En cours au Siège de l'ONU

CS/1103

LE CONSEIL DE SECURITE CREE LA MISSION DES NATIONS UNIES EN SIERRA LEONE POUR AIDER A LA MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD DE PAIX DE LOME

22 octobre 1999


Communiqué de Presse
CS/1103


LE CONSEIL DE SECURITE CREE LA MISSION DES NATIONS UNIES EN SIERRA LEONE POUR AIDER A LA MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD DE PAIX DE LOME

19991022

La MINUSIL forte de 6 000 hommes est autorisée à prendre des mesures pour protéger le personnel de l'ONU et les civils

Le Conseil de sécurité a adopté cet après-midi à l'unanimité la résolution 1270 (1999) par laquelle il décide de créer, avec effet immédiat, pour une période initiale de six mois, la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL) qui aura notamment pour mandat de coopérer à l'exécution de l'Accord de paix, signé à Lomé le 7 juillet 1999, d'aider le Gouvernement sierra-léonais à appliquer le plan de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, de surveiller le cessez-le-feu, et d'apporter, sur demande, un appui pour les élections qui doivent se tenir conformément aux dispositions de la Constitution actuelle de la Sierra Leone. Le Conseil décide que la composante militaire de la MINUSIL comprendra un maximum de 6 000 hommes, dont 260 observateurs militaires, effectif qui pourra être revu périodiquement en fonction de l'évolution de la situation sur le terrain. Il décide que la MINUSIL reprendra les principales composantes civile et militaire, et les fonctions de la Mission d'observation des Nations Unies en Sierra Leone (MONUSIL). Il approuve le nouveau mandat du Groupe d'observateurs militaires (ECOMOG) de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et souligne la nécessité d'assurer une coopération et une coordination étroite entre l'ECOMOG et la MINUSIL.

Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte, le Conseil de sécurité décide que dans l'accomplissement de son mandat, la MINUSIL pourra prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la liberté de circulation de son personnel et, dans la mesure de ses moyens, la protection des civils immédiatement menacés de violences physiques dans ses zones d'opération. Le Conseil engage le Gouvernement sierra-léonais à veiller à la mise en place rapide et au bon fonctionnement de la Commission de la vérité et de la réconciliation, la Commission des droits de l'homme et la Commission pour la consolidation de la paix. Il engage le Front uni révolutionnaire (FUR), les forces de défense civile, les anciennes forces armées sierra-léonaises, le Conseil révolutionnaire des forces armées (CRFA) et tous les autres groupes armés en Sierra Leone à commencer immédiatement à se dissoudre et à rendre

leurs armes. Le Conseil encourage de nouveau les parties concernées à répondre aux besoins spécifiques de tous les enfants touchés par le conflit, dont le sort est une des questions les plus pressantes à laquelle doit s'attaquer la Sierra Leone, et de faire en sorte que les réfugiés et les personnes déplacées puissent regagner librement et en toute sécurité leurs foyers. Il invite les groupes rebelles à mettre immédiatement fin aux prises d'otages et à chercher la réponse à leurs préoccupations au sujet des termes de l'Accord de paix par des moyens pacifiques.

Le Conseil invite tous les Etats et organisations internationales à contribuer généreusement au Fonds d'affectation spéciale multidonateurs créé par la Banque internationale pour la reconstruction et le développement pour financer le processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion. Il leur demande instamment de fournir à titre prioritaire une aide humanitaire à la population sierra-léonaise, ainsi qu'une assistance soutenue au titre des tâches à long terme en matière de consolidation de la paix, de reconstruction, de redressement économique et social et de développement. Il demande instamment au Gouvernement sierra-léonais d'accélérer la mise en place d'une force de police et de forces armées nationales professionnelles et responsables.

Prenant la parole avant l'adoption de la résolution, le Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, M. Olara Otunnu, a souligné qu'outre la fin de la guerre et le rétablissement de la paix, le défi le plus important est la "crise des jeunes". Rappelant que les enfants de Sierra Leone ont souffert au-delà de ce qui est imaginable, M. Otunnu a expliqué qu'il avait proposé un programme d'action spécifique en faveur des jeunes Sierra-léonais, pour lequel il a demandé l'appui de la communauté internationale. M. Otunnu a exhorté les dirigeants du FUR et du CRFA à faire preuve d'honnêteté vis-à-vis des enfants et à reconnaître leur rôle dans les atrocités commises pendant la guerre.

Le représentant de la Sierra Leone a estimé que l'adoption de la résolution et la création de la MINUSIL permettraient de mieux garantir la sécurité de tous les Sierra-léonais. Louant le rôle joué par l'ECOMOG depuis son engagement dans le pays, il a engagé le Conseil à tout faire pour assurer son maintien en Sierra Leone. Sa présence est indispensable à la mise en oeuvre de l'Accord de Lomé et au renforcement de la paix dans le pays, a-t-il déclaré. Le représentant du Nigéria a estimé pour sa part que la création de la MINUSIL soulagerait son pays d'un lourd fardeau en termes de ressources humaines et financières. Il s'est félicité de voir l'ONU assumer sa responsabilité de maintien de la paix et de la sécurité internationales dans la sous-région et a assuré le Conseil que son pays était prêt à continuer à assumer sa part dans cet effort.

Les Etats Membres suivants du Conseil de sécurité ont expliqué leur vote: Royaume-Uni, Etats-Unis, Malaisie, France, Gambie, Pays-Bas, Chine, Brésil, Argentine, Canada et Bahreïn.

Rappel des faits

L'Accord de paix, signé le 7 juillet 1999 à Lomé (Togo), entre le Gouvernement sierra-léonais et le Front uni révolutionnaire (FUR), a mis fin à plusieurs années de guerre en Sierra Leone, à la suite de l'apparition de la rébellion du FUR en 1991. Au plus fort du conflit, le Président élu, Ahmad Tejan Kabbah, avait été contraint à l'exil, à la suite d'un coup d'Etat militaire le 25 mai 1997, avant d'être rétabli au pouvoir en mars 1998. Outre la cessation totale et définitive des hostilités, l'Accord de paix prévoit notamment la transformation du FUR en un parti politique et la participation de ses membres à un gouvernement d'union nationale, actuellement en cours de formation, ainsi que la tenue d'élections nationales, présidentielles et législatives. Le Gouvernement est également tenu, par l'Accord, de procéder à la restructuration des forces armées en vue de la création d'une véritable force armée nationale reflétant la structure géopolitique du pays et ouverte aux ex-combattants du RUF, des Forces de défense civile, et des Forces armées sierra-léonaises répondant aux critères établis. Il prévoit le pardon et l'amnistie à tous les combattants et à leurs collaborateurs pour tous les actes commis dans la poursuite de leurs objectifs jusqu'à la date de signature de l'Accord, une disposition qui, dans l'entendement des Nations Unies, ne peut concerner les crimes de génocide, les crimes de guerre et autres violations graves du droit international humanitaire, selon le Secrétaire général. Le Conseil de sécurité avait, dans un premier temps, autorisé le 20 août dernier un accroissement provisoire des effectifs de la Mission d'observation des Nations Unies en Sierra Leone (MONUSIL) et de ses composantes politique, affaires civiles, information, droits de l'homme et protection des enfants.

