LE FORUM DE LA TELEVISION SUR LE THEME "L'IMPACT DE LA TELEVISION SUR LA PAIX ET LE DEVELOPPEMENT" S'EST ACHEVE
Communiqué de Presse
PI/1166
LE FORUM DE LA TELEVISION SUR LE THEME "L'IMPACT DE LA TELEVISION SUR LA PAIX ET LE DEVELOPPEMENT" S'EST ACHEVE
19991119Le Forum mondial de la télévision s'est achevé cet après-midi, en présence de M. Kensaku Hogen, Secrétaire général adjoint aux communications et à l'information des Nations Unies. La séance de clôture a permis à trois personnalités du monde de la télévision de dresser le bilan des défis identifiés lors du Forum qui se tient depuis hier. S'exprimant sur le rôle de la télévision dans le développement, Mme Jennifer Sibanda, Directrice générale de la Fédération des femmes de presse africaines, a dénoncé, en cette ère de mondialisation, le risque de suprématie culturelle véhiculée par les images des pays qui détiennent le pouvoir médiatique. Estimant que le développement durable passe par la prise en compte de la diversité des cultures et des besoins, elle a appelé à la mise en place de courants d'information diversifiés. Elle a remis en question les définitions actuelles du développement et a appelé les peuples africains à élaborer leur propre conception du développement.
M. Joseph Flaherty, Vice-Président principal de la technologie, CBS Corporation (USA), a, quant à lui, dressé le bilan des avancées réalisées dans le domaine de la technologie télévisuelle. Il a indiqué que la télévision digitale et la télévision à haute définition (TVHD) sont en train de prendre la place des systèmes actuels de télévision analogique. La qualité la plus haute en matière d'image est actuellement fournie par la TVHD. Le défi qui se pose à nous, a-t-il estimé, est désormais de fournir les meilleurs programmes possibles en matière d'information, d'éducation, de formation et de culture à la population mondiale. A cette fin, il conviendrait de souscrire aux objectifs de l'Union internationale des télécommunication qui consistent à redistribuer les bénéfices des nouvelles techniques de communication à tous les habitants de la planète.
M. Xavier Gouyou Beauchamps, Président du Groupement des radiodiffuseurs français, a fait le point de la situation des programmes éducatifs et des programmes destinés aux enfants. Ce dernier secteur, a-t-il expliqué, est confronté à la nécessité de puiser dans les valeurs morales en raison d'une compétitivité extrême. La télévision éducative, de son côté, fait face à une demande accrue en matière de savoir en raison du développement effréné des technologies modernes de communication. L'essor que connaît la télévision
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éducative est une bonne chose mais est-il significatif? s'est-il interrogé en expliquant que ces chaînes donnent accès à l'éducation à ceux qui ont déjà un niveau élevé. Sir Arthur C. Clarke, auteur du livre "Odysée de l'espace" et qui a participé au Forum par vidéoconférence depuis le Sri Lanka, s'est inquiété de l'importance des images de brutalité que contiennent, en particulier, les programmes pour enfants. Il a salué les appels lancés récemment pour que les responsables de programmes adoptent une approche plus éthique.
Le Ministre de la presse, de la télévision, de la radiodiffusion et des télécommunications de la Fédération de Russie, M. Mikhail Lessin, a fait une déclaration.
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Bilan des défis et opportunités identifiés aux ateliers du Forum des médias
M. MIKHAIL LESSIN, Ministre de la presse, de la télévision, de la radiodiffusion et des télécommunications de la Fédération de Russie, a estimé que les participants ont fait de ce Forum un véritable évènement. La Russie n'en est qu'à ses débuts en matière de technologies de l'information modernes. Nous avons lancé un projet de communication et d'information dans un contexte de libertés et de réformes socio-économique difficiles. La loi de la concurrence contribuera à la réalisation de progrès. La société russe ne doit pas être prisonnière du monde de l'information. Le consommateur est en droit de revendiquer des médias l'accès à la culture et à l'éducation.
