En cours au Siège de l'ONU

CS/1097

LE CONSEIL DE SECURITE EXAMINE LES MESURES ET OBJECTIFS VISANT A REDUIRE LES CONFLITS ET A ASSURER UNE PAIX SOLIDE ET DURABLE EN AFRIQUE

29 septembre 1999


Communiqué de Presse
CS/1097


LE CONSEIL DE SECURITE EXAMINE LES MESURES ET OBJECTIFS VISANT A REDUIRE LES CONFLITS ET A ASSURER UNE PAIX SOLIDE ET DURABLE EN AFRIQUE

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En conjuguant leurs efforts, l'Afrique et la communauté internationale pourront donner un élan nouveau et décisif à la paix et au développement

L'"afropessimisme" ne mène nulle part. La "lassitude face aux problèmes de l'Afrique" est un affront à l'idée même d'une communauté internationale responsable, a souligné le Secrétaire général, M. Kofi Annan, ce matin dans le cadre du débat au niveau ministériel du Conseil de sécurité sur l'état de l'Afrique - présidé par le Premier Ministre et Ministre des affaires générales des Pays-Bas, M. Wim Kok -, à la suite du rapport d'étape sur l'Afrique du Secrétaire général concernant l'application des recommandations qu'il avait formulées, l'année dernière, relatives aux causes des conflits et à la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique. En faisant preuve de volonté et en dégageant les moyens nécessaires, l'Afrique et la communauté internationale donneraient un nouveau souffle décisif à la paix et au développement en Afrique, a dit M. Kofi Annan.

Pour sa part, le Secrétaire général de l'Organisation de l'unité africaine (OUA), M. Salim Ahmed Salim, a indiqué que l'OUA souhaite un développement des partenariats qu'elle a pu établir avec les Nations Unies et les organisations économiques régionales africaines, mais qu'elle tient aussi à rappeler que la responsabilité première du maintien et de la paix et de la sécurité internationale incombe à l'ONU et au Conseil de sécurité, dont les atermoiements ces derniers temps, quand l'Afrique est concernée, ont fait connaître des reculs aux efforts de paix africains. L'OUA soutient l'idée du Secrétaire général de l'ONU d'envoyer une force de paix de 6000 hommes en Sierra Leone, et elle demande que la dimension économique des conflits qui touchent le continent soit sérieusement prise en compte dans les solutions à trouver.

Intervenant en sa qualité de représentant de la présidence en exercice de l'OUA, le représentant de l'Algérie a rappelé que, lors du Sommet de l'OUA, tenu en juillet dernier à Alger, les dirigeants africains ont décidé de s'atteler avec une vigueur nouvelle au règlement des conflits qui endeuillent leurs peuples et épuisent leurs précieuses ressources en traitant leurs causes sous-jacentes et en créant les conditions de la mise en oeuvre de solutions africaines nourries de valeurs africaines. L'Afrique a placé, au centre de

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ses priorités, le renforcement de ses capacités en matière de prévention, de gestion et de règlement des conflits. Mais pour réussir le pari de son redressement, l'Afrique doit pouvoir compter sur la communauté internationale. De manière générale, elle attend du reste du monde qu'il l'accepte comme un partenaire égal en droits et en devoirs, et qu'il la considère comme un interlocuteur crédible et responsable, lui permettant ainsi de participer activement dans la prise de décisions concernant les grandes questions internationales qui engagent le destin de l'humanité et donc son propre avenir, tant en matière de paix et de sécurité internationales que de coopération économique et de développement.

Le Conseil de sécurité a tenu ce débat pour examiner les mesures de suivi adoptées ou menées à bien en ce qui concerne la paix et la sécurité, le développement et les questions connexes en Afrique, dans le cadre des recommandations formulées par le Secrétaire général dans son rapport intitulé "les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durable en Afrique", publié le 16 avril 1998. Le Conseil de sécurité avait créé un groupe de travail ad hoc pour examiner les recommandations du Secrétaire général ayant trait à la paix et à la sécurité. Le Groupe de travail a élaboré des recommandations concrètes visant notamment à appuyer les initiatives régionales et sous-régionales dans le domaine de la prévention des conflits et du maintien de la paix; à créer un mécanisme international pour aider les gouvernements hôtes à maintenir la sécurité et la neutralité des camps de réfugiés; à renforcer les capacités de l'Afrique en matière de maintien de la paix: et à accroître l'efficacité des régimes des sanctions sur les armes imposées par le Conseil de sécurité. Pour sa part, l'Assemblée générale, dans sa résolution 53/92 du 7 décembre 1998, a créé un groupe de travail chargé de suivre la mise en oeuvre des recommandations formulées par le Secrétaire général dans son rapport sur les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique. Lors d'un débat au niveau ministériel sur la situation en Afrique - tenu le 25 septembre 1997 -, le Conseil avait, en effet, prié le Secrétaire général de lui présenter des recommandations concrètes sur les moyens de prévenir les conflits en Afrique, les différents modes d'intervention dans les situations de conflits dont dispose la communauté internationale, les impératifs d'une paix durable, de la croissance économique et du développement durable. Comme il l'a déclaré lui-même lors de la présentation de son rapport, les progrès en la matière dépendent de trois facteurs essentiels, à savoir, une compréhension claire du défi à relever, la volonté politique d'y répondre et les ressources nécessaires à une réponse appropriée.

Les représentants des membres suivants du Conseil de sécurité ont fait une déclaration: Etats-Unis, Canada, Argentine, Gabon, Fédération de Russie, Royaume-Uni, Chine, Namibie, Slovénie, Bahreïn, Malaisie, Brésil, Gambie, France et Pays-Bas. Les représentants des pays suivants ont pris la parole: Ukraine, Yémen, Australie, Malawi et Norvège.

Le Conseil de sécurité poursuivra son débat sur l'Afrique, demain jeudi 30 septembre à partir de 10 heures.

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Rapport d'étape du Secrétaire général sur l'application des recommandations figurant dans le rapport sur les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique (S/1999/1008)

Ce rapport d'étape rappelle tout d'abord que le rapport du Secrétaire général sur les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique avait été publié le 13 avril 1998 (A/52/871 - S/1998/318) et a été examiné par l'Assemblée générale, le Conseil de sécurité et le Conseil économique et social. Il avait été également débattu dans diverses autres instances de l'ONU - dont le Comité administratif de coordination - et de l'extérieur. Ce rapport examine les moyens d'agir face aux situations de conflit - rétablissement de la paix, maintien de la paix, aide humanitaire et consolidation de la paix après les conflits -; les moyens d'édifier une paix durable et de favoriser la croissance économique, notamment la bonne gouvernance et le développement durable.

Dans son rapport d'étape, le Secrétaire général fait ensuite observer que son premier rapport avait engendré des réactions très encourageantes de la part de gouvernements, d'établissements de recherche et institutions universitaires, de groupes de la société civile, d'organisations non gouvernementales et de particuliers, beaucoup ayant saisi l'occasion offerte par le débat qu'il a suscité pour contribuer à la promotion de la paix et du développement en Afrique. Le rapport fait surtout un bilan clair et objectif des causes de conflits en Afrique et des raisons pour lesquelles ces conflits persistent. Il met également en relief la corrélation entre la paix et le développement: le développement qui ne tient pas compte des facteurs sociaux et politiques est souvent entravé par les conflits et, inversement, la prévention des conflits et la consolidation de la paix après les conflits n'ont de sens que si elles favorisent le développement social. Le Secrétaire général a donc recommandé une série de mesures et d'objectifs, qu'il juge réalistes et réalisables, en vue de réduire les conflits et d'assurer une paix solide et durable. Mais il reste beaucoup à faire.

L'Afrique d'aujourd'hui, à l'orée du nouveau millénaire, est caractérisée par un mélange remarquable de réalisations et de problèmes non résolus, de possibilités exploitées et d'occasions ratées. La naissance d'un aussi grand nombre d'Etats en Afrique au cours de ce siècle, avec l'euphorie et les grands espoirs qu'elle a suscités, a rapidement cédé le pas à la désillusion et à la déception. Il existe des régions en Afrique où les gouvernements persistent à dépenser de l'argent pour acheter des armes hors de leur portée aux fins de guerres qu'ils ne devraient pas mener; où les conflits signifient pour les marchands d'armes et les groupes rebelles des possibilités d'affaires; où, du fait de la mauvaise gouvernance, les populations ne peuvent satisfaire leurs besoins fondamentaux; où le silence qui plane sur le sida aggrave l'épidémie; où la corruption entrave la croissance économique: où, du fait du lourd fardeau de la dette, des obstacles au commerce et de la réduction de la dette, il est extrêmement difficile aux pays d'attirer des investissements et d'éviter une plus grande marginalisation dans l'économie mondiale. Bref, il existe des endroits où l'idée largement répandue selon laquelle l'Afrique est une région en crise perpétuelle n'est pas seulement une image mais bien une sombre et pénible réalité. La guerre civile empêche de nombreuses victimes de la maladie et de la faim de recevoir une aide humanitaire internationale.

Toutefois, on note des changements radicaux positifs dans certaines régions. Cette année, le Nigéria - le plus grand pays de l'Afrique - a connu un retour rapide à un gouvernement civil après des élections pluralistes, tandis que l'Afrique du Sud - la puissance économique du continent - a tenu avec succès sa deuxième élection démocratique et opéré sans heurt la passation du pouvoir du Président Mandela au Président Mbeki. Les élections démocratiques deviennent progressivement la règle et non l'exception en Afrique. La bonne gouvernance, l'obligation redditionnelle, la transparence et l'état de droit s'imposent lentement dans toutes les régions du continent. Ce que le monde extérieur n'a peut-être pas remarqué, c'est que la plupart des mesures qu'il n'a cessé de préconiser deviennent une réalité.

