que l'objectif que s'est fixée l'Italie est de mettre en place une stratégie intégrée de soutien aux efforts nationaux des pays affectés par le sida. Cette stratégie se basera sur les connaissances scientifiques et les thérapies développées en Italie grâce aux efforts de la recherche médicale et scientifique menés par les institutions italiennes, les institutions académiques et les centres hospitaliers spécialisés. Cette stratégie mettra l'accent sur la prévention, les programmes de vaccination, l'éducation et les campagnes de communication dans les écoles, et sur les lieux de travail en se servant des médias, et notamment, de l'audiovisuel. La surveillance épidémiologique, le traitement des maladies sexuellement transmissibles, la baisse des taux de transmission de la mère à l'enfant, l'assistance aux orphelins et aux familles touchés par la maladie, la formation des personnels et le soutien à la recherche sur le continent africain seront également au centre de la coopération de l'Italie avec les pays affectés.

La contribution financière de l'Italie à la lutte contre le fléau du sida sera approximativement cette année de 20 millions de dollars, et elle sera distribuée à travers des canaux bilatéraux et multilatéraux. 8 millions de dollars iront à l'Organisation mondiale de la santé et nous verserons 2 millions de dollars à l'ONU-sida. Le Gouvernement italien, a précisé M. Vento, prévoit aussi des fonds d'intervention d'urgence pour un montant de 5,5 millions de dollars, qui iront vers les pays les plus touchés.

M. MICHAEL POWLES (Nouvelle-Zélande) a déclaré que l'ampleur et la gravité de la pandémie du sida en Afrique exigent une attention urgente. La propagation de la maladie dans la région est une catastrophe humaine sans précédent, affectant le développement humain, social et économique et requiert une action urgente. Dans son rapport de 1998 sur les causes de conflit et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique, le Secrétaire général a reconnu que le sida et la crise dans le domaine de la santé publique à laquelle est confrontée l'Afrique ont des conséquences graves sur les progrès économiques et sociaux qui sont essentiels à la réduction des conflits dans la région. Le sida est un problème mondial. Il ne reconnaît pas les frontières nationales. Il est donc impératif que des efforts concertés internationaux soient déployés pour lutter contre cette maladie dans le monde, mais la taille du problème en Afrique rend les besoins de la région uniques. Le représentant a souhaité que les pays membres des fonds et programmes des Nations Unies ainsi que les institutions spécialisées actives dans ce domaine continueront à appuyer tous les efforts pour lutter efficacement contre la propagation de cette maladie.

M. PETER L. KASANDA (Zambie) a déclaré qu'en Afrique, la lutte contre le sida doit commencer par un ferme engagement politique à éradiquer la maladie. Pour lui, les dirigeants africains doivent prendre la maladie pour ce qu'elle est, à savoir, une menace à la survie même des nations viables. En deuxième lieu, le représentant a cité la nécessité de mettre fin aux pratiques traditionnelles et culturelles qui encouragent la propagation du virus. Il a ensuite cité l'importance qu'il y a à rompre la loi du silence à l'égard de la maladie et à faire de l'éducation en matière de sida, une partie essentielle des programmes scolaires. Le représentant a mis l'accent sur la nécessité d'un appui international en souhaitant que le monde et l'Afrique deviennent partenaires dans la lutte contre cette maladie. Au bout du compte, a pourtant convenu le représentant, la questions des ressources financières constitue le plus grand obstacle au succès de la lutte contre le sida. Il a plaidé pour que l'appui apporté à l'Afrique se fonde sur un engagement renouvelé en faveur de l'augmentation de aide publique au développement. Poursuivant sur la question des ressources, le représentant a jugé urgent de trouver une solution complète et durable au problème de la dette. Il a terminé sur la nécessité d'un appui international en ce qui concerne l'accès aux traitements et aux médicaments.