M. XAVIER GOUYOU BEAUCHAMPS, Président du Groupement des radiodiffuseurs français, s'est exprimé sur le thème de la programmation éducative et de la télévision pour enfants. Il a expliqué que la télévision pour enfants exige un nombre important de programmes de meilleure qualité. Les programmes pour enfants se trouvent dans une situation particulière. Le marché est en plein essort, notamment en France. Il est soumis à une très forte concurrence. La nécessité de trouver les capitaux et les partenaires font de celui-ci un secteur où le choix des valeurs est crucial. On s'éloigne de la quête du profit pour s'orienter vers la recherche de l'identité culturelle qui justifie des mesures propres à encourager la production locale de programmes pour enfants. La valeur d'exemplarité de l'école doit trouver une prolongation dans la télévision pour enfants. Il faut par sensibiliser les élites européennes, qui affichent souvent une attitude méprisante envers la télévision, au pouvoir d'apprentissage des images. Il est également important de soutenir et d'encourager les activités concertées internationales dans le domaine de la télévision pour enfants.
L'atelier de travail sur la télévision éducative a montré qu'il existe plusieurs formes de télévision éducative. Les pays en développement ont tendance à voir dans la télévision scolaire et universitaire un substitut aux moyens traditionnels éducatifs. Un autre type de télévision éducative vise la socialisation et la vision globale des savoirs contemporains. Une autre forme est la télévision culturelle qui a un niveau d'exigence très élevé. La chaîne Arte correspond à ce modèle. L'accélération des nouveaux moyens de communication a accru la demande en matière de savoir. Toute société a besoin, pour maintenir son unité et sa cohésion sociale, de communiquer et la télévision représente un des éléments de cohésion sociale. Favoriser l'apprentissage et une citoyenneté responsable, tel est le rôle de la télévision éducative. Néanmoins, le passage de la théorie à la pratique butte sur l'accès à l'information et sur les choix budgétaires. L'essor de la télévision éducative en raison des développements de la technologie numérique est une bonne chose. Ces chaînes ne donnent-elles pas l'accès à l'éducation à ceux qui ont déjà un niveau élevé. Nous sommes en droit d'attendre d'elle qu'elle contribue à la diffusion des valeurs humanistes et démocratiques. Le bilan de la télévision en général n'est pas, à cet égard, aussi négatif qu'on pourrait être tenté de le croire.
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M. JOSEPH FLAHERTY, Vice-Président principal de la technologie, CBS Corporation (USA), a déclaré que si à l'issue de ces deux jours de forum, il est manifeste que l'industrie de la télévision présente des lacunes, les potentiels dont elle dispose à court terme sont en revanche considérables. Les changements techniques dans cette industrie revêtent une grande importance. A l'origine de ces changements se trouvent les progrès réalisés dans la technologie digitale. La télévision digitale et la télévision à haute définition (TVHD) sont en train de prendre la place des systèmes actuels de télévision analogiques et font entrevoir un avenir tout différent de l'avènement de la télévision couleur. Se référant à la citation suivante de l'auteur français Paul Valéry "le problème avec notre époque, c'est que l'avenir n'est plus ce qu'il était", M. Flaherty a indiqué que, depuis la naissance de le télévision digitale et de la TVHD le 1er juin 1990, lorsque General Instrument a proposé un système de télévision à haute définition et intégralement digitale, la télévision allait changer pour toujours. La télévision est, à l'heure actuelle, le moyen de communication le plus important sur la planète capable d'éduquer, d'informer, de divertir et d'amuser les hommes partout dans le monde.
Exposant une vue d'ensemble des avancées récentes réalisées dans la technologie de la télévision, M. Flaherty a indiqué que la qualité la plus haute en matière d'image est actuellement fournie par la TVHD qui permet de multiplier par six le nombre de lignes ou de pixels à l'écran, par rapport aux images transmises actuellement par la télévision. La technologie de la haute définition consiste à comprimer les signaux audio et vidéo, ce qui permet d'utiliser plus efficacement les médias d'enregistrement. En 1935, la haute définition représentait ainsi 343 lignes alors qu'elle en représente aujourd'hui 1080 lignes pour 1920 échantillons de lignes. Projetée sur des écrans larges, la technologie de la haute définition créera une nouvelle expérience de projection pour la maison, les écoles et les cinémas. La qualité de diffusion a toujours constitué la "marque d'excellence" de la télévision que beaucoup cherchent à atteindre et que peu parviennent à égaler. La télévision à haute définition produit une résolution verticale et une résolution horizontale deux fois plus importante que la télévision actuelle. Le défi qui se pose à nous est désormais de fournir les meilleurs programmes possibles en matière d'information, d'éducation, de formation et de culture. A cette fin, il conviendrait de souscrire aux objectifs de l'Union internationale des télécommunication qui consistent à promouvoir les bénéfices des nouvelles télécommunications pour que tous les habitants de la planète puissent en profiter. Il faudrait ensuite éviter de réaliser de nouveaux investissements dans les équipements analogiques car ils seront vite dépassés. Il faut également étudier les préférences des téléspectateurs en matière d'écrans larges et de récepteurs numériques et faire parvenir ces données aux fabricants.