Le Secrétaire général fait remarquer que l'on compte de nombreux pays africains qui libéralisent le commerce et les contrôles des changes, privatisent les entreprises d'Etat moribondes, mettent en place des infrastructures de communication et procèdent à des réformes de leurs cadres juridiques et réglementaires. La CNUCED a récemment publié une étude indiquant que les investissements réalisés par les sociétés américaines et japonaises leur rapportent plus en Afrique que dans les autres régions du monde. En effet, la rentabilité de l'Afrique est le secret le mieux gardé sur la scène économique mondiale d'aujourd'hui. Les réformes financières et les incitations à la production se généralisent pendant que de nombreux Etats africains s'emploient inlassablement à rationaliser des administrations aux effectifs pléthoriques et inefficaces. Les Africains sont de plus en plus disposés à reconnaître les erreurs passées et à oeuvrer sincèrement ensemble pour assurer un meilleur avenir à tous. Le Traité d'Abuja institue une Communauté économique africaine qui doit se construire progressivement en utilisant comme ossature les groupements sous- régionaux. La Déclaration de Syrte, adoptée au Sommet extraordinaire de l'OUA tenu le 9 septembre 1999 dans cette ville de la Jamahiriya arabe libyenne engage les dirigeants africains à prendre rapidement les dispositions nécessaires pour assurer l'union continentale. La majorité des Africains vivent maintenant en régime pluraliste, et lors du Sommet de l'OUA qui s'est tenu à Alger en juillet dernier, les dirigeants africains ont clairement indiqué que les dirigeants qui prennent le pouvoir par la violence ne pouvaient plus s'attendre à être reçus sur un pied d'égalité dans une assemblée de chefs d'Etat élus.

Grâce aux efforts diplomatiques soutenus des pays africains eux-mêmes, d'importantes percées ont été enregistrées dans la recherche de solutions négociées à certains conflits de longue date, notamment l'Accord de Lomé concernant la Sierra Leone et les accords de Lusaka concernant la République démocratique du Congo. Des progrès notables ont été accomplis dans les efforts visant à négocier une solution pacifique au conflit entre l'Ethiopie et l'Erythrée. L'ONU a encouragé tous ces efforts et continuera à donner la priorité au renforcement des divers mécanismes de liaison avec l'OUA et ses organisations sous- régionales. Pour accroître la capacité de l'Afrique en matière de maintien de la paix, les Etats Membres sont invités à contribuer généreusement aux organismes bilatéraux et multilatéraux ainsi qu'aux fonds d'affectation spéciale de l'ONU et de l'OUA. Le Secrétaire général estime que les tragédies prolongées comme celle d'Angola et du Soudan ne devraient pas occulter les efforts déployés ailleurs par les Africains et auxquels la Communauté internationale doit également apporter un appui sans faille.

C'est aux Africains qu'il incombe au premier chef de s'aider eux-mêmes. Toutefois, les pays qui font des efforts sincères et adoptent des politiques judicieuses doivent bénéficier d'un plus grand appui. Chaque fois que la communauté internationale s'est engagée à apporter son concours, il s'est avéré qu'une transformation notable et rapide était possible. L'augmentation de l'aide publique au développement demeure un élément indispensable de ces efforts. Il faut d'urgence prendre d'autres mesures décisives concernant la dette. Au 31 août, l'ONU n'avait reçu que la moitié des 800 millions de dollars qu'elle a demandés pour satisfaire les besoins humanitaires en Afrique en 1999. Dans certaines situations d'urgence les plus graves, moins du quart des ressources nécessaires avait été fourni. Le Secrétaire général souligne qu'en faisant preuve de volonté et en dégageant les moyens nécessaires, l'Afrique et la communauté internationale donneraient un nouveau souffle décisif à la paix et au développement en Afrique. L'"afro-pessimisme" ne mène nulle part. La "lassitude envers l'Afrique" est contraire à l'image d'une communauté internationale soucieuse. Jamais les pays d'Afrique n'ont été mieux placés pour tirer parti de l'engagement et de l'assistance du monde extérieur. L'aide voulue, soigneusement orientée vers ceux qui sont les plus aptes à en faire usage, pourrait renforcer les efforts courageux faits par l'Afrique elle-même et permettre aux Africains de tourner la page et de jeter les bases d'un avenir plus radieux.

Déclaration du Secrétaire général des Nations Unies

M. KOFI ANNAN: étant donné l'extraordinaire diversité humaine, culturelle et naturelle de l'Afrique, il n'est pas étonnant que l'examen de la situation de ce continent à la veille du nouveau millénaire révèle une combinaison complexe de réalisations et de problèmes non résolus, de possibilités mises à profit et d'occasions manquées. Il y a des pays où le gouvernement et les groupes rebelles s'obstinent à consacrer de précieuses ressources à des guerres qu'ils ne devraient pas faire. Il y a des pays où des pans entiers de l'économie dépendent de la perpétuation de la guerre; où le pouvoir politique a été obtenu par des moyens violents, non démocratiques; où l'exercice pernicieux du pouvoir dépouille les habitants des moyens de pourvoir à leurs besoins fondamentaux; où le silence qui entoure le problème du sida ne fait qu'aggraver l'épidémie; où la corruption paralyse la croissance économique; où l'énorme fardeau de la dette, les obstacles aux échanges et la diminution de l'aide internationale font qu'il est extrêmement difficile de ne pas se retrouver toujours plus en marge de l'économie mondiale. Mais il y a aussi des pays, plus nombreux que l'on ne l'imagine, où l'on peut constater des améliorations spectaculaires.

De nombreux pays africains libéralisent les échanges, lèvent le contrôle des changes, privatisent des entreprises d'Etat moribondes, mettent en place des réseaux de télécommunications et réforment l'appareil juridique. L'Afrique possède des ressources en terre et en main d'oeuvre attrayantes pour les investisseurs étrangers. La CNUCED a récemment publié une étude montrant que l'Afrique était, de toutes les régions du monde, celle qui offrait aux sociétés américaines et japonaises les investissements les plus rentables. Les Africains prennent en charge leur destin politique et sont prêts à reconnaître leurs erreurs passées. La majorité des Africains vivent désormais sous des régimes démocratiques. L'Afrique du Sud vient d'organiser une deuxième élection présidentielle paisible et démocratique, et le Mozambique organisera lui aussi, le mois prochain, sa seconde élection présidentielle. Le retour à un régime civil démocratique au Nigéria a transformé les perspectives de ce pays. Le Libéria et le Mali ont procédé à la destruction d'un grand nombre d'armes légères. L'Algérie a pris des mesures importantes pour venir à bout de la guerre civile qui a si longtemps paralysé son développement et causé tant de souffrances. Cette année, au Sommet de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) à Alger, les dirigeants africains ont clairement laissé entendre que les dirigeants arrivés au pouvoir par des moyens non constitutionnels ne devraient plus s'attendre à être reçus comme des égaux dans une assemblée de chefs d'Etats élus. Mais tant que l'Afrique ne sera pas venue à bout de ses conflits, les progrès resteront précaires, même dans les pays éloignés du théâtre des hostilités. En dépit des ressources naturelles abondantes en Angola, la population est misérable et les belligérants persistent à se battre, alors qu'ils auraient dû comprendre depuis longtemps qu'il n'y pas de solution militaire possible.

Le peuple soudanais, lui aussi, souffre depuis trop longtemps et pourtant rien n'indique que ses épreuves touchent à leur fin. L'Ethiopie et l'Erythrée ont laissé de nouveaux différends mettre une fin brutale à un nouveau chapitre prometteur de leur histoire. Nous devons absolument garantir l'accès des secours humanitaires aux victimes de ces crises. Mais aucune intervention humanitaire ne saurait nous dispenser de l'engagement politique et militaire requis des pays de l'Afrique et de la communauté internationale pour instaurer la stabilité et s'attaquer aux causes profondes des conflits. Bien que loin d'être parfait, l'Accord de Lomé réglant le conflit en Sierra Leone répond au réel désir de paix du pays et a permis à celui-ci de prendre un nouveau départ après avoir connu des violations des droits de l'homme qui comptent parmi les plus cruelles et les plus odieuses que le monde ait connu au cours de ces dernières années. Une autre initiative de médiation menée par les pays d'Afrique a conduit à la signature des accords de Lusaka pour la paix en République démocratique du Congo. L'ONU a facilité l'action diplomatique. La semaine dernière, j'ai proposé au Conseil de sécurité de déployer dès que possible une mission de maintien de la paix comptant jusqu'à 6 000 hommes et j'étudie les autres mesures visant à promouvoir la paix dans ce pays. Dépourvue de gouvernement central, la Somalie demeure un cas unique. Pourtant, dans la plus grande partie du pays, l'anarchie ne règne pas.

Vous prendrez bientôt des décisions concernant les situations en Afrique et, à cet égard, j'espère que vous adopterez la perspective la plus large possible. La Sierra Leone et la République démocratique du Congo attendent plus que des palliatifs humanitaires. Chaque crise est unique et doit être traitée comme un cas d'espèce. Mais pour que les Nations Unies, et plus particulièrement le Conseil de sécurité, conservent leur crédibilité et l'adhésion des peuples du monde, il faut absolument que la volonté d'assurer le maintien de la paix, d'offrir une aide humanitaire ou d'intervenir de toute autre façon s'applique équitablement et systématiquement, quels que soient la région du monde ou le pays concerné.

L'argent n'est pas la seule mesure du raisonnable et du possible. Formation, technologie, engagement politique - nombreux sont les domaines qui s'ouvrent au partenariat. Ce qu'il importe de souligner, c'est que si l'Afrique et la communauté internationale conjuguent leurs efforts, elles peuvent donner un nouvel élan décisif à la cause de la paix et du développement en Afrique. L'"afropessimisme" ne mène nulle part. La "lassitude face aux problèmes de l'Afrique" est un affront à l'idée même d'une communauté internationale responsable. Si nous apportons aujourd'hui une aide réfléchie à ceux qui sont le plus en mesure d'en faire bon usage, nous pouvons aider l'Afrique à prendre un nouveau départ et à se construire un avenir meilleur. Ne manquons pas cette occasion.