M. SOTIRIOS ZACKHEOS (Chypre) a associé sa délégation à la déclaration faite par le Portugal au nom de l'Union européenne et des pays associés. Le sida est non seulement une menace pour l'Afrique mais aussi pour le monde entier et Chypre espère que le dialogue lancé aujourd'hui par le Conseil de sécurité ne s'arrêtera pas seulement au sida, mais s'étendra aussi aux questions socioéconomiques auxquelles fait face ce continent, a dit le représentant. L'Afrique au sud du Sahara souffre de manière disproportionnée de la pandémie du sida qui y cause d'énormes souffrances humaines.

Des efforts visant à aider les Africains à profiter des dernières découvertes scientifiques et médicales doivent être déployés, a dit M. Zackheos, et si les coûts de développement d'un vaccin semblent effarants, le coût humain de l'épidémie devrait en justifier le développement. La communauté des donateurs devrait aussi, et c'est une mesure facile à promouvoir, aider les pays africains à rendre leurs approvisionnements en sang hospitalier sains et sûrs. Le simple dépistage des donneurs de sang résoudrait ce problème, et épargnerait bien des vies humaines.

M. ARTHUR MBANEFO (Nigéria) a rappelé que le sida est devenu le principal problème de santé en Afrique, devant la malaria. L'impact du VIH/sida a de nombreuses dimensions et sa prévalence en Afrique, un continent de 53 pays en développement dont les économies chancelantes doivent faire face à une dette extérieure énorme et à l'absence de ressources humaines techniquement qualifiées, mérite un plan d'action conjoint national et international pour trouver des solutions et oeuvrer à l'éradication de ce fléau mondial. Pour sa part, le Nigéria a fait de la croisade contre le VIH/sida l'une de ses priorités nationales, a déclaré M. Mbanefo. Il a indiqué que les politiques étaient revues afin d'assurer un environnement plus favorable au contrôle du VIH/sida. Davantage d'acteurs sont mobilisés via la stratégie "Réponse nationale élargie au sida" et davantage de fonds sont alloués aux programmes nationaux de lutte contre le sida. Les campagnes de sensibilisation sont organisées à tous les niveaux de gouvernement avec la participation active des ONG locales et internationales. Les contrôles ont également été intensifiés afin de définir les facteurs favorisant l'épidémie. Le Gouvernement espère que l'accès à l'information, la prévention de la transmission du virus de la mère à l'enfant, ainsi que l'accès aux médicaments auront un impact positif au niveau de la société de base et permettront d'enrayer la propagation de la maladie. De l'avis du Nigéria, il faut encourager l'ouverture et la franchise sur la question du sida car c'est le seul moyen d'assurer que le problème soit traité de manière adéquate à tous les niveaux. L'éducation et l'information jouent à cet égard un rôle vital.

De tels efforts au niveau national sont toutefois insuffisants étant donné l'ampleur de la pandémie et les obstacles socioéconomiques et scientifiques auxquels est confronté le continent, a poursuivi le représentant. Toute solution doit prendre en considération non seulement l'aspect médical mais aussi les obstacles concomitants qui sapent les efforts que fait l'Afrique pour se débarrasser de ce fléau et assurer le développement de ses populations et de ses économies. La pandémie du sida, qui menace d'extinction l'humanité et l'Afrique plus encore, de même que les conflits armés qui ravagent le continent ne méritent pas moins l'attention du Conseil de sécurité que l'utilisation ou la menace d'utiliser les armes nucléaires dans toute partie du monde, a estimé le représentant. Le Nigéria espère que ce débat marquera le début du lancement de plans d'action concrets pour trouver une solution à ce problème urgent.

Encouragé par la bonne volonté dont témoigne le Partenariat international contre le sida en Afrique, le Nigéria veut croire que la question du sida et des conflits armés avec toutes leurs conséquences sur la situation en Afrique se verront accorder le statut de questions de "sécurité internationale" qu'ils méritent et qui relèvent de la compétence du Conseil de sécurité, a conclu le représentant.