Projet de résolution (S/1999/1069)

Le Conseil de sécurité,

Rappelant ses résolutions 1171 (1998) du 5 juin 1998, 1181 (1998) du 13 juillet 1998, 1231 (1999) du 11 mars 1991 et 1260 (1999) du 20 août 1999 et ses autres résolutions sur la question, ainsi que la déclaration de son Président en date du 15 mai 1999 (S/PRST/1999/13),

Rappelant également le rapport du Secrétaire général en date du 8 septembre 1999 (S/1999/957) et sa résolution 1265 (1999) du 17 septembre 1999 concernant la protection des civils en période de conflit armé,

Affirmant l'attachement de tous les États au respect de la souveraineté, de l'indépendance politique et de l'intégrité territoriale de la Sierra Leone,

Ayant examiné le rapport du Secrétaire général en date du 23 septembre 1999,

Considérant que la situation en Sierra Leone continue de faire peser une menace sur la paix et la sécurité internationales dans la région,

1. Accueille avec satisfaction les importantes mesures prises par le Gouvernement sierra-léonais, la direction du Front uni révolutionnaire (FUR), le Groupe d'observateurs militaires (ECOMOG) de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et la Mission d'observation des Nations Unies en Sierra Leone (MONUSIL) au titre de l'application de l'Accord de paix (S/1999/777) depuis sa signature à Lomé, le 7 juillet 1999, et reconnaît le rôle important que joue le Comité conjoint de mise en oeuvre créé par l'Accord de paix sous la présidence du Président du Togo;

2. Invite les parties à respecter tous les engagements qu'elles ont pris en vertu de l'Accord de paix pour faciliter le rétablissement de la paix, la stabilité, la réconciliation nationale et le développement en Sierra Leone;

3. Prend note des dispositions préliminaires prises en vue du désarmement et de la démobilisation des ex-combattants, y compris les enfants soldats, par le Gouvernement sierra-léonais, par l'intermédiaire du Comité national du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion, et engage tous les intéressés à n'épargner aucun effort pour faire en sorte que tous les centres désignés commencent à fonctionner dès que possible;

4. Engage le FUR, les forces de défense civile, les anciennes forces armées sierra-léonaises, le Conseil révolutionnaire des forces armées (CRFA) et tous les autres groupes armés en Sierra Leone à commencer immédiatement à se dissoudre et à rendre leurs armes conformément aux dispositions de l'Accord de paix, et à participer pleinement au programme de désarmement, de démobilisation et de réinsertion;

5. Se félicite du retour, à Freetown, des dirigeants du FUR et du CRFA, et les engage à s'atteler pleinement et de façon responsable à l'application de l'Accord de paix et à amener tous les groupes rebelles à participer sans plus tarder au processus de désarmement et de démobilisation;

6. Déplore les récentes prises d'otages, notamment de membres de la MONUSIL et de l'ECOMOG, par des groupes rebelles et invite les responsables à mettre immédiatement fin à ces pratiques et à chercher la réponse à leurs préoccupations au sujet des termes de l'Accord de paix par des moyens pacifiques grâce au dialogue avec les parties concernées;

7. Réaffirme sa gratitude à l'ECOMOG pour le rôle indispensable que ses forces continuent de jouer en ce qui concerne le maintien de la sécurité et de la stabilité ainsi que la protection des civils en Sierra Leone, et approuve le nouveau mandat de l'ECOMOG adopté par la CEDEAO le 25 août 1999;

8. Décide de créer, avec effet immédiat, pour une période initiale de six mois, la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL) dont le mandat sera le suivant : a) Coopérer à l'exécution de l'Accord de paix avec le Gouvernement sierra-léonais et les autres parties à l'Accord;

b) Aider le Gouvernement sierra-léonais à appliquer le plan de désarmement, de démobilisation et de réinsertion;

c) À cette fin, établir une présence à des emplacements clefs sur l'ensemble du territoire sierra-léonais, y compris aux centres de désarmement/réception et aux centres de démobilisation;

d) Assurer la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies;

e) Surveiller le respect du cessez-le-feu conformément à l'accord de cessez-le-feu du 18 mai 1999 (S/1999/585, annexe) au moyen des mécanismes prévus dans cet accord;

f) Encourager les parties à créer des mécanismes de rétablissement de la confiance et en appuyer le fonctionnement;

g) Faciliter l'acheminement de l'assistance humanitaire;

h) Appuyer les activités des fonctionnaires civils de l'Organisation des Nations Unies, y compris le Représentant spécial du Secrétaire général et ses collaborateurs, les spécialistes des droits de l'homme et les spécialistes des affaires civiles;

i) Apporter, sur demande, un appui pour les élections qui doivent se tenir conformément aux dispositions de la Constitution actuelle de la Sierra Leone;

9. Décide également que la composante militaire de la MINUSIL comprendra un maximum de 6 000 hommes, dont 260 observateurs militaires, effectif qui pourra être revu périodiquement en fonction de l'évolution de la situation sur le terrain et des progrès réalisés dans le cadre du processus de paix, en particulier en ce qui concerne le programme de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, et prend note du paragraphe 43 du rapport du Secrétaire général en date du 23 septembre 1999;

10. Décide en outre que la MINUSIL reprendra les principales composantes civile et militaire, et les fonctions de la MONUSIL, ainsi que son matériel, et, à cet effet, décide que le mandat de la MONUSIL prendra immédiatement fin à la date de la création de la MINUSIL;

11. Se félicite que l'ECOMOG soit prêt à continuer d'assurer la sécurité dans les zones où il est actuellement déployé, en particulier autour de Freetown et de Lungi, à assurer la protection du Gouvernement sierra-léonais, à mener d'autres opérations conformément à son mandat en vue de veiller à l'application de l'Accord de paix et à commencer et poursuivre les opérations de désarmement et de démobilisation conjointement et en pleine coordination avec la MINUSIL;