Déclaration du Secrétaire général de l'Organisation de l'unité africaine

M. SALIM AHMED SALIM: l'initiative de la tenue de cette réunion au niveau ministériel du Conseil de sécurité coïncide avec les décisions prises par les dirigeants africains eux-mêmes, à la fois au Sommet d'Alger en juillet et à celui de Syrte en ce mois de septembre, en vue de renforcer la capacité de l'Afrique à faire face aux défis qui lui ont posés aux niveaux continental et international. Cette réunion coïncide avec la volonté de l'Afrique de faire de l'année 2000 une année de paix et de stabilité. Notre objectif est d'aller d'une ère de résolution de conflit à une ère de stabilité et de sécurité; et d'une ère de stagnation économique vers celle d'une plus grande intégration des économies et du développement du continent. Ce faisant, nous mettrons en route le processus qui permettra de mettre fin à la pléthore actuelle de conflits, qui frustent l'Afrique de ses aspirations et de ses rêves. Nous créerons de ce fait de meilleurs conditions en vue du bien-être des peuples africains. Pour nous, cette session s'inscrit aussi dans le suivi de la réunion ministérielle du Conseil de sécurité qui s'est tenue en septembre 1997 et a discuté de la situation de l'Afrique. Ensuite, elle va dans le sens de la discussion qui s'est engagée en 1998 sur le rapport du Secrétaire sur les causes des conflits et la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique. Les questions liées à la démocratisation, à la bonne gouvernance, au respect des droits de l'homme, à la responsabilité des actes posés et de la gestion, de même que celles concernant l'état de droit, continuent de préoccuper les peuples et les Gouvernements africains. Une saine et franche discussion s'est engagée à Alger sur ces sujets, et en particulier sur la décision de ne plus accepter au sein de l'OUA, à partir de son prochain sommet, ceux qui s'emparent du pouvoir en renversant des gouvernements démocratiquement élus. C'est là un témoignage de la résolution et du sérieux du continent sur ces questions. L'OUA attache, sur autre plan, une grande importance à plus de coopération avec les Nations Unies, et nous sommes convaincus que le partenariat entre les deux institutions ne peut que les renforcer mutuellement. Des évolutions se sont produites sur le terrain depuis la tenue de la dernière réunion du Conseil au niveau ministériel. La signature d'un Accord de cessez-le-feu en République démocratique du Congo et l'Accord de Lomé sur le processus de paix en Sierra Leone sont importants, et à cet égard, nous apprécions la récente proposition du Secrétaire général visant au déploiement d'une force de 6000 hommes en Sierra Leone et la réaction positive du Conseil de sécurité, qui se traduit par un projet de résolution qui est en ce moment examiné. L'envoi d'une telle force contribuera à stabiliser la situation et facilitera la mise en oeuvre de l'Accord de Lomé.

Concernant le regrettable conflit entre l'Ethiopie et l'Erythrée, l'Afrique est profondément engagée à lui trouver une solution, et les efforts qu'elle déploie sont menés par la Délégation de haut niveau des chefs d'Etat et de gouvernement comprenant le Président en exercice de l'OUA, les Présidents Blaise Compaoré du Burkina Faso, Robert Mugabe du Zimbabwe, et l'ancien Président de Djibouti, M. Hassan Gouled Aptidon, de même que son successeur à la tête de ce pays, et moi-même. Concernant le Libéria, la Sierra Leone et la Guinée-Bissau, c'est une nouvelle fois l'Afrique elle-même, et particulièrement les chefs d'Etats de la communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), qui a oeuvré assidûment pour un retour à la paix et à l'ordre constitutionnel dans ces Etats. En ce moment, le continent est aussi engagé dans l'avancement de la cause de la paix au Burundi, sous l'égide du Mwalimu Julius Nyerere, ancien Président de la Tanzanie. Dans l'esprit du Sommet d'Alger, nous sommes aussi déterminés à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour mettre fin aux destructions et aux massacres qui se déroulent en Angola, et qui ont pour cause l'intransigeance de la direction de l'UNITA. Nous espérons aussi intensifier les efforts visant la résolution des conflits qui déchirent la Somalie et le Sud du Soudan. La situation aux Comores demeure aussi de notre préoccupation, et nous n'avons épargné aucun effort en vue d'y restaurer la paix, la sécurité, et l'ordre constitutionnel. L'OUA est fière des partenariats qu'elle a pu construire avec les Nations Unies et les organisations économiques régionales africaines, et nous comptons les renforcer.

Mais nous aimerions insister sur le besoin de bénéficier d'un soutien et d'actions en temps opportun de la part de la communauté internationale, et particulièrement de la part du Conseil de sécurité et des Nations Unies, en vue d'aider les Accords de paix promus par l'OUA. Car au cours de périodes écoulées, nous avons perdu des occasions et des opportunités de retour à la paix du fait du manque de soutien au moment où nous en avions le plus besoin, de la part du Conseil de sécurité. Nous pensons spécialement ici à l'inaction de l'ONU face à la situation qui prévaut en République du Congo. Il ne fait pas de doute que la signature d'un accord de paix, bien que significative en elle-même, n'est que le début d'un processus ardu vers le rétablissement de la paix, semé cependant de dangers ayant un potentiel de retour à la situation de conflit, si de vraies composantes de maintien et d'établissement de la paix ne l'accompagnent pas en temps opportun. En plaidant pour une action rapide du Conseil de sécurité, nous voulons mettre l'accent sur le partenariat dont nous avons auparavant parlé et que nous voulons renforcer entre cette Organisation universelle, l'OUA et les organisations économiques régionales, ceci sur la base d'une répartition rationnelle du travail et d'un juste partage des tâches, tout en gardant en mémoire les responsabilités mondiales dévolues à l'ONU et à son Conseil de sécurité pour le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Nous sommes confiant que vous prendrez en compte les réalités et les efforts déployés par les Etats africains dans la résolution des problèmes qui les affectent et des événements qui s'imposent au continent de l'extérieur. Concernant les questions économiques, le Traité d'Abuja ouvre des perspectives inexplorées pour l'intégration des économies du continent. Mais l'Afrique a besoin d'aide pour pouvoir en réaliser les objectifs, et l'annulation de la dette des Etats du continent est devenue un impératif urgent. Récemment, à Syrte en Lybie, les dirigeants africains ont décidé, entre autres choses, de créer une Union africaine conforme aux objectifs de la Charte de l'OUA et aux clauses du Traité établissant une Communauté économique africaine. L'accélération du processus de mise en oeuvre du Traité, et le renforcement et la consolidation des communautés économiques régionales, sont le pilier de la réalisation de la Communauté économique africaine, qui, elle- même, est nécessaire à la réalisation de l'Union. Nous pensons donc que les sérieux efforts et l'imagination déployés par nos peuples pour faire face à leurs problèmes méritent plus de solidarité et de préoccupation de la part de la communauté internationale.

Déclarations

M. ABDALLAH BAALI (Algérie): en fondant l'Organisation de l'unité africaine (OUA) en tant que creuset de leur solidarité et vecteur de leurs aspirations, les pays africains ont su préserver leur indépendance face aux sollicitations que la structuration bipolaire des relations internationales portait, et au-delà, trouver dans les principes du non alignement les ressorts d'une unité d'action garante d'un impact significatif sur le cours des événements au sein des Nations Unies devenues le réceptacle de tant d'espérances. Depuis lors, l'OUA a démenti bien des paris sur son obsolescence et défié les éclipses auxquelles la vouaient des pesanteurs endogènes et des interférences exogènes. L'Afrique continue de souffrir d'une détérioration chronique des termes de l'échange, du fardeau de la dette extérieure, du poids du chômage, des effets des pandémies ainsi que des affres conjugués des méfaits de l'homme et de la nature. C'est sur le continent africain que se comptent les deux tiers des pays les moins avancés, les trois quarts des pays à faible niveau de développement humain et que vit dans une situation de pauvreté absolue près de la moitié de la population. De fait, avec une Aide publique au développement en constant déclin, un fardeau de la dette asphyxiant, un flux d'investissements directs étrangers encore dérisoire, une forte dépendance doublée d'une sensible vulnérabilité à l'égard des produits primaires qui constituent souvent sa seule exportation, un taux de participation insignifiant aux échanges commerciaux mondiaux, des indicateurs de développement social comptant parmi les plus bas, l'Afrique se présente aujourd'hui comme un continent affligé de lourds handicaps qui l'entravent d'autant plus que, dans ses efforts de développement, elle a entrepris de se redresser dans les conditions les plus défavorables et les plus négatives.

Lors du Sommet de l'OUA, tenu en juillet dernier à Alger, les dirigeants africains ont décidé de s'atteler avec une vigueur nouvelle à la résorption des conflits qui endeuillent leurs peuples et épuisent leurs précieuses ressources en traitant leurs causes sous-jacentes et en créant les conditions de la mise en oeuvre de solutions africaines nourries de valeurs africaines. La Déclaration d'Alger que le 35ème Sommet de l'OUA a voulu porteuse de la détermination de l'Afrique et de ses attentes, au seuil du XXIème siècle, est révélatrice d'une approche saine et ambitieuse du partenariat universel auquel les pays africains appellent dans l'intérêt le mieux compris de tous. La Déclaration adoptée par les chefs d'Etat et de gouvernement africains à Syrte, est venue établir de nouvelles règles en vue de faciliter l'évolution de l'Afrique vers l'unité que la Charte de l'OUA s'est fixé comme objectif ultime. L'Afrique a placé, au centre de ses priorités, le renforcement de ses capacités en matière de prévention, de gestion et de règlement des conflits, convaincue que les pertes humaines et les déperditions des ressources ne sauraient être justifiées par les faux enjeux et les solutions illusoires qui sont à la base de tant de confrontations internes et inter-africaines. Pour ce faire, le Sommet d'Alger a opéré une consolidation et un élargissement des bases doctrinales de l'action africaine commune, à la fois en sanctifiant des principes tel que celui de l'intangibilité des frontières existant depuis l'indépendance, et en décidant le rejet des changements constitutionnels dans la vie politique des Etats du continent. L'action de l'OUA, en coopération avec les Nations Unies et avec les bonnes volontés qui accompagnent la dynamique de paix de leur précieux soutien, se poursuivra méthodiquement et s'intensifiera avec l'adhésion des protagonistes dont la collaboration est indispensable. Le Sommet de l'OUA ne s'est pas uniquement engagé à clore la phase tragique des conflits en Afrique. Il s'est également voulu un nouveau point de départ pour le développement économique du continent et la réalisation de son intégration.