Mme PENNY WENSLEY (Australie) a indiqué que la priorité que son pays accorde à la lutte contre le VIH/sida en Afrique figure dans son programme d'assistance. En dépit du fait que les efforts internationaux de développement de l'Australie portent essentiellement sur la région d'Asie et du Pacifique, l'Afrique reçoit 25% des ressources australiennes consacrées à la lutte contre le VIH/sida. En tant que bailleur de fonds relativement petit en Afrique, l'Australie continuera à accorder une part importance de son aide à la lutte contre le VIH/sida et à jouer un rôle d'appui dans ce domaine. L'Australie s'est engagée à consacrer 100 millions de dollars australiens pour une période de quatre ans en vue de contribuer à la lutte contre le VIH/sida en Afrique australe et de l'est. Les mesures prises par l'Australie visent à contribuer à la prévention de la propagation de la maladie, à en atténuer les incidences sur l'individu et sur la société, et à répondre aux besoins économiques et sociaux créés par la maladie. Le programme australien VIH/sida vise essentiellement les communautés rurales et les membres les plus vulnérables de la société, en particulier les femmes et les enfants. Pour mettre en oeuvre ce programme, l'Australie oeuvre en étroite coopération avec les gouvernements des pays africains, les institutions multilatérales et les ONG locales.

Les projets bilatéraux futurs continueront à chercher à renforcer la capacité des gouvernements partenaires à s'engager dans la planification à long terme pour répondre aux conséquences économiques et sociales de la pandémie du sida. Les stratégies de prévention devront mettre l'accent sur les jeunes et les mères qui risquent de transmettre la maladie à leurs enfants. En outre, l'Australie verse 1,6 million de dollars australiens au Programme ONU-sida.

M. DURI MOHAMMED (Ethiopie) a préconisé une approche globale pour faire face aux conséquences complexes et graves du sida en Afrique. Pour combattre ce fléau de manière efficace, des partenariats entre les institutions gouvernementales, les organisations non gouvernementales, le monde des affaires, la société civile, les malades et les groupes d'activistes sont essentiels. Les communautés et les gouvernements doivent travailler main dans la main pour trouver une solution. Pour sa part, l'Ethiopie déploie des efforts pour contenir la propagation du VIH/sida depuis le milieu des années 1980, par le biais notamment de campagnes de sensibilisation. Ainsi, en 1987, un Programme national de contrôle du sida a été mis en place au sein du Ministère de la santé. En complément de ce Programme, des groupes civiques ont lancé des activités de sensibilisation sur les conséquences du sida.

Ces efforts n'ont toutefois pas débouché sur les résultats escomptés. Le Gouvernement a donc formulé une politique "VIH/sida" visant à créer un environnement favorable au renforcement des partenariats entre le Gouvernement, la société civile et la communauté internationale pour lutter contre le sida. Pour mobiliser tous les secteurs de la société, le Gouvernement fédéral se concentre actuellement sur un programme global et est en train d'établir un Conseil national qui sera chargé de surveiller la mise en oeuvre du Programme. Ces efforts nécessitent soutien et assistance internationale, a souligné M. Mohammed.

Le sida n'est pas seulement un problème africain. C'est un problème mondial et il exige l'engagement et l'action de tous les pays, a poursuivi le représentant. Il a souhaité que le débat au Conseil de sécurité ouvre la voie à une coopération internationale plus efficace et mieux coordonnée et au lancement d'une action contre le sida. L'aide internationale est indispensable pour soutenir les efforts déployés par l'Afrique pour lutter contre le fléau du sida. Or, jusqu'à présent, cette aide a été insuffisante, a-t-il observé. La réponse de la communauté internationale doit être concrète et pratique. A cet égard, il est également important d'assurer l'accès à prix raisonnable aux traitements et aux médicaments. Cette question, de même que les conséquences socioéconomiques du VIH/sida demeurent des défis urgents à relever, a conclu le représentant.

