LES TALIBAN A NOUVEAU MENACES DE SANCTIONS PAR LE CONSEIL DE SECURITE SI USAMA BIN LADEN N'EST PAS EXTRADE AVANT LE 14 NOVEMBRE
Communiqué de Presse
CS/1104
LES TALIBAN A NOUVEAU MENACES DE SANCTIONS PAR LE CONSEIL DE SECURITE SI USAMA BIN LADEN N'EST PAS EXTRADE AVANT LE 14 NOVEMBRE
19991022Le Conseil exige que les Taliban et les autres parties mettent fin à toutes les activités liées aux drogues illégales
Le Président du Conseil de sécurité, M. Sergey Lavrov, a fait, cet après-midi, au nom des membres du Conseil de sécurité la déclaration suivante:
1. Le Conseil de sécurité a examiné le rapport du Secrétaire général en date du 21 septembre 1999 sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales (A/54/378-S/1999/994).
2. Le Conseil se déclare de nouveau gravement préoccupé par la poursuite du conflit afghan, qui fait peser une menace grave et croissante sur la paix et la sécurité régionales et internationales. Il condamne vigoureusement le lancement par les Taliban, en juillet 1999, une semaine seulement après la réunion à Tachkent du groupe des "six plus deux", d'une nouvelle offensive, qui a contrarié l'action menée au niveau international pour faciliter le rétablissement de la paix en Afghanistan, et qui se poursuit malgré les demandes répétées du Conseil tendant à ce qu'il soit mis fin aux combats. Cela est allé à l'encontre de l'effort international de restauration de la paix en Afghanistan. Les combats qui ont fait suite à cette offensive ont causé d'énormes souffrances parmi la population civile afghane. Les Taliban en portent la responsabilité principale.
3. Le Conseil réaffirme qu'il n'y a pas de solution militaire au conflit en Afghanistan et que seul un règlement politique négocié visant à la mise en place d'un gouvernement doté d'une large assise multiethnique et pleinement représentatif, acceptable par tous les Afghans, pourra conduire à la paix et à la réconciliation. Il rappelle qu'il a exigé des parties au conflit, spécialement des Taliban, qu'elles reprennent les négociations sous les auspices des Nations Unies, sans retard et sans préalable, et en pleine conformité avec les résolutions pertinentes de l'Assemblée générale et du Conseil de sécurité. Le Conseil de sécurité note que le Front uni a confirmé à plusieurs reprises qu'il était disposé à engager un dialogue avec les Taliban en vue de trouver une solution aux problèmes du pays.
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4. Le Conseil réaffirme que toute ingérence extérieure dans les affaires intérieures de l'Afghanistan, notamment la participation de personnel militaire et des combattants étrangers, et la fourniture d'armes et de matériels servant au conflit, doit cesser immédiatement. Il engage tous les États à prendre des mesures déterminées pour interdire à leur personnel militaire de préparer des opérations de combat en Afghanistan et d'y prendre part, ainsi qu'à rappeler immédiatement ce personnel, et à veiller à ce que des munitions et d'autres matériels de guerre cessent d'être livrés. Le Conseil prend connaissance avec une profonde consternation d'informations faisant état de la participation aux combats en Afghanistan, essentiellement du côté des forces des Taliban, de milliers de non-Afghans, provenant pour la plupart d'écoles religieuses, dont certains ont moins de 14 ans.
5. Le Conseil réaffirme son plein appui aux efforts de l'Organisation des Nations Unies, en particulier les activités de la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan et de l'Envoyé spécial du Secrétaire général en Afghanistan, afin de faciliter le processus politique en vue de la réalisation des objectifs que constituent la réconciliation nationale et un règlement politique durable, avec la participation de toutes les parties au conflit et de toutes les composantes de la société afghane, et réaffirme que l'Organisation des Nations Unies doit continuer de jouer le rôle central et impartial qui lui revient dans les efforts déployés à l'échelon international en vue de parvenir à un règlement pacifique du conflit afghan.
6. Le Conseil se déclare vivement préoccupé par l'aggravation critique de la situation humanitaire en Afghanistan. Il engage toutes les parties afghanes, en particulier les Taliban, à prendre les mesures voulues pour garantir l'acheminement sans interruption de l'assistance humanitaire à tous ceux qui ont besoin d'aide et, à ce propos, à s'abstenir d'entraver les activités des organismes des Nations Unies à vocation humanitaire et des organisations humanitaires internationales.
7. Le Conseil exhorte une fois de plus toutes les factions afghanes à coopérer pleinement avec la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan et les organisations internationales à vocation humanitaire et les engage, en particulier les Taliban, à prendre les mesures nécessaires pour garantir la sécurité et la liberté de circulation de leur personnel.