12. Souligne qu'il faut assurer une coopération et une coordination étroites entre l'ECOMOG et la MINUSIL dans l'accomplissement de leurs tâches respectives et se félicite de la création envisagée de centres d'opérations conjoints à leurs quartiers généraux respectifs et, le cas échéant, également sur le terrain;

13. Réaffirme l'importance de la protection, de la sécurité et de la liberté de circulation du personnel des Nations Unies et du personnel associé, note que le Gouvernement sierra-léonais et le FUR sont convenus dans l'Accord de paix d'offrir des garanties à cet égard et invite toutes les parties sierra-léonaises à respecter pleinement le statut du personnel des Nations Unies et du personnel associé;

14. Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, décide que dans l'accomplissement de son mandat la MINUSIL pourra prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la liberté de circulation de son personnel et, dans la mesure de ses moyens, la protection des civils immédiatement menacés de violences physiques dans ses zones d'opérations, en tenant compte des attributions du Gouvernement sierra-léonais et de l'ECOMOG;

15. Souligne qu'il importe de prévoir parmi les effectifs de la MINUSIL du personnel ayant reçu une formation appropriée en ce qui concerne le droit international humanitaire et le droit relatif aux droits de l'homme et aux réfugiés, y compris les dispositions touchant les enfants et les sexospécificités, la négociation et la communication, les spécificités culturelles et la coordination entre civils et militaires;

16. Demande au Gouvernement sierra-léonais de conclure avec le Secrétaire général un accord sur le statut des forces dans les 30 jours suivant l'adoption de la présente résolution et rappelle qu'en attendant la conclusion d'un tel accord c'est le modèle d'accord sur le statut des forces en date du 9 octobre 1990 (A/45/594) qui s'appliquera provisoirement;

17. Souligne qu'il faut d'urgence promouvoir la paix et la réconciliation nationale et encourager le sens de l'obligation redditionnelle et le respect des droits de l'homme en Sierra Leone, met l'accent, dans ce contexte, sur le rôle clef que sont appelées à jouer la Commission de la vérité et de la réconciliation, la Commission des droits de l'homme et la Commission pour la consolidation de la paix créées par l'Accord de paix et engage le Gouvernement sierra-léonais à veiller à la mise en place rapide et au bon fonctionnement de ces organes avec la pleine participation de toutes les parties et en tirant parti de l'expérience qu'ont acquise et du soutien que peuvent apporter les États Membres, les organes spécialisés, d'autres organisations multilatérales et la société civile;

18. Souligne que le sort des enfants est une des questions les plus pressantes à laquelle doit s'attaquer la Sierra Leone, accueille avec satisfaction l'engagement pris par le Gouvernement sierra-léonais de continuer à collaborer avec le Fonds des Nations Unies pour l'enfance, le Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général pour la protection des enfants en période de conflit armé et d'autres organisations internationales afin d'accorder une attention particulière à la réadaptation à long terme des enfants soldats en Sierra Leone, et encourage de nouveau les entités concernées à répondre aux besoins spécifiques de tous les enfants touchés par le conflit;

19. Demande instamment à toutes les parties concernées de faire en sorte que les réfugiés et les personnes déplacées soient protégés et puissent regagner librement et en toute sécurité leurs foyers et encourage les États et les organisations internationales à fournir d'urgence une assistance à cette fin;

20. Souligne qu'il faut disposer d'urgence d'importantes ressources supplémentaires pour financer le processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion et invite tous les États et organisations internationales à contribuer généreusement au fonds d'affectation spéciale multidonateurs créé à cette fin par la Banque internationale pour la reconstruction et le développement;

21. Souligne également qu'il demeure nécessaire de fournir d'urgence une aide humanitaire importante à la population sierra- léonaise ainsi qu'une assistance soutenue et généreuse au titre des tâches à long terme en matière de consolidation de la paix, de reconstruction, de redressement économique et social et de développement en Sierra Leone, et demande instamment à tous les États et organisations internationales de fournir à titre prioritaire une telle assistance;

22. Engage toutes les parties à faire en sorte que l'aide humanitaire parvienne en toute sécurité et sans entrave à ceux qui en ont besoin en Sierra Leone, à assurer la protection et la sécurité du personnel humanitaire et à respecter strictement les dispositions pertinentes du droit relatif aux droits de l'homme et du droit international humanitaire;

23. Demande instamment au Gouvernement sierra-léonais d'accélérer la mise en place d'une force de police et de forces armées nationales professionnelles et responsables, notamment en procédant à leur restructuration et à la formation de leurs effectifs, sans quoi il ne sera pas possible d'assurer, à long terme, la stabilité, la réconciliation nationale et la reconstruction du pays, et souligne qu'il importe que la communauté internationale fournisse à cet égard son appui et son assistance;

24. Accueille avec satisfaction le travail que l'Organisation des Nations Unies continue de consacrer à l'élaboration d'un cadre stratégique pour la Sierra Leone en vue de renforcer et de rendre plus efficace la collaboration et la coordination au sein du système des Nations Unies et entre les organismes des Nations Unies et leurs partenaires nationaux et internationaux en Sierra Leone;

25. Note que le Secrétaire général a l'intention de suivre de près l'évolution de la situation en Sierra Leone et de lui adresser, le cas échéant, des propositions supplémentaires;

26. Prie le Secrétaire général de lui communiquer tous les 45 jours des informations actualisées sur l'état du processus de paix, sur les conditions de sécurité sur le terrain et sur le maintien de l'effectif actuel du personnel de l'ECOMOG déployé dans le pays, afin que les effectifs militaires et les tâches à accomplir puissent être revus comme il est prévu aux paragraphes 49 et 50 du rapport du Secrétaire général en date du 23 septembre 1999;

27. Décide de demeurer activement saisi de la question.

Rapport du Secrétaire général (S/1999/836)

Le huitième rapport du Secrétaire Général sur la Mission d'observation des Nations Unies en Sierra Leone fait suite à la demande adressée au Secrétaire général par le Conseil de sécurité qui le prie de lui présenter dès que possible un rapport additionnel contenant des recommandations relatives au mandat et à la structure de la présence élargie des forces de maintien de la paix des Nations Unies qui pourrait être nécessaire en Sierra Leone. Est annexé au rapport du Secrétaire général un tableau récapitulatif de la composition de la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MONUSIL), qui compte 107 personnes au 21 septembre 1999.