M. ILEKA ATOKI (République démocratique du Congo) a fait remarquer que c'est en Afrique subsaharienne - région dont fait partie la République démocratique du Congo - que l'épidémie connaît actuellement son plus fort développement. Les gouvernements de la région se sont engagés à lutter pour trouver les différents moyens de prévenir une propagation plus grande encore, et continuent pour ce faire à rechercher des moyens encore plus efficaces pour réduire les effets du sida, malgré les énormes difficultés qu'ils connaissent en raison de ressources limitées, de la pauvreté et des guerres de toutes sortes. Bénéficiant d'une coopération tant bilatérale que multilatérale conséquente, mon pays avait dans le passé mis au point avec l'aide de la communauté des bailleurs de fonds, un projet sida qui s'attaquait sérieusement aux effets dévastateurs du virus et qui a été en soi un succès, essentiellement dans le domaine de la prévention et de l'accès à l'information en matière de sida, a poursuivi le représentant. En 1994, le pays a été l'hôte de millions de réfugiés venus essentiellement du Rwanda voisin. Leur présence a été un désastre tant écologique que social et économique. Elle a également été le vecteur dans les provinces orientales de maladies sexuellement transmissibles et évidemment du virus VIH/sida. Depuis le 2 août 1998, la RDC subit les affres d'une agression de la part de la coalition armée des forces régulières du Rwanda, de l'Ouganda et du Burundi. Cette guerre, avec son lot de misère, de populations déplacées, de flux de réfugiés, contribue grandement à la propagation du sida.

La population congolaise est livrée en pâture à toutes sortes de maladies, y compris des virus insoupçonnés jusqu'à une date toute récente, notamment Ebola ou de Marburg, et pour lesquels comme pour le sida, il n'existe pas de vaccin. La guerre a également vu l'essor d'une technique militaire pour le moins étrange et pratiquée par les Forces armées ougandaises, à savoir l'envoi sur le terrain de militaires séropositifs qui ne se privent pas de violer systématiquement les femmes mariées et les jeunes filles, contribuant ainsi à la propagation exponentielle du sida dans les provinces occupées.

M. IBRA DEGUENE KA (Sénégal) a estimé que l'épidémie du sida n'est pas un simple problème de santé publique, mais aussi une question de développement qui pose des obstacles majeurs à l'avenir de l'Afrique. Il est donc heureux que l'ONU et le Conseil de sécurité aient décidé de consacrer des efforts à la lutte contre cette maladie. En 1992, le Sénégal avait soutenu, lors du Sommet de l'OUA à Dakar, une résolution relative à la reconnaissance du sida par les Etats du continent africain comme une menace grave à l'avenir de l'Afrique. Cette résolution engageait déjà les Etats à tout mettre en oeuvre pour limiter la propagation et l'impact de ce fléau.

Au plan national, le Sénégal a mis en place un programme national de lutte contre le sida, programme qui a bénéficié de structures favorables à la lutte contre le sida et de la compréhension de la population sénégalaise. Notre pays a mis en oeuvre de véritables stratégies de prévention au lendemain de la création du Comité national de lutte contre le sida. Dès l'année 1990, l'accès aux préservatifs s'est généralisé au Sénégal, et l'usage en a été multiplié par 10 en dix ans. Concernant l'information sur la maladie, le Sénégal a intégré, à partir de l'année 1992, l'éducation sexuelle des jeunes dans ses programmes scolaires, et plus de 130 000 manuels scolaires d'information sur la maladie ont été distribués dans les institutions d'enseignement public et privé du pays. Le Sénégal est soutenu dans ses efforts par des ONG, et des associations de personnes atteintes du sida ont pu bénéficier d'une formation leur permettant de prendre part aux activités de soins et de prévention.

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