8. Le Conseil se félicite de la Déclaration relative aux principes fondamentaux d'un règlement pacifique du conflit en Afghanistan (A/54/174- S/1999/812, annexe) adoptée le 19 juillet 1999 à Tachkent par le groupe des "six plus deux", en particulier la décision des membres du groupe de s'abstenir de fournir quelque soutien militaire que ce soit aux parties afghanes et de veiller à ce que le territoire de leur pays ne soit pas utilisé à cette fin. Il invite instamment les membres du groupe et les factions afghanes à appliquer ces principes afin d'appuyer les efforts déployés par l'Organisation des Nations Unies pour parvenir à un règlement pacifique du conflit afghan.
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9. Le Conseil condamne énergiquement le fait que le territoire afghan, en particulier les zones tenues par les Taliban, continue d'être utilisé pour accueillir et former des terroristes et organiser des actes de terrorisme, et se réaffirme convaincu que la répression du terrorisme international est essentielle pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Il insiste pour que les Taliban cessent d'offrir aux terroristes internationaux ainsi qu'à leurs organisations refuge et entraînement, prennent les mesures effectives voulues pour que le territoire tenu par eux n'abrite pas d'installations et de camps de terroristes ni ne serve à préparer ou à organiser des actes de terrorisme dirigés contre d'autres États ou leurs citoyens, et secondent l'action menée en vue de traduire en justice les personnes accusées de terrorisme. Le Conseil exige une fois encore que les Taliban remettent Usama bin Laden, accusé de terrorisme, aux autorités compétentes, comme prévu dans la résolution 1267 (1999) du 15 octobre 1999. Il réaffirme qu'il est résolu à mettre en application le 14 novembre 1999 les mesures indiquées dans cette résolution, à moins que le Secrétaire général ne l'informe que les Taliban ont pleinement répondu à l'obligation fixée au paragraphe 2 de cette même résolution.
10. Le Conseil est également profondément préoccupé par l'augmentation sensible de la culture, de la production et du trafic de drogues en Afghanistan, en particulier dans les zones tenues par les Taliban, qui contribuera à renforcer le potentiel de guerre des Afghans et aura des conséquences encore plus graves pour la santé au niveau mondial. Il exige que les Taliban et les autres parties mettent fin à toutes les activités liées aux drogues illégales. Le Conseil demande aux États Membres et, en particulier, aux voisins de l'Afghanistan, ainsi qu'à toutes les autres parties intéressées, de prendre des mesures concertées pour mettre fin au trafic des drogues illégales d'Afghanistan.
11. Le Conseil déplore la détérioration de la situation des droits de l'homme en Afghanistan. Il est particulièrement alarmé par le mépris que les Taliban continuent d'afficher pour les préoccupations exprimées par la communauté internationale. Il souligne le caractère inacceptable du déplacement forcé de la population civile, en particulier le déplacement opéré par les Taliban au cours de leur récente offensive, des exécutions sommaires, des mauvais traitements systématiques et de la détention arbitraire de civils, de la violence et de la discrimination persistante à l'encontre de la population féminine, de la séparation d'hommes de leur famille, de l'utilisation d'enfants soldats, des incendies généralisés de cultures et de la destruction de logements, des bombardements sans discrimination et des autres violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire en Afghanistan. Il engage toutes les parties afghanes, en particulier les Taliban, à mettre un terme à ces pratiques, à respecter les normes internationales en la matière, à prendre d'urgence des mesures afin d'améliorer la situation des droits de l'homme et, à titre de priorité absolue, d'assurer la protection des civils.
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12. Le Conseil souligne de nouveau que la prise du consulat général de la République islamique d'Iran et l'assassinat de diplomates iraniens ainsi que d'un journaliste à Mazar-e-Sharif constituent des violations flagrantes du droit international. Il exige que les Taliban coopèrent sans réserve avec l'Organisation des Nations Unies pour enquêter sur ces crimes afin de traduire les responsables en justice.
13. Le Conseil attend avec intérêt le prochain rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan, et l'invite à examiner les solutions qui s'offrent au Conseil de sécurité et à l'Assemblée générale.
14. Le Conseil déplore que la direction des Taliban n'ait pas pris de mesures pour donner suite aux exigences formulées dans ses résolutions antérieures, concernant en particulier la conclusion d'un cessez-le-feu et la reprise des négociations, et, dans ce contexte, réaffirme qu'il est prêt à envisager d'imposer des mesures, conformément à la responsabilité qui lui incombe en vertu de la Charte des Nations Unies, en vue d'assurer l'application intégrale de ses résolutions pertinentes.