Après avoir rappelé l'évolution de la situation politique, notamment les progrès réalisés dans l'application de l'Accord de paix de Lomé depuis son septième rapport au Conseil de sécurité (S/1999/836), le Secrétaire général indique qu'un certain nombre d'obstacles au bon déroulement du processus de paix demeure. Le Secrétaire général fait le point de la situation sur les plans militaires et de la sécurité, dans les domaines des droits de l'homme, des aspects humanitaires et dans le domaine du désarmement et de la démobilisation. Le Secrétaire général présente enfin le rôle futur des Nations Unies en Sierra Leone, sous l'angle de la coopération entre l'ECOMOG (Groupe de surveillance du cessez-le-feu) et de l'ONU, d'une part, et sous l'angle du concept opérationnel de la force des Nations Unies, d'autre part. Il évoque aussi les aspects financiers de la MONUSIL en indiquant qu'au 31 août 1999 les contributions non acquittées au compte spécial de cette mission s'élevaient à 4,5 millions de dollars et que le montant total des contributions non acquittées à l'ensemble des opérations de maintien de la paix se chiffrait à ce jour à 1 965 900 000 dollars. Par ailleurs, les contributions au Fonds d'affectation spéciale créé pour appuyer les initiatives de maintien de la paix des Nations Unies s'établissaient à 2,1 millions de dollars et les dépenses approuvées à 1,1 million de dollars.

Dans ses observations et recommandations, le Secrétaire général souligne que les efforts à long terme qu'implique l'Accord de paix de Lomé exigent un engagement de la part du Gouvernement et des donateurs pendant de longues années encore. Il note toutefois que ce dont la Sierra Leone a besoin d'urgence dans l'immédiat, c'est de la sécurité. En effet, en l'absence de sécurité, il ne sera pas possible de mener à bien le programme visant à désarmer, démobiliser et réinsérer environ 45 000 anciens combattants et de créer entre les parties le climat de confiance requis pour appliquer les dispositions de l'Accord de paix. Pour rétablir et maintenir cette confiance, le Secrétaire général souligne qu'il convient de prendre d'urgence certaines mesures, parmi lesquelles le retour immédiat de M. Sankoh qui est appelé à exercer d'importantes fonctions au sein du Gouvernement sierra-léonais et à prendre part au processus de paix. Il importe également que la communauté internationale verse des contributions au Fonds d'affectation spéciale, créé par la Banque mondiale à l'appui du processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion.

Dans l'immédiat, observe M. Annan, l'Organisation des Nations Unies peut contribuer au renforcement de la sécurité en Sierra Leone grâce au déploiement rapide d'une force solide. Le Secrétaire général recommande donc au Conseil de sécurité d'autoriser le déploiement de la force des Nations Unies qui, avec les observateurs militaires et la composante civile de la MONUSIL, serait connue sous le nom de Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL). Par ailleurs, le Secrétaire général invite instamment les donateurs à contribuer généreusement à l'ECOMOG, ou directement aux pays qui lui fournissent des contingents. Il est cependant évident que la communauté internationale ne sera pas en mesure de maintenir indéfiniment une importante présence militaire en Sierra Leone. Le Secrétaire général engage donc le Gouvernement de ce pays à achever rapidement la mise en place et la formation de sa police nationale et de ses forces armées, sans lesquelles il sera impossible d'assurer la stabilité à long terme, la réconciliation nationale et la reconstruction du pays.

Déclarations

M. OLARA OTUNNU, Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, a déclaré qu'une visite récente au Sierra Leone lui avait permis de constater qu'outre les impératifs immédiats liés à la fin de la guerre et au rétablissement de la sécurité, le défi le plus important est la "crise des jeunes", c'est-à-dire la condition désespérée des jeunes enfants et adolescents de Sierra Leone. Les enfants de ce pays ont souffert au-delà ce qui est imaginable. Nombre d'entre eux ont été mutilés délibérément. Au cours du mois de janvier 1999 seulement, plus de 4000 enfants ont été enlevés. On estime que 60 % d'entre eux seraient des fillettes, dont la majorité ont subi des violences sexuelles. Des milliers d'enfants ont été mobilisés comme enfants soldats. Plus de 3 millions de Sierra- Léonais, soit deux tiers de la population, ont été déplacés par la guerre, dont plus de 60% sont des enfants. Quelque 10 000 enfants ont été séparés de leurs parents. Il y a plus de 3000 enfants des rues dans la seule ville de Freetown et de nombreux enfants souffrent de traumatismes graves. M. Otunnu a indiqué que, face à cette situation, il avait proposé un programme d'action pour les enfants de Sierra Leone dont les principaux éléments sont la création de toute urgence d'une Commission nationale pour les enfants chargée de leur protection; la prise en compte de la protection des enfants dans le mandat de la MINUSIL; un programme spécial de réhabilitation des amputés; un programme spécial pour répondre aux besoins des enfants qui ont été abusés sexuellement; l'accès auprès des enfants enlevés et leur libération; la démobilisation des enfants combattants pour laquelle des dispositions spéciales doivent être prévues dans le programme national de démobilisation; le retour et la réinstallation des enfants déplacés; la réhabilitation de l'éducation et des services médicaux de base; le développement d'initiatives locales pour protéger les enfants dans la sous- région; la création d'une station de radio et de programmes - "Voix des enfants" - consacrés aux besoins et aux intérêts des enfants; et la création d'un fonds spécial pour les victimes de la guerre.