Le Traité d'Abuja créant la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) est en train de prendre corps, s'appuyant sur des regroupements régionaux et sous-régionaux dont l'interaction et les échanges concourront de manière progressive et pragmatique, à l'unification ultime du continent. Pour réussir le pari du redressement, l'Afrique doit pouvoir compter sur la communauté internationale. De manière générale, elle attend du reste du monde qu'il l'accepte comme un partenaire égal en droits et en devoirs, et qu'il la considère comme un interlocuteur crédible et responsable. Cela signifie que l'Afrique doit être partie prenante dans la prise de décisions concernant les grandes questions internationales qui engagent le destin de l'humanité et donc son propre devenir, que ce soit celles relatives à la paix et la sécurité internationales ou celles portant sur la coopération économique et le développement. Ensemble, nous devons réfléchir à l'identification de différents domaines où une coopération étroite entre les deux Organisations est souhaitable, sinon nécessaire, et aux moyens à même de l'organiser, de l'articuler et de la mettre en oeuvre. Il est donc essentiel que l'ONU s'engage, en Afrique avec le même poids et la même détermination qu'elle le fait dans d'autres régions du monde, tant en ce qui concerne la prévention des conflits ou leur règlement qu'en ce qui concerne les opérations de maintien de la paix ou l'assistance aux réfugiés.

M. RICHARD HOLBROOKE (Etats-Unis): le Secrétaire d'Etat des Etats-Unis, Mme Madeleine Albright, effectuera prochainement son troisième voyage officiel en Afrique. Tout d'abord, et de manière très fondamentale, les sociétés africaines ont besoin de paix. Aujourd'hui, la guerre affecte de nombreuses régions d'Afrique. Par le biais des efforts propres aux Etats-Unis et ceux de l'ONU, le gouvernement américain souhaite - et même redoublera d'efforts - appuyer les efforts visant à régler ces conflits. Comme le Président Clinton l'a indiqué dans son allocution à l'Assemblée générale, la semaine dernière, il faudra faire preuve de détermination pour renforcer le rôle de la communauté internationale en vue de prévenir et, en cas de besoin, mettre fin aux tueries et aux déplacement de personnes massifs. C'est une lourde tâche; il se peut que nous ne réussirons pas, mais nous devons essayer de le faire. En Afrique, nous devons oeuvrer de manière inlassable et de manière plus difficile pour régler les conflits qui menacent l'avenir du continent et mettent en péril la vie de la population. En République démocratique du Congo, les Etats-Unis appuient actuellement les efforts en cours pour mettre en oeuvre l'accord de paix négocié avec tant de difficultés par la Zambie. Ils examineront les recommandations des officiers de liaison militaires des Nations Unies sur les moyens de faire progresser le processus de paix. Les Etats-Unis appellent tous les combattants à adhérer à l'accord de cessez-le-feu. Les Nations Unies ont besoin d'un Représentant spécial dynamique et compétent en République démocratique du Congo dès que possible pour mettre en oeuvre l'accord de paix. De même, en Sierra Leone, les Etats- Unis oeuvrent activement avec le gouvernement sierra-léonais, avec les différents groupes de rebelles, la CEDEAO et l'ONU pour mettre en oeuvre l'accord de paix. Ils se disent anxieux d'entamer le désarmement et la démobilisation en Sierra Leone tandis que l'ECOMOG demeure une force crédible sur le terrain. Les Nations Unies doivent déployer le contingent supplémentaire autorisé par le Conseil de sécurité, dès que possible et se tenir prêtes à mettre en place une opération de maintien de la paix complète en décembre, lorsque les Nigérians envisagent de partir. Les Etats-Unis poursuivent également leurs efforts en vue de restaurer la paix en Ethiopie et en Erythrée.

Les échecs collectifs visant à prévenir et à contenir ces conflits sont lamentables. La communauté internationale a l'obligation de faire davantage. Pour leur part, les Etats-Unis ont déjà commencé à le faire. Par le biais de l'initiative du Président Clinton de 1996 concernant une réponse à la crise de l'Afrique, les Etats-Unis procèdent au renforcement de la capacité de l'Afrique dans le domaine du maintien de la paix. A ce jour, environ 5 000 soldats de la paix africains de six pays ont été formés dans le cadre de ce programme. Les Etats-Unis ont développé des procédures visant à mettre fin à la vente d'armes aux régions de conflit qui ne sont pas encore couvertes par les embargos sur les armes imposés par l'ONU, et encouragent les autres pays à établir et à contrôler de tels moratoires. Les Etats-Unis estiment également qu'il faudra s'attaquer aux structures économiques qui encouragent le commerce illicite des armes - les marchés "gris" et "noir" des diamants, des métaux précieux et des stupéfiants. Par ailleurs, le terrorisme continue de poser une menace transnationale grave que nous devrons tous combattre. Les Etats-Unis assurent une formation anti-terroriste aux officiers chargés de mettre en oeuvre ces mesures dans huit pays africains. L'Afrique doit continuer à développer ses propres sociétés et à opter pour une économie de marché.

M. LLOYD AXWORTHY, Ministre des affaires étrangères du Canada: la prévention et le règlement des conflits sont le point de départ vers lequel tendent tous les Africains qui s'emploient à faire cesser les guerres: l'Organisation de l'unité africaine (OUA) dans le cas du conflit entre l'Ethiopie et l'Erythrée; la Communauté de développement en Afrique australe en Angola et en République démocratique du Congo; le processus d'Arusha au Burundi. Un soutien international peut raffermir ces actions et concourir au renforcement des capacités à l'échelle locale. C'est en vertu de ce principe que le Canada s'associe à l'action du Commonwealth en Sierra Leone. Au sommet de Moncton, le Canada a annoncé le lancement d'un programme de formation d'une durée de trois ans visant à renforcer le degré de compétences en matière de paix et de sécurité dans des pays de la Francophonie. Mais instaurer la paix ne suffit pas, encore faut-il la maintenir et la consolider, et les Africains sont invités à apporter leur concours dans cette tâche. Au sortir des conflits, l'instauration d'une culture de la paix requiert le soutien de tous - Gouvernement, société civile et monde des affaires. Le désarmement, la démobilisation et la réinsertion des anciens combattants, tout comme la pénible situation des enfants touchés par la guerre sont autant de défis à relever. Le Canada et le Ghana organiseront l'an prochain une conférence sur la paix et la sécurité en Afrique de l'Ouest. Par ailleurs, une grande partie de l'Initiative canadienne de consolidation de la paix, dotée d'un budget de 30 millions de dollars, vise à soutenir des projets à l'échelle locale. La semaine dernière, le Gouvernement canadien a annoncé une contribution supplémentaire de 4,5 millions de dollars en faveur de la Sierra Leone afin d'aider les civils, et en particulier les enfants, touchés par le conflit.

Il est également capital de mieux contrôler les marchés qui alimentent les machines de guerre locales en Afrique. Entreprises et pouvoir publics doivent avoir une attitude responsable à cet égard. Il incombe aussi au Conseil de sécurité de protéger la sécurité des Africains. Cette instance a en effet le pouvoir de prendre des mesures à l'encontre de ceux qui profitent de la misère; elle peut contribuer à l'instauration d'une paix durable et même intervenir en cas d'urgence. La dramatique situation de certains Africains - victimes du génocide au Rwanda, de la famine en Somalie, de la terreur en Sierra Leone, de l'esclavage au Soudan ou encore de la guerre insensée entre l'Ethiopie et l'Erythrée - appelle une intervention efficace de la part du Conseil de sécurité. De son côté, le Canada se préoccupe en premier lieu du développement en Afrique, qui est selon lui le moyen le plus sûr de garantir une paix durable. Des Canadiens de tous horizons (juges, policiers, enseignants, travailleurs humanitaires) sont à l'oeuvre en Afrique. Le Canada est d'ailleurs le seul pays non africain à toujours contribuer à la Mission des Nations Unies en République centrafricaine.

M. FERNANDO ENRIQUE PETRELLA (Argentine): ce débat nous donne l'occasion de faire le point sur les meilleurs moyens de mettre un terme aux conflits africains et ce d'une manière durable. Il faut tout d'abord reconnaître l'indiscutable responsabilité du Conseil de sécurité dans le maintien de la paix mondiale et renforcer son autorité. Dans ce contexte, le concept de "sécurité humaine" est essentiel. Une coopération étroite entre le Conseil et les organismes africains régionaux et sous- régionaux est en outre indispensable pour comprendre les causes profondes des conflits. Cette coopération est particulièrement importante quand il s'agit d'élaborer des mécanismes de prévention ou d'alerte rapide. La création de conditions de développement minimales permettant de faire face aux conséquences du conflits est également fondamentale, surtout lorsqu'il faut envoyer de l'aide humanitaire. A cet égard, une bonne coordination est indispensable entre les activités du Conseil de sécurité et les autres organes du système des Nations Unies, en particulier les institutions de Bretton Woods.