Rapport du Secrétaire général (A/54/378- S/1999/994)
Le rapport du Secrétaire général sur la situation en Afghanistan et ses conséquences pour la paix et la sécurité internationales, soumis en application du paragraphe 22 de la résolution 53/203 de l'Assemblée générale, décrit l'évolution de la situation de la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan depuis la publication du précédent rapport en date du 21 juin 1999.
Dans ce rapport, le Secrétaire général juge profondément inquiétant de constater qu'une semaine à peine après la réunion du groupe des "six plus deux" tenue à Tachkent le 19 et 20 juillet dernier, les Taliban ont lancé une nouvelle offensive militaire. En ne tenant manifestement pas compte de la Déclaration adoptée à Tachkent, les responsables des Taliban, qui de toute évidence continuent de miser sur une solution militaire du conflit afghan, suscitent de nouveau de sérieuses inquiétudes à propos de leurs intentions. Le Secrétaire général réaffirme sa conviction qu'il ne saurait y avoir de solution militaire au conflit en Afghanistan. La paix ne peut être réalisée que par le biais de négociations et à la faveur d'une réconciliation, et non par des conquêtes territoriales.
Notant que le Front uni avait précisé à plusieurs reprises à l'Envoyé spécial du Secrétaire général et à la Mission spéciale qu'il était disposé à engager des pourparlers avec les Taliban en vue de parvenir à une solution des problèmes du pays, le Secrétaire général exhorte les Taliban à accepter cette offre. Il alerte une fois de plus la communauté internationale à propos de l'aggravation de la situation relative aux droits de l'homme dans le pays. Il
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souligne que le déplacement forcé de la population civile opéré par les Taliban pendant leur récente offensive est particulièrement alarmant, car il traduit le peu de cas que le mouvement semble faire des préoccupations exprimées par la communauté internationale. Le Secrétaire général demande instamment aux parties afghanes de prendre sans retard les mesures propres à améliorer la situation relative aux droits de l'homme, et, comme un premier pas immédiat, d'assurer la protection des civils. En ce qui concerne les enfants, dont certains sont engagés aux combats, il a lancé un appel à toutes le parties pour qu'elles respectent la Convention relative aux enfants.
Le Secrétaire général a jugé extrêmement inquiétant que non seulement des forces extérieures continuent d'alimenter les combats en Afghanistan en fournissant des munitions et autres matériels de guerre, mais également qu'un nombre croissant de ressortissants d'autres pays prennent part aux combats. L'augmentation des activités de trafic de drogues, en particulier à partir des régions contrôlées par les Taliban, doit être également appréhendée comme un instrument essentiel au service du renforcement du potentiel de guerre en Afghanistan.
Le fait que des éléments extérieurs continuent d'être mêlés au conflit amène le Secrétaire général à se poser la question du rôle du groupe des "six plus deux", créé à l'origine pour mettre au point une stratégie commune devant conduire à une solution pacifique du conflit afghan. En fait, note le rapport, eu égard au soutien qu'ils continuent d'apporter à certaines factions afghanes, certains membres du groupe donnent l'impression de se payer des mots lorsqu'ils proclament leurs intentions. Le Secrétaire général dit partager les doutes que son Envoyé spécial, M. Lakhdar Brahimi, nourrit à propos de la contribution pratique que le groupe "six plus deux" apporte aux efforts de rétablissement de la paix déployés par l'ONU en Afghanistan. En conséquences, il appuie la recommandation de l'Envoyé spécial visant à réexaminer la façon dont l'ONU aborde le conflit afghan, y compris le mécanisme de soutien des Etats Membres. Les résultats de cet examen seront communiqués à l'Assemblée générale et au Conseil de sécurité dans le rapport final du Secrétaire général en 1999.
Rappel des faits
Le 15 octobre dernier, le Conseil de sécurité a, dans une résolution adoptée à l'unanimité, exigé l'extradition de Usama bin Laden, inculpé par la justice des Etats-Unis pour les attentats de Dar es-Salaam (Tanzanie) et de Nairobi (Kenya) en août 1998 qui avaient fait plus de 200 morts et quelques 4000 blessés. Le Conseil a prévu d'imposer aux Taliban une série de sanctions, notamment le gel de leurs avoirs et l'interdiction des vols internationaux de leurs aéronefs, s'ils ne livrent pas Usama bin Laden avant le 14 novembre prochain. Les Taliban ont jusqu'à présent refusé de livrer le milliardaire saoudien (déchu de sa nationalité) qui vit depuis plusieurs années sur le territoire afghan sous leur contrôle.
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