Les atrocités en Sierra Leone ne sont pas le résultat de démarcations ethniques ou religieuses, mais le travail d'une petite partie de la population bien armée qui a lancé une campagne de terreur organisée contre la population. Faisant remarquer le fait que les Sierra-Léonais sont bien informés de la réponse de la communauté internationale à la situation au Kosovo, M. Otunnu a souligné le besoin critique que la communauté internationale soit perçue comme réagissant avec le même niveau de préoccupation partout où des enfants nécessitent protection et support. Il a ensuite attiré l'attention sur la situation en Guinée, un petit pays relativement pauvre qui a cependant assumé une responsabilité majeure en accueillant un grand nombre de réfugiés. Ceux-ci représentent actuellement plus de 10 % de la population totale de la Guinée. Soulignant le fait que l'étendue de ce fardeau a commencé à se ressentir durement sur l'économie du pays, M. Otunnu a estimé que la Guinée méritait un plus grand soutien de la communauté internationale. La Sierra Leone n'est pas un cas désespéré, a encore affirmé le représentant spécial. Malgré la guerre, elle a conservé un certain nombre de points forts, comme un gouvernement élu, une société civile active, un tissu social cohérent, des ressources naturelles importantes et une tradition d'éducation supérieure importante. Pour fonctionner, tout cela nécessite l'établissement de la paix et de la sécurité. En conclusion, M. Otunnu a appelé les chefs politiques à prendre des mesures audacieuses pour assurer l'application de l'Accord de paix. A cet égard, il s'est réjoui du retour de Foday Sankoh et de Johnny Paul Koromah à Freetown. Il a exhorté les dirigeants du FUR et du CRFA à être justes par rapport aux enfants et à reconnaître leur rôle dans les atrocités commises pendant la guerre. Il a appelé la communauté internationale à ne pas abandonner les enfants de la Sierra Leone. La paix est fragile et requiert un soutien local et international fort, a-t-il conclu. M. IBRAHIM KAMARA (Sierra Leone) a déclaré que le peuple de la Sierra Leone, qui craignait que ses préoccupations n'aient été reléguées au bas de l'ordre du jour du Conseil de sécurité, est très reconnaissant pour le fait que, finalement, le Conseil a approuvé une véritable mission de maintien de la paix des Nations Unies pour la Sierra Leone. Il a souligné l'importance que son gouvernement accorde à la sécurité et à la sûreté de la population, en particulier des enfants innocents dans ce pays qui a subi ce qui est considéré comme une des plus violentes et brutales violations des droits de l'homme que le monde ait connu ces dernières années. De ce point de vue, l'adoption de cette résolution est un filet de sécurité supplémentaire pour tous les Sierra-Léonais. La MONUSIL a joué un rôle important, mais il faut reconnaître qu'elle n'était pas équipée pour connaître de certaines situations avant et après l'Accord de paix de Lomé. Le représentant s'est félicité du paragraphe 14 de la présente résolution, qui autorise la MINUSIL à prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et la liberté de mouvement du personnel des Nations Unies, et ceteris paribus la protection des civils directement menacés par des violences physiques. La Sierra Leone considère ce paragraphe comme une assurance à la fois pour le personnel international et les civils innocents. C'est également un signe très clair que la communauté internationale ne tournera pas le dos si de telles violences étaient perpétrées.

Le représentant s'est félicité de ce que cette résolution soit la preuve de l'efficacité de la coopération entre les Nations Unies et les organisations sous-régionales dans les activités de maintien de la paix. Sous la direction du Nigéria, et avec la coopération de la MONUSIL, l'action de l'ECOMOG, soulignée dans chaque résolution du Conseil depuis 1997, a été exemplaire. Elle jouit également de la confiance de toutes les parties, en particulier du FUR, en ce qui concerne le processus de dapprouvésarmement, de démobilisation et de la réintégration des anciens combattants. Le représentant a fait observer que la permanence de la présence de l'ECOMOG en Sierra Leone était indispensable à la mise en oeuvre de l'Accord de Lomé et au renforcement de la paix dans le pays. Les 6000 hommes des forces des Nations Unies ne suppléeront pas complètement les fonctions si bien remplies par l'ECOMOG. Tout en se félicitant du plan alternatif proposé par le Secrétaire général en cas de retrait de l'ECOMOG ou des troupes nigérianes, il a appelé le Conseil à tout faire pour assurer le maintien de l'ECOMOG en Sierra Leone. La coopération entre Nations Unies et ECOMOG est prévue dans l'Accord de Lomé. Le Conseil va également approuvé au paragraphe 7 de la présente résolution le nouveau mandat que la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) a donné à l'ECOMOG.

Le représentant s'est enfin demandé quand la résolution allait être effectivement mise en oeuvre, et à quel rythme. Il a posé la question de savoir quand la communauté internationale allait dégager les ressources financières nécessaires à la mise en oeuvre du difficile processus de désarmement et de démobilisation. Le déploiement du premier contingent de la MINUSIL sera-t-il aussi lent que celui des 210 observateurs approuvé par le Conseil il y a quelques mois ? Le représentant a rappelé à ce titre que le programme de désarmement, de démobilisation et de réintégration, lancé par son gouvernement bien avant l'Accord de paix, n'avait guère décollé faute de moyens. Conformément à l'Accord de paix de Lomé, un tel processus aurait dû commencer six semaines après l'Accord. Ce retard est dû avant tout à un manque de ressources.

M. ARTHUR MBANEFO (Nigéria) a indiqué que l'adoption de la résolution faisait date dans la quête d'une paix durable en Sierra Leone. Cette résolution donne aux Nations Unies la possibilité d'assurer la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité dans la région. En outre, la CEDEAO et l'ECOMOG peuvent aujourd'hui pousser un soupir de soulagement en sachant que l'ONU a enfin adopté des mesures concrètes pour assurer le maintien de la paix et de la sécurité dans la sous- région. Pour le Nigéria, la crise en Sierra Leone menace la paix régional. Avec l'adoption de cette résolution, il est soulagé d'un lourd fardeau en termes de ressources humaines et financières. Après de nombreuses années de destruction et de privations à grande échelle qui ont entraîné des souffrances indicibles, la population de la Sierra Leone et de la sous-région peut enfin aspirer à la paix et au développement, s'est réjoui le représentant.

Evoquant le long processus qui a mené à la paix, le représentant a expliqué qu'à la suite de son succès au Libéria, l'ECOMOG avait été saisi de la situation en Sierra Leone à un moment où elle bénéficiait d'une faible attention de la communauté internationale. L'ECOMOG a réussi à maîtriser la crise ce qui a permis la signature de l'Accord de paix et, aujourd'hui, la création de la MINUSIL. Le Nigéria rend hommage à la CEDEAO et aux pays contributeurs de troupes à l'ECOMOG. Aucun développement économique et social important ne peut se produire en l'absence de paix et de stabilité. Dans ce contexte, le Nigéria est prêt à jouer son rôle pour le maintien de la paix et de la sécurité dans la région, au sein de la MINUSIL, qui représente une forme rare de coopération entre l'ONU et un mécanisme régionale. Le représentant a souhaité que l'ONU continue de développer une approche semblable vis-à-vis d'autres organisations régionales. Il a prié l'ONU et la communauté internationale de s'engager à l'application fidèle de la résolution pour que la population de la Sierra Leone puisse en tirer les plus grands bénéfices possibles.

Explications de vote

M. STEWART ELDON (Royaume-Uni) a souligné la contribution importante faite par les Nations Unies à la paix en Sierra Leone. Tout en se félicitant des efforts entrepris par toutes les parties depuis la signature de l'Accord de paix, il a estimé qu'il était essentiel que la communauté internationale agisse rapidement pour appuyer ces efforts, sous peine de les voir échouer comme d'autres dans le passé, avec des conséquences tragiques pour la population.