En République démocratique du Congo comme en Sierra Leone, la voie de la négociation et du dialogue a repris, grâce à la volonté constructive des leaders régionaux et à l'appui du Conseil de sécurité. Dans le cas de la République centrafricaine, les élections présidentielles, qui ont eu lieu le 19 septembre, se sont déroulées dans la transparence et la paix. La Mission des Nations Unies dans ce pays, la MINURCA, a joué un rôle fondamental pour créer les conditions de stabilité nécessaires à la tenue de ce scrutin. Au Sahara occidental, la MINURSO, en collaboration avec les Marocains et le Front Polisario, continue son travail de préparation d'un referendum. Pour ce qui est du conflit entre l'Erythrée et l'Ethiopie, nous avons l'espoir de parvenir à un apaisement de la situation. Force est de constater que tous ces pas en direction de paix l'ont été grâce à l'action du Conseil de sécurité. Depuis le début des années 50, l'Argentine a participé au processus de décolonisation en Afrique. Elle encourage aujourd'hui l'instauration d'un Etat de droit et l'ouverture économique de ce continent. Dans la mesure de ses possibilités, l'Argentine a participé et continuera de participer à des opérations de maintien de la paix en Afrique, à travers des programmes humanitaires ou d'assistance dans des domaines comme l'agriculture ou l'informatique.

M. JEAN PING, Ministre des affaires étrangères, de la coopération et de la francophonie de la République gabonaise: répondant à une demande du Conseil de sécurité, le Secrétaire général lui a soumis, le 13 avril 1998, un rapport d'une qualité exceptionnelle, tant en ce qui concerne la justesse du diagnostic qu'en ce qui est des règles proposées, concernant des solutions aux sources des conflits et à la promotion d'une paix et d'un développement durables en Afrique. Répondant aux propositions concrètes du Conseil sur notamment, l'appui aux initiatives régionales et sous-régionales dans le domaine de la prévention des conflits, le renforcement des capacités de l'Afrique en matière de maintien de la paix et l'accroissement de l'efficacité des régimes de sanctions sur les armes, l'Afrique s'est efforcée de se doter de mécanismes appropriés en matière de prévention, de gestion et de règlement des conflits aux niveau régional et sous- régional. Les pays d'Afrique centrale, outre un système d'alerte rapide et l'adoption d'un pacte de non-agression, ont créé un Conseil supérieur de la paix et de la sécurité, et des exercices de simulation d'opérations de maintien de la paix y auront lieu en l'an 2000. Ces différentes initiatives concourent au renforcement des mesure de confiance entre les Etats de la sous- région.

L'accueil favorable réservé au rapport du Secrétaire général sur les causes des conflits en Afrique par les institutions internationales et autres organisations gouvernementales et non gouvernementales, aurait pu faire penser que la communauté internationale soutiendrait de manière active les actions entreprises par l'Afrique dans le domaine de la résolution des conflits, de la consolidation de la démocratie et du développement économique et social. Mais le Conseil de sécurité tergiverse en ce qui concerne les situations de conflits en Afrique, alors que dans d'autres parties du monde, il agit promptement au nom de l'humanitaire. L'Afrique, dont les actions prouvent la détermination à combattre les crises qui affectent le bien-être de ses populations, a besoin du concours indispensable de la communauté internationale.

M. SERGEI LAVROV (Fédération de Russie): pendant l'année qui s'est écoulée, la situation en Afrique est multidimensionnelle et continue d'être critique. Grâce aux initiatives des pays intéressés, de l'ONU et d'organisations régionales, un certain nombre de conflits ont pu être réglés. Toutefois, il en subsiste d'autres qui ne donnent aucun signe qu'un règlement proche sera réalisé. Il faut élargir les opérations de maintien de la paix régionales, avec l'appui des Nations Unies. Sans règlement solide et durable des conflits, il n'est pas possible pour les pays africains de prendre part à l'économie mondiale. L'OUA dispose d'un potentiel important tant pour régler les conflits que pour assurer la reconstruction après les conflits. La Fédération de Russie note avec satisfaction le rôle que les pays africains jouent dans le domaine du maintien de la paix et de la sécurité sur leur continent et leur détermination d'intégrer l'économie mondiale.

M. PETER HAIN, Ministre d'Etat des affaires étrangères et du Commonwealth (Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord): les progrès réalisés depuis 18 mois semblent indiquer la bonne voie à suivre pour trouver des solutions aux problèmes qui se posent à l'Afrique. L'Afrique a souffert de longues périodes d'exploitation coloniale et néocoloniale et souffre encore des conséquences de cette situation. Aujourd'hui, le continent est sur la touche, après avoir été pendant de longues années, le terrain de luttes d'influence entre les blocs Est et Ouest pendant la guerre froide. Comment peut-on aujourd'hui, situer les problèmes de l'Afrique sur l'agenda international, et comment peut-on l'aider? Nous pensons qu'il faut travailler avec les Africains eux mêmes, pour trouver des solutions aux questions qui se posent à eux et aux calamités qui les affectent. Nous pensons, en ce sens, que la vision exprimée par M. Thabo Mbeki, le Président de l'Afrique du Sud, et qui parle d'une renaissance africaine, est la bonne, et nous sommes prêts à soutenir de véritables efforts allant dans le sens de la démocratisation et d'un véritable développement économique du continent, loin des maux qui l'affectent, comme ceux de la corruption et de la violence. Il faut empêcher les guerres de démarrer, et pour cela, il faut améliorer les conditions socioéconomiques du continent. Notre gouvernement soutiendra, à cet égard, les efforts pour accomplir la transparence et parvenir à construire une vie civile saine, et nous appuierons les organisations régionales dans leurs activités de maintien de la paix.

Concernant les aspects économiques, nous sommes pour une solution réelle au problème de la dette qui est un lourd fardeau pour les Etats africains dont les Gouvernements doivent persévérer dans les efforts qu'ils font pour créer des cadres qui attirent les investissements et la croissance. La bonne gouvernance doit devenir, sur ce point, un mot d'ordre absolu.

M. MARTIN ANDJABA (Namibie): nous appuyons l'idée du Secrétaire général de recourir davantage à la prévention. C'est la raison pour laquelle nous nous félicitons du soutien apporté par les Nations Unies au Centre régional pour la Paix et le Désarmement, aux Centres de formation au maintien de la paix de la Côte d'Ivoire et du Zimbabwe, ainsi que des initiatives régionales et sous-régionales prises à travers le Réseau d'information régional intégré des Nations Unies, en tant que mécanisme d'alerte rapide en Afrique centrale et australe. Nous nous félicitons également des efforts déployés par les Nations Unies pour la reconstruction après les conflits dans les pays qui sortent de la guerre civile. Les efforts de l'Organisation en vue de la destruction des armes de petit calibre sont tout aussi louables. Le Conseil de sécurité a adopté nombre de résolutions imposant des sanctions à l'Union nationale pour l'indépendance de l'Angola (UNITA). Nous sommes en faveur d'une stricte application de ces sanctions. A cet égard, l'existence d'une véritable volonté de la communauté internationale est indispensable au renforcement de leur efficacité. En outre, mon pays prépare l'élaboration d'une législation qui incriminera les violations par l'UNITA des sanctions imposées par le Conseil de sécurité. Il entend obtenir à cette fin l'assistance du Secrétariat.

Depuis le déclenchement des hostilités en République démocratique du Congo, d'importants efforts ont été déployés par l'Organisation de l'Unité africaine et par les Nations Unies afin de trouver une solution au conflit. Un Accord de cessez-le-feu ayant été signé par les parties, nous considérons que le déploiement des Opérations de maintien de la paix des Nations Unies en République démocratique du Congo, sans plus attendre, est de la plus haute importance. Il en va de la mise en oeuvre d'un accord qui reste fragile. Une telle force internationale de maintien de la paix devrait être déployée sur la base du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies et alimentée par des ressources financières nécessaires. Depuis 50 ans, nombre d'instruments internationaux ont été ratifiés, qui traitent des droits, de la protection et du bien-être des enfants. Aussi, est-il urgent que toutes les parties impliquées dans des conflits respectent pleinement les dispositions de tels instruments. Enfin, il est important que la communauté internationale ne soit pas sélective dans son approche des situations humanitaires dans le monde. Le temps est maintenant venu pour elle d'accorder une égale attention à tous les conflits. En même temps, nous considérons que le traitement des situations humanitaires seul n'est pas suffisant. Aucun effort ne devra être épargné pour s'attaquer aux causes des conflits. Le Sommet de l'OUA, récemment tenu à Alger, a démontré une fois encore, la volonté des Etats africains de faire de

la paix et du développement, une loi pour l'Afrique. Ceci étant, une volonté politique d'assister les Africains doit exister pour que la paix et la sécurité deviennent des réalités en Afrique.

M. MOHAMMAD KAMAL YAN YAHAYA (Malaisie): aujourd'hui, beaucoup d'Etats Membres paraissent sceptiques en ce qui concerne la volonté et la détermination des Nations Unies à intervenir dans les situations conflictuelles en Afrique. Le Conseil a entendu l'appel lancé par le Président de la République de Zambie, Frederick Chiluba, la semaine dernière seulement. Ce dernier le priait de se montrer plus disposé à soutenir les efforts de maintien de la paix en Afrique. Cette hésitation s'explique en partie par l'échec de l'intervention menée en Somalie, ainsi que par la "non-intervention", au Rwanda, au début des années quatre-vingt-dix. De plus, ce n'est que l'an dernier, que le Conseil a commencé à engager des efforts de maintien de la paix en République centrafricaine ou en Sierra Leone. C'est pourquoi, nous prions instamment le Conseil de définir des critères clairs, indifférents de la situation géographique, permettant de mettre en place de telles opérations. Durant le débat général en cours de l'Assemblée générale les Etats membres ont présenté des avis divergents quant à la question de l'ingérence humanitaire. A ce sujet, la Malaisie tient à déclarer que pour elle l'autorisation du Conseil de sécurité constitue un préalable à toute opération de force menée contre un des Etats membres de l'Organisation. La Malaisie estime qu'un engagement politique durable est nécessaire afin que les conflits actuellement réglés en Afrique ne resurgissent. Or, les Nations Unies sont le seul mécanisme international à même d'agir lorsque les Etats ne peuvent le faire seuls. Mais, pour mener à bien sa mission, il lui faut de meilleurs outils et des ressources supplémentaires.