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Le marché international des émissions évolue, lui aussi, vers la haute définition, notamment les programmes sportifs. La qualité de la télévision digitale fournira toutes sortes de nouvelles occasions pour un service de plus haute qualité. La TVDH trouvera des applications dans tous les domaines, notamment dans le commerce électronique, le reportage, et la retransmission d'événements sportifs tels que la coupe mondiale de football. 15 heures d'émission à haute définition sont diffusées chaque semaine sur CBS en grande audience le soir. Des recherches indiquent que les spectateurs veulent la haute définition et qu'ils prendront cette technologie comme critère d'achat. A la fin du mois, plus de 100 000 téléviseurs auront été vendus aux Etats-Unis alors qu'il aura fallu près de quatre ans pour vendre 1 million de magnétoscopes et près de trois ans pour arriver à vendre 1 million de lecteurs de CD. L'ère de la télévision digitale a donc véritablement commencé et, à cet égard, il semble que les pays qui n'ont pas encore investi dans la technologie analogique sont ceux qui seront le mieux à même de réaliser directement la transition vers la technologie de la haute définition.
Mme JENNIFER SIBANDA, Directrice générale de la Fédération des femmes de presse africaines, s'est exprimée sur le thème du rôle de la télévision dans le développement. Elle a évoqué le pouvoir immense de la télévision dans un environnement en pleine mutation. La planète se trouve réduite à la taille d'un village. Les populations s'ouvrent de plus en plus à l'information, ce qui a poussé les gouvernements à devenir plus démocratiques et comptables de leurs actes. Les services de télévision mondiaux contribuent à une meilleure compréhension des événements qui se déroulent dans des pays éloignés, générant ainsi plus de compréhension et de solidarité entre les peuples. Des craintes ont été formulées quant au risque de suprématie culturelle véhiculée par les images, a-t-elle indiqué. Pourtant, pour garantir un développement durable, il faut tenir compte des besoins des peuples. Sans la participation des masses populaires, la télévision offre une vision unique du monde qui va du sommet vers le bas. Il faut mettre en place des courants d'information diversifiés et non pas unidirectionnels car le monde n'est pas homogène. Dans la plupart des cas, la culture dominante est celle qui détient le pouvoir médiatique. Certaines émissions étrangères en Afrique vont à l'encontre de nos valeurs culturelles. Pourtant, le développement et la culture sont interdépendants. La culture peut renforcer ou mettre un frein au développement quant elle est étrangère. Mais comment définit-on le développement? Nous, Africains, devons définir nous-mêmes le développement de nos masses car toute stratégie qui repose sur des valeurs extérieures sera vouée à l'échec.
L'autre thème évoqué lors des ateliers a porté sur la langue, qui est après tout le véhicule de notre culture et de notre identité nationale. Les langues locales sont en train de mourir en raison de la suprématie des langues dominantes véhiculées par les ondes. Un autre thème à porté sur la vitesse avec laquelle la technologie évolue. A l'heure de l'Internet, a expliqué
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Mme Sibanda, nos salles de presse en Afrique sont toujours équipées de machines à écrire. Les trois quarts de la population mondiale n'ont pas accès à un service téléphonique. L'électricité est encore un rêve dans de nombreux pays. Cinq pour-cent des pays en développement possèdent des postes de télévision tandis que 20 à 30% de ces pays ont des postes de radio. La radio, qui utilise la langue locale, reste la technologie la plus appropriée en Afrique. Quatre-vingt-dix pour-cent de la population africaine a accès à la radio. M. Sibanda a évoqué les déséquilibres en matière de représentation sexospécifique dans les médias africains. Tous ces éléments vont à l'encontre des impératifs de développement. Comment, dans ce contexte, s'éloigner d'une définition étroite du développement. Comment la technologie peut-elle favoriser le développement?