La situation actuelle en Sierra Leone est vue comme un test par de nombreux Etats. Elle indique très clairement que les Nations Unies s'appliquent à maintenir la paix tant en Afrique qu'en d'autres régions troublées dans le monde. Le Conseil s'engage aujourd'hui avec un mandat ambitieux et montre qu'il est prêt à agir. Mais aucun retard n'est excusable. Un déploiement rapide de la force de l'ONU permettra de construire un climat de confiance et redonnera force au processus de paix . Tout retard risque de remettre en cause les acquis du passé. Le déploiement rapide facilitera aussi l'acheminement de l'aide alimentaire. Le représentant a rappelé qu'il est important d'aider le Gouvernement de la Sierra Leone dans le processus de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) des anciens combattants, ajoutant qu'aucun délai ne pouvait être autorisé. Il a invité tous les Etats à faire des contributions urgentes au Fonds d'affectation spéciale de la Banque mondiale pour soutenir le programme de DDR.

Il a également appelé à libérer tous les détenus. Il a engagé la MINUSIL à se préparer à défendre le personnel international, mais a précisé que ce sont en définitive l'ECOMOG et le Gouvernement de la Sierra Leone qui sont responsables de la sécurité dans le pays. Il s'est félicité de la coopération entre l'ECOMOG et les Nations Unies, indispensable à la réussite de la mission. L'ECOMOG continuera de jouer un rôle important en Sierra Leone, a-t-il ajouté. Pour sa part, le Royaume-Uni continuera à appuyer l'ECOMOG dans sa tâche.

M. ALAIN DEJAMMET (France) a relevé que l'Accord de paix de Lomé, signé entre le Gouvernement légitime et le FUR en Sierra Leone, représente aux yeux de la France une occasion à ne pas manquer pour instaurer en Sierra Leone les fondements d'une paix durable et au-delà, assurer aux populations civiles un accès libre aux services publics et sociaux.

Il a remercié ceux qui ont permis cette évolution positive, en particulier les Etats de la CEDEAO et le Nigéria. La nomination au Gouvernement de représentants de la rébellion constitue une évolution encourageante. Il a appelé toutes les parties à respecter de bonne foi les engagements pris à Lomé.

Le représentant a appelé le Conseil de sécurité à se donner les moyens de transformer cette évolution positive en réalité. La France a, à ce titre toujours soutenu les efforts du Secrétaire général pour créer une Mission des Nations Unies avec des effectifs importants, et ayant la capacité de se défendre et d'assurer la protection des populations civiles menacées. La prorogation de la Mission des Nations Unies en République centrafricaine (MINURCA), la création ainsi que le déploiement de la MINUSIL constituent un signal d'encouragement vis-à-vis du continent africain. La France estime que lorsque des perspectives sérieuses de règlement des conflits existent, la communauté internationale se place aux côtés des Africains pour en faciliter la mise ne oeuvre. Le représentant a exprimé l'espoir que l'engagement pris aujourd'hui pour la Sierra Leone sous la forme incontestable de

l'établissement d'une opération de maintien de la paix des Nations Unies pourra être poursuivi dans d'autres régions d'Afrique et notamment en République démocratique du Congo.

M. HASMY AGAM (Malaisie) a fait observer que le déploiement de la MINUSIL aurait dû se faire plus tôt, car l'Accord de paix de Lomé a été signé il y a trois mois déjà. La présence de la MINUSIL sur place permettra à son avis la création du climat de confiance nécessaire pour l'instauration d'une paix durable et de la réconciliation.

Il a cependant rappelé que la responsabilité première pour l'établissement de la sécurité de tous revient d'abord à la population et au Gouvernement de la Sierra Leone. Le représentant a rappelé que, vu la difficile tâche qui incombe à la MINUSIL, et le climat d'insécurité dans laquelle elle sera amenée à agir, sa délégation avait toujours soutenu que son déploiement soit effectué conformément aux dispositions du Chapitre VII de la Charte. Il a ajouté que cela pourrait avoir des incidences sur les futures opérations de maintien de la paix des Nations Unies. Il s'est félicité de ce que la MINUSIL soit bien équipée et de la participation de l'ECOMOG à la lourde tâche de sécurisation de certaines régions dans le pays. Il a insisté sur la nécessité d'une coopération et d'une coordination efficaces entre l'ONU et l'ECOMOG.

Le représentant a demandé qu'une attention particulière soit accordée aux enfants brutalisés, y compris aux enfants soldats qui ont été manipulés lors du conflit. Il a fermement condamné de telles pratiques. Le représentant a appelé les rebelles à agir rapidement pour donner réalité à leurs paroles, notamment en ce qui concerne le démantèlement des groupes armés. Il appelé toutes les parties à se conformer à l'Accord de paix de Lomé. Le processus de paix doit commencer par le programme de DDR des anciens combattants, a-t-il ajouté. Pour sa part, la communauté internationale doit veiller à ce que l'élan de paix ne soit pas dispersé en ce moment crucial de l'histoire de la Sierra Leone.

M. RICHARD HOLBROOKE (Etats-Unis) a déploré l'attaque lâche perpétrée ce matin à Banja Luka contre un journaliste important qui se trouve actuellement dans un état critique. Cet incident nous rappelle que nos efforts ne sont jamais terminés et que nous devons travailler pour la paix dans le monde entier, a dit M. Holbrooke. Revenant à la question de la Sierra Leone, M. Holbrooke a estimé que trois mois après la signature de l'Accord de paix, la situation demeure fragile et que l'élan du processus de paix peut être facilement perdu sans une action rapide et ferme de la communauté internationale. La résolution de ce conflit constitue une priorité du Gouvernement américain. Les Etats-Unis ont aidé à conclure le cessez-le-feu et à faciliter le processus de paix, a déclaré M. Holbrooke, indiquant qu'au cours des deux dernières années, le Gouvernement américain a fourni plus de 100 millions de dollars pour l'aide humanitaire et 15,6 millions de dollars pour l'appui logistique à l'ECOMOG. Le représentant s'est félicité du leadership du Président Kabbah et de l'esprit de compromis dont ont fait preuve les anciens combattants rebelles. Dans ce contexte, il s'est réjoui du retour à Freetown de Foday Sankoh et de Johnny Paul Koromah qui ont un rôle essentiel à jouer pour assurer que leurs partisans mettent en oeuvre l'Accord de paix. M. Holbrooke a aussi reconnu la grande contribution de l'ECOMOG et du Nigéria. Il a souhaité le succès de l'Accord de Lomé et indiqué que son pays était prêt à accorder son soutien à cette fin. M. Holbrooke a indiqué qu'il avait défendu devant le sénat américain le point de vue qu'il n'y a pas deux poids, deux mesures en matière de sécurité internationale. La paix en Afrique est tout aussi importante pour les Etats-Unis, que la paix dans les Balkans ou au Timor oriental, a-t-il dit, indiquant que le sénat américain partage ce point de vue.