Dans le contexte actuel des situations conflictuelles en Afrique, une plus grande coopération et coordination entre l'Organisation de l'unité africaine (OUA) et les Nations Unies est nécessaire. Cette coopération doit être soutenue par un engagement politique durable. A ce sujet, la Malaisie engage les Etats et les organismes internationaux pertinents à poursuivre leur soutien financier et technique visant la poursuite du renforcement des efforts en matière de prévention des conflits sur ce continent. Mais les efforts déployés par des organismes régionaux pour le maintien de la paix ne doivent pas soustraire le Conseil de ses obligations dans ce domaine. Il ne peut sous- estimer les responsabilités que lui confère la Charte. Depuis un an, ma délégation a soulevé à maintes reprises la question du soutien qu'apporte le Nigéria dans ses efforts de maintien de la paix en Afrique. Ce pays devra être soutenu. Ma délégation est très préoccupée par la prolifération des armes légères en Afrique et supporte pleinement l'appel lancé pour un contrôle plus strict des armes dans les zones de conflits. De même, nous sommes sensibles à la question de l'utilisation des armes de pointe, source potentielle de nouveaux troubles en Afrique. Récemment nous avons pu apprécier la rapidité du Conseil, concernant la question du Timor oriental et espérons qu'il agira de même pour les conflits africains. M. JASSIM BUALLAY (Bahreïn): ma délégation se félicite des travaux accomplis par l'Organisation de l'unité africaine (OUA) visant à établir des mécanismes efficaces pour prévenir, gérer et régler les conflits sur le continent africain. Les organes des Nations Unies ont lancé de nombreuses initiatives pour assister tant les pays africains touchés par les conflits que ceux qui en sont épargnés. Tout en soulignant leur efficacité, les sanctions imposées par le Conseil de sécurité ne devraient pas avoir un impact négatif sur les populations civiles. Après les conflits, les Nations Unies sont invitées à mettre en place une force de police civile dans les pays concernés. L'aide humanitaire aux pays africains est indispensable. A cet égard, le Bahreïn insiste sur la nécessité de faciliter l'accès aux organisations humanitaires et de s'assurer que l'aide humanitaire est livrée aux personnes dans le besoin. L'allégement de la dette est indispensable pour permettre aux pays africains de mieux répondre aux objectifs de développement qu'ils se sont fixés. Certains pays africains ont pris des mesures concrètes visant la libéralisation de leur commerce.

M. DANILO TURK (Slovénie) a mis l'accent sur certains domaines qui, selon lui, exigent des mesures supplémentaires. Il a évoqué le domaine de la coopération interinstitutions, en particulier entre l'ONU et l'OUA, pour souhaiter une plus grande implication du Secrétaire général de l'OUA dans les travaux du Conseil parce qu'ensemble, a estimé le représentant, ces deux institutions peuvent assurer une synergie dans la mise en oeuvre de leurs mandats respectifs et éviter ainsi des situations où des procédures régionales complexes entraînent des retards inconsidérés et diminuent l'efficacité des actions de l'ONU en faveur de l'OUA. Le représentant s'est arrêté sur la nécessité pour le Conseil de sécurité d'engager une réflexion plus approfondie sur la question des sanctions. Il a rappelé, à cet égard, les termes de la note du Président du Conseil datée du 29 janvier 1999, qui comprend un certain nombre de propositions sur des mesures visant à améliorer l'efficacité des régimes des sanctions et à atténuer leurs effets secondaires. Les activités du Conseil de sécurité dans ce domaine doivent se poursuivre, a estimé le représentant qui a poursuivi son intervention en abordant la question du trafic illicite d'armes et d'armes conventionnelles. Le représentant a, à cet égard, rappelé les dispositions de la résolution 1209 du Conseil de sécurité qui complètent les différentes initiatives de la région parmi lesquelles figurent le Moratoire de la CEDEAO sur la production et le transfert des armes légères et la décision de l'OUA d'organiser une conférence régionale sur les armes légères.

Venant à la question du maintien de la paix, le représentant s'est félicité des efforts en cours pour intensifier la coopération entre l'ONU et l'OUA ainsi qu'avec les autres arrangements régionaux et sous-régionaux. Il a toutefois souligné qu'au stade actuel, le renforcement de la capacité de l'Afrique en matière de maintien de la paix demeure tributaire de l'appui logistique qui lui sera offerte par l'ONU et la communauté internationale. Le représentant a conclu en convenant d'abord que de nombreux préalables à la paix et au développement durable en Afrique échappent aux prérogatives du Conseil du sécurité. Il s'est ainsi félicité de la récente initiative du G8 d'apporter des changements déterminants à l'initiative HIPC en faveur des pays pauvres les plus endettées. Beaucoup reste à faire, a dit le représentant, avant de regretter que la mise en oeuvre des programmes d'ajustement structurel soit toujours une condition préalable à l'entrée d'un Etat au FMI. Dans ce contexte, le représentant a appelé la communauté internationale à répondre aux appels en faveur de l'annulation de la dette et à repenser le rôle du FMI en Afrique. Il semble que les arrangements actuels ne résolvent pas les problèmes fondamentaux de l'Afrique et tendent, au contraire, à détourner l'attention des défis importants que sont l'éradication des maladies, le développement des ressources humaines et la gestion de l'environnement.

M. GESLON FONSECA (Brésil): le Brésil entretient des liens étroits avec l'Afrique. Nous parlons des Africains comme de nos frères et toujours dans un esprit de solidarité. Nous n'avons aucun conseil à leur donner ni de leçon à leur faire. Cependant, certaines questions relatives à l'Afrique sont préoccupantes, et particulièrement la persistance des conflits armés et des obstacles à l'établissement des bases d'un développement durable sur tout le continent. Il est donc naturel que l'Afrique fasse l'objet d'une série d'initiatives des Nations Unies. La communauté internationale doit manifester clairement, avec bonne volonté et par des actes concrets, sa volonté de faire davantage, et de renforcer sa coopération avec l'Organisation de l'unité africaine (OUA), avec les pays d'Afrique et avec leurs organisations sous-régionales.

Le Conseil de sécurité s'occupe de façon suivie des conflits en Afrique, mais ses initiatives sont très timides. Il semblerait que la communauté internationale ne se sente obligée d'entreprendre des actions conjointes, de mobiliser la volonté politique qui s'impose et les instruments juridiques indispensables que lorsque les problèmes ont atteint des dimensions telles que leur résolution devient extrêmement difficile. La situation en Angola est un exemple clair de conflit qui n'a pas reçu le traitement prioritaire qui s'imposait de la part de la communauté internationale, en dépit de ses effets notoirement catastrophiques.

Les initiatives et les décisions des Africains permettent les progrès les plus importants sur leur continent. L'extraordinaire transition qu'a connue le Nigéria est un exemple d'événement ayant des répercussions au-delà des frontières de ce pays. A cet égard, le processus de démocratisation en Afrique est essentiel pour l'instauration d'une culture participative et de respect des droits de l'homme, mais aussi afin de créer des conditions de stabilité, indispensables au processus de développement.

En Afrique du Sud, la disparition de l'apartheid a démontré que le continent africain a la capacité d'inventer une culture de tolérance en dépit de conditions difficiles. Le processus d'indépendance en Namibie et le processus de réconciliation nationale au Mozambique sont également des exemples frappants de la capacité africaine à construire la paix grâce au dialogue et à la participation. L'ensemble d'initiatives internationales en faveur de la légitimité est également un phénomène positif, notamment en ce qui concerne les sanctions contre l'UNITA.

M. MOMODOU LAMIN SEDAT JOBE, Secrétaire d'Etat aux affaires étrangères de la Gambie: le continent africain se transforme rapidement et sa situation s'améliore. Malheureusement, la situation générale de l'Afrique est perturbée par les conflits, les guerres civiles, la stagnation économique, les problèmes concernant les réfugiés, la pauvreté et les maladies mortelles. Toutefois, en dépit de ce triste tableau, les Etats africains prennent davantage d'initiatives afin d'atténuer les souffrances de leur population.

Ma délégation reconnaît que les conflits que connaît l'Afrique sont complexes. A cet égard, nous apprécions les efforts déployés par les diverses agences et fonds des Nations Unies. Nous devons toutefois souligner la responsabilité primordiale du Conseil de sécurité, en tant qu'organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité dans le monde. Il est inacceptable que le Conseil de sécurité hésite à organiser des opérations de maintien de la paix en Afrique. Il est vrai que l'échec de ses opérations en Somalie est désagréable, mais il est pire de rester inactif comme au Rwanda et dans d'autres pays.

Les coûts financiers ne doivent plus servir de justification pour les interventions. Les Nations Unies devraient envisager des solutions afin d'accorder plus de fonds aux opérations de maintien de la paix.

La prolifération et le flux illicites d'armes pourraient notamment être réduits en identifiant les marchands d'armes internationaux et en restreignant le commerce d'armes légères. Nous encourageons le Secrétariat à entreprendre une étude de faisabilité et à émettre des recommandations sur ce sujet.

Nous avons récemment pu constater que ce sont les populations civiles, et particulièrement les femmes, les enfants et les autres groupes vulnérables qui souffrent le plus des conflits armés. Pour que la sécurité des populations civiles soit assurée, il est absolument impératif que toutes les parties aux conflits respectent les normes du droit humanitaire international et les principes des droits de l'homme. A cet égard, notre délégation se félicite du rôle important qu'ont joué le Représentant spécial du Secrétaire général pour les enfants touchés par des conflits armés, de l'UNICEF, de

l'Organisation mondiale de la santé (OMS), du Haut Commissariat aux réfugiés (HCR) et de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme. Ma délégation soutien également les différents efforts entrepris par le Secrétariat pour améliorer la situation des civils dans les conflits armés, et particulièrement celle des enfants.