Sir ARTHUR C. CLARKE, auteur de quelque 80 ouvrages, notamment du livre "Odyssée de l'espace", n'a pu se joindre personnellement à la conférence pour des raisons de santé, mais il y a participé à distance par vidéoconférence depuis le Sri Lanka. Il a déclaré que le développement de la télévision représente la révolution technologique la plus marquante de l'histoire, se rappelant encore des débuts de la télévision, du temps où les cassettes vidéo n'existaient pas encore et où chaque programme devait être répété quatre fois pour permettre une couverture de tous les fuseaux horaires. Dans ces circonstances, il était difficile de rester spontané au bout de la deuxième ou de la troisième tentative. Bien que les images que nous livre aujourd'hui la télévision sont d'une excellente qualité, des efforts considérables sont toujours en cours pour les améliorer encore et - ce qui est peut-être encore plus important - pour mettre en place des normes universellement acceptées, ce qui représente un autre grand défi pour les Nations Unies. Mais peut-être avons-nous déjà atteint le point auquel toute amélioration supplémentaire serait marginale et les limitations dont il est question ne sont plus de nature uniquement technique, elles ont également un caractère économique, politique, sans parler de leur aspect culturel.
Sir Arthur a indiqué que ce qu'il reprochait le plus à la télévision en général, c'est l'importance massive des images de brutalité et de pure atrocité que contient un grand nombre de programmes, en particulier ceux qui s'adressent aux enfants. Il a salué, à cet égard, l'appel lancé récemment par Steve Allen pour que les responsables de programmes adoptent une approche plus éthique, notant également que le Congrès américain a récemment engagé, sans grande conviction cependant, quelques tentatives, pour faire face à ce problème. Il faut également reconnaître qu'il existe de nombreux programmes qui ont enrichi d'innombrables vies et éduqué des générations entières comme jamais auparavant. Fait encore plus marquant peut-être, la télévision a constitué la force principale ayant conduit à la création du village mondial, plus exactement de la "famille" mondiale. Pour la première fois dans l'histoire, chacun peut, de n'importe quel endroit dans le monde, voir ses voisins planétaires et partager avec eux leurs joies et leurs peines, leurs victoires et leurs tragédies.
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La télévision joue actuellement un rôle clé pour lever des fonds et acheminer les secours d'urgence sur les lieux où se produisent des catastrophes naturelles ou des guerres. La télévision a souvent révélé des atrocités et, dans certains cas, a permis de les prévenir. Dans un domaine bien moins dramatique, la télévision au niveau mondial a contribué à ce que Arnold Toynbee a appelé "l'unification du monde". Bien que beaucoup reste encore à faire, c'est dans cette voie que nous nous dirigeons de façon inévitable. Il est à espérer cependant que cette unification ne détruise pas la diversité. La télévision a souvent contribué à sauver des coutumes et peut-être même des cultures entières qui, sans elle, se seraient étaient éteintes à jamais. Concluant sur les possibilités de développement technique de la télévision, Sir Arthur a lancé plusieurs défis à la technologie: sera-t-il jamais possible de parvenir à la "vraie" télévision, au sens littéral du terme "vision à distance", et de voir tout ce qu'il se passe dans le monde entier sans avoir besoin de caméra à l'autre bout de la chaîne? En allant plus loin encore, pouvez-vous vous représenter un appareil qui vous permette de voir tous les événements du passé, vous affranchissant ainsi des frontières temporelles, comme nous transgressons actuellement les frontières de l'espace? Même si la faisabilité théorique de cette question dépend des principes physiques, on peut se demander si l'on peut vraiment perdre totalement une information? Si il existe un quelconque principe cosmique de conservation qui puisse s'appliquer à l'information, comme cela est le cas pour la matière et l'énergie, alors un moyen de technologie suffisamment avancée devrait permettre de retrouver toute information.
Les programmes de télévision qui émanent de la Planète Terre occupent actuellement un volume spatial dont la circonférence est supérieure à 100 années-lumière, ce qui semble prouver, a conclu Sir Arthur, qu'il n'y a pas de civilisations avancées dans les alentours de la Terre; le contraire aurait déjà alerté les "flics" dont les voitures déclencheraient leurs sirènes à travers le spectre électromagnétique.
Déclaration de clôture
M. KENSAKU HOGEN, Secrétaire général adjoint aux communications et à l'information, a conclu le Forum en soulignant que son point fort a été l'examen des contributions que la télévision peut apporter aux objectifs des Nations Unies. Ce qu'attendaient les Nations Unies de ce Forum, c'est que les professionnels de la télévision comprennent mieux les objectifs et le travail des Nations Unies. Si tel est le cas, M. Hogen a estimé que le Forum aura été couronné de succès. Il faut que les Nations Unies tirent pleinement profit de ce formidable outil qu'est la télévision. Il faut désormais continuer à s'interroger sur la manière dont les professionnels de la télévision peuvent aider les Nations Unies dans la lutte pour la paix et le développement.
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