A l'instar du Secrétaire général, les Etats-Unis sont préoccupés par les dispositions de l'Accord relatives à l'amnistie. Ils restent engagés envers la justice et aident, à cet égard, le Gouvernement de la Sierra Leone à mettre en place une Commission de vérité et de réconciliation et une Commission des droits de l'homme. Les Etats-Unis sont en faveur d'une mission internationale d'établissement des faits pour appuyer le travail de ces Commissions. En début de semaine, la Secrétaire d'Etat, Mme Albright, s'est rendue en Sierra Leone pour montrer l'appui des Etats-Unis au Président Kabbah et à son Gouvernement démocratiquement élu. Après cette visite, elle a déclaré avoir vu des gens qui ont souffert des horreurs indicibles mais qui, pourtant, ne cherchent pas vengeance mais renouveau. C'est ce processus de renouveau que nous voulons encourager aujourd'hui, a affirmé M. Holbrooke. Les Etats-Unis appuient donc pleinement cette résolution importante visant à mettre en place la MINUSIL.

M. BABOUCARR-BLAISE ISMAILA JAGNE (Gambie) estime que le projet de résolution à l'examen vient apaiser les craintes d'un manque d'intérêt de la part du Conseil de sécurité en ce qui concerne le maintien de la paix en Afrique. Il s'est félicité du soutien que les Etats-Unis et la communauté internationale n'ont pas cessé d'apporter au processus de paix en Sierra Leone, et qui se traduit notamment par la visite récente de la Secrétaire d'Etat américain, Mme Madeleine Albright, sur place.

M. Jagne a ajouté que cette démonstration sans précédent du soutien international constitue une chance unique que le peuple de la Sierra Leone doit saisir pour restaurer une paix durable. A cette fin, les parties doivent honorer leurs engagements au titre de l'Accord de paix, et, pour ce faire, le processus de désarmement, de démobilisation et de réhabilitation (DDR) doit être accéléré.

La Gambie rend hommage au Groupe d'observateurs militaires de la communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (ECOMOG). Il espère que son nouveau mandat reflètera clairement l'évolution positive récente. M. Jagne estime que le déploiement imminent de la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL), doit se faire en étroite coopération et coordination avec l'ECOMOG. La situation en Sierra Leone, a-t-il reconnu reste très fragile et nécessite par conséquent une garantie de sécurité sans laquelle il ne sera pas possible de procéder au DDR des quelques 45 000 ex-combattants. L'ECOMOG seul ne saurait s'acquitter de cette tâche. A cet égard, le représentant a déclaré que son pays s'était toujours opposé au fait que les Nations Unies sous-traitent leur responsabilité dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité internationales car à son avis le manque de ressources ne peut servir d'excuse légitime pour abdiquer cette responsabilité.

La Gambie considère que le mandat de la MINUSIL doit lui permettre de parer aux menaces qui pèsent sur la mise en oeuvre du processus de paix et sur la sécurité des civils. M. Jagne a fait remarquer que le sort des enfants constitue en Sierra Leone l'un des plus grands défis à relever et il s'est félicité de l'engagement que le Gouvernement de la Sierra Leone et la MINUSIL ont pris en ce sens.

M. ALPHONS HAMER (Pays bas) a accueilli avec satisfaction l'adoption de la résolution établissant la Mission des Nations Unies en Sierra Leone (MINUSIL) en tant qu'outil supplémentaire de soutien à l'Accord de paix de Lomé. L'un des éléments d'une importance capitale de cette mission est la phase de désarmement, de démobilisation et de réintégration des anciens combattants. Nous avons l'intention, a ajouté le représentant, d'apporter notre contribution au fonds d'affectation spéciale mise en place par la Banque mondiale. Toutes les parties concernées doivent garantir la démobilisation, le désarmement et la réintégration à la société civile des bandes armées. Une attention particulière doit être accordée aux enfants soldats. Les armes ainsi collectées devraient être détruites immédiatement pour empêcher qu'elles ne circulent à nouveau.

La situation en Sierra Leone demeure instable, a estimé le représentant. Le Conseil de sécurité ainsi que le Secrétaire général ont pressenti la nécessité d'établir des règles d'engagement strictes permettant à la MINUSIL de remplir sa mission et de protéger son personnel ainsi que les populations civiles. Dans ce contexte, le paragraphe 14 de la résolution prend une importance considérable en ce qu'il permet à la Mission de maintien de la paix d'être à la hauteur de ses responsabilités. Pour qu'une paix durable s'instaure en Sierra Leone, il faut traduire en justice ceux qui sont responsables des atrocités et des souffrances infligées au cours des huit années de guerre. Le travail de la Commission de vérité et de réconciliation devrait commencer dès que possible. Le représentant a rendu hommage à la contribution du Groupe d'observateurs militaires de la communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (ECOMOG) et a plaidé en faveur de la poursuite de la coopération entre la MINUSIL et l'ECOMOG.

M. SHEN GUOFANG (Chine) s'est félicité du fait que la situation en Sierra Leone est, dans l'ensemble, restée calme depuis la signature de l'Accord de paix, et que des progrès ont été réalisés dans plusieurs domaines. En raison des incertitudes qui subsistent et de la fragilité du processus de paix, la communauté internationale se doit de continuer à fournir un soutien ferme en Sierra Leone. La Chine a toujours défendu l'adoption d'actions concrètes à cette fin et remercie le Secrétaire général pour les recommandations qu'il a formulées. Elle se félicite du fait que le Conseil soit parvenu à un accord et à une résolution, la première sur un conflit en Afrique après le débat publique sur la situation en Afrique le mois dernier. La résolution est, de l'avis de la Chine, exhaustive et équilibrée et tient compte des vues des membres du Conseil. Le représentant a souhaité que le Secrétariat entame le plus rapidement possible les préparatifs en vue du déploiement de la MINUSIL. Il s'est déclaré convaincu que la Mission travaillera en coopération étroite avec le Gouvernement sierra-léonais et oeuvrera avec énergie et dévouement à la paix en Sierra Leone. Avec cette résolution, le Conseil donne au peuple sierra-léonais l'espoir de voir commencer rapidement la reconstruction et la guérison des blessures de la guerre et de jouir d'un élan nouveau et positif vers la promotion du développement économique et la stabilisation du pays.