Il est peut-être nécessaire d'organiser une série d'initiatives pour aider les sociétés à sortir de situations de conflit. Toutefois, ces interventions ne doivent pas être suspendues dès que le conflit prend fin. Pour que ces sociétés ne basculent pas une nouvelle fois dans la guerre, il faut leur fournir des structures d'aide post-conflit. La création au Libéria et en Guinée-Bissau de bureaux d'aide au rétablissement de la paix est un bon exemple des aides post-conflit au rétablissement de la paix.

M. ALAIN DEJAMMET (France): depuis que le Conseil de sécurité, en demandant au Secrétaire général un rapport sur l'Afrique, avait manifesté son intérêt pour le sort de l'Afrique, les critiques ont réapparu sur le thème d'un moindre engagement concret de la communauté internationale sur ce continent par rapport à ce qui était fait dans d'autres régions. La séance d'aujourd'hui est une initiative bienvenue qui doit permettre d'y répondre et de renouveler la détermination que nous avions manifesté il y a deux ans. Le bilan depuis lors n'est pas aussi sombre qu'on le prétend parfois. Il est satisfaisant de constater la vitalité des organisations régionales et sous- régionales africaines, telles que la CEDEAO, la SADC, l'OUA et l'IGAD, qui ont joué un rôle souvent déterminant dans le règlement de conflits. Toutefois, cette intervention renforcée et souvent fructueuse de ces organisations ne doit pas pour autant dispenser les Nations Unies et les partenaires extérieurs de l'Afrique de leurs responsabilités. Or là aussi l'expérience des 18 derniers mois a montré que, sans soutien déterminant de la communauté internationale, les progrès accomplis par les Africains risquaient d'être fragiles, voire de rester lettre morte. Ainsi, au moment où il est question de renforcer les capacités africaines de maintien de la paix, il est bon de tirer les leçons de la gestion des crises récentes - notamment en Guinée-Bissau, en République démocratique du Congo, en Sierra Leone, en République centrafricaine, en Ethiopie et en Erythrée - à savoir qu'une force multinationale africaine n'est viable que si un pays est disposé à et capable d'assumer le rôle de nation- pilote ( à l'instar du rôle joué par le Nigéria au sein de l'ECOMOG en Sierra Leone), et que si elle bénéficie de soutiens logistiques et financiers extérieurs. Par ailleurs, en l'absence de solution régionale capable de mettre sur pied une force multinationale (comme cela semble être le cas pour la République démocratique du Congo), le Conseil de sécurité doit être prêt à assumer ses responsabilités et à envoyer, là où c'est nécessaire pour garantir le respect d'un accord de paix, une force de maintien de la paix.

A côté des évolutions positives, des problèmes demeurent, en particulier en Angola où les Nations Unies ont pour le moment, malheureusement, un rôle marginal. Par ailleurs, les effets de la circulation et de l'accumulation déstabilisantes et du trafic illicite des armes légères et de petit calibre sont très dévastateurs en Afrique et, au-delà des mesures de sensibilisation actuelles, il faudra agir plus concrètement et vigoureusement. En arrière-plan de plusieurs conflits en Afrique, on trouve souvent des trafics illicites de matières précieuses - des diamants en particulier - mais aussi parfois des opérations de pillage à grande échelle des ressources naturelles d'un pays par des armées étrangères et des groupes armés qui financent ainsi leur effort de guerre et achètent des armes. Tout effort visant à lutter contre ces trafics et pillages doit être encouragé, non seulement en améliorant l'application des sanctions, lorsqu'elles existent, mais aussi en cherchant à faire toute la lumière sur ces phénomènes.

M. QIN HUASUN, (Chine): depuis le rapport du Secrétaire général sur la situation en Afrique, l'année dernière, on constate que, dans l'ensemble, le continent africain fait preuve d'une stabilité relative et d'une croissance économique continue, de progrès dans le processus de démocratisation et dans le domaine des droits de l'homme. De plus, des Accords de paix ont été signés en Sierra Léone et en République démocratique du Congo. Ce sont là des signes positifs de progrès, toutefois, il ne faut pas oublier que le continent africain reste la région la moins développée du monde caractérisée par des conflits fréquents et un nombre important de réfugiés. D'un point de vue stratégique, la communauté internationale doit accorder l'attention requise à l'Afrique qui représente plus de 50 pays, soit la moitié des Etats Membres des non-alignés et un tiers de ceux de l'ONU. L'Afrique représente également un marché important avec un potentiel économique illimité, elle fait partie intégrante du développement économique mondial. La communauté internationale doit traiter l'Afrique comme un partenaire de développement égal et lui fournir un soutien et une aide conséquente.

La communauté internationale doit s'attacher à mettre en place un environnement extérieur favorable à l'Afrique et à cette fin définir un nouvel ordre économique et politique mondial. Le processus de mondialisation en cours risque de marginaliser l'Afrique et si l'on ne remédie pas à cette situation il ne pourra y avoir de paix et de développement sur ce continent. Compte tenu des conditions spécifiques des différents pays, les solutions aux problèmes africains doivent être trouvées au cas par cas et non pas être uniformes. En outre, la communauté internationale doit accorder un soutien vigoureux aux efforts déployés par les organisations régionales africaines, telles que l'OUA, la CEDEAO, la SADC et l'IGAD, en particulier dans les domaines de la prévention et de la gestion de conflits. Cela suppose notamment de la part de la communauté internationale et, en particulier, des

pays développés, qu'elle honore ses engagements en matière d'Aide publique au développement, réduise le poids de la dette africaine et lève certaines barrières commerciales. De plus, le système des Nations Unies et les institutions de Bretton-Woods devraient jouer un rôle plus actif.

M. WIM KOK, Premier Ministre des Pays-Bas: la façon dont le Conseil de sécurité aborde les conflits, l'instabilité et le manque de développement en Afrique affecte non seulement les Africains mais aussi la crédibilité des Nations Unies. C'est une détermination égale à celle dont a fait récemment preuve le Conseil de sécurité à l'égard du Timor oriental qu'il faudra pour résoudre les conflits en Afrique et éliminer leurs causes. M. Kok a souligné qu'il est tout aussi important de s'occuper des questions de sous-développement, y compris des questions structurelles, que de trouver des réponses appropriées aux problèmes des mouvements d'armes et de la conduite inacceptable des combattants. La politique étrangère des Pays-Bas, en particulier sa politique de développement, est particulièrement orientée vers les problèmes de l'Afrique. Les Pays-Bas souscrivent aux observations du rapport du Secrétaire général touchant au développement durable et aux causes intrinsèques des conflits. De ce fait, les Pays-Bas souhaitent consacrer 50% de leur aide au développement à l'Afrique et faire de l'allégement de la dette des pays africains une priorité. M. Kok a également expliqué la proposition de son pays pour l'établissement d'une stratégie commune qui comprendrait le soutien du développement, l'étude des causes d'instabilité et de sous-développement et le renforcement des capacités de maintien de la paix, grâce aux organisations régionales et sous-régionales. Il a insisté sur le fait que l'effort de coopération des Pays-Bas à la reconstruction des Balkans ne se fera pas aux dépens de l'Afrique.

En ce qui concerne la logistique des opérations de maintien de la paix, M. Kok a déploré le déraillement de certaines d'entre elles en raison d'un manque de financement. Il a suggéré que soit développée l'idée d'un allégement de la dette des pays africains proportionnellement à leur participation aux opérations de maintien de la paix ainsi que d'un accroissement de l'aide aux Etats participant à un tel effort au niveau régional. Il faut une approche créative à l'aide apportée au continent africain afin de dynamiser la diplomatie préventive, les processus de paix et de maintien de la paix.

M. BORYS TARASYUK, Ministre des affaires étrangères de l'Ukraine: en tant que pays fondateur des Nations Unies, l'Ukraine a toujours suivi étroitement l'évolution de la situation sur le continent africain et a appuyé la lutte pour l'indépendance des peuples d'Afrique. Nation indépendante depuis seulement huit ans et qui a édifié ses institutions et élaboré sa législation nationale en partant de rien, l'Ukraine comprend pleinement les problèmes auxquels est confrontée l'Afrique. Il faudra promouvoir le développement économique de la région, grâce à la fois à la coopération bilatérale et aux efforts internationaux concertés. Pendant des décennies, l'Ukraine a maintenu des liens traditionnels étroits avec les pays africains. Des dizaines de milliers de spécialistes africains ont été formés en Ukraine. Des kilomètres de voies ferrées, d'autoroutes et de pipelines, des centrales électriques ou des usines ont été construits par des Ukrainiens dans de nombreux pays africains. Après une brève interruption due à la période en transition, l'Ukraine essaie maintenant de renouveler ses anciennes relations, en faisant une contribution à la croissance économique et à la stabilité sociale de ces pays. C'est ce qui explique la participation pour la première fois de l'Ukraine au Sommet de l'OUA, tenu à Alger en juillet dernier. Réaffirmant le principe de l'intégrité territoriale des pays à l'intérieur de leurs frontières universellement reconnues, l'Ukraine condamne fermement toute action violente des rebelles perpétrée contre les populations et les gouvernements légitimes. L'Ukraine a une expertise dans le domaine du règlement des conflits inter- ethniques et de la promotion de la tolérance à l'égard des minorités nationales. Elle a réglé avec succès les questions délicates du retour et de la réintégration de centaines de milliers de Tartares de Crimée qui jouissent de tous les droits de la société démocratique ukrainienne et vivent en paix avec les autres groupes ethniques du pays. L'Ukraine contribue en outre à régler les problèmes de sécurité complexes notamment à Moldova, en Abkhazie (Géorgie) et en Nagorny-Karabakh (Azerbaïdjan).

L'expérience ukrainienne en matière de médiation politique et de maintien de la paix peut être utile aux pays africains, en particulier à l'égard des consultations en cours sur l'envoi d'opérations de maintien de la paix en République démocratique du Congo et en Sierra Leone. Rappelant qu'elle a été un des co- auteurs du projet de convention de 1989 sur le recrutement, l'utilisation, le financement et la formation de mercenaires et qu'à cet égard, elle se conforme pleinement à ses obligations internationales, l'Ukraine envisage de renforcer les mesures législatives applicables en la matière. L'Ukraine se félicite de l'attention accrue que le Conseil de sécurité prête à la nécessité de renforcer les embargos sur les armes et de combattre la circulation illicite d'armes en Afrique. Elle propose de convoquer, sous les auspices des Nations Unies, une réunion internationale d'experts des grands pays producteurs d'armes, en vue d'élaborer des mesures concrètes pour empêcher la revente des armes à des tierces parties et de combler le vide juridique.

M. ABDULKADER BAJAMMAL (Yémen): les autorités de mon pays ont mis en oeuvre une coopération avec nombre d'organisations régionales et internationales dans le but de remédier à la détérioration de la situation dans la Corne de l'Afrique et en Afrique Centrale et de l'Est. Notre pays subit chaque jour les conséquences de ces conflits depuis que son littoral est devenu une terre d'accueil pour des milliers de personnes fuyant les foyers de guerre et de dissension. Ainsi, le fardeau qui pèse sur le peuple et l'Etat yéménites est très lourd. Notre économie ne pourra pas supporter indéfiniment une charge sans cesse croissante. La tragédie que nous subissons est d'autant plus grave que rien ne laisse espérer un rétablissement de la paix et de la stabilité dans la région. Le Gouvernement de la République du Yémen exhorte le Conseil de sécurité à prendre les mesures qui s'imposent pour sauver une situation à propos de laquelle le silence n'est plus possible. Le Conseil de sécurité devra soutenir les efforts déployés par l'Organisation de l'unité africaine pour rechercher des solutions qui préservent la souveraineté des Etats, l'unité et la cohésion sociale des peuples et qui permettent d'alléger les impacts humanitaires et environnementaux des conflits. Des solutions devraient également être trouvées pour traiter des problèmes de la faim et de la pauvreté, des épidémies et de l'accroissement du nombre des personnes déplacées. Le Conseil devra s'efforcer d'éliminer les causes de ces conflits. En dépit des effets négatifs sur l'économie et l'environnement du Yémen, mon pays est prêt à renouveler ses efforts pour participer à la mise en place d'une force internationale et régionale qui contribuera de façon efficace au rétablissement de la paix dans la Corne de l'Afrique et en Afrique de l'Est. Nous demandons également l'assistance de la communauté internationale pour que notre pays puisse faire face à ses problèmes économiques et environnementaux. Tout en renouvelant notre entière confiance au Conseil de sécurité nous attendons qu'il renforce l'efficacité de son action dans la gestion des conflits en Afrique, en aidant les pays et les peuples de cette région à retrouver la paix et la stabilité. Nous considérons également qu'il est indispensable que l'ensemble des organisations africaines et des parties impliquées assument leur responsabilité.

M. ALEXANDER DOWNER, Ministre des affaires étrangères de l'Australie: les relations de l'Australie avec les pays africains ont toujours reflété notre engagement envers les principes de décolonisation, d'autodétermination et de démocratie, de même qu'un engagement sans faille dans la lutte contre l'apartheid. Les soldats australiens y ont participé à plusieurs opérations de maintien de la paix sous l'égide des Nations Unies et de la communauté internationale. Les exemples les plus récents sont, à cet égard, ceux du Sahara Occidental, de la Somalie et du Rwanda. En ce moment, nous sommes aussi engagés dans les opérations de déminage sur le continent. L'Australie soutient les efforts de paix déployés en Angola et ceux du Comité des sanctions dirigé par l'ambassadeur du Canada, M. Robert Fowler, pour renforcer les mesures d'embargo contre l'UNITA. Nous soutenons et encourageons aussi les initiatives régionales actuelles pour un retour à la paix en République démocratique du Congo et dans le conflit qui oppose l'Ethiopie à l'Erythrée. Ce sont là des exemples concrets d'Africains travaillant ensemble, entre eux, pour trouver des solutions aux problèmes de l'Afrique. L'Australie continuera de soutenir ces efforts régionaux, tout comme elle s'est montrée prête à contribuer à trouver des solutions au niveau de sa propre région d'Asie-Pacifique.

Sur un autre plan, nous sommes conscients de l'importance que l'Afrique attache à la question de la réduction de la dette. Nous sommes pour une assistance substantielle aux pays pauvres très endettés en vue de réduire la pauvreté et de promouvoir le développement durable et la bonne gouvernance. A ce sujet, notre Gouvernement a annoncé, lors de l'ouverture des réunions annuelles de la Banque mondiale et du FMI à Washington, qu'il participerait à hauteur de 35 millions de dollars à l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés. L'Australie a commencé à investir en Afrique, malgré la tendance à la chute des investissements directs vers le continent, et nous estimons nos investissements actuels à environ 2,6 milliards de dollars. C'est donc avec confiance que nous portons notre regard vers l'Afrique à l'aube du nouveau millénaire.

M. BROWN J. MPINGANJIRA, Ministre des affaires étrangères et de la Coopération internationale du Malawi: les voix qui se sont récemment fait entendre lors du Sommet de l'Organisation de l'Unité africaine (OUA) à Alger, témoignent d'un nouvel engagement du continent africain à construire la paix et à installer la prospérité. Comment la communauté internationale peut-elle agir pour répondre aux appels lancés par le continent africain? Comment le Conseil de sécurité peut-il porter assistance à l'Afrique, assumant ainsi pleinement les responsabilités qui sont les siennes en vertu de la Charte des Nations Unies? Telles sont les questions qui continuent d'être posées. La fin de la guerre froide a été marquée par des appels à la construction d'un nouvel ordre mondial. Pourtant, les pays qui disposent de la capacité de venir en aide à l'Afrique avancent l'argument de l'intérêt national ou de la protection des "intérêts vitaux" pour justifier leur inaction. Le fait est qu'aussi longtemps que s'exprimeront de telles positions, les chances de voir se réaliser des changements importants resteront très minces. Aussi devons-nous redéfinir la notion "d'intérêt national". Si difficile soit-elle, une telle tâche est à la portée du Conseil de sécurité. En vertu de la Charte, c'est à lui qu'incombe, en premier lieu, la responsabilité du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Les Nations Unies, et plus particulièrement le Conseil de sécurité, ne devraient pas donner l'image d'institutions indifférentes aux problèmes et crises de l'Afrique. Ils ne peuvent pas se permettre de laisser s'installer une telle idée. Le Conseil de sécurité dispose de la capacité de répondre, de façon résolue, aux crises qui éclatent sur le continent africain. De nombreux pays africains sont prêts à agir. Mon propre pays, par exemple, souhaiterait s'engager davantage dans les opérations de maintien de la paix. Les fonds des Nations Unies et de l'OUA visant à l'amélioration de la prévention des conflits et des opérations de maintien de la paix en Afrique, doivent recevoir des ressources appropriées. Le Conseil de sécurité peut également jouer un rôle important dans la diplomatie préventive. Un message clair et univoque et, en effet, une action précoce face à une crise peuvent faire la différence. Les démocraties africaines resteront fragiles si la communauté internationale ne les aide pas

à surmonter les difficultés économiques et financières. Un des principaux défis auxquels elle doit faire face, consiste à construire une paix durable et à favoriser la croissance économique en Afrique. Les peuples d'Afrique ont effectivement besoin d'une assistance accrue, ciblée sur les personnes. Mme HILDE F. JOHNSON, Ministre pour le développement international et des droits de l'homme de la Norvège: la situation de l'Afrique se caractérise par deux grandes tendances. D'une part on assiste à la reprise de vieux conflits, et de l'autre, on voit de nouveaux conflits éclater dans plus d'une dizaine de pays du continent. Sous cet aspect, la situation de l'Afrique s'est détériorée, et nous nous devons de mettre fin au cercle vicieux de guerre et de sous-développement qui mine trop de nations de ce continent. Cependant, nous assistons aussi en Afrique à un processus de démocratisation qui s'enracine et se traduit par le transfert du pouvoir des militaires vers les civils. Des scrutins électoraux justes et transparents ont été tenus ces dernières années, et l'Afrique a aussi vu la mise en place de politiques économiques plus libérales sur le plan économique. Nous devons soutenir ces avancées. Nous partageons sur ce point l'opinion du Secrétaire général selon laquelle une mobilisation des volontés politiques sera le facteur clef pour parachever les buts recherchés. Les discussions sur la résolution des conflits et le maintien de la paix qui ont eu lieu lors du dernier sommet de l'OUA à Alger sont d'une importance particulière, et le Président Olusegun Obasanjo du Nigéria nous a rappelé lors du débat général de l'Assemblée, que les pays membres de l'OUA avaient décidé de respecter une code de décence et d'éthique et un minimum de normes protocolaires en ce qui concerne l'admission de Chefs d'Etats et de gouvernements. Comme l'a si bien dit M. Thabo Mbeki, "dans tout pays démocratique, les gens ordinaires doivent sentir qu'ils jouissent effectivement du droit de déterminer leur propre destin."

Les initiatives en vue de mettre fin à l'usage et à l'accumulation illégaux des armes légères sur le continent sont cruciales dans les discussions sur la paix et la stabilité en Afrique. De nombreux pays de ce continent ont besoin de soutien pour restructurer leurs organes nationaux de sécurité. Tous les efforts allant dans le sens de la collecte et de la destruction des armes légères auront notre soutien, et le moratoire sur les petites armes adoptés par les pays d'Afrique de l'Ouest est à cet égard fort encourageant. Nous nous joignons à l'appel du Secrétaire général pour une plus grande participation des Etats africains au registre d'armes conventionnelles des Nations unies.

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