M. GELSON FONSECA (Brésil) s'est déclaré choqué par les chiffres cités par le Représentant spécial du Secrétaire général à propos des enfants et des conflits armés et a appelé la communauté internationale à accorder l'attention voulue aux enfants de Sierra Leone. Il a exprimé sa reconnaissance à l'ECOMOG pour ses efforts déployés dans le cadre du processus de paix en Sierra Leone et s'est aussi félicité du rôle joué par le Groupe de contact dans la promotion d'un dialogue politique et de réconciliation nationale. Le Brésil appuie pleinement les termes de la résolution et l'envoi d'une Mission de l'ONU en Sierra Leone. Il attend un progrès rapide dans la mise en oeuvre du programme de désarmement, de démobilisation et de réintégration des forces rebelles qui est indispensable à la stabilité et à une paix durable dans la région. De l'avis du Brésil, il est essentiel de mettre aujourd'hui l'accent sur le relèvement et la reconstruction du pays. A cette fin, la communauté internationale, par le biais de l'ONU, doit élaborer une stratégie à long terme pour la Sierra Leone qui comporte les aspects sécuritaires, politiques, économiques, sociaux et humanitaires, et appuyer, en outre, les organisations et partenaires régionaux. Le processus de paix doit aussi avoir pour objectif la protection et la promotion des droits de l'homme, en particulier par des enquêtes sur les massacres. La création et l'entrée en fonction rapide de la Commission vérité et réconciliation et de la Commission des droits de l'homme sont essentielles pour la consolidation de la paix et la réconciliation nationale en Sierra Leone. Le représentant a exprimé l'espoir que l'application de la résolution bénéficie d'un soutien important de la communauté internationale.

M. FERNANDO PETRELLA (Argentine) a déclaré que la population de la Sierra Leone peut envisager l'avenir avec espoir. La Sierra Leone, l'ECOMOG et les Nations Unies ont consenti des efforts importants pour défendre les valeurs de justice, de démocratie et de droits de l'homme, et permettre leur mise en oeuvre. L'opération de maintien de la paix créée aujourd'hui y contribuera sur quatre plans: militaire, politique, humanitaire et en matière de droits de l'homme. Cette opération aidera le gouvernement dans le processus de DDR; elle apportera une assistance électorale; et veillera au respect des droits de l'homme. Il a souligné l'importance du paragraphe 14 de la résolution qui prévoit la défense du personnel international et la protection des civils menacés. Les hommes et femmes qui travaillent pour l'ONU ne doivent pas être soumis à moins de sécurité que les autres. Le travail de la MINUSIL se fera dans un contexte risqué. l'autorité du Chapitre VII de la Charte renforcera sa capacité de défendre son personnel, ainsi que les normes inscrites dans la Convention sur la protection du personnel de l'ONU.

Le représentant a souligné que cette opération ajoute une nouvelle dimension politique, juridique et morale essentielle aux travaux du Conseil, notamment en ce qui concerne la protection des civils, même si pour des questions pratiques, il y a des limites objectives fixées pour le mandat comme la situation géographique et des considérations fonctionnelles. Le représentant s'est associé à la condamnation des atrocités perpétrées contre les enfants et les civils, et le besoin de leur offrir réparation. Il a appelé la MINUSIL a s'y atteler conformément à son mandat. Il a souligné que cette opération est la première d'une série d'opérations de maintien de la paix de grande envergure que le Conseil souhaite lancer dans les semaines à venir. Mais pour relancer ces efforts de maintien de la paix, les Nations Unies ont besoin de ressources pour leur fonctionnement.

M. ROBERT FOWLER (Canada) a indiqué que son pays soutient la résolution dont l'adoption constituera une étape importante pour la mise en oeuvre de l'Accord de Lomé. Cette résolution marque le ferme attachement de la communauté internationale au processus de paix. Il a remercié l'ECOMOG et les membres de la MONUSIL et rendu hommage au personnel humanitaire en Sierra Leone. Le nombre croissant d'agressions contre le personnel humanitaire dans le monde exige l'adoption de mesures urgentes. Le lancement d'une opération de maintien de la paix de l'ONU en Sierra Leone permettra à la communauté internationale d'alléger une partie du fardeau de l'ECOMOG. La mise en recouvrement des dépenses au titre de la force permettra que son financement soit assuré par les Etats membres, a indiqué le représentant. Il a toutefois déploré le fait que certains contingents continueront de dépendre de contributions volontaires qui sont extrêmement lentes à venir. Une telle situation a-t-il reconnu ne permettra pas d'alléger le fardeau financier qu'assument ces pays. Le Canada est satisfait des dispositions de la résolution relatives à la sécurité des civils et du personnel de la MINUSIL. Ces dispositions donnent aux responsables du maintien de la paix de l'ONU l'autorité de réagir lorsque son personnel ou des civils sont menacés. Cela devrait contribuer à dissuader les actes de violence.

De l'avis du Canada, le succès de la mise en oeuvre du processus de paix dépendra largement du succès du processus de désarmement. Il a insisté sur la nécessité pour la MINUSIL et l'ECOMOG de coordonner étroitement leurs activités pour que leurs efforts se renforcent mutuellement. Aucune paix ne peut être durable sans justice, a souligné le représentant, qui s'est félicité de l'intégration d'un Groupe des droits de l'homme au sein de la MINUSIL. Le destin de la Sierra Leone est entre les mains de ses habitants, a encore souligné le représentant, qui a engagé toutes les parties à respecter les termes de l'Accord de Lomé. A cet égard, il a estimé que l'intégration de représentants des anciens rebelles dans le Gouvernement actuellement en formation constituait une étape dans cette voie.

M. RASHID AL-DOSARI (Bahreïn) a remercié l'ECOMOG et les Nations Unies pour les efforts importants, matériels et humains qu'ils ont déployés, pour la paix en Sierra Leone. Il a souligné les effets désastreux du conflit pour les infrastructures du pays, ainsi que pour les civils, en particulier, les femmes et les enfants auxquels ont été infligées des souffrances indicibles. Il a observé que les exactions ont été perpétrées en majorité par les forces rebelles et a appelé la communauté internationale à fournir une aide adéquate aux civils et à les protéger. Il a souligné l'importance du succès de la Mission des Nations Unies car tout échec sonnerait le glas de l'espoir de paix en Sierra Leone. Il a appelé toutes les parties à se conformer strictement à cet accord unique pour la paix en Sierra Leone. Il a exprimé l'espoir que cette mission contribuera efficacement à la paix et la stabilité en Sierra Leone, et a engagé les parties à tout mettre en oeuvre pour garantir la sécurité et la liberté de circulation du personnel des Nations Unies.

* *** *

À l’intention des organes d’information. Document non